Couverture de INNO_054

Article de revue

Appropriation de technologies et développement durable : l’exemple de la viticulture de précision

Pages 97 à 122

Notes

  • [1]
    La vigueur de la vigne se définie par la grosseur des sarments de la vigne.
  • [2]
    Ces indices de végétation visent à estimer la surface au sol recouverte par des végétaux.
  • [3]
    Cette activité vise à raccourcir les sarments de vigne pour préparer leur taille.
  • [4]
    Comme expliqué dans la revue de littérature, l’enherbement a pour but de préserver les sols.

1À l’heure où les effets du changement climatique sont observés sur l’agriculture, l’agriculture de précision est considérée par certains chercheurs comme pouvant contribuer au développement durable en réduisant les impacts sur l’environnement tout en étant profitable économiquement (Bongiovanni, Lowenber-Deboer, 2004 ; Jullien, Huet 2005). Ces travaux se basent essentiellement sur les économies d’intrants réalisables, se focalisant sur les caractéristiques physiques et les fonctionnalités des technologies de viticulture de précision, oubliant que l’appropriation peut conditionner la bonne utilisation d’une technologie. Pour rendre compte de ces questions d’appropriation, nous avons associé à nos travaux en sciences de gestion les sciences cognitives et plus particulièrement l’ergonomie. La technologie peut ainsi être étudiée à travers le concept d’instrument composé d’un modèle d’utilisation, le schème, et d’un artefact, que nous considérons comme pourvoyeur de ressources. Nous avons voulu comprendre comment l’appropriation, à travers l’évolution du schème d’utilisation et de l’artefact, permettait de former des modèles d’utilisation axés sur le développement durable et d’améliorer les ressources que la technologie peut apporter dans cette démarche.

2Pour cela, nous examinerons dans un premier temps la littérature sur les technologies de viticulture de précision et sur les pratiques considérées comme durables en agriculture, pour nous concentrer par la suite sur la définition de la technologie et de son appropriation. Nous présenterons ensuite la méthodologie utilisée, il s’agit d’une méthodologie qualitative d’étude de plusieurs cas. Nous exposerons alors les résultats de nos enquêtes dans les exploitations vitivinicoles ayant adopté des technologies de viticulture de précision dans l’une ou l’autre des deux principales tâches où elles sont utilisées, la tâche de caractérisation de l’hétérogénéité et la tâche de modulation des itinéraires techniques. Puis nous interpréterons ces résultats à partir de notre grille d’analyse définissant l’appropriation des technologies de viticulture de précision dans des démarches de développement durable.

Revue de littérature

De l’agriculture durable à l’agriculture de précision

3En agriculture, le terme sustainaibility était présent dès le 18ème siècle dans le domaine de l’agroforesterie afin de mettre en évidence la contradiction entre des besoins humains à court terme et la gestion des ressources à long terme (Kuhlman, Farrington, 2010). Une définition précise et absolue de la sustainability est considérée comme impossible car complexe et nécessitant de faire appui au contexte en choisissant de définir ce qui doit être durable et pour combien de temps. En effet, pour Pretty (1995), la durabilité est en opposition avec le paradigme positiviste et l’uniformisation associée à l’agriculture conventionnelle. La durabilité devrait donc selon cet auteur prendre en compte l’hétérogénéité des milieux et des savoirs. Puisque nous nous focalisons sur l’aspect environnemental de la durabilité, les pratiques éco-durables (eco-sustainability practices) d’une entreprise sont celles qui ont pour but de minimiser la pollution, les déchets, d’améliorer la gestion de l’eau et de minimiser l’empreinte environnementale de l’entreprise (Hart, 1995). Dans le secteur agricole, beaucoup de termes sont apparus pour prendre en compte ces aspects environnementaux et se distinguer de l’agriculture moderne dite « conventionnelle », considérée comme intensive en technologie, mal adaptée au contexte naturel, menant à une standardisation des pratiques, une homogénéisation de l’environnement naturel et entraînant une perte de la biodiversité (Pretty, 1995). Cette agriculture conventionnelle est par ailleurs considérée comme plus polluante, entraînant des risques de santé publique, un gaspillage en eau et en énergie fossile, une érosion des sols, une inefficacité des produits phytosanitaires (Pretty, 1995 ; Stassart et al., 2012). Une agriculture durable peut inclure la protection de la biodiversité, la préservation de la qualité des sols et de l’eau, la lutte raisonnée contre les maladies et les pestes. La scénarisation (Aggeri, 2011) de l’agriculture permet de l’articuler dans différentes démarches comme l’agriculture raisonnée, l’agriculture biologique ou l’agriculture biodynamique. L’agriculture raisonnée peut se traduire en viticulture par des pratiques visant à optimiser le volume d’intrants, raisonner les actions sur les vignes en fonction des conditions climatiques et sanitaires, à limiter les apports en fertilisation et à utiliser les intrants chimiques le moins souvent possible, voir uniquement comme solution de secours (Delhomme, Ugaglia, 2011). L’enherbement, qui consiste à laisser pousser l’herbe entre les rangs de vigne, est également considéré comme une pratique de développement durable permettant de limiter l’érosion et la pollution des sols (Vallière et al., 2005 ; Delhomme, Ugaglia, 2011). L’agriculture biologique répond à un cahier des charges précis, imposant notamment l’utilisation d’engrais et de produits phytosanitaires organiques au lieu des produits de synthèse. Enfin, l’agriculture biodynamique met en avant des pratiques plus strictes que l’agriculture biologique, les produits autorisés étant moins nombreux, avec des applications plus réduites et suivant des principes associés aux « cycles naturels et au calendrier lunaire ». Ces trois agricultures peuvent être certifiées par un label pour être officiellement reconnues.

4Cependant une agriculture durable ne signifie pas forcément un retour à une agriculture à faible contenu technologique. Elle peut être accompagnée par l’utilisation de nouvelles technologies visant par exemple à modifier le dosage de l’épandage en temps réel, ou à repérer l’hétérogénéité des parcelles par photographies aériennes et GPS. Ces technologies sont à combiner avec des moyens pratiques plus « classiques » favorisant l’observation, comme l’analyse des sols et le tour de parcelles (Pretty, 1995). Ces technologies sont appelées technologies d’agriculture de précision.

L’agriculture de précision

5Le concept d’agriculture de précision vient des États Unis à la suite de travaux effectués dans les années 1980 sur un épandeur capable de moduler en cours d’intervention le mélange et le taux d’engrais, en tenant compte des cartes du sol pour évaluer les besoins en engrais (Jullien, Huet, 2005). L’agriculture de précision s’est développée de manière lente et inégale, notamment parce qu’elle est venue sur le marché dans une forme encore immature (Lowenberg-DeBoer, 2003). L’agriculture de précision est souvent définie comme une agriculture qui utilise des données spatialisées (Robert, 1999 ; Jullien, Huet, 2005 ; Tisseyre, 2012) à la fois dans la caractérisation de l’hétérogénéité et dans la modulation des itinéraires techniques (de Carvalho Pinto et al., 2007). Ainsi ces technologies peuvent être utiles pour réduire l’impact des pratiques agricoles sur l’environnement. En effet, des paramètres comme le potentiel de rendement, la qualité du sol, l’avancement des maladies doivent être connus pour minimiser cet impact. Ces paramètres peuvent être connus grâce à plusieurs indicateurs (pH et conductivité du sol, teneur en pigments ou structure de la végétation…) que peuvent aider à construire les informations récoltées par des capteurs faisant partie de ces technologies d’agriculture de précision (Cassman, 1999). Ces technologies, tout comme les pratiques d’agriculture durable, requièrent la compréhension des échelles spatio-temporelles par la prise en compte des buts et contextes, ainsi que de l’aspect multidimensionnel des cultures (agroclimat, type de sol, pratiques techniques, biodiversité, etc.). Ce lien entre agriculture de précision et développement durable est également mis en évidence par Bongiovanni et Lowenberg-DeBoer (2004), qui expliquent que l’agriculture de précision permet de mieux gérer l’apport d’intrants, bien qu’ils déplorent le manque d’étude à ce sujet. Elle permettrait de réduire l’impact environnemental de l’exploitation agricole en délivrant la quantité précise d’intrant au bon moment et au bon endroit (Sevila, 2001 ; Jullien, Huet 2005).

De la technologie à l’instrument

6Afin de comprendre l’apport de ces technologies, notamment par le biais de l’appropriation, il est nécessaire de définir le concept de « technologie » et d’« appropriation ». Pour éviter les écueils d’une analyse uniquement technocentrée ne prenant pas en compte l’aspect humain (Orlikowski, 2009), nous avons choisi de construire une approche anthropocentrée des technologies de viticulture de précision en nous focalisant sur la manière dont les individus s’approprient ces technologies. Pour prendre en compte la dimension à la fois matérielle et humaine de la technologie (Orlikowski, 2009), nous nous appuyons sur le concept d’instrument. L’instrument est composé d’artefact et d’un schème qui précise son usage (Rabardel, 1995 ; Beguin, Rabardel, 2000).

7L’artefact est une structure matérielle ou symbolique (ayant subie une transformation d’origine humaine, même minime, inscrite dans des activités finalisées). Cette structure et sa disposition dans l’environnement peuvent apporter des contraintes, de nouvelles opportunités (en autorisant ou non certaines opérations dans la réalisation des actions), conditionner la communication entre les individus ou la distribution des tâches et ouvrir des opportunités d’apprentissage (de Sanctis, Poole, 1994 ; Hutchins, 1995).

8Le schème est un modèle abstrait stable composé de buts et de règles pour guider l’action. Il reste néanmoins souple pour adapter plus facilement l’utilisation de l’instrument aux variations de situation (Beguin, Rabardel, 2000 ; Pastré et al., 2006). De Sanctis et Poole (1994) ont nommé « esprit de la technologie » le but (la tâche à réaliser) d’une technologie, ce pourquoi elle a été conçue. Cet esprit devant être interprété par les utilisateurs grâce au schème d’interprétation, nous considérons celui-ci comme la partie du schème d’utilisation reliant l’activité à sa finalité. La tâche à réaliser étant une finalité de l’action (de Montmollin, 1986).

L’appropriation

9L’appropriation résulte de l’évolution des interactions que l’individu développe avec l’artefact qui devient instrument (Jouët, 2000 ; Orlikowski, 2000 ; Oiry et al., 2010). Elle permet à l’utilisateur d’être acteur, de devenir un usager. L’appropriation est pour lui un moyen de créer des usages en fonction de ses besoins. En effet, l’individu peut faire plus que choisir la technologie, il peut choisir comment l’utiliser, parfois même d’une manière dont ses concepteurs ou les managers n’avaient pas pensé (Orlikowski, 2000 ; Aggeri, Labatut, 2010). Rabardel (1995) et Beguin et Rabardel (2000) ont mis en évidence deux processus qui forment la genèse instrumentale et permettent l’appropriation : l’instrumentalisation et l’instrumentation.

10L’instrumentalisation est une évolution de l’artefact. Beguin et Rabardel (2000) distinguent trois niveaux d’instrumentalisation. Le premier niveau est une instrumentalisation locale limitée dans le temps, une fonction réalisée de manière momentanée pour une action et son contexte, comme un échafaudage (Orlikowski, 2006) ou une adaptation qui permet d’adapter l’instrument aux caractéristiques de l’utilisateur (Akrich, 1998). Le deuxième niveau conserve et stabilise la fonction acquise pour qu’elle devienne une propriété de l’artefact, en lien avec une classe d’action. La customisation légère telle qu’Hutchins (1995) la définit permet par exemple d’adapter l’instrument pour économiser des efforts cognitifs par la mise en valeur ou l’obstruction de certaines affordances. Le troisième niveau d’instrumentalisation a lieu quand les fonctions acquises modifient le fonctionnement de l’artefact. Il peut également consister à modifier l’artefact dans sa structure, lorsque par exemple la customisation devient plus lourde et revient à choisir les composantes de différents fournisseurs pour les configurer dans un mélange d’éléments standardisés et customisés (Williams, Edge, 1996) allant jusqu’à la co-configuration, c’est-à-dire une production nécessitant des relations d’échanges continus avec les utilisateurs et une customisation sur le long terme (Engeström, 2004). C’est également le cas de l’extension, permettant de garder plus ou moins la forme et les usages de l’instrument en lui ajoutant des éléments pour étendre son éventail de fonctions (Akrich, 1998). Ce niveau d’instrumentalisation peut aussi consister en un ajout d’artefacts périphériques (Jouët, 2000).

11L’instrumentation se définit à l’inverse comme l’évolution des schèmes. De Sanctis et Poole (1994) ainsi qu’Hutchins (1995) ont mis en évidence le développement avec l’expérience de la coordination des individus avec leur environnement, notamment la coordination apportée par les schèmes d’utilisation d’un instrument. Les schèmes d’utilisation interagissent avec les routines (ou les schèmes chez Rabardel) préexistantes (Jouët, 2000). Il y a appropriation quand nous choisissons d’appliquer un pattern d’action, de le reproduire ou le faire évoluer (Orlikowski, 1992 ; de Sanctis, Poole, 1994). Ainsi, il peut parfois y avoir une différence entre les schèmes d’utilisation prévus par les concepteurs ou managers et ceux mis en œuvre par les utilisateurs (Labatut et al. 2012). Ces interprétations divergentes peuvent s’illustrer ici par des exemples donnés par Akrich (1998), le déplacement et le détournement. L’utilisateur peut faire un déplacement des utilisations du produit par rapport à ce pourquoi il avait été conçu à l’origine, tout en s’appuyant sur ses fonctionnalités, à l’instar de l’exemple du sèche-cheveux utilisé pour faire sécher un vernis. Une alternative, le détournement (aussi appelé catachrèse par Beguin et Rabardel, 2000) est effectué lorsque l’utilisateur se sert du produit pour un usage complètement différent de ce pourquoi il a été créé. Quand ces schèmes ou structures sont stabilisés, ils peuvent être pérennisés dans le temps et moins sujet à des conflits d’interprétation. Il s’agit de ce que de Sanctis et Poole (1994) appellent la structuration. Son institutionnalisation correspond en plus de sa stabilisation temporelle à sa stabilisation spatiale (Giddens, 1984) à plus grande échelle, que nous pourrions considérer comme collective ou organisationnelle.

12Ces différents travaux vont nous servir de trame pour analyser l’appropriation des technologies de viticulture de précision dans les cas que nous allons présenter.

Méthodologie et présentation des cas

Méthodologie

13Nous avons utilisé une méthodologie qualitative d’étude de cas correspondant à des entreprises vitivinicoles sélectionnées pour leur introduction de technologies de viticulture de précision visant une conduite durable de la vigne. Trouver des exploitations utilisant ce type de technologie s’est révélé difficile. Nous avons réussi à nous constituer un échantillon en contactant des individus ayant assisté à des conférences sur les nouvelles technologies en agriculture. Devant la difficulté de trouver des entreprises utilisant ce type de technologie, nous n’avons pu faire le choix d’un échantillon de cas avec des critères prédéfinis. Nous avons fait le choix de tirer parti de l’hétérogénéité de notre échantillon, tant en termes d’instrument utilisés que de type d’entreprise. Notre démarche nous a poussés à chercher les éventuelles similitudes que pouvaient présenter des cas aussi différents. Nous avons d’abord procédé à une recherche documentaire sur les exploitations sélectionnées et sur les technologies de viticulture de précision utilisées. Nous avons ensuite procédé à une phase d’entretiens semi-directifs en interviewant au total sept personnes. Puis, nous avons réalisé une analyse intra-cas, avant de procéder à une analyse inter-cas, avec un premier codage manuel et un second sous N’vivo 10. Le codage s’est dans un premier temps appuyé sur une liste de codes préétablie issue de la revue de littérature et s’est progressivement étendue lors de l’analyse, en partie grâce à des codes in vivo. Certaines données ne sont pas précisées afin de préserver l’anonymat des entreprises participantes. Nous avons au final étudié 5 cas venant de 2 régions différentes.

Présentation des cas

14L’exploitation I s’étend sur 360 ha et emploie l’équivalent de 123 salariés en prenant en charge toutes les opérations de fabrication du vin. Elle s’est engagée depuis 2005 dans des démarches de développement durable et les certifications ISO 14001 et 22000. L’analyse portera ici sur l’utilisation d’un capteur de vigueur [1] afin de cartographier et d’estimer la croissance de la vigne.

15L’exploitation J appartient au même groupe que l’exploitation I. Elle couvre environ 1150 hectares et emploie 1300 salariés. L’exploitation est engagée dans une démarche de développement durable certifiée. L’analyse portera sur le même capteur de vigueur que dans l’exploitation I.

16L’exploitation A est composée de 9 hectares. Il s’agit d’un domaine familial tenu par 3 associés dont un gérant et qui emploie un salarié à temps complet ainsi que des saisonniers. Elle vinifie et commercialise la majorité de sa production en son nom propre. Elle est engagée depuis 2010 dans une démarche de biodynamie. Elle utilise un DPAE (débit proportionnel à l’avancement électronique). Il s’agit d’un ordinateur de bord qui contrôle la quantité exacte de produit distribué pour chaque hectare, indépendamment de la vitesse d’avancement du tracteur.

17L’exploitation F gère 41 ha, emploie 25 personnes, prend en charge toutes les opérations de la chaine technique du vin, de la vigne jusqu’à la commercialisation. Elle a obtenu la certification ISO 14001. Depuis 2010, l’exploitation utilise des produits phytosanitaires moins agressifs et plus ciblés et choisi du matériel agricole plus efficace afin de réduire les doses d’intrants. Pour limiter les apports de soufre et de cuivre présents en agriculture biologique, des expérimentations sont menées en biodynamie sans labellisation depuis 4 ans sur quelques parcelles. L’exploitation a acheté un drone et a changé de modèle pour des prises de vue de meilleure qualité.

18La cave coopérative Y regroupe 184 agriculteurs sur 1870 hectares divisés en 18 domaines. Elle emploie 91 salariés et gère toute la partie vinification et commercialisation du vin ainsi que 3 vignobles en propre pour 140 hectares. La cave est engagée depuis 2005 dans une démarche de viticulture raisonnée, notamment à travers une politique de labellisation de ses vignes selon les normes ISO 14 001 et 26 000. En 2013, un partenariat de recherche a permis de faire survoler par un drone un des domaines de la coopérative et d’appliquer ces données sur une machine pour adapter les doses de fertilisants. En 2014, le survol des vignes pour recueillir ces indices de végétation [2] a été effectué sur l’ensemble des parcelles de la coopérative en faisant appel à un avion. Elle utilise également depuis 2014 une machine à vendanger triant automatiquement la récolte des raisins à partir de ces cartographies et d’un système embarqué d’acquisition géolocalisée des données. Enfin, elle a testé en 2014 une machine à épandage automatique d’engrais basée sur le même type de fonctionnement et est porteuse d’un partenariat de recherche et développement pour la conception d’un système d’épandage incluant d’autres types d’intrants.

19Nous présentons ici un tableau récapitulatif des différents cas analysés.

Tableau 1

Synthèse des cas

Tableau 1
Cas Technologie de viticulture de précision Démarches environnementales Exploitation I Capteur de vigueur - Certifications ISO 14001 et 22000, optimisation de la gestion de l’eau et d’énergie, tri sélectif des déchets, réduction d’emballages - Production viticole : enherbement, désherbage mécanique entre les rangs de vignes, utilisation d’engrais organiques avec exclusion progressive des herbicides Exploitation J Capteur de vigueur - Certifications ISO 14001 et 22000, projet de certification, diagnostic énergie, tri et valorisation des déchets, réduction des emballages - Enherbement, matériel de pulvérisation plus propre, diminution de la consommation des herbicides Exploitation A DPAE - Viticulture biodynamique labellisée Déméter Exploitation F Drone avec caméra - Certifications ISO 14001, réduction de la consommation d’eau et d’électricité - Expérimentation en biodynamie Coopérative Y Service de cartographie, Machine à vendanger Système d’épandage - Labellisation normes ISO 14001 et 26000, achats responsables, réduction des emballages, politique de préservation de la biodiversité, réhabilitation des haies. - Utilisation d’engrais organique, enherbement

Synthèse des cas

Résultats

Présentation des artefacts et de leurs évolutions

20Dans chacun des cas analysés, nous avons constaté que les instruments de viticulture de précision utilisés présentent tous, malgré leurs différences, la particularité d’être un ensemble d’artefacts apportant les mêmes types de ressources, présentées dans le tableau n° 2.

Tableau 2

Les ressources apportées par les artefacts*

Tableau 2
Ressources Exploitation I Exploitation J Exploitation A Exploitation F Coopérative Y Moyen d’acquisition des données Capteur composé d’émetteur et récepteur Capteur composé d’émetteur et récepteur Capteur de vitesse, Compteur de cuve, Ordinateur de bord (données pré-enregistrées) Caméra Capteur* Moyen de localisation des données GPS GPS GPS GPS GPS* Moyen de locomotion ou de fixation Tracteur Tracteur Tracteur Drone et manette Drone (2013)*, avion (2014)*, satellite (2015)*, machine à vendanger Moyen de visualiser les données Ordinateur de bord, ordinateur Ordinateur Ordinateur de bord Ordinateur et logiciel Ordinateur de bord, ordinateur Moyen de stocker les données Clé USB, ordinateur Clé USB, ordinateur Ordinateur de bord, carte mémoire Carte SD et ordinateur Carte mémoire, ordinateur Moyen de transférer les données EDI, internet EDI, internet EDI (Bus CAN) Pilotage par radiocommande, carte SD EDI, internet Moyen de traiter et d’analyser les données Ordinateur, logiciels Ordinateur, logiciels Ordinateur de bord (SIG) Ordinateur, logiciel Ordinateur, logiciels

Les ressources apportées par les artefacts*

* matériel qui n’appartient pas à l’exploitation ou la coopérative

21L’instrumentalisation peut être réalisée par le concepteur grâce aux retours des utilisateurs (cas I, J, Y), ou par l’entreprise utilisatrice elle-même (cas I, J, dans une moindre mesure cas Y, F, A). À ce propos, il est important de distinguer deux types de logiques liées à l’utilisation et l’instrumentalisation des artefacts : selon qu’ils sont utilisés durant leur phase d’expérimentation (coopérative Y), où bien déjà commercialisés (cas F, I, J, A). En effet, l’instrumentalisation réalisée dans la phase de développement va impliquer des évolutions qui n’impacteront pas uniquement l’entreprise concernée mais aussi les futurs utilisateurs de l’instrument en cours de développement.

22La plupart des instrumentalisations effectuées par les utilisateurs peuvent être considérées de « premier niveau », c’est-à-dire qu’elles sont locales, limitées dans le temps et réversibles, comme le montage et démontages des cellules du capteur (exploitation I et J), l’abandon de la tablette au profit de la manette pour piloter le drone (exploitation F) ou l’étape de paramétrage dans les cas A et Y (tâche de modulation des intrants et des vendanges).

23Mais des instrumentalisations sont également de deuxième niveau et peuvent concerner les montages des capteurs sur les tracteurs ou les choix de traitement des données. Le montage du capteur n’entraîne pas d’évolution de la structure physique du capteur ou du tracteur, mais modifie uniquement la manière dont ils sont rattachés l’un à l’autre.

24Le troisième niveau d’instrumentalisation concerne essentiellement l’extension de l’artefact grâce à la création de bases de données construites lors de l’instrumentation. Il peut aussi impliquer l’utilisation d’artefacts périphériques comme un scarificateur d’herbe, des électrovannes.

25Nous avons choisi de ne pas indiquer l’utilisation des logiciels de traitement ou de lecture des données dans les extensions car ils sont de fait intégrés à l’utilisation des capteurs et caméras pour traiter ou visualiser les données et font donc partie des artefacts étudiés. Il en va de même pour l’utilisation des tracteurs, indispensable aux capteurs embarqués. Nous pouvons remarquer que chaque exploitation crée une base de données à partir des données acquises et traitées, que l’on peut considérer comme une extension des artefacts puisqu’ils sont créés à partir d’eux et vont modifier l’analyse des prochaines données acquises.

26Le tableau n° 3 précise ces différents niveaux d’instrumentalisation dans les cas étudiés.

Tableau 3

L’instrumentalisation

Tableau 3
Instrumentalisation Exploitation I Exploitation J Exploitation A Exploitation F Coopérative Y Échafaudage/adaptation Montage et démontage des cellules du capteur Montage et démontage des cellules du capteur Pré-enregistrement des données Abandon de la tablette Évolution du choix du moyen de locomotion (pour les données de la cartographie) Enregistrement de la cartographie dans la vendangeuse et l’épandeur, des données dans le DPAE Customisation et deuxième niveau Montage (position, caches), choix du traitement des données Montage (position, caches), choix du traitement des données / Changement de drone Choix du traitement des données Extension et ajout autre artefact, et création de bases de données Bientôt scarificateur d’herbe, base de données Base de données Électrovannes, base de données Base de données DPAE, évolution en cours du choix de l’épandeur, base de données Ressources apportées par l’instrumentalisation Amélioration du moyen d’acquisition des données, du moyen de traiter les données (éventuellement ajout d’un moyen d’action) Amélioration du moyen d’acquisition des données, du moyen de traiter les données Amélioration du moyen de traiter les données et ajout d’un moyen d’action Amélioration du moyen d’acquisition des données et de transfert des données (commande du drone) Amélioration du moyen d’acquisition des données et de locomotion, du moyen de traitement des données ajout d’un moyen d’action. Moyens d’action sur l’hétérogénéité apportés par ces trois niveaux (éventuellement ajout d’un moyen d’action sur l’hétérogénéité grâce à l’ajout d’une pré-tailleuse) / Électrovannes / Vendangeuse (tête de récolte, table de tri, bacs) et épandeuse en test (vannes automatiques…)

L’instrumentalisation

Présentation des schèmes d’utilisation

27Nous avons noté que l’utilisation de ces technologies de viticulture de précision pouvait être liée à deux tâches différentes, une tâche de caractérisation de l’hétérogénéité des parcelles (cas I, J, F et Y pour le service de cartographie) et une tâche de modulation des itinéraires techniques, c’est-à-dire de l’ensemble des actions menées sur la vigne ou son environnement (cas A, cas Y pour l’épandage et la fertilisation). La caractérisation et la modulation des itinéraires techniques peuvent se faire avec ou sans les technologies de viticulture de précision. Chaque tâche est divisée en plusieurs étapes chacune créant un output qui devient l’input de l’étape suivante. Par ailleurs, la tâche de modulation des itinéraires techniques peut se réaliser après la caractérisation de l’hétérogénéité. Si la caractérisation est erronée, la modulation des itinéraires sera inadéquate. Ainsi, les outputs de la tâche de caractérisation sont présents dans le paramétrage des machines de la tâche de modulation.

Tâche de caractérisation de l’hétérogénéité

28Les exploitations I et J utilisant le même capteur de vigueur, ont un schème proche, différent de celui de l’exploitation F et de la coopérative Y, que nous présentons dans le tableau 4.

Tableau 4

Le schème de la tâche de caractérisation de l’hétérogénéité

Tableau 4
Étapes Exploitation I Exploitation J Exploitation F Coopérative Y Montage Réalisé en 2014 par un concessionnaire puis en 2015 par les tractoristes les plus expérimentés de l’exploitation Réalisé en interne en 2012 par un tractoriste travaillant avec le service R&D Les années 2013 et 2014, par des tractoristes non identifiés et sans suivi Effectué en 2015 par le responsable du garage de l’exploitation Non concernées Acquisition des données Réalisée par les tractoristes les plus expérimentés en hiver pendant le pré-taillage de la vigne Par un seul tractoriste en 2012 Réalisée en 2013 et 2014 par plusieurs utilisateurs non identifiés et non suivis une multiplication des utilisateurs non identifiés et peu suivis En 2015, les utilisateurs sont choisis et identifiés Réalisée par le directeur de l’exploitation, le directeur technique ou la chef de culture Effectuée en externe par un fournisseur de service Transmission des données Réalisée à la fin de chaque journée par le tractoriste qui apporte la clé USB stockant toutes les données du capteur à son supérieur hiérarchique, celui-ci les transmettant par mail au directeur adjoint Dès 2013, le supérieur hiérarchique récupère la clé USB sur le tracteur pour envoyer les données par mail au stagiaire réalisant les traitements des données Non concernées Traitement des données Effectué en 2014 par le directeur adjoint À partir de 2015 par la chargée de gestion de l’exploitation Réalisé en 2012 par l’ingénieure R&D et les années suivantes par un ingénieur stagiaire Réalisée par la ou les personnes ayant participé à l’acquisition des données Réalisée par l’assistante du responsable innovation Analyse des données Confrontation collective des cartographies durant des réunions impliquant le directeur adjoint, les chefs de secteur et contremaîtres, les tractoristes, les vignerons manuels et le chargé d’expérimentation Les personnes invitées aux réunions varient selon les secteurs, elles peuvent être concentrées vers les chefs de secteurs, mais peuvent parfois aussi intégrer les chefs d’équipe et les tractoristes selon les secteurs L’analyse et la prise de décision peuvent être réalisées par les mêmes personnes ayant effectué les autres étapes Réalisée par le responsable de l’innovation pour interpréter les données en vue de préconisations agronomiques Prise de décision / zonage L’analyse peut être séparée de la prise de décision si elle intègre d’autres personnes pour des décisions plus stratégiques, comme la préparation des vendanges qui demande d’inclure le maître de chai Il discute ces résultats avec chaque chef d’exploitation Utilisation des cartographies dans les domaines en propre par l’œnologue et la responsable du service vigne

Le schème de la tâche de caractérisation de l’hétérogénéité

29Dans les exploitations I et J, l’étape du montage du capteur sur le tracteur est très importante pour la bonne acquisition des données, ce montage n’étant pas présent dans les autres cas.

30L’étape de l’acquisition des données est réalisée en interne dans ces cas I, J et F et par un prestataire externe pour la coopérative Y. Dans les cas I et J, l’acquisition des données présente la particularité d’être faite pendant l’activité des tractoristes, le pré-taillage de la vigne [3].

31L’étape de transmission des données est importante dans les exploitations I et J pour la fiabilité des données à traiter, manipulées par plusieurs personnes, impliquant alors un risque élevé de perte en fiabilité. La transmission des données n’a pas autant d’importance dans le cas Y où le prestataire transmet les données et dans le cas F où le même utilisateur peut acquérir les données et les insérer dans l’ordinateur pour les analyser, c’est pourquoi la transmission des données ne figure pas parmi les étapes.

32Le traitement des données est réalisé en interne pour les quatre cas, même si une partie du traitement est déjà réalisée en externe dans le cas Y. Les exploitations I, J et Y utilisent le même logiciel de cartographie et ont bénéficié de formations au traitement des données. Au contraire, dans l’exploitation F, le traitement des données est réalisé par visualisation et assemblage des photographies et ne nécessite pas de formation particulière.

33Une fois traitées statistiquement, les données doivent ensuite être interprétées pour être transformées en informations utiles aux décisions. Dans les exploitations I et J, l’analyse des données est réalisée en même temps que la prise de décision de zonage, c’est-à-dire le découpage des parcelles en fonction du degré d’hétérogénéité choisi. Les réunions où sont confrontées les cartographies aux autres données et aux connaissances des salariés vont donc également permettre de prendre des décisions sur le zonage, l’utilisation du capteur ainsi que les éventuelles modulations des itinéraires techniques. Dans l’exploitation F, selon les situations et les finalités, l’analyse peut être séparée de la prise de décision, si elle intègre les autres utilisateurs potentiels du drone pour des prises de décisions plus stratégiques, comme précisé dans le tableau 4. Dans la coopérative Y l’analyse de la cartographie a pour but de faciliter la prise de décision d’autres acteurs, notamment les chefs d’exploitations.

Tâche de modulation des itinéraires techniques

34La tâche de modulation des itinéraires techniques concerne dans nos cas la modulation des intrants (cas A et Y) ou la modulation des vendanges (cas Y). Elle est composée de trois étapes.

Tableau 5

Le schème de la tâche de modulation des itinéraires techniques

Tableau 5
Étapes Exploitation A Coopérative Y - intrants Coopérative Y - vendanges Paramétrage Les choix liés au paramétrage se font durant cette étape par le chef d’exploitation qui utilise le tracteur Données enregistrées sous forme numéraire par cette personne Les choix liés au paramétrage se font durant cette étape par le responsable innovation Données enregistrées par le tractoriste sous forme numéraire et cartographique Les choix liés au paramétrage se font durant cette étape par le responsable innovation Cartographie enregistrée par le tractoriste Application des intrants ou sélection des raisins Les paramétrages, ainsi que les données acquises en temps réel par les moyens d’acquisition des données (capteurs), vont être traités (moyen de traitement) et transmises (moyen de transmission des données) automatiquement aux moyens d’agir. Le chef d’exploitation (cas A) ou le tractoriste (cas Y) est essentiellement tourné vers la conduite du moyen de locomotion. Il peut moduler manuellement le traitement en fonction des informations apparaissant sur les tableaux de bords et de ses observations, bien que celles-ci restent difficiles à faire depuis la cabine Les cartographies enregistrées ainsi que les données acquises et traitées en temps réel sont transmises automatiquement à la tête de tri des raisins (moyen d’agir). Le tractoriste n’intervient pas directement dans la sélection des raisins Amélioration du paramétrage Les nouvelles données acquises (par capteur ou observation du conducteur) permettent d’améliorer les paramétrages liés à l’application des intrants pour le prochain passage avec le tracteur, d’inscrire ces données dans le logiciel de gestion et de traçabilité de l’entreprise En plus de ce qui est déjà pratiqué dans l’exploitation A, les données acquises peuvent aider à améliorer après coup la cartographie réalisée grâce aux drones En plus de ce qui est déjà pratiqué dans l’exploitation A, la vendangeuse incluant un moyen d’acquisition et de traitement des données plus sophistiqués, elle crée de manière simultanée une cartographie qui pourra être corrigée et traitée par la suite

Le schème de la tâche de modulation des itinéraires techniques

35Dans l’étape du paramétrage, les données enregistrées peuvent avoir plusieurs sources : elles peuvent être issues de la tâche de caractérisation de la vigne (coopérative Y), mais aussi de résultats d’analyse, du logiciel de traçabilité.

36Les moyens offerts par les artefacts durant cette étape sont les mêmes. La seule particularité réside dans la forme des données enregistrées. Pour la tâche de modulation des intrants dans l’exploitation A et dans la coopérative Y, les données sont sous forme numéraire. Pour la tâche de modulation des vendanges (coopérative Y), elles sont également sous forme cartographique. Un autre individu que le tractoriste est donc associé à l’étape du paramétrage : le responsable innovation qui détient les savoir-faire statistiques et de gestion des données liés à la manipulation des données cartographiques. Le tractoriste lui, va enregistrer directement les données liées aux types d’intrants.

37Vient ensuite l’étape d’application des intrants, qui peut être réalisée automatiquement grâce aux données enregistrées durant le paramétrage ou grâce à des données collectées en temps réel par des capteurs. Le tractoriste peut aussi lui-même changer manuellement la dose d’intrant en fonction des observations qu’il peut faire lors de la conduite de l’engin agricole.

38Enfin, une fois que les nouvelles données collectées sont récupérées, elles peuvent être visualisées et permettent d’améliorer les paramétrages pour la prochaine application d’intrants. Au sein de la coopérative Y, les données récupérées peuvent également permettre au responsable innovation de compléter la cartographie réalisée lors de la tâche de caractérisation.

L’instrumentation

Évolution des acteurs

39L’instrumentation consiste dans l’exploitation I en une internalisation de l’étape du montage ainsi qu’à une décentralisation du traitement des données. Le directeur adjoint de l’exploitation I a sélectionné un nombre réduit de personnes pour se constituer une équipe de travail. Cette sélection s’est basée sur leur expérience, leurs savoirs, savoir-faire et savoir-être et est accompagnée d’une phase de formation et sensibilisation des salariés à l’intérêt de ce capteur. Cela s’est également étendu aux managers supervisant les vignerons et tractoristes : les chefs de secteurs et le management intermédiaire, les contremaîtres. Par ailleurs, l’ensemble des salariés ayant participé à l’utilisation du capteur a été intégré à la prise de décision finale sur l’interprétation des données et le zonage. Ces précautions ont permis une rapide stabilisation du schème d’utilisation du capteur.

40Dans l’exploitation J, l’achat et la première utilisation du capteur en 2012 est faite au sein du service recherche et développement, une équipe restreinte agissant sur des parcelles clairement identifiée avec un protocole très précis. Les premiers résultats étant prometteurs, l’utilisation du capteur a été transmise au service opérationnel, mais avec des résultats décevants. En effet, le transfert vers les services opérationnels s’est accompagné d’une multiplication des utilisateurs, ceux-ci n’ayant pas été soigneusement sélectionnés, ni même clairement identifiés. Les montages et l’utilisation des capteurs étaient différents d’une parcelle à l’autre, entraînant une acquisition des données de qualité inégale. Les salariés n’ont pas été formés ou sensibilisés aux différents soins à apporter au capteur, ce qui a provoqué une dégradation du matériel. Par ailleurs, la personne qui chapeaute l’utilisation du capteur et qui réalise le traitement des données dans ce service est un stagiaire, qui n’est jamais le même d’une année sur l’autre. Cela nuit donc à une certaine stabilité du schème d’utilisation. Avec l’arrivée d’un nouveau stagiaire destiné à résoudre les disfonctionnements, l’année 2015 marque une reprise en main de l’utilisation du capteur. Le montage des capteurs est désormais effectué par une seule personne. La phase d’acquisition des données a été proposée aux utilisateurs et leurs managers les plus motivés. Cela s’est accompagné de formations à l’acquisition des données, à l’entretien du capteur et au transfert des données. Même si les données acquises sont désormais plus fiables, une autre question se pose sur l’étape d’analyse des données et du zonage. En effet, selon le style de management des chefs de secteur, la délibération peut inclure les chefs d’équipe (équivalents des contremaîtres de l’exploitation I), ou inclure les vignerons et tractoristes. Cependant, il a été observé que le style participatif incluant tous les salariés ayant participé à l’utilisation du capteur motivaient d’avantage les individus, qui pouvaient prendre part aux décisions. Il facilitait une plus grande efficacité d’utilisation car la motivation des individus est l’un des moteurs les plus importants de la bonne utilisation des capteurs dans cette exploitation.

41Dans l’exploitation A, l’utilisation du tracteur restant dévolue à l’un des chefs d’exploitation, ce dernier est le seul utilisateur du DPAE. Enfin, dans la coopérative Y et l’exploitation F, l’évolution des personnes impliquées dépend de la finalité d’utilisation de la technologie, que nous allons expliquer dans le point suivant.

L’évolution de la tâche

42L’évolution du schème peut aussi être liée à l’évolution de la finalité, la tâche, ou de l’interprétation de l’esprit de la technologie (de Sanctis, Poole, 1994). Ces deux exploitations sont ici très différentes. Dans l’exploitation I, l’acquisition du capteur a été réalisée dans un but clair : accorder les pratiques agricoles durables avec une meilleure qualité des vins. Mais ce but a dérivé pour faire des expérimentations supplémentaires et mieux comprendre le comportement de la vigne de manière générale. Au contraire, dans l’exploitation J, l’utilisation du capteur s’est clairement inscrit dans une démarche R&D qui vise à comprendre comment le capteur peut être utilisé avant de voir quels bénéfices il est possible d’en retirer.

43Dans l’exploitation A, le DPAE est utilisé essentiellement pour contrôler les doses de cuivre afin de respecter la certification en biodynamie, mais son utilisation a également été dérivée pour permettre de repérer l’interruption du traitement lors de pannes de tracteur.

44Dans l’exploitation F comme pour la coopérative Y, la diversité des personnes impliquées peut dépendre en partie du type d’objectifs visé par le diagnostic. Par exemple, l’œnologue ne sera pas inclus dans la tâche si le drone est utilisé pour une veille sanitaire des parcelles.

45Chez la coopérative Y le diagnostic peut servir soit à aider les chefs d’exploitation à moduler la conduite de leur vigne (notamment dans la gestion des intrants), soit à anticiper les vendanges. Cela implique donc des personnes différentes dans la prise de décision du zonage, comme précisé dans le point 3.2.1. L’utilisation de la vendangeuse est destinée à accroitre la qualité des vins alors que la machine à épandre était essentiellement utilisée pour l’application de la fertilisation avant d’envisager de stopper son utilisation en 2015 pour évoluer vers un projet européen de développement d’un appareil de modulation d’intrants phytosanitaires en général.

46L’exploitation F utilise une caméra pour acquérir des données sous forme d’image et de films et non sous forme d’indicateurs et données numériques. Son utilisation n’est donc pas uniquement dédiée à un aspect de la production, mais peut dépendre des préoccupations du moment : préparation des vendanges, prévention des maladies, ajustement des doses de fertilisation et autres produits phytosanitaires, observation des essais en biodynamie. Le drone peut même être utilisé pour un usage autre que la viticulture comme par exemple, caractériser les dégâts de la tempête sur les bâtiments de l’exploitation. Cette variabilité d’usages permet une grande flexibilité parmi les personnes pouvant être impliquées dans son utilisation.

Stabilisation

47Toutes les personnes interrogées ont fait part de leur volonté de prendre régulièrement du recul par rapport à l’utilisation des technologies de viticulture de précision. Il s’agit de bien définir les finalités (la tâche), les besoins (objectifs de production), le schème d’utilisation de l’artefact. Dans l’exploitation I, cette prise de recul se fait de manière collective avec les vignerons. Au sein de l’exploitation J, et F elle est surtout réalisée entre managers de différents secteurs pour qu’ils aient une interprétation commune des données.

48Toutes les entreprises concernées par la tâche de caractérisation de l’hétérogénéité partagent une volonté de simplifier le zonage. En effet, les utilisateurs recherchent un zonage facile à mettre en œuvre, ce qui signifie qu’il n’est pas forcément le plus précis. Dans l’exploitation A, le schème d’utilisation du DPAE s’est rapidement stabilisé et s’améliore progressivement grâce au peaufinage du paramétrage. Cette stabilisation est également présente dans la coopérative Y pour la modulation des vendanges, puisque le prototype de vendangeuse qui était au préalablement testé dans le cadre d’un projet R&D a finalement été acheté par la coopérative. La stabilisation est sur le point de se finaliser dans les exploitations I et F et dans la coopérative Y pour la tâche de caractérisation. Par ailleurs, l’exploitation F cherche à structurer son traitement des données. La structuration du schème est en cours dans l’exploitation J et elle est encore à redéfinir dans la coopérative Y pour la tâche de modulation des intrants. Ce manque de stabilisation est lié à son instrumentalisation. En effet, l’évolution de l’artefact peut entraîner une évolution du schème d’utilisation. Par exemple, l’évolution du montage (cas I) peut entraîner une internalisation du montage qui était d’abord réalisé par un prestataire. De la même manière, l’évolution du schème d’utilisation peut conduire à une modification plus ou moins importante de l’artefact (amélioration du paramétrage, construction de bases de données, voir dans le cas Y modification de l’artefact pour prendre en compte un objectif d’utilisation plus large de l’épandeuse).

Discussion

Le respect des principes de durabilité

49Les entreprises I, A, F et Y, qui s’approprient le mieux les technologies de viticulture de précision ont associé leur utilisation aux principes de durabilité énoncés par Pretty (2005). Ces principes concernent l’utilisation d’intrants naturels, la réduction de l’utilisation des ressources non renouvelables, l’appui sur les connaissances des agriculteurs et la capacité de travailler ensemble pour résoudre des problèmes naturels.

501) L’utilisation de ces technologies est associée à des procédés et intrants naturels comme l’utilisation de fertilisants organiques plutôt que de synthèse, l’enherbement [4] avec désherbage mécanique plutôt qu’un désherbage intégral.

512) La limitation des usages en ressources non renouvelables est associée à la tâche de caractérisation lors du zonage des parcelles pour éviter qu’une trop grande précision du zonage entraîne une modélisation des itinéraires techniques nécessitant trop de passages avec le tracteur et donc trop de carburant. La modulation des itinéraires techniques est aussi vue dans ce sens et pour éviter une saturation des sols avec une surdose d’intrants.

523) L’utilisation la plus efficace des connaissances et savoir-faire des salariés est recherchée à la fois dans l’usage de ces technologies et dans la production de nouvelles données et connaissances grâce à ces technologies.

534) Enfin, la capacité des individus à travailler ensemble sur ces thématiques environnementales s’exprime en interne lors d’utilisations collectives des technologies (cas I, F, Y). Elle s’exprime également en externe avec d’autres agriculteurs à travers des groupes de travail sur la réduction de l’utilisation des intrants et la viticulture de précision (cas A), ou encore dans des projets de recherches (cas Y).

54Pretty (1995) souligne que l’agriculture durable est une manière d’apprendre le monde. Il ne s’agit pas d’un ensemble de pratiques et technologies figées, mais en évolution et liées à des interprétations et situations multiples. Utiliser des technologies de viticulture de précision peut être l’occasion de développer un apprentissage en confrontant les interprétations et points de vue d’équipes de travail (cas I, F, Y) ou avec d’autres utilisateurs extérieurs (cas A). Notre recherche montre que le respect de ces différents principes de développement durable dans l’utilisation des technologies de viticulture de précision est dû dans nos cas à la manière de se les approprier.

Les impacts de l’instrumentation

55L’instrumentation est l’occasion de mettre les bonnes personnes aux bonnes étapes afin qu’elles soient réalisées avec succès. Ainsi, les pratiques RH de l’entreprise (choix des utilisateurs, formation, sensibilisation à l’intérêt de la technologie…) influencent positivement l’appropriation d’une technologie (Oiry et al., 2010). Nous avons pu voir la différence lorsque la reprise en main de l’utilisation du capteur dans l’exploitation J a permis d’améliorer la fiabilité des données acquises.

56L’instrumentation est également essentielle pour associer la tâche aux objectifs de production de l’exploitation. Cela revient à construire une interprétation claire et forte de l’esprit (but) de la technologie. Les entreprises ayant réalisé ces phases de « pré-appropriation » (De Vaujany, 2006), se sont rapidement approprié l’instrument et l’ont associé à leurs démarches environnementales. Au contraire, dans l’exploitation J où cet effort n’a pas été fait, les technologies de viticulture de précision ne sont pas associées à des objectifs de développement durable et n’ont pour l’instant aucun impact dessus. Autre particularité, la machine à vendanger a été utilisée dans la coopérative Y au nom d’objectifs d’augmentation de la qualité, et non d’une démarche environnementale. Si l’usage de cette machine avait également été lié aux objectifs de production durable de la coopérative, les données recueillies auraient pu être utiles pour aider les décisions de fertilisation raisonnée et la réduction des intrants.

57Les technologies de viticulture de précision ont dans nos cas plusieurs buts. Elles sont utilisées pour permettre la modulation des pratiques d’enherbement considérées comme une composante de la viticulture durable (cas I et F). Elles peuvent aussi aider les décisions de raisonnement de fertilisation, de protection contre les parasites et les maladies (cas F et Y) ou pour agir directement sur la modulation d’intrants d’origine naturelle (cas A et Y).

58Enfin, la stabilisation du schème permet de pérenniser ces pratiques et c’est lorsque le schème est pérennisé que les entreprises (I, F et Y) cherchent à entamer une nouvelle phase d’instrumentalisation afin de rendre les technologies plus performantes ou d’avoir les moyens d’agir en fonction du zonage effectué.

Les impacts de l’instrumentalisation

59L’instrumentalisation a permis dans les cas étudiés d’améliorer l’artefact et les moyens sur lesquels s’appuyer pour acquérir et analyser les données, dans le cas de la tâche de caractérisation, et les rendre plus fiables et précises. Elle permet également d’acquérir des moyens d’action ou de les améliorer pour développer les pratiques de développement durable, c’est-à-dire raisonner les traitements. Par ailleurs la coopérative Y a arrêté l’utilisation de l’épandeuse pour participer à un projet favorisant les économies sur un plus grand nombre de type d’intrants. Nous pouvons souligner que dans ce projet, l’entreprise fournissant les intrants est un fabriquant d’intrants organiques, d’origine naturelle et utilisables dans le cadre d’une agriculture labellisée biologique.

60L’utilisation des technologies de précision permet alors la construction d’une base de données renseignant l’évolution de l’hétérogénéité dans le temps. Elle permet d’en comprendre les causes et, dans les cas d’utilisation collective, de susciter la discussion entre les individus, donc d’acquérir des connaissances sur le comportement de la vigne.

L’appropriation dans la tâche de caractérisation de l’hétérogénéité

61La tâche de caractérisation de l’hétérogénéité permet d’avoir des indicateurs sur l’hétérogénéité de la vigueur, de la végétation, de l’aspect visuel des parcelles selon les technologies utilisées dans nos différents cas. Dans cette tâche, l’appropriation permet surtout de perfectionner les moyens d’acquérir des connaissances utiles aux pratiques agricoles durables. En effet, les technologies de viticulture de précision nécessitent d’associer différentes sources d’information (analyses des sols, expérimentations, observations visuelles…) discutées lors de réunions entre plusieurs individus pour faire converger leurs points de vue. Cela permet une prise de recul sur les pratiques viticoles et d’acquérir de nouvelles connaissances sur les comportements de la plante et ses conséquences en termes de production. En effet, l’agriculture raisonnée et biologique exigent une connaissance accrue des parcelles, ce que peuvent apporter les technologies dans la tâche de caractérisation de l’hétérogénéité (Chiffoleau et al., 2002). Plus particulièrement, l’utilisation du drone dans l’exploitation F permet de bien situer les zones qui peuvent être critiques en biodynamie, de visualiser les zones sensibles, de mieux délimiter et d’anticiper les foyers de maladies ou d’attaque pour éviter de traiter certaines zones inutilement. Cependant, dans l’exploitation J l’appropriation n’est pas encore effective, puisque l’utilisation du capteur rencontre encore quelques difficultés. Elle ne peut donc pas avoir d’impact sur les pratiques de développement durable.

L’appropriation dans la tâche de modulation des itinéraires techniques

62La caractérisation de l’hétérogénéité apporte les informations nécessaires à la modulation des itinéraires techniques qui peut être réalisée de manière classique où avec des technologies de viticulture de précision. Cependant, la modulation est moins précise si elle n’est pas automatisée par l’utilisation de technologies de viticulture de précision. Celles-ci permettent d’appliquer directement les principes de développement durable, comme la rationalisation des intrants, la pratique de l’enherbement selon les besoins de la plante. Et une bonne appropriation de ces technologies permet d’agir directement sur les pratiques durables. Par exemple, dans l’exploitation A, l’utilisation du DPAE a permis de baisser la moyenne de l’Indicateur de Fréquence de Traitement phytosanitaire (IFT) a 9,83 par hectare et par an alors que la moyenne régionale est de 22. Ces technologies peuvent donc participer à réduire directement l’utilisation d’intrants. Cette efficacité peut d’ailleurs être améliorée grâce à la dernière étape du schème d’utilisation, l’amélioration du paramétrage permise par l’expérience d’utilisation du DPAE.

Conclusion

63En nous appuyant sur une littérature à la fois gestionnaire et ergonome visant à appréhender l’aspect socio-matériel de la technologie, nous avons pu analyser l’impact de l’appropriation des technologies de viticulture de précision sur les pratiques durables des entreprises. L’appropriation de ces technologies peut agir sur ces pratiques par deux biais : par l’instrumentalisation, en améliorant les ressources apportées par la technologie ou par l’instrumentation, en sélectionnant les personnes susceptibles d’être des utilisateurs plus performants, en améliorant son modèle d’utilisation et en y incorporant des objectifs durables. L’appropriation de ces technologies permet de les utiliser dans deux tâches. La première, la caractérisation de l’hétérogénéité selon différents indicateurs (météorologie, vigueur, couvert végétal, acidité du sol…), apporte des connaissances utiles à la compréhension du comportement de la vigne et à la conception d’itinéraires techniques respectueux de l’environnement. La deuxième, la tâche de modulation des itinéraires techniques, sera l’occasion d’appliquer précisément l’itinéraire technique le plus adéquat pour éviter l’apport inutile d’intrant ou un trop grand nombre de passages des engins agricoles. Ainsi, plus que les caractéristiques de départ de ces technologies et leur « esprit » définit par leurs concepteurs, nos recherches ont mis en évidence l’importance de l’action des utilisateurs pour les améliorer en adéquation avec leurs propres objectifs et pratiques d’agriculture durable. Nous avons vu que l’appropriation de ces technologies pouvaient aider les viticulteurs à faire un meilleur usage des biens offerts par la nature tout en limitant les effets négatifs sur l’environnement et en s’adaptant aux spécificités locales, répondant alors à l’une des définitions d’une agriculture durable (Pretty, 2005). En nous appuyant sur cet auteur, nous avons également relevé l’importance de s’appuyer sur les connaissances des agriculteurs et la capacité des individus à travailler ensemble sur des projets communs, notamment avec des chercheurs et ingénieurs concepteurs de technologies. Ainsi, il est probable que l’intérêt pour l’agriculture durable soit à l’origine de créations de communautés pouvant être répertoriées parmi le quatrième type de communautés épistémiques présentées par Touzard et al. (2015) où chercheurs, ingénieurs et acteurs du monde agricole peuvent se regrouper pour, entre autres, développer de nouvelles technologies. Nos recherches ont montré la créativité dont peuvent faire preuve les utilisateurs. Elles posent également la question de l’intégration des utilisateurs dans les communautés tournées vers le développement de nouvelles technologies pour l’agriculture durable et l’agriculture numérique.

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Notes

  • [1]
    La vigueur de la vigne se définie par la grosseur des sarments de la vigne.
  • [2]
    Ces indices de végétation visent à estimer la surface au sol recouverte par des végétaux.
  • [3]
    Cette activité vise à raccourcir les sarments de vigne pour préparer leur taille.
  • [4]
    Comme expliqué dans la revue de littérature, l’enherbement a pour but de préserver les sols.
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