Notes
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Cet article s’intéresse à ces formes-là de migrations. Il exclut par conséquent de l’analyse les migrations de travailleurs qualifiés ou très qualifiés.
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Singapour accède en fait une première fois à l’indépendance en 1957, avec le reste de la Malaisie, puis se sépare de cette dernière, en 1965.
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Année de la chute du régime de l’Ordre Nouveau.
1Les pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) concentrent aujourd’hui 3,8 % des migrants internationaux, tandis que leurs ressortissants en représentent 8,1 %, ce dernier chiffre correspondant peu ou prou au poids démographique de la région dans le monde. Cependant, cette perspective statique masque la forte croissance des circulations au sein et vers la région, leur volume ayant plus que doublé depuis 2000. Par ailleurs, ces chiffres méconnaissent les migrations irrégulières qui représentent par exemple, en Malaisie, entre 40 % et 50 % du total des migrations. L’Asie du Sud-Est s’affirme donc aujourd’hui comme un pôle de migrations dynamique et en développement rapide. Dans ce contexte régional, les flux entrants se concentrent essentiellement sur trois pays : la Thaïlande, la Malaisie et Singapour. En valeur absolue, les flux sortants sont dominés par les ressortissants philippins, indonésiens, birmans et vietnamiens.
2Ces mobilités ont comme particularité de s’inscrire dans le cadre de grandes migrations de travail, dominées par de puissantes « industries migratoires ». Ces dernières organisent le déplacement d’une main-d’œuvre excédentaire, dans les régions de départ, vers les pôles de forte croissance économique où ces migrants occupent des emplois pas ou peu qualifiés [1]. Au regard de ces éléments, ces migrations évoquent fortement les grands déplacements coloniaux de main-d’œuvre, au sein de la région.
3À partir du cas des migrations indonésiennes vers la Malaisie et Singapour, l’article vise à éclairer le rôle de ces migrations en Asie du Sud-Est insulaire, sur le plan des pays et de la région. Nous montrerons ainsi qu’elles constituent une ressource utile aux États pour répondre, sur les scènes nationales, à des besoins économiques et politiques liés aux options de développement arrêtées au moment des indépendances. Ces migrations participent par ailleurs à stimuler la croissance économique régionale en facilitant une répartition efficace de la main-d’œuvre (d’un point de vue économique). Elles imposent cependant aussi des contraintes sur l’action publique et sont sources de conflits, au sein des pays. Elles génèrent enfin des tensions dans le cadre des relations bilatérales entre les trois États et sur la scène internationale.
Des migrations coloniales aux migrations contemporaines
4Les migrations de travail contemporaines, en Asie du Sud-Est insulaire, ressemblent par bien des aspects aux migrations de main-d’œuvre organisées à l’époque coloniale. À partir de la décennie 1870, la région, alors partagée entre les administrations coloniales britannique et néerlandaise, assiste en effet au développement rapide d’un colonialisme d’extraction sous l’impulsion du développement industriel européen : extraction minière, d’une part, dominée par l’étain, en péninsule malaise et à Bangka et Belitung, au large de Sumatra, qui donne lieu à la création d’une industrie métallurgique associée. Extractivisme agricole, d’autre part, avec, à la même époque, la structuration d’une économie de plantations à forte concentration capitalistique, qui culmine avec le boom de la demande mondiale en latex, autour de 1910 [Kaur, 2004]. Ces transformations économiques, très directement liées à la révolution industrielle « occidentale », voient ainsi émerger des activités nouvelles, créatrices d’une très forte demande de main-d’œuvre, dans des espaces alors faiblement peuplés [Kaur, 2004 ; Lafaye de Micheaux, 2012].
5Dans la région, le secteur minier est d’abord dominé par des entrepreneurs originaires de Chine du Sud qui, pour pallier cette pénurie, organisent la migration de « compatriotes » au moyen du ticket credit system : les candidats à la migration, recrutés en Chine, s’endettent, parfois par le jeu, parfois par des avances sur le prix de la traversée et se lient ainsi durablement par un engagement monétaire qui les fixe dans l’emploi, jusqu’à apurement des sommes dues. Ce type de recrutement est alors largement contrôlé par les sociétés secrètes – hui, kongsi. La demande en main-d’œuvre va cependant s’amenuiser à mesure que les Européens prennent la main sur cette activité, en développant un secteur minier moderne où la mécanisation réduit les besoins en travail humain [Kaur, 2004].
6Le secteur des plantations mobilise initialement les mêmes réseaux d’approvisionnement, en provenance de Chine du Sud. Entre 1851 et 1925, 835 000 travailleurs chinois affluent ainsi dans la région en réponse à la croissance de l’économie coloniale [Kaur, 2004, p. 5]. Ce développement rapide pousse cependant l’administration coloniale britannique à se tourner vers d’autres sources, au sein de l’empire. Des travailleurs indiens, issus pour l’essentiel de la région de Madras (actuelle Chennai), sont ainsi recrutés sous un régime d’endettement similaire au credit ticket system ou à travers des intermédiaires locaux, dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler le kangani system. À partir de 1907, l’administration britannique prend la main sur ces recrutements avec la mise en place de l’Indian Immigration Committee. Entre 1844 et 1920, 900 000 travailleurs indiens arrivent ainsi en péninsule à travers ces différentes filières [Kaur 2004, p. 66-69].
7Dans l’archipel insulindien (actuelle Indonésie), alors sous domination néerlandaise, le développement de grandes plantations et de l’activité minière, dans les îles extérieures, place le gouvernement colonial face au même impératif. Les autorités développent alors une politique similaire avec la promulgation, en 1880, de la Contract Coolie Ordinance qui vise au recrutement d’ouvriers chinois [Maurer et Magi, 2006]. Celle-ci formalise les modalités d’un contrat salarial coercitif qui attache juridiquement le travailleur à l’employeur pour le temps de son contrat, sous peine de sanctions pénales. À partir de 1900, l’administration se tourne vers Java comme principale source d’approvisionnement. Il s’agit là, toujours, d’assurer un flux ininterrompu de travailleurs dans les plantations et les mines, pour l’essentiel à Sumatra ; il s’agit désormais aussi, cependant, de diminuer la pression démographique sur l’île de Java, dont la population a connu une croissance explosive au xixe siècle. En 1906, 53 105 travailleurs chinois et 33 802 Javanais sont répertoriés dans les plantations de l’est de Sumatra ; en 1930, le rapport s’est inversé avec la présence de 234 554 Javanais face à un contingent chinois de 26 037 travailleurs. Ces migrations javanaises passent essentiellement par trois canaux : premièrement par un système d’intermédiation similaire au ticket credit system, deuxièmement par un système de travail « libre », nourri par des migrations spontanées, et, troisièmement, par des agences de recrutement privées et licenciées, régulées par l’ordonnance de recrutement (Wervingsordonnantien) de 1914 [Kaur, 2004 ; Maurer et Magi, 2006]. À la fin du xixe siècle, on assiste donc dans la région à la structuration de grands systèmes migratoires liée au développement de l’économie extractive coloniale. Au moment des indépendances, ces circulations lèguent un triple héritage aux États-nations naissants.
8En premier lieu, l’Indonésie, la Malaisie et Singapour, qui accèdent respectivement à l’indépendance en 1949, 1957 et 1965 [2], héritent des infrastructures mises en place dans le cadre de ces déplacements de masse – dispositifs de recrutement, de transit et de répartition de la main-d’œuvre, mais aussi cadres juridiques, systèmes de financement, etc. Cette industrie migratoire est animée par les administrations coloniales britannique et néerlandaise, qui encadrent les flux et, à certains moments, prennent la main sur les processus de recrutement et de placement ; par des entrepreneurs privés (agences d’emploi, banques, compagnies maritimes, intermédiaires de toute sorte) qui procèdent au recrutement et à l’acheminent des migrants, et par les populations migrantes elles-mêmes, qui accumulent des compétences, des savoir-faire et des ressources à la mobilité facilitant ainsi les départs successifs vers les nouveaux pôles économiques du Sud-Est asiatique, depuis les territoires d’origine. Singapour joue un rôle stratégique à l’intérieur de ces systèmes migratoires, comme plaque tournante où travailleurs indiens, chinois et insulindiens sont acheminés avant d’être répartis vers les bassins d’emploi finaux, en Malaisie britannique, dans les grandes plantations des îles extérieures indonésienne et au-delà, au sein des empires coloniaux.
9En second lieu, les grands déplacements de travailleurs ont des conséquences démographiques majeures dans les territoires sous administration britannique. Ainsi, le taux d’immigration (ratio immigrants/population locale) en Malaisie britannique est-il demeuré le plus important au monde entre 1881 et 1939, avec un apport de 826 migrants pour 1 000 résidents par décennie sur la période. À l’indépendance, la population de Malaisie compte ainsi 3,149 millions de « Malais » (dont une partie conséquente est en fait originaire de l’actuelle Indonésie), 2, 398 millions de Chinois et 723 000 Indiens. Dans les villes nouvelles de la Malaisie moderne, qui ont émergé autour des grands bassins miniers – Kuala Lumpur, Ipoh, Taiping, Seremban –, les Chinois représentent en moyenne 70 % de la population. À Singapour, le ratio s’élève à 75 %. La ville, par son histoire, est d’ailleurs intrinsèquement une société de migrants puisque à sa fondation, en 1819, l’île ne comptait que quelques centaines d’habitants autochtones.
10Enfin, cette histoire particulière laisse en héritage de nouvelles formes d’exploitation du travail, liées au développement du capitalisme extractif colonial : salariat et, surtout, salariat bridé (indentured labor) sous ses différentes espèces, dans le cadre duquel le travailleur se trouve attaché à son poste et à l’employeur, par la dette – à l’instar du credit ticket system – ou au moyen du code pénal – comme dans le coolie system.
Singapour et Malaisie : indépendances, développement et pénuries de main-d’œuvre
11À l’indépendance, des régimes politiques autoritaires ou semi-autoritaires, issus des mouvements nationalistes, émergent à Singapour et en Malaisie [Cheah, 2002 ; Trocki, 2005]. La cité-État est dirigée par le gouvernement du People’s Action Party (PAP) ; la Malaisie est prise en main par une coalition de partis organisés en fonction d’appartenances ethniques. Ceux-ci sont réunis dans la coalition du Barisan Nasional (BN) dominée par le parti malais de la United Malays National Organisation (UMNO). Pour assoir leur pouvoir politique, le PAP, d’abord, l’UMNO, ensuite, vont développer des politiques volontaristes de développement économique : dans ces régimes de type « développementaliste », les gouvernements pallient leur défaut d’assise démocratique par une politique de croissance forte et de redistribution, facilitant ainsi l’accès des populations à des trajectoires de mobilité ascendante. À partir de 1965, l’économie singapourienne croît de 9,2 % en moyenne annuelle pendant 25 ans (de 7,7 % jusqu’à aujourd’hui). La Malaisie emprunte une trajectoire similaire, avec, de 1957 à la crise asiatique de 1997, une croissance du PIB de 8 à 9 % en rythme annuel moyen. Dans les deux pays sans doute plus qu’ailleurs, la croissance économique s’inscrit ainsi au cœur de la mécanique du pouvoir.
12Singapour et la Malaisie vont alors connaître un découplage entre une croissance économique extrêmement soutenue et un développement démographique plus lent. Ce hiatus génère de fortes tensions sur les marchés du travail. Entre 1976 et 1979 l’économie singapourienne crée ainsi annuellement 50 000 emplois alors que seuls 30 000 nouveaux entrants alimentent les marchés du travail. La Malaisie connaît une situation similaire avec, entre 1987 et 1993, la création de quatorze millions d’emplois que la croissance de la population ne suffit pas à pourvoir. Pour pérenniser le développement économique, les gouvernements adoptent alors une série de mesures :
13Singapour s’engage dans une dynamique de montée en gamme économique, d’augmentation de la productivité du travail et délocalise les industries les plus intensives en main-d’œuvre dans sa proche périphérie [Yeoh, 2006].
14Les deux pays cherchent par ailleurs à accroître le taux de participation à la population active au travail, celui des femmes en particulier [Kaur, 2004 ; Yeoh, 2006]. Enfin, ils s’appuient sur un recours massif à la main-d’œuvre étrangère.
15Pour comprendre l’impact de ces mesures sur les marchés du travail, il convient de porter un regard plus sectoriel sur les économies des deux pays. En 1965, Singapour devient indépendant. Privé du grand marché malaisien, le PAP opte pour une stratégie d’industrialisation orientée vers l’exportation. La Malaisie emprunte le même chemin à partir des années 1970, les deux pays tentant alors d’attirer les investisseurs étrangers pour constituer et/ou moderniser leurs bases industrielles et afin de se positionner comme des territoires-pivots dans le cadre des mouvements de délocalisation des entreprises états-uniennes, européennes et japonaises, qui s’accélèrent à l’époque. Les deux pays émergent alors, rapidement, parmi les premiers récepteurs d’investissements directs étrangers (IDE) à l’échelle mondiale [Athukorala, 2006].
16Cet afflux de capitaux se traduit par une forte croissance des secteurs manufacturiers. Entre 1970 et 1980, la production industrielle croît ainsi de 11 % en moyenne annuelle en Malaisie. La création d’emploi suit une courbe similaire, avec une croissance moyenne de 9,8 % de 1987 à 1993. À Singapour, les emplois générés par le secteur manufacturier augmentent de 114 % entre 1974 et 1984, puis de 74 % entre 1984 et 1994. Dans les deux pays, cette industrialisation se double par ailleurs d’une expansion très forte du secteur du bâtiment, liée à la multiplication des grands travaux d’infrastructures nécessaires à la montée en gamme de l’économie et à l’attraction des IDE [Bastide, 2019]. Ces trajectoires accroissent considérablement la demande en main-d’œuvre dans les secteurs industriel et du bâtiment.
17Dans le cadre de l’économie politique développementaliste, la croissance économique conduit par ailleurs, dans les deux pays, au développement rapide des classes moyennes. Alors qu’elles représentaient 20 % de la population en 1957, elles passent ainsi en Malaisie à 45 % de la population en 2000. Dès 1989, les classes moyennes composent 50 % de la population singapourienne. Les trajectoires ascendantes des nationaux, dans les deux pays, ont pour conséquence le dépeuplement des segments inférieurs des marchés du travail, créant une forte demande de main-d’œuvre dans le cadre des emplois les plus pénibles et les moins considérés, dans l’ensemble des secteurs économiques.
18En Malaisie, la restructuration des marchés du travail est par ailleurs fortement orientée par une politique de discrimination positive mise en place par l’État au début des années 1970. Celle-ci entend favoriser le rattrapage économique des Malais par rapport aux populations chinoises, mieux insérées dans l’économie moderne au sortir de la période coloniale. Cela passe par la mise en place de quotas ethniques et d’emplois réservés, dans la fonction publique comme dans l’économie privée [Lafaye de Micheaux, 2012]. Les Malais, qui formaient l’essentiel des populations rurales, se déplacent alors vers les centres urbains où se concentrent les emplois dans l’économie moderne. Un fort déficit de main-d’œuvre se creuse ainsi dans le secteur agricole malaisien et, plus largement, dans les espaces ruraux.
19Enfin, ces déficits de main-d’œuvre font planer une menace constante sur la croissance économique et, par conséquent, sur les régimes politiques. Face à cette situation, les deux États vont encourager l’entrée des femmes dans l’emploi. Ce mouvement va conduire au développement d’une nouvelle demande de services dans la sphère domestique, pour prendre le relais au sein des familles. Les États vont alors avoir recours à des employées domestiques étrangères pour amortir ces transformations de la cellule familiale et fournir une solution bon marché aux couples biactifs.
20Dans les deux pays, les tensions sur les marchés du travail sont donc inégalement réparties : elles se concentrent sur les segments les moins qualifiés des marchés du travail, d’une part, et elles concernent des secteurs économiques spécifiques – industrie, bâtiment, services à la personne (dans les deux pays), agriculture et plantations (Malaisie) –, d’autre part.
21Face à cette demande multiforme, d’autres pays de la région affrontent, à l’inverse, des situations de stagnation économique et de chômage de masse. En Indonésie comme aux Philippines, la période postindépendance est difficile. Les restructurations économiques – industrialisation et modernisation agricole – ont eu pour double effet de détruire les anciens modes de subsistance et de pousser les populations dans le salariat, alors que les secteurs économiques modernes étaient dans l’incapacité d’absorber les nouveaux entrants (700 000 annuels aux Philippines, entre 1 et 1,5 million en Indonésie) [Booth, 1998]. Vingt ans après la fin de la colonisation, la répartition inégale des populations et des pôles de croissance économique dans la région va alors stimuler le redéploiement des grandes migrations de travail, désormais internationales.
Migrations de travail et économies politiques nationales
Du côté de la demande : main-d’œuvre étrangère et développementalisme en Malaisie et à Singapour
22Depuis les années 1970, ces nouvelles migrations de travail ont crû rapidement, cela en dépit des replis nationaux qui ont conduit les gouvernements malaisien et singapourien à restreindre (provisoirement) l’immigration, aux indépendances, malgré aussi des baisses conjoncturelles lors des périodes de ralentissement, dans un contexte global de forte croissance économique. Aujourd’hui, la Malaisie et Singapour recrutent à grande échelle une main-d’œuvre en provenance d’une dizaine de pays répartis entre l’Asie de l’Est (Chine – à Singapour), du Sud-Est (Indonésie, Philippines, Myanmar, Cambodge, Vietnam et Malaisie – à Singapour) et du Sud (Inde, Pakistan, Népal, Bangladesh). Si les chiffres exacts sont difficiles à établir, la Malaisie s’appuie aujourd’hui sur 3,85 à 7 millions de travailleurs étrangers (dont entre deux et quatre millions d’Indonésiens), qui composent par conséquent entre 20 % et 50 % de la population active au travail [Bastide, 2019]. Singapour compte aujourd’hui 981 000 détenteurs d’un work permit autorisant les étrangers à occuper des emplois peu qualifiés [Yeoh, 2006], pour une population totale de 5,6 millions d’habitants. Dans la cité-État, le secteur du travail domestique comptait 255 800 travailleuses en 2017, dont une grande majorité de femmes indonésiennes. L’Indonésie quant à elle exporte ses travailleurs (et, surtout, ses travailleuses, les femmes représentant, selon les années, entre 60 et 70 % des flux migratoires officiels) pour l’essentiel vers l’Asie de l’Est et du Sud-Est – Singapour, Malaisie, mais aussi Hong Kong, Taïwan, Corée du Sud et, dans une moindre mesure, Japon – et le Moyen-Orient – l’Arabie Saoudite au premier chef. Selon les chiffres de la Banque mondiale, 9 millions de nationaux travaillaient ainsi à l’étranger en 2018, auxquels il convient d’ajouter les migrants « irréguliers » dont le nombre peut atteindre, selon les pays, jusqu’à 100 % des flux déclarés.
23Comme l’indiquent assez ces volumes, les trois pays ont donc été prompts à renouer avec une certaine économie politique coloniale – caractérisée par l’usage des mobilités spatiales comme vecteur de croissance économique et outil de gestion politique des populations –, ceci dans le cadre des projets politiques nationaux. Dans ce contexte, se sont développées des figures de travail captif qui rappellent, par bien des traits, les formes coloniales d’indentured labour (coolie system, credit ticket system). Entre l’Indonésie, la Malaisie et Singapour, le coût des services de recrutement, de transit et de placement sont ainsi imputés au travailleur dans le cadre de l’industrie migratoire, renouant ainsi avec les systèmes de disciplinarisation par la dette. Reste que les propriétés de cette main-d’œuvre – faibles coûts, large disponibilité, flexibilité, sujétion – sont aujourd’hui le produit de processus nouveaux, qu’il convient d’appréhender en relation avec la fragmentation de la région entre les États-nations : elles s’appuient sur des processus d’infériorisation civique et juridique autorisés par le statut de non-citoyen [Bastide, 2015].
24Du point de vue des pays importateurs, la main-d’œuvre étrangère joue différents rôles, que l’on peut décliner en trois points.
25Premièrement, ainsi qu’on l’a souligné, elle permet de pallier les déficits de main-d’œuvre dans les emplois libérés ou créés par les mobilités ascendantes des populations nationales, d’une part, et la croissance économique, d’autre part. Ainsi les travailleurs migrants représentent-ils aujourd’hui 85 % de la main-d’œuvre dans le secteur des plantations malaisien, 20 % à 60 % dans l’industrie électronique ; à Singapour, ces mêmes travailleurs occupaient la moitié des emplois dans le secteur manufacturier en 2018, 74 % des emplois dans le bâtiment et environ 30 % des postes dans le secteur des services. Dans les deux pays et dans chacun de ces secteurs, ils occupent pour l’essentiel les postes les moins qualifiés.
26Deuxièmement, la disponibilité d’une main-d’œuvre disciplinée, flexible et bon marché a permis, aux indépendances, d’attirer les entreprises étrangères pour déclencher puis soutenir la croissance. Cet effet persiste en Malaisie, où les capitaux étrangers demeurent ou continuent à s’implanter pour profiter des conditions particulières d’exploitation du travail autorisées par la main-d’œuvre transnationale [Bastide, 2019]. À partir de cette impulsion initiale, l’économie singapourienne est quant à elle rapidement montée en gamme, se spécialisant dans des secteurs à haute valeur ajoutée (finance, production à forte intensité capitalistique, service aux entreprises, recherche et développement, etc.) [Yeoh, 2006].
27Enfin, la main-d’œuvre étrangère permet de maintenir des taux de profit viables dans des secteurs économiques où ils s’érodent, comme dans la petite hôtellerie et la restauration. La réduction des coûts du travail compense ainsi l’inflation d’autres facteurs de production – coût du foncier, par exemple – ou la baisse tendancielle des profits.
28En somme, ces formes d’emploi permettent de conjuguer l’impératif économique de croissance et l’impératif politique de redistribution. Elles augmentent la disponibilité globale du facteur travail, d’une part, et elles opèrent comme outil de régulation des déséquilibres économiques et démographiques induits par la politique volontariste de massification des classes moyennes, d’autre part. En ce sens, elles constituent un instrument majeur de l’économie politique développementaliste, dans les deux pays.
Du côté de l’offre : exportation de main-d’œuvre, développement régional et régulation démographique en Indonésie
29En 1966, au moment de l’instauration par Suharto du gouvernement autoritaire de l’Ordre Nouveau (Orde Baru) en Indonésie, le pays connaît un chômage de masse avec entre 10 et 15 millions de travailleurs sans emploi. Dès la fin des années 1960, l’État va alors s’appuyer sur une conjoncture internationale favorable pour diriger une partie des surplus de main-d’œuvre vers les marchés du travail internationaux, soulageant ainsi la pression sur les marchés du travail domestiques [Palmer, 2016 ; Tirtosudarmo, 2018].
30Dans les années 1970, les pays du Golfe connaissent en effet un boom économique lié à la montée des cours du pétrole. Ils se lancent alors dans de grands travaux de modernisation. Le gouvernement philippin est le premier à saisir cette opportunité : la conjonction entre puissance économique et faiblesse démographique, d’un côté (monarchies du Golfe), et fragilité économique et vigueur démographique, de l’autre (Philippines), permet d’envisager l’exportation de la main-d’œuvre excédentaire philippine. L’Indonésie suit de près [Fau, 2015a]. Le pays profite notamment d’une forte demande au sein des foyers saoudiens, enrichis par la rente pétrolière, pour exporter des travailleuses domestiques. Ces premières migrations se diversifient rapidement, notamment vers l’Asie [Fau, 2015b]. La Malaisie devient ainsi, dans les années 1990, le premier importateur de main-d’œuvre indonésienne ; Singapour s’impose quant à elle comme une destination majeure pour les femmes indonésiennes, recrutées dans le secteur du travail domestique. L’exportation de travailleurs est ainsi conçue, à l’origine, comme un moyen d’alléger les tensions sociales liées à l’insuffisance d’emplois dans l’économie « formelle » et la faiblesse des revenus, en offrant, à l’étranger, les opportunités qui font défaut au pays. Entre 1976 et 1979, dans la phase initiale du programme d’exportation de la main-d’œuvre, 46 % des travailleurs indonésiens sont en effet en situation de sous-emploi, dont 29 % qui travaillent moins de 25 heures par semaine [Dhanani, 2004].
31À partir des années 1990, ces migrations vont croître et s’organiser, donnant ainsi lieu à la constitution d’une industrie migratoire qui procède au recrutement, au transit et au placement des travailleurs. En Indonésie – comme dans les autres grands pays d’origine d’Asie du Sud-Est – cette industrie tourne aujourd’hui à plein, sous étroite supervision étatique [Palmer, 2016]. Le négoce de la main-d’œuvre génère des flux financiers considérables et revêt à ce titre une fonction économique de premier plan. Les migrations de travail rapportaient ainsi plus de 12 milliards de dollars en 2018 sous la forme des remises de fonds effectuées par les travailleurs expatriés (dont plus de trois milliards en provenance de Malaisie), équivalant à 1,1 % du PIB. En Indonésie, ces migrations constituent aujourd’hui, en valeur et du point de vue de l’apport en devises, le troisième secteur d’exportation après le pétrole/charbon et l’huile de palme.
32Encore que ce volume ne représente qu’une part des revenus imputables à la migration. L’industrie migratoire génère en effet, en plus de ces transferts, une économie propre : le commerce de la main-d’œuvre implique une pluralité de prestations de services, facturées par les acteurs publics et privés du secteur – recrutement, transit, placement, mais aussi services bancaires, assurance, services d’intermédiation, communication, etc. Considérant qu’un placement officiel est facturé en moyenne entre 800 et 1 000 dollars, les seuls placements annuels représentent entre 200 et 400 millions de dollars de chiffre d’affaires, selon les années. De surcroît il ne s’agit là que des sommes forfaitaires, fixées par décret, qui constituent une estimation restrictive des flux monétaires associés, dans la mesure où l’économie des migrations demeure très largement souterraine.
33Enfin, outre les revenus procurés à l’industrie migratoire (dont l’État est un acteur majeur et dont une partie est finalement redistribuée aux communautés migrantes elles-mêmes), cet apport économique est aussi envisagé, politiquement, comme un outil de développement endogène, à travers l’investissement, dans les territoires, des remises de fonds consenties par les migrants à leurs proches restés au pays.
34En Indonésie, en Malaisie et à Singapour, les migrations de travail se sont donc progressivement affirmées comme une pièce essentielle des économies politiques nationales, dans la mesure où elles permettent de concilier des besoins économiques et politiques divergents (l’organisation des mobilités ascendantes des populations – impératif politique – entre par exemple en contradiction avec les besoins réels de l’économie, à Singapour et en Malaisie – persistance d’une forte demande sur les segments les moins qualifiés du marché du travail).
Les « coûts cachés » du travail migrant : contestations domestiques, tensions bilatérales et pressions internationales
35Au sein des trois pays, les migrations de travail jouent donc un rôle décisif. De la même façon, elles participent aujourd’hui à structurer les rapports économiques entre les pays. Elles permettent en effet de gérer conjointement l’inégale répartition des populations et de l’activité économique à l’échelle régionale. Elles facilitent ainsi l’équilibrage des ressources entre les pôles d’activité économique et les grands bassins démographiques. Ce faisant, ces mobilités participent à générer de la croissance économique à l’échelle de la région, mais aussi à en distribuer le produit entre pays exportateurs – par les biais des remises de fonds et de l’économie des migrations – et pays importateurs de main-d’œuvre – en soutenant la croissance. Elles sont donc constitutives d’une nouvelle économie politique régionale du travail et du capital. En même temps qu’elles engendrent de fortes dépendances sur le plan national et de fortes interdépendances entre les pays de la région, les migrations de travail contemporaines génèrent cependant aussi des tensions importantes, sur ces deux plans.
36Dans les pays d’origine, l’exportation de main-d’œuvre engendre d’intenses contestations. En 1995, l’exécution pour meurtre de Flor Contemplacion, une travailleuse domestique philippine à Singapour, déclenchait par exemple une vague de protestations dans l’archipel philippin, obligeant le gouvernement à revoir de fond en comble l’encadrement de l’industrie migratoire dans le sens d’une meilleure protection de ses citoyens expatriés. De la même façon, en Indonésie, dans le contexte démocratique post-1998 [3], la société civile proteste régulièrement contre la gestion par l’État de la question migratoire, en réaction aux innombrables cas de maltraitance relayés par la presse. Le commerce transnational de la main-d’œuvre est aujourd’hui largement perçu comme une atteinte à la citoyenneté et apparaît souligner l’hypocrisie des pouvoirs publics qui présentent les migrants comme des « héros » du développement (pahlawan devisa) sans pour autant les protéger. Des mouvements d’opinion émergent et des mobilisations collectives s’organisent, autour d’ONG, sous l’égide notamment du Consortium de Protection des travailleurs migrants indonésiens (KOPBUMI) qui fédère plusieurs dizaines d’organisation, ou de syndicats, comme le KSPSI (confédération des syndicats de travailleurs de toute l’Indonésie) ou des organisations développées par les migrants eux-mêmes, comme l’Association des travailleurs migrants indonésiens (ATKI), créée à Hong Kong et maintenant présente en Indonésie [Rother, 2017 ; Ford, 2004]. Des manifestations se tiennent régulièrement devant les ambassades malaisienne (2009, 2012, 2018, 2019) et saoudienne (2011, 2013, 2017, 2018) contre le traitement des ressortissants indonésiens, dans les deux pays. Comme aux Philippines, quoique de manière plus progressive, cette pression continue contraint le gouvernement à amender graduellement les dispositifs d’encadrement afin de mieux protéger ses travailleurs expatriés, comme en témoigne le vote en 2017 d’une nouvelle loi sur la protection et le placement des travailleurs migrants (sur les Philippines, voir Tyner [2004]).
37Au sein des pays importateurs, les États font face aussi à des mouvements d’opinion hostiles à la main-d’œuvre transnationale. Une très forte xénophobie s’est en effet développée vis-à-vis des travailleurs étrangers, en Malaisie et à Singapour, qui rend la gestion politique de cette question particulièrement épineuse. Leur visibilité croissante est vécue comme un empiétement (encroachment) sur l’espace public, une attaque contre le caractère national du territoire et leur contribution économique comme un péril pour les travailleurs nationaux [Bastide, 2015]. Ce faisant, les deux pays sont tenaillés entre les impératifs économiques – de croissance – et politiques – de redistribution –, d’un côté, et, de l’autre, l’impératif politique de réaffirmation de la souveraineté de l’État sur son territoire et de la primauté des citoyens. Cette tension se retrouve à l’intérieur même des appareils d’État. Ainsi, en Malaisie, des conflits récurrents opposent les ministères du Travail et de l’Économie, qui poussent à la continuité des recrutements pour répondre à la demande des secteurs économiques, et le ministère de l’Intérieur, plus enclin à plaider pour la réduction des migrations. Face à ces tensions, le gouvernement procède tous les deux à trois ans, depuis 1991, à des expulsions de masse des travailleurs « sans papiers ». Ces opérations sont régulièrement suivies par des mesures d’amnistie et de réadmission rapide, afin de réduire les pénuries de main-d’œuvre qui en résultent [Fau, 2000]. Ces épisodes permettent au gouvernement de réguler la pression populaire en mettant en scène sa volonté politique. Dans les deux pays, les autorités publiques développent par ailleurs un discours d’apaisement qui porte sur le caractère transitoire des migrations de travail. Cela semble cependant de moins en moins crédible alors que leur dépendance manifeste à l’égard de la main-d’œuvre exogène ne fait en fait que s’accentuer [Bastide, 2019].
38Ces tensions internes se doublent de conflits bilatéraux entre pays exportateurs et importateurs. En 1995, suite à l’affaire Flor Contemplacion, les relations entre les Philippines et Singapour se sont ainsi considérablement tendues. Des manifestations d’ampleur et la mobilisation forte de la société civile et de la presse, dans l’archipel, obligeaient le gouvernement à rappeler son ambassadeur, à demander le rappel de l’ambassadeur singapourien à Manille, à annuler la visite prévue du Premier ministre singapourien aux Philippines et, surtout, à promulguer un moratoire sur le placement des femmes philippines à Singapour. En 2009, face à la multiplication des cas médiatiques de violences graves subies par des femmes indonésiennes en Malaisie, sous la pression aussi de la société civile, le gouvernement indonésien déclarait un moratoire sur le placement de travailleuses domestiques en Malaisie (mesure levée en 2011). Cela s’ajoutait à d’autres motifs de tension bilatérale et contribuait à crisper notablement les liens diplomatiques entre les deux pays.
39Enfin, les modalités d’exploitation des travailleurs étrangers dégradent l’image des trois pays sur la scène internationale. Dans son rapport annuel sur le trafic d’êtres humains, le département d’État états-unien pointe ainsi systématiquement les manquements de l’Indonésie, de Singapour et, surtout, de la Malaisie. Cette dernière a par ailleurs fait l’objet de nombreux rapports d’organisations internationales (OIM, BIT, HRW, etc.) condamnant le traitement des travailleurs migrants dans le pays. Si l’emploi transnational constitue certainement une ressource pour l’ensemble des pays impliqués dans la région, il provoque donc, aussi, des coûts importants dans les cadres nationaux, au regard des relations bilatérales et à l’échelle internationale.
Conclusion
40En Asie du Sud-Est insulaire, les interdépendances économiques et démographiques forgées au mitan du capitalisme colonial ont donc persisté après les indépendances. Cela témoigne sans doute de leur résilience et de leur durabilité. Si les migrations de travail se transforment (diversification des pays sources et des pays de destination), il est douteux qu’elles se tarissent à moyen terme, ce pour au moins trois raisons.
41D’abord, les besoins des États importateurs et exportateurs sont pérennes, institutionnalisés, durablement encastrés dans les économies politiques nationales. Il est donc difficile de les imaginer se résorber, malgré les coûts engendrés. La chute du gouvernement UMNO et l’émergence de la Nouvelle Malaisie (Malaysia Baru) en 2017 pourraient éventuellement rebattre les cartes : les traitements infligés aux travailleurs migrants sont certainement plus difficiles à justifier dans un contexte de démocratisation. L’exemple indonésien incite cependant à la plus grande prudence sur ce point.
42Deuxièmement, l’industrie migratoire est aujourd’hui puissante et institutionnalisée. Elle agrège des intérêts publics, privés, officiels et irréguliers, fortement implantés dans les appareils d’État, en Malaisie et en Indonésie. La diversité des intérêts ainsi composés – y compris ceux des classes populaires, en Indonésie et dans les pays d’origine, qui perçoivent la migration comme un risque mais aussi une opportunité –, la possibilité d’une prise de risque en vue d’une opportunité et le volume des flux économiques générés rendent peu probable l’étiolement des migrations de travail dans un avenir prévisible.
43Enfin, les circulations historiques des populations ont contribué à disséminer des réseaux familiaux ou communautaires à travers la région, qui soutiennent des phénomènes de « migration en chaîne » dans la mesure où les migrants installés facilitent le départ des suivants, créant ainsi des liens durables entre espaces d’origine et de destination. Pour ces trois raisons, cette économie politique des migrations, consolidée depuis les années 1990 mais qui puise dans les circulations coloniales (et précoloniales), paraît durablement installée, nonobstant les coûts afférents pour les pays concernés.
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Notes
-
[1]
Cet article s’intéresse à ces formes-là de migrations. Il exclut par conséquent de l’analyse les migrations de travailleurs qualifiés ou très qualifiés.
-
[2]
Singapour accède en fait une première fois à l’indépendance en 1957, avec le reste de la Malaisie, puis se sépare de cette dernière, en 1965.
-
[3]
Année de la chute du régime de l’Ordre Nouveau.