1 La Chine est aujourd’hui le seul pays au monde à entretenir des relations étroites avec les deux Corées dans le contexte d’une péninsule coréenne divisée, une spécificité qui rend parfois la politique chinoise envers chacun de ces deux États ambivalente. Les autorités chinoises peuvent ainsi participer aux sanctions internationales à l’encontre de la Corée du Nord, tout en maintenant avec elle des relations économiques et des coopérations frontalières. Elles peuvent aussi proposer l’établissement d’une zone de libre-échange et signer un « partenariat stratégique » avec la Corée du Sud, tout en critiquant fortement ses exercices militaires menés conjointement avec les États-Unis en mer Jaune. Ces diverses positions à première vue contradictoires répondent à une constante de la politique extérieure chinoise depuis maintenant plus d’une décennie : préserver la stabilité dans son environnement régional et approfondir les relations économiques avec ses voisins, deux facteurs primordiaux dans le souci de poursuivre son développement et sa croissance économiques.
2 Cette recherche de la stabilité est une quasi-obsession dans le cas de la péninsule coréenne, particulièrement chez les militaires et stratèges chinois. Historiquement, la Corée occupe en effet une place importante dans le dispositif sécuritaire de la Chine. Elle est un carrefour stratégique et un espace-pont en Asie orientale que la Chine a toujours cherché à contrôler, à défendre ou à stabiliser pour assurer la sécurité de ses frontières. Déjà, les armées Ming étaient intervenues pour aider le royaume de Corée, alors vassal de l’Empire chinois, contre les tentatives d’invasion japonaises au XVIe siècle. De même, c’est en partie pour contrerl’influence croissante du Japon en Corée et plus largement en Asie orientale que la dynastie Qing décide d’envoyer des troupes sur la péninsule en 1894. Enfin, l’intervention militaire chinoise dans la guerre de Corée en octobre 1950 visait surtout à défendre la frontière sino-nord-coréenne alors menacée par les troupes onusiennes. En somme, pour reprendre une formule officielle chinoise employée au début des années 1950, la Corée a toujours été la « lèvre qui protège les dents », une représentation d’autant plus importante que la plupart des affrontements militaires qui se sont déroulés sur la péninsule ont eu des impacts majoritairement négatifs pour la Chine sur le plan international. L’intervention de 1894 débouche sur la première guerre sino-japonaise, dont l’issue confirme la toute-puissance militaire du Japon, point de départ de son emprise ultérieure sur le territoire chinois. En plus de très lourds coûts humains et économiques, le soutien à l’armée nord-coréenne en 1950 présente quant à lui la Chine communiste comme un État agresseur aux yeux de la communauté internationale, ce qui contribue à lui fermer les portes de l’ONU, alors même que sa représentation était en débat.
3 L’histoire militaire témoigne donc de l’importance décisive de la péninsule coréenne, véritable « verrou géopolitique » pour la sécurité chinoise. Or dans le contexte actuel d’une péninsule divisée, de relations intercoréennes fluctuantes et d’une Corée du Nord nucléarisée, la péninsule coréenne est stratégiquement sensible pour la Chine, car tout bouleversement est susceptible d’avoir des impacts directs, non seulement sur ses intérêts nationaux dans la région, mais aussi sur la sécurité de sa frontière et son processus de modernisation. Depuis la division coréenne et la fin de la guerre de Corée, ce « verrou géopolitique » est surtout représenté par la Corée du Nord.
4 Globalement, la politique chinoise vis-à-vis de la péninsule comprend trois tendances : réduction des tensions concernant le dossier nucléaire nord-coréen, maintien des liens traditionnels et des relations économiques avec la Corée du Nord et coopération économique avec la Corée du Sud. Outre la stabilité et l’objectif de prévenir un potentiel nouveau conflit sur la péninsule, la politique chinoise est déterminée dans le cas coréen par un certain nombre d’incertitudes concernant le futur de l’alliance militaire entre la Corée du Sud et les États-Unis, le destin politique du régime nord-coréen et les retombées d’une hypothétique unification coréenne. Ces incertitudes sont d’autant plus grandes que des révélateurs d’instabilité potentielle se sont déjà manifestés le long de sa frontière avec la Corée du Nord. Ils concernent les réfugiés nord-coréens, la minorité coréenne de Chine et, par le biais d’une dispute historique avec la Corée du Sud, la question frontalière.
5 Les relations de la Chine avec les deux Corées illustrent aussi parfaitement l’émergence de la Chine comme arbitre régional et puissance mondiale, tout en interrogeant dans le même temps les limites et problèmes que cette émergence est susceptible de recouvrir. La participation active de la Chine dans l’organisation despourparlers à six, actuellement à l’arrêt, mais qu’elle semble vouloir relancer, est une façon pour elle de s’afficher comme une puissance conciliatrice, stabilisatrice et responsable, capable de résoudre les conflits régionaux. Le fort développement des relations économiques et culturelles avec la Corée du Sud est un témoignage de la politique de bon voisinage qu’elle développe à destination des pays qui composent son pourtour frontalier et son environnement régional, et dont un des principaux objectifs est de dissiper toute idée d’une future menace chinoise. Enfin, la poursuite d’une politique coréenne active n’est pas sans liens avec les rivalités stratégiques qu’elle entretient avec le Japon et les États-Unis. Par ce biais, elle tente d’exclure le Japon d’un rôle de leader régional et de concurrencer la prédominante et longue présence américaine en Corée du Sud. Ainsi, la politique chinoise en direction de la péninsule coréenne, et plus particulièrement de la Corée du Sud, peut-elle remettre en cause à plus ou moins long terme l’influence américaine ?
6 On le voit, la péninsule et les incertitudes coréennes sous-tendent de nombreux enjeux géopolitiques tant à l’échelle régionale que le long de la frontière. Ici, quatre grandes thématiques ont été privilégiées : la Chine et le programme nucléaire nord-coréen, les relations sino-nord-coréennes, les relations entre la Chine et la Corée du Sud et la frontière sino-coréenne. Cette analyse est principalement fondée sur une partie de nos travaux portant sur les dynamiques frontalières sino-coréennes, complétée par des ouvrages, articles et autres rapports occidentaux, chinois et coréens plus récents.
La Chine et le programme nucléaire nord-coréen
7 Le programme nucléaire nord-coréen constitue un enjeu de sécurité majeur pour les autorités chinoises, non pas parce qu’il constitue une menace directe dirigée contre la Chine, mais par ses éventuelles conséquences sur une prolifération à l’échelle régionale. La Chine craint en effet que la possession définitive de l’arme nucléaire par la Corée du Nord n’entraîne à terme, et par effet de domino, une course à l’armement en Asie du Nord-Est, incluant non seulement la Corée du Sud et le Japon, mais aussi Taïwan. Pour cette raison, les autorités chinoises ont toujours cherché à éviter la nucléarisation de la Corée du Nord, en s’impliquant activement dans l’organisation des pourparlers à six. Elles n’ont pas hésité non plus à soutenir les sanctions internationales, voire à adopter des mesures coercitives à l’encontre du régime nord-coréen lorsque ses transgressions, notamment les deux essais nucléaires d’octobre 2006 et de mai 2009, sont allées trop loin à leurs yeux. Ces actions de la Chine menées depuis 2003 contrastent avec celles plus passives de la décennie 1990 et témoignent d’une volonté de résoudre le problème par le dialogue et d’éviter ainsi tout risque de dérapage aux frontières du pays.
Le rôle actif de la Chine dans les pourparlers à six
8 Instaurés en août 2003, les pourparlers à six réunissent la Chine, la Corée du Nord, la Corée du Sud, les États-Unis, le Japon et la Russie. Leur but est d’œuvrer « de manière pacifique à une dénucléarisation vérifiable de la péninsule coréenne », ainsi que de parvenir à la signature d’un accord engageant la Corée du Nord à abandonner son programme et ses armements nucléaires, à renouer avec les termes du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et à accepter les inspections de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). En retour, les États-Unis promettent ne pas envahir ou attaquer la Corée du Nord avec des armes nucléaires ou conventionnelles tandis que la Corée du Sud s’engage à ne pas abriter d’infrastructures militaires nucléaires sur son territoire [Chu et Lin, 2008]. Malgré la tenue de nombreuses sessions, ces pourparlers n’ont pas encore atteint, début 2011, leur objectif principal. À l’arrêt depuis que la Corée du Nord s’est retirée du processus en avril 2009, ils n’en ont pas moins été un lieu de consultation multilatérale unique pour tenter de résoudre la crise nucléaire nord-coréenne. Beaucoup d’analystes perçoivent d’ailleurs en eux les fondations pour l’établissement à plus long terme d’un cadre de sécurité régionale qui permettrait de discuter de nombreux autres dossiers comme la dénucléarisation, la non-prolifération, les litiges maritimes, la protection de l’environnement, les problèmes de sécurité non traditionnels ou encore l’intégration économique [Jian, 2010]. Lors de la sixième session, le 21 juillet 2007, un groupe de travail sur la constitution d’un mécanisme de paix et de sécurité en Asie du Nord-Est a d’ailleurs été créé et pourrait représenter une première étape.
9 Ces pourparlers à six ont toujours été considérés par les autorités centrales chinoises comme un des dossiers majeurs de la politique étrangère du pays. Au-delà de leurs objectifs affichés, ils sont aussi une sorte de test pour la diplomatie chinoise et sa réelle capacité à œuvrer à la stabilité régionale. Ainsi, le ministère des Affaires étrangères, le département des liaisons du Parti communiste, mais aussi les plus hauts dirigeants, comme Jiang Zemin et Hu Jintao, ont tous fortement contribué à leur organisation. Plus globalement, depuis les premières sessions de 2003, organisées sur la demande des États-Unis, la Chine a régulièrement, par le biais de nombreuses rencontres diplomatiques préparatoires, poussé la Corée du Nord à s’asseoir à la table des négociations, contribuant ainsi à maintenir le plus longtemps possible le processus de discussion. Elle a également proposé des compromis clés facilitant la signature des accords de septembre 2005 et de février 2007, qui ont, un temps, été perçus comme d’importants premiers pas dans une future résolution de la question, avant que Pyongyang ne les dénonce, d’abord oralement, puis par la reprise de ses activités nucléaires. En bref, la Chine n’a pas hésité à déployer une diplomatie médiatrice, qui n’a toutefois pas réussi à éviterla nucléarisation de la Corée du Nord. Dans ce contexte, les incessantes transgressions nord-coréennes de ces dernières années (tirs de missiles balistiques de longue portée et essais nucléaires) ont fortement mécontenté les autorités chinoises qui ont fini par adopter des sanctions et des mesures coercitives.
Des sanctions minimalistes
10 Afin de marquer son opposition aux deux essais nucléaires nord-coréens, la Chine a supporté les résolutions 1718 (octobre 2006) et 1874 (juin 2009) du Conseil de sécurité des Nations unies, contrastant ainsi avec son ancienne stratégie d’abstention. Par ce biais, elle a donc accepté l’idée d’imposer des sanctions à la Corée du Nord, dont les principales consistent en un embargo sur les équipements militaires lourds, les marchandises associées à la production d’armes nucléaires et les produits de luxe, un gel des transactions financières et des avoirs financiers nord-coréens dans les banques étrangères, et une réduction temporaire des fournitures en pétrole. De nombreux rapports et articles de presse chinois, sud-coréens, japonais et occidentaux témoignent de prises de décision allant dans ce sens [Twomey, 2008]. Ainsi, la Chine aurait suspendu ses fournitures en pétrole en septembre et novembre 2006, puis en février et mars 2007. Elle aurait également mis un terme à ses échanges de matériels militaires, annulé certains projets d’investissement, suspendu des vols à destination de Pyongyang et conduit des inspections douanières à la frontière sino-nord-coréenne, fermant même pendant plusieurs jours quelques postes frontaliers. Les autorités chinoises ont aussi collaboré avec les États-Unis dans la préparation d’exercices multilatéraux de contre-prolifération (surveillance et arraisonnement des navires suspectés de transporter des armes de destruction massive) et dans l’imposition d’une série de sanctions financières contre Pyongyang. Un certain nombre de banques chinoises en joint-venture avec des banques nord-coréennes auraient ainsi arrêté leurs transactions financières avec la Corée du Nord. Enfin, la Chine aurait interdit le survol de son territoire aux avions nord-coréens à destination de l’Iran, car susceptibles de transporter du matériel nucléaire.
11 Sans dénier leur existence, ces actions chinoises posent toutefois un certain nombre de questionnements quant à leur tangibilité. Certains rapports récents d’origine américaine mentionnent en effet que la Corée du Nord continuerait d’utiliser les routes et l’espace aérien chinois avec peu de risque d’inspections et que les produits de luxe en provenance de Chine n’auraient jamais cessé d’affluer à Pyongyang. Ils notent également une nette reprise des échanges et de la coopération militaires depuis l’automne 2009 [Nanto et Manyin, 2010]. En fait, la Chine a adopté une approche minimaliste dans l’exécution des sanctions à l’encontre de laCorée du Nord. Les mesures prises ne sont jamais écrasantes et beaucoup d’entre elles n’ont été que temporaires. L’objectif pour les autorités chinoises n’est surtout pas d’étrangler le régime de Pyongyang, mais de le forcer à revenir à la table des négociations. En d’autres termes, les sanctions sont l’occasion d’exprimer un mécontentement et ne représentent en aucun cas le signe d’un abandon. Le maintien et l’ouverture de la Corée du Nord semblent rester la priorité absolue, malgré l’existence de débats et de différences de points de vue parmi les acteurs diplomatiques et militaires chinois.
Pour un maintien et une ouverture de la Corée du Nord
La Corée du Nord : un État tampon pour la Chine ?
12 Depuis sa participation à la guerre de Corée (1950-1953) en soutien des forces armées nord-coréennes, la Chine a toujours maintenu des relations étroites avec la Corée du Nord, à l’exception d’une forte période de tensions durant les pires années de la Révolution culturelle (1966-1969). Certes, ces relations ont progressivement changé de nature depuis la fin de la guerre froide, en raison des évolutions politiques et économiques internes à la Corée du Nord et de la redéfinition de la diplomatie chinoise vis-à-vis de la question coréenne, et plus largement de la communauté internationale. Ainsi, l’abandon par la Chine de la « politique d’une seule Corée » symbolisé par la normalisation des relations sino-sud-coréennes en 1992, la mort de Kim Il-sung en 1994, l’effondrement de l’économie nord-coréenne durant la décennie 1990 et la relance du programme nucléaire nord-coréen en 2002 ont rendu ces relations plus complexes, flexibles et pragmatiques. Pour autant, la Chine n’a jamais « abandonné » la Corée du Nord. Elle lui a fourni une précieuse aide énergétique et alimentaire au plus profond de la crise économique, l’encourage régulièrement à adopter la voie des réformes et de l’ouverture et continue à se positionner en médiateur lors des crises récurrentes qui l’opposent à la Corée du Sud et aux États-Unis. Derniers exemples en date, les autorités chinoises n’ont pas ouvertement condamné le régime de Pyongyang suite au torpillage de la corvette sud-coréenne Cheonan en mars 2010 et au bombardement de l’île de Yeonpyeong en novembre, appelant au contraire pour des pourparlers d’urgence refusés par Séoul et Washington.
13 Comment expliquer ce soutien et cette tolérance continus de la Chine alors même que des études montrent que la population chinoise est très critique vis-à-vis du régime nord-coréen et sa structure du pouvoir héréditaire, et que certains officiels et analystes chinois sont de plus en plus consternés par ses provocations répétées ? La réponse réside dans la volonté chinoise d’éviter un effondrementsoudain du régime nord-coréen qui menacerait la stabilité de la péninsule et, au-delà, du Nord-Est chinois. Selon les scénarios les plus souvent cités, cet effondrement pourrait provoquer un afflux de réfugiés en direction du Nord-Est chinois, laisser place à une guerre civile entre différentes factions du pouvoir nord-coréen, voire susciter un nouveau conflit Nord/Sud, autant de facteurs d’instabilité que la Chine ne souhaite pas voir surgir à proximité de sa frontière. L’avenir post-effondrement serait ensuite incertain en matière de sécurité. Une Corée unifiée, plus puissante sous l’influence d’un nouveau nationalisme coréen, pourrait représenter à son tour une menace sur des régions frontalières chinoises encore peuplées par une importante minorité coréenne. Enfin, le maintien par la Corée unifiée d’une alliance militaire avec les États-Unis entraînerait le stationnement des troupes américaines à proximité des rives du Yalu et du Tumen.
14 Cette dernière question des troupes américaines en Corée, comme le souci de maintenir la Corée du Nord, renvoie directement à la position de la Chine vis-à-vis d’une hypothétique unification coréenne. Officiellement, les autorités chinoises supportent l’unification de la péninsule, à condition que celle-ci soit effectuée pacifiquement, à travers des efforts concertés et graduels des deux Corées, et de manière indépendante, autrement dit sans la présence militaire des États-Unis [Park, 2010]. Si les autorités chinoises ont reconnu ces dernières années le rôle stabilisateur des troupes américaines en Asie orientale, en cela qu’elles freinent le retour d’une puissance militaire japonaise autonome, elles ne les considèrent pas moins comme un symbole de l’hégémonie des États-Unis dans la région et un important obstacle à l’unification de la péninsule. Ce point de vue est particulièrement dominant au sein des élites militaires, pour lesquelles la Corée du Nord constitue donc toujours un État tampon [Park, 2010]. Plus globalement, au regard des incertitudes que recouvriraient un effondrement du régime nord-coréen et une unification soudaine de la péninsule coréenne, la Chine préfère jouer la carte du statu quo et du maintien, ce qui passe aussi par une amélioration de la situation économique en Corée du Nord.
Les relations économiques sino-nord-coréennes et leurs implications stratégiques
15 Les relations économiques entre la Chine et la Corée du Nord se sont fortement approfondies depuis le début des années 2000. La Chine est désormais considérée comme vitale pour l’économie nord-coréenne. Son assistance énergétique et alimentaire, la croissance de ses investissements et l’augmentation du commerce bilatéral sont non seulement essentielles à la stabilité politique et sociale de la Corée du Nord, mais constituent également une source clé de technologies et de devises pour le régime nord-coréen. Près de 80% des biens consommés enCorée du Nord seraient actuellement d’origine chinoise. Cet approfondissement ne répond pas uniquement aux intérêts de sécurité, mais est aussi le résultat d’objectifs économiques fixés dans chacun des deux États. En Corée du Nord, il répond désormais à une volonté de construire une « nation forte et prospère » pour 2012, année du 100e anniversaire de la naissance de Kim Il-sung. Pour cela, le régime cherche à développer les infrastructures de transport ainsi qu’à moderniser et relancer la production minière (35 % du PIB en 2008 contre 8,3 % en 2005) et celle de d’électricité. Selon de récents rapports, huit villes (Pyongyang, Nampo, Sin?iju, W?nsan, Hamhung, Kimch’aek, Rajin-S?nbong et Ch’?ngjin) auraient également été dotées courant 2010 d’un nouveau statut de zone économique spéciale afin d’attirer des investissements étrangers [Lee, 2010]. Pour la Chine, la coopération économique avec la Corée du Nord constitue un des volets du plan de revitalisation du Nord-Est et de ses régions frontalières en cours depuis les années 2003-2004. Les acteurs économiques provinciaux et locaux du Liaoning et du Jilin y sont fortement impliqués et ont beaucoup investi dans leurs propres infrastructures pour faciliter le commerce frontalier et promouvoir les investissements.
16 Le plan de revitalisation du Nord-Est chinois prévoit en effet le renforcement de deux corridors de transport en direction de la péninsule coréenne. Le premier longe le golfe de Bohai, de Huludao à Dandong en passant par Dalian. L’objectif est de le prolonger en direction de Pyongyang, voire, à plus long terme, au-delà de la frontière intercoréenne à condition que celle-ci s’entrouvre à nouveau. Le prolongement jusqu’à Pyongyang semble en bonne voie. La construction d’une nouvelle route reliant Sin?iju à la capitale nord-coréenne serait en effet envisagée par les parties chinoise et nord-coréenne tandis que la Chine a financé seule la construction d’un nouveau pont routier entre Dandong et Sin?iju. Le second axe relie Oulan-Bator à Rajin et traverse la province du Jilin de part en part. Sa partie orientale, entre Changchun et Rajin, constitue la colonne vertébrale de la zone pilote de développement économique régional de Changjitu (Changchun-Jilin-Tumen), dont la mise en place a été officiellement approuvée par les autorités centrales en août 2009. La section nord-coréenne de cet axe, entre la frontière chinoise et les deux ports de Rajin et Ch’?ngjin, est majeure, car c’est par elle que devraient transiter à terme des marchandises chinoises à destination de la Corée du Sud et du Japon. Lors de la visite de Wen Jiabao à Pyongyang en octobre 2009, la Chine et la Corée du Nord ont ainsi signé un accord qui autorise la construction d’une section routière entre Hunchun et Rajin et attribue à la partie chinoise un droit d’exploitation d’une partie du port de Rajin. Cette volonté chinoise de sécuriser l’accès aux ports nord-coréens et à la mer de l’Est n’est pas nouvelle et était déjà au cœur du programme de développement de la région du fleuve Tumen (Tumen River Area Development Programme – TRADP), officialisé en décembre 1995 par la signature d’un accord entre le PNUD et les gouvernementschinois, russe, nord-coréen, sud-coréen et mongol. Pour la Chine, la mise en place de ce programme avait alors plusieurs enjeux qui sont toujours d’actualité. Outre d’accéder à la mer, il s’agissait de lancer le développement de la préfecture autonome des Coréens de Yanbian et de gagner en influence sur la péninsule coréenne et la scène nord-est asiatique [Colin, 2000 et 2004]. Ce programme n’a toutefois donné que des résultats médiocres, principalement en raison de la versatilité de la Corée du Nord qui a ralenti de nombreux projets. Il a même changé de nom en 2005 suite au retrait définitif de la partie nord-coréenne pour devenir le Greater Tumen Initiative. Ainsi, la mise en place de la zone de Changjitu par les autorités chinoises constitue à bien des égards un moyen de remédier à cet échec.
17 Dans ces contextes, le commerce entre la Chine et la Corée du Nord a connu une nette augmentation, passant d’une valeur de 370 millions de dollars en 1999 à 2,7 milliards en 2009. Près de 70% de ses flux traversent les villes frontalières de Dandong et de Sin?iju, point de passage traditionnel du commerce entre les deux pays, situé en aval du fleuve Yalu et traversé par l’axe ferroviaire Pékin-Shenyang-Pyongyang. Le reste transite par la petite ville de Ji’an et les localités frontalières de la préfecture autonome des Coréens de Yanbian. Les investissements chinois en Corée du Nord sont quant à eux passés d’une valeur d’un peu plus d’un million de dollars en 2003 à plus de 260 millions en 2009. Toutefois, en dépit de ce développement, les flux restent encore faibles en comparaison des valeurs enregistrées dans d’autres pays frontaliers de la Chine comme le Pakistan, le Kazakhstan, la Mongolie ou encore le Myanmar. Cette faiblesse s’explique par la présence d’un environnement encore peu favorable en Corée du Nord pour les investisseurs, en raison de la pauvreté des infrastructures et d’un régime encore réticent à jouer pleinement la carte de l’ouverture, mais aussi par l’identité des acteurs chinois majoritairement constitués de petites et moyennes entreprises. Contrairement au Kazakhstan et au Myanmar où les grandes compagnies pétrolières chinoises ont investi massivement, on ne trouve en Corée du Nord que deux des cent premières entreprises chinoises. Les principaux investisseurs sont généralement des petits entrepreneurs privés ou des entreprises publiques de niveau provincial, préfectoral ou municipal, surtout originaires (plus de 60% en 2009) des deux provinces frontalières du Liaoning et du Jilin, et plus particulièrement, dans cette dernière province, de la préfecture de Yanbian où la minorité coréenne constitue un acteur majeur [Thompson, 2011]. Les investissements chinois sont principalement présents dans cinq secteurs industriels qui sont l’extraction minière, l’industrie légère, les services, l’industrie lourde et les infrastructures de transport.
18 Cette coopération économique sino-nord-coréenne a d’énormes implications stratégiques. Son approfondissement oblige désormais les autorités chinoises à prendre en compte dans leur politique vis-à-vis de la Corée du Nord les intérêts des divers acteurs économiques chinois présents sur le territoire nord-coréen, et enpremier lieu ceux des provinces du Nord-Est. Or ces dernières sont favorables à la stabilité et à une plus grande ouverture de la Corée du Nord ainsi qu’à une reprise du dialogue de celle-ci avec la Corée du Sud afin d’espérer à terme une nouvelle ouverture de la frontière intercoréenne. Une autre implication stratégique réside dans l’existence d’une très forte et croissante dépendance de l’économie nord-coréenne vis-à-vis de la Chine. Cette dernière comptait en effet pour 73% du commerce extérieur nord-coréen en 2008 et représentait en 2010 près de 80 % des investissements étrangers présents en Corée du Nord [Lee, 2010]. De nombreuses voix en Corée du Sud s’inquiètent depuis quelques années de cette situation, certaines évoquant même une future « annexion » de la Corée du Nord par la Chinevia la création d’une « quatrième province du Nord-Est ». Sans aller jusque-là, il est clair que l’approfondissement des relations économiques entre la Chine et la Corée du Nord complique la politique américano-sud-coréenne vis-à-vis de Pyongyang, car il limite de fait l’isolement du régime nord-coréen et l’impact des sanctions internationales. Vue de Corée du Nord, cette dépendance vis-à-vis de la Chine n’est bien sûr pas ignorée. Le régime nord-coréen est encore soucieux de son indépendance et veille de temps à autre à contrôler l’afflux des investissements chinois. Il juge cependant l’influence économique chinoise beaucoup moins dangereuse que celle de la Corée du Sud, toujours susceptible de fragiliser son système. En ayant réussi à réformer et ouvrir son économie tout en maintenant son système politique, la Chine est par conséquent perçue comme un partenaire plus sûr.
Les relations sino-sud-coréennes : entre interdépendance économique et « anxiété politique »
19 Les relations entre la Chine et la Corée du Sud ont connu d’importants approfondissements depuis le début des années 1990. D’abord sourdes aux gestes d’ouverture sud-coréens, lancés dès le début des années 1970, parallèlement aux rapprochements sino-américains et sino-japonais, les autorités chinoises révisent progressivement leur position dans le courant des années 1980, percevant dès lors la Corée du Sud et sa forte croissance économique comme un potentiel partenaire du développement chinois. Les premiers contacts officiels sont établis dans la seconde moitié des années 1980 avec la signature d’accords commerciaux et la participation des sportifs chinois au jeux Olympiques de Séoul. La normalisation diplomatique intervient quant à elle en août 1992. Depuis, les échanges et les investissements croisés se sont multipliés à un rythme remarquable. La valeur du commerce bilatéral est ainsi passée de 6,4 milliards de dollars en 1992 à un peu plus de 156 milliards en 2009. Le pourtour de la mer Jaune et du golfe de Bohai est désormais un important espace d’interconnexions économiquessino-sud-coréennes. Aux investissements des grands groupes et PME sud-coréens, majoritairement implantés dans les provinces du Shandong, du Jiangsu et du Liaoning, ainsi que dans les municipalités de Pékin et de Tianjin, s’ajoute depuis le début des années 2000 une importante croissance des flux d’investissements chinois à destination de la Corée du Sud. Dans ce contexte, les autorités des deux pays évoquent depuis plusieurs années le projet d’établir une zone de libre-échange, en association avec le Japon. Le dynamisme des relations sino-sud-coréennes est également visible sur le plan éducatif et culturel. La vague culturelle sud-coréenne (Hallyu) divertit depuis plusieurs années la jeunesse chinoise tandis que les étudiants sud-coréens constituent de loin le premier groupe d’étudiants étrangers en Chine. Cette vitalité des relations économiques et culturelles est encadrée depuis mai 2008 par la signature d’un « partenariat stratégique » qui vise également à approfondir leurs échanges militaires (toutefois limités par le facteur nord-coréen) et leur collaboration dans les affaires régionales et mondiales.
20 Cette interdépendance économique sino-sud-coréenne est-elle susceptible de détourner la Corée du Sud de ses relations traditionnelles de sécurité avec les États-Unis au profit des intérêts géopolitiques de la Chine ? D’emblée, la réponse est non car la Chine, malgré une nette amélioration de son image, ne parvient pas à dissiper totalement la méfiance suscitée par son émergence et ses orientations stratégiques. L’image de la Chine en Corée du Sud est diverse et fluctuante. D’abord suzeraine d’une Corée complètement intégrée à la sphère d’influence sinisée et confucéenne, la Chine fut ensuite un adversaire du régime sud-coréen durant la guerre de Corée et la guerre froide, avant de devenir son principal partenaire économique durant les années 2000. La croissance des investissements, flux touristiques et programmes éducatifs croisés, ainsi que son rôle constructif dans les pourparlers à six ont progressivement crédité la Chine d’une image plutôt positive au sein de la société sud-coréenne alors même que le sentiment antiaméricain se renforçait. La mort de deux collégiennes sud-coréennes renversées par un véhicule de l’armée américaine en 2002 a en effet alimenté le débat sur la présence américaine en Corée du Sud et la question de la réduction des troupes durant une grande partie du mandat du président Roh Moo-hyun (février 2003-février 2008). Pour autant, si la Chine bénéficie aujourd’hui d’une image globalement supérieure à celle du Japon, elle ne parvient pas à triompher de la supériorité des États-Unis sur le plan de la sécurité. D’après des sondages menés au milieu des années 2000, le rôle de la Chine est certes perçu positivement dans les affaires économiques, mais reste doté d’un déficit de confiance dans les affaires diplomatiques et militaires [Lee, 2008]. En dépit de voix plus nombreuses souhaitant la réduction des troupes américaines et une diplomatie sud-coréenne plus indépendante, les États-Unis sont toujours considérés comme indispensables à la sécurité de la Corée du Sud. Les Sud-Coréens souhaitent certes une réduction des troupes américaines, maispas leur départ. Globalement, il subsiste dans les relations sino-sud-coréennes une certaine « anxiété politique », souvent sous-évaluée et nourrie par les incertitudes que procure la situation géopolitique de la péninsule [Kim, 2008]. Certains analystes sud-coréens mettent ainsi en doute le soutien par la Chine des objectifs politiques de la Corée du Sud à long terme, et plus particulièrement celui de l’unification, tandis que la Chine s’inquiète du futur statut des forces américaines sur la péninsule et des éventuelles orientations stratégiques d’une Corée unifiée. À cela s’ajoutent des tensions moins hypothétiques et passagères au sujet des réfugiés nord-coréens, de la minorité coréenne de Chine et du royaume de Kogury? qui représentent pour la Chine trois déterminants de la stabilité frontalière.
Quels enjeux autour de la frontière sino-coréenne ?
Les réfugiés nord-coréens : un facteur d’instabilité ?
21 Cela fait maintenant plus d’une décennie que des populations nord-coréennes traversent la frontière entre la Chine et la Corée du Nord afin d’échapper à la pénurie alimentaire, aux difficultés économiques et à la répression présentes dans leur pays. La majorité d’entre eux entrent en territoire chinois clandestinement. S’ils sont qualifiés de « réfugiés » ou de « demandeurs d’asile politique » par ceux qui veulent les protéger, ils sont en revanche considérés par les autorités chinoises et nord-coréennes comme des « migrants illégaux ». La Chine est là encore confrontée à l’inadéquation entre ses engagements internationaux et ses liens privilégiés avec le régime nord-coréen. Signataire de la convention des Nations unies relative aux réfugiés, elle a également signé en 1986 un accord avec la Corée du Nord sur le rapatriement des « migrants illégaux », l’obligeant théoriquement à reconduire à la frontière tout Nord-Coréen pénétrant illégalement sur son territoire. Il résulte de cette situation un comportement oscillant entre tolérance et répression en fonction du contexte local et international.
22 Le nombre de réfugiés nord-coréens actuellement présents en Chine est très difficile à estimer. La sensibilité du sujet, la nature clandestine de la migration et la forte mobilité des populations rendent tout recensement quasiment impossible. Les quelques chiffres cités dans les médias depuis maintenant plusieurs années (si bien qu’ils n’ont plus beaucoup de sens) divergent fortement les uns des autres, variant entre 100000 et 300000 selon les estimations. En 2006, le département d’État américain et le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) des Nations unies estimaient leur nombre entre 30000 et 50000 [Margesson, Chanlett-Avery et Bruno, 2007]. Enfin, une étude plus récente fait état d’une présence en 2009 de 10000 Nord-Coréens sur l’ensemble du territoire chinois et de 5700 pour la seuleChine du Nord-Est [Robinson, 2010]. Au-delà de ces incertitudes statistiques, il est en revanche avéré que l’effectif des populations nord-coréennes en Chine a fortement décliné depuis le début des années 2000. Trois raisons principales peuvent être évoquées pour expliquer ce déclin. La reprise d’une économie frontalière, consécutivement aux réformes nord-coréennes et aux politiques de développement régional chinoises, en constitue une première. Principalement entre les mains de la minorité coréenne, cette reprise est surtout caractérisée par une augmentation du commerce entre les villes frontalières situées de part et d’autre des fleuves Yalu et Tumen, permettant ainsi à un certain nombre d’habitants des régions frontalières nord-coréennes d’éviter de fuir en Chine pour survivre. En fait, en fonction des configurations locales, la structure de certains flux a pu être modifiée. Une partie des populations nord-coréennes se livre en effet à des allers-retours entre les régions frontalières chinoises, notamment la préfecture autonome des Coréens de Yanbian, et la Corée du Nord. Pour autant, malgré quelques timides améliorations économiques, la Corée du Nord reste un pays miné par des pénuries alimentaires chroniques, en proie à des désastres naturels récurrents et doté d’un régime réticent à prendre des mesures qui amélioreraient le bien-être et les droits humains de la population. Par conséquent, le déclin du nombre de Nord-Coréens en Chine est surtout à chercher dans la mise en place d’un contrôle plus strict aux frontières et le lancement de campagnes de traque à partir des années 2002-2003, en réponse aux incursions de certains réfugiés dans des ambassades occidentales à Pékin et parallèlement à l’émergence de la seconde crise nucléaire. Enfin, la non-reconnaissance par la Chine de l’asile politique pousse aussi une grande partie de ces populations à trouver refuge dans des pays tiers directement frontaliers de la Chine, qu’ils soient proches (Mongolie, Russie) ou plus lointains (Vietnam, Laos, Cambodge et Thaïlande). De là, certains réfugiés tentent d’obtenir l’asile politique dans les pays occidentaux (Angleterre, Allemagne, France, Canada et États-Unis) mais aussi, et surtout, en Corée du Sud, destination la plus recherchée. Depuis 1997, les réfugiés nord-coréens y sont juridiquement considérés comme des citoyens. Les autorités sud-coréennes, mais aussi certaines ONG et Églises évangélistes les prennent en charge et tentent d’accompagner ces populations, dont l’intégration dans la société d’accueil n’est pas toujours évidente.
23 Une autre transformation importante des flux migratoires nord-coréens à destination de la Chine réside dans leur très forte féminisation. Les femmes représenteraient les trois quarts des réfugiés installés dans le Nord-Est chinois en 2009 contre 50% en 1998 [Robinson, 2010]. Si certaines analyses évoquent le regroupement familial pour expliquer cette mutation, cette dernière est surtout le résultat d’un important déficit de femmes chinoises dans certaines campagnes et régions industrielles de Chine, et plus particulièrement dans le Nord-Est que de nombreuses femmes ont quitté à partir de la décennie 1990pour alimenter les flux d’émigration à destination de la Russie, de l’Europe ou de l’Amérique du Nord.
24 Au total, au vu des évolutions démographiques récentes, les réfugiés nord-coréens dans le Nord-Est chinois ne constituent pas pour l’instant un vecteur majeur d’instabilité. Les flux sont encore limités et les populations principalement féminines qui restent en Chine s’insèrent de gré ou de force dans la société par le biais du mariage. Ces populations sont avant tout des victimes, souvent soumises à l’arbitraire des populations locales ou des réseaux du crime organisé. Les autorités chinoises surveillent toutefois de près les relations que ces populations sont susceptibles d’entretenir avec la minorité coréenne de Chine et certaines ONG étrangères, notamment sud-coréennes, présentes sur le territoire chinois. Elles restent également attentives à l’évolution quantitative des flux. La grande inquiétude reste bien sûr l’hypothèse d’un effondrement brutal du régime nord-coréen qui pourrait entraîner une arrivée massive de populations nord-coréennes. À ce titre, les nombreuses infrastructures de transport construites dans les régions frontalières permettront sans doute, sinon une prise en charge, du moins une intervention plus rapide aux frontières des forces de sécurité. L’architecture multilatérale des pourparlers à six pourrait aussi être utilisée pour répondre à cette situation d’urgence.
La minorité coréenne de Chine : un enjeu géopolitique ?
25 La minorité coréenne de Chine (Chaoxianzu en chinois et Chos?njok en coréen) regroupe un peu plus de 1,9 million d’individus, vivant très principalement dans le Nord-Est chinois. La principale concentration se situe dans la préfecture autonome des Coréens de Yanbian, située dans la partie orientale du Jilin, aux frontières de la Russie et de la Corée du Nord. On y comptait près de 816000 Coréens en 2005, lesquels ne représentaient toutefois que 37% de la population totale de la préfecture contre 60 % de Han. Cette présence de populations coréennes à Yanbian et dans le Nord-Est est l’héritage de flux migratoires successifs originaires de la péninsule coréenne, très souvent spontanés entre les années 1860 et 1910, avant d’être en partie contrôlés durant la colonisation japonaise. Au tournant du XXe siècle, les Coréens de Yanbian (alors appelée Jiandao en chinois et Kando en coréen) ont constitué un important enjeu géopolitique entre la Chine et la Corée, puis le Japon, qui se disputaient la souveraineté de ce territoire frontalier. Depuis le début des années 1990, cette minorité coréenne de Yanbian est confrontée à une importante décroissance démographique, résultat conjugué d’une baisse du taux de croissance naturelle et d’un solde migratoire négatif. Le retard de développement de la préfecture a incité les populations coréennes à émigrer en direction des grandes villes et provinces côtières, en particulier dans le Shandong où s’implantent durant la décennie 1990 de nombreux investissements sud-coréens. Dans le même temps, l’ouverture des frontières et la normalisation des relations diplomatiques entre la Chine et la Corée du Sud en 1992 autorisent de nouveau les contacts économiques et culturels. La Corée du Sud et son développement économique fulgurant deviennent dès lors très attractifs pour les populations coréennes de Yanbian impatientes tout à la fois de découvrir une partie de leur pays d’origine et d’améliorer leur quotidien.
LES PEUPLEMENTS CORÉENS
LES PEUPLEMENTS CORÉENS
26 La décroissance de la population coréenne de Yanbian, dont la proportion dans la population totale diminue progressivement, a rapidement posé aux autorités de la préfecture la question du maintien, dans un avenir plus ou moins proche, du statut de « préfecture autonome » [Xu, 2001]. En effet, d’après la « loi sur l’autonomie régionale » de 1982, pour obtenir ce statut, l’entité administrative doit abriter une population minoritaire représentant plus de 30% de la population totale. Inquiètes, les autorités de la préfecture ont établi depuis la fin de la décennie 1990 de nombreuses mesures pour lutter contre ce dépeuplement et encourager la natalité de la minorité coréenne, pourtant non soumise à la politique de l’enfant unique et à la planification des naissances. En avril 2005, elles ont lancé une nouvelle politique visant à offrir des primes à tous les foyers coréens qui donneraient naissance à plus de deux enfants. De leur côté, les autorités provinciales du Jilin auraient déjà trouvé une nouvelle appellation à l’éventuelle future remplaçante de Yanbian. Ce serait la municipalité de Yanlongtu, une fusion toponymique de Yanji, Longjing et Tumen, les trois principales villes de la préfecture !
27 En attendant que se dessine l’avenir administratif de Yanbian, la minorité coréenne constitue-t-elle aujourd’hui un enjeu géopolitique pour les autorités centrales chinoises ? Ces dernières s’inquiètent effectivement de temps à autre de la résurgence éventuelle d’une trop forte identité coréenne même si, dans les faits, la situation est très ambivalente. Il faut en fait distinguer les populations qui quittent Yanbian pour d’autres régions chinoises et celles qui sont en contact avec les deux Corées. D’après des études récentes, les premières seraient en train de perdre leur identité ethnique à un rythme plus rapide que beaucoup d’autres nationalités minoritaires en Chine. Les jeunes Coréens de Chine affirmeraient de plus en plus leur sinité (citoyens de la RPC et membres de la nation chinoise) au détriment de leur identité coréenne, contrastant ainsi avec le comportement de leurs parents et grands-parents [Kim, 2010]. Les Coréens de Chine qui sont restés en contact avec les deux Corées ont un positionnement très variable vis-à-vis de celles-ci. Longtemps proches de la Corée du Nord, ils sont fortement déçus de ses évolutions politiques et économiques récentes. Le maintien du culte de la personnalité, la structure héréditaire du pouvoir, l’idéologie du Juche, l’absence totale de liberté individuelle et la situation des réfugiés sont autant d’éléments qu’ils critiquent fortement [Park, 1987 ; Choi, 2001]. Seuls quelques liens familiaux conservés parcertains d’entre eux témoignent d’une attache avec un pays, dont ils souhaitent l’ouverture économique. L’excitation de découvrir la Corée du Sud après 1992 et la possibilité de goûter à son haut et rapide développement économique ont également été entachées par la découverte d’une culture et d’une vie sociale complètement différentes des leurs et par de nombreuses difficultés d’adaptation [Olivier, 2000]. Ces multiples contacts entretenus avec les deux Corées ont surtout consolidé une identité « sino-coréenne » qui ne représenterait pas une véritable menace pour la stabilité politique et sociale. Au cours des années 1980 et 1990, la préfecture autonome des Coréens de Yanbian a d’ailleurs été qualifiée à plusieurs reprises par les autorités du Centre et de la province du Jilin de « collectivité modèle » (mofan jiti), signifiant ainsi que l’union entre les nationalités, c’est-à-dire avec les Han, y était jugée satisfaisante [Xu, 2001 ; Liu, 2001].
28 Cette situation n’empêche cependant pas d’autres sources de considérer la minorité coréenne comme une nationalité intermédiaire, « ni froide ni chaude » (bu leng bu re), ne manifestant pas de séparatisme, comme au Tibet et au Xinjiang, mais n’étant pas non plus « sans risque pour la stabilité sociale et politique de la région ». Une méfiance subsiste donc et les autorités surveillent attentivement depuis plusieurs années les contacts existant entre les Coréens de Chine et les réfugiés nord-coréens, de même qu’avec les ONG, parfois clandestines, qui tentent de leur venir en aide. Malgré tout, c’est surtout le regard que porte la Corée du Sud sur cette population qui inquiète parfois. Les autorités chinoises ont par exemple fortement critiqué ces dernières années un certain nombre de projets de réforme en Corée du Sud visant à faciliter l’accès à la nationalité sud-coréenne pour les populations coréennes de Chine. À cela s’ajoute également la concentration du peuplement coréen à Yanbian, encore d’actualité malgré les évolutions démographiques en cours, et plus particulièrement le long d’une frontière avec la Corée du Nord, officiellement délimitée et démarquée au début des années 1960, mais à bien des égards en suspens.
La frontière entre la Chine et la Corée du Nord vue de Corée du Sud : unefrontière en suspens ?
29 Établie sur les cours des fleuves Yalu et Tumen à la fin du XIVe siècle par les dynasties chinoise des Ming et coréenne des Yi, la frontière entre l’Empire chinois et le royaume coréen a été ensuite, entre le XVIIIe et le début du XXe siècle, l’objet de fréquentes disputes. Deux principaux secteurs ont été au centre des désaccords : le secteur du mont Changbaishan (Paektusan en coréen) et la région de Jiandao (Kando en coréen, correspondant grosso modo à l’actuelle préfecture de Yanbian) où s’installent alors de nombreux migrants coréens. En dépit de nombreuses négociations, la Chine et la Corée ne parviennent pas à s’entendre sur une strictedélimitation. C’est finalement le Japon, par le biais d’un traité (le traité de Jiandao) signé avec la Chine en 1909, qui confirme la souveraineté chinoise sur Jiandao tout en obtenant l’autorisation d’y implanter des représentations diplomatiques, commerciales et militaires. Le secteur du Changbaishan reste quant à lui libre de toute délimitation jusqu’à ce que la Chine et la Corée du Nord redélimitent leur frontière commune en 1962. Gardés secrets pendant plusieurs décennies, les traités de délimitation et de démarcation frontalières confirment les deux fleuves Yalu et Tumen comme supports du tracé de la frontière, partagent les nombreux bancs de sable et îles qui s’y trouvent, divisent le mont Changbaishan et donnent la quasi-totalité de la superficie de l’estuaire du fleuve Yalu à la Corée du Nord [Colin, 2006]. La nature secrète de ces traités, jumelée à des revendications ultérieures sur la totalité du Changbaishan par Kim Il-sung ou Mao Zedong, laisse parfois penser que la frontière sino-nord-coréenne est toujours disputée [Gomà, 2006]. Beaucoup de ces revendications ont toutefois eu lieu lors de périodes de tensions entre les deux pays ou pour répondre à des enjeux internes nécessitant une mobilisation des masses.
30 En fait, c’est bien plus l’hypothèse d’une future réunification coréenne (plus ou moins lointaine) pilotée par Séoul qui pourrait replacer la frontière sino-coréenne au centre de disputes, en particulier le secteur du Changbaishan, revendiqué dans sa totalité par les cartes officielles sud-coréennes, et peut-être l’ancienne région de Jiandao : deux territoires en partie légués à la Chine par le Japon colonial et la Corée du Nord. Il convient toutefois de mentionner que les autorités sud-coréennes ne se sont jamais prononcées clairement et officiellement sur la question frontalière. Les revendications émanent essentiellement pour l’instant de députés, d’intellectuels ou de membres de la société sud-coréenne. En septembre 2004, cinquante-neuf députés sud-coréens ont par exemple soumis à l’Assemblée nationale une résolution visant à annuler le traité de Jiandao de 1909. Alors en pleine dispute « historique » avec la Chine au sujet du royaume de Kogury?, l’Assemblée a prudemment rejeté le texte. Bien sûr, cette volonté d’annuler le traité de Jiandao pourrait n’être que symbolique et ne pas forcément sous-entendre une ferme revendication territoriale de la part d’une Corée réunifiée sur d’anciens territoires mandchous, et ce même si certains groupes nationalistes les considèrent parfois comme des « territoires coréens perdus » et se prononcent pour leur récupération. Elle n’en représente pas moins un facteur d’incertitude autour de la frontière, qui pousse la Chine à manifester de temps à autre ses préoccupations, voire à protester vigoureusement, auprès des autorités sud-coréennes. La controverse récente sur le royaume de Kogury? illustre assez bien cette inquiétude, tout en révélant une forte opposition entre deux identités nationales.
31 Entre 2002 et 2007, avec le soutien financier des autorités centrales chinoises, l’Académie des sciences sociales de Chine a mené un programme de recherches historiques et géographiques sur le Nord-Est chinois et ses frontières, appelé enchinois Dongbei gongcheng (projet Nord-Est). L’une de ces recherches a porté sur le royaume de Kogury? (Gaogouli en chinois) qui de – 37 à 668 a étendu sa puissance de part et d’autre de l’actuelle frontière sino-nord-coréenne, sur une bonne partie orientale de la Mandchourie et la moitié septentrionale de la péninsule coréenne. Publiés dans le courant de l’année 2003, les premiers résultats de cette recherche mentionnent alors l’histoire de Kogury?, un royaume considéré comme coréen par les historiographies coréennes, comme partie intégrante de l’histoire nationale chinoise. Leur lecture en Corée du Sud provoque immédiatement de très fortes réactions parmi les chercheurs, la société civile et le monde politique, allant même jusqu’à générer des tensions diplomatiques et nécessiter des négociations bilatérales de haut niveau pour tenter de trouver une issue en août 2004. Cette appropriation chinoise de l’histoire de Kogury? n’est pas nouvelle et s’inscrit dans cette volonté, née dans le courant du XXe siècle, de justifier l’unité ancienne des territoires et des nationalités minoritaires afin de donner une assise historique à un État-nation chinois en construction. Si les résultats ne confirment finalement que des positions anciennes partagées par la majorité des historiens chinois, on ne peut toutefois nier que la mise en place du programme prend part dans un contexte particulier, marqué par quelques incertitudes autour de la sécurité de la frontière sino-nord-coréenne (crise nucléaire nord-coréenne, flux de réfugiés nord-coréens à destination du Nord-Est chinois, etc.). Par conséquent, en réfutant l’existence d’un Kogury? coréen et donc d’une ancienne Mandchourie coréenne, cette confirmation de l’appropriation historique de Kogury? peut également être perçue comme une stratégie chinoise d’anticiper de futures revendications sur ses régions frontalières dans le cas d’une réunification soudaine de la péninsule. Du côté de la Corée du Sud, le royaume de Kogury? touche directement à l’identité nationale. Il est synonyme de puissance et d’indépendance, notamment vis-à-vis de la Chine, et la valorisation de son histoire a pris une grande place dans la construction identitaire coréenne à partir de la fin du XIXe siècle et dans le courant du XXe [Seo, 2008 ; Gries, 2005]. Or la revendication chinoise remet directement en cause cette indépendance et fragilise dans le même temps un point central du discours nationaliste coréen contemporain. Si les autorités chinoises et sud-coréennes ont fait preuve de retenue pour ne pas compromettre leurs dynamiques relations économiques, cette dispute a toutefois eu un impact important au sein de la société sud-coréenne et sur sa manière de percevoir la Chine. Elle contribue à alimenter une certaine méfiance. Depuis 2007 et la fin du programme de recherche Dongbei gongcheng, les positions des deux parties n’ont pas vraiment changé et la probabilité de futures disputes demeure, à moins que les efforts chinois, sud-coréens et japonais récents pour valoriser une histoire régionale, transnationale et partagée, comme base à l’établissement d’une future et éventuelle communauté est-asiatique, ne continuent de se développer et finissent par prendre le dessus sur les élans nationalistes.
Conclusion
32 La péninsule coréenne est donc un dossier complexe pour la Chine. Le programme nucléaire et la situation économique fragile de la Corée du Nord, l’alliance militaire entre la Corée du Sud et les États-Unis et la perspective de la réunification coréenne, certes peut-être lointaine, mais toujours envisagée, selon des scénarios qui vont de la réunification soudaine à la réunification progressive, de la réunification violente à la réunification pacifique, comportent diverses incertitudes géopolitiques aux autorités chinoises. Ces dernières tentent donc de les anticiper ou du moins de travailler à la mise en place du scénario le plus favorable aux intérêts nationaux. L’idéal pour la Chine consiste à pousser le régime nord-coréen à établir une politique d’ouverture économique graduelle sur le long terme, afin qu’il modernise et développe son économie aujourd’hui très fragile, et à engager un dialogue, également sur la durée, avec la Corée du Sud et les États-Unis concernant la dénucléarisation, ce qui permettrait dans le même temps de relancer la coopération économique intercoréenne. La question de l’unification pourrait être évaluée plus tard, à condition que l’avenir des forces américaines en Corée du Sud ait été clarifié ou que l’état futur des relations sino-américaines ne fasse pas de celles-ci un obstacle majeur, à condition aussi que les incertitudes concernant la frontière sino-coréenne aient été levées. Pour l’heure, la Chine préfère une péninsule coréenne divisée, mais stable, pacifique, si possible dénucléarisée, et engagée dans un processus de coopération économique, plutôt qu’une péninsule unifiée, mais potentiellement incertaine et pas forcément conforme à ses intérêts géopolitiques.
33 L’ouverture de la Corée du Nord et la relance de la coopération de part et d’autre de la zone démilitarisée coréenne seraient également très bénéfiques sur le plan économique, particulièrement pour la région du Nord-Est chinois qui pourrait ainsi profiter d’une plus forte intégration économique avec la Corée du Nord, mais aussi la Corée du Sud et au-delà le Japon, par le biais des grands corridors de transport transnationaux. L’axe Pékin-Shenyang-Dandong-Pyongyang-Séoul-Busan est pour l’heure inexistant mais est doté d’un potentiel économique important.
34 La réalisation de ce scénario « idéal » est toutefois dépendante des actions unilatérales, et parfois imprévisibles, du régime nord-coréen, motivées par des facteurs politiques internes ou par la perception que celui-ci a de la menace extérieure représentée par l’alliance sud-coréano-américaine. Elle est aussi dépendante des stratégies mises en place à Séoul et à Washington à l’extérieur du cadre des pourparlers à six, qui contribuent parfois à tendre la situation. La révélation d’un journal sud-coréen en janvier 2010 sur le projet d’intégration administrative de la Corée du Nord en cas d’effondrement du régime de Pyongyang par les autorités de Séoul ou encore la préparation d’un « plan d’opération 5029 », qui préparerait un désarmement de l’armée nord-coréenne par les armées sud-coréenne etaméricaine, ne sont pas étrangères aux tensions intercoréennes survenues ensuite en mer Jaune en mars et novembre 2010 [Cheong, 2010]. En somme, la marge de manœuvre de la Chine vis-à-vis de la situation sur la péninsule coréenne n’est pas sans limites.
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