Hérodote 2010/1 n° 136

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Article de revue

Traite des femmes et analyse géopolitique : focus sur le cas albanophone

Pages 150 à 165

Notes

  • [1]
    Diplômée de l’Institut français de géopolitique, section recherche, promotion 2009.
  • [2]
    Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée.
  • [3]
    Principalement des femmes et des enfants. L’exploitation sexuelle des hommes, bien qu’en plein développement, reste un sujet peu connu.
  • [4]
    La traite à l’échelle domestique correspond à la traite de nationaux au sein de leur propre territoire. Détectée dans 32 pays étudiés par l’ONUDC au cours de ses recherches, cette forme de traite reste peu prise en compte malgré le fait que, dans les pays la reconnaissant, elle apparaisse comme une part importante des statistiques, atteignant 26 % des victimes aux Pays-Bas. Le manque de prise en compte de la traite domestique vient de la difficulté à identifier un national comme victime de traite, les organismes de mise en application de la loi étant habitués à utiliser cette catégorie juridique pour des étrangers. Les cas sont généralement traités via les dispositions relatives à l’esclavage ou au travail.
  • [5]
    Émirats arabes unis, Israël, Maroc et Qatar.
  • [6]
    Notamment l’Allemagne, la Belgique, la Grèce, l’Italie et les Pays-Bas. Les informations concernant la France ne font pas mention des victimes nigériannes, néanmoins, selon la Brigade de répression du proxénétisme de Paris, elles tiennent une place majeure dans la prostitution à Paris.
  • [7]
    Suite à la rupture entre Tito (qui souhaitait annexer l’Albanie à la Yougoslavie) et Staline en 1948, l’Albanie, alliée jusque-là à la Yougoslavie, s’allie la Russie. Cependant, elle va refuser le projet de déstalinisation et rompre avec la Russie en 1961 pour s’aligner sur la Chine maoïste avant de se retrouver isolée après avoir rompu avec Pékin en 1978 suite au rétablissement des relations diplomatiques entre la Chine et les États-Unis.
  • [8]
    En juillet 1990, 5000 personnes se réfugient dans les ambassades occidentales pour tenter de gagner le statut d’émigrants politiques et partir vers la France, l’Allemagne ou l’Italie.
  • [9]
    Ancienne police politique.
  • [10]
    Dans son ouvrage La Traite des êtres humains, réalités de l’esclavage contemporain (La Découverte, Paris, 2006), G. Vaz Cabral présente la situation de la Bosnie, quasi similaire à celle du Kosovo, le déploiementd’une force de 50000 hommes ayant entraîné une forte augmentation de nombre de « maisons de prostitution », dont 20 à 50 % des clients provenaient de la force internationale.
  • [11]
    M. Chureau, « Étude géopolitique de la criminalité organisée albanophone, nature et facteurs de développement (approche comparative franco-européenne », mémoire de Master 1, juin 2008.
  • [12]
    Dans le cas de l’Allemagne, les polices des Länder n’ont pas l’obligation de fournir leurs informations au BKA (office central en charge du crime organisé dénué de vocation opérationnelle).
  • [13]
    Très souvent, malgré l’existence de lois contre la traite à des fins d’exploitation sexuelle, la méconnaissance des femmes quant à leur statut de victimes et le manque de formation des policiers à la détection de ces cas ont pour conséquence de voir les auteurs de traite jugés pour proxénétisme, ce qui allège énormément leurs peines et peut avoir des conséquences dramatiques pour les victimes. Selon Amnesty International, la situation est particulièrement alarmante en Grèce où beaucoup de femmes victimes de traite se voient reconduites dans leur pays pour infraction à la loi sur l’immigration avant qu’une enquête pour déterminer leur statut de victime de traite ait été ouverte.

1 Il y a aujourd’hui cinq ans que le protocole des Nations unies sur la traite des personnes [2] est entré en vigueur, instituant pour la première fois une définition universelle de la traite reconnue comme :

2

Le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contraintes, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation. L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes.

3 Bien que cette définition prenne en compte différents types d’exploitation pouvant toucher aussi bien les hommes que les femmes ou les enfants, le phénomène le plus connu reste l’exploitation sexuelle [3] (représentant 79% des cas de traite identifiés).

4 Cette prédominance ne doit pas être interprétée comme signifiant que la majorité des victimes de traite le sont dans le cadre de l’exploitation sexuelle, mais que cette forme d’exploitation est la forme la plus facilement identifiable. Ayant lieu au grand jour, dans les centres-villes, ou le long des axes routiers majeurs, l’exploitation sexuelle est clairement visible, contrairement à l’exploitation de la main-d’œuvre, l’exploitation domestique ou le mariage forcé ayant lieu derrière des portes closes. Cette grande visibilité facilite l’identification des cas de traite à des fins d’exploitation sexuelle par les services concernés et donc leur prise en compte dans les statistiques.

5 L’exploitation sexuelle des femmes, de par sa grande visibilité et sa reconnaissance quasi universelle, apparaît donc comme le type de traite principal et fait l’objet d’une attention croissante depuis la fin des années 1990. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un phénomène nouveau, l’ouverture des pays de l’Est, les crises économiques post-transition qu’ils ont subies et les transformations induites par la mondialisation des échanges (en particulier l’accroissement des écarts de richesse) ont favorisé son développement et la rapide prise de conscience de cette réalité dans les pays industrialisés, en particulier ceux d’Europe de l’Ouest qui ont connu une arrivée massive de femmes sur les trottoirs de leurs capitales. Selon l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), 120000 à 500000 femmes seraient trafiquées depuis l’Europe de l’Est vers l’Europe de l’Ouest chaque année et, selon Amnesty International, chaque année 1 à 2 millions de femmes seraient victimes de traite dans le monde. Si de plus en plus d’études sont réalisées, la plupart d’entre elles se centrent sur l’aspect sociologique et victimaire du trafic en se concentrant sur le vécu des victimes ou sur l’aspect juridique (avancées législatives, état de la coopération internationale, besoins), angle d’attaque favorisé par les organisations internationales comme l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) ou l’Organisation internationale du travail (OIT) ; très peu de travaux abordent la question sous un angle géographique alors que la demande pour des données géographiques précises (qui sont les trafiquants et d’où viennent-ils/elles ? Quelles sont leurs routes ? Quelle est l’ampleur des gains engendrés par le trafic ? Quelle situation pour demain ? Etc.) se fait de plus en plus pressante de la part des gouvernements. Il est primordial de comprendre que la nature souterraine du trafic rend toute étude globale particulièrement difficile si ce n’est impossible. Contrairement au trafic de drogues, la traite des êtres humains et donc le trafic de femmes sont des sujets d’étude très récents pour lesquels on ne dispose pas encore de bases de données internationales, notamment du fait du manque d’homogénéité sur le plan législatif. De plus, en ce qui concerne les activités illicites, toute analyse ne peut se fonder que sur les cas rapportés par les services de police (nationaux ou internationaux, Europol/Interpol) ou les organisations militantes actives dans la lutte contre l’exploitation sexuelle. Or, au problème lié à la divergence de conception quant à qui doit ou non être reconnu comme victime, s’ajoute le fait que les cas rapportés ne représentent qu’une infime partie de la réalité ; à partir de là, toute tentative de dégagement de logiques, routes ou tendances globales se trouvera très rapidement limitée. Les chiffres dont on dispose aujourd’hui sur le nombre de femmes exploitées dans le monde ou sur les revenus annuels de cette exploitation ne sont que de vagues estimations.

6 La traite des femmes est un phénomène particulièrement complexe qui s’analyse et s’étudie à différents niveaux et ce quel que soit l’angle d’attaque retenu. Si l’on choisit d’étudier le trafic sous l’angle sociologique, différents aspects doivent être envisagés : ce qui a conduit les femmes à leur exploitation, ce qui a mené les trafiquants à se lancer dans ce trafic, le vécu de la victime, l’impact de l’exploitation sexuelle sur la personne humaine, l’impact de l’exploitation humaine sur la société, etc. ; et il en est de même si l’on aborde la question sous un angle géographique : plusieurs niveaux d’analyse doivent être dégagés. Le trafic se déroule sur trois niveaux : transrégional, intrarégional et domestique [4].

Une réalité difficile à appréhender au niveau mondial

7 Le rapport de recherches réalisées par l’ONUDC sur la traite des personnes dans 155 pays membres (période 2003-2007) marque un apport majeur quant à l’appréhension géographique de ce phénomène. Il y apparaît clairement que si le trafic à l’échelle transrégionale est non négligeable, le trafic de personnes a lieu principalement sur de courtes distances, entre régions ou pays voisins. Pour mener à bien ses recherches, l’ONUDC a découpé le monde en onze régions (voir la carte n°1)

8 Les trafics transrégionaux – correspondant aux trafics transcontinentaux (par exemple entre l’Asie et l’Europe) ou entre deux régions d’un même continent (Europe de l’Est/Europe de l’Ouest ou Amérique centrale/Amérique du Nord, Afrique de l’Est et Afrique australe) –, qui sont les plus médiatisés, existent sur l’ensemble des zones étudiées.

9 L’Asie dans son ensemble représente une zone d’origine particulièrement importante. Les flux du trafic humain y sont très compliqués, particulièrement en ce qui concerne l’Asie de l’Est et le Pacifique, car c’est à la fois une zone d’origine pour de multiples trafics transrégionaux et pour divers trafics intrarégionaux. Des victimes est-asiatiques ont été repérées dans plus de vingt pays à travers le monde et dans l’ensemble des régions étudiées. Les informations sont moins nombreuses pour l’Asie du Sud et de l’Ouest, mais il semble que des victimes aient été identifiées au Moyen-Orient et en Europe.

CARTE 1

DÉCOUPAGE GÉOGRAPHIQUE DU RAPPORT MONDIAL SUR LA TRAITE DES PERSONNES

figure im1
Europe
de l’ouest
Europe de l’Est
et centrale et d’Asie
Amérique
du Nord
Amérique AfriqueduNord Asie
centrale Asie detePl’aEcsitfique
etcaraïbes AfriqueCentrale detuOSuuedst
et de l’Ouest Afrique
de l’Est
Amérique
du Sud
Afrique australe
Source : UNODC, Rapport Mondial sur la traite des personnes, 1998 Europa Technologies ltd
Limites des zones régionales
États pris en compte dans le rapport mondial ;
sont inclus : La République Dominicaine, Sainte Lucie, Saint Vincent et les Grenadines, Trinidad
et Tobago, Singapour, le Timor-Leste, les Iles Cook, les Iles Salomon, Kiribati, la Micronésie,
Nauru, La Nouvelle Calédonie, Niue, Palau, La Polynésie française, Samoa et Tuvalu
États non pris en compte dans le rapport mondial

DÉCOUPAGE GÉOGRAPHIQUE DU RAPPORT MONDIAL SUR LA TRAITE DES PERSONNES


Selon l'UNODC, le fait que certains pays n'aient pas été pris en compte pour l'analyse relève de divers
facteurs variant selon les pays concernés : tels que des contraintes budgétaires et de temps ;
des informations difficiles d'accès quand elles existent ; voire un refus des autorités de partager
les informations existantes.

10 Il est difficile de distinguer les zones d’origine et les zones de destination des femmes car les pays sont à la fois consommateurs et fournisseurs de prostituées mais il apparaît néanmoins que, dans le cadre du trafic transrégional, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord soient surtout une zone de destination pour les femmes d’Europe de l’Est, d’Asie centrale, d’Asie du Sud et d’Afrique subsaharienne, d’après les informations fournies par quatre pays  [5] sur les nationalités des victimes identifiées et les pays d’où ont été rapatriés leurs nationaux victimes de trafic.

11 L’Afrique centrale et de l’Ouest est principalement touchée par un trafic intrarégional et domestique. En ce qui concerne le trafic transrégional, pour lequel très peu d´informations sont disponibles dans le rapport, il s’agit avant tout d’une zone d’origine, principalement vers l’Europe de l’Ouest (d’après les informations fournies par le Burkina Faso et le Ghana mais aussi les observations réalisées par certains pays d’Europe de l’Ouest [6] ayant identifié de nombreuses victimes nigérianes) et, dans le cadre du trafic d’enfants, vers le Moyen-Orient (exploitation de jeunes garçons comme jockeys pour les courses de chameaux).

12 Pour le reste de l’Afrique, le manque de données ne permet pas d’établir de véritables tendances concernant les flux du trafic, on peut seulement noter que plusieurs victimes originaires d’Afrique de l’Est ont été rapatriées depuis l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique.

13 En Amérique du Nord, le trafic transrégional semble être la forme la plus développée, les victimes venant principalement des régions voisines (Amérique centrale, Caraïbes et Amérique du Sud) mais aussi d’Afrique, d’Asie et d’Europe.

14 Enfin, en Europe de l’Est et en Asie centrale, le trafic transrégional se déroule principalement avec les régions voisines, à savoir l’Europe de l’Ouest et centrale et les pays asiatiques voisins. L’Europe de l’Ouest, quant à elle, apparaît comme une zone de destination pour des flux transrégionaux en provenance d’Europe de l’Est et d’Asie centrale, d’Asie de l’Est et du Pacifique, d’Amérique du Sud, d’Afrique de l’Ouest et, dans une moindre mesure, d’Afrique du Nord.

15 En effet, de nombreux flux transrégionaux répondent en réalité à une logique plus locale qu’internationale, puisque existant entre régions très proches : Afrique centrale et de l’Ouest vers Afrique australe ; Amérique centrale et Caraïbes vers Amérique du Nord et Amérique du Sud, Amérique du Sud vers Amérique centrale, etc.

16 Outre le fait qu’ils sont prédominants, les niveaux intrarégionaux, et domestiques permettent une plus grande précision quant à l’analyse géographique. Paradoxalement en effet, la visibilité médiatique de la traite des femmes se fonde sur des chiffres très aléatoires, à partir desquels on fait des cartes peu fiables, alors que l’on aurait besoin, pour effectuer un diagnostic des enjeux de la traite, d’études plus nombreuses et précises, sur de petits territoires. Travailler sur de petits territoires permet d’aborder le sujet dans toute sa complexité, en s’intéressant notamment à ses modalités (à savoir les itinéraires et modes opératoires des trafiquants) et aux facteurs ayant entraîné son apparition et son expansion, ce qui est indispensable pour développer des politiques de lutte adaptées et efficaces. Pour lutter efficacement contre un phénomène criminel il est en effet primordial de comprendre les facteurs influant sur le comportement des trafiquants et de s’intéresser à la situation dans la zone d’origine.

De l’utilité d’une analyse localisée pour la compréhension des facteurs à l’origine de la traite : la traite organisée par les criminels albanophones

17 Les facteurs expliquant le développement de la traite à partir d’une zone varient selon les contextes socioéconomique, politique mais aussi culturel. Certaines constantes existent néanmoins comme l’accroissement des écarts de richesse et le désir migratoire, la guerre ou la faiblesse de l’État qui jouent un rôle important dans le développement de réseaux criminels et donc dans le développement du trafic de femmes.

18 Si l’on centre l’analyse sur la zone albanophone, le développent de la traite des femmes apparaît étroitement lié à l’apparition des réseaux criminels, elle-même liée à la désintégration économique et politique ayant suivi la fin du régime d’Enver Hoxha.

19 Tout au long de la décennie 1990 les évolutions politiques internationales et régionales, comme la chute du bloc soviétique, la levée des embargos sur la Yougoslavie ou le déclenchement de la guerre au Kosovo, se sont répercutées sur la zone albanophone créant des situations de crises économiques et sociales qui ont fortement favorisé le développement d’activités criminelles, considérées pourtant par nombre de ces trafiquants comme une simple activité de subsistance.

L’impact de la crise économique post-transition

20 Durant la guerre froide, l’Albanie a dû faire face à un profond isolement géopolitique suite à de multiples ruptures d’alliances [7] qui la laissèrent dans un état de profond sous-développement, renforcé par une gestion désastreuse de l’appareil de production. Or la situation s’aggrave encore après la chute du communisme ; la crise économique empire en raison de l’effondrement du système de production et de distribution, de la privatisation et de la lutte pour le pouvoir entre le parti d’opposition (PDA) et l’ancien Parti du travail albanais (PTA) devenu Parti socialiste albanais (PSA).

21 Malgré une révolution en douceur, les lendemains sont particulièrement difficiles sur le plan économique. La précipitation dans laquelle se fait la privatisation des fermes coopératives, sous un régime pourtant encore communiste (PSA) ne permet pas d’organiser un système durable ; les conflits sur les modalités de la restitution des terres ont pour conséquence une véritable crise au sein du monde paysan représentant à l’époque près de 60 % des travailleurs ; en 1992, 40 % des terres n’ont pas été ensemencées, les paysans n’ont souvent d’autre choix que de vendre le bétail qui leur fut attribué et de rejoindre les villes (où ils représentent parfois jusqu’à 30% de la population [Fuga, 2000]) pour trouver une activité de remplacement. Ces populations, particulièrement démunies, vont former un terreau propice au développement d’activités de type criminel qui seront vues pour nombre d’entre elles comme des activités de subsistance indispensables à la survie de leur famille.

22 De plus, les querelles politiques entre le PSA et la PDA (unis au sein d’un gouvernement de coalition suite au résultat des élections de 1991) vont accélérer la désagrégation du système de production, ce qui entraînera une pénurie et une inflation particulièrement forte : 300% en 1991 [Cabanes, 1999], et lourde de conséquences pour la population. Le PDA tient une grande responsabilité dans cette situation en ayant accéléré le processus d’effondrement du système de production par sa théorie du « niveau 0 » dont l’objectif était, au nom du slogan « éradiquer le communisme », de détruire usines, mines, plantations et coopératives agricoles. L’effondrement des systèmes de production et de distribution a eu pour conséquence de frapper directement la population albanaise qui se trouve dans l’incapacité de se nourrir ou de se chauffer, ce qui aboutit au développement d’un important marché noir de denrées alimentaires alimenté par le détournement de l’aide humanitaire.

23 Des réseaux criminels préexistants ou embryonnaires vont dès lors profiter de cette situation économique désastreuse et de la détresse des populations pour développer de nouvelles activités et étendre leurs zones d’influence. La volonté d’exode d’une partie de la population, exprimée dès 1990 par la crise des ambassades [8], est le point de départ du développement des réseaux qui vont mettre la main sur l’immigration par le canal d’Otrante, l’organiser, la développer et peu à peu l’utiliser dans une logique polycriminelle (cet itinéraire sera rapidement étendu au trafic de femmes mais aussi de drogues et d’armes).

24 La montée en puissance du PDA en 1991 et son arrivée au pouvoir après les élections législatives de 1992 ont donné un véritable coup d’accélérateur à la criminalité organisée dans la région. Dès 1991, certains membres de la Sigurimi [9] ont formé les premiers groupes criminels (ayant la main sur le trafic de migrants et de drogue) dans la ville de Vlora (ville traditionnelle de recrutement pour la Sigurimi, devenue un des points névralgiques des activités criminelles dans la région albanophone et le point central du trafic d’êtres humains). Puis, lors de l’arrivée au pouvoir du PDA, la volonté de rupture avec le passé communiste (doctrine du « niveau 0 ») a poussé les dirigeants à se débarrasser des anciens fonctionnaires communistes, majoritairement originaires du sud du pays, au profit de personnes du Nord, moins imprégnées de l’idéologie communiste. Ce choix a eu pour conséquences de réduire au chômage des milliers de fonctionnaires qualifiés, en particulier militaires ou anciens membres de la Sigurimi (devenue le service d’information national, SHIK, en juillet 1991), qui, disposant de réseaux importants et d’une connaissance parfaite de l’appareil de sécurité albanais et donc de ses lacunes, se sont, pour beaucoup, reconvertis dans des activités souterraines faisant du sud de l’Albanie la zone d’origine de la criminalité organisée albanophone. La volonté de renverser le favoritisme envers le Sud, entretenu sous la période soviétique, en faveur des populations du Nord a aussi eu pour conséquence une tolérance certaine de la part des autorités envers les violations de l’embargo sur la Yougoslavie, source de revenus importants pour les populations du Nord impliquées dans un trafic de produits pétroliers.

Le tournant des années 1995 et 1996

25 La fin de la guerre en Yougoslavie ainsi que la levée de l’embargo international sur ce pays et de l’embargo grec sur la Macédoine ont porté un coup sérieux aux réseaux criminels albanophones. Avant tout, la fin de la guerre en Yougoslavie a mis un terme à un trafic d’armes très prolifique (facilité par l’existence des nombreux stocks d’armes constitués sous le régime hoxhiste), géré par les groupes albanophones qui ont de surcroît souffert de la réouverture des voies traditionnelles de la route des Balkans (passant par la Yougoslavie depuis la période ottomane) qui a fortement diminué l’attrait des voies de substitution qui s’étaient créées en Albanie suite au déclenchement de la guerre en 1991. En effet, le déclenchement de cette guerre avait entraîné une réorganisation à travers l’Albanie, la Macédoine et le Kosovo des routes traditionnelles de l’héroïne qui, du fait du conflit et des embargos, étaient difficilement empruntables car plus contrôlées et donc beaucoup plus risquées pour les trafiquants. Leurs activités ont donc été mises à mal, d’autant plus que cela a mis un terme à la contrebande très importante qui existait entre les régions nord de l’Albanie d’un côté et la Serbie et le Monténégro de l’autre. Si cette contrebande principalement axée sur l’essence était d’abord relativement artisanale et réalisée par les particuliers des régions frontalières, elle a rapidement été organisée par des réseaux professionnels utilisant des camions pour le transfert des marchandises. Avec la surpression des embargos, une source de revenus primordiale des réseaux a disparu, ce qui a poussé les trafiquants à étendre leurs réseaux à l’Europe à partir de 1996 et à développer leur activité prostitutionnelle. Les groupes déjà présents en Europe de l’Est et en Europe de l’Ouest y ont renforcé leurs positions et de nouveaux groupes se sont implantés, faisant de villes comme Milan ou Prague de véritables plaques tournantes de leurs trafics et de nouveaux marchés ont été visés. La présence de la criminalité organisée albanophone dans les capitales européennes s’est rapidement faite de plus en plus visible, profitant de nouvelles crises comme la crise des pyramides financières pour connaître son apogée à partir de 1999-2000 lors de la crise du Kosovo, étape principale dans le développement de la traite des femmes dans la région.

Impact de la guerre du Kosovo et du déploiement de la force internationale en 1999

26 Ce conflit et sa gestion par la société internationale ont été particulièrement lourds de conséquences pour la zone albanophone ainsi que pour l’ensemble de l’Europe en occasionnant une véritable explosion criminelle dans la zone et le développement à grande échelle d’une des menaces criminelles majeures touchant actuellement l’ensemble de l’Europe : la prostitution organisée par les réseaux criminels albano-kosovars. La plupart des conflits s’accompagnent d’une recrudescence de l’activité prostitutionnelle mais ce qu’il est intéressant de noter dans le cas du Kosovo, c’est que, comme dans le cas de la Bosnie  [10], le déploiement d’une force internationale censée apporter la stabilité dans la région a au contraire joué un rôle important dans le développement de cette activité. Le rapport d’Amnesty International met en lumière l’impact négatif de l’implantation de militaires (40000) et fonctionnaires internationaux aux revenus élevés ayant entraîné un essor important de la prostitution, via le développement de maisons de prostitution, notamment au Kosovo, allant parfois jusqu’au développement de « centres de formation » dans certains night-clubs. Selon ce rapport, le nombre d’établissements qui exploiteraient des femmes au Kosovo serait passé de 18 en 1999 à plus de 200 en 2003. Selon Amnesty International, la MINUK, la KFOR et l’administration civile des Nations unies ont échoué dans leur devoir de protection des droits de l’homme envers ces femmes : les personnels internationaux sont estimés représenter 20 % des clients des réseaux de prostitution ainsi qu’une part importante des revenus de cette activité.

27 De plus, ce conflit a été à l’origine d’une vague migratoire très importante à destination de l’Europe occidentale, que ce soit de façon légale ou clandestine, qui a apporté avec elle des acteurs déjà engagés dans le crime organisé et favorisé le recrutement de populations émigrées, souvent clandestines, en situation de précarité. Les différents services de police rencontrés, français ou étrangers, ainsi que l’association du Bus des femmes témoignent du tournant qu’a marqué l’année 1999 pour la pénétration criminelle albanophone hors de sa zone d’origine. En effet, selon la Brigade de répression du proxénétisme de Paris et l’association du Bus des femmes, c’est à partir de la fin 1998 que les femmes albanophones arrivèrent en masse sur le marché de la prostitution parisienne.

Les modalités de l’expansion géographique de la traite des femmes

28 Dans la région balkanique, certaines routes du trafic organisé par des réseaux criminels albanophones ont pu être identifiées grâce aux observations réalisées par les polices italienne et grecque dès le début des années 1990.

29 Dès 1991, ces polices ont pu observer l’expansion internationale de ces réseaux et repérer, via de nombreuses arrestations, les principales voies utilisées pour exporter leurs trafics, en particulier les trafics de migrants et de femmes. Ainsi, les 247 kilomètres de frontière en zone montagneuse (culminant à 2530 mètres) entre l’Albanie et la Grèce ont permis le passage de nombreux migrants et de femmes destinées à la prostitution dans les villes grecques. En ce qui concerne l’Italie, la proximité entre le Sud-Ouest albanais et la région italienne des Pouilles via le canal d’Otrante (72 km, soit 1h30 de scafi (bateaux motorisés très rapides) a été massivement utilisée dès 1991. Après la chute du régime d’Enver Hoxha, des milliers d’Albanais ont franchi le canal ; l’exode fut d’abord spontané et désordonné mais très rapidement, et en collaboration avec la Sacra Corona Unita (qui leur fournissait des scafi), les réseaux albanais ont mis la main sur cette activité qui s’est peu à peu diversifiée au trafic de femmes et qui s’est énormément intensifiée lors de la crise financière qui a frappé l’Albanie en 1997.

30 La projection d’une activité criminelle intense sur une zone relève d’un cumul de facteurs. Dans le cas de la criminalité organisée albanophone, l’étude de la projection des réseaux et de leurs activités (notamment prostitutionnelles) aux marchés d’Europe de l’Ouest [11] a révélé que de multiples facteurs doivent être pris en compte, qu’ils soient historiques, culturels, géographiques, politiques, juridiques ou encore liés aux marchés (comme ce fut le cas en 1995 lorsque la levée des embargos sur la Yougoslavie a entraîné la réorientation des réseaux sur les marchés ouest-européens).

31 Les flux migratoires massifs offrent une opportunité de taille pour des criminels : en se faisant passer pour des réfugiés ou de simples migrants économiques, ils vont pouvoir se lancer sur de nouveaux marchés, et ce d’autant plus facilement qu’ils vont exploiter la situation précaire de leurs compatriotes récemment immigrés. Dans le cas de la criminalité albanophone, cela apparaît clairement pour la Belgique et l’Italie, les deux pays d’Europe de l’Ouest les plus touchés par leurs activités, notamment prostitutionnelles. Des liens anciens entre deux territoires, lorsqu’il s’agit d’une tradition migratoire à l’origine d’une communauté diasporique importante, peuvent en partie expliquer le choix de ce territoire par les générations suivantes forcées à la migration ; elles auront en effet plus de chance de se faire une place dans une société qui reconnaît déjà ces communautés, et pourront plus facilement y conserver (du moins en partie) leur culture du fait de la présence importante d’immigrés ou de nationaux originaires de leur région. En Belgique, la première vague d’immigration albanophone remonte aux années 1950 suite à l’instauration du régime communiste en 1946, qui entraîna une vague migratoire importante depuis les régions montagneuses du Nord, hostiles au régime hoxhiste. À la fin des années 1960 s’ajoutèrent les immigrés de Yougoslavie qui arrivèrent de plus en plus nombreux au cours des années 1970 et 1980 du fait de l’accord passé entre la Belgique et la Yougoslavie pour l’importation de travailleurs migrants, des conditions économiques difficiles, de la forte répression des mouvements de protestation et de la suppression progressive de l’autonomie de la province du Kosovo. Ainsi, avant même le début des années 1990 et des troubles qui ont entraîné le développement du crime organisé dans la zone albanophone, la Belgique accueillait la communauté albanophone la plus importante d’Europe. Dans le cas de l’Italie, bien que cela puisse sembler superficiel, le fait que la télévision italienne soit captée dans la région albanophone a joué pour beaucoup dans le développement massif de l’immigration de sa population vers l’Italie, les individus étant véritablement imprégnés de culture et de langue italiennes. En effet, la majorité des albanophones parle l’italien ou en maîtrise au minimum les fondamentaux, ce qui, en plus de renforcer l’attrait pour ce pays, le rend beaucoup plus accessible. Lorsqu’on est plus ou moins familier avec le pays, sa langue et sa culture, il est dès lors beaucoup plus facile de formuler un vrai projet d’avenir orienté vers la recherche d’un emploi légal ou le projet de suivre une formation, qui sont des éléments récurrents des récits de victimes.

32 Les facteurs liés aux politiques de lutte contre la traite, en particulier les dispositions législatives relatives à cette activité ainsi que la volonté politique et les capacités des services influent sur le fait que l’activité puisse ou non se maintenir sur un territoire. En effet, une législation accommodante vis-à-vis de la prostitution, comme c’est le cas en Allemagne, en Belgique, en Grèce et aux Pays-Bas (où la prostitution est légale, considérée comme une vraie profession donnant droit au statut de travailleur indépendant, voire de salarié), offre une grande opportunité aux réseaux criminels actifs dans la traite. Bien que ces pays encadrent clairement l’activité et réprime le proxénétisme par coercition (voire même le proxénétisme simple pour la Belgique), ces marchés restent intéressants pour les réseaux qui peuvent détourner les lois relativement facilement, d’autant que le marché y est important contrairement à un pays comme la Suède où la législation, extrêmement répressive et criminalisant le client (qui risque une amende et jusqu’à six mois de prison), a un impact direct sur la demande. Ainsi, selon la police judiciaire belge, en Belgique de nombreuses femmes qui se disent indépendantes sont en réalité sous la coupe de proxénètes albanophones qui n’ont pas de mal à leur procurer de faux papiers et à les forcer au silence. De plus, il ne faut pas oublier l’importance de la volonté politique et des capacités policières qui sont les deux principaux facteurs influant sur le succès ou l’échec d’une politique de lutte, qu’elle soit nationale ou internationale. Or la multiplication des services opérant sur le sujet et le mauvais partage des informations lié à une certaine culture du secret entretenue dans ces services posent un frein majeur à l’appréhension de la traite. Non seulement cela empêche les autorités politiques nationales d’avoir une vision précise du phénomène et donc de prendre des mesures adaptées, mais cela se répercute au niveau international, les organismes comme Europol ou Interpol tenant leurs informations des offices centraux nationaux, qui peinent souvent eux-mêmes à obtenir des informations [12]. Enfin, une lutte efficace est étroitement liée aux capacités des services d’appliquer les lois en vigueur – ce qui fait parfois défaut dans le cadre des lois sur la traite –  [13] et de s’adapter aux méthodes des trafiquants, notamment à leur grande mobilité qui rend la lutte extrêmement difficile sur certains territoires, en particulier les régions frontalières.

Frontières et traite des femmes

33 Aborder la question de la traite des femmes sous un angle géopolitique impose en effet de s’intéresser à la question de la frontière. Outre la question de la frontière directe avec la zone d’origine qui fait du pays frontalier une zone d’expansion privilégiée – comme on l’a vu avec l’Italie ou la Grèce –, les zones frontalières et multifrontalières sont en général particulièrement concernées par les activités illicites car elles représentent un intérêt stratégique majeur pour les acteurs criminels : la mobilité. Pouvoir se déplacer rapidement est une nécessité impérative pour les acteurs criminels. Quelle que soit la nature de leurs activités, ils sont avant tout des commerçants dont l’objectif est de réaliser un maximum de profit, ce qui sous-entend de pouvoir multiplier leurs activités en étant actifs sur plusieurs marchés à la fois tout en réduisant les risques au minimum. Rien n’est laissé au hasard et si, une fois qu’ils ont réussi à s’installer sur un marché, celui s’avère moins lucratif, du fait d’un renforcement de la loi ou de la focalisation des services de police sur leurs activités, ils quittent le territoire pour un autre plus favorable. Cette situation a notamment été observée par la police judiciaire fédérale belge qui a vu l’activité prostitutionnelle gérée par les réseaux albanophones se déplacer au gré des interventions policières entre 1999 et 2008, depuis Bruxelles et Anvers en 1999 vers Liège en 2000-2001, puis Charleroi et Hasselt en 2002 jusqu’à traverser les frontières en 2003 pour s’implanter dans les villes frontalières d’Herleen (Pays-Bas) et d’Aix-la-Chapelle (Allemagne) avant de revenir sur Liège.

CARTE 2

DÉPLACEMENT DE L’ACTIVITÉ PROSTITUTIONNELLE

figure im2
Mer du Nord PAYS-BAS
Anvers
ALLEMAGNE
Heeden
Hasselt
Bruxelles
Liège
Aix-la-
Charleroi Chapelle
FRANCE
Premières zones d'activité
des criminels albanophones actifs
sur le marché de la prostitution (1999)
Zones d'activité en 2000-2001 LUX.
Zones d'activité en 2003-2004
Zones d'activité en 2004-2009
Premier déplacement (2000-2001)
Deuxième déplacement (2002)
Troisième déplacement (2003-2004)
Dernier déplacement, retour vers
les zones d'activité d'origine (2007-2008) 50 Km

DÉPLACEMENT DE L’ACTIVITÉ PROSTITUTIONNELLE

34 Les zones frontalières et multifrontalières sont donc particulièrement intéressantes pour les acteurs criminels, en particulier en Europe où, si les frontières sont complètement ouvertes sur le plan humain, elles ne le sont pas sur le plan juridique et leur offrent donc la possibilité de déplacer leurs activités mais aussi de se réfugier dans un pays voisin s’ils se trouvent recherchés par la police. Malgré les accords de coopération policière en vigueur en Europe, la longueur des démarches administratives leur laisse généralement le temps de prendre de la distance.

35 Le développement d’une connaissance globable de la traite des femmes, mais aussi de la traite en général, à l’image de la connaissance actuelle en matière de trafic de drogues, devra passer par le développement d’études de fond à grande échelle afin de saisir toute la complexité de ce phénomène en matière de flux et tout le spectre de logiques à l’œuvre dans son développement, sans quoi la définition d’une politique internationale efficace sera impossible, celle-ci devant être nécessairement globale du fait de la nature profondément transnationale de ce trafic mais néanmoins adaptable aux spécificités locales. Cela ne sera cependant pas possible tant que les conceptions (et législations) nationales de la traite ne seront pas plus homogènes, les disparités restant trop importantes pour développer une approche commune.

Bibliographie

Bibliographie

  • AMNESTY INTERNATIONAL (2004), « Does that mean I have rights ? Protecting the human rights of women and girls trafficked for forced prostitution in Kosovo ».
  • BJELICA J. (2005), Prostitution : l’esclavage des filles de l’Est, Paris-Méditerranée, Paris.
  • CABANES P. et B. (1999), Passions albanaises de Bérisha au Kosovo, éditions Odile Jacob, Paris.
  • Cahiers de la Sécurité (2009), La Traite des êtres humains, un défi mondial, n° 9.
  • CHASSAGNE P., GJELOSAJ K. (2001), « L’émergence de la criminalité organisée albanophone », CEMOTI, n° 32.
  • EUROPOL (2006), « Crimes against persons unit, trafficking of women and children for sexual explotation in the EU : the involvment of western Balkans organised crime 2006 », Public version.
  • FARCY F. (2002), « Comment s’implante la mafia albanaise à l’échelle locale, nationale puis européenne ? » (étude disponible sur le site du DRMCC).
  • FARCY F. (2007), Conférence « Europe et crime organisé. Le crime organisé albanophone : exemple de menace » pour le colloque international « L’Europe et les nouvelles menaces criminelles ».
  • FUGA A. (2000), Identités périphériques en Albanie, L’Harmattan, Paris.
  • GJELOSHAJ K., WAELE J.-M. (2000), « La République d’Albanie et la question du Kosovo », CEMOTI, n° 29.
  • JARVIS C. (2000), « Grandeur et décadence des pyramides financières en Albanie », Finances et développement, vol. 37.
  • METAIS S. (2006), Histoire des Albanais, des Illyriens à l’indépendance du Kosovo, Fayard, Paris.
  • UNITED NATIONS OFFICE ON DRUGS AND CRIME (2009), Global Report on Trafficking in Persons.
  • VAZ CABRAL G. (2006), La Traite des êtres humains, réalités de l’esclavage contemporain, La Découverte, Paris.
  • Divers entretiens réalisés en 2008 pour la rédaction du mémoire de recherche « Étude géopolitique de la criminalité organisée albanophone, nature et facteurs de développement (approche comparative franco-européenne) » : police judiciaire française, police judiciaire fédérale belge, Europol, association « Les Amis du Bus des femmes », etc.

Notes

  • [1]
    Diplômée de l’Institut français de géopolitique, section recherche, promotion 2009.
  • [2]
    Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée.
  • [3]
    Principalement des femmes et des enfants. L’exploitation sexuelle des hommes, bien qu’en plein développement, reste un sujet peu connu.
  • [4]
    La traite à l’échelle domestique correspond à la traite de nationaux au sein de leur propre territoire. Détectée dans 32 pays étudiés par l’ONUDC au cours de ses recherches, cette forme de traite reste peu prise en compte malgré le fait que, dans les pays la reconnaissant, elle apparaisse comme une part importante des statistiques, atteignant 26 % des victimes aux Pays-Bas. Le manque de prise en compte de la traite domestique vient de la difficulté à identifier un national comme victime de traite, les organismes de mise en application de la loi étant habitués à utiliser cette catégorie juridique pour des étrangers. Les cas sont généralement traités via les dispositions relatives à l’esclavage ou au travail.
  • [5]
    Émirats arabes unis, Israël, Maroc et Qatar.
  • [6]
    Notamment l’Allemagne, la Belgique, la Grèce, l’Italie et les Pays-Bas. Les informations concernant la France ne font pas mention des victimes nigériannes, néanmoins, selon la Brigade de répression du proxénétisme de Paris, elles tiennent une place majeure dans la prostitution à Paris.
  • [7]
    Suite à la rupture entre Tito (qui souhaitait annexer l’Albanie à la Yougoslavie) et Staline en 1948, l’Albanie, alliée jusque-là à la Yougoslavie, s’allie la Russie. Cependant, elle va refuser le projet de déstalinisation et rompre avec la Russie en 1961 pour s’aligner sur la Chine maoïste avant de se retrouver isolée après avoir rompu avec Pékin en 1978 suite au rétablissement des relations diplomatiques entre la Chine et les États-Unis.
  • [8]
    En juillet 1990, 5000 personnes se réfugient dans les ambassades occidentales pour tenter de gagner le statut d’émigrants politiques et partir vers la France, l’Allemagne ou l’Italie.
  • [9]
    Ancienne police politique.
  • [10]
    Dans son ouvrage La Traite des êtres humains, réalités de l’esclavage contemporain (La Découverte, Paris, 2006), G. Vaz Cabral présente la situation de la Bosnie, quasi similaire à celle du Kosovo, le déploiementd’une force de 50000 hommes ayant entraîné une forte augmentation de nombre de « maisons de prostitution », dont 20 à 50 % des clients provenaient de la force internationale.
  • [11]
    M. Chureau, « Étude géopolitique de la criminalité organisée albanophone, nature et facteurs de développement (approche comparative franco-européenne », mémoire de Master 1, juin 2008.
  • [12]
    Dans le cas de l’Allemagne, les polices des Länder n’ont pas l’obligation de fournir leurs informations au BKA (office central en charge du crime organisé dénué de vocation opérationnelle).
  • [13]
    Très souvent, malgré l’existence de lois contre la traite à des fins d’exploitation sexuelle, la méconnaissance des femmes quant à leur statut de victimes et le manque de formation des policiers à la détection de ces cas ont pour conséquence de voir les auteurs de traite jugés pour proxénétisme, ce qui allège énormément leurs peines et peut avoir des conséquences dramatiques pour les victimes. Selon Amnesty International, la situation est particulièrement alarmante en Grèce où beaucoup de femmes victimes de traite se voient reconduites dans leur pays pour infraction à la loi sur l’immigration avant qu’une enquête pour déterminer leur statut de victime de traite ait été ouverte.
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