Couverture de RIEJ_066

Article de revue

La nouvelle nomenclature des actes dans le Traité de Lisbonne

Pages 85 à 108

Notes

  • [1]
    Cet article fait suite à une intervention dans le cadre du séminaire sur « Les sources du droit revisitées » organisé par le SIEJ (Facultés universitaires Saint-Louis à Bruxelles) le 5 novembre 2010. L’auteur remercie très sincèrement les organisateurs du séminaire pour leur invitation et pour l’ensemble de leurs remarques.
  • [2]
    Sur les différents sens du mot source, cf. notamment Ph. Jestaz, « Source délicieuse… (Remarques en cascades sur les sources du droit) », in RTD civ., 1993, pp. 73-85. Voir également I. Hachez, « Balises conceptuelles autour des notions de “source du droit”, “force normative” et “soft law” », in R.I.E.J., n° 65, 2010, pp. 1-65.
  • [3]
    Ainsi selon C. Blumann et L. Dubouis : « les traités constitutifs de l’Union, comme jadis les traités constitutifs des Communautés européennes, ne proposent aucune typologie des sources de droit », in Droit institutionnel de l’Union européenne, Paris, Litec, 2010 (4e édition), p. 253. On pourrait en effet se demander si tous les actes mentionnés dans l’article 288 TFUE constituent des sources du droit de l’Union. La question se pose, notamment, à l’égard des recommandations et des avis qui « ne lient pas ».
  • [4]
    P. Deumier et Th. Revet, « Sources du droit », in S. Rials, Dictionnaire de culture juridique, Paris, P.U.F., 2003, p. 1431.
  • [5]
    Cf. par exemple en ce sens : J. Rideau, Droit institutionnel de l’Union et des Communautés européennes, Paris, LGDJ, 2006 (5e édition).
  • [6]
    J. Roux, Droit général de l’Union européenne, Paris, Litec, 2006. En toute hypothèse, cette assimilation ne concerne que les cas dans lesquels la Cour de justice interprète les traités ou dégage des principes généraux du droit.
  • [7]
    J.-S. Berge et S. Robin-Olivier, Introduction au droit européen, Paris, P.U.F., 2008.
  • [8]
    Les sources internes sont celles qui sont élaborées dans l’enceinte de l’Union, tandis que les sources externes font intervenir des États tiers ou d’autres organisations internationales. Ibidem, p. 38.
  • [9]
    Droit institutionnel de l’Union européenne, op. cit., p. 524.
  • [10]
    CJCE, 10 février 1983, Luxembourg contre Parlement, aff.230/81, Rec. pp. I-255 et ss., point 44 : « il convient toutefois d’observer que cette pratique [consistant à tenir une partie des séances plénières à Luxembourg] avait été décidée par le Parlement de sa propre initiative, et qu’elle n’avait été approuvée ni expressément ni implicitement par les États membres. Au contraire, le gouvernement français a contesté, à plusieurs reprises, la compatibilité de cette pratique avec les décisions des États membres et a demandé qu’elle soit modifiée. C’est donc à tort que le gouvernement luxembourgeois fait valoir qu’une coutume aurait été créée en sa faveur par cette pratique ».
  • [11]
    Ainsi, « on ne saurait refuser à un justiciable, lorsqu’il se prévaut en justice des droits qu’il tire directement d’un accord avec un pays tiers, la faculté de mettre en cause la validité d’un règlement qui, en suspendant les concessions commerciales octroyées par cet accord, l’empêche de s’en prévaloir, et d’invoquer, pour en contester la validité, les obligations découlant des règles du droit coutumier international qui régissent la cessation et la suspension des relations conventionnelles ». CJCE, 16 juin 1998, Racke, aff. C-162/96, Rec. pp. I-3665 et ss.
  • [12]
    Il en va ainsi, notamment, du principe réciprocité. Cf. CJCE, 26 févr. 1976, Commission contre Italie, aff. 52/75, Rec. 1976, p. 277, point 11 : « en effet, le traité ne s’est pas borné à créer des obligations réciproques entre les différents sujets auxquels il s’applique, mais a établi un ordre juridique nouveau qui règle les pouvoirs, droits et obligations desdits sujets, ainsi que les procédures nécessaires pour faire constater et sanctionner toute violation ».
  • [13]
    Sur la notion de règle de reconnaissance et de règle secondaire, cf. Ph. Gerard, « L’idée de règle de reconnaissance : valeur, limites et incertitudes », in R.I.E.J., n° 65, 2010, pp. 65-85.
  • [14]
    H.L.A. Hart, Le concept de droit, trad. M. van de Kerchove, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2005 (2e édition), p. 114.
  • [15]
    « Dire qu’une règle donnée est valide, c’est reconnaître qu’elle satisfait à tous les critères fournis par la règle de reconnaissance et qu’elle constitue ainsi une règle du système », ibidem, p. 122.
  • [16]
    Ibidem, p. 232.
  • [17]
    Ibidem, p. 249.
  • [18]
    Selon l’article 19 §1 TUE modifié par le Traité de Lisbonne, la Cour de justice de l’Union européenne « comprend la Cour de justice, le Tribunal et des tribunaux spécialisés ».
  • [19]
    CJCE, 23 avril 1986, Parti écologiste « Les Verts » contre Parlement européen, aff. 294/83, Rec. pp. 1339 et ss., point 23 : « la Communauté économique européenne est une Communauté de droit en ce que ni ses États membres ni ses institutions n’échappent au contrôle de la conformité de leurs actes à la charte constitutionnelle de base qu’est le traité ».
  • [20]
    La Cour de justice évoquait déjà la « compétence légiférante » de la Haute Autorité de la C.E.C.A. (CJCE, 15 juillet 1960, Italie contre Haute Autorité, aff. 20/59, Rec. pp. 663 et ss.). Par la suite, elle a fait référence au « système législatif du traité » (CJCE, 17 décembre 1970, Köster aff. 25/70, Rec. pp. 1161 et ss.), au « pouvoir législatif de la Communauté » (CJCE, 9 mars 1978, Administration des finances de l’État contre société Simmenthal, aff. 106/77, Rec. pp. 629 et ss.), et au « législateur communautaire » (CJCE, 27 octobre 1992, Allemagne contre Commission, aff. C-240/90, Rec. pp. I-5383 et ss.)
  • [21]
    Dans l’arrêt « Matthews » du 18 février 1999, la Cour européenne des droits de l’homme avait qualifié le Parlement européen de « corps législatif » (CEDH, 18 février 1999, Matthews contre Royaume-Uni, req. n°24833/94). Cette qualification a fait l’objet de nombreuses critiques dans la doctrine. Il convient en effet de rappeler que le Parlement européen n’exerce pas seul la fonction législative dans l’Union européenne. Cette dernière est exercée dans certains cas par le Conseil, et dans d’autres cas par le Conseil et le Parlement agissant en commun. Précisons cependant que les régimes parlementaires des États membres admettent également, sous différents aspects, l’intervention de l’Exécutif dans le processus d’élaboration des lois (initiative, promulgation), voire la délégation du pouvoir législatif à l’organe exécutif (ordonnances de l’article 38 et de l’article 74-1 en France, décrets-lois et/ou décrets législatifs au Portugal, en Italie et en Espagne).
  • [22]
    H.L.A. Hart, op. cit., p. 252. « Dans la forme la plus élémentaire de société [à laquelle est assimilée le droit international], nous devons attendre pour voir si une règle se fait admettre comme règle ou non ; dans un système doté d’une règle fondamentale de reconnaissance, nous pouvons dire, avant qu’une règle soit effectivement édictée, qu’elle sera valide si elle satisfait aux conditions posées par la règle de reconnaissance », ibidem, pp. 252-253.
  • [23]
    Cf. notamment CJCE, 5 février 1963, Van Gend en Loos contre Administration fiscale néerlandaise, aff. 26/62, Rec. pp. 3 et ss. et CJCE, 15 juillet 1964, Flaminio Costa contre ENEL, aff. 6/64, Rec. pp. 1141 et ss.
  • [24]
    Cf. notamment P.-Y. Monjal, Recherches sur la hiérarchie des normes communautaires, Paris, L.G.D.J., 2000.
  • [25]
    Cf. également en ce sens F. E. Dowrick, « A model of the European Communities legal system », in Yearbook of European Law, 1983, p. 204 : « Its legal system remains coherent despite the co-existence of several contending sources of its law ».
  • [26]
    H.L.A. Hart, op. cit., p. 114 : « dans un système juridique développé, les règles de reconnaissances sont évidemment plus complexes ».
  • [27]
    « Dans les ordres juridiques modernes [la règle de reconnaissance] prend généralement l’apparence de la Constitution nationale » (A. Bailleux, « “Hart vs. Dworkin” and its Progeny. Actualité du “combat des chefs” dans la littérature anglo-saxonne », in R.I.E.J., 2007, n° 59, cité par I. Hachez, op. cit.)
  • [28]
    « The Court’s rulings on the validity or otherwise of secondary legislation and other acts of the Community organs is universally accepted as conclusive » (F. E. Dowrick, op. cit., p. 203).
  • [29]
    Ex-article 249 TCE
  • [30]
    Ex-article 12 TUE.
  • [31]
    Ex-article 34 §2 TUE.
  • [32]
    La coopération policière et judiciaire en matière pénale est rebaptisée « espace de liberté, de sécurité et de justice » par le Traité de Lisbonne.
  • [33]
    Le deuxième pilier était en effet considéré par certains auteurs comme le domaine de « l’action ou de la négociation, non pas celui de la norme » (C. Blumann, « Contribution du Traité d’Amsterdam à la transformation de la Communauté de droit en Union de droit », in J. Rideau (dir.), De la Communauté de droit à l’Union de droit. Continuités et avatars européens, Paris, L.G.D.J., 2000, p. 371).
  • [34]
    L. Benoît considérait ainsi la position commune comme « un instrument déclaratoire à vocation opérationnelle ne prévoyant pas de modalité d’exécution ». Plus généralement, selon l’auteur, les piliers intergouvernementaux avaient pour vocation d’« organiser une coopération […] qui n’a pas vocation à déboucher systématiquement sur des décisions obligatoires » (L. Benoit, Les piliers intergouvernementaux de la construction européenne. L’antagonisme des démarches de coopération et de communautarisation, Thèse pour le doctorat en droit, sous la direction du Professeur Jean Rossetto. Université François Rabelais, Tours, 2000, dact., pp. 48 et 31).
  • [35]
    Articles 24 §1 TUE et 31 §1 TUE modifiés par le Traité de Lisbonne.
  • [36]
    Article 24 TUE modifié par le Traité de Lisbonne.
  • [37]
    Ex-article 24 TUE.
  • [38]
    Article 191 §4 TFUE dans le domaine de l’environnement et article 211 TFUE dans le domaine de la coopération au développement.
  • [39]
    On distingue traditionnellement les actes atypiques prévus par les traités et ceux issus de la pratique des institutions. Cf. notamment C. Blumann et L. Dubouis, op. cit., pp. 544-545.
  • [40]
    Il considère ainsi que ces actes lient leur auteur pour l’adoption des actes individuels (cf. par exemple : TPICE, 17 décembre 1991, SA Hercules Chemicals NV contre Commission, aff. T-7/89, Rec. pp. II-1711 et ss., point 53 : « la Commission ne peut se départir des règles qu’elle s’est elle-même imposées »). Ces actes peuvent par ailleurs produire des effets contraignants à l’égard des États membres (voir par exemple CJCE, 31 mars 1971, Commission contre Conseil, aff. 22/70, Rec. pp. 263 et ss. : une « délibération » du Conseil déterminant l’attitude que doivent adopter les gouvernements des États membres dans les négociations de l’AETR a pour objet de « fixer une ligne de conduite obligatoire pour les institutions comme pour les États membres », point 53). Ces derniers sont en effet tenus d’appliquer des règles énoncées dans des lignes directrices, dès lors qu’ils les ont acceptées (CJCE, 15 octobre 1996, Ijssel-Vliet Combinatie BV contre Minister van Economische Zaken, aff. C-311/94, Rec. pp. I-05023 et ss. : « Il résulte de l’obligation de coopération découlant de l’article 93, paragraphe 1, du traité, d’une part, et de l’acceptation des règles énoncées dans les lignes directrices, d’autre part, qu’un État membre, tel le Royaume des Pays-Bas, est tenu d’appliquer les lignes directrices lorsqu’il adopte une décision à l’égard de la demande d’aide pour la construction d’un bateau destiné à la pêche », point 44. Voir également CJCE, 24 mars 1993, CIRFS contre Commission, aff. C-313/90, Rec. pp. 1125 et ss. à propos d’une « discipline » de la Commission acceptée par les États membres).
  • [41]
    Cf. les articles 149 TFUE (emploi), 156 TFUE (protection sociale), 168 TFUE (santé publique), 173 TFUE (industrie) et 181 TFUE (recherche).
  • [42]
    CJCE, 17 décembre 1970, Internationale Handelsgesellschaft GmbH contre Einfuhr - und Vorratsstelle für Getreide und Futtermittel, aff. 11/70, Rec. pp. 503 et ss.
  • [43]
    Article 6 §1 TUE modifié par le Traité de Lisbonne : « L’Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000, telle qu’adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg, laquelle a la même valeur juridique que les traités ».
  • [44]
    Cf. J.- P. Jacque, « Le Traité de Lisbonne. Une vue cavalière », in R.T.D.E., 2008, p. 452.
  • [45]
    Cf. le Protocole (n° 30) sur l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne à la Pologne et au Royaume-Uni. Le Conseil européen des 29 et 30 octobre 2009 a accepté que les dérogations s’appliquent également à la République tchèque.
  • [46]
    L’article 38 du statut de la CIJ notamment ne fait pas référence à une quelconque hiérarchie entre les sources qu’il évoque. Selon P. Daillier, M. Forteau et A. Pellet : « Il n’est pas possible de poser, en postulat général, que les traités l’emportent nécessairement sur la coutume ou inversement. Il en irait autrement si, par une procédure centralisée, l’une des sources disposait d’une primauté incontestée. L’état actuel de la société internationale, encore largement décentralisée, interdit une telle conclusion », Droit international public, Paris, L.G.D.J., 2009 (8e édition), p. 127.
  • [47]
    En France, les débats ont d’abord porté sur la question de la primauté du droit communautaire à l’égard de la loi nationale postérieure. Les juridictions internes s’étant finalement ralliées à la position de la Cour de justice (CE, 20 octobre 1989, Nicolo, Leb. pp. 190 et ss. ; Cass. ch. mixte, 24 mai 1975, Café J. Vabre), les désaccords portent aujourd’hui sur la place de la Constitution nationale (CE Ass., 30 octobre 1998, Sarran, Levacher e.a., Leb. pp. 368 et ss. ; Cass. ass. plén., 2 juin 2000, Melle Fraisse, in Recueil Dalloz, 2000, p. 865 ; Décision du Conseil constitutionnel n° 2004-505 DC du 19 novembre 2004, Traité établissant une Constitution pour l’Europe, considérant n°9).
  • [48]
    Il serait vain de prétendre lister tous les écrits portant sur ce thème. On mentionnera simplement P. Cassia, « Le juge administratif, la primauté du droit de l’Union européenne et la Constitution française », in R.F.D.A., n° 3, 2005, pp. 465-472 ; B. Genevois, « Le Conseil constitutionnel et la primauté du droit communautaire », in R.F.D.A., n° 2, 2005, pp. 239-241 ; D. Chamussy, « Le Conseil constitutionnel face à la primauté du droit communautaire », in A.J.D.A., n° 4, 2005, pp. 219-222 ainsi que O. Pfersmann, « La primauté : double, partiellement directe, organiquement indéterminée, provisoirement fermée », in Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 18, pp. 138-141.
  • [49]
    Cf. néanmoins P.-Y. Monjal, Recherches sur la hiérarchie des normes communautaires, Paris, L.G.D.J., 2000, 629 p. ; R. Bieber, I. Salome, « Hierarchy of norms in European law », in C.M.L.R., 1996, pp. 907-930 ; J. Dutheil de la Rochere, « La hiérarchie des normes », in Ph. Manin (dir.), La révision du Traité sur l’Union européenne, perspectives et réalités. Rapport du groupe français pour la Conférence intergouvernementale, Paris, Pedone, 1996, pp. 41-60 ; H. Gaudin, « Amsterdam : l’échec de la hiérarchie des normes ? », in R.T.D.E., n° 1, 1999, pp. 1-20 ; R. Mehdi, « La “double hiérarchie” normative à l’épreuve du projet de traité établissant une Constitution pour l’Union européenne », in Les dynamiques du droit européen en début de siècle. Études en l’honneur de Jean-Claude Gautron, Paris, Pedone, 2004, pp. 443-462 ; A. Tizzano, « La hiérarchie des normes communautaires », in R.M.C., 1995, pp. 219-232.
  • [50]
    A. Tizzano, « La hiérarchisation des normes », in J. Rideau, (dir.), De la Communauté de droit à l’Union de droit, op. cit., p. 157.
  • [51]
    TPI, 21 septembre 2005, Yusuf et Al Barakaat International Foundation contre Conseil et Commission, aff. T-306/01, Rec. 2005 pp. II-3533 et ss.
  • [52]
    La solution retenue pas le Tribunal a fait l’objet de critiques au sein de la doctrine. Cf. notamment D. Simon et F. Mariatte, « Le Tribunal de première instance des Communautés : Professeur de droit international ? À propos des arrêts Yusuf, Al Barakaat International Foundation et Kadi du 21 septembre 2005 », in Europe, n° 12, 2005.
  • [53]
    CJCE, 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation contre Conseil et Commission, aff. C-402/05 P et C-415/05 P, Rec. 2008, pp. I-6351 et ss.
  • [54]
    Contrairement aux principes généraux du droit administratif français qui ne lient pas le législateur.
  • [55]
    J. Roux, Droit général de l’Union européenne, Paris, Litec, 2008 (2e édition), p. 206.
  • [56]
    C. Blumann, L. Dubouis, Droit institutionnel de l’Union européenne, op. cit., p. 79. Dans la dernière édition de leur manuel, les auteurs considèrent cependant que les principes généraux du droit font partie du « socle constitutionnel » de l’Union.
  • [57]
    CJCE, 14 octobre 2004, Omega Spielhallen - und Automatenaufstellungs-GmbH contre Oberbürgermeisterin der Bundesstadt Bonn, aff. C-36/02, Rec. pp. I-9609 et ss.
  • [58]
    Le Traité instituant la Communauté européenne ne faisait pas apparaître de hiérarchie entre les différentes catégories d’actes de la nomenclature. Il se référait cependant à la « qualité de législateur » du Conseil (article 207 §3 TCE) et aux « compétences d’exécution » de la Commission (article 202, alinéa 4 TCE et article 211, alinéa 5 TCE).
  • [59]
    Cf. supra note 20.
  • [60]
    CJCE, 17 décembre 1970, Köster, aff. 25/70, Rec. pp. 1161 et ss.
  • [61]
    Cf. en ce qui concerne les règlements : CJCE, 17 décembre 1970, Köster précité ; en ce qui concerne les directives : CJCE, 25 janvier 1994, Angelopharm, aff. C-212/91, Rec. pp. 171 et ss ; en ce qui concerne les décisions : TPICE (Ord.), 27 janvier 2000, TAT European Airlines SA contre Commission, aff. T-49/97, Rec. pp. II-51 et ss. Pour plus d’éléments, cf. L. Guilloud, La loi dans l’Union européenne. Contribution à la définition des actes législatifs dans un ordre juridique d’intégration, L.G.D.J., 2010, tome 134, 589 p.
  • [62]
    CJCE, 27 septembre 1979, Spa Eridiana contre Ministre de l’agriculture et des forêts, aff. 230/78, Rec. pp. 2749 et ss., point 8.
  • [63]
    P. Deumier et Th. Revet, « Sources du droit », op. cit., p. 1432.
  • [64]
    L’expression est empruntée à J. Andriantsimbazovina, « Le Parlement européen, “corps législatif”. Banalisation hasardeuse ou évolution créatrice ? », in Mélanges en hommage à Guy Isaac. Cinquante ans de droit communautaire, Toulouse, Presses de l’Université des sciences sociales, 2004, p. 264.
  • [65]
    D. Rousseau, « Les Constitutions possibles pour l’Europe », in Cités, n° 13, 2003, p. 20.
  • [66]
    L. Favoreu, « L’euroscepticisme du droit constitutionnel. Rapport de synthèse de la journée d’études constitutionnelles du 28 mars 2003, maison de l’Europe : la “Constitution européenne” : une Constitution ? », in R.A.E., n° 6, 2001-2002, p. 701.
  • [67]
    L. Burgogue-Larsen, « Pourquoi une Constitution européenne ? », in R.A.E., ibidem, p. 670.
  • [68]
    J.- P. Jacque, Eléments pour une théorie de l’acte juridique en droit international public, Paris, L.G.D.J., 1972, p. 40.
  • [69]
    P.-Y. Monjal, « Lois et règlements », in Les mots de la Constitution européenne. Actes des journées d’études du Centre de recherche universitaire sur la construction européenne, Amiens, 12 décembre 2003 et 15 octobre 2004, Paris, P.U.F., 2005, pp. 119 et 129.
  • [70]
    Cf. L. Guilloud, « La réforme de la nomenclature des actes de l’Union européenne : le mirage de la simplification », in J. Pousson et F. Rueda, Qu’en est-il de la simplification du droit ?, Toulouse, Presses de l’Université de Toulouse, 2010, pp. 221-235.
  • [71]
    Articles 289 §1 TFUE et 294 TFUE.
  • [72]
    Article 223 §2 TFUE.
  • [73]
    Article 226, alinéa 3 TFUE.
  • [74]
    Article 228 §4 TFUE.
  • [75]
    Soulignons d’ailleurs que le Traité de Lisbonne consacre la compétence de principe des États membres pour mettre en œuvre le droit de l’Union. Ce n’est que « lorsque des conditions uniformes d’exécution des actes juridiquement contraignants de l’Union sont nécessaires, [que] ces actes confèrent des compétences d’exécution à la Commission ou, dans des cas spécifiques dûment justifiés […] au Conseil » (article 291 §2 TFUE).
  • [76]
    Cette pratique existait déjà dans le cadre des traités antérieurs, puisque le juge admettait dans certains cas que les actes d’exécution complètent voire dérogent à l’acte de base. Le Traité de Lisbonne ne fait que distinguer formellement l’exécution de la délégation du pouvoir législatif.
  • [77]
    Cf. C. Boyer-Merentier, Les ordonnances de l’article 38 de la Constitution du 4 octobre 1958, Paris, Economica, Aix-en-Provence, P.U.A.M., 1996, 416 p. Cf. également, du même auteur, « Les ordonnances de l’article 38 de la Constitution : une place ambiguë dans la hiérarchie des normes (propos autour du contentieux relatif aux ordonnances portant réforme de la sécurité sociale) », in R.F.D.A., n° 5, 1998, pp. 924-940.
  • [78]
    Cf. R. Mehdi et F. Picod, « Article I-33 », in L. Burgogue-Larsen, A. Levade, F. Picod, Traité établissant une Constitution pour l’Europe, commentaire article par article, Bruxelles, Bruylant, 2007, p. 453 : « on ne peut qu’être frappé par le caractère redondant des règlements délégués par rapport aux actes d’exécution ».
  • [79]
    C. Blumann, « Article I-35 », in Traité établissant une Constitution pour l’Europ…, ibidem, p. 469.
  • [80]
    L’article 44 TFUE prévoit ainsi que, dans le cadre de la politique agricole commune, lorsqu’un produit fait l’objet d’une organisation nationale du marché ou de toute réglementation interne d’effet équivalent, la Commission peut fixer une taxe compensatoire visant à rétablir l’équilibre des échanges. Elle est également compétente en matière de libre circulation des travailleurs pour adopter les mesures autorisant un ressortissant d’un État membre à demeurer sur le territoire d’un autre État membre après y avoir occupé un emploi (article 49 §3 d) TFUE). Elle peut, dans le cadre de la politique des transports, autoriser les États membres à adopter des mesures de soutien ou de protection en faveur des entreprises de transport (article 96 §1 TFUE). Elle dispose enfin de compétences non négligeables en matière de concurrence. En effet, l’article 106 §3 TFUE prévoit que « la Commission veille à l’application des dispositions du présent article et adresse, en tant que de besoin, les directives ou décisions appropriées aux États membres ».
  • [81]
    La pertinence de cette catégorie d’acte en droit interne a cependant été contestée cf. L. Favoreu, « Les règlements autonomes n’existent pas », in R.F.D.A., n° 6, 1987, pp. 871-884.

Introduction

A – Le droit de l’Union européenne et les sources du droit

1Que la notion de « source du droit » soit complexe, cela n’est plus à démontrer mais impose une grande prudence à l’abord du sujet [2]. Dans le cadre de l’Union européenne, l’article 288 TFUE (ex-article 249 TCE) invite à éluder cette question de la définition de la notion en imposant apparemment à l’observateur une typologie des sources du droit de l’Union. Mais cette typologie, bien que diversifiée, est loin d’être complète. Elle laisse en effet de côté les traités fondateurs de l’Union européenne, la jurisprudence de la Cour de justice, les actes conventionnels ou bien encore les actes dit « hors nomenclature ». À tel point que certains auteurs dénient à cette disposition toute prétention à s’ériger en typologie des sources du droit de l’Union [3]. Si cette conclusion peut paraître excessive, le caractère lacunaire de la typologie révèle néanmoins, comme le soulignent P. Deumier et Th. Revet, que « la velléité d’établir officiellement les sources du droit est non seulement paradoxale mais, surtout, illusoire [...] elle nie, fondamentalement et contre toute évidence, le pluralisme des sources du droit » [4].

2La typologie issue du traité étant incomplète, la doctrine s’est efforcée de dresser sa propre typologie. La catégorisation retenue diffère néanmoins selon les auteurs. L’une des classifications traditionnelles des sources du droit de l’Union européenne repose sur la distinction entre les sources primaires (les traités fondateurs de l’Union) et les sources dérivées (comprenant les actes unilatéraux adoptés par les institutions européennes ainsi que les actes conventionnels conclus au nom de l’Union). Ce qui reste (jurisprudence, principes généraux du droit, droit international) est alors (artificiellement) regroupé sous l’appellation de sources subsidiaires. Néanmoins, le contenu de ces catégories n’est pas figé. Certains auteurs considèrent ainsi les actes conventionnels conclus par l’Union européenne comme des sources « autonomes » ne faisant pas partie du droit dérivé [5]. La jurisprudence de la Cour de justice, quant à elle, est parfois assimilée aux sources primaires [6]. Enfin, d’autres classifications sont envisageables. J.-S. Bergé et S. Robin-Olivier [7] distinguent ainsi : les sources internes et les sources externes [8], les sources écrites (traités, actes de droit dérivé) et les sources non écrites (jurisprudence, principes généraux du droit), les sources contraignantes et les sources non contraignantes.

3Ces différentes classifications ont pour point commun d’ignorer certaines sources de droit, qui ne sont pas considérées comme des sources du droit de l’Union européenne : la doctrine et la coutume. En ce qui concerne la doctrine, C. Blumann et L. Dubouis considèrent ainsi que « si les conceptions qu’elle développe peuvent exceptionnellement exercer une influence sur les autorités créatrices de la règle de droit, notamment le juge, elle ne constitue en aucune manière une source directe du droit de l’Union » [9]. Quant à la coutume, son existence au sein du droit de l’Union européenne a déjà été examinée – et rejetée en l’espèce – par la Cour de justice [10]. Elle admet cependant que certaines coutumes issues du droit international puissent constituer des sources du droit de l’Union [11]. En revanche, la Cour écarte systématiquement l’application de tout principe du droit international qui serait contraire aux autres sources du droit de l’Union [12].

4À l’examen de ces typologies des sources du droit, on constate que des procédés comparables d’élaboration des normes sont utilisés dans l’ordre juridique interne – celui des États membres – et dans l’ordre juridique de l’Union européenne : actes unilatéraux, actes conventionnels, jurisprudence. Cette proximité entre ordre juridique interne et ordre juridique de l’Union européenne se manifeste également, lorsque l’on entreprend d’analyser l’Union européenne à travers la grille de lecture proposée par Hart.

B – La règle de reconnaissance dans l’Union européenne

5La règle de reconnaissance, qui constitue l’une des trois catégories de règles secondaires [13], détermine selon Hart « un ou plusieurs traits qui peuvent être considérés comme indiquant d’une manière positive et décisive que la règle visée qui les possède constitue bien une règle du groupe, et qu’elle devra être soutenue par la pression sociale exercée par ce groupe » [14]. La règle de reconnaissance permet ainsi d’identifier, au sein d’un système juridique donné, les règles de droit valides [15]. C’est aussi elle qui permet de transformer un ensemble de règles juridiques en un système cohérent.

6Hart considère qu’il n’est pas possible d’identifier des règles secondaires au sein du droit international. Selon lui, « le droit international manque non seulement des règles secondaires de changement et de décision qui pourvoient à l’existence d’un corps législatif et de tribunaux, mais également d’une règle de reconnaissance qui, en spécifiant les « sources » du droit et en fournissant des critères généraux permettant d’identifier ses règles, assure leur unité » [16]. Néanmoins, l’auteur raisonne dans le cadre d’une structure formelle du droit international caractérisée par « l’absence d’un corps législatif, de juridictions dotées de pouvoirs coercitifs et de sanctions organisées officiellement » [17]. Or, la structure du système juridique de l’Union européenne est bien différente. La Cour de justice de l’Union européenne [18] est dotée de pouvoirs coercitifs et les mécanismes de sanctions incarnés dans les différentes voies de recours font de l’Union européenne, pour paraphraser la Cour de justice, une « Union de droit » [19]. La capacité conférée aux institutions européennes d’adopter des actes contraignants, s’imposant aux États membres et à leurs ressortissants, permet également d’identifier, au moins matériellement, l’existence d’un « pouvoir législatif » [20], et donc d’un corps législatif, même si la forme que celui-ci revêt dans l’Union européenne – le fameux « triangle décisionnel » – présente des spécificités au regard de la situation prévalant dans les ordres juridiques internes [21].

7De même, selon Hart, le droit international constitue non un système organisé mais un ensemble composé de règles indépendantes les unes des autres, ce qui empêche donc d’identifier « des catégories générales de règles que l’on distingue à l’aide de critères généraux de validité » [22]. Là encore, tout autre est la situation du droit de l’Union européenne. En effet, la Cour de justice a qualifié, très précocement et à plusieurs reprises, le droit communautaire d’ordre juridique [23], ce qui renvoie à l’existence d’un ensemble organisé, même si certains auteurs préfèrent le qualificatif de système juridique pour son caractère dynamique [24]. Il existe indéniablement une structuration interne propre à l’ordre – ou au système – juridique de l’Union européenne [25] ainsi que des catégories générales de règles qui sont identifiées par les traités, de même que les rapports qu’elles entretiennent les unes avec les autres.

8Cependant, dans l’Union européenne comme dans tout système juridique développé, la règle de reconnaissance est complexe et, en définitive, plurielle [26]. Elle trouve son fondement en partie dans les traités, ce qui rapproche de nouveau l’Union européenne d’un ordre juridique interne [27], et en partie dans la jurisprudence. En effet, selon l’article 19 §1 TUE modifié par le Traité de Lisbonne, la Cour de justice de l’Union européenne « assure le respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités ». Par ses méthodes d’interprétation, téléologique et systémique, elle a largement contribué à préciser, mais aussi dans certains cas à étendre, voire à compléter, la portée des dispositions des traités. Elle a également assuré la cohérence du système en se prononçant sur la validité du droit dérivé [28]. Le Traité de Lisbonne a cependant renforcé la place du droit primaire en la matière. Plus généralement, il a contribué à une réorganisation des sources du droit de l’Union européenne (1), non sans introduire certaines incohérences (2).

1 – La contribution du Traité de Lisbonne à une réorganisation des sources du droit de l’Union européenne

9Après l’échec du Traité établissant une Constitution pour l’Europe, le Traité de Lisbonne constitue l’étape finale du processus de réforme engagé le 15 décembre 2001 par la Déclaration de Laeken. Or, l’un des objectifs assignés à la révision des traités et mentionnés par cette déclaration tenait dans la simplification des instruments juridiques de l’Union. Le Traité de Lisbonne, qui reprend sur de nombreux points les innovations du Traité établissant une Constitution pour l’Europe, répond au « cahier des charges » qui lui avait ainsi été imposé par une réorganisation des sources du droit de l’Union Son apport dans ce domaine revêt principalement deux formes. Le Traité de Lisbonne contribue d’une part à la rationalisation des sources du droit de l’Union européenne (A), et d’autre part à leur hiérarchisation (B).

A – La contribution du Traité de Lisbonne à la rationalisation des sources du droit de l’Union européenne

10La rationalisation des sources, mise en parallèle avec l’objectif de « simplification » qui a constitué le mot d’ordre de la Déclaration de Laeken, s’est essentiellement manifestée par le souci de contenir la prolifération des sources du droit de l’Union européenne. Si les grandes catégories de sources évoquées précédemment subsistent, la rationalisation qui s’est opérée au sein de chacune d’elle a conduit : à la diminution des sources unilatérales au sein du droit dérivé grâce à la disparition des différents « piliers » de l’Union et à l’uniformisation des actes qui en résulte (A.1), à la simplification des sources conventionnelles du fait de l’attribution de la personnalité juridique à l’Union européenne (A.2), enfin à l’encadrement (partiel) des actes atypiques (A.3). L’impact de la réforme sur les sources primaires reste en revanche plus limité (A.4) et son influence sur les sources jurisprudentielles plus incertaine (A.5).

A.1 – La diminution des sources unilatérales prévues par les traités

11Avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, chaque « pilier » de l’Union européenne disposait de sa nomenclature spécifique. Les institutions européennes adoptaient ainsi des règlements, des directives, des décisions, des recommandations ou des avis lorsqu’elles agissaient dans le cadre du premier pilier [29] ; des stratégies communes, des actions communes et des positions communes lorsqu’elles agissaient dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune (deuxième pilier) [30] ; des positions communes, des décisions-cadres, des décisions lorsqu’elles agissaient dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale (troisième pilier) [31]. Ce foisonnement était source de complexité, notamment lorsqu’un même acte avait des implications dans différents domaines.

12Dans le Traité de Lisbonne, la rationalisation des sources se manifeste d’abord par la suppression des différents piliers et par l’abandon de la nomenclature spécifique dans les domaines de la politique étrangère et de sécurité commune et de la coopération policière et judiciaire en matière pénale [32]. L’article 288 TFUE, tel que modifié par le Traité de Lisbonne, prévoit en effet que « pour exercer les compétences de l’Union, les institutions adoptent des règlements, des directives, des décisions, des recommandations et des avis ». La nomenclature de l’ancien premier pilier est ainsi étendue à l’ensemble de l’Union. Au-delà de la réduction des différentes catégories d’actes juridiques qui en résulte, cette réorganisation de la nomenclature a pour avantage d’affirmer la nature juridique des actes adoptés dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune et de la coopération policière et judiciaire en matière pénale qui était parfois mise en doute par la doctrine [33], ainsi que leur caractère contraignant, lui aussi souvent contesté [34].

13Mais cette apparente unification n’a pas pour effet d’uniformiser l’ensemble des règles juridiques applicables aux différents domaines d’intervention de l’Union européenne. En effet, la politique étrangère et de sécurité commune reste soumise à des règles et à des procédures spécifiques. Au titre de ces spécificités, on peut ainsi mentionner l’impossibilité pour les institutions d’adopter des actes législatifs en la matière [35]. À cela s’ajoute l’exclusion de la compétence de la Cour de justice de l’Union européenne, sauf lorsqu’il s’agit de veiller à ce que les actes adoptés n’affectent pas la mise en œuvre des autres politiques de l’Union, ou pour contrôler la légalité des décisions édictant des mesures restrictives à l’encontre des personnes physiques ou morales [36].

A.2 – La simplification des sources conventionnelles

14L’attribution de la personnalité juridique à l’Union européenne et sa substitution à la Communauté européenne ont pour effet de mettre un terme à l’ambiguïté qui entourait les accords internationaux conclus par les institutions européennes dans le cadre des 2e et 3e piliers. Jusque là en effet, ces accords ne pouvaient être imputés aux États puisque le traité sur l’Union européenne prévoyait qu’ils « lient les institutions de l’Union » [37]. Ils n’étaient par pour autant imputables à l’Union elle-même, faute de personnalité juridique, ni à la Communauté dès lors qu’ils intervenaient en dehors de son champ d’intervention.

15Le Traité de Lisbonne institue également une procédure de conclusion commune (article 218 TFUE), sous réserve des dispositions particulières s’appliquant en matière de politique commerciale (article 207 TFUE), en matière monétaire (article 219 TFUE), et des particularités reconnues aux accords portant exclusivement sur la politique étrangère et de sécurité commune (article 218 §6 TFUE).

16En revanche le Traité de Lisbonne laisse subsister les « accords mixtes » dans les domaines relevant à la fois de la compétence de l’Union européenne et de la compétence des États membres [38]. Or, ces accords présentent une indéniable complexité dans la mesure où ils doivent être conclus à la fois dans le respect des procédures internes de l’Union européenne et des procédures constitutionnelles nationales.

A.3 – L’encadrement des actes atypiques (ou hors nomenclature)

17L’existence des actes dits « hors nomenclature » est, au moins partiellement, consacrée par les traités [39] et le juge leur a reconnu, dans certains cas, la capacité de produire des effets de droit [40]. Le Traité de Lisbonne s’est néanmoins efforcé d’encadrer le recours aux actes atypiques. Ainsi, selon l’article 296, alinéa 2 TFUE, « lorsqu’ils sont saisis d’un projet d’acte législatif, le Parlement européen et le Conseil s’abstiennent d’adopter des actes non prévus par la procédure législative applicable au domaine concerné ».

18La formulation retenue est cependant peu contraignante car seule la fonction législative est concernée par ce qui apparaît comme une incitation à la modération, plutôt que comme une véritable exclusion, du recours aux actes atypiques. On peut, en outre, s’interroger sur la cohérence de l’encadrement des actes atypiques avec, d’une part, l’extension de la méthode ouverte de coordination [41] qui constitue une incitation directe à l’adoption d’autres catégories d’actes que celles prévues par la nomenclature, et, d’autre part, la consécration des accords interinstitutionnels par l’article 295 TFUE, ce qui confère une base juridique à cette catégorie particulière d’actes atypiques (actes atypiques de nature conventionnelle).

A.4 – La diversité persistante des traités fondateurs (sources primaires)

19En ce qui concerne les traités fondateurs de l’Union européenne, la rationalisation opérée par le Traité de Lisbonne n’est que relative puisque le nombre de traités fondateurs de l’Union européenne reste inchangé. À la différence du Traité établissant une Constitution pour l’Europe qui substituait un traité unique aux traités en vigueur, avec le Traité de Lisbonne, soit les traités préexistants subsistent tels quels (Traité instituant la CEEA), soit ils sont modifiés dans leur contenus, voire renommés. Ainsi, le Traité sur l’Union européenne qui correspond au traité de Maastricht, entré en vigueur en 1993 et modifié depuis par les traités d’Amsterdam et de Nice, conserve son appellation tout en étant de nouveau modifié par le traité de Lisbonne. Le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, quant à lui, se substitue au Traité instituant la Communauté européenne. Quant à l’impact du traité sur les sources jurisprudentielles, et plus précisément sur les principes généraux du droit dégagés par la Cour de justice, il reste encore incertain compte tenu du peu de recul dont on dispose encore à l’égard de l’application de ce traité entré en vigueur le 1er décembre 2009.

A.5 – La remise en cause partielle des sources jurisprudentielles ?

20Les principes généraux du droit constituent l’archétype du pouvoir créateur de la Cour de justice. Elle a eu abondamment recours à ces derniers pour compenser les « lacunes » initiales des traités, notamment dans le domaine des droits fondamentaux. En effet, en raison de la vocation économique de la construction européenne, les Traités originaires ne comportaient pas l’équivalent de ce que sont les déclarations des droits dans les ordres juridiques des États membres. Seules certaines dispositions relatives à la libre circulation des travailleurs, à la non-discrimination entre les ressortissants de l’Union européenne et à l’égale rémunération entre les hommes et les femmes, inscrites dans le traité de Rome, était rattachables à la protection des droits fondamentaux. C’est la Cour de justice qui, confrontée au refus des cours constitutionnelles allemande et italienne de faire prévaloir le droit communautaire sur les dispositions des constitutions nationales relatives à la protection des droits fondamentaux, a renforcé la protection des droits fondamentaux à l’échelle européenne. Dans son arrêt du 17 décembre 1970 Handelgesellschaft, la Cour affirme ainsi que le respect des droits fondamentaux « fait partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect » [42].

21Or, en conférant valeur juridique à la « Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne » [43], laquelle consacre l’œuvre jurisprudentielle de la Cour de justice dans ce domaine, le Traité de Lisbonne pourrait partiellement remettre en cause l’intérêt des principes généraux du droit dégagés par le juge. L’analyse doit néanmoins rester nuancée pour au moins deux raison. D’une part, il n’est pas exclu que la Cour de justice ait recours aux principes généraux du droit pour interpréter les dispositions de la Charte [44]. D’autre part, certains États membres ont négocié des dérogations à la Charte [45], alors qu’aucun d’entre eux ne dispose de dérogation à l’égard des principes généraux du droit lorsqu’ils interviennent dans le champ d’application du droit de l’Union européenne.

22La diversité des sources du droit soulève évidemment la question des relations entre les sources. Il est traditionnellement admis en droit international qu’il n’existe pas de hiérarchie entre ces dernières [46]. Il en va différemment au sein du droit de l’Union européenne.

B – La contribution du Traité de Lisbonne à la hiérarchisation des sources du droit de l’Union européenne

23Alors que la question de la hiérarchie entre le droit de l’Union et les droits nationaux a fait l’objet de multiples controverses à la fois au sein de la jurisprudence [47] et de la doctrine [48], celle de la hiérarchie interne à l’Union européennes est restée plus confidentielle [49]. Les différentes catégories de sources évoquées précédemment sont pourtant hiérarchisées. Cette hiérarchisation a été mise en évidence par la Cour de justice sur le fondement des dispositions des traités. Néanmoins, les réponses du juge sont « nécessairement occasionnelles et limitées, [et] restent par leur nature inadéquates et insuffisantes » [50]. Elle a ainsi été complétée sur certains points par le Traité de Lisbonne.

B.1 – La hiérarchie entre les sources internes et externes

24Les sources externes priment sur le droit dérivé. L’article 216 §2 TFUE (ex article 300 §7 TCE) prévoit en effet que « les accords conclus par l’Union lient les institutions de l’Union et les États membres ». Elles s’inclinent en revanche devant le droit primaire. La subordination des sources conventionnelles aux sources primaires se manifeste dans l’article 218 §11 TFUE. Selon cet article : « un État membre, le Parlement européen, le Conseil ou la Commission peut recueillir l’avis de la Cour de justice sur la compatibilité d’un accord envisagé avec les traités. En cas d’avis négatif de la Cour, l’accord envisagé ne peut entrer en vigueur, sauf modification de celui-ci ou révision des traités ». Le contrôle préventif n’étant pas systématique, la Cour de justice a, en outre, accepté de se prononcer sur un recours en annulation formé soit à l’encontre de la décision de conclure l’accord, soit à l’encontre des actes d’exécution de cet accord. Cette jurisprudence peut cependant conduire à remettre en cause les accords conclus. Dans ce cas, il appartiendra à l’Union de renégocier avec ses partenaires afin de trouver une solution acceptable par toutes les parties. Néanmoins, pour éviter la mise en cause de la responsabilité internationale de l’Union, la Cour s’efforce, dans la mesure du possible, de procéder à une interprétation conforme plutôt qu’à une annulation de la mesure contestée. Elle peut également choisir de maintenir les effets de l’acte annulé lorsque « d’importants motifs de sécurité juridique » l’exigent.

25Le Tribunal de première instance avait tenté d’ouvrir une brèche dans cet ordonnancement des sources. Dans une affaire concernant un règlement adopté pour la mise en œuvre de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, il avait refusé d’exercer le contrôle de la légalité du règlement au regard du droit communautaire primaire, au motif que cela impliquerait qu’il « examine, de façon incidente, la légalité desdites résolutions » [51]. Or, les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU ne pouvaient, selon le Tribunal, faire l’objet d’un contrôle, même indirect, de leur conformité aux traités fondateurs de l’Union européenne. En revanche, il s’était reconnu compétent pour « contrôler, de manière incidente, la légalité des résolutions en cause du Conseil de sécurité au regard du jus cogens, entendu comme un ordre public international qui s’impose à tous les sujets du droit international » [52]. La Cour est cependant revenue sur cette interprétation [53]. Peu importe que les mesures communautaires soient prises en application d’une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux États : « les obligations qu’impose un accord international ne sauraient avoir pour effet de porter atteinte aux principes constitutionnels du Traité CE, au nombre desquels figure le principe selon lequel tous les actes communautaires doivent respecter les droits fondamentaux ». Ce principe s’impose donc même s’il conduit à un contrôle indirect de la conformité des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU aux traités de l’Union, ce qui rétablit la hiérarchie initiale entre les sources primaires et les sources externes.

B.2 – La hiérarchie au sein des sources internes

26L’existence d’une hiérarchie entre les sources primaires et dérivées peut être aisément déduite des dispositions des traités concernant les voies de recours. L’article 263 TFUE (ex-article 230 TCE) prévoit en effet que la Cour de justice de l’Union européenne contrôle la légalité des actes de droit dérivé, lesquels peuvent, notamment, être annulés pour « violation des traités ou de toute règle de droit relative à leur application ». Avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, la compétence restreinte de la Cour de justice dans le cadre du 3e pilier, et son exclusion dans le cadre du 2e pilier, rendaient cependant plus difficile le respect – voire l’identification – de la hiérarchie dans ces deux domaines.

27Un débat s’était en revanche élevé dans la doctrine concernant la place des principes généraux du droit. En effet, s’il s’imposent à l’ensemble des sources dérivées [54], leur rang exact par rapport aux traités faisait l’objet de controverses. Certains auteurs considéraient en effet que les principes généraux du droit de l’Union étaient « assimilables au droit primaire ». Dès lors, « un conflit éventuel entre l’un de ces principes et des dispositions explicites du droit primaire se résoudrait par une conciliation manifestant leur égalité de valeur, plutôt que par l’application d’un principe hiérarchique » [55]. D’autres en revanche évoquaient une position « infra-constitutionnelle et […] supra-législative » [56]. Cependant, dans son arrêt du 14 octobre 2004 « Omega », confrontée au conflit entre les principes de libre prestation des services et de libre circulation des marchandises garantis par les traités d’une part, et le principe de dignité humaine reconnu comme principe général du droit ne pouvant pas faire l’objet de restriction d’autre part, la Cour de justice a décidé que « le droit communautaire ne s’oppose pas à ce qu’une activité économique consistant en l’exploitation commerciale de jeux de simulation d’actes homicides fasse l’objet d’une mesure nationale d’interdiction adoptée pour des motifs de protection de l’ordre public en raison du fait que cette activité porte atteinte à la dignité humaine » [57]. Un principe général du droit peut donc justifier la limitation apportée à un principe garanti par le traité (en l’espèce la libre circulation).

28L’apport du Traité de Lisbonne concerne essentiellement la hiérarchie au sein des sources dérivées. Il distingue en effet les actes législatifs des actes non législatifs. Il s’agit cependant d’une consécration plus que d’une innovation. En effet, même si une telle distinction n’apparaissait pas de façon explicite dans le Traité instituant la Communauté européenne [58], elle émergeait depuis de nombreuses années de la jurisprudence [59], surtout à partir de l’arrêt Köster [60]. En effet, la Cour de justice, en s’appuyant sur la « pratique constante des institutions » et sur « les conceptions juridiques reçues dans tous les États membres », avait œuvré dans le sens de la hiérarchisation du droit dérivé en distinguant au sein de celui-ci « les mesures qui trouvent directement leur base dans le traité même [actes de base] et le droit dérivé destiné à assurer leur exécution [actes d’exécution] ». C’est donc le critère de la base juridique qui permettait de distinguer ces deux catégories d’actes au sein du droit dérivé [61]. En conséquence, les actes d’exécution étaient subordonnés aux actes de base qu’ils devaient mettre en œuvre, même si le juge admettait dans certains cas la possibilité pour l’acte d’exécution de compléter l’acte de base, voire de « fixer des dérogations » lorsque ce dernier le prévoyait [62].

29Cependant, faute de consécration conventionnelle, la hiérarchie au sein du droit dérivé restait partielle. Le Traité de Lisbonne pouvait donc faire œuvre utile en la matière en instaurant une distinction entre les actes législatifs et les actes non législatifs, qui ait une portée générale et qui se concrétise dans les effets attachés à chacun de ces actes. Or, sur ce point, des incohérences persistent à l’issue de l’entrée en vigueur du traité.

2 – Les incohérences du Traité de Lisbonne dans la réorganisation des sources de droit dérivé

30« Aujourd’hui encore, malgré le développement irrépressible des sources concurrentes, la loi demeure la référence centrale en matière de sources. » [63] La transposition à l’échelle européenne de la distinction « loi / règlement » qui caractérise les ordres juridiques nationaux est-elle réellement pertinente ou n’est-elle que la manifestation d’un stato-morphisme inapte à rendre compte de l’autonomie et des spécificités du système juridique de l’Union ? Les critiques à l’encontre de la « migration des concepts » [64] sont nombreuses. Les notions empruntées au vocabulaire constitutionnel seraient utilisées pour l’effet de « mode » [65], parce que « ça fait plus moderne » [66], ou pour « détacher le système communautaire de ses “gènes” internationaux afin de mieux marquer sa spécificité » [67]. Si ces mises en garde ne doivent pas être négligées, les jugements portés semblent sévères. En effet, comme le souligne J.- P. Jacqué, « les chances de réussite d’une transposition sont […] étroitement fonction de la structure comparée des deux ordres juridiques en question. Il serait vain de vouloir acclimater des notions qui parviennent d’un ordre juridique décentralisé au sein d’un ordre plus hiérarchisé et réciproquement » [68]. Or, comme on l’a démontré précédemment, le droit de l’Union européenne présente aujourd’hui plusieurs manifestations de la hiérarchisation de ses sources.

31Plus que le principe, c’est la méthode retenue qui peut être contestée. En effet, le Traité de Lisbonne a été guidé par le paradigme de la simplification énoncé dans la Déclaration de Laeken. Mais il semble avoir privilégié la finalité (rendre simple) plutôt qu’une réflexion sur les moyens d’assurer cette finalité. La simplification a en effet été présentée comme le procédé permettant d’assurer l’intelligibilité du droit de l’Union par les citoyens, donc de renforcer leurs possibilités de contrôle à l’égard des institutions, et, en définitive, de conforter le caractère démocratique de l’Union. Des jugements sévères ont été portés sur cette instrumentalisation de la notion. Le Professeur Monjal a ainsi dénoncé une notion de simplification « dogmatisée à des fins démagogiques » [69]. L’opération de simplification entreprise par le Traité de Lisbonne semble avoir tenté de faire abstraction des éléments de complexité inhérents à la nature du système décisionnel de l’Union, mais, ne pouvant les supprimer, elle introduit en définitive des incohérences dans le traité [70].

32Ainsi, pour distinguer les actes législatifs des actes non législatifs, le Traité de Lisbonne se réfère à leur procédure d’élaboration. L’article 289 §3 TFUE prévoit que « les actes juridiques adoptés par procédure législative constituent des actes législatifs ». Le critère formel, ou procédural, se substitue donc à la base juridique comme critère déterminant d’identification des actes législatifs de l’Union. Mais ce critère n’est pas véritablement homogène car le Traité de Lisbonne consacre en réalité l’existence d’une grande diversité de procédures législatives (A), tandis que la catégorie des actes non législatifs, qui ne sont définis qu’a contrario, rassemble des actes très hétérogènes (B).

A – La diversité des procédures législatives

33Le Traité de Lisbonne, reprenant sur ce point les dispositions du Traité établissant une constitution pour l’Europe, fait de la procédure de codécision la procédure législative ordinaire [71]. Cette consécration reflète la volonté de renforcer le caractère démocratique de l’Union européenne en valorisant la procédure qui place sur un pied d’égalité le Conseil et le Parlement européen. Néanmoins, le Traité de Lisbonne n’est pas parvenu à mener la logique à son terme en faisant de la procédure de codécision l’unique procédure législative en vigueur au sein de l’Union.

34Ainsi, au-delà de la procédure législative ordinaire, le Traité de Lisbonne prévoit l’existence de plusieurs procédures législatives spéciales. Selon les dispositions de l’article 289 §2 TFUE, un acte législatif peut en effet être également adopté « par le Parlement européen avec la participation du Conseil ou par celui-ci avec la participation du Parlement européen ». De plus, le terme général de « participation » renvoie à des situations variées puisque l’acte peut être soumis soit à la consultation soit à l’approbation de l’institution concernée. Dans tous les cas, l’adoption d’un acte législatif nécessite néanmoins l’intervention du Conseil et du Parlement européen. Cela permet d’exclure de la catégorie des actes législatifs tous les actes adoptés selon d’autres procédures. Mais l’intervention du Parlement se réduit parfois à un simple avis. En outre, à la lecture du traité, on constate que les cas dans lesquels l’adoption d’un acte législatif par le Conseil, avec la participation du Parlement européen, est prévue sont incomparablement plus nombreux que ceux dans lesquels les actes législatifs sont adoptés par le Parlement européen, avec la participation du Conseil. En effet, l’adoption d’actes législatifs par le Parlement sur la base d’une procédure législative spéciale n’est prévue que dans trois cas dont la portée reste limitée au cadre institutionnel : pour fixer le statut et les conditions générales d’exercice des fonctions de ses membres [72], pour déterminer les modalités d’exercice du droit d’enquête [73] et pour prévoir le statut et les conditions générales d’exercice des fonctions du médiateur [74]. Dans ces trois cas, l’adoption de l’acte requiert en outre l’approbation du Conseil. L’existence de procédures législatives spéciales reflète ainsi le souci de préserver la prépondérance du Conseil au sein du pouvoir législatif dans certains domaines. Il en résulte que le critère formel ou procédural, qui devait en principe permettre d’identifier les actes législatifs au sein de l’Union, est loin d’être homogène.

B – L’hétérogénéité de la catégorie des actes non législatifs

35La catégorie des actes non législatifs ne se résume pas à celle des actes d’exécution pris pour l’application des actes législatifs [75]. Elle est en réalité hétérogène. Elle intègre en effet les actes délégués, pris pour compléter ou modifier les actes législatifs et dont la nature juridique reste quelque peu ambiguë (B.1), ainsi que les actes non législatifs pris sur le fondement direct des traités qui présentent manifestement des particularités au regard des deux autres catégories d’actes non législatifs (B.2).

B.1 – Les actes délégués

36L’article 290 TFUE crée la catégorie des actes délégués. Il s’agit d’« actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels de l’acte législatif » [76]. Ils constituent ainsi une catégorie d’actes hybrides, non législatifs par leur forme, puisqu’ils ne sont pas adoptés sur la base d’une procédure législative ordinaire ou spéciale, législatifs par leur portée, dès lors qu’ils peuvent modifier un acte législatif. On peut les rapprocher des ordonnances de l’article 38 de la Constitution française, même s’ils diffèrent de ces dernières sur plusieurs points. En effet, les ordonnances de l’article 38 ne sont pas soumises aux mêmes limitations que les actes délégués qui ne peuvent modifier que les éléments « non essentiels » d’un acte législatif. En outre, suite à leur éventuelle ratification, les ordonnances intègrent la catégorie des actes législatifs, tandis qu’aucune procédure de ratification n’est prévue pour les actes délégués qui conservent donc, en toutes circonstances, leur statut d’actes non législatifs. Enfin, le niveau d’encadrement de la délégation est renforcé au niveau de l’Union puisque le Parlement européen comme le Conseil peuvent révoquer la délégation ou s’opposer à l’entrée en vigueur de l’acte. Les débats suscités par la catégorie des actes délégués à l’échelle européenne sont en revanche semblables à ceux qui entourent les ordonnances en France [77]. Dans les deux cas, en effet, ces actes sont considérés comme « non législatifs », ou « administratifs », alors qu’ils peuvent modifier des actes législatifs, ce qui nourrit un doute sur la pertinence de la qualification choisie au regard de la portée véritable de ces actes.

37L’utilité de l’acte délégué dépend en outre de sa capacité à se différencier de l’acte d’exécution. Or, sur ce point, une nouvelle critique peut être adressée à la procédure de délégation mise en place par le Traité de Lisbonne. Car si la dissociation existe, dès lors que seul l’acte délégué peut modifier un acte législatif, on peut regretter que les rédacteurs du Traité de Lisbonne, reprenant les dispositions contestables du Traité établissant une Constitution pour l’Europe, aient précisé que les actes délégués « complètent » les actes législatifs, « complément » dont la distinction avec la « mise en œuvre » relevant des actes d’exécution peut en pratique s’avérer malaisée [78]. Il en résulte une évolution vers une conception restrictive de l’exécution qui consiste en la stricte application de l’acte législatif.

38L’acte non législatif donne ainsi « l’impression d’une notion insaisissable, éclatée, aux multiples facettes et aux objets assez disparates » [79]. Cette impression est encore accrue par le fait que le Traité de Lisbonne prévoit également l’existence d’actes non législatifs adoptés sur le fondement direct des traités.

B.2 – Les actes non législatifs pris sur le fondement direct des traités

39Depuis l’arrêt « Köster » déjà évoqué, la Cour de justice distinguait les actes de base, adoptés sur le fondement direct des traités considérés comme les actes législatifs de l’Union, et les actes d’exécution adoptés sur le fondement de ces derniers. La base juridique de l’acte était donc le critère de distinction des actes législatifs et des actes d’exécution de l’Union. Les actes de base pouvaient être élaborés selon diverses procédures, en fonction de la disposition conventionnelle sur le fondement de laquelle ils étaient adoptés, sans que cette différence de procédure ne se traduise par une différence de rang hiérarchique.

40Le Traité de Lisbonne définit en revanche l’acte législatif par sa procédure d’adoption. Tout acte qui n’est pas adopté selon une procédure législative ordinaire ou spéciale ne peut donc être considéré que comme un acte non législatif, même s’il est adopté sur le fondement direct des traités. C’est le cas pour certains actes adoptés par la Commission. Cela concerne principalement certains aspects de la réglementation des échanges et de la libre circulation [80]. Par ailleurs, dans le cadre de l’Union économique et monétaire, un pouvoir de décision propre a également été reconnu à la Banque centrale européenne. En effet, en vertu de l’article 128 §1 TFUE, « la BCE est seule habilitée à autoriser l’émission de billets de banque dans la Communauté ». Tous ces actes, bien qu’adoptés sur le fondement direct des traités, ne sont pas des actes législatifs puisqu’ils ne sont pas adoptés par l’une des procédures législatives prévues par le Traité de Lisbonne. Pourtant, leur portée est radicalement distincte de celle des règlements d’exécution et des règlements délégués, dont l’adoption est toujours liée à l’existence d’un acte législatif (qu’ils mettent en œuvre, complètent, ou modifient). Ils constituent ainsi une catégorie d’actes assez proche de celle des règlements autonomes prévus par l’article 37 de la Constitution française, c’est-à-dire des actes adoptés en dehors de toute intervention d’un acte législatif [81], ce qui accroît une nouvelle fois l’hétérogénéité des actes non législatifs prévus par le Traité de Lisbonne.

41Néanmoins, au-delà de ses faiblesses, sans doute inévitables dans le cadre d’un processus de réforme confronté tant à la complexité du domaine concerné qu’aux contraintes inhérentes à un mode de négociation diplomatique, le Traité de Lisbonne a très certainement eu pour effet de renouveler l’intérêt de l’étude des sources du droit au sein de l’Union européenne.


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Date de mise en ligne : 15/09/2012

https://doi.org/10.3917/riej.066.0085

Notes

  • [1]
    Cet article fait suite à une intervention dans le cadre du séminaire sur « Les sources du droit revisitées » organisé par le SIEJ (Facultés universitaires Saint-Louis à Bruxelles) le 5 novembre 2010. L’auteur remercie très sincèrement les organisateurs du séminaire pour leur invitation et pour l’ensemble de leurs remarques.
  • [2]
    Sur les différents sens du mot source, cf. notamment Ph. Jestaz, « Source délicieuse… (Remarques en cascades sur les sources du droit) », in RTD civ., 1993, pp. 73-85. Voir également I. Hachez, « Balises conceptuelles autour des notions de “source du droit”, “force normative” et “soft law” », in R.I.E.J., n° 65, 2010, pp. 1-65.
  • [3]
    Ainsi selon C. Blumann et L. Dubouis : « les traités constitutifs de l’Union, comme jadis les traités constitutifs des Communautés européennes, ne proposent aucune typologie des sources de droit », in Droit institutionnel de l’Union européenne, Paris, Litec, 2010 (4e édition), p. 253. On pourrait en effet se demander si tous les actes mentionnés dans l’article 288 TFUE constituent des sources du droit de l’Union. La question se pose, notamment, à l’égard des recommandations et des avis qui « ne lient pas ».
  • [4]
    P. Deumier et Th. Revet, « Sources du droit », in S. Rials, Dictionnaire de culture juridique, Paris, P.U.F., 2003, p. 1431.
  • [5]
    Cf. par exemple en ce sens : J. Rideau, Droit institutionnel de l’Union et des Communautés européennes, Paris, LGDJ, 2006 (5e édition).
  • [6]
    J. Roux, Droit général de l’Union européenne, Paris, Litec, 2006. En toute hypothèse, cette assimilation ne concerne que les cas dans lesquels la Cour de justice interprète les traités ou dégage des principes généraux du droit.
  • [7]
    J.-S. Berge et S. Robin-Olivier, Introduction au droit européen, Paris, P.U.F., 2008.
  • [8]
    Les sources internes sont celles qui sont élaborées dans l’enceinte de l’Union, tandis que les sources externes font intervenir des États tiers ou d’autres organisations internationales. Ibidem, p. 38.
  • [9]
    Droit institutionnel de l’Union européenne, op. cit., p. 524.
  • [10]
    CJCE, 10 février 1983, Luxembourg contre Parlement, aff.230/81, Rec. pp. I-255 et ss., point 44 : « il convient toutefois d’observer que cette pratique [consistant à tenir une partie des séances plénières à Luxembourg] avait été décidée par le Parlement de sa propre initiative, et qu’elle n’avait été approuvée ni expressément ni implicitement par les États membres. Au contraire, le gouvernement français a contesté, à plusieurs reprises, la compatibilité de cette pratique avec les décisions des États membres et a demandé qu’elle soit modifiée. C’est donc à tort que le gouvernement luxembourgeois fait valoir qu’une coutume aurait été créée en sa faveur par cette pratique ».
  • [11]
    Ainsi, « on ne saurait refuser à un justiciable, lorsqu’il se prévaut en justice des droits qu’il tire directement d’un accord avec un pays tiers, la faculté de mettre en cause la validité d’un règlement qui, en suspendant les concessions commerciales octroyées par cet accord, l’empêche de s’en prévaloir, et d’invoquer, pour en contester la validité, les obligations découlant des règles du droit coutumier international qui régissent la cessation et la suspension des relations conventionnelles ». CJCE, 16 juin 1998, Racke, aff. C-162/96, Rec. pp. I-3665 et ss.
  • [12]
    Il en va ainsi, notamment, du principe réciprocité. Cf. CJCE, 26 févr. 1976, Commission contre Italie, aff. 52/75, Rec. 1976, p. 277, point 11 : « en effet, le traité ne s’est pas borné à créer des obligations réciproques entre les différents sujets auxquels il s’applique, mais a établi un ordre juridique nouveau qui règle les pouvoirs, droits et obligations desdits sujets, ainsi que les procédures nécessaires pour faire constater et sanctionner toute violation ».
  • [13]
    Sur la notion de règle de reconnaissance et de règle secondaire, cf. Ph. Gerard, « L’idée de règle de reconnaissance : valeur, limites et incertitudes », in R.I.E.J., n° 65, 2010, pp. 65-85.
  • [14]
    H.L.A. Hart, Le concept de droit, trad. M. van de Kerchove, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2005 (2e édition), p. 114.
  • [15]
    « Dire qu’une règle donnée est valide, c’est reconnaître qu’elle satisfait à tous les critères fournis par la règle de reconnaissance et qu’elle constitue ainsi une règle du système », ibidem, p. 122.
  • [16]
    Ibidem, p. 232.
  • [17]
    Ibidem, p. 249.
  • [18]
    Selon l’article 19 §1 TUE modifié par le Traité de Lisbonne, la Cour de justice de l’Union européenne « comprend la Cour de justice, le Tribunal et des tribunaux spécialisés ».
  • [19]
    CJCE, 23 avril 1986, Parti écologiste « Les Verts » contre Parlement européen, aff. 294/83, Rec. pp. 1339 et ss., point 23 : « la Communauté économique européenne est une Communauté de droit en ce que ni ses États membres ni ses institutions n’échappent au contrôle de la conformité de leurs actes à la charte constitutionnelle de base qu’est le traité ».
  • [20]
    La Cour de justice évoquait déjà la « compétence légiférante » de la Haute Autorité de la C.E.C.A. (CJCE, 15 juillet 1960, Italie contre Haute Autorité, aff. 20/59, Rec. pp. 663 et ss.). Par la suite, elle a fait référence au « système législatif du traité » (CJCE, 17 décembre 1970, Köster aff. 25/70, Rec. pp. 1161 et ss.), au « pouvoir législatif de la Communauté » (CJCE, 9 mars 1978, Administration des finances de l’État contre société Simmenthal, aff. 106/77, Rec. pp. 629 et ss.), et au « législateur communautaire » (CJCE, 27 octobre 1992, Allemagne contre Commission, aff. C-240/90, Rec. pp. I-5383 et ss.)
  • [21]
    Dans l’arrêt « Matthews » du 18 février 1999, la Cour européenne des droits de l’homme avait qualifié le Parlement européen de « corps législatif » (CEDH, 18 février 1999, Matthews contre Royaume-Uni, req. n°24833/94). Cette qualification a fait l’objet de nombreuses critiques dans la doctrine. Il convient en effet de rappeler que le Parlement européen n’exerce pas seul la fonction législative dans l’Union européenne. Cette dernière est exercée dans certains cas par le Conseil, et dans d’autres cas par le Conseil et le Parlement agissant en commun. Précisons cependant que les régimes parlementaires des États membres admettent également, sous différents aspects, l’intervention de l’Exécutif dans le processus d’élaboration des lois (initiative, promulgation), voire la délégation du pouvoir législatif à l’organe exécutif (ordonnances de l’article 38 et de l’article 74-1 en France, décrets-lois et/ou décrets législatifs au Portugal, en Italie et en Espagne).
  • [22]
    H.L.A. Hart, op. cit., p. 252. « Dans la forme la plus élémentaire de société [à laquelle est assimilée le droit international], nous devons attendre pour voir si une règle se fait admettre comme règle ou non ; dans un système doté d’une règle fondamentale de reconnaissance, nous pouvons dire, avant qu’une règle soit effectivement édictée, qu’elle sera valide si elle satisfait aux conditions posées par la règle de reconnaissance », ibidem, pp. 252-253.
  • [23]
    Cf. notamment CJCE, 5 février 1963, Van Gend en Loos contre Administration fiscale néerlandaise, aff. 26/62, Rec. pp. 3 et ss. et CJCE, 15 juillet 1964, Flaminio Costa contre ENEL, aff. 6/64, Rec. pp. 1141 et ss.
  • [24]
    Cf. notamment P.-Y. Monjal, Recherches sur la hiérarchie des normes communautaires, Paris, L.G.D.J., 2000.
  • [25]
    Cf. également en ce sens F. E. Dowrick, « A model of the European Communities legal system », in Yearbook of European Law, 1983, p. 204 : « Its legal system remains coherent despite the co-existence of several contending sources of its law ».
  • [26]
    H.L.A. Hart, op. cit., p. 114 : « dans un système juridique développé, les règles de reconnaissances sont évidemment plus complexes ».
  • [27]
    « Dans les ordres juridiques modernes [la règle de reconnaissance] prend généralement l’apparence de la Constitution nationale » (A. Bailleux, « “Hart vs. Dworkin” and its Progeny. Actualité du “combat des chefs” dans la littérature anglo-saxonne », in R.I.E.J., 2007, n° 59, cité par I. Hachez, op. cit.)
  • [28]
    « The Court’s rulings on the validity or otherwise of secondary legislation and other acts of the Community organs is universally accepted as conclusive » (F. E. Dowrick, op. cit., p. 203).
  • [29]
    Ex-article 249 TCE
  • [30]
    Ex-article 12 TUE.
  • [31]
    Ex-article 34 §2 TUE.
  • [32]
    La coopération policière et judiciaire en matière pénale est rebaptisée « espace de liberté, de sécurité et de justice » par le Traité de Lisbonne.
  • [33]
    Le deuxième pilier était en effet considéré par certains auteurs comme le domaine de « l’action ou de la négociation, non pas celui de la norme » (C. Blumann, « Contribution du Traité d’Amsterdam à la transformation de la Communauté de droit en Union de droit », in J. Rideau (dir.), De la Communauté de droit à l’Union de droit. Continuités et avatars européens, Paris, L.G.D.J., 2000, p. 371).
  • [34]
    L. Benoît considérait ainsi la position commune comme « un instrument déclaratoire à vocation opérationnelle ne prévoyant pas de modalité d’exécution ». Plus généralement, selon l’auteur, les piliers intergouvernementaux avaient pour vocation d’« organiser une coopération […] qui n’a pas vocation à déboucher systématiquement sur des décisions obligatoires » (L. Benoit, Les piliers intergouvernementaux de la construction européenne. L’antagonisme des démarches de coopération et de communautarisation, Thèse pour le doctorat en droit, sous la direction du Professeur Jean Rossetto. Université François Rabelais, Tours, 2000, dact., pp. 48 et 31).
  • [35]
    Articles 24 §1 TUE et 31 §1 TUE modifiés par le Traité de Lisbonne.
  • [36]
    Article 24 TUE modifié par le Traité de Lisbonne.
  • [37]
    Ex-article 24 TUE.
  • [38]
    Article 191 §4 TFUE dans le domaine de l’environnement et article 211 TFUE dans le domaine de la coopération au développement.
  • [39]
    On distingue traditionnellement les actes atypiques prévus par les traités et ceux issus de la pratique des institutions. Cf. notamment C. Blumann et L. Dubouis, op. cit., pp. 544-545.
  • [40]
    Il considère ainsi que ces actes lient leur auteur pour l’adoption des actes individuels (cf. par exemple : TPICE, 17 décembre 1991, SA Hercules Chemicals NV contre Commission, aff. T-7/89, Rec. pp. II-1711 et ss., point 53 : « la Commission ne peut se départir des règles qu’elle s’est elle-même imposées »). Ces actes peuvent par ailleurs produire des effets contraignants à l’égard des États membres (voir par exemple CJCE, 31 mars 1971, Commission contre Conseil, aff. 22/70, Rec. pp. 263 et ss. : une « délibération » du Conseil déterminant l’attitude que doivent adopter les gouvernements des États membres dans les négociations de l’AETR a pour objet de « fixer une ligne de conduite obligatoire pour les institutions comme pour les États membres », point 53). Ces derniers sont en effet tenus d’appliquer des règles énoncées dans des lignes directrices, dès lors qu’ils les ont acceptées (CJCE, 15 octobre 1996, Ijssel-Vliet Combinatie BV contre Minister van Economische Zaken, aff. C-311/94, Rec. pp. I-05023 et ss. : « Il résulte de l’obligation de coopération découlant de l’article 93, paragraphe 1, du traité, d’une part, et de l’acceptation des règles énoncées dans les lignes directrices, d’autre part, qu’un État membre, tel le Royaume des Pays-Bas, est tenu d’appliquer les lignes directrices lorsqu’il adopte une décision à l’égard de la demande d’aide pour la construction d’un bateau destiné à la pêche », point 44. Voir également CJCE, 24 mars 1993, CIRFS contre Commission, aff. C-313/90, Rec. pp. 1125 et ss. à propos d’une « discipline » de la Commission acceptée par les États membres).
  • [41]
    Cf. les articles 149 TFUE (emploi), 156 TFUE (protection sociale), 168 TFUE (santé publique), 173 TFUE (industrie) et 181 TFUE (recherche).
  • [42]
    CJCE, 17 décembre 1970, Internationale Handelsgesellschaft GmbH contre Einfuhr - und Vorratsstelle für Getreide und Futtermittel, aff. 11/70, Rec. pp. 503 et ss.
  • [43]
    Article 6 §1 TUE modifié par le Traité de Lisbonne : « L’Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000, telle qu’adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg, laquelle a la même valeur juridique que les traités ».
  • [44]
    Cf. J.- P. Jacque, « Le Traité de Lisbonne. Une vue cavalière », in R.T.D.E., 2008, p. 452.
  • [45]
    Cf. le Protocole (n° 30) sur l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne à la Pologne et au Royaume-Uni. Le Conseil européen des 29 et 30 octobre 2009 a accepté que les dérogations s’appliquent également à la République tchèque.
  • [46]
    L’article 38 du statut de la CIJ notamment ne fait pas référence à une quelconque hiérarchie entre les sources qu’il évoque. Selon P. Daillier, M. Forteau et A. Pellet : « Il n’est pas possible de poser, en postulat général, que les traités l’emportent nécessairement sur la coutume ou inversement. Il en irait autrement si, par une procédure centralisée, l’une des sources disposait d’une primauté incontestée. L’état actuel de la société internationale, encore largement décentralisée, interdit une telle conclusion », Droit international public, Paris, L.G.D.J., 2009 (8e édition), p. 127.
  • [47]
    En France, les débats ont d’abord porté sur la question de la primauté du droit communautaire à l’égard de la loi nationale postérieure. Les juridictions internes s’étant finalement ralliées à la position de la Cour de justice (CE, 20 octobre 1989, Nicolo, Leb. pp. 190 et ss. ; Cass. ch. mixte, 24 mai 1975, Café J. Vabre), les désaccords portent aujourd’hui sur la place de la Constitution nationale (CE Ass., 30 octobre 1998, Sarran, Levacher e.a., Leb. pp. 368 et ss. ; Cass. ass. plén., 2 juin 2000, Melle Fraisse, in Recueil Dalloz, 2000, p. 865 ; Décision du Conseil constitutionnel n° 2004-505 DC du 19 novembre 2004, Traité établissant une Constitution pour l’Europe, considérant n°9).
  • [48]
    Il serait vain de prétendre lister tous les écrits portant sur ce thème. On mentionnera simplement P. Cassia, « Le juge administratif, la primauté du droit de l’Union européenne et la Constitution française », in R.F.D.A., n° 3, 2005, pp. 465-472 ; B. Genevois, « Le Conseil constitutionnel et la primauté du droit communautaire », in R.F.D.A., n° 2, 2005, pp. 239-241 ; D. Chamussy, « Le Conseil constitutionnel face à la primauté du droit communautaire », in A.J.D.A., n° 4, 2005, pp. 219-222 ainsi que O. Pfersmann, « La primauté : double, partiellement directe, organiquement indéterminée, provisoirement fermée », in Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 18, pp. 138-141.
  • [49]
    Cf. néanmoins P.-Y. Monjal, Recherches sur la hiérarchie des normes communautaires, Paris, L.G.D.J., 2000, 629 p. ; R. Bieber, I. Salome, « Hierarchy of norms in European law », in C.M.L.R., 1996, pp. 907-930 ; J. Dutheil de la Rochere, « La hiérarchie des normes », in Ph. Manin (dir.), La révision du Traité sur l’Union européenne, perspectives et réalités. Rapport du groupe français pour la Conférence intergouvernementale, Paris, Pedone, 1996, pp. 41-60 ; H. Gaudin, « Amsterdam : l’échec de la hiérarchie des normes ? », in R.T.D.E., n° 1, 1999, pp. 1-20 ; R. Mehdi, « La “double hiérarchie” normative à l’épreuve du projet de traité établissant une Constitution pour l’Union européenne », in Les dynamiques du droit européen en début de siècle. Études en l’honneur de Jean-Claude Gautron, Paris, Pedone, 2004, pp. 443-462 ; A. Tizzano, « La hiérarchie des normes communautaires », in R.M.C., 1995, pp. 219-232.
  • [50]
    A. Tizzano, « La hiérarchisation des normes », in J. Rideau, (dir.), De la Communauté de droit à l’Union de droit, op. cit., p. 157.
  • [51]
    TPI, 21 septembre 2005, Yusuf et Al Barakaat International Foundation contre Conseil et Commission, aff. T-306/01, Rec. 2005 pp. II-3533 et ss.
  • [52]
    La solution retenue pas le Tribunal a fait l’objet de critiques au sein de la doctrine. Cf. notamment D. Simon et F. Mariatte, « Le Tribunal de première instance des Communautés : Professeur de droit international ? À propos des arrêts Yusuf, Al Barakaat International Foundation et Kadi du 21 septembre 2005 », in Europe, n° 12, 2005.
  • [53]
    CJCE, 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation contre Conseil et Commission, aff. C-402/05 P et C-415/05 P, Rec. 2008, pp. I-6351 et ss.
  • [54]
    Contrairement aux principes généraux du droit administratif français qui ne lient pas le législateur.
  • [55]
    J. Roux, Droit général de l’Union européenne, Paris, Litec, 2008 (2e édition), p. 206.
  • [56]
    C. Blumann, L. Dubouis, Droit institutionnel de l’Union européenne, op. cit., p. 79. Dans la dernière édition de leur manuel, les auteurs considèrent cependant que les principes généraux du droit font partie du « socle constitutionnel » de l’Union.
  • [57]
    CJCE, 14 octobre 2004, Omega Spielhallen - und Automatenaufstellungs-GmbH contre Oberbürgermeisterin der Bundesstadt Bonn, aff. C-36/02, Rec. pp. I-9609 et ss.
  • [58]
    Le Traité instituant la Communauté européenne ne faisait pas apparaître de hiérarchie entre les différentes catégories d’actes de la nomenclature. Il se référait cependant à la « qualité de législateur » du Conseil (article 207 §3 TCE) et aux « compétences d’exécution » de la Commission (article 202, alinéa 4 TCE et article 211, alinéa 5 TCE).
  • [59]
    Cf. supra note 20.
  • [60]
    CJCE, 17 décembre 1970, Köster, aff. 25/70, Rec. pp. 1161 et ss.
  • [61]
    Cf. en ce qui concerne les règlements : CJCE, 17 décembre 1970, Köster précité ; en ce qui concerne les directives : CJCE, 25 janvier 1994, Angelopharm, aff. C-212/91, Rec. pp. 171 et ss ; en ce qui concerne les décisions : TPICE (Ord.), 27 janvier 2000, TAT European Airlines SA contre Commission, aff. T-49/97, Rec. pp. II-51 et ss. Pour plus d’éléments, cf. L. Guilloud, La loi dans l’Union européenne. Contribution à la définition des actes législatifs dans un ordre juridique d’intégration, L.G.D.J., 2010, tome 134, 589 p.
  • [62]
    CJCE, 27 septembre 1979, Spa Eridiana contre Ministre de l’agriculture et des forêts, aff. 230/78, Rec. pp. 2749 et ss., point 8.
  • [63]
    P. Deumier et Th. Revet, « Sources du droit », op. cit., p. 1432.
  • [64]
    L’expression est empruntée à J. Andriantsimbazovina, « Le Parlement européen, “corps législatif”. Banalisation hasardeuse ou évolution créatrice ? », in Mélanges en hommage à Guy Isaac. Cinquante ans de droit communautaire, Toulouse, Presses de l’Université des sciences sociales, 2004, p. 264.
  • [65]
    D. Rousseau, « Les Constitutions possibles pour l’Europe », in Cités, n° 13, 2003, p. 20.
  • [66]
    L. Favoreu, « L’euroscepticisme du droit constitutionnel. Rapport de synthèse de la journée d’études constitutionnelles du 28 mars 2003, maison de l’Europe : la “Constitution européenne” : une Constitution ? », in R.A.E., n° 6, 2001-2002, p. 701.
  • [67]
    L. Burgogue-Larsen, « Pourquoi une Constitution européenne ? », in R.A.E., ibidem, p. 670.
  • [68]
    J.- P. Jacque, Eléments pour une théorie de l’acte juridique en droit international public, Paris, L.G.D.J., 1972, p. 40.
  • [69]
    P.-Y. Monjal, « Lois et règlements », in Les mots de la Constitution européenne. Actes des journées d’études du Centre de recherche universitaire sur la construction européenne, Amiens, 12 décembre 2003 et 15 octobre 2004, Paris, P.U.F., 2005, pp. 119 et 129.
  • [70]
    Cf. L. Guilloud, « La réforme de la nomenclature des actes de l’Union européenne : le mirage de la simplification », in J. Pousson et F. Rueda, Qu’en est-il de la simplification du droit ?, Toulouse, Presses de l’Université de Toulouse, 2010, pp. 221-235.
  • [71]
    Articles 289 §1 TFUE et 294 TFUE.
  • [72]
    Article 223 §2 TFUE.
  • [73]
    Article 226, alinéa 3 TFUE.
  • [74]
    Article 228 §4 TFUE.
  • [75]
    Soulignons d’ailleurs que le Traité de Lisbonne consacre la compétence de principe des États membres pour mettre en œuvre le droit de l’Union. Ce n’est que « lorsque des conditions uniformes d’exécution des actes juridiquement contraignants de l’Union sont nécessaires, [que] ces actes confèrent des compétences d’exécution à la Commission ou, dans des cas spécifiques dûment justifiés […] au Conseil » (article 291 §2 TFUE).
  • [76]
    Cette pratique existait déjà dans le cadre des traités antérieurs, puisque le juge admettait dans certains cas que les actes d’exécution complètent voire dérogent à l’acte de base. Le Traité de Lisbonne ne fait que distinguer formellement l’exécution de la délégation du pouvoir législatif.
  • [77]
    Cf. C. Boyer-Merentier, Les ordonnances de l’article 38 de la Constitution du 4 octobre 1958, Paris, Economica, Aix-en-Provence, P.U.A.M., 1996, 416 p. Cf. également, du même auteur, « Les ordonnances de l’article 38 de la Constitution : une place ambiguë dans la hiérarchie des normes (propos autour du contentieux relatif aux ordonnances portant réforme de la sécurité sociale) », in R.F.D.A., n° 5, 1998, pp. 924-940.
  • [78]
    Cf. R. Mehdi et F. Picod, « Article I-33 », in L. Burgogue-Larsen, A. Levade, F. Picod, Traité établissant une Constitution pour l’Europe, commentaire article par article, Bruxelles, Bruylant, 2007, p. 453 : « on ne peut qu’être frappé par le caractère redondant des règlements délégués par rapport aux actes d’exécution ».
  • [79]
    C. Blumann, « Article I-35 », in Traité établissant une Constitution pour l’Europ…, ibidem, p. 469.
  • [80]
    L’article 44 TFUE prévoit ainsi que, dans le cadre de la politique agricole commune, lorsqu’un produit fait l’objet d’une organisation nationale du marché ou de toute réglementation interne d’effet équivalent, la Commission peut fixer une taxe compensatoire visant à rétablir l’équilibre des échanges. Elle est également compétente en matière de libre circulation des travailleurs pour adopter les mesures autorisant un ressortissant d’un État membre à demeurer sur le territoire d’un autre État membre après y avoir occupé un emploi (article 49 §3 d) TFUE). Elle peut, dans le cadre de la politique des transports, autoriser les États membres à adopter des mesures de soutien ou de protection en faveur des entreprises de transport (article 96 §1 TFUE). Elle dispose enfin de compétences non négligeables en matière de concurrence. En effet, l’article 106 §3 TFUE prévoit que « la Commission veille à l’application des dispositions du présent article et adresse, en tant que de besoin, les directives ou décisions appropriées aux États membres ».
  • [81]
    La pertinence de cette catégorie d’acte en droit interne a cependant été contestée cf. L. Favoreu, « Les règlements autonomes n’existent pas », in R.F.D.A., n° 6, 1987, pp. 871-884.

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