Notes
-
[1]
Doctorant contractuel à l’Institut français de géopolitique, université Paris-VIII.
-
[2]
Sa suppression en 2010 fait l’objet d’un cas d’étude quelques pages plus loin.
-
[3]
Interview de Fabienne Stich parue dans l’édition du 2 février 2009 des Dernières Nouvelles d’Alsace.
-
[4]
Interview de Michèle Marquet parue dans l’édition du 11 février 2009 de L’Union.
-
[5]
La rationalité de ce chiffre reste à déterminer. D’aucuns pourraient penser qu’il a été choisi afin de rapprocher le produit de ce nouvel impôt de celui de l’ancienne taxe professionnelle.
-
[6]
On retrouve ici la continuation de la péréquation départementale présentée auparavant.
-
[7]
Interview de Jacques Pélissard parue dans l’édition du 16 novembre 2009 de L’Express.
-
[8]
Christian Bataille, député socialiste du Nord, est un des parlementaires les plus actifs d soutien à l’énergie nucléaire.
-
[9]
On peut évoquer les opérations RACINE (Régionalisation des activités de construction d’une installation nucléaire pour l’emploi), qui visaient, par exemple à Chinon, 85 % de la main-d’œuvre recrutée au niveau local.
-
[10]
Environ deux tiers de l’énergie libérée par la réaction nucléaire n’est pas transformée en électricité et se perd en chaleur.
-
[11]
On retrouve textuellement cet objectif dans les chartes de parrainage rédigées par les directions des centrales.
-
[12]
Le greenwashing ou écoblanchiment est un procédé marketing visant à se donner une image écoresponsable.
-
[13]
Dans les années 1980, plus de 300000 personnes visitaient les centrales nucléaires françaises chaque année. Les visites furent freinées par les mesures de sécurité mises en place après les attentats du 11 septembre 2001.
1 Le 13 décembre 2012, c’est un cortège de 150 travailleurs et élus locaux barrant l’entrée de la centrale nucléaire de Fessenheim qui accueillit Francis Rol-Tanguy, le délégué interministériel chargé de superviser sa fermeture. Un an et demi auparavant, de l’autre côté du Rhin, Angela Merkel avait décidé, suite à la catastrophe de Fukushima, de relancer l’abandon de l’énergie atomique sans que cela ne soulève de mobilisations autour des centrales. Guerres du pétrole ou crises russo-ukrainiennes du gaz, trop souvent la géopolitique des énergies se résume à une analyse à l’échelle mondiale ou, au mieux, continentale. Pourtant, comme l’illustre la différence de réaction entre la France et l’Allemagne, il est impossible de prétendre comprendre les stratégies énergétiques d’un pays sans s’attarder sur les dynamiques locales. Si nombre d’États occidentaux semblent s’être accordés, au moins rhétoriquement, sur la nécessité d’une transition écologique de la société, la composition des bouquets énergétiques, prérogative encore régalienne même au sein de l’Union européenne, dépendra de rivalités de pouvoirs internes.
2 Système technopolitique [Hecht, 1989] fait de flux, d’usines, de mines, de lignes électriques et de centrales, l’empreinte géographique de l’énergie atomique est forte. Les conséquences locales de l’implantation d’un réacteur varient d’un pays à l’autre. En aménageant leur voisinage, les dix-neuf centrales françaises et leur opérateur, Électricité de France, ont créé un environnement propice à leur survie. Si les mouvements antinucléaires français ont fait l’objet de très nombreuses études [Touraine et al., 1980 ; Kitschelt, 1986, Topçu, 2013], parfois à l’initiative d’EDF qui souhaitait identifier ces potentiels ennemis, ce n’est pas le cas des forces pronucléaires. Une analyse géopolitique à grande échelle révèle la présence en France de territoires de dépendance au nucléaire. Acteurs à part entière du conflit, leur engagement freine le désaménagement du parc atomique que nécessiterait une hypothétique modification du mix énergétique national.
L’implantation d’une mono-industrie nucléaire en France : une collision d’échelles
3 L’historien J. Rovan attribue à la forte densité de population du territoire allemand la raison de la puissance de son mouvement antinucléaire [Rovan, 1983]. En France, la démographie permet aussi d’appréhender la singularité de l’énergie atomique. Exception faite de Gravelines et de Nogent-sur-Seine, les dix-neuf communes choisies pour abriter des centrales partageaient le même caractère rural et souffraient de dépopulation et de l’absence d’industries. Ainsi F. Lafaye, ethnologue travaillant sur la construction d’une centrale nucléaire au Blayais, qualifiait son terrain de recherche de « pays perdu » [Lafaye, 1994, p. 115]. L’éloignement des centres urbains, que l’on ne retrouve pas en Allemagne, a été systématisé en 1974 par Michel d’Ornano, ministre de l’Industrie et aménageur du parc électronucléaire français, afin de minimiser les risques d’opposition. L’arrivée d’une centrale a causé une restructuration complète des communautés d’implantation [Flaire, 1978], résultat d’une collision d’échelles entre celle de la commune rurale et celle de la mono-industrie nucléaire.
4 La construction et l’opération des réacteurs ont entraîné une explosion démographique. Entre 1962 et 2010, les populations des communes de Saint-Vulbas, de Saint-Laurent-Nouan et de Belleville-sur-Loire ont augmenté respectivement de 300 %, 350 % et 340 % alors que la croissance départementale n’était que de 75 %, 30 % et 6 %. En exploitation, une centrale nécessite entre 900 et 2300 personnes en fonction de sa puissance. La technicité de l’industrie nucléaire demande un personnel qualifié. Les effectifs montrent alors une surreprésentation des employés de catégories supérieures et une sous-représentation des ouvriers. En conséquence, la rémunération des agents des centrales dépasse de 50 % le niveau moyen des salaires en France [INSEE, 2014]. Les zones d’implantation ont vu s’installer une nouvelle population au pouvoir d’achat plus important que la moyenne locale, entraînant la construction d’écoles, de routes, de logements, de commerces, etc.
5 En sus des dotations de l’État, les municipalités françaises s’autofinancent par l’emprunt, la récolte de dividendes et la levée de plusieurs impôts locaux, les taxes d’habitation, foncière et professionnelle [2] auxquelles sont assujetties les centrales. La taxe professionnelle a été instaurée en 1975, quelques années avant la divergence des premiers réacteurs. Elle était calculée en prenant comme base la valeur locative cadastrale des bâtis dans lesquels s’exerce l’activité de l’entreprise, multipliée par un taux fixé par la commune. Les deux taxes foncières, sur le bâti et le non-bâti, suivent à peu de chose près le même schéma. Le Code général des impôts, article 1499, définit la valeur locative cadastrale des usines, auxquelles les centrales s’apparentent, comme le prix de revient des différents éléments y étant utilisés (outils, bâtiments, machines, etc.). Dans le cas d’un réacteur nucléaire, infrastructure intensive en capital, ce montant est particulièrement élevé augmentant mécaniquement le produit des taxes. Comparer les volumes d’argent disponibles par habitant dans les budgets municipaux à ceux de la moyenne des communes de leur strate statistique (carte 1) permet de visualiser la richesse de ces collectivités. À titre d’exemple, les communes d’Omonville-la-Petite et de Paluel disposent respectivement de 916 % et de 1639 % d’argent en plus par habitant que la moyenne des municipalités démographiquement semblables. Outre la fiscalité, l’échelle des communes explique la forte concentration des retombées économiques. La taille moyenne d’une commune française est de 1771 habitants pour 15 km2, contre 6700 habitants pour 30 km2 en Allemagne. Ces différences sont encore plus flagrantes dans les communes nucléaires. Les municipalités allemandes comptent en moyenne 10000 habitants contre 3000 en France. En Allemagne, les flux financiers des centrales subissent une dilution plus importante qu’en France où la taille réduite des collectivités les concentre.
L’usage des retombées économiques : vers la constitution de territoires de dépendance au nucléaire
6 Les besoins primaires des centrales initièrent l’amélioration fonctionnelle des communes d’implantation. La construction de nouvelles routes nécessaires aux chantiers participa au désenclavement de ces territoires alors que l’arrivée de nouvelles familles requit l’agrandissement des écoles dans des régions où celles-ci étaient menacées de fermeture. Pour les premières centrales établies en zone rurale, le chantier accéléra la mise en place de réseaux d’assainissement et d’éclairage public. Afin de sédentariser les agents EDF, souvent d’extraction urbaine, des infrastructures de loisir et des associations furent créées.
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7 Les nouvelles recettes permirent de réaliser différents investissements de prestige et d’attractivité. À Braud-et-Saint-Louis on rénova les monuments historiques et l’église. À Belleville-sur-Loire, l’ensemble des réseaux filaires furent enfouis. L’argent du nucléaire permit aux communes de revêtir des habits bien éloignés de ceux des pays perdus. C’est dans les investissements de loisirs que la mutation est la plus flagrante. Les villages d’implantation se distinguent par un niveau d’infrastructures, d’équipements et de services hors de portée des communes de leur taille. Chinon, Cattenom, Chooz, Golfech, Paluel, Penly, Dampierre ou encore Saint-Alban disposent de grands centres nautiques. D’autres se sont équipés de bibliothèques, ludothèques et médiathèques aux fonds remarquablement fournis, dépassant les 100000 documents pour la médiathèque de Chooz, commune de 800 habitants. Globalement, l’offre culturelle des villages s’est étoffée par la création de nombreuses associations. Enfin, la qualité de vie des habitants s’est vue améliorée par l’ouverture d’œuvres sociales et de services à la personne. Ces recettes permirent aux municipalités de mettre en place des stratégies fiscales d’attractivité. Sur les dix-neuf communes, quatorze ont fixé des taux de taxes d’habitation inférieurs à la moyenne des villages démographiquement semblables dans leur département et, pour dix d’entre elles, il y est plus de deux fois plus bas. Cas extrêmes, Saint-Vulbas et Cruas offrent les taux les plus bas de France avec 0,01 %. Certaines municipalités profitèrent de leur aisance fiscale pour minorer la taxe professionnelle, sacrifiant une part de la manne nucléaire afin d’attirer de nouvelles entreprises.
Saint-Vulbas et le modèle pétromonarchique des communes du nucléaire
8 Située au bord du Rhône dans le département de l’Ain, Saint-Vulbas abritait 300 habitants quand elle fut désignée en 1974 pour accueillir la centrale de Bugey. Avec une population dont le poids a presque quadruplé depuis, la commune est aujourd’hui le symbole de la création de territoires de dépendance au nucléaire. Grâce à un budget de 6585 euros par habitant en 2012, soit dix fois plus que la moyenne de sa strate statistique, Saint-Vulbas jouit d’équipements rivalisant avec ceux d’une métropole régionale. Matérialisation de sa richesse, elle dispose, outre d’un grand centre nautique, de son propre palais des Congrès qui, s’étalant sur 34000 m2, accueille des manifestations d’envergure internationale. L’opération de ces infrastructures se fait sans avoir recours à la fiscalité des particuliers, le taux de taxe d’habitation de Saint-Vulbas étant quasi nul. En appliquant le taux de taxe professionnelle le plus bas du département de l’Ain (8,5 % en 2009), la commune a attiré 125 entreprises au sein du Parc industriel de la Plaine de l’Ain, créé en 1976 et qui emploie aujourd’hui 4500 personnes.
L’« ÉMIRAT DE SAINT-VULBAS » : UN TERRITOIRE D’EXCEPTIONNALITÉ CONSTITUÉ PAR LA MANNE DU NUCLÉAIRE
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Colmar Hérodote n°155
Les collectivités territoriales
participent au conflit...
Commune dont le conseil municipal a signé
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Mulhouse appelant à la fermeture de la centrale
Commune dont au moins un élu du conseil
municipal a signé l’appel de l’association
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9 La richesse ostentatoire du village lui a valu le surnom d’« émirat de Saint-Vulbas » dans la presse et dans les communes voisines. D’autres ont eu le même traitement : « Koweït sur Rhône » pour Saint-Paul-Trois-Châteaux ou encore « Petit Koweït d’Indre-et-Loire » pour Avoine. D’espaces ruraux au dynamisme économique déclinant, ces villages sont devenus des bourgs aux fonctions urbaines et à la vie culturelle foisonnante grâce à la présence des centrales. Outre le surnom, c’est le modèle de développement, à savoir une économie de rente reposant sur l’énergie, qui rapproche les communes nucléaires françaises des pétromonarchies du Golfe.
L’expansion géographique de la dépendance au nucléaire
10 Que ce soit pour subvenir aux besoins des chantiers ou pour faciliter le partage de la taxe professionnelle, les communes d’implantation émirent tôt le souhait d’une coopération avec leurs voisins. Jusqu’alors cantonnés aux agglomérations, la loi sur la gestion municipale et les libertés communales de 1970 permit la création de districts ruraux. Alors qu’au XIXe siècle l’électricité avait été un des moteurs du premier regroupement intercommunal [Bouvier, 2005], l’aménagement du parc électronucléaire motiva la fondation d’intercommunalités modernes. Sur les dix-neuf communes d’implantation, onze font aujourd’hui partie d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dont la création est liée à l’installation des centrales. À partir de 1992, ces collectivités eurent la possibilité de s’autofinancer en percevant une partie des recettes de la taxe professionnelle. Cette réforme permit aux intercommunalités de jouir directement de l’argent des centrales. Comme pour les municipalités, ces EPCI entreprirent des politiques de construction d’équipements et de mise en place de services à la personne. Ces financements permirent d’investir dans des stratégies de développement, avec par exemple, à Chooz, une bourse allouée aux étudiants en médecine prenant l’engagement d’exercer dans l’intercommunalité et une aide d’un montant de 50000 euros aux médecins s’y installant. Ne touchant pas directement aux transferts d’argent de la centrale, les communes avoisinantes ne profitent toutefois pas moins de cette rente de situation, créant de facto un second territoire de dépendance au nucléaire.
11 Les départements ont eux aussi profité de ces retombées fiscales via les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP). Créés en 1975, ils devaient permettre de redistribuer une part de l’argent prélevé sur les infrastructures dites exceptionnelles : barrages, centrales nucléaires, grandes usines, etc. Les fonds étaient alloués aux communes considérées comme défavorisées, c’est-à-dire situées à proximité de l’infrastructure et en subissant un préjudice quelconque. Derrière cette définition floue, il appartenait aux conseils généraux de définir les critères qualifiants. Dans la Vienne, 250 communes étaient considérées comme défavorisées, soit 90 % des municipalités du département, alors que dans le Tarn-et-Garonne ceci concernait 169 communes, soit 80 % du département. Ces proportions obligent à relativiser la notion de défavorisé. Si ces sommes ont pu compter pour certaines municipalités, elles n’ont pas influencé significativement leurs finances et il serait exagéré de parler d’une extension du territoire de dépendance à l’échelle départementale.
LES TERRITOIRES DE DÉPENDANCE AU NUCLÉAIRE
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Dilution des retombées fiscales
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LES TERRITOIRES DE DÉPENDANCE AU NUCLÉAIRE
Quand les collectivités territoriales se font actrices du conflit
12 Attachés aux emplois et à l’argent des centrales, les collectivités et leurs élus ont politiquement réagi à ce qu’ils considèrent comme une agression contre leurs intérêts vitaux.
La suppression de la taxe professionnelle : illustration de l’engagement des élus locaux
13 Accusée d’être néfaste à la compétitivité de l’économie française, la taxe professionnelle (TP) fut abrogée par la loi de finances 2010, conformément à une promesse faite par Nicolas Sarkozy en février 2009. Malgré la prédominance de la taxation des entreprises dans les recettes des villages du nucléaire, force est de constater que l’impact de cette suppression y est nul. Les élus du nucléaire furent parmi les premiers à contester cette réforme. Début 2009, Fabienne Stich, maire de Fessenheim, exprimait ses craintes dans Les Dernières Nouvelles d’Alsace :
La suppression de la TP remettrait en cause beaucoup de choses, [...] la commune ne serait pas ce qu’elle est sans la centrale, elle vit largement grâce à la taxe professionnelle et il en est de même au niveau intercommunal [3].
15 Peu de temps après, dans les colonnes de L’Union, Michèle Marquet, maire socialiste de Chooz, qualifiait la réforme de « catastrophe », jugeant qu’elle mènerait à la « disparition » ou à la « dilution » de la commune où la taxe de la centrale a permis de « maintenir une population sur place après l’effondrement de la métallurgie [4] ». Plusieurs parlementaires géographiquement ou professionnellement concernés par l’énergie atomique se firent le relais de ces mécontentements, principalement Alain Fouché (sénateur UMP et conseiller général de la Vienne, élu du canton de Chauvigny à 10 kilomètres de la centrale nucléaire de Civaux), Jean-Pierre Sueur (sénateur PS et ancien député du Loiret, département de la centrale nucléaire de Dampierre) et Xavier Pintat (sénateur UMP de la Gironde, ingénieur du Commissariat à l’énergie atomique et président de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies). S’il est impossible d’évaluer l’influence réelle de la mobilisation, on doit remarquer que la loi de finances intègre plusieurs dispositifs exclusifs aux territoires du nucléaire.
16 Pour permettre aux collectivités de conserver des revenus comparables, la suppression de la taxe professionnelle s’est accompagnée de la création de la Contribution économique territoriale (CET). En sus, la présence de certaines infrastructures permet aux communes et EPCI de lever des taxes spécifiques. C’est le cas des centrales qui sont assujetties depuis 2010 à l’Imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux et installations de production d’électricité d’origine nucléaire (IFER-nucléaire). Le montant dû par chaque centrale est calculé en multipliant le nombre de mégawatts de puissance installée par 2913 [5]. En France, la moyenne des puissances installées est d’environ 3300 mégawatts par centrale. En moyenne, chaque infrastructure doit payer 3300 x 2913 = 9612900 euros. Le Code des impôts prévoit que le produit de l’IFER se divise pour 50 % aux départements [6] et pour 50 % aux communes ou EPCI. Reste donc, théoriquement, une manne de presque 5 millions d’euros pour ces derniers. La réforme apparaît comme un jeu à somme nulle. En 2010, la centrale nucléaire de Fessenheim versait 13 millions d’euros au titre de la taxe professionnelle et un million d’euros de taxe foncière, soit 14 millions d’euros. Pour l’exercice 2012, le versement était de 6 millions d’euros pour la CFE, 6 millions pour l’IFER ainsi qu’un peu moins de 2 millions au titre de la taxe foncière, soit un total de 14 millions. On retrouve ici les mêmes sommes avant et après la réforme.
17 Les modifications de la loi de finances faites en faveur des communes du nucléaire révèlent tant la capacité qu’ont eue leurs élus à peser dans le processus, que la prise en compte par les législateurs des spécificités des territoires du nucléaire. En toile de fond se trouve la peur de voir diminuer l’acceptabilité locale de ces infrastructures, une crainte clairement exprimée en 2009 par le président de l’Association des maires de France dans L’Express où il justifiait, entre autres, son refus de la réforme par la possibilité de ne voir « plus aucune commune accepter sur son sol la présence d’une centrale nucléaire ou d’une autre industrie polluante [7] ». Ce « gouvernement du nucléaire par l’économie » [Topçu, 2013, p. 54] est parfaitement intégré par les avocats de l’énergie atomique. Dès 1990, dans le premier rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) sur la gestion des déchets nucléaires, le rapporteur Christian Bataille [8] soulignait la nécessité d’« aligner les ressources fiscales des communes d’implantation de sites de stockage sur celles des centrales » afin de faire accepter la construction d’un site d’enfouissement des déchets [Bataille, 1990, p. 93].
Fessenheim et l’action politique des collectivités du nucléaire
18 Les collectivités se sont constituées en actrices dans le conflit sur l’avenir de l’électronucléaire en France dans un contexte de forte politisation des agents des centrales. Des recherches précédentes ont déjà montré l’implication des employés d’EDF dans la vie politique locale [Bouvier, 2005]. Si le manque de données empêche d’établir des statistiques précises, quelques indications peuvent être avancées. À la centrale du Blayais, 40 des 1300 employés exercent un mandat. Au niveau national, les agents d’EDF détenant un mandat électif sont représentés par l’Association des élus agents d’EDF et GDF (AEAEG). Sa composition trahit la politisation des travailleurs du nucléaire. Jacky Terrancle, président d’honneur de l’AEAEG, maire de Saint-Palais, est un ancien employé de la centrale du Blayais. Michel Tindillière, secrétaire général adjoint de l’association est conseiller municipal de Gien et employé de la centrale de Dampierre-en-Burly. En se concentrant sur les communes proches de la centrale de Fessenheim, on note a minima un maire, trois adjoints et de nombreux conseillers municipaux. Consciente de leur originalité, les municipalités du nucléaire se sont fédérées dès 1984 au sein de l’Association des représentants des communes d’implantation de centrales et établissements nucléaires (ARCICEN). Aujourd’hui, elle milite non seulement pour un plus grand rôle donné aux élus locaux dans la gouvernance des activités électronucléaires, mais surtout pour la pérennité de l’énergie atomique en France. Rédactrice d’un cahier d’acteurs dans le cadre du débat public sur le réacteur EPR de Flamanville en 2006, elle a délocalisé son assemblée générale d’octobre 2013 de Paris à Fessenheim pour exprimer son soutien à la centrale.
19 Le conflit autour du site alsacien témoigne du rôle grandissant des collectivités territoriales dans le débat électronucléaire. Ce sont les communes proches de la centrale ainsi que la communauté de communes de l’Essor du Rhin (CCER) qui mènent actuellement le mouvement contre sa fermeture. L’association Fessenheim Notre Énergie (FNE), véritable moteur de la mobilisation, a été fondée en 2012 par François Beringer, maire de Blodelsheim, Fabienne Stich, ancienne maire de Fessenheim, et André Onimus, ancien président de la CCER. Parallèlement, la CCER a porté en 2013 un recours en excès de pouvoir devant le Conseil d’État demandant l’annulation du décret instituant le délégué interministériel à la fermeture de la centrale Fessenheim. Enfin, la communauté de communes et plusieurs autres municipalités ont signé une motion contre l’arrêt du site déposée à l’occasion du débat national sur la transition énergétique.
Des territoires coconstruits par les stratégies d’EDF
20 Électricité de France (EDF) a, tôt, réalisé la singularité de l’implantation d’une centrale nucléaire par rapport aux autres ouvrages qu’elle avait érigés auparavant. Pour l’entreprise, les premières années ont représenté un réel apprentissage géopolitique. Confrontée à la conflictualité de son activité, elle a dû élaborer des stratégies pour la pérenniser.
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La mise en place de stratégies d’acceptabilité : un apprentissage géopolitique précoce pour EDF
21 Suivant son protocole habituel, c’est EDF qui prit en charge la construction des logements des agents arrivés pour opérer les centrales. Les concentrant dans quelques communes, l’entreprise privilégia l’aménagement de pavillons individuels en dehors des bourgs centraux préexistants en appliquant un modèle de développement identique à chacun des sites. Placé en périphérie du bâti historique, vivant dans des lotissements parfois dotés de leurs propres écoles, commerces et infrastructures de loisirs, la ségrégation d’avec les populations locales était flagrante. Cette situation aboutie à l’apparition de tensions avec les habitants de ces nouvelles « colonies du nucléaire » [Chabert, 1987]. Ce malaise conduisit EDF à mener dès 1977 une révision de sa politique d’aménagement afin d’éviter le glissement du mécontentement vers une opposition contre les centrales. Il fallait alors repenser l’intégration des agents EDF. Afin d’éviter les coupures avec la population ancienne, l’entreprise chercha à acquérir des terrains en continuité immédiate du bâti traditionnel et limita la taille des cités. Simultanément, des incitations financières furent proposées aux agents pour la construction ou l’achat de résidences en dehors des lotissements. Alors que l’inexistence de formations locales forçait EDF à faire venir ses employés du reste de la France, l’intégration de ces familles dans leur nouvelle commune rencontrait une résistance des deux côtés [Lafaye, 1994]. Pour y remédier, l’entreprise instaura une politique de préférence territoriale dans le recrutement [9].
22 La gestion des eaux de refroidissement est un autre exemple d’apprentissage géopolitique. Un réacteur nécessite une grande quantité d’eau pour son refroidissement, rejetée après utilisation, échauffée entre 10 °C et 20 °C [10]. Dès le début des années 1960, EDF et le CEA ont œuvré à trouver une solution de valorisation pour ces rejets afin de minimiser cet élément de conflictualité [Dubesset, 1987]. Trois débouchés furent identifiés : la serriculture, la pisciculture et le chauffage urbain. Malgré de multiples essais à taille réelle, aucun ne se développa. Tous trois pâtirent du coût d’investissement dans les réseaux de chaleur et du risque de rupture d’approvisionnement en cas de panne de la centrale ou durant ses périodes de maintenance. Seul le site de Gravelines, fort de ses six réacteurs, abrite encore une activité piscicole pérenne.
EDF et l’utilisation stratégique des ressources locales
23 Spécificité du nucléaire en France, EDF prend en charge le développement associatif des zones d’implantation par la création de partenariats financiers. Ces parrainages systématiques, dont le but est de « promouvoir l’image d’EDF et de la centrale afin de conforter son image d’entreprise citoyenne [11] », s’articulent autour de trois thématiques : le sport, les œuvres sociales et le développement durable. Outre le sponsoring systématique des équipes sportives, les centrales financent les sections locales de grandes associations (Restos du Cœur, Secours populaire, Croix-Rouge, etc.) et organisent des partenariats pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées.
24 La question du développement durable est aujourd’hui capitale dans la stratégie territoriale d’EDF, ce qui lui vaut d’être accusée de greenwashing par les opposants à l’énergie atomique [12]. L’entreprise va non seulement aider financièrement des associations préexistantes mais aussi directement en créer certaines. En Alsace, l’association Au Fil du Rhin, qui se donne comme but de soutenir le développement écologique des ses berges et qui fédère plusieurs autres associations environnementalistes, a été fondée en 2004 par les deux opérateurs de la centrale de Fessenheim, Électricité de France et EnBW. Les centrales participent aussi à l’aménagement voire à la création d’espaces naturels protégés autour des infrastructures. En partenariat avec des associations ou indépendamment, sept centrales nucléaires se sont engagées dans ces actions. À Belleville-sur-Loire, EDF finance la plantation d’arbres dans la zone Natura 2000 qui borde la centrale. À Nogent-sur-Seine, l’exploitant paye le suivi scientifique de la Zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique de la Prée présente à l’intérieur du site. À Chooz, l’entreprise entretient une réserve naturelle au pied de la centrale. Les berges des rivières intégrées aux sites nucléaires semblent avoir été protégées de toute activité humaine, en dehors de celles découlant de l’exploitation des réacteurs, permettant ainsi le développement d’une faune et d’une flore potentiellement valorisables. L’électricien a rapidement compris l’intérêt de l’exploitation de ces écosystèmes pour son image, d’autant plus que les centrales sont les sites industriels les plus visités de France [13]. Ces stratégies permettent d’associer l’action d’EDF à un lieu à valeur symbolique, l’espace protégé. Cette dynamique est d’autant plus importante qu’EDF met en scène ces territoires en les aménageant avec des parcours de randonnées ou parfois en employant des guides pour animer leur visite.
25 La somme de ces actions passées et présentes démontre une véritable intelligence géographique de la part d’EDF. L’entreprise a non seulement identifié et corrigé la conflictualité locale de son action, mais elle a surtout su utiliser les ressources de son territoire à son avantage.
Conclusion
26 Pour être analysée, la stratégie énergétique d’un pays doit être considérée comme une politique d’aménagement, résultat d’un conflit entre acteurs aux intérêts différents et aux représentations contradictoires s’opposant pour déterminer l’usage du territoire. Sans minorer l’importance des enjeux globaux, tels l’extraction ou l’enrichissement de l’uranium, la géopolitique du nucléaire ne peut faire l’impasse sur l’étude des dynamiques internes.
27 Si l’existence de territoires de dépendance au nucléaire est le fruit de la rencontre fortuite entre une fiscalité locale et une infrastructure toutes deux exceptionnelles, elle est aussi le produit des stratégies proactives d’EDF. En prenant en charge, directement ou indirectement, le développement de leurs environnements, les centrales sont entrées dans la vie quotidienne des habitants. Cette implication de l’opérateur, qui a permis la greffe territoriale du nucléaire en France, est une des originalités que l’on ne retrouve pas en Allemagne où aucune des quatre entreprises du secteur (EnBW, Vattenfall, E. On et RWE) n’a entretenu sa relation avec le tissu local. Paradoxalement, les centrales outre-Rhin demeurent des industries socialement et économiquement banales pour lesquelles les élus locaux ne se sont pas battus, bien au contraire. Mais les réacteurs nucléaires ne sont que la part la plus visible de l’industrie atomique française. Les 456 entreprises actives dans la filière, réparties dans 64 départements, représentent potentiellement autant de territoires de défense de l’énergie atomique et d’acteurs dans le débat. C’est dans le dense maillage du pays par cette industrie, situation mondialement unique, que l’on peut trouver une des explications à l’exceptionnalité de l’électronucléaire en France.
Bibliographie
Bibliographie
- BATAILLE C. (1990), Rapport sur la gestion des déchets nucléaires à haute activité, rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.
- BOUVIER G. (2005), « Les collectivités locales et l’électricité. Territoires, acteurs et enjeux autour du service public local de l’électricité en France », thèse de doctorat en géographie, université Paris-VIII Vincennes-Saint-Denis.
- CHABERT L. (1987), « Introduction à l’étude du nucléaire rhodanien », Revue de géographie de Lyon, vol. 62, n° 2-3, Association des amis de la Revue de géographie de Lyon, Lyon.
- DUBESSET P. (1987), « Une retombée agricole du nucléaire rhodanien : les serres chauffées », Revue de géographie de Lyon, vol. 62, n°2-3, Association des amis de la Revue de géographie de Lyon, Lyon.
- FLAIRE D. (1978), « L’implantation des centrales nucléaires », in CHEVALIER J. (dir.), Centre, périphérie, territoire, Presses universitaires de France, Paris.
- HECHT G. (1998), The Radiance of France. Nuclear Power and National Identity after World War II (« Le rayonnement de la France : énergie nucléaire et identité nationale après la Seconde Guerre mondiale »), MIT Press, Cambridge, Massachusetts.
- INSEE (2014), « Une inscription territoriale diffuse pour la centrale nucléaire de Fessenheim », Insee Als@ce Actualités, n° 106.
- KITSCHELT H. (1986), « Political opportunity structures and political protest : anti-nuclear movements in four democracies », British Journal of Political Science, n° 16, Cambridge University Press, Cambridge.
- LAFAYE F. (1994), « Une centrale pas très... nucléaire. Revendications territoriales et processus identitaires lors de l’implantation du site nucléaire du Blayais à Braud-et-Saint Louis », thèse de doctorat en ethnologie, université de Paris X-Nanterre, 1 vol.
- ROVAN J. (1983), « Les raisons géographiques de la puissance des Verts en RFA », Hérodote, n° 28, La Découverte, Paris.
- TOPÇU S. (2013), La France nucléaire : l’art de gouverner une technologie contestée, Seuil, Paris.
- TOURAINE A. et al. (1980), La Prophétie antinucléaire, Seuil, Paris.
Notes
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[1]
Doctorant contractuel à l’Institut français de géopolitique, université Paris-VIII.
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[2]
Sa suppression en 2010 fait l’objet d’un cas d’étude quelques pages plus loin.
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[3]
Interview de Fabienne Stich parue dans l’édition du 2 février 2009 des Dernières Nouvelles d’Alsace.
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[4]
Interview de Michèle Marquet parue dans l’édition du 11 février 2009 de L’Union.
-
[5]
La rationalité de ce chiffre reste à déterminer. D’aucuns pourraient penser qu’il a été choisi afin de rapprocher le produit de ce nouvel impôt de celui de l’ancienne taxe professionnelle.
-
[6]
On retrouve ici la continuation de la péréquation départementale présentée auparavant.
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[7]
Interview de Jacques Pélissard parue dans l’édition du 16 novembre 2009 de L’Express.
-
[8]
Christian Bataille, député socialiste du Nord, est un des parlementaires les plus actifs d soutien à l’énergie nucléaire.
-
[9]
On peut évoquer les opérations RACINE (Régionalisation des activités de construction d’une installation nucléaire pour l’emploi), qui visaient, par exemple à Chinon, 85 % de la main-d’œuvre recrutée au niveau local.
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[10]
Environ deux tiers de l’énergie libérée par la réaction nucléaire n’est pas transformée en électricité et se perd en chaleur.
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[11]
On retrouve textuellement cet objectif dans les chartes de parrainage rédigées par les directions des centrales.
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[12]
Le greenwashing ou écoblanchiment est un procédé marketing visant à se donner une image écoresponsable.
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[13]
Dans les années 1980, plus de 300000 personnes visitaient les centrales nucléaires françaises chaque année. Les visites furent freinées par les mesures de sécurité mises en place après les attentats du 11 septembre 2001.