Couverture de RISA_751

Article de revue

La transparence financière publique dans les pays membres du MERCOSUR

Pages 185 à 198

1 – Introduction

1Pour que les gouvernements puissent administrer comme il se doit les ressources publiques disponibles, ils doivent être en possession d’informations fiables afin de pouvoir analyser et décider des mesures à prendre pour atteindre les objectifs préalablement établis. Les gouvernements ont par conséquent besoin de systèmes d’informations financières appropriés, sur lesquels la procédure de prise de décisions puisse se fonder. En l’absence de systèmes de ce type, l’efficacité gouvernementale est considérablement réduite, ce qui peut accroître les risques de corruption et, ainsi, réduire la croissance et le développement économique nationaux (Ball, 2000). En conséquence, et comme l’ont fait observer les Nations unies (1999), les états financiers apportent une preuve tangible de bonne comptabilité et améliorent la transparence au sein de l’État.

2Compte tenu de ces considérations, et comme l’indique Points (2001), lorsqu’elle a dû faire face à la crise financière qui a touché l’Asie de l’Est et l’Amérique latine dans les années 1990, la Fédération internationale des comptables (FIC) a commencé à examiner la nécessité d’améliorer la transparence financière publique au travers de la divulgation complète de toutes les informations financière pertinentes de façon ponctuelle et systématique. En conséquence, en 2000, la FIC a commencé à publier une série de normes comptables internationales du secteur public (les normes IPSAS), afin de s’assurer que les rapports financiers publics comprenaient des informations financières d’une qualité suffisante pour faciliter la prise de décisions par différents utilisateurs.

3Selon l’OMS (2007), les normes IPSAS constituent une série de recommandations de qualité en matière de comptabilité et de publication des rapports financiers par le secteur public, selon lesquelles la comptabilité doit être basée sur des « valeurs totales non distribuées ». L’adoption de ces normes par les gouvernements améliorerait à la fois la qualité et la comparabilité des informations financières présentées par les organismes du secteur public dans le monde.

4Dans ce contexte, beaucoup de pays d’Amérique latine qui étaient mécontents de la qualité des informations financières à la disposition des utilisateurs ont opéré d’importantes réformes dans leurs systèmes d’informations financières (Asselin, 1995). Beaucoup de ces pays semblent cependant toujours mécontents et estiment que de nouvelles améliorations s’imposent sur le plan de la qualité de l’information financière. Cette observation a été confirmée avec la signature, en 2001, du projet « Transparency in Public Accounts » (transparence dans les comptes publics) (TC013013), qui faisait intervenir la Banque interaméricaine de développement et l’Association interaméricaine de comptabilité. Ce projet en est arrivé à la conclusion que l’adoption des normes IPSAS était nécessaire pour améliorer la qualité des informations financières alors accessibles aux utilisateurs.

5En Amérique latine, comme dans le reste du monde, l’interdépendance et la mondialisation sont de plus en plus marquées sur les marchés, et les pays situés le plus au Sud de l’Amérique latine ont atteint un degré considérable d’intégration économique régionale dans le cadre de l’accord infrarégional intergouvernemental appelé MERCOSUR (Marché commun du cône sud), signé en 1991 (Kalternthaler et Mora, 2002). Depuis sa création, le MERCOSUR, qui se compose de l’Argentine, du Brésil, du Paraguay et de l’Uruguay, encourage la paix et la stabilité, suscite un dialogue politique de haut niveau et renforce la coopération interne et internationale.

6Reste que la Commission européenne (2007) a observé que le MERCOSUR est encore confronté à trois défis considérables : a) améliorer ses processus de prise de décisions et sa capacité à mettre en œuvre et à appliquer une législation commune ; b) parvenir à un marché véritablement commun ; c) sensibiliser davantage ses sociétés civiles au projet d’intégration régionale et renforcer leur participation dans celui-ci. Par ailleurs, et comme indiqué dans le Document de stratégie régionale MERCOSUR 2007-2013 (CE, 2007), la démocratie électronique et la transparence, de même que l’imputabilité des institutions du MERCOSUR, ne sont pas encore suffisantes. Dans la même veine, l’article 3, point 2 du protocole constitutif du Parlement du MERCOSUR, adopté en décembre 2005, recommande « la transparence des informations et des décisions pour renforcer la confiance et faciliter la participation des citoyens ».

7Dans ce contexte, l’application des normes IPSAS par les pays du MERCOSUR pourrait leur permettre de moderniser leurs systèmes comptables publics et d’assurer la comparabilité des informations financières offertes. Cela faciliterait par ailleurs la préparation et la comparabilité des comptes nationaux, ce qui permettrait d’obtenir des statistiques sur l’administration publique des comptes nationaux sur la base d’informations financières publiques (Lüder, 1988). Cela faciliterait en outre l’externalisation de l’activité financière, étant donné qu’un certain niveau de standardisation des informations financières publiques s’imposerait dans le cadre de l’obtention de fonds sur les marchés internationaux (Brusca et Benito, 2004).

8Compte tenu de ce qui précède, de l’importance déterminante des rapports financiers dans l’amélioration de la transparence financière et de l’imputabilité des gouvernements, ainsi que de l’importance de la comparabilité documentaire entre les pays où une intégration infrarégionale a été opérée, la présente communication a pour objet de comparer le niveau de divulgation de l’information financière contenue dans les rapports publics de fin d’année des pays membres du MERCOSUR avec le niveau recommandé par les normes IPSAS de la FIC.

9Notre article est structuré comme suit : premièrement, nous passons en revue les principales réformes en matière de transparence financière publique mises en œuvre dans les pays du MERCOSUR au cours des dernières décennies. Ensuite, nous analysons l’importance des informations contenues dans les rapports financiers. Troisièmement, nous décrivons les recommandations de la FIC visant à améliorer les rapports financiers publics annuels. Nous présentons les résultats empiriques de notre étude dans la cinquième partie. Pour terminer, nous présentons les principales conclusions de notre étude et les implications potentielles.

2 – Les réformes dans le domaine de la transparence financière publique dans les pays du MERCOSUR au cours des récentes décennies

10Avant d’analyser les réformes financières opérées par les gouvernements dans les pays du MERCOSUR, il convient d’évoquer brièvement la situation politico-économique dans laquelle les réformes ont été mises en œuvre dans ces pays à la structure politique-administrative variable (le Brésil et l’Argentine sont des États fédéraux, tandis que l’Uruguay et le Paraguay sont des États unitaires).

11En conséquence, d’une part, on ne peut analyser les réformes sans tenir compte du fait que tous ces pays ont, à différentes périodes, fait l’objet d’une dictature militaire. Cela a été le cas en Argentine entre 1976 et 1983, avec des gouvernements formés par des Juntes militaires successives. Dans le même ordre d’idées, pendant 35 ans (1954-1989), le Paraguay a été gouverné par un dictateur, le General Alfredo Stroessner. L’Uruguay, pour sa part, a été soumis à une dictature militaire de 1973 à 1985. Enfin, le coup d’État organisé en 1964 par l’armée contre le Président João Goulart a conduit le Brésil à une dictature brutale et répressive jusqu’en 1985.

12En outre, dans les pays du MERCOSUR, tout comme dans beaucoup de pays d’Amérique latine, il a toujours été normal d’appliquer des mesures économiques populistes, c’est-à-dire des mesures visant à augmenter la popularité du gouvernement en place même si elles provoquent de graves déséquilibres macroéconomiques. Ce fut notamment le cas en Argentine entre 1945 et 1955 (sous le gouvernement péroniste), et au Brésil, entre 1930 et 1954. Si l’on ajoute à cela le fait que le clientélisme politique et la corruption sont encore très présents dans ces pays (Maiz, 2003), il faut admettre que les obstacles au développement et à l’efficacité des réformes financières dans les administrations publiques sont nombreux.

13Quoi qu’il en soit, les pays d’Amérique latine ont pris de nombreuses initiatives au vingtième siècle dans le but de moderniser les administrations publiques. Parmi ces actions, certaines étaient axées sur la modernisation de la gestion financière publique. Pour déterminer les caractéristiques les plus importantes des réformes de l’information financière mises en œuvre dans les pays du MERCOSUR, examinons les événements survenus depuis le vingtième siècle jusqu’à aujourd’hui.

14Jusqu’à la fin des années 1930, il s’est passé peu de choses dans les pays du MERCOSUR en ce qui concerne les réformes dans le domaine de la transparence financière publique. Vers le milieu des années 1940, certains pays du MERCOSUR, comme l’Argentine et le Paraguay, ont adopté des règles comptables qui abordaient pour la première fois, à côté des données budgétaires, des informations d’une nature financière. Il s’agissait de la loi comptable 12.961 en Argentine et de la loi organique des finances 17.101 au Paraguay. Parallèlement à cela, en Uruguay, des études ont été menées, en collaboration avec des universités, qui portaient sur la création d’organes de réglementation similaires. Ces règles, qui imposaient de nouvelles pratiques de transparence dans l’information financière publique, n’ont cependant pas atteint les résultats attendus. Au Brésil, l’approbation en 1940 du décret de loi n° 2416 a suscité des innovations considérables dans les comptes publics produits par les États et les autorités locales.

15L’Argentine a pris un tournant décisif vers le milieu des années 1950. Après plusieurs années d’application des nouvelles règles sur la transparence de l’information financière publique (loi n° 12.961), il s’est avéré nécessaire de les réformer afin de corriger les erreurs révélées par l’expérience pratique.

16Après l’Argentine, les autres États membres du MERCOSUR ont élaboré et approuvé de nouvelles lignes directrices visant à améliorer la transparence de l’information publique. En 1964, le Brésil a adopté la loi n° 4.320 établissant les règles générales de gestion financière pour la création et le contrôle des budgets et des bilans au sein de l’Union, des États municipaux et du district fédéral ; cette loi est toujours en vigueur. Après cette mesure prise par le Brésil, la loi n° 1250 et le décret n° 104 (avec des effets similaires) ont été adoptés au Paraguay et en Uruguay, respectivement.

17D’autres règles dans ce domaine ont été mises en place dans les années 1980, mais aucune n’a débouché sur une amélioration significative de la transparence des informations financières publiques : d’une part, les structures administratives n’étaient pas suffisamment préparées à absorber des informations semblables à celles définies dans ces règles, et d’autre part, l’instabilité politique était considérable à cette époque.

18Au début des années 1990, l’ensemble ou presque de la région du MERCOSUR commence à adopter, dans une mesure plus ou moins large en fonction de la situation de chaque pays, des réformes visant à moderniser l’administration publique afin d’améliorer l’efficacité, l’efficience et la transparence de l’information financière publique. Ces réformes sont encouragées par l’Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID) dans le cadre du projet de gestion financière régionale en Amérique latine (RFMIP I), qui crée un projet régional visant à améliorer les systèmes de gestion financière en Amérique latine et dans les Caraïbes, appelé IFMS ou SIMAFAL (Dannin, 2000).

19Ainsi, dans le cadre du SIMAFAL, l’Argentine adopte une loi (n° 24.156/92) sur l’administration financière et un système de contrôle pour le secteur public national (LAFC) ; cette loi vise à obtenir une vue d’ensemble de la réalité économique-financière développée par les organes nationaux. Dans le cadre du même projet, la loi n° 1.535/99 sur l’administration financière nationale est adoptée au Paraguay, qui stipule qu’un rapport doit être publié « qui synthétise les bilans qui décrivent la situation financière, économique et budgétaire globale des organes et agences nationaux, pour chaque exercice clôturé et finalisé, et qui comprenne une comparaison entre les rubriques inscrites au budget et celles effectivement exécutées ». En Uruguay, les changements opérés ne sont pas aussi ambitieux que dans les deux cas mentionnés plus haut, puisque ce que l’on a fait en réalité, c’est réorganiser le système d’administration financière (au titre de la loi n° 16736/96 – TOCAF) et le structurer dans le cadre du système d’information financière intégrée (SIIF) approuvé en 1997.

20Pour terminer, notons que le Brésil n’a pas suivi l’exemple du SIMAFAL et qu’au titre de la loi n° 4.320, adoptée dans les années 1960 et qui est toujours en vigueur, les pratiques comptables doivent permettre non seulement de contrôler la bonne gestion budgétaire, mais aussi divulguer la composition financière du budget et, ainsi, le nouveau système d’information financière intégré (SIAFI) est approuvé en 1986.

3 – Les avantages des informations financières présentées conformément aux recommandations de la FIC

21Comme l’indiquent Dorotinsky et Matsuda (2002), les informations financières sont essentielles dans la prise de décisions : elles apportent les connaissances nécessaires afin que des décisions appropriées puissent être prises pour atteindre les objectifs institutionnels. Les Nations unies (1999) indiquent que les états financiers apportent la preuve tangible de la bonne responsabilisation et améliorent la transparence au sein de l’État. En réalité, l’amélioration des rapports financiers peut renforcer la crédibilité et l’intégrité des finances publiques et contribuer à une gestion plus efficace des ressources publiques (Santiso, 2004).

22Dans ce contexte, les rapports financiers sont plus ou moins utiles dans la prise de décisions en fonction des informations qu’ils contiennent. Par ailleurs, l’inclusion ou non de certains types d’informations financières peut limiter considérablement les avantages produits par ces documents (Tableau 1).

Tableau 1

Avantages des informations produites dans le rapport financier

Tableau 1
Objectif de l’inclusion dans le rapport financier Type d’état financier Avantages Démontrer le respect de la réglementation et du budget au cours de la période de référence Rapport simple de suivi budgétaire Limités : un compte rendu des dépenses par rapport au budget pour les analyses futures et en tant que base de prévisions. L’utilisation d’états supplémentaires détaillés peut cependant renforcer son utilité. Évaluer la situation financière d’une administration publique et les évolutions dans cette situation durant la période de référence Comme ci-dessus, mais avec une comptabilité d’exercice modifiée basée sur un bilan simple, faisant état de l’actif et du passif financiers courants Considérables : offre un moyen de contrôler l’actif et le passif, qui constituent souvent un problème comptable majeur. Améliore aussi la fiabilité du système comptable en le « verrouillant ». Représenter l’ensemble des ressources que les gouvernements contrôlent, et l’évolution de ces ressources durant la période de référence Comme ci-dessus, mais basé sur une comptabilité d’exercice intégrale, incluant les actifs capitalisés et les amortissements Les avis divergent en ce qui concerne l’intérêt des informations supplémentaires. Apporte effectivement des informations sur l’actif total utilisé et permet de répartir les coûts de façon plus équitable. Cependant, il n’est pas certain que les amortissements ou les autres systèmes d’imputation du capital rendent compte du coût réel de l’actif consommé. Produire suffisamment d’informations pour présenter les coûts de la prestation de services ou les résultats de la gestion des ressources Comme (2) ou (3) ci-dessus, mais avec des états supplémentaires reliant les indicateurs de rendement financier et les autres Considérables : commence, pour la première fois, à produire une mesure des résultats liée aux intrants financiers au sein de l’État. Cependant, l’intérêt dépend de la capacité à définir des indicateurs non financiers intéressants, ainsi que de la fiabilité des informations de contrôle. Source : Basé sur les Nations unies (1999).

Avantages des informations produites dans le rapport financier

23Il est cependant extrêmement difficile de se mettre d’accord au sein du secteur public sur un langage financier commun à utiliser par tous les pays (Asselin, 2000) pour différentes raisons. Parmi celles-ci, il y a le fait que même si des organisations internationales telles que les Nations unies (1999) ou l’OCDE (2001) ont formulé des recommandations sur les informations financières à inclure dans un modèle de rapport exhaustif, il y avait un manque de précision au niveau international quant aux rapports financiers à inclure dans tous les rapports publics et au contenu de ces rapports financiers. Les différents pays devaient par conséquent décider par eux-mêmes des informations à inclure dans leurs rapports financiers et du contenu des rapports produits.

24Selon la Fédération internationale des comptables (FIC) et l’OCDE (2003), l’adoption de règles internationales en matière de comptes publics, associée à la démonstration du respect de ces règles, susciterait des améliorations significatives dans la qualité des rapports financiers généraux produits par les organismes du secteur public. Il est très probable que cela permettrait d’améliorer la qualité des informations pour la prise de décisions par l’État en matière d’allocation des ressources, et que cela améliorerait la transparence et susciterait un degré de responsabilité plus élevé pour les engagements et les résultats des actions mises en œuvre.

25La FIC, avec les normes IPSAS, encourage les gouvernements à présenter d’autres informations à côté de celles généralement produites sur la base du budget afin d’améliorer la transparence financière. Ces informations supplémentaires portent sur la situation financière, le rendement et le flux de trésorerie des entités, des informations qui sont utiles pour toute une série d’utilisateurs amenés à prendre des décisions en matière d’allocation des ressources.

26Les normes IPSAS ayant été produites de manière indépendante, avec la participation de gouvernements du monde entier, d’organismes comptables professionnels et d’organisations internationales comme la Banque mondiale, l’OCDE et le FMI, il y a peu de chances qu’un pays refuse d’appliquer ces règles comptables publiques, même s’il s’agit de règles qui n’ont pas été créées dans un pays ou une agence donnés (Brusca et Benito, 2004).

27Parmi les questions relatives aux normes IPSAS abordées par la FIC, on trouve des propositions visant à améliorer le contenu des informations financières intégrées dans le rapport de fin d’année, afin que celui-ci puisse mieux rendre compte de la situation financière et de l’actif des organismes qui constituent le secteur public national.

28En ce qui concerne les informations contenues dans le rapport mentionné ci-dessus, la FIC a formulé des recommandations, dans ses normes IPSAS 1 et 2, concernant la structure et le contenu des bilans produits et présentés par les organes du secteur public. Ces recommandations visaient à assurer la comparabilité avec d’une part les bilans publiés par un même organisme au cours de périodes antérieures et, d’autre part, avec ceux publiés par d’autres entités.

29D’après les normes IPSAS 1 et 2 de la FIC, pour que les états financiers soient complets, ils doivent comprendre les états suivants: a) un état de la situation financière – un bilan ou un état de l’actif et du passif ; b) un état du rendement financier ; c) un état de l’évolution de l’actif net/des fonds propres ; d) un état des flux de trésorerie ; et e) les politiques comptables ainsi que les remarques relatives aux états financiers. Ces états financiers doivent par ailleurs au minimum comprendre les différentes rubriques mentionnées dans le Tableau 2.

4 – Changements à opérer dans les rapports financiers publics dans le MERCOSUR afin d’améliorer la transparence des informations, conformément aux recommandations de la FIC

Méthodologie

30Un indice a été créé afin d’analyser la transparence des informations des gouvernements centraux dans les pays du MERCOSUR. Cet indice compare les exigences minimales en matière d’information à produire dans le rapport public financier annuel, conformément aux recommandations de la FIC, avec les informations effectivement produites dans les rapports financiers publics annuels des pays étudiés. Dans le choix des composantes de cet indice, nous avons tenu compte des références 1 et 2 des normes IPSAS. Cet indice de cohérence contient deux niveaux :

  1. Niveau un : distingue les pays sur le plan des rapports financiers devant être présentés par l’organe compétent, indépendamment de leur contenu. Le premier niveau établit la distinction entre 5 items, qui correspondent à chacun des états financiers présentés précédemment.
  2. Niveau deux : se concentre sur le contenu devant être publié dans chacun des rapports financiers présentés, avec les informations à inclure présentées sur des lignes distinctes. Pour ce second niveau, 76 items ont été sélectionnés, répartis comme indiqué dans le tableau 2.
Le nombre total d’exigences minimales fixées par les normes IPSAS en matière de divulgation des informations financières publiques produites par les comptes publics annuels pour un pays donné (TRIPSAS) s’obtient en ajoutant le score de chaque item recommandé par les normes IPSAS (ripsas) mentionné dans le tableau 1. Parmi les possibilités présentées pour la notation de ces items, nous avons opté pour une procédure dichotomique, dans le cadre de laquelle un point est attribué lorsque les rapports publics du pays comprennent les informations correspondant aux items recommandés par les normes IPSAS et 0 point, dans le cas contraire.

31Une fois tous les items notés, nous avons créé un indice afin de mesurer le niveau de conformité avec les exigences minimales en matière d’informations à produire dans les comptes publics annuels, conformément aux recommandations des normes IPSAS (TC). Par conséquent, si l’on considère que m est le nombre maximum d’items pouvant coïncider, (c.-à-d. 5 pour le 1er niveau et 76 pour le second), l’indice (TC) est défini en divisant l’indice TRIPSAS par le nombre maximum d’items pouvant coïncider (m). Nous avons défini des indices partiels pour chacun des rapports suivants : TCb pour le bilan ; TCp pour le rapport de suivi budgétaire ; TCc pour le flux de trésorerie ; TCn pour l’état des évolutions dans l’actif net ; TCs pour les remarques relatives aux états financiers.

Tableau 2
Tableau 2
ITEMS % 1. Items liés au bilan : 1.1. Immobilisations corporelles non financières ; 1.2. Immobilisations corporelles ; 1.3. Actifs incorporels ; 1.4. Investissements ; 1.5. Actif financier à court et à long terme présentés séparément ; 1.6. Comptes débiteurs ; 1.7. Comptes débiteurs à court et à long terme présentés séparément ; 1.8. Liquidités ; 1.9. Charges payées d’avance ; 1.10. Comptes créditeurs ; 1.11. Comptes créditeurs à court et à long terme présentés séparément ; 1.12. Emprunts ; 1.13. Emprunts à court et à long terme présentés séparément ; 1.14. Part actuelle des emprunts présentés séparément ; 1.15. Provisions ; 1.16. Actif net/capitaux propres ; 1.17. Actif et passif à court et à long terme en tant que classification distincte ou par ordre de liquidité. 17 22,3 % 2. Items liés au rapport de suivi budgétaire : 2.1. Recettes des activités d’exploitation ; 2.2. Excédent ou déficit des activités d’exploitation ; 2.3. Coûts de financement ; 2.4. Excédent ou déficit des activités ordinaires ; 2.5. Items extraordinaires ; 2.6. Excédent ou déficit nets pour la période ; 2.7. Les dépenses sont regroupées en fonction de leur nature, du programme ou de leur objet. 7 9,2 % 3. Items liés aux liquidités : 3.1. Utilisation nette des paiements au comptant découlant des activités d’exploitation présentée séparément ; 3.2. Principales classes d’encaissements bruts et de recettes découlant des activités d’exploitation présentées séparément ; 3.3. Utilisation de paiements au comptant nets découlant d’activités d’investissement présentée séparément ; 3.4. Principales classes d’encaissements bruts et de recettes découlant d’activités d’investissement présentées séparément ; 3.5. Utilisation nette de paiements au comptant découlant d’activités de financement présentée séparément ; 3.6. Principales classes d’encaissements bruts et de recettes découlant d’activités de financement présentées séparément ; 3.7. Flux de trésorerie associés à des items extraordinaires présentés séparément ; 3.8. Flux de trésorerie associés à des intérêts perçus ou versés dans le cadre d’activités d’exploitation, d’investissement ou de financement présentés séparément ; 3.9. Rapprochement des montants dans l’état des flux de trésorerie avec les items équivalents présentés dans l’état de la situation financière présenté. 9 11,8 % 4. Évolution dans l’actif net : 4.1. Excédent ou déficit nets pour la période ; 4.2. Chaque item de recette et de dépense, constaté directement dans l’actif net/les capitaux propres, et total de ces items ; 4.3. Contributions des propriétaires et distribution aux propriétaires, en leur qualité de propriétaires ; 4.4. Effet cumulatif des évolutions dans la politique comptable et la correction des erreurs fondamentales ; 4.5. Le solde des excédents ou déficits accumulés au début de la période et à la date de référence, et mouvements pour la période ; 4.6. Un rapprochement entre le montant d’acquisition de chaque composante de l’actif net/des capitaux propres au début et à la fin de la période. 6 5,2 % 5. Remarques relatives aux états financiers 37 48,6 % 5.1. Informations complémentaires sur le bilan. 16 5.2. Informations complémentaires sur le compte de résultat. 2 5.3. Informations complémentaires sur le bilan financier général. 19 TOTAL 76 100 % Source : production propre

Résultats

32Comme indiqué dans la partie 2, du point de vue juridique, tous les pays du MERCOSUR estiment nécessaire depuis quelques années de publier, à côté des informations d’une nature budgétaire, des informations financières. Afin d’analyser ce qui se passe dans la pratique, comparons les informations financières produites dans le rapport financier de fin d’année 2006 publié par chacun des pays membres du MERCOSUR avec les recommandations formulées par la FIC, mentionnées dans la partie précédente.

33Les résultats de notre analyse révèlent que ces rapports financiers de fin d’année dans les pays du MERCOSUR ne comprennent pas toutes les informations proposées dans les normes IPSAS n° 1 (voir tableau 3) ; en effet, l’Uruguay ne produit aucun des bilans proposés.

Tableau 3

Degré de conformité de premier niveau avec les normes IPSAS proposées par la FIC

Tableau 3
Argentine Brésil Paraguay Uruguay Bilan 1 1 1 0 État du rendement financier/résultat d’exploitation 1 0 1 0 État de l’évolution dans l’actif net/les capitaux propres 1 0 0 0 État des flux de trésorerie 0 1 1 0 Pratiques comptables et remarques relatives à l’état financier 1 0 0 0 Degré de conformité de premier niveau 4/5=80% 2/5=40% 3/5=60% 0/5=0% Source : production propre

Degré de conformité de premier niveau avec les normes IPSAS proposées par la FIC

34On constate que l’Argentine présente le niveau de concordance de premier niveau le plus élevé entre le contenu de son rapport financier de fin d’année et les recommandations des normes IPSAS n° 1. L’élément avec lequel le plus grand nombre de pays du MERCOSUR parviennent à cette concordance est le bilan. Les documents considérés comme les moins nécessaires sont l’état de l’évolution dans l’actif net et les informations sur les pratiques comptables utilisées et les remarques relatives aux états financiers.

35Compte tenu de ces observations, nous avons analysé le degré de concordance de second niveau (tableau 4), en tenant compte du fait que certaines des données mentionnées dans le premier niveau n’étaient en réalité pas produites.

Tableau 4

Degré de conformité de second niveau avec les normes IPSAS proposées par la FIC

Tableau 4
ARGENTINE SILBRÉ PARAGUAY URUGUAY SCOR TCX SCOR TCX SCOR TCX SCOR TCX • Conformité avec les items à présenter au recto du bilan (mb= 17) 15 88.3% 8 47% 11 64.7% • Conformité avec les items à présenter au recto de l’état du rendement financier (mp=7) 4 57.14% 4 57.14% • Conformité avec les items à présenter au recto de l’état du flux de trésorerie (mc=9) 1 11.1% 5 55.5% • ? Conformité avec les items à présenter au recto de l’évolution de l’actif net/des capitaux propres (mn=6) 4 66.6% • ? Conformité avec les informations présentées dans les parties principales ou dans les remarques relatives aux états financiers (ms=37) 18 48.6% 6 16.2% 12 32.4% A. Informations supplémentaires concernant les items inclus dans le bilan 8 6 10 B. Informations supplémentaires concernant les items inclus dans l’état de rendement financier 2 2 C. Informations accompagnant l’état financier en général 7 Conformité de second niveau total (m=76) 53.9% 21% 42.1% Source : production propre

Degré de conformité de second niveau avec les normes IPSAS proposées par la FIC

36Si l’on commence par une analyse des éléments recommandés pour la partie principale du bilan, et en tant compte du fait que l’Uruguay ne publie pas ce rapport, on observe que tous les pays, à l’exception du Brésil, produisent normalement plus de 50 % de ces éléments. Le cas de l’Argentine mérite d’être souligné, puisque son bilan présente plus de 88 % des éléments recommandés par les normes IPSAS n° 1 pour la partie principale de ce rapport.

37En outre, lorsqu’on examine, à côté des éléments présentés dans la partie principale du bilan, ceux produits au recto du document ou dans les remarques annexées, on constate que le Brésil ne présente à nouveau pas 50 % des éléments recommandés pour cette partie, tandis que les pays qui le font (l’Argentine et le Paraguay), ne dépassent pas le taux de conformité de 70 %. Notre analyse des bilans fait en effet apparaître l’importance insuffisante accordée à la nécessité de produire des informations sur des actifs comme l’infrastructure, sur le passif, comme les allocations de retraite, et sur l’avoir net, comme les actifs détenus dans d’autres organismes publics.

38En ce qui concerne les items présentés dans l’état du rendement financier, il nous faut travailler sur la base de la situation observée au premier niveau, ce document n’étant produit qu’en Argentine et au Paraguay. Aucun de ces pays n’a estimé nécessaire d’inclure des éléments faisant apparaître de façon claire le déficit ou l’excédent produits, que ce soit par les activités d’exploitation ou en tant qu’items ordinaires et extraordinaires. On constate en outre qu’aucun de ces pays n’a regroupé les coûts selon les fonctions ; ils se sont contentés de les présenter en fonction de la nature des dépenses. En conséquence, le degré de conformité présenté par le document en question est le même dans les deux pays (66,6 %), lorsque l’on tient compte à la fois des items présentés dans la partie principale du document et de ceux mentionnés dans les remarques.

39S’agissant de l’état des flux de trésorerie, qui n’est produit ni par l’Argentine, ni par l’Uruguay, il est important d’observer avant toute chose les différences considérables dans les items présentés pour cet état dans les rapports financiers de fin d’année du Brésil et du Paraguay. En effet, le seul élément pour lequel ils semblent coïncider est celui de la non présentation, de façon différentiée, des flux de trésorerie associés aux activités extraordinaires, ou de ceux associés aux paiements d’intérêts perçus ou versés, qu’ils se rapportent à des activités ordinaires ou à des activités telles que des investissements ou des financements. Il faut aussi souligner le fait que, contrairement au Paraguay, le Brésil ne présente pas 50 % des informations mentionnées dans les normes IPSAS n° 2.

40En ce qui concerne les items présentés dans le rapport sur les évolutions dans l’actif net, une information qui n’est produite que par l’Argentine, on constate qu’ils correspondent à raison de 66,6 % au format recommandé par les normes IPSAS n° 1.

41Pour terminer, examinons les remarques jointes aux bilans, et plus particulièrement les informations qui ne constituent pas une sous-classification des items sur le bilan ou dans l’état du rendement financier. Ce document, qui n’est présenté que par l’Argentine, correspond à raison de 35 % aux exigences minimales recommandées dans les normes IPSAS. Cependant, le rapport de fin d’année publié par l’Argentine ne produit aucune information sur la base comptable et sur la politique utilisée pour constater les recettes perçues.

42En somme, seule l’Argentine produit 50 % des informations à présenter conformément aux normes IPSAS n° 1 et 2. Les autres pays du MERCOSUR n’atteignent même pas ce niveau, même si le Paraguay s’en rapproche.

5 – Conclusions

43Depuis quelques dizaines d’années, les pays du MERCOSUR revoient, dans une mesure plus ou moins large, leurs systèmes d’informations financières publiques dans le but d’améliorer la prise de décisions. La présente étude a pour objet de comparer les informations financières publiques actuellement produites par les pays membres du MERCOSUR dans leurs rapports publics de fin d’année avec les recommandations formulées par la FIC dans le cadre des normes comptables internationales du secteur public (IPSAS), afin de déterminer si des mesures s’imposent pour améliorer la transparence, la cohérence et la comparabilité des états financiers au fil du temps et entre différents gouvernements du MERCOSUR.

44Notre comparaison transnationale fait apparaître trois résultats principaux. Premièrement, pour adapter les modèles comptables publics des pays du MERCOSUR au format recommandé par les normes IPSAS en matière d’informations financières, des changements importants s’imposent, qui concernent non seulement les bilans à publier, mais aussi leur contenu. Deuxièmement, en ce qui concerne les bilans à présenter, tout le monde est relativement d’accord pour reconnaître la nécessité de produire un document qui mentionne l’actif et le passif, même si des divergences considérables existent en ce qui concerne la question de savoir si ces informations doivent être présentées dans la partie principale de ce rapport ou dans les remarques annexées. Troisièmement, aucun des rapports recommandés par les normes IPSAS n’a été totalement intégré dans les rapports financiers publics annuels publiés par les pays du MERCOSUR.

45Les résultats obtenus nous amènent à penser que la qualité des rapports financiers publics annuels des pays membres du MERCOSUR analysés n’est pas conforme aux normes IPSAS en matière de divulgation de l’information et que des changements importants doivent être opérés, qui concernent non seulement les états produits, mais aussi leur contenu.

46En dépit de ce qui précède, étant donné, d’une part, que ces normes sont préconisées par des organisations internationales de développement telles que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, qui ont une grande influence dans la région du MERCOSUR, et, d’autre part, que de plus en plus d’organisations et de gouvernements adoptent les normes IPSAS pour leurs rapports financiers, il ne serait pas étonnant qu’à relativement court terme, les pays envisagent sérieusement, dans ce contexte, d’adapter leurs pratiques d’établissement de rapports financiers à ces normes.

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Mots-clés éditeurs : informations financières, IPSAS, comptes publics, comptabilité publique, rapports financiers, Amérique latine

Mise en ligne 01/11/2010

https://doi.org/10.3917/risa.751.0185

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