Notes
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[1]
Plasseraud, Savignon (1986).
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[2]
Pour la partie indienne Sahu1 (1998) ; Lanjouwe (1997) ; Scheer, Watal (2001). Pour le Brésil, sur les politiques de développement industriel autonome, Loyola (2009).
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[3]
Loi brésilienne de Propriété Industrielle - LPI - 9.279/96.
-
[4]
Entretien avec J. Rabi, PDG de Microbiologica, avril 2003, Rio de Janeiro.
-
[5]
Entretiens et visite du laboratoire, avril 2004.
-
[6]
Entretiens avril 2004, Itapira.
-
[7]
Le laboratoire fédéral de Farmanguinhos fut créé à l’origine en 1948 dans le cadre du Département des endémies rurales. En 1971, il fut transformé en laboratoire de production de médicaments.
-
[8]
Entretien à la Nortec avril 2004 et avril 2006.
-
[9]
The New York Times titre en 2001 “Look at Brazil”. Voir l’ouvrage collectif édité par l’ANRS en 2003 : Economics of Aids and access to HIV care. Issues and Challenges for developing countries, Paris. Egalement Cohen J. C, 2000, “Public Choices in the Pharmaceutical Sector : a Case Study of Brazil”, LCHSD Paper Series n° 54, Human development Department, The World Bank.
-
[10]
P. Teixeira et al., 2003, in Economics of Aids and access to HIV care. Issues and Challenges for developing countries, op. cit.
-
[11]
entretiens avec Eloan Pinehiro, décembre 2002, avril 2004, Rio de Janeiro.
-
[12]
Pour un exposé détaillé des processus de copie et d’innovation dans les laboratoires brésiliens, se reporter à trois articles publiés en 2003, 2008 et 2009 : Cassier M., Correa M., 2003, Patents, innovation and public health: Brazilian’s public-sector laboratorie’s experience in copying Aids drugs, in Barnett T. et al. (eds). Economics of Aids and access to HIV care. Issues and Challenges for developing countries, Paris: ANRS, pp. 89-108 ; Cassier M., Correa M., 2008, “Scaling up and reverse engineering : Acquisition of industrial knowledge by copying drugs in Brazil”, in The Political Economy of HIV/AIDS in Developing Countries, B. Coriat (ed.), Edward Elgar, pp. 130-149. Cassier M., Correa M., 2009, « Eloge de la copie : le reverse-engineering des antirétroviraux contre le VIH/ sida dans les laboratoires pharmaceutiques brésiliens », Sciences Sociales et Santé, 30 pages, vol. 27, n°3, pp. 77?103.
-
[13]
“Post-Trips Options for Access to Patented Medicines in Developing Countries”, F. Scherer and Watal, Commission on Macroeconomics and Health, January 2001.
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[14]
Entretien avec J. Rabi, fondateur de Microbiologica en avril 2003, Rio de Janeiro.
-
[15]
“Proteases inhibitors and their pharmaceutical uses”, WO0242412, 2001.
-
[16]
“Pharmaceutical composition with increased bioavailability suitable for the administration of oral protease inhibitors”, WO2005007069 ; “Pharmaceutical composition, process to prepare said composition, use of the respective composition in the treatment of immunodeficiency caused by HIV infection”, W02006086865 ; “Soluble stable pharmaceutical composition for the administration of protease inhibitors”, WOO3105826, May 2005.
-
[17]
Décision du 17 août 2005, Tribunal Fédéral Régional de Rio de Janeiro.
-
[18]
Décision du 6 octobre 2005, Tribunal Régional Fédéral de la 2ème Région.
-
[19]
Ce fut le travail de Wanise Barroso, responsable de la propriété intellectuelle de l’Institut Farmanguinhos.
-
[20]
Les oppositions brésiliennes ont été rejointes par des contestations aux Etats-Unis qui ont conduit l’USPTO à annuler en 2008 quatre brevets de Glilead sur le Ténofovir – avant de rétablir Gilead dans ses droits quelques mois plus tard. Une opposition a également été déposée en Inde.
-
[21]
L’article 3d prévoit en effet : « n’est pas considérée comme une invention brevetable : … la simple découverte d’une nouvelle forme d’une substance connue qui n’amène pas une amélioration de l’efficacité de cette substance ou le nouvel usage d’une substance connue ou le nouvel usage d’un procédé connu, d’une machine ou d’un appareil à moins qu’un tel procédé connu ne produise pas un nouveau produit ou utilise au moins un nouveau réactif ».
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[22]
La précédente loi de 1970 avait en effet exclu les médicaments des brevets, ce qui permis une vigoureuse croissance de l’économie de la copie des génériques en Inde dans les 30 années qui suivirent ; Lanjouw, 1997, Scherer et Watal, 2001, Sahu, 1998.
-
[23]
Sur ce sujet, voir l’article de Stefan Ecks, 2008, “Global Pharmaceutical markets and corporate citizenship: the Case of Novartis’ anti-cancer drug Glivec”, Biosocieties 3 (2008), 165-181.
-
[24]
Voir Carlos Correa, 2007, Guidelines for the examination of pharmaceutical patents: developing a public health perspective, ICTSD, WHO, UNCTAD, 2007.
1La propriété intellectuelle est le lieu de singulières tensions entre la propriété exclusive et l’accessibilité des traitements, entre le prélèvement d’une rente de monopole et la revendication d’un « droit à la santé » comme le proclame la Constitution du Brésil de 1988 ou d’un « droit à la vie » comme le clamaient en 2001 les manifestants de l’ONG sud-africaine Treatment Access Campaign : « Les droits des patients contre les droits des brevets ». La reconnaissance des brevets de produits pharmaceutiques est du reste une affaire assez récente dans de nombreux pays industrialisés – il faut attendre 1960 pour la France, 1968 pour l’Allemagne, et 1976 pour le Japon. Tandis que les pays européens et le Japon intégraient progressivement les médicaments dans la sphère des brevets, les pays en développement, en premier lieu le Brésil et l’Inde, connaissaient un mouvement inverse [1]. L’Inde décida d’exclure les brevets de produits pharmaceutiques en 1970 tandis que les procédés de fabrication restaient brevetables, mais étaient appropriables seulement par des brevets de 5 ou 7 ans avant de tomber dans le domaine public. Quant au Brésil, qui avait exclu les produits pharmaceutiques des brevets dès 1945, il décida d’étendre cette exclusion aux procédés pharmaceutiques en 1971. Dans ces deux pays en développement, les inventions pharmaceutiques étaient alors considérées comme des biens largement publics et elles étaient librement copiables. Cette exclusion de la brevetabilité était doublement justifiée, par des arguments de santé publique – les médicaments sont des biens essentiels qui ne doivent pas être monopolisés, et par des arguments de politique industrielle – la copie des inventions étrangères assurera l’apprentissage des technologies pharmaceutiques et la constitution d’une industrie pharmaceutique locale et autosuffisante [2].
2Ce cycle de reflux de la propriété exclusive en Inde et au Brésil ou encore dans les pays de l’Amérique Andine du début des années 1970 fut bientôt contrecarré par une contre-offensive des grands laboratoires internationaux qui poussèrent à une globalisation et à un renforcement des standards de la propriété industrielle avec des brevets de médicaments de 20 ans pour tous les pays membres de la nouvelle organisation mondiale du commerce de 1994. La rationalité de cette globalisation des droits de propriété exclusifs est parfaitement explicitée dans un plan stratégique de l’Académie des Sciences publié en 1997 : « La piraterie décourage l’industrie américaine à approvisionner en technologies et en produits médicaux certains pays qui ont d’énormes besoins de santé comme la Chine et l’Inde. Bien que plusieurs pays aient indiqué leur souhait de rejoindre l’Organisation Mondiale du Commerce et de respecter les accords sur la propriété intellectuelle, les subventions publiques apportées aux industries locales qui violent ces accords continuent à décourager un plus fort engagement de l’industrie américaine des médicaments, des vaccins et des technologies médicales » (« America’s vital interest in global Health : protecting our people, enhancing our economy and advancing our international interest », 1997, Académie des Sciences des États-Unis). Le Brésil et l’Inde n’adoptèrent pas les standards de propriété intellectuelle de l’OMC à la même date. Alors que le Brésil, pressé par les États-Unis, réforme sa loi de propriété intellectuelle dès 1996, l’Inde attend les limites de la période de transition prévue par les accords ADPIC de l’OMC pour changer sa loi, soit en mars 2005. L’industrie indienne des génériques utilise pleinement cette période de 10 ans pour accumuler de nouvelles technologies, commercialiser de nombreux génériques et renforcer ses capacités de R&D. C’est du reste l’industrie des génériques de l’Inde qui fournit aujourd’hui des matières premières aux laboratoires pharmaceutiques brésiliens. C’est vers l’Inde que se tournent les chimistes brésiliens quand ils décident de se lancer dans le reverse-engineering des antirétroviraux contre le VIH/sida au milieu des années 1990 (Cassier, Correa, 2003).
3La globalisation des brevets de médicaments, qui gagne le Brésil en 1996 et l’Inde en 2005, se heurte à de nombreuses résistances. Au Brésil, la nouvelle loi des brevets est instaurée en même temps qu’une loi pour l’accès universel et gratuit aux traitements du VIH/sida est promulguée par la Présidence de la République, en novembre 1996. La contradiction est flagrante entre la nouvelle loi des brevets [3] qui établit une propriété exclusive sur les produits thérapeutiques tandis que la loi Sarney en fait des produits d’intérêt public pour répondre à l’épidémie de VIH/sida. La politique de santé fondée sur la distribution gratuite des trithérapies se heurte aux nouveaux brevets de médicaments et au renchérissement du prix des molécules. Le conflit implique non seulement le Ministère de la santé mais aussi les laboratoires pharmaceutiques brésiliens, publics autant que privés, qui avaient entrepris de copier les premiers ARVs (anti-rétroviraux), non soumis à des brevets au Brésil, et qui se voient interdire la copie des nouvelles générations d’ARVs, désormais revendiqués par des brevets de 20 ans. Le Ministère de la santé, rejoint par des associations de patients et par des génériqueurs, s’efforce de ré-ouvrir l’espace de la copie pour continuer à produire des médicaments génériques. Des luttes se multiplient au Brésil au début des années 2000 pour faire jouer toutes les flexibilités des lois et des accords internationaux sur la propriété intellectuelle des médicaments. Il s’agit des campagnes publiques lancées pour la décision de licences obligatoires, de procédures d’opposition engagées par le Ministère de la santé ou d’associations de patients du VIHsida pour demander le refus de certains brevets, de procès qui impliquent la Fondation Oswaldo Cruz et les laboratoires Merck au sujet du reverse-engineering d’un médicament breveté, l’Efavirenz, en vue de son enregistrement comme générique au Brésil.
4Ces luttes sont plus récentes en Inde, mais se diffusent rapidement. Elles se multiplient dès l’adoption de la nouvelle loi, en 2005, et elles engagent comme au Brésil des associations de malades, assistés par des juristes, et des laboratoires de génériques qui entendent préserver leur liberté de copie et leur marché. Dans les deux pays, on voit émerger des luttes pour limiter les monopoles sur les médicaments. La politique de santé publique de l’État est davantage présente au Brésil, à travers l’intervention du programme VIH/ sida du Ministère de la santé, tandis que les laboratoires pharmaceutiques privés sont davantage impliqués dans les oppositions aux brevets de médicaments et les procès en Inde. On observe dans les deux pays un phénomène de démocratisation du droit de la propriété intellectuelle à la faveur des débats publics, des procès et des oppositions. De nouveaux acteurs investissent ce champ juridique spécialisé, en apprennent les règles et les procédures, interviennent pour en modifier les standards. Il se forge également de nouvelles problématiques lors de ces conflits : au Brésil comme en Inde, des procès font émerger la catégorie juridique de l’intérêt public pour disputer l’étendue de la propriété intellectuelle.
5Nous analyserons dans cet article la période de changement du statut des médicaments au Brésil et en Inde, du statut de bien public au statut de bien privé, à partir de 1996 au Brésil et de 2005 en Inde, et la montée d’une biopolitique de l’accès aux traitements, au départ dans le champ du VIH/sida, puis dans le champ des maladies chroniques (cancer) ou encore des maladies négligées (malaria, tuberculose). Cette biopolitique de protection des populations et de l’accès universel aux traitements exploite dans un premier temps le régime de non brevetabilité des premiers ARVs contre le VIH/sida. C’est l’objet de la section 1 qui étudie l’engagement des laboratoires brésiliens dans la copie des ARVs au début des années 1990. La section 2 met en lumière les possibilités d’apprentissage technologique et d’innovation permises par la copie de médicaments aussi sophistiqués que les ARVs. La section 3 analyse les tensions et les luttes associées au changement du régime de propriété des médicaments au Brésil à partir de 1996 ainsi que les premières décisions de licence obligatoire, de procès sur le reverse engineering et d’oppositions juridiques qui aboutissent à rouvrir l’espace de la copie au nom de l’intérêt public. La section 4 détaille un procès et une jurisprudence majeurs intervenus en Inde en 2006 et 2007 au sujet d’un brevet sur une molécule anticancéreuse revendiquée par Novartis.
6Si l’essentiel de l’article intéresse le Brésil, suite aux enquêtes de terrain que nous y avons conduit depuis 2002, l’Inde est fortement présente dans cette histoire concrète des brevets et des médicaments génériques. En effet, les échanges entre le Brésil et l’Inde interviennent en plusieurs points. Premièrement, l’expérience de copie des médicaments antirétroviraux au Brésil est indissociable des échanges d’informations, de chercheurs et de matières premières entre les deux pays. Il existe une circulation Sud-Sud des technologies et des produits pharmaceutiques entre l’Inde et le Brésil. L’industrie indienne a fortement bénéficié des achats de génériques du programme sida du Brésil. La licence obligatoire décidée en mai 2007 par le Président Lula à l’endroit de l’Efavirenz autorisait l’importation du médicament fourni par un laboratoire indien puis sa production locale par des laboratoires brésiliens. Deuxièmement, on observe des échanges et une circulation entre les ONG brésiliennes et indiennes qui luttent pour demander le rejet ou l’annulation de certains brevets, jusqu’à déposer une opposition conjointe auprès de l’Office des Brevets indiens en juin 2008. Troisièmement, on observe des alliances entre les gouvernements de l’Inde et du Brésil dès lors qu’il s’agit de peser dans les cycles de négociation de l’OMC pour la promulgation d’une déclaration qui balance la propriété intellectuelle par l’intérêt de la santé publique (Déclaration de Doha de novembre 2001) ou encore pour que l’OMS encourage l’usage des flexibilités des brevets de médicaments ainsi que l’expérimentation de systèmes de financement et d’innovation pharmaceutique alternatifs au système du brevet (Velasquez, 2009).
7Nos travaux sur les conflits sur les brevets, les médicaments et la santé publique mobilisent deux types de sources : premièrement, des enquêtes par entretiens approfondis et souvent renouvelés dans les laboratoires pharmaceutiques pour collecter des informations sur la copie des brevets et l’acquisition des savoirs pharmaceutiques ou encore auprès des associations de patients et des juristes qui les conseillent pour étudier les confrontations sur la propriété intellectuelle ; deuxièmement, la collecte des archives juridiques relatives aux procès (le procès Merck/Farmanguinhos au Brésil ; le procès Novartis/gouvernement indien), aux procédures d’opposition (mémoires d’opposition et décision de l’office des brevets), à la licence obligatoire brésilienne (dossiers juridiques et décret de la licence obligatoire sur l’Efavirenz).
Épidémie de sida, copie et santé publique au Brésil (1993-)
8Au début des années 1990, alors que les scénarii de la Banque Mondiale prévoyaient une « africanisation » de l’épidémie de sida au Brésil, une alliance originale se noua entre les mouvements sociaux du sida qui revendiquaient l’accessibilité des traitements, les premières initiatives locales de distribution de médicaments, en premier lieu dans l’Etat de Sao Paulo, et des laboratoires fabricants de médicaments génériques qui entreprirent de copier l’AZT : « Le Brésil perdit alors beaucoup d’intellectuels importants. Mais ces personnes fondèrent des ONG, et elles commencèrent immédiatement à faire pression. Nous décidâmes de produire l’AZT au Brésil » (Directeur de Microbiologica) [4]. Les premières expériences de copie de l’AZT au Brésil eurent lieu simultanément dans un laboratoire privé, fondé par des chimistes de l’Université Fédérale de Rio de Janeiro au début des années 1980, et dans un laboratoire public, le LAFEPE localisé à Recife et qui est la propriété de l’État de Pernambouc dans le Nord-Est du Brésil. Les chimistes du laboratoire fédéral de Rio de Janeiro évaluèrent les échantillons produits par les deux laboratoires. D’emblée, la copie des ARVs impliquait le secteur pharmaceutique public autant que le secteur privé.
9Plusieurs laboratoires privés s’engagèrent dans la copie des ARVs au début des années 1990. Il s’agissait de développer des produits à forte valeur ajoutée et d’anticiper la demande de traitements. Labogen développa la synthèse de l’AZT en 1994 dans un laboratoire loué à l’Université de Campinas qui est voisine de la petite firme chimique : «…ça a coïncidé avec les débuts du sida au Brésil. À la même période, on a commencé à étudier la synthèse des produits du sida » (Directeur Labogen) [5]. En mars 1995, Labogen commence la production de l’AZT dans sa nouvelle usine. Elle achète les matières premières en Inde et développe ensuite 5 étapes de la synthèse pour produire le principe actif. Le laboratoire Cristalia, qui a été fondé par un médecin hospitalier pour développer l’offre de génériques pour les hôpitaux brésiliens, s’engage dans le reverse-engineering des ARVs au milieu des années 1990. Il anticipe la mise en place d’un programme gouvernemental d’achat et de distribution gratuite des médicaments contre le VIH./sida : « nous avons commencé de notre propre initiative à copier ces molécules ; bien sûr, nous savions qu’il y avait un programme du gouvernement et nous avons décidé de commencer notre recherche ici, en premier » (Directeur de la Recherche Cristalia) [6].
10En novembre 1996, le président de la République prend un décret qui proclame “ la distribution gratuite de médicaments pour les porteurs du VIH et les malades du sida « et qui consacre le statut d’exception de l’épidémie auquel les mouvements sociaux du sida ont fortement contribué. Pour traiter l’épidémie, les médicaments seront achetés directement par le Ministère de la santé et distribués gratuitement via le système de santé unique. L’intervention de l’état ne s’arrête pas au rôle de d’acquisition et de redistribution universelle des traitements. Il est aussi producteur de médicaments à travers l’action du laboratoire fédéral qu’il contrôle directement et des 17 autres laboratoires publics qui sont la propriété des États. En 1997, le laboratoire fédéral Farmanguinhos [7] de Rio de Janeiro s’engage dans un programme de copie et de production des ARVs. Au total, six laboratoires publics produiront huit ARVs génériques. Un nouveau laboratoire privé, la Nortec, s’engage dans la copie des ARVs au début des années 2000 à la demande du laboratoire fédéral de Farmanguinhos qui lui demande de développer la production de principes actifs pour ces médicaments. Il est vrai que la Nortec est née par essaimage de chercheurs du laboratoire fédéral au début des années 1980 et qu’elle est sous contrat de recherche avec lui depuis cette date : « Nous ne sommes rentrés dans les antirétroviraux qu’au début de cette décennie 2000. Et nous y sommes entrés par sollicitation de Farmanguinhos, selon notre accord avec Farmanguinhos, cet accord de 82 qui est encore valide. Nous avons renouvelé notre accord de 5 en 5 années » (directeur de la R&D) [8].
11La copie des ARVs au Brésil résulte donc des actions conjointes ou conjuguées des laboratoires privés, des laboratoires publics, du Ministère de la santé et des ONG de malades. Le Ministère de la santé est susceptible de s’adresser à tel ou tel laboratoire privé pour entreprendre la copie de tel ou tel principe actif ou médicament : « Pour le Ganciclovir, quand Roche a arrêté de fournir le gouvernement brésilien, celui-ci nous a appelé pour savoir si on serait capable de développer ce médicament au Brésil. On a répondu : on va développer la synthèse et on a aidé le gouvernement à développer la méthodologie de lyophilisation » (directeur général de Labogen). Le laboratoire fédéral de Farmanguinhos a également développé des échanges de technologies et d’informations avec les laboratoires privés avec lesquels il est essentiellement complémentaire : le laboratoire fédéral ne produit pas de principes actifs qu’il est susceptible d’acquérir auprès des laboratoires privés de chimie pharmaceutique. L’histoire de ces firmes et celle de leur entrée dans le domaine du sida témoignent d’une forte imbrication entre les politiques industrielles et les politiques de santé publique, entre les actions du Ministère de la santé et les stratégies des laboratoires pharmaceutiques. Premièrement, l’imbrication entre industrie et politique de santé est évidemment très forte au sein des laboratoires pharmaceutiques publics qui sont en quelque sorte les bras armés du Ministère de la santé. Leurs programmes de production et de recherche sont directement commandés par les objectifs de santé publique et les demandes du Ministère de la santé. Deuxièmement, l’entrée des laboratoires privés dans le domaine du sida au milieu des années 1990, en plus des incitations liées à une plus forte profitabilité de ces molécules, a été encouragée par les achats du Programme Sida du Brésil. Troisièmement, les firmes privées ont reçu des sollicitations directes du Ministère de la santé ou du laboratoire fédéral pour développer telle ou telle synthèse, le cas échéant pour préparer des décisions de licence obligatoire. Quatrièmement, des échanges et des accords de coopérations ont associé les producteurs privés de principes actifs aux laboratoires publics qui produisaient les médicaments finals.
12Ces stratégies de copie des ARVs, du moins de la première génération des ARVs, sont permises par le statut non brevetable des substances pharmaceutiques au Brésil depuis 1945. Il est donc tout à fait licite de copier l’AZT, la Stavudine ou l’Indinavir au Brésil dès lors qu’aucun brevet ne les protégeait sur le territoire national. Ce statut d’exception fut acquis lors de deux réformes de la loi des brevets, en 1945 puis en 1971. En 1945, la loi exclut les substances pharmaceutiques des brevets. En 1971, le gouvernement étendit la non brevetabilité aux procédés de production pharmaceutiques. Les chimistes brésiliens qui commencent la copie de l’AZT en 1993 ou 1994 peuvent donc consulter les brevets internationaux sans être empêchés de dupliquer, de produire et de commercialiser ces médicaments. L’industrie de la copie des génériques suppose le statut de bien public des inventions pharmaceutiques qui perdura jusqu’en 1996. Paradoxalement, le Brésil changea sa loi des brevets pour adopter les normes des accords TRIPS, c’est-à-dire l’établissement de brevets de 20 ans sur les médicaments, en 1996, l’année où il promulgua la loi sur l’accès universel aux traitements anti VIH/sida. Toutefois, le Brésil fut en mesure de copier huit ARVs non brevetés pour approvisionner son programme de distribution gratuite auprès de 180 000 patients aujourd’hui. Ce programme public d’accès aux traitements associa étroitement distribution gratuite et production locale des médicaments génériques. Les génériques brésiliens provoquèrent une forte diminution des prix des ARVs. Au début des années 2000, le programme brésilien de lutte contre le VIH/sida est considéré comme un modèle de politique de santé publique [9]. Les responsables brésiliens du programme sida et du laboratoire fédéral Farmanghuinhos furent appelés à Genève auprès de l’OMS et de l’ONU pour mettre en place le passage à l’échelle [10]. La directrice du laboratoire Fédéral de Farmanguinhos fut notamment chargée par Kofi Annan d’une enquête pour recenser les laboratoires pharmaceutiques des pays africains qui seraient susceptibles de recevoir et de dupliquer les technologies de production des ARVs [11]. Au début des années 2000, le Brésil avait de son côté offert de transférer ses technologies vers d’autres pays du sud. En 2009, on inaugure une usine de production pharmaceutique au Mozambique qui a été construite avec l’assistance technique du laboratoire fédéral Farmanguinhos.
Copie, apprentissage et innovation pharmaceutique [12]
13La pratique de la copie des ARVs est considérée comme une tâche complexe : « Where production technologies are hard to replicate, cooperation of the patent holder might be needed to make new products available. This may be why only five of the 14 HIV/Aids antiretrovirals were produced be local company in India as of June 2000 » [13]. En plus de la complexité de ces classes de molécules, en particulier des anti-protéases, les chimistes se heurtent à l’incomplétude des savoirs décrits dans les brevets et à l’indisponibilité des données relatives à ces molécules dans les pharmacopées internationales – en raison des délais de protection des données d’enregistrement de médicaments : « 90 % des produits que nous fabriquons ici ne sont pas dans la pharmacopée. On trouve seulement l’AZT dans la pharmacopée » (Directeur de Labogen, mars 2004) ; « Et quand on a un produit sous brevet qu’est-ce que ça signifie ? Ça signifie que l’on n’a pas de monographie analytique, qu’il n’y a pas de modèle primaire, il n’est pas dans la pharmacopée » (Directrice de Farmanguinhos, avril 2004). Or la détention d’un modèle primaire de la molécule est considérée comme stratégique pour contrôler la qualité du principe actif que l’on produit ou que l’on achète sur le marché. Le fabricant de génériques est dans l’impérieuse obligation de reconstituer les standards des molécules en s’aidant des brevets et en procédant au reverse engineering des médicaments. Il lui faudra aussi reconstituer les procédés de synthèse des principes actifs ainsi que les technologies de formulation des médicaments.
14Le travail de duplication des médicaments commence par le rassemblement d’une bibliographie composée des brevets internationaux et des publications scientifiques. Les chimistes du fabricant de génériques essayent parfois de réunir la bibliographie des inventeurs pour reconstituer leur trajectoire scientifique : « Vous avez donc, plus ou moins, le cheminement de ce laboratoire, de ce groupe de chercheurs, des compétences qu’ils ont. Nous imaginons que leur travail est dans leur champ de compétence, alors on doit confronter le brevet avec les autres travaux que ce groupe a faits, quelles sont les familles de produits sur lesquelles ils ont travaillé, le type de réaction qu’ils maîtrisent, pour qu’on puisse avoir vraiment une meilleure vision de ce qui est nécessaire pour ce processus » (Directeur de la recherche de Nortec). Même avec cette enquête minutieuse sur la trajectoire scientifique du laboratoire des inventeurs, la bibliographie ne peut suffire à fournir tout le savoir nécessaire à la duplication, en raison notamment des restrictions qui accompagnent l’écriture du brevet : « Parfois on part d’une voie qui est décrite par un brevet, mais on n’arrive pas à la reproduire, d’aucune manière. Il y a ce qu’on appelle le saut du chat. Il est dit qu’on ajoute un réactif de telle façon, et ça n’est pas fait comme ça. C’est décrit grossièrement. ‘J’ajoute tant’ et ce n’est pas cette quantité qui est mise. On doit étudier, voir tout le procédé, évaluer tout très correctement pour savoir jusqu’à quel point on peut chauffer. Parce que quand ils déposent un brevet, ils donnent le temps comme ça : ‘de deux à 22 heures’. Dans cet intervalle, on doit découvrir quel est le temps de réaction. C’est long, tout ça » (responsable de la synthèse des ARVs, Farmanguinhos). Quand bien même la description du brevet serait-elle très détaillée, il faudrait encore reconstituer le savoir-faire nécessaire à la réplication de la technologie. Cette reconstitution procède de l’analyse et de la manipulation des médicaments en laboratoire, autrement dit du reverse-engineering et du learning by doing. Pour cela, il faut se procurer les médicaments de marque sur le marché et des intermédiaires que l’on étudie au laboratoire d’analyse et de synthèse.
15Il faut encore traduire le brevet aux conditions technologiques du laboratoire local et faire les transpositions nécessaires. Il faut aussi considérer le fait que la reproduction consiste aussi en une bonne dose d’amélioration et d’invention de la technologie, dès lors que la technologie qui a été décrite dans le brevet au moment de son dépôt n’était alors pas encore parfaitement stabilisée. Les laboratoires qui ont commencé à copier l’AZT au début des années 1990 se sont vite rendu compte que le procédé du brevet de Glaxo n’était pas le plus efficient. Ils s’attachèrent donc à trouver de nouvelles voies et parvinrent à un nouveau procédé produisant un AZT plus pur que celui décrit dans le brevet de départ : « Ce n’était pas une chose facile que de produire de l’AZT à cette époque. Il fallait développer beaucoup de technologie. Il ne s’agissait plus ici de reverse engineering. Nous avons dû faire un gros travail d’innovation dans l’entreprise pour produire de l’AZT » (Directeur de Microbiologica) [14].
16Le travail de duplication s’accompagne fréquemment d’innovations de perfectionnement des procédés de fabrication ou de conception de nouvelles formulations de médicament. L’invention de nouvelles voies de synthèse est du reste le ressort de la concurrence entre fabricants de génériques qui s’efforcent d’améliorer la productivité des synthèses. Ces améliorations sont généralement tenues secrètes. Par contre plusieurs innovations de formulations d’antirétroviraux ont été brevetées par les laboratoires de génériques brésiliens, notamment le laboratoire Cristalia qui dispose d’une importante équipe de R&D. Quelques fabricants de génériques ont également commencé des programmes de recherche sur de nouvelles familles d’antirétroviraux, généralement en collaboration avec des équipes universitaires. En 2001, le laboratoire public de Farmanguinhos a breveté une nouvelle famille d’antiprotéases qui avait été découverte à l’Université Fédérale de Rio de Janeiro [15]. En 2004, Cristalia a également déposé des brevets sur de nouvelles formulations d’anti-protéases [16]. Les laboratoires de génériques sont ainsi susceptibles d’utiliser les connaissances acquises lors de l’activité de duplication dans des recherches orientées vers la découverte de nouvelles molécules. On observe des trajectoires similaires parmi les firmes de génériques les plus importantes en Inde (Lanjouw, 1997).
17Les travaux de copie des ARVs au Brésil ont ainsi relancé l’industrie pharmaceutique et chimique brésilienne. Les laboratoires ont créé ou renforcé leurs structures internes de R&D pour être à même de dupliquer et de contrôler la qualité de molécules aussi complexes que les ARVs. Le laboratoire fédéral a utilisé les bénéfices générés par la vente des ARVs pour développer une plate-forme d’analyse et de synthèse chimique qui est une référence pour les laboratoires brésiliens. Le travail de duplication a produit des bases de connaissances importantes sous forme de standards des molécules, de procédés de synthèse souvent améliorés, de nouvelles technologies de formulation qui ont pu être brevetées sous le régime de la nouvelle loi des brevets de 1996. Paradoxalement, cette nouvelle loi qui a instauré les brevets de médicaments de 20 ans au Brésil signifie aussi la fin du régime de copie licite pour les nouvelles générations d’ARVs qui sont aujourd’hui utilisées dans les trithérapies pour surmonter les résistances acquises par le VIH.
18La poursuite de ce processus d’acquisition de la technologie par copie et le maintien d’une production locale d’ARVs génériques pour approvisionner le programme Sida du Brésil sont aujourd’hui menacés. D’où la montée des luttes dans le champ de la propriété intellectuelle pour préserver le domaine public du médicament depuis le début des années 2000.
Nouveau régime de brevetabilité au Brésil et luttes sur et dans le droit des brevets : procès, oppositions, licence obligatoire (2000-)
19Alors que la production d’antirétroviraux génériques au Brésil et en Inde a fait baisser les prix, l’inclusion des ARVs brevetés fait peser une charge croissante sur le Ministère de la santé du Brésil qui achète les molécules et les distribue gratuitement. Dès le début des années 2000, plusieurs laboratoires brésiliens, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, commencent par faire les travaux de reverse engineering sur les molécules brevetées, par exemple sur l’Efavirenz de Merck. En 2001, Merck adresse une lettre à Farmanguinhos pour lui demander de cesser ces travaux sur une molécule dont elle est le propriétaire – le brevet brésilien a été accordé par l’INPI en 1997. Le laboratoire fédéral répond que ces recherches qui utilisent des matières premières d’un médicament breveté sont licites dès lors qu’il s’agit de recherche et non de commerce. Ces travaux de reverse engineering sont alors utilisés par le Ministère de la santé pour faire pression sur Merck pour obtenir des baisses de prix sur un médicament qui accapare 10 % du budget du programme sida. En cas de blocage, le Ministère de la santé pourrait décider d’une licence obligatoire pour produire l’Efavirenz sur place : « S’ils acceptaient un prix plus bas, nous ne lancerions pas la fabrication sur place, mais s’ils ne baissaient par leur prix, alors nous étions prêts » (E. Pinheiro, directrice de Farmanguinhos, mars 2001). Le ministère de la Santé demandera également aux laboratoires privés de s’engager dans le reverse engineering de molécules brevetées pour faire pression dans ses négociations avec les laboratoires internationaux et pour être prêts à produire sur place si il venait à décider d’une licence obligatoire : « une fois que les fabricants nationaux ont développé le reverse engineering, le Ministère va parler aux multinationales en toute sécurité « si vous ne nous fournissez pas, j’ai à qui faire recours. On a la connaissance, le know how » (directeur de la R&D Cristalia, avril 2004, Itapira). Plusieurs épreuves de force sont intervenues en 2001, 2003 et 2005, entre le Ministère de la santé du Brésil et les laboratoires internationaux qui se sont soldés chaque fois par des réductions de prix des ARVs sans que le gouvernement du Brésil ne prenne de décret de licence obligatoire. En 2005, des responsables du programme sida et des ONG critiquent la prudence du gouvernement qui craint des rétorsions commerciales de la part des États-Unis en cas de licence obligatoire. Les laboratoires privés doivent supporter les dépenses de recherche engagées pour développer les technologies brevetées sans pouvoir lancer la production au Brésil.
20En 2004, Merck est engagée dans la négociation d’une licence volontaire avec Farmanguinhos pour la production de l’Efavirenz au Brésil. La multinationale tarde à négocier et décide finalement de rompre les négociations et de faire un procès à son partenaire qu’elle accuse d’avoir lancé un appel d’offre international pour se procurer les matières premières nécessaires au reverse engineering de l’Efavirenz. La firme multinationale demande la suspension de l’importation du générique de l’Efavirenz qui est fourni par un laboratoire indien. Le juge de la Cour Fédérale de Rio de Janeiro suit dans un premier temps la revendication de Merck et ordonne la suspension de l’importation. Farmanguinhos fait appel et le juge inverse son jugement en août 2005 [17]. Le juge suit l’argument de Farmanguinhos qui fait valoir l’intérêt de la santé publique et la nécessité de faire le reverse-engineering de la molécule : « le retard du développement des recherches susmentionnées provoquera le retard de l’acquisition de la technologie et de la fabrication des médicaments génériques ». Le juge déclare que « …le retard ou l’interdiction de la production portera préjudice à la santé publique à cause du manque des médicaments génériques sur le marché » [18]. Cette décision fait le lit d’une décision de licence obligatoire qui sera prise par décret en mai 2007 par le Président de la République. Dans un premier temps, l’Efavirenz sera acheté à un génériqueur indien, Aurobindo, puis un Efavirenz brésilien sera produit par le secteur privé et par le secteur public qui conjugueront leurs efforts. Le Ministère de la santé met en place un comité de suivi de la licence obligatoire pour superviser le lancement de la production locale. Les ONG internationales, à l’instar de MSF ou du CPTech, et les associations de malades du sida au Brésil et dans le monde se réjouissent d’une telle décision.
21Le processus de décision qui conduit à la licence obligatoire de mai 2007 se joue sur plusieurs scènes. Nous avons vu que la décision se prépare dans les laboratoires de recherche des fabricants de génériques pour être en mesure de produire le médicament sur place. Elle se joue également sur la scène judiciaire dès lors que Merck décide de porter l’affaire devant les tribunaux. Elle se prépare également sur la scène publique où les ONG internationales, MSF Brésil en premier lieu, et les associations de malades brésiliennes multiplient les conférences et les débats pour le déclenchement d’une licence obligatoire. Elle se prépare enfin parmi les responsables du programme sida du Brésil qui font un énorme travail juridique pour élaborer le dossier de licence obligatoire. Le processus de décision de cette licence repose sur des alliances originales entre le Ministère de la santé, les associations de malades et les ONG internationales, notamment MSF, ainsi qu’avec les laboratoires de génériques à qui le Ministère a demandé de se lancer dans les opérations de reverse engineering et qui souhaitent récupérer leurs investissements de R&D.
22À partir de 2006, les acteurs brésiliens, laboratoires de génériques et associations de malades, utilisent un nouveau moyen de régulation juridique dans le champ des brevets, à savoir les procédures d’opposition. En 2006, quatre oppositions ont été formulées auprès de l’INPI pour des demandes de brevets portant sur deux ARVs, le Kaletra et le Ténofovir. Ces oppositions ont été déposées par le laboratoire public Farmanguinhos [19], d’un côté, et par l’association de malades ABIA, d’un autre côté. Ces quatre oppositions introduisent plusieurs nouveautés dans le domaine de la propriété intellectuelle au Brésil : premièrement, les opposants utilisent la procédure d’opposition pour rehausser les critères de brevetabilité et rejeter des brevets qui leur paraissent manquer de nouveauté ou d’inventivité. Il en va ainsi des mémoires d’opposition déposé par Farmanguinhos à l’encontre du Kaletra et du Ténofovir. Deuxièmement, les opposants introduisent des critères de justice et de santé publique pour contester la légitimité des brevets de médicaments. Il en va ainsi des mémoires d’opposition déposés par ABIA à la fin de l’année 2006. Dans ce dernier cas, l’opposition ne mobilise pas seulement des critères d’invention, mais des principes de justice plus généraux. Troisièmement, le dépôt de ces oppositions marque l’élargissement du cercle des intervenants dans le domaine de la propriété intellectuelle. D’ordinaire, ce sont les grandes entreprises industrielles, à l’instar de l’entreprise brésilienne du pétrole, Petrobras, qui déposent des dizaines d’oppositions pour contrecarrer les revendications de leurs concurrents.
23Dans le cas qui nous concerne ici, c’est un laboratoire public qui appartient au Ministère de la santé et une association de malades qui utilisent les flexibilités de la loi sur les brevets pour réduire la part des droits exclusifs sur les médicaments, dès lors qu’ils ne seraient pas justifiés par des critères d’invention suffisamment stricts, et pour faire valoir des raisons de justice et de santé publique. En septembre 2008, l’Institut brésilien de la propriété industrielle décidait de refuser la demande de brevet de la société Gilead sur le Ténofovir. Cette décision, qui intervient en contrecoup des procédures d’opposition, aboutit à faire tomber le Ténofovir dans le domaine public brésilien [20]. Qu’il s’agisse des campagnes pour demander des licences obligatoires ou des procédures d’opposition pour demander l’annulation de brevets de médicaments, on observe la constitution d’alliances entre Ministère de la santé, ONG et laboratoires fabricants de génériques.
24En novembre 2008, une association de patients du Brésil – ABIA- organisait à Rio de Janeiro un séminaire international sur la manière de faire des oppositions aux brevets de médicaments. Elle invitait une ONG de juristes indiens – I-MAK- pour échanger des expériences sur le sujet. En juin 2008, ABIA avait déposé une opposition auprès de l’Office indien des brevets en collaboration avec une ONG médicale indienne, SAHARA.
Opposition, procès et activisme thérapeutique en Inde : l’affaire du Glivec (2006-2007)
25En janvier 2006, l’Office des Brevets indien rejetait une demande de brevet déposée par Novartis sur un anticancéreux employé dans le traitement des leucémies – le Glivec. L’office des brevets justifia son rejet par un article de la loi des brevets indienne qui considère comme non brevetable les mises en forme nouvelles de substances connues, à moins qu’elles n’apportent un surcroît d’efficacité [21]. Cet article a une portée fondamentale dès lors qu’il peut justifier le refus de brevets futiles ou de l’evergreening sur des variations mineures de certains produits. Le refus du brevet sur le Glivec est une des premières décisions qui intervint dans le cadre de la nouvelle loi indienne sur les brevets qui autorisait désormais des brevets de 20 ans sur des produits pharmaceutiques [22]. Le rejet du brevet sur le Glivec a eu deux effets majeurs sur l’interprétation de la nouvelle loi des brevets et sur l’économie des génériques en Inde. Du côté juridique, la décision de l’office des brevets allait dans le sens d’un seuil de brevetabilité élevé des médicaments. Du côté économique, elle faisait tomber dans le domaine public un médicament très coûteux (2 600 $ par patient et par mois) et elle autorisait les copies. Plusieurs laboratoires indiens avaient d’ores et déjà entrepris la production de génériques du Glivec qu’ils livraient à un prix treize fois inférieur au prix du médicament de marque (200 $ par patient et par mois). La décision de l’Office des brevets suivait la demande de rejet du brevet de Novartis formulée par une procédure d’opposition déposée par une association de malades du cancer, la Cancer Patient Aid Association, et par plusieurs firmes de génériques. Les opposants avaient fondé leur demande de rejet du brevet sur le fondement de l’article 3d de la loi indienne.
26Novartis répondit à l’annulation de son brevet de deux manières : d’une part, la firme fit valoir le dispositif de distribution gratuite du Glivec qu’elle avait installé et qui concernait 11 000 patients en Inde [23] ; d’autre part elle fit appel de la décision de l’Office des brevets en mettant en cause la constitutionnalité de la loi indienne sur les brevets et sa conformité avec les accords de l’OMC. Le débat public devint international : les ONGs engagées dans des luttes pour l’accès aux traitements, entre autres Médecins Sans Frontières, firent valoir que la poursuite judiciaire engagée par Novartis aurait, en cas de succès, des effets dommageables pour la production et l’accessibilité de l’ensemble des génériques indiens, y compris les ARVs : « Si Novartis gagne le procès du Glivec et parvient à faire changer la loi indienne, l’Inde sera conduite à accorder des brevets aussi larges et aussi nombreux que dans les pays riches. Cela signifie que les producteurs de génériques indiens ne pourront plus produire autant de génériques de produits brevetés dans les autres pays pendant les 20 ans de durée de vie du brevet, et qu’il y aura moins ou plus du tout de médicaments essentiels à bon marché à la disposition des pays pauvres » (MSF, 20 décembre 2006).
27En août 2007, la Cour de Chennai déboutait Novartis, à la grande satisfaction des fabricants indiens de génériques et des ONG. Les justifications avancées par les juges apportent à notre sens deux enseignements fondamentaux sur la question de la fabrication des brevets de médicaments par les examinateurs de l’office des brevets et sur la question de l’intérêt public à faire valoir pour balancer le droit de propriété des brevets de médicaments. Concernant le premier point, celui de la fabrication concrète des brevets, la plainte de Novartis attaquait le caractère vague et arbitraire de l’article 3d de la loi indienne sur l’évaluation de la nouveauté d’une invention. Novartis faisait notamment valoir que la section 3 d ne contient pas de guidelines susceptibles d’aider les examinateurs à décider de l’invention brevetable. La Cour de Justice répondit que les examinateurs de l’Office des Brevets étaient tout à fait compétents pour juger de la nouveauté, des gains d’efficacité de la substance brevetée sur la foi de la documentation du brevet, et que le déposant avait lui-même toute latitude de montrer les gains d’efficacité thérapeutique de la nouvelle substance. Les juges de Chenai éclairent ici le travail concret d’interprétation et de jugement des examinateurs en brevet. Concernant le second point, la Cour de Chenai fonde la constitutionalité de l’article 3 d de la loi des brevets sur l’argument de l’intérêt public : l’objectif de cet article est d’empêcher l’evergreening des brevets de médicaments et de remplir l’obligation constitutionnelle du pays de fournir de bons soins de santé à ses citoyens.
28L’intérêt de la santé publique peut donc être légitimement mobilisé pour concevoir et aménager le droit des brevets de médicaments. En août 2009, Novartis décidait de faire appel de la décision de la Cour de Chenai. Cet appel démontre, s’il en était besoin, le caractère fondamental de l’argument des juges de Chenai sur la fabrication du droit des brevets de médicaments par les examinateurs – leur travail d’interprétation- et sur la légitimité de l’argument de l’intérêt public. Entre-temps, l’Office indien des brevets avait rejeté un second brevet de Novartis sur une autre forme du Glivec – un cristal alfa au lieu d’un cristal beta- qui lui aussi avait fait l’objet d’une procédure d’opposition par trois firmes indiennes. Cette nouvelle décision de rejet, intervenue en avril 2009, suit le même avis que la première : « Si ce brevet était attribué ce serait un cas de brevet frivole. Cette forme différente du Glivec n’est en aucune mesure supérieure à l’autre forme dont le brevet n’a pas été attribué » (conseil en brevet partie de l’opposition).
Conclusion
29La nouvelle phase de globalisation des brevets de médicaments qui s’est déployée dans le cadre de la nouvelle régulation du commerce mondial depuis le milieu des années 1990, conçue pour en finir avec la copie et les génériques de l’Inde et du Brésil, ne va pas sans résistances. Elle s’accompagne de remises en cause des fondements même du brevet dans le champ spécifique de la santé, au nom de l’intérêt public et de la protection des patients et des populations. Les fabricants de génériques alliés aux associations de malades brésiliennes ou indiennes et aux ONG internationales comme MSF ou Oxfam ont engagé de multiples épreuves de forces à l’encontre des brevets de médicament. Il s’agit en premier lieu de campagnes publiques pour demander des licences obligatoires et pour défendre la production de médicaments génériques. Il s’agit en second lieu de l’utilisation des moyens de régulation juridique qui existent dans le cadre même du droit des brevets [24], à savoir le droit d’opposition ouvert aux tiers pour contester la validité d’un brevet ou encore le droit d’utiliser un brevet sans demander l’autorisation du propriétaire, autrement dit le droit de décider d’une licence obligatoire pour raison de santé publique. Ces diverses luttes « sur » le droit (campagnes publiques) ou « dans » le droit (oppositions juridiques, procès, utilisation des flexibilités du droit) visent à préserver ou obtenir la possibilité de produire des médicaments génériques à bon marché accessibles pour les populations. Pour la première fois de son histoire, le Brésil décida en mai 2007 de prendre une licence obligatoire sur un antirétroviral très utilisé contre le VIH/sida, l’Efavirenz. Le programme VIH/sida du Ministère de la santé était devenu suffisamment hégémonique pour surmonter les pressions politiques et commerciales, internes et externes, qui s’exerçaient à l’encontre de la licence obligatoire.
30Au cours de ces batailles politiques et juridiques, il s’opère un travail d’élaboration juridique, particulièrement lors des procès devant les juges ou des oppositions devant les offices de brevets, mais aussi dans le cadre de réflexions conduites de manière indépendante par des magistrats ou des universitaires, sur la catégorie d’intérêt public dans le domaine de la santé qui peut s’imposer au droit de propriété intellectuelle des brevets. C’est le sens de la décision de la Cour Fédérale de Rio de Janeiro dans le procès qui opposait la Fondation Oswaldo Cruz et le laboratoire Merck à propos du reverse engineering d’un médicament breveté. Les juges autorisant finalement le travail des chercheurs du laboratoire pharmaceutique fédéral par le souci de ne pas différer l’arrivée des médicaments génériques mis à la disposition des malades et par la préoccupation de ne pas nuire à l’intérêt de « l’économie publique », représentée ici par la Fondation Oswaldo Cruz. L’affirmation de l’intérêt public face au droit de propriété intellectuelle fonde également la Décision des juges de la Cour de Chenai dans l’affaire du brevet sur le Glivec. L’arrêt de 2007 établit le caractère constitutionnel d’un article de la loi indienne des brevets, l’article 3d qui restreint la prolifération des brevets sur des améliorations mineures, en référence à l’objectif de protection de la santé de la population. Des magistrats brésiliens ont également entrepris une réflexion approfondie sur l’intérêt public dans des cours et des publications. Rappelons que l’OMC elle-même a intégré les préoccupations de santé publique dans ses positions, notamment dans la Déclaration de Doha de novembre 2001, déclaration qui fut obtenue grâce aux pressions du Brésil et de l’Inde qui s’étaient alliés dans les négociations de l’OMC.
31Ces épreuves de forces contribuent simultanément à la fabrication du droit des brevets (usage des flexibilités du droit, décision de licence obligatoire, jurisprudence sur le critère de nouveauté à la suite des oppositions brésiliennes contre les brevets sur le Tenofovir ou oppositions indiennes à l’encontre des brevets sur le Glivec, autorisation de procéder au reverseengineering de médicaments brevetés en vue de leur enregistrement auprès de l’Agence du Médicament et dans le but d’acquérir des informations technologiques au Brésil) et à l’organisation de l’économie du médicament (réouverture de l’espace de la copie, limitations des monopoles des médicaments propriétaires). De nouvelles réflexions sont engagées au Brésil et en Inde pour parvenir à un usage automatique des licences obligatoires, pour réunir les brevets des ARVS contre le VIH/sida dans une communauté de brevets qui seraient rendus accessibles pour tous les fabricants, pour renforcer l’expertise juridique des ONG en vue de contrôler la validité des brevets délivrés, pour exercer une veille systématique sur les brevets internationaux à des fins d’information technologique ou à des fins de contestation juridique.
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Mots-clés éditeurs : médicaments, politique gouvernementale, droit de propriété intellectuelle, litiges, ONG, santé publique
Date de mise en ligne : 18/06/2010
https://doi.org/10.3917/inno.032.0109Notes
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[1]
Plasseraud, Savignon (1986).
-
[2]
Pour la partie indienne Sahu1 (1998) ; Lanjouwe (1997) ; Scheer, Watal (2001). Pour le Brésil, sur les politiques de développement industriel autonome, Loyola (2009).
-
[3]
Loi brésilienne de Propriété Industrielle - LPI - 9.279/96.
-
[4]
Entretien avec J. Rabi, PDG de Microbiologica, avril 2003, Rio de Janeiro.
-
[5]
Entretiens et visite du laboratoire, avril 2004.
-
[6]
Entretiens avril 2004, Itapira.
-
[7]
Le laboratoire fédéral de Farmanguinhos fut créé à l’origine en 1948 dans le cadre du Département des endémies rurales. En 1971, il fut transformé en laboratoire de production de médicaments.
-
[8]
Entretien à la Nortec avril 2004 et avril 2006.
-
[9]
The New York Times titre en 2001 “Look at Brazil”. Voir l’ouvrage collectif édité par l’ANRS en 2003 : Economics of Aids and access to HIV care. Issues and Challenges for developing countries, Paris. Egalement Cohen J. C, 2000, “Public Choices in the Pharmaceutical Sector : a Case Study of Brazil”, LCHSD Paper Series n° 54, Human development Department, The World Bank.
-
[10]
P. Teixeira et al., 2003, in Economics of Aids and access to HIV care. Issues and Challenges for developing countries, op. cit.
-
[11]
entretiens avec Eloan Pinehiro, décembre 2002, avril 2004, Rio de Janeiro.
-
[12]
Pour un exposé détaillé des processus de copie et d’innovation dans les laboratoires brésiliens, se reporter à trois articles publiés en 2003, 2008 et 2009 : Cassier M., Correa M., 2003, Patents, innovation and public health: Brazilian’s public-sector laboratorie’s experience in copying Aids drugs, in Barnett T. et al. (eds). Economics of Aids and access to HIV care. Issues and Challenges for developing countries, Paris: ANRS, pp. 89-108 ; Cassier M., Correa M., 2008, “Scaling up and reverse engineering : Acquisition of industrial knowledge by copying drugs in Brazil”, in The Political Economy of HIV/AIDS in Developing Countries, B. Coriat (ed.), Edward Elgar, pp. 130-149. Cassier M., Correa M., 2009, « Eloge de la copie : le reverse-engineering des antirétroviraux contre le VIH/ sida dans les laboratoires pharmaceutiques brésiliens », Sciences Sociales et Santé, 30 pages, vol. 27, n°3, pp. 77?103.
-
[13]
“Post-Trips Options for Access to Patented Medicines in Developing Countries”, F. Scherer and Watal, Commission on Macroeconomics and Health, January 2001.
-
[14]
Entretien avec J. Rabi, fondateur de Microbiologica en avril 2003, Rio de Janeiro.
-
[15]
“Proteases inhibitors and their pharmaceutical uses”, WO0242412, 2001.
-
[16]
“Pharmaceutical composition with increased bioavailability suitable for the administration of oral protease inhibitors”, WO2005007069 ; “Pharmaceutical composition, process to prepare said composition, use of the respective composition in the treatment of immunodeficiency caused by HIV infection”, W02006086865 ; “Soluble stable pharmaceutical composition for the administration of protease inhibitors”, WOO3105826, May 2005.
-
[17]
Décision du 17 août 2005, Tribunal Fédéral Régional de Rio de Janeiro.
-
[18]
Décision du 6 octobre 2005, Tribunal Régional Fédéral de la 2ème Région.
-
[19]
Ce fut le travail de Wanise Barroso, responsable de la propriété intellectuelle de l’Institut Farmanguinhos.
-
[20]
Les oppositions brésiliennes ont été rejointes par des contestations aux Etats-Unis qui ont conduit l’USPTO à annuler en 2008 quatre brevets de Glilead sur le Ténofovir – avant de rétablir Gilead dans ses droits quelques mois plus tard. Une opposition a également été déposée en Inde.
-
[21]
L’article 3d prévoit en effet : « n’est pas considérée comme une invention brevetable : … la simple découverte d’une nouvelle forme d’une substance connue qui n’amène pas une amélioration de l’efficacité de cette substance ou le nouvel usage d’une substance connue ou le nouvel usage d’un procédé connu, d’une machine ou d’un appareil à moins qu’un tel procédé connu ne produise pas un nouveau produit ou utilise au moins un nouveau réactif ».
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[22]
La précédente loi de 1970 avait en effet exclu les médicaments des brevets, ce qui permis une vigoureuse croissance de l’économie de la copie des génériques en Inde dans les 30 années qui suivirent ; Lanjouw, 1997, Scherer et Watal, 2001, Sahu, 1998.
-
[23]
Sur ce sujet, voir l’article de Stefan Ecks, 2008, “Global Pharmaceutical markets and corporate citizenship: the Case of Novartis’ anti-cancer drug Glivec”, Biosocieties 3 (2008), 165-181.
-
[24]
Voir Carlos Correa, 2007, Guidelines for the examination of pharmaceutical patents: developing a public health perspective, ICTSD, WHO, UNCTAD, 2007.