Couverture de I2D_171

Article de revue

Le vocabulaire du design thinking

Pages 32 à 33

Notes

1Co-design (et design participatif). Le design est une approche centrée sur l’humain : avant de développer un produit/service, on cherche à mieux connaître ses utilisateurs. Il est possible d’aller plus loin et de proposer à ces derniers de tenir un rôle actif dans le processus de conception. On parle alors de co-design. Ces approches ont d’abord été développées dans les pays scandinaves dans les années 70 et 80. Le co-design peut être un simple outil permettant d’améliorer une solution mais il peut aussi être une véritable technique d’empowerment et de démocratie participative.

2• Confiance créative. On dit souvent que le design thinking est à la fois une méthode et un état d’esprit (« mindset »). C’est pour désigner cet état d’esprit particulier que Tom et David Kelley ont forgé la notion de confiance créative. Pour les deux frères, nous sommes tous créatifs mais cela ne signifie pas pour autant que nous sommes tous des artistes nés. La confiance créative est plus large que le talent artistique ; c’est la capacité à « utiliser son imagination pour créer quelque chose de neuf dans le monde. Elle entre en jeu chaque fois que l’on a l’occasion de générer des idées, des solutions ou des approches nouvelles. » [1] Les détracteurs du design thinking opposent parfois « design thinking » et « design doing » ; pourtant, « c’est l’association de la pensée et de l’action qui définit la confiance créative : la capacité à produire des idées nouvelles et le courage de les tester. » En ce sens, la confiance créative est inséparable du goût pour l’expérimentation.

3• Design. En tant que discipline, le design est souvent réduit à la conception de produits ou de beaux objets (comme lorsqu’on parle d’un canapé « design ») mais c’est aussi une technique de résolution de problème et une méthode de conduite de projet qui peut s’appliquer dans toutes sortes de domaines, à partir du moment où ils impliquent un utilisateur : produits, services, espaces, interfaces, etc.

4• Divergence/convergence. Lorsqu’on cherche à produire des idées nouvelles, on distingue souvent deux phases : une phase de « pensée divergente » au cours de laquelle on essaie de produire un maximum d’idées de façon débridée et une phase de « pensée convergente » au cours de laquelle les idées sont triées, classées et sélectionnées.

5• Empathie. L’empathie est la capacité de se mettre à la place d’autrui. C’est une qualité essentielle lorsqu’on travaille pour des usagers ou des utilisateurs. Le premier mantra de l’UX est « Vous n’êtes pas vos utilisateurs » : concevoir un service nécessite avant tout d’enlever ses lunettes d’expert pour voir avec les yeux des utilisateurs.

6• Expérience utilisateur (ou UX). Un service implique forcément une expérience : quelque chose de subjectif, qui se déroule dans le temps et qui est doté d’une qualité (agréable, désagréable, ennuyeux, enthousiasmant, etc.). Le terme a été forgé par le designer et chercheur en sciences cognitives Donald Norman dans les années 80, alors qu’il travaillait chez Apple, pour faire référence au continuum allant de l’achat d’un ordinateur en magasin jusqu’à son utilisation. L’UX est souvent entendu en un sens étroit, limité au design d’interface, mais le concept est en fait bien plus large : il englobe l’ensemble des points de contact entre un utilisateur et un service.

7• Idéation. Ce terme un petit peu compliqué en apparence signifie tout simplement « générer des idées. » L’idéation intervient dans le processus de design après l’enquête de terrain, lorsqu’il s’agit de synthétiser les données recueillies et d’imaginer de nouvelles solutions. Les techniques d’idéation les plus fréquentes sont dérivées du brainstorming, inventé en 1939 par le publicitaire Alex Osborn. Pour encourager la créativité et éviter le conformisme, un brainstorming repose sur un certain nombre de règles simples (ne pas se censurer, viser la quantité plutôt que la qualité, rebondir sur les idées des autres, etc.).

8• Itération. Itérer signifie « répéter. » Le processus de design repose sur une série de cycles au cours desquels une idée est testée et améliorée de façon progressive. Ce caractère itératif est un point commun avec les « méthodes agiles » comme Scrum (dans le domaine de l’informatique) ou Lean start-up (dans le domaine du management). L’objectif d’une itération est paradoxal : on cherche à tester une idée, à la mettre à l’épreuve et donc à échouer pour en tirer des leçons. Un échec peut être considéré comme un résultat intéressant et même souhaitable à deux conditions : s’il intervient rapidement et s’il n’engendre pas de coûts supplémentaires, ce qui est le cas lorsqu’on teste un prototype rapide.

9• Marathon créatif (également appelé make-a-thon, sprint ou workshop). Il s’agit d’un évènement au cours duquel tout ou partie du processus de design est concentré sur une période très limitée (1 à 5 jours). La contrainte de temps et le format événementiel permettent de stimuler la créativité et l’esprit d’équipe, de faire connaître un projet, etc. C’est un sprint de ce genre qui a fait découvrir le design thinking au grand public. En 1999, un journaliste de l’émission Nightline (ABC) propose aux designers d’Ideo un challenge : imaginer en une semaine un nouveau caddie de supermarché en utilisant leur méthode de travail. D’après la légende, c’est après voir vu ce reportage que le PDG de SAP, Hasso Plattner, aurait décidé de financer la d.school de Stanford. Cette vidéo disponible en ligne constitue une excellente initiation à la démarche design [2].

10• Point de contact. Un point de contact désigne toute forme d’interaction entre un utilisateur et le service qui lui est proposé. Un service simple en apparence sur le versant métier ou technique peut représenter de nombreux points de contact en amont ou en aval et donc nécessiter des expertises variées. On représente souvent les points de contact sous une forme visuelle au sein d’une frise ou d’un schéma appelé « cartographie de l’expérience utilisateur. »

11• Prototype rapide (ou prototype basse fidélité). C’est l’une des caractéristiques les plus frappantes du design thinking : dès qu’un projet est conçu, un prototype doit être réalisé. Il ne faut pas imaginer une réalisation complexe ou coûteuse (comme un « concept car » par exemple). L’essentiel est d’avoir en main une réalisation tangible qui pourra être testée. Il peut s’agir, dans un premier temps, d’une réalisation rudimentaire : croquis, storyboard, maquette en carton, etc. Il est essentiel de comprendre qu’un prototype basse fidélité n’est pas une version miniature, un modèle réduit ou une maquette du futur service mais un outil permettant de poser des questions. Dans le cas d’un service complexe, impliquant plusieurs étapes, un prototype différent pourra ainsi être fabriqué pour chaque point de contact.

12• Recherche ethnographique. Le design d’un produit ou d’un service nécessite de connaître intimement ses utilisateurs. Pour ce faire, il existe deux grands types d’approche. Les méthodes quantitatives reposent essentiellement sur des enquêtes ou des questionnaires fermés qui permettent d’aboutir à des résultats chiffrés. Ce type de méthode accorde beaucoup de crédits aux opinions et aux déclarations ; or, les gens ne disent pas toujours ce qu’ils pensent et ils ne sont pas forcément capables de dire comment ils se comportent. Pour atteindre des couches de vécu plus profondes, on a recours à des méthodes qualitatives qui viennent en grande partie de l’ethnographie. Les principales techniques de recherche ethnographique sont l’entretien ouvert (sur la base d’un guide de conversation souple plutôt que d’un questionnaire fermé) ; l’observation et l’immersion ; les activités génératives et les « sondes culturelles » (il s’agit d’activités simples que l’on propose aux usagers de réaliser, souvent en mobilisant des compétences non verbales : cartographie, journal photo, maquette en lego, etc.).

Notes

bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Avec le soutien de

Retrouvez Cairn.info sur

18.97.9.170

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions