Résumé
Se suicider au travail a émergé sur la scène médiatique ces dix dernières années. En corollaire, se sont engouffrés de nombreux leaders d’opinion de toute sorte qui selon leurs intérêts ou leurs idéologies ont livré leurs interprétations obligeant à une compréhension partisane de la situation. Pour se dégager de cette contrainte, cette réflexion vise à éclairer les interstices entre le suicide et le management, d’en expliciter les liens et les dépendances au travers de différents outils et concepts psychanalytiques. La conjonction de la métapsychologie de la dépression associée à la topique narcissique semble être opérante pour expliquer le passage à l’acte suicidaire. Ainsi, il apparaît que le suicide au travail n’est pas l’aboutissement d’un stress insupportable ou l’issue dramatique de contraintes instituées par un nouveau capitalisme. Au-delà des concepts analytiques usités, ceux-ci sont nourris par les événements dramatiques qui se sont déroulés au sein de Renault et de France Télécom avec en filigrane la tentative de répondre à la question : pourquoi là et non pas dans une autre entreprise ? A l’heure de la société libérée et individualiste de masse où chacun est laissé libre de donner le sens qu’il entend à sa vie, lorsque le sens s’échappe au travail, il est parfois difficile de ne pas s’échapper avec lui.
Mots-clés
- suicide au travail
- psychanalyse
- stress
- management
- narcissisme
Mots-clés
- workplace suicide
- suicide
- psychoanalyses
- stress
- management
- narcissism
The management of meaning to the test
The management of meaning to the test
Only over the past ten years has committing suicide in one’s workplace made the headlines. As a consequence of such a tragic trend, various public figures of all stripes have voiced their opinion about it and attempted to interpret it either out of self-interest or by mere ideological stances, which has led to a very biased understanding of the scope of the situation. With a view to shaking ourselves free of prejudices, this study aims at throwing light on the gap between suicide and corporate management by explaining their links and dependencies through various analytical tools and concepts. The metapsychology of nervous breakdowns together with a narcissistic inclination can account for committing suicide. Thus, committing suicide in one’s workplace does not turn out to be the result of unbearable and heavy stress nor is it the tragic outcome of capitalism-bred constraints. Beyond the commonly-used analytical concepts, they are often fostered by tragic events such as those that happened in major companies like Renault or France Télécom while attempting to find out why those acts of despair took place in those very companies and not in others? In our liberal society and age of mass individualism in which every man and woman is free to provide some meaning to their life and in which work is devoid of meaning, it is sometimes difficult not to find a way of getting away from it.