Hérodote 2008/2 n° 129

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Article de revue

La stratégie politique américaine en Azerbaïdjan

Pages 123 à 143

Notes

  • [*]
    Doctorante en anthropologie politique, EHESS.
  • [1]
    Joseph S. Nye Jr, « Propaganda Isn’t the Way : Soft Power », The International Herald Tribune, 10 janvier 2003.
  • [2]
    En effet, les cinq pays riverains ne sont pas encore arrivés à un accord sur le statut même de cette mer. L’Iran considère que la Caspienne est un lac et doit être régie en conséquence, c’est-à-dire par un contrôle commun ou un partage égal des ressources. La Russie, l’Azerbaïdjan et le Kazakhstan s’accordent pour lui reconnaître le statut de mer fermée et chaque État riverain peut donc, proportionnellement à la longueur de ses côtes, en exploiter les ressources.
  • [3]
    24% en 2007 ; 36% en 2006; le budget du pays a augmenté de 40% en 2007 et celui de 2008 devrait atteindre près de 10 milliards USD.
  • [4]
    Le Freedom Support Act est adopté à l’automne 1992 par le Congrès américain.
  • [5]
    Discours du sénateur Sam Brownback, président de la sous-commission des Affaires étrangères du Sénat pour le Proche-Orient et l’Asie du Sud, 23 mars 1999.
  • [6]
    Il est remis à jour en mai 2006.
  • [7]
    Ce document modifie le Foreign Assistance Act de 1961.
  • [8]
    White House Paper on a New National Security Strategy, décembre 1999.
  • [9]
    Accord bilatéral pour le commerce signé en 1995.
  • [10]
    Dont la visite à Bakou en septembre 1994 de Madeleine Albright, ambassadrice américaine auprès des Nations unies.
  • [11]
    Ligne Kars-Akhalkalaki-Tbilissi-Bakou (KATB).
  • [12]
    Le 25 janvier 2002.
  • [13]
    En 2006, Bakou avait 150 personnels en Irak, 22 personnels en Afghanistan et 34 personnels au Kosovo.
  • [14]
    L’Azerbaïdjan est partenaire de l’Alliance depuis 1994 à travers le programme Partenariat pour la paix (PPP).
  • [15]
    Organisation rassemblant la Géorgie, l’Ukraine, l’Azerbaïdjan et la Moldavie, renommée ainsi depuis le départ de l’Ouzbékistan en 2005.
  • [16]
    Contre une rémunération de 7 millions USD par an.
  • [17]
    CASFOR.
  • [18]
    Dont font partie, entre autres, « For the Sake of Civil Society », « Coordinating Advisory Council for Free and Fair Elections »...
  • [19]
    Résolutions 822 (1993), 853 (1993), 874 (1993) et 884 (1993) du Conseil de sécurité des Nations unies.

1L’Azerbaïdjan est un cas pratique très intéressant de l’exercice du soft power américain. Joseph Nye, théoricien du soft power, définit le pouvoir comme étant la « capacité de parvenir au résultat que l’on souhaite et d’être capable, si nécessaire, de changer le comportement des autres pour y arriver [1] ». Ce pouvoir met en œuvre des ressources pour séduire et coopter un partenaire plutôt que de le soumettre de force (hard power). Les moyens pour assurer le leadership américain en Azerbaïdjan sont de trois ordres : la coopération économique, la coopération dans le domaine militaro-sécuritaire et la promotion de la démocratie et de l’État de droit. L’objectif à atteindre étant de convertir ce pays nouvellement indépendant à un système de pensée et de valeurs qui permettra de développer et de soutenir les intérêts américains dans la région. Or, de récentes divergences sur les nouveaux objectifs et moyens de la politique régionale américaine ont quelque peu distendu ces relations. De plus, les objectifs stratégiques de l’Azerbaïdjan changent et certains diffèrent désormais des options géopolitiques américaines. La prise de conscience de la puissance économique et politique que les ressources en hydrocarbures confèrent à l’Azerbaïdjan a sensiblement modifié les termes et le ton général de la relation avec ce pays où la poussée d’un certain sentiment antiaméricain montre les limites de cette politique de séduction.

2L’Azerbaïdjan (8,3 millions habitants et 86600 km2 ) est situé sur les bords de la mer Caspienne, élément déterminant de son histoire au XXe siècle en raison du potentiel en hydrocarbures supposé de cette mer, dont le statut juridique, et donc la délimitation des eaux entre les cinq pays riverains, n’est toujours pas résolu [2]. Les réserves connues de pétrole azerbaïdjanais oscilleraient entre 7 et 13 milliards de barils. La production pétrolière devrait atteindre en 2009 environ 1 million de barils/jour et se maintenir à ce rythme pendant quatre ou cinq ans, avant de décroître progressivement jusqu’en 2024. En 2007, la croissance économique de ce pays est l’une des plus élevées au monde [3]. Autre fait important : ce pays n’a signé qu’un accord de cessez-le-feu avec les forces arméniennes qui, depuis la guerre au Haut-Karabakh, occupent une partie des territoires azerbaïdjanais. Il a récemment augmenté singulièrement ses crédits de défense, qui s’élèvent en 2007 à environ 1 milliard USD, environ l’équivalent du PNB de l’Arménie. Ils étaient de 175 millions USD en 2004... Ce pays, bouleversé par la guerre (qui fit de nombreuses victimes et environ 1 million d’Azerbaïdjanais réfugiés ou déplacés), a également connu une sérieuse période de troubles politiques jusqu’en 1994-1995. Le pouvoir a été repris fin 1993-1994 par le mentor soviétique Heydar Aliev, ex-général du KGB, qui a globalement dominé, presque sans interruption, l’actualité politique de ce pays depuis 1969. Il décède en 2003 après avoir transmis le pouvoir à son fils à l’issue d’une étrange succession. La vague des révolutions de couleur n’a pas réussi à ébranler le pouvoir en place. Il semblerait que le statu quo acquis aux principes de « stabilité et développement » convienne tant à la nomenklatura locale, aux compagnies pétrolières occidentales qu’aux voisins iranien et russe, heureux de ne pas voir s’implanter dans ce pays des idées de démocratie occidentale.

3L’Azerbaïdjan est un pays géopolitiquement stratégique pour la politique américaine dans la région, devenu un avant-poste de l’Irak, voisin de l’Iran et élément pivot du dispositif énergétique régional. Il apparaît également essentiel à Washington de renforcer sa présence dans une région où non seulement la Russie tente de consolider ses positions, mais où la pénétration de mouvements islamiques fait, d’un pays de culture musulmane chiite mais laïc, un allié rare et indispensable pour la lutte contre le terrorisme.

Une prise de conscience progressive

4Globalement, jusqu’en 1996-1997, la politique américaine en Azerbaïdjan est dominée par l’ombre de la délicate relation russo-américaine. Le Freedom Support Act de 1992 [4] encadre ces activités. La politique de coopération est néanmoins conditionnée par des limitations au soutien financier de l’Azerbaïdjan. La section 907 du Freedom Support Act, adoptée sous l’influence des lobbies sympathisants de la cause arménienne, interdit formellement toute aide directe au gouvernement azerbaïdjanais. Elle est considérée à Bakou comme une prise de position inadmissible, qui non seulement favorise l’agresseur arménien, mais punit injustement les populations azerbaïdjanaises victimes de ce conflit. En effet, elle suppose que l’Azerbaïdjan a joué un rôle offensif dans le conflit et se réfère à l’« usage offensif de la force contre l’Arménie et le Nagornyi-Karabakh ». Les relations US-Azerbaïdjan seront empoisonnées par cet amendement pendant plus de dix ans. Néanmoins, le pragmatisme de la politique américaine permettra de développer avec l’Azerbaïdjan de fructueuses relations dans les domaines énergétique et économique.

5Dès l’arrêt des hostilités entre les forces arméniennes et azerbaïdjanaises en 1994, l’équilibre géopolitique du Sud-Caucase se recompose. En raison d’intérêts mutuels dans le domaine énergétique, Bakou devient progressivement un allié pour Washington et un élément pivot de l’axe pro-américain Bakou-Tbilissi-Ankara qui fait face au bloc arméno-russe lié à l’Iran. Pour l’Azerbaïdjan, l’antagonisme arméno-turc est une raison essentielle de cette alliance. La guerre qui a opposé l’Azerbaïdjan aux forces arméniennes pour le contrôle du Karabakh et des territoires attenants a ravivé le conflit de l’Arménie avec la Turquie, qui par solidarité avec l’Azerbaïdjan a fermé sa frontière pendant la guerre et soumis Erevan à un blocus économique. L’Arménie, enclavée entre ses deux voisins turcs, devra son salut aux ponts humanitaires et routes ouverts par la Russie et l’Iran. Par ce jeu d’alliances, l’Arménie, la Russie et l’Iran se trouvent écartés des projets d’oléoducs et gazoducs qui forgent l’avenir de cette région.

6À partir de 1997, certains proches de l’administration Clinton tentent de faire valoir l’idée que la région mérite encore plus d’attention et que Washington doit mettre fin à une certaine forme d’isolationnisme. L’administration démocrate est une adepte de la théorie du soft power. La stabilisation politique, les développements économiques positifs mais aussi le processus de globalisation et le contexte international justifient de renforcer les relations avec l’Azerbaïdjan. Zbigniew Brzezinski, conseiller démocrate pour les Affaires stratégiques, prône dès 1997 une diplomatie et une présence renforcées dans ce pays qu’il classe comme « État pivot ». Il s’agit, dans ce qu’il appelle l’« Eurasie volatile », de s’assurer que les États-Unis maintiennent une influence décisive sur le processus de recomposition de la région et ne soient détrônés dans ce rôle par aucun autre État. Les relations que Washington établira avec la Chine et l’UE marqueront le rôle futur de la Russie dans la région et par là même l’équilibre des pouvoirs en Eurasie. L’intérêt grandissant de la Chine, l’Iran et la Russie pour cette région, l’émergence de l’Inde, imposent à Washington de se positionner en fonction de ses intérêts géostratégiques. Les théories géopolitiques cèdent la place à la géoéconomie et des personnalités telles que C.J. Pitman, président d’Amoco Eurasia Petroleum, et Richard Morningstar, à l’époque conseiller du président Clinton pour la diplomatie énergétique dans le bassin de la mer Caspienne, sont associées à cette réflexion politique. C’est finalement grâce aux pressions des compagnies pétrolières, pour qui la politique américaine ne peut rester subordonnée aux relations avec la Russie, qu’une stratégie est enfin définie en 1997. C’est là le signe d’une nouvelle forme de diplomatie américaine qui associe les entreprises et autres acteurs aux affaires diplomatiques.

7Sur la proposition du sénateur Sam Brown [5], le Silk Road Strategy Act est adopté en 1999 [6] et définit les priorités de l’assistance américaine dans le Caucase et en Asie centrale [7]. Le sénateur constate une montée des réactions antioccidentales et anti-américaines en raison des pressions exercées sur la région par l’Iran entre autres. De plus, les réformes effectuées au cours des premières années d’indépendance n’ont pas abouti à l’établissement de régimes totalement démocratiques et respectueux des droits de l’homme, ni à la mise en place d’économies de marché libérées. Il est donc préconisé de développer les « paniers » traditionnels de l’action diplomatique américaine (soutien aux réformes économiques et démocratiques) et de mettre en œuvre cette politique de soft power afin d’arrimer le Caucase du Sud au monde occidental. Un large éventail de partenariats, programmes conjoints et autres formes de coopération seront l’outil principal de cette diplomatie.

8Le concept sur la « nouvelle stratégie sécuritaire [8] » conçu en 1999 par l’administration présidentielle sera une nouvelle étape de ce processus. La stabilité et la prospérité du Sud-Caucase et de l’Asie centrale sont des facteurs essentiels pour l’exploitation et l’acheminement rapide, avec la participation des compagnies américaines, des ressources de la Caspienne. À ce titre, il est donc important de résoudre les conflits locaux, dont la question du Nagornyi-Karabakh. Le Groupe de Minsk de l’OSCE, formé depuis 1992, est le forum unique qui encadre les négociations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan pour la résolution du conflit. C’est en 1997, dans le cadre de cette politique caucasienne, que les États-Unis en deviennent l’un des trois coprésidents avec la France et la Russie. Cette implication dans le processus de négociation est un élément significatif de l’investissement de Washington dans le développement de la région, et s’inscrit dans l’évolution de cette politique vers le soft power qui préconise également la présence et les actions à travers les organisations internationales. Le résultat de ces investissements diplomatiques de l’administration Clinton se fait rapidement sentir et c’est en marge du sommet de l’OSCE à Istanbul, en 1999, que le premier accord sur la construction du gazoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC) et la déclaration d’intention sur le gazoduc transcaspien sont signés. Les tracés de ces deux routes évitent les territoires de l’Arménie et de la Russie pour acheminer via la Turquie et la Géorgie les hydrocarbures vers la Méditerranée.

9Le nouvel ordre mondial apparu après le 11 septembre 2001 et les interventions militaires au nom de la lutte contre le terrorisme ont rendu urgente la consolidation du réseau de « pays alliés » dans cette zone Asie centrale-Asie Mineure. L’un des outils de cette politique est le développement de nouvelles formes de coopération dans le domaine sécuritaire et militaire. Cette offre a trouvé un accueil favorable en Azerbaïdjan, pays très préoccupé par la menace terroriste. À plusieurs reprises ces dernières années, les autorités azerbaïdjanaises ont annoncé avoir arrêté des groupes d’« islamistes radicaux-wahhabistes », dont certains seront accusés de terrorisme ou d’intelligence avec des services étrangers. En octobre 2007, le ministère de la Sécurité nationale annonçait avoir déjoué des attaques de terroristes islamistes ciblant les ambassades de Grande-Bretagne et des États-Unis à Bakou. Dans le Sud-Caucase, la coopération avec Bakou devient donc une priorité. En octobre 2001, quelques semaines après les attentats et sous la pression du département d’État, la fameuse section 907 est finalement suspendue. Au nom de la stabilité Washington soutient, du moins par sa réaction modérée, la succession du pouvoir Aliev. La vague des révolutions de velours qui semblait vouloir toucher l’Azerbaïdjan après la Géorgie, l’Ukraine et le Kirghizstan n’arrivera finalement pas à déstabiliser le pouvoir mis en place par la famille Aliev. Les intérêts de Washington et de Bakou convergent; néanmoins, les moyens pour arriver à ces objectifs feront, eux, l’objet d’un désaccord croissant.

Le déploiement de la stratégie américaine

10Globalement, trois priorités sont au cœur de la stratégie américaine en Azerbaïdjan. Elles visent à assurer la sécurité énergétique, la stabilité et la préservation des intérêts américains dans la région.

11Pour l’économie, outre la promotion du commerce bilatéral [9], il s’agit de s’assurer un accès aux ressources en hydrocarbures de la Caspienne et de mettre en place un dispositif logistique pour l’exportation de ces ressources vers les marchés européens. Le développement des transports sera une priorité. Le deuxième objectif est d’assurer un certain contrôle sur l’évolution et la transformation de l’armée azerbaïdjanaise, sceller sa séparation des structures militaro-sécuritaires soviétiques, l’arrimer au système otanien afin de l’inclure dans un dispositif de sécurité collective allié, endiguer les mouvements radicaux et religieux et réduire l’influence russe dans la région. Troisièmement, il est impératif d’ancrer les principes d’économie de marché et de démocratie occidentale dans la société et de s’assurer de la mise en place d’institutions démocratiques garantes, selon cette théorie, d’une forme de stabilité politique.

12Grâce à ces objectifs, Washington peut s’assurer du recul de l’influence de Moscou dans cette région, tenter de contenir les ambitions iraniennes, tout en se positionnant de manière avantageuse sur les marchés stratégiques de ce pays.

13Victoire indéniable de la stratégie d’influence américaine s’agissant des questions pétrolières : le fameux « contrat du siècle » signé le 20 septembre 1994. Prévoyant plus de 50 milliards USD d’investissements, il concerne l’exploitation des gisements pétroliers et gaziers les plus prometteurs. Le contrat est assorti de bonus impressionnants. Le consortium est composé d’une dizaine de compagnies pétrolières. La Compagnie nationale des pétroles azerbaïdjanais détient 20% des parts, British Petroleum environ 17% et l’ensemble des compagnies américaines environ 38%. Cependant, l’Azerbaïdjan a finalement consenti à céder 10 de ses 30% initiaux pour que Lukoil – la compagnie d’État russe – soit associée au projet. L’estimation des bénéfices de ce contrat pour l’Azerbaïdjan serait d’environ 80 milliards USD sur trente ans. À compter de cette signature, l’enjeu essentiel pour les compagnies occidentales, et celui que le gouvernement de Washington s’attachera à promouvoir, sera de s’assurer que ce pétrole pourra atteindre les marchés occidentaux sans dépendre des fluctuations avec la Russie. Plusieurs routes étaient envisageables, mais l’option passant par la Géorgie et la Turquie en évitant la mer Noire et les ports russes fut choisie en dépit de son coût et de l’ampleur des travaux nécessaires. L’accord de principe pour la construction de l’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC) est signé en 1999 par les présidents américain, turc, azerbaïdjanais, géorgien, kazakhstanais et turkmène, scellant ainsi une nouvelle alliance politique. À terme, cette route devrait pouvoir accueillir les flux pétroliers en provenance du Kazakhstan ainsi que le gaz turkmène. Selon le plan établi, un oléoduc et un gazoduc devraient être construits sous la mer Caspienne, assurant ainsi une route évitant la Russie aux hydrocarbures d’Asie centrale. Cette option stratégique fait partie intégrante de la stratégie initiale de Washington pour assurer sa sécurité énergétique. L’Azerbaïdjan y joue un rôle pivot de plate-forme de transit et d’acheminement des hydrocarbures. Sa réalisation lie indéniablement l’Azerbaïdjan aux structures logistiques européennes.

14Les choix de la partie azerbaïdjanaise sont en partie le résultat de la stratégie d’influence américaine, comme en témoignent les nombreuses consultations au moment de la signature du « contrat du siècle » entre les autorités azerbaïdjanaises et d’éminents représentants américains [10], la rencontre du président Aliev avec B. Clinton au lendemain de la signature du contrat ou celle au Caire avec Al Gore, à l’époque vice-Président des États-Unis. La diplomatie « souple » américaine aurait dès 1994 également contribué à apaiser Moscou ou, du moins, à neutraliser son mécontentement de se voir écarté et évincé de son rôle dominant en mer Caspienne au profit d’entreprises pétrolières occidentales. Le 20 septembre 1994, un officiel du ministère des Affaires étrangères déclarait que la Russie ne reconnaissait pas la validité du contrat du siècle, faisant écho à certaines mises en garde du ministre Andrei Kozyrev demandant de trouver une « solution acceptable pour tous ». Le ministre des Affaires étrangères faisait référence au partage des eaux de la Caspienne qui selon Moscou devait continuer à se faire selon les accords de 1921 et 1940 signés entre l’URSS et l’Iran, ignorant ainsi l’existence de nouveaux États souverains. Moscou n’abandonnera pas facilement ses exigences et adressera au secrétaire général des Nations unies une plainte à ce sujet.

15Aujourd’hui, la configuration de la région a fortement évolué. La Géorgie et l’Azerbaïdjan ont lié leurs destins à ceux du gazoduc BTC et de l’oléoduc BTE, qui arriment les deux pays dans le « camp occidental ». Les hydrocarbures azerbaïdjanais sont désormais exportés vers la Turquie et l’Europe et présentent une réelle alternative pour les pays européens à leurs approvisionnements en provenance de Russie. L’Azerbaïdjan commence à recevoir les dividendes des investissements pétroliers et sa stature financière lui permet désormais de regarder l’avenir avec une certaine sérénité.

16Cependant, cette évolution complique la mise en œuvre du soft power; Bakou étant désormais capable d’assumer financièrement ses projets, il devient plus difficile d’influencer le cours de ses décisions. Ainsi pour la première fois, en 2007, l’Azerbaïdjan va financer sur fonds propres un projet auquel s’opposait Washington : la construction d’une ligne ferroviaire reliant la Turquie à l’Azerbaïdjan en passant par la Géorgie [11]. Cette ligne offre une précieuse alternative aux routes ferroviaires russes, mais écarte l’Arménie de ces nouvelles possibilités de coopération et de commerce régionaux. En effet, pour Bakou, toute perspective de coopération avec Erevan est soumise à la condition de libérer les territoires azerbaïdjanais occupés. Cette initiative a soulevé de nombreuses protestations. Le Congrès américain a interdit tout financement du projet par des fonds gouvernementaux. Finalement, l’Azerbaïdjan a accordé un prêt de 220 millions USD à la Géorgie pour sa réalisation.

17Résultats mitigés de la coopération dans les domaines de défense et de sécurité : contrairement aux succès enregistrés dans le domaine économique, la puissance américaine n’a pas tout à fait réussi à mettre en place le dispositif sécuritaire et de défense souhaité. La coopération est mise en place tardivement et prend de l’importance dans les années 2000. Mais elle a fait place, plus récemment, à une phase de prudence et de rééquilibrage des engagements politiques de Bakou, conformément à sa « diplomatie multivectorielle ».

18La coopération dans le domaine militaire a été longtemps difficile en raison de la section 907 du Freedom Support Act. La suspension de cette section 907 a permis [12] l’assistance, la vente et le transfert d’équipements militaires. Le choc politique du «9-11 » a fait apparaître de nouvelles menaces terroristes et un enjeu important pour la protection des installations pétrolières en mer Caspienne et la sécurité des oléoducs. Washington a renforcé son assistance dans ce domaine en échange de concessions. Les militaires américains ont désormais une autorisation permanente de survol de l’espace aérien, des experts sont associés aux efforts de modernisation de l’armée et le Pentagone sponsorise – entre autres – la formation d’une force navale azerbaïdjanaise en mer Caspienne ainsi que la réfection de certaines bases aériennes. L’Azerbaïdjan participe aux coalitions internationales en Irak, en Afghanistan et au Kosovo [13]. De plus, Washington a réussi à persuader Bakou d’installer un réseau de stations radar sur le littoral et deux stations mobiles situées respectivement à quelques dizaines de kilomètres des frontières russe et iranienne dans le cadre de la lutte contre les trafics illicites et la prolifération des armes de destruction massive.

19Enfin, Bakou a mis en place une collaboration avec les structures de l’OTAN, signe de sa volonté de faire partie du camp occidental. Plutôt informelle dans ses débuts [14], elle s’est accélérée avec la mise en place d’une nouvelle génération de programmes de l’OTAN. Bakou s’est engagé en février 2005 dans le « Plan d’action individuel pour le partenariat de l’OTAN – IPAP ». Néanmoins, des déclarations officielles récentes soulignent que cette coopération n’est pas orientée vers l’adhésion, mais pourrait le cas échéant raccourcir le chemin qui y mène. Une prudence reflétant la volonté de l’Azerbaïdjan de ne pas importuner ses voisins par sa participation à des systèmes de défense qui pourraient sembler offensifs. Parallèlement, l’Azerbaïdjan a réduit au strict minimum sa participation aux structures de la CEI. Partie au Traité de sécurité collective lors de sa création en 1992, le pays a décidé, lors de sa reconduction en 1999, de ne pas renouveler son adhésion. Il n’a pas signé le traité portant sur la protection des frontières extérieures de la CEI, ni celui portant sur le système de défense aérienne, dans le but de conserver de bonnes relations avec ses voisins et les grandes puissances sans s’engager dans un système strict d’alliances militaires, pratiquant ainsi une diplomatie de l’équilibre.

20Héritage des premières années de l’indépendance, l’Azerbaïdjan est membre du GUAM [15], structure dont le premier objet était de « soutenir les indépendances et la souveraineté » de ses membres. Cette organisation est considérée à Moscou comme une organisation hostile, un forum antirusse, pâle contrepoids au Traité de sécurité collective de la CEI. À l’époque, l’Azerbaïdjan rejoint ce mouvement pour marquer son mécontentement du soutien russe à l’Arménie. Il regroupe quatre États dont trois au moins font face à des mouvements séparatistes ou entretiennent des relations difficiles avec Moscou. Ces États sont soucieux de se rapprocher de l’OTAN et de l’UE et affichent la volonté d’adhérer aux principes et valeurs occidentaux de la démocratie. Peu active pendant longtemps, cette organisation devient en 1999 l’« Organisation pour la démocratie et le développement économique », une structure de coopération régionale. Son ambition est de conforter l’alliance et la solidarité entre ses États membres, de former une force de maintien de la paix et de devenir un forum de négociation des « conflits gelés » (le Haut-Karabakh, la Transdniestrie, l’Ossétie et l’Abkhazie). Cette organisation, qui bénéficie du soutien politique et dans une moindre mesure financier des États-Unis, ne deviendra pas un contrepoids à l’influence russe dans l’ex-Union soviétique, contrairement à ce que certains stratèges avaient envisagé.

21Trois éléments révèlent que la stratégie d’influence américaine en Azerbaïdjan n’a pas produit tous les résultats escomptés et notamment que le système d’alliance exclusif que Washington souhaitait instituer n’a pu être réalisé. À trois reprises, l’Azerbaïdjan déclinera les offres américaines pour leur préférer des alternatives plus neutres ou des partenariats avec d’autres pays. Le résultat en est une diversification des partenaires de Bakou dans le domaine militaro-sécuritaire, élément central de la politique d’équilibre soutenue par le président I. Aliev.

22Tout d’abord Bakou a clairement établi une limite à sa coopération avec les militaires américains. La raison principale en est sa position géopolitique et les contraintes qu’elle lui impose. Ainsi a-t-il toujours refusé la présence de soldats américains sur son territoire, ce dont il a été question au moment du retrait des militaires US postés en Ouzbékistan. À l’époque la pression avait été forte pour que Bakou accepte d’ouvrir une base militaire pour accueillir le contingent évacué d’Ouzbékistan. Il avait été fermement mis en garde par ses voisins iranien et russe : la présence de militaires américains en Azerbaïdjan n’était pas souhaitable.

23Deuxièmement, l’affaire du « nucléaire iranien » a quelque peu mis à mal les relations des deux pays, et forcé Bakou à se repositionner. En effet, Washington insiste depuis quelques années pour obtenir l’installation de bases militaires en Azerbaïdjan. Cette demande s’est faite plus pressante avec les rumeurs qu’une action armée pourrait être envisagée contre Téhéran. Hormis cette concession, il serait souhaitable pour Washington que les autorités azerbaïdjanaises s’engagent d’une façon plus marquée à ses côtés dans le bras de fer qui l’oppose à Téhéran. Mais ces dernières ont à plusieurs reprises signifié leur refus de se mettre dans une position politiquement inconfortable vis-à-vis de l’Iran. Non seulement des enjeux économiques lient les deux pays, mais Bakou veut éviter tout sujet de fâcherie avec Téhéran dont il redoute le prosélytisme religieux. De plus, la présence en Iran d’une importante minorité azérie rend la situation encore plus délicate. En mai 2006, cette population avait été réprimée à la suite de manifestations qui avaient dégénéré, soulevant l’indignation et provoquant une réaction de solidarité en Azerbaïdjan. L’escalade de cette crise avait conduit Téhéran à hausser le ton et à prier fermement l’Azerbaïdjan d’éviter toute prise de position sur des incidents à caractère interne. Le président I. Aliev, au cours de sa première visite officielle aux États-Unis en 2006, a réitéré son opposition à soutenir de quelque manière que ce soit une possible intervention américaine en Iran. Dans le but de rassurer Téhéran, un pacte de non-agression a été signé en mai 2005 entre les deux pays, écartant tout espoir pour Washington d’établir des liens militaires plus profonds avec Bakou. Il a également déclaré au cours de cette visite qu’il ne laisserait pas son pays devenir un lieu de confrontation USA/Russie...

24Enfin, dans le cadre de sa politique d’équilibre, Bakou a décidé de diversifier ses partenariats dans le domaine militaro-sécuritaire. En 2002, l’administration Poutine a entrepris de renforcer ses relations militaires avec l’Azerbaïdjan, relations jusqu’alors limitées par l’engagement russe en Arménie. Cette offre a rencontré du côté azerbaïdjanais un accueil positif. Ce rapprochement avec Moscou fut concrétisé par un premier accord en 2002 cédant pour dix ans aux Russes l’exploitation de la base radar [16] de Gabala, qui accueille environ 1500 personnels militaires russes. Un second accord, ratifié en 2003 et renouvelé en 2006, institue un cadre de coopération étroit dans le domaine de la défense antiaérienne et prévoit livraisons d’armes, entraînement de l’armée et modernisation des équipements militaires. À noter que la Russie a également conçu un projet de coopération concurrent à celui de Washington, projetant la création d’une force militaire opérationnelle conjointe en mer Caspienne [17]. La collaboration s’est également développée dans le domaine de la sécurité et de la protection civile. Les deux pays se sont trouvé des intérêts communs dans la lutte contre le terrorisme mais également dans leurs efforts contre l’extension du « courant révolutionnaire » à l’origine des récents changements politiques en Ukraine, Géorgie et au Kirghizstan. On parle désormais à Bakou de « partenariat stratégique » avec Moscou.

Les difficultés de l’assistance aux réformes démocratiques et au développement de la société civile

25Lorsque J. Nye s’interroge sur les moyens de mesurer la puissance internationale d’un pays, il montre que, au-delà des critères traditionnels (ressources militaires et économiques), il convient de prendre en compte les « ressources intangibles ». Ces dernières incluent un vaste éventail d’éléments tels que la réputation d’un pays, son poids dans les relations internationales, le pouvoir d’attraction de sa culture, de ses valeurs, mais également son rôle et son influence au sein des organisations internationales. Washington a investi dans ces domaines mais les résultats de certains sondages indiquent une montée perceptible du sentiment anti-américain en Azerbaïdjan, indice d’un succès mitigé de cette politique.

26La promotion des valeurs de la démocratie occidentale, des droits de l’homme et du système de gouvernance libéral est – dans l’espace ex-soviétique – un pilier de la coopération américaine. La théorie de J. Nye vise à montrer que le pouvoir d’un pays est également sa « capacité à faire accepter comme universelle une vision du monde particulière afin que la domination de celui qui la produit soit acceptée car considérée comme légitime ». Washington s’est attaché à développer cette capacité par le biais de programmes bilatéraux, par l’action d’ONG internationales et locales ou encore avec l’aide de certaines organisations internationales. Cet aspect de la coopération avec les États-Unis sera fondamental pour le jeune État azerbaïdjanais, qui cherche à démontrer à l’Occident la réalité de son choix prodémocratique. Les nouvelles autorités du pays ont également un besoin pressant de stabiliser et de légitimer leur pouvoir en devenant un membre actif et donc reconnu de cette communauté internationale. Ainsi, l’engouement des premières années pour les propositions et le mode de gouvernance américains s’expliquent aisément. Le pays, à la recherche de nouvelles références après la dissolution de l’URSS, souhaite consolider et légitimer son pouvoir tant sur la scène nationale qu’internationale. À cette fin, le pays s’empresse de devenir membre d’organisations internationales et s’engage à mettre en œuvre une série de réformes institutionnelles selon les principes de la démocratie occidentale et de la séparation des pouvoirs. Le cadre juridique pour l’établissement d’une société civile est réformé en 1996. L’administration américaine avait suivi de très près les évolutions du texte de loi sur les ONG, reflétant l’importance pour cette dernière de la mise en place d’un cadre juridique satisfaisant. En effet, tant que la section 907 limitait l’action américaine à des domaines non gouvernementaux, il était essentiel pour Washington d’avoir la possibilité de travailler avec des partenaires locaux pour la mise en œuvre de programmes de coopération.

27Les ONG reçoivent essentiellement des fonds d’institutions internationales, posant ainsi le problème de leur survie à long terme. Ces dernières connaissent un véritable succès comme partenaires des ONG internationales pour la distribution de l’aide humanitaire aux réfugiés et personnes déplacées. Le développement des premières se fera au gré des financements et des préférences thématiques lancées par Washington ou les institutions internationales. Ainsi se succèdent les ONG « spécialisées » dans les projets pour la défense des droits des femmes, des enfants, des minorités, des prisonniers politiques ou encore les activités de développement, l’observation des élections ou la lutte contre la corruption... Elles sont tolérées par les autorités azerbaïdjanaises, qui sont cependant soucieuses du pouvoir que certains de ces acteurs non étatiques ont déjà acquis. Ces ONG soulèvent des questions gênantes sur les droits de l’homme, la réforme de l’État, la transparence de la vie publique et, surtout, revendiquent un droit de regard. Le soutien qu’elles reçoivent des institutions internationales et des ambassades semble déplacé pour les autorités qui considèrent qu’une partie d’entre elles ne sont qu’une émanation des mouvements et partis politiques d’opposition. La réplique des autorités sera de créer une nouvelle génération d’ONG. Elles sont appelées les « GONGO » (pour GOvernmental NGO). Elles reçoivent l’appui et le soutien financier du gouvernement ou d’oligarques proches du pouvoir et deviennent pour le gouvernement une forme de contrepoids.

28Les ONG s’imposent également comme une source essentielle d’information sur le pays et remplacent souvent dans cette tâche des institutions étatiques défaillantes. À ce titre, il est intéressant de noter le rôle de certaines d’entre elles qui, au moment de la négociation pour l’entrée de l’Azerbaïdjan au Conseil de l’Europe, ont transmis directement à Strasbourg une liste de prisonniers considérés comme des « prisonniers politiques ». Sur la base de cette liste la libération ou le re-jugement de ces prisonniers deviendront des exigences du Conseil pour que l’Azerbaïdjan puisse se maintenir au sein de ce club européen. Les ONG sont devenues de véritables interlocuteurs, une source d’information alternative aux autorités, en fait un véritable contre-pouvoir.

29Les ONG azerbaïdjanaises se sont autoproclamées porte-parole de la population et de la nouvelle « société civile ». Elles en ont tiré une forte légitimité qui leur a permis de se poser en véritable interlocuteur des organisations internationales. Certaines ont été chargées de missions délicates telles que la réalisation de sondages postélectoraux, le contrôle et la surveillance des élections, et seront très actives pendant les scrutins (2001 et 2003 et surtout 2005). En 2005, EMC (« Election Monitoring Center ») est formé et regroupe une dizaine d’ONG [18] dont les observateurs étaient présents dans une grande majorité des bureaux de vote. Au cours de ces élections, des observateurs nationaux (ONG et représentants de partis politiques, et fréquemment les deux à la fois) tenteront d’obtenir une copie des procès-verbaux afin de reconstituer – région après région – les résultats du scrutin. En 2003, les autorités s’efforcent de limiter ces pratiques, puisque l’élection présidentielle doit confirmer la passation de pouvoir à Ilham Aliev. Des mesures sont prises pour renforcer les vérifications nécessaires à leur enregistrement et limiter le rôle et le nombre des observateurs locaux dans les bureaux de vote. L’élection sera suivie de désordres civils et de manifestations que les autorités répriment avec force. Cette situation met Bakou devant la contradiction entre ses engagements au titre de la démocratisation et les besoins inhérents à la stabilisation du pouvoir. Bakou décide ainsi de limiter l’influence de ces ONG devenues incontrôlables, de nouvelles dispositions sur leur statut voient le jour. Les exemples ukrainien, géorgien et kirghize confirment qu’elles peuvent devenir des acteurs politiques puissants et être utilisées, voire manipulées, à des fins politiques. Lors des élections présidentielles de 2005, Bakou réprimera très fermement les élans de nouveaux mouvements de jeunesse (« Yeni Fikir », « Yox », « Magam »...), créés quelques mois avant les élections à l’instar de « Pora », « Kmara » et autres mouvements de « résistance civique » associés aux « révolutions de velours ». Certains de leurs leaders seront accusés de collaboration avec des forces étrangères et de tentative de coup d’État.

30De par l’identité des ONG souvent assimilées à un « contre-pouvoir » et leur statut d’interlocuteurs privilégiés des étrangers, les ONG azerbaïdjanaises ont une réputation ambiguë et généralement plutôt négative auprès de la population. Elles apparaissent comme une émanation du pouvoir, un instrument de la politique américaine ou occidentale, ou encore une structure sous contrôle de l’opposition. Elles peuvent également servir de paravent à des activités économiques diverses; mais seule une infime partie de la population urbaine se sent concernée par ces activités. Le cadre et les normes strictement établis par les organisations internationales pour le développement de la société civile ont souvent eu l’effet pervers de réduire ces ONG à n’être qu’un support de l’action d’organisations internationales sur le terrain. Le modèle de « société civile » occidental fait référence à une tradition spécifique, fondée sur l’initiative individuelle, la défense active des droits individuels et collectifs. Dans ce modèle, les structures sont capables de conserver leur autonomie et de protéger leur indépendance grâce à la possibilité d’autofinancement. Le tissu des ONG en Azerbaïdjan ne correspond pas à ces critères et on peut donc considérer que l’importation de ce concept n’est pas, à ce jour, une réussite. Il n’y a pas en Azerbaïdjan de société civile au sens anglo-saxon du terme.

Obstacles structurels au succès d’une politique de soft power

31Trois types de facteurs peuvent éclairer la réflexion sur l’échec relatif de cette tentative de transmission de valeurs considérées comme universelles.

Le facteur économique

32Il semble, dans le cas de l’Azerbaïdjan, que le pouvoir d’influence ou soft power ait rencontré des succès tant que l’échange était inégal entre les deux pays, tant que la coopération s’inscrivait dans une relation de leadership. Une fois l’autonomie financière acquise, l’idéologie et la séduction du système se révèlent peu efficaces. C’est ce qu’illustre la décision de Bakou de financer coûte que coûte le projet de ligne de chemin de fer KTB. L’Azerbaïdjan est de moins en moins vulnérable à la pression, notamment celle des institutions financières internationales. L’Azerbaïdjan pourrait se passer des prêts de la Banque mondiale ou de la BERD, la conditionnalité de leurs crédits ayant de moins en moins de prise sur le pays. Le besoin de reconnaissance internationale est compensé, d’un point de vue psychologique, par l’assurance que confère la richesse au pays. Ainsi, les autorités ont depuis peu un discours de plus en plus belliqueux et menacent sans hésitation de reprendre par la force les territoires occupés. Bakou sait qu’il bénéficie du droit du plus fort, tout au moins du plus riche. La richesse apporte au pays une nouvelle aisance, qui lui permet de traiter sur un pied d’égalité les propositions russes, américaines ou autres : il ne craint plus de perdre un partenaire aujourd’hui facilement remplaçable. L’Azerbaïdjan, éduqué à l’école de la Realpolitik ou du pragmatisme politique, entend tirer un maximum de profit économique, mais également politique, de son potentiel énergétique. Elle pratique désormais non plus une politique d’alliances, mais la « politique du mieux-disant ».

Des raisons politiques : divergences sur les buts et la méthode

33La dualité de la politique américaine. – Le cas de l’Azerbaïdjan reflète parfaitement les contradictions américaines en matière de politique étrangère. Les restrictions imposées par le Congrès américain à l’assistance à l’Azerbaïdjan entachent durablement la relation bilatérale entre les deux pays. Pour Bakou, cet amendement reflète la puissance du lobby arménien dans ce pays et appelle à la prudence. Il a fallu le choc politique du bombardement des tours new-yorkaises et une déclaration de guerre totale aux terroristes en 2001 pour que cette disposition soit suspendue. Les autorités azerbaïdjanaises en attendent encore la suppression définitive. Certaines réactions des institutions américaines sont ressenties à Bakou comme reflétant une politique dualiste et contradictoire. D’un côté, Washington se conduit avec l’Azerbaïdjan comme avec un partenaire économique stratégique et, de l’autre, le même pouvoir se trouve violement sermonné pour sa conduite des élections « non démocratiques », critique qui apparaît à Bakou comme un soutien ouvert à l’opposition.

34Une inéquité de traitement. – Du point de vue azerbaïdjanais, l’attitude des États-Unis et derrière eux de la communauté internationale a souvent heurté le sentiment national azerbaïdjanais, créant des effets tout à fait contraires à l’idée du soft power. L’aide inégale entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan a marqué les relations bilatérales. Selon le site du département d’État, le montant total alloué à l’Arménie dans le cadre de l’assistance américaine entre 1992 et 2002 est d’environ 1,5 milliard USD. Pour la même période ce chiffre s’élève à 450 millions pour l’Azerbaïdjan, dont la population est au moins deux fois plus importante qu’en Arménie. Cet élément a contribué à développer un sentiment de défiance, et même un goût amer, déjà connus sous l’Union soviétique et entretenus par la théorie du « nouvel ordre mondial » selon laquelle le monde se divise entre les nations chrétiennes et les nations musulmanes. Ces idées nourrissent les théories nationalistes, dont certaines évoluent vers l’anti-américanisme. En réaction à ces démonstrations d’unilatéralité, Bakou a délibérément choisi de diversifier ses alliances. C’est de la déception que l’on décèle dans le discours actuel des autorités azerbaïdjanaises et qui encourage le retour vers les racines orientales de la culture. Cet élément est très perceptible dans les discours justifiant notamment les difficultés d’implantation du système de gouvernance démocratique à l’occidentale dans le pays.

35« Doubles standards » des organisations internationales. – Tout d’abord, l’Azerbaïdjan reproche à la communauté internationale de ne pas faire appliquer les quatre résolutions des Nations unies [19] condamnant l’occupation des régions azerbaïdjanaises. Bakou rappelle qu’il a dû également attendre le sommet de l’OSCE à Lisbonne, en 1996, pour que le principe d’intégrité territoriale soit affilié à une déclaration officielle de l’OSCE, et qu’en dépit de ces outils juridiques il n’a pas été possible de redresser le tort fait à ce pays. Certains, à Bakou, argumentent cyniquement qu’il est peut-être dans l’intérêt de quelques-uns de maintenir un conflit non résolu comme moyen de pression, ou plus simplement que cet état de fait résulte de l’activisme du lobby pro-arménien. L’argument des doubles standards est récurrent pour la question des progrès démocratiques. À chaque élection, le texte d’évaluation du scrutin par l’OSCE fait l’objet d’une comparaison minutieuse, notamment avec les déclarations de cette organisation pour les pays voisins. Pour l’Azerbaïdjan, l’avis de Washington se confond généralement avec les déclarations de l’OSCE, l’assimilant à un outil indirect de sa politique d’influence.

36Mise en place d’une politique diplomatique « multivectorielle ». – Les élections de 2003 et 2005 feront l’objet de vives critiques. Bakou comprend que les exigences des organisations internationales et de Washington en matière de développement démocratique et de réforme de l’État ne sont plus compatibles avec le système de gouvernance qui se met en place. De ce fait, sa coopération dans ce domaine va diminuer progressivement. Les évaluations de la situation des droits de l’homme deviennent de plus en plus sévères et négatives. Le seul soutien au pouvoir en place émane de Moscou, qui effectue un grand retour politico-économique dans la région et devient pour Bakou le contrepoids à la pression occidentale devenue trop importante. De plus, I. Aliev va trouver en V. Poutine un allié dans la lutte contre l’extension du « courant révolutionnaire ». Ainsi se met en place la politique d’équilibre des forces entre les partenariats établis avec la Russie et les États-Unis. De nouvelles raisons de maintenir cette diplomatie multivectorielle apparaissent avec la crise sur le nucléaire iranien. Les pressions américaines, de plus en plus insistantes pour un engagement total, poussent Bakou à adopter une forme de « neutralité » dans ce conflit, en maintenant de bonnes relations à la fois avec Téhéran et Washington.

37Retour à Huntington. – L’élément essentiel pour comprendre l’évolution plus récente des relations américano-azerbaïdjanaises est le changement de la politique américaine après les attentats du «9-11 ». La fracture sera fortement ressentie en Azerbaïdjan, d’autant plus qu’elle annonce le retour en force de la politique du hard power avec le concept de guerre préventive et les interventions militaires en Afghanistan et en Irak. Le monde reprend une allure manichéenne et se divise à nouveau entre alliés et ennemis, laissant peu de place aux nuances de la politique azerbaïdjanaise d’équilibre. Il est donc nécessaire de prendre un peu de distance et de relativiser son engagement avec Washington, dont les pressions exercées ne produiront pas les effets attendus, comme par exemple dans le cas du conflit sur le nucléaire iranien. Si Washington a su s’assurer la bienveillance de Bakou, il n’a pu obtenir le soutien inconditionnel désiré.

Les facteurs culturels

38Ces facteurs culturels contribuent à expliquer les divergences fondamentales qui opposent la conception azerbaïdjanaise de la société et de son mode de fonctionnement au modèle américain que le soft power voudrait promouvoir. Ils apportent également un éclairage sur les différences de vues politiques. Ces caractères culturels s’amplifient avec la formation de l’identité nationale, la maturité du nouvel État et surtout l’enrichissement de la nation, qui apporte au pays assurance et reconnaissance internationale.

39Réapparition de l’identité musulmane. – Au cours de la dernière décennie, l’Azerbaïdjan, de tradition majoritairement chiite, a connu un renouveau religieux. Les liens avec l’étranger et le développement de nouvelles mosquées ont permis aux populations de se réapproprier leur identité musulmane ainsi que de réapprendre, pour certains, la théologie et la pratique religieuse. Pour la majorité, la religion demeure un élément culturel de l’identité collective, mais une certaine frange de la population s’est activement tournée vers la religion. L’État azerbaïdjanais affirme sa laïcité dans sa Constitution et la met en pratique dans son mode de gouvernement. Cependant, le caractère culturel de l’islam imprègne désormais les institutions, les hommes et leur politique.

40Le cas des relations azerbaïdjano-israéliennes est un bon exemple de cette évolution. Israël ouvre en 1993 une ambassade en Azerbaïdjan avec lequel elle entretient des liens commerciaux importants. Cette ambassade est la plus importante de l’État hébreu en terre musulmane et l’Azerbaïdjan bénéficie à Washington de la bienveillance du lobby juif. Les communautés juives d’Azerbaïdjan et ses liens avec Israël consolident ces relations. Dès 1993, les affaires entre les deux pays se développeront par l’intermédiaire d’hommes d’affaires turco-israéliens, qui auraient également eu un important rôle d’intermédiaires entre Bakou et Ankara pour des livraisons d’équipements militaires. À terme, Israël espère pouvoir s’approvisionner en hydrocarbures de la mer Caspienne via la Turquie. De par le jeu d’alliances régional, cette coopération azerbaïdjano-israélienne s’inscrit parfaitement dans les intérêts de l’axe pro-américain Bakou-Tbilissi-Ankara.

41Cependant, Bakou reste prudent dans ses relations officielles avec Tel-Aviv et s’efforce de ne pas fâcher Téhéran par un engagement public trop visible. Bakou a par ailleurs repoussé à plusieurs reprises l’ouverture d’une ambassade en Israël, où elle a ouvert en 2007 un centre culturel. Au niveau officiel les relations demeurent excellentes, mais l’attitude populaire face à l’État d’Israël a été depuis la fracture du «9-11 » influencée par les discours de l’islam politique. Le début de la seconde Intifada en 2000 et l’intervention israélienne au Liban ont provoqué des réactions dans la frange politisée et religieuse de la société. Des manifestations de faible ampleur ont été organisées par des organisations religieuses devant l’ambassade israélienne à Bakou en 2002 pour protester contre les incursions dans la bande de Gaza et en 2006 contre les opérations militaires au Liban. Ces manifestations ont un caractère purement politique, un caractère anti-israélien voire anti-américain, mais les différentes communautés juives d’Azerbaïdjan ne sont pas la cible d’actions d’antisémites. Elles indiquent néanmoins une prise de conscience par la société azerbaïdjanaise de son identité musulmane et de son appartenance au monde musulman et témoignent de tentatives de politiser ce sentiment. L’actualité dans le monde musulman est observée avec de plus en plus d’attention, notamment lorsqu’elle concerne les populations chiites comme au Liban ou en Irak. Certains de ces mouvements encore marginaux se posent en défenseurs actifs d’une « Internationale chiite ».

Résistance à l’universalité du modèle démocratique

42En dépit des engagements et des promesses de Bakou, certains piliers de la « bonne gouvernance » tels que la décentralisation avec l’émergence d’un pouvoir local élu, le principe de transparence dans les affaires publiques, la lutte contre la corruption, ou encore le principe de la séparation des pouvoirs, n’ont pas encore aujourd’hui de réalité dans le nouveau système politique azerbaïdjanais. L’institution des élus locaux, mise en place pour respecter un engagement pris auprès du Conseil de l’Europe, est une institution vide de sens et de pouvoir, et le plus souvent une simple émanation locale de l’administration du gouverneur. De même, la lutte contre la corruption et la promotion de la transparence dans les affaires se sont essentiellement traduites par l’adoption de textes théoriques et de stratégies à long terme. Dans ce pays, le pouvoir est personnalisé et les élites forment un groupe compact, lié par des alliances matrimoniales et peu disposé à s’ouvrir au public. Quant à la mise en œuvre du principe de séparation des pouvoirs, elle se heurte à des réflexes et des mécanismes de sauvegarde du pouvoir et paraît inconciliable avec le principe d’« intangibilité » et de centralité de l’autorité. De plus, les personnalités qui ont mis en place ce système politique ont clairement opté pour un type de gouvernance autoritaire. L’Azerbaïdjan est empreint de traditions et de culture musulmanes et sa société est construite autour de la notion de communauté. La culture philosophique et la structure familiale de ce pays érigent l’autorité paternelle et celle des personnes âgées au-dessus de toute autre. Ce système caractérise la nature du pouvoir, hiérarchique, familial et incontesté. Les principes d’une culture politique fondée sur le consensus s’apparentent mal avec le principe majoritaire, consubstantiel à la démocratie. Fondamentalement, il y a une forme de contradiction entre le concept de démocratie occidentale et le fonctionnement du pouvoir en Azerbaïdjan pour une simple raison qui est que l’individu peut difficilement survivre seul dans cette société de réseaux. De même, cette société fondée sur l’opposition entre la sphère publique et la sphère privée n’a pu intégrer le concept de société civile occidental qui considère l’individu comme un acteur de la société et dépasse ainsi cette séparation traditionnelle privé/public. La réalisation de ce concept impliquerait également une rationalisation de la tradition d’opacité qui domine les relations d’influence dans ce pays. Pour ces raisons, la promotion d’une american way of life fondée sur la liberté individuelle, passé son attrait premier, n’a pas eu la même force d’attraction en Azerbaïdjan que dans d’autres pays de la CEI.

43Une réaction postcoloniale. – L’assurance économique récemment acquise donne aux dirigeants de ce pays de nouveaux atouts dans ses relations avec l’extérieur. L’atout économique apporte l’autonomie financière nécessaire à assumer les décisions en toute souveraineté. L’atout politique permet de s’émanciper de toute forme de partenariats rappelant de quelque manière que ce soit la domination coloniale. Cet aspect explique certaines réactions aux attitudes de Moscou ou Washington considérées comme « paternalistes » ou postcolonialistes. L’Azerbaïdjan n’est pas le seul État de la CEI à avoir comparé certaines organisations internationales (et notamment l’OSCE pour des questions électorales) au pouvoir autoritaire de Moscou du temps de l’Union soviétique. Dans certains cas, Bakou n’a pas mesuré la teneur et le sérieux des nouveaux engagements souscrits, tant il était à l’époque important de devenir rapidement un État membre de ces organisations. Aujourd’hui, l’État souverain azerbaïdjanais entend, grâce à son nouveau statut d’État pétrolier, être considéré comme un partenaire à part entière commercialement et politiquement et ne pas se laisser dicter sa conduite.

Conclusion : réel succès du soft power américain en Azerbaïdjan ?

44La capacité d’attraction du modèle américain avec son lot de rêves et ses stéréotypes a, comme dans toute l’ex-Union soviétique, eu un certain poids dans les choix politiques de ce pays. Cependant, le succès relatif de la politique américaine en Azerbaïdjan se doit d’être mesuré à la lumière des ambitions de Bakou. Au len-demain de l’indépendance, le pays cherchait désespérément un solide soutien extérieur pour se dégager de l’emprise coloniale de Moscou et s’autonomiser politiquement et économiquement. Cette rupture, dans le cas de l’Azerbaïdjan, ne sera pas facile. Accessoirement, la puissance russe se trouve mêlée aux troubles qui secouent les premières années d’indépendance du pays, ce qui complique pour les autorités américaines leur engagement direct en Azerbaïdjan. Les autorités de ce nouvel État, qui sort d’une guerre et de plusieurs tentatives de coup d’État, craignent le prosélytisme de leur voisin iranien et des diverses officines arabes engagées dans les camps de réfugiés azerbaïdjanais pour distribuer de l’aide humanitaireaux victimes de la guerre au Haut-Karabakh. Le choix de se rapprocher des États-Unis, fait à l’époque par Heydar Aliev, un homme marqué par la culture laïque soviétique, est certainement inspiré par cette crainte. La seconde raison immédiate est que l’Azerbaïdjan comprend que son développement économique dépend des investissements réalisés pour la modernisation des infrastructures pétrolières. Bakou recherche des investisseurs capables d’assurer le financement des techniques de forage off-shore en mer Caspienne et de développer des routes pour l’exportation des produits pétroliers, en bref de lui donner les moyens de devenir un État pétrolier.

45Mais la coopération avec Washington n’a semble-t-il pas été un succès à tous les points de vue. Les ressources du soft power sont difficiles à contrôler et beaucoup d’entre elles échappent au contrôle du gouvernement, notamment les décisions du Congrès américain, la formation de la réputation d’un État ou sa capacité de séduction... Certains constatent que l’approche américaine en Azerbaïdjan a manqué de crédibilité. La politique américaine déterminée par l’obsession de Washington pour la sécurité énergétique est caractérisée par son pragmatisme, ce qui n’est pas toujours compatible avec l’éthique, la promotion de valeurs ou celle d’un modèle politique. Les relations bilatérales ont également souffert d’une certaine manière du retour au hard power qui marque la politique américaine depuis le «9-11 » et le retour des républicains à la Maison-Blanche. Cette politique a paralysé les relations avec les pays musulmans, dont l’Azerbaïdjan fait désormais partie, presque contre son gré et sa volonté d’afficher sa laïcité. On peut également douter que les deux pays partagent véritablement des valeurs politiques et morales. L’Azerbaïdjan aspire ces dernières années à une formule mixte, qui puisse respecter ses engagements internationaux et s’accommoder de ses « spécificités culturelles ». Mais on observe aujourd’hui une résistance à ces valeurs occidentales qui révèle certaines incompatibilités entre ces principes et le mode de gouvernance traditionnel.

46Selon Nye, un État ne devrait donc plus être régi par la contrainte, mais parson attractivité et sa capacité d’incarner des valeurs universelles. Si les États-Unis n’ont pas utilisé la contrainte en Azerbaïdjan, ils ne semblent pas non plus avoir totalement séduit ce pays par un modèle ou une capacité à incarner des valeurs universelles. En somme, si le soft power suppose que l’autre veuille suivre un modèle, s’allier avec un gouvernement et que l’on croie en son discours et en son système, il est évident que dans ce domaine la politique américaine n’a pas encore atteint ses buts. L’auteur souligne également que les effets de cette politique se mesurent à long terme. En revanche, le soft power mis au service des ambitions géopolitiques et géoéconomiques américaines est une réussite certaine. Le remodelage de la région en fonction des infrastructures nécessaires aux transports d’hydrocarbures et la mise en place d’un système d’alliances soutenant cette vision correspondent aux plans initiaux de Washington. De son côté, l’Azerbaïdjan a finalement, non sans difficulté, réussi à obtenir le soutien recherché dans les domaines économique et diplomatique. Bakou s’est très habilement appuyé surce partenariat avec Washington pour affirmer son indépendance, sécuriser son pouvoir et mener à bien le développement de ses infrastructures pétrolières et un plan d’exportation des hydrocarbures vers l’Europe. Restent deux questions qui seront au centre du développement à venir de ces relations : l’avenir du conflit au Haut-Karabakh et le processus de démocratisation de ce pays.


Date de mise en ligne : 07/07/2008

https://doi.org/10.3917/her.129.0123

Notes

  • [*]
    Doctorante en anthropologie politique, EHESS.
  • [1]
    Joseph S. Nye Jr, « Propaganda Isn’t the Way : Soft Power », The International Herald Tribune, 10 janvier 2003.
  • [2]
    En effet, les cinq pays riverains ne sont pas encore arrivés à un accord sur le statut même de cette mer. L’Iran considère que la Caspienne est un lac et doit être régie en conséquence, c’est-à-dire par un contrôle commun ou un partage égal des ressources. La Russie, l’Azerbaïdjan et le Kazakhstan s’accordent pour lui reconnaître le statut de mer fermée et chaque État riverain peut donc, proportionnellement à la longueur de ses côtes, en exploiter les ressources.
  • [3]
    24% en 2007 ; 36% en 2006; le budget du pays a augmenté de 40% en 2007 et celui de 2008 devrait atteindre près de 10 milliards USD.
  • [4]
    Le Freedom Support Act est adopté à l’automne 1992 par le Congrès américain.
  • [5]
    Discours du sénateur Sam Brownback, président de la sous-commission des Affaires étrangères du Sénat pour le Proche-Orient et l’Asie du Sud, 23 mars 1999.
  • [6]
    Il est remis à jour en mai 2006.
  • [7]
    Ce document modifie le Foreign Assistance Act de 1961.
  • [8]
    White House Paper on a New National Security Strategy, décembre 1999.
  • [9]
    Accord bilatéral pour le commerce signé en 1995.
  • [10]
    Dont la visite à Bakou en septembre 1994 de Madeleine Albright, ambassadrice américaine auprès des Nations unies.
  • [11]
    Ligne Kars-Akhalkalaki-Tbilissi-Bakou (KATB).
  • [12]
    Le 25 janvier 2002.
  • [13]
    En 2006, Bakou avait 150 personnels en Irak, 22 personnels en Afghanistan et 34 personnels au Kosovo.
  • [14]
    L’Azerbaïdjan est partenaire de l’Alliance depuis 1994 à travers le programme Partenariat pour la paix (PPP).
  • [15]
    Organisation rassemblant la Géorgie, l’Ukraine, l’Azerbaïdjan et la Moldavie, renommée ainsi depuis le départ de l’Ouzbékistan en 2005.
  • [16]
    Contre une rémunération de 7 millions USD par an.
  • [17]
    CASFOR.
  • [18]
    Dont font partie, entre autres, « For the Sake of Civil Society », « Coordinating Advisory Council for Free and Fair Elections »...
  • [19]
    Résolutions 822 (1993), 853 (1993), 874 (1993) et 884 (1993) du Conseil de sécurité des Nations unies.

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