Notes
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[1]
King et Le Galès ont initié dans un style « oxfordien », sur plusieurs années, des séminaires durant lesquels la plupart des spécialistes européens ont présenté leurs travaux de recherche. William Genieys a participé à deux de ces séminaires (à Sciences Po et à Nuffield College d'Oxford).
-
[2]
P. Evans, D. Rueschemeyer, T. Skocpol (eds) (1985), Bringing the State Back In, Cambridge, Cambridge University Press.
-
[3]
L. Jacobs, D. King (eds) (2009), The Unsustainable American State, Oxford, Oxford University Press.
-
[4]
Karen Orren et Stephen Skowronek définissent le « développement politique » comme « une transformation durable affectant l'autorité gouvernante » (K. Orren, S. Skowronek [2004], In Search of American Political Development, Cambridge, Cambridge University Press, p. 123). L'APD se présente comme une sous-discipline de la science politique susceptible de rassembler tous les travaux étudiant dans une perspective historique non évolutionniste les « réarrangement[s], redirection[s], reconstruction[s] » (p. 127) qui ont affecté le système politique américain depuis sa fondation. Au regard de cette approche extrêmement large, ces travaux dont certains peuvent être identifiés à la sociologie historique ou encore l'institutionnalisme historique s'avèrent extrêmement divers, voire contradictoires, quant à leurs objets, hypothèses ou conclusions. Concernant cette diversité, voir S. Mettler, R. M. Valelly (2016), « Introduction: The Distinctiveness and Necessity of American Political Development », in R. M. Valelly, S. Mettler, R. Liberman (eds), The Oxford Handbook of American Political Development, Oxford, Oxford University Press, p. 1-23.
-
[5]
Cette perspective était déjà très présente dans leur premier état de l'art sur la question : D. King, P. Le Galès (2011), « Sociologie de l'État en recomposition », Revue française de sociologie, 52 (3), p. 453-480.
-
[6]
K. Orren, S. Skowronek (2017), The Policy State. An American Predicament, Cambridge (Mass.), Harvard University Press.
-
[7]
P. Bezes (2009), Réinventer l'État. Les réformes de l'administration française (1962-2008), Paris, PUF.
-
[8]
W. Novak (2008), « The Myth of American State », American Historical Review, 113 (3), p. 752-72 ; S. Mettler (2011), The Submerged State. How Invisible Government Policies Undermine American Democracy, Chicago (Ill.), University of Chicago Press.
-
[9]
D. P. Carpenter (2010), Reputation and Power. Organizational Image and Pharmaceutical Regulation at the FDA, Princeton (N. J.), Princeton University Press ; L. Jacobs, D. King (2016), Fed Power. How Finance Wins, Oxford, Oxford University Press.
-
[10]
P. Birnbaum (1977), Les Sommets de l'État. Essai sur l'élite du pouvoir en France, Paris, Seuil.
-
[11]
Voir, par exemple : W. J. Novak (2008), « The Myth of the “Weak” American State », op. cit. ; D. King, R. C. Liebermann (2009), « Ironies of State Building: A Comparative Perspective on the American State », World Politics, 61 (3), p. 547-588.
-
[12]
J. P. Nettl (1968), « The State as a Conceptual Variable », World Politics, 20 (4), p. 559-592.
-
[13]
B. Badie, P. Birnbaum (1979), Sociologie de l'État, Paris, Seuil.
-
[14]
P. Birnbaum (2012), Les Deux Maisons. Essai sur la citoyenneté des juifs (en France et aux États-Unis), Paris, Gallimard ; et P. Birnbaum (2015), Les Désarrois d'un fou de l'État, Paris, Albin Michel, p. 111.
-
[15]
H. Kriesi (2007), « La performance des États forts et des États faibles », dans B. Badie, Y. Déloye (dir.), Le Temps de l'État. Mélanges en l'honneur de Pierre Birnbaum, Paris, Fayard, p. 283-302.
-
[16]
P. Rosanvallon (2006), Le Modèle politique Français. La société civile contre le jacobinisme de 1789 à nos jours, Paris, Seuil, coll. « Points histoire », p. 116.
-
[17]
M. Crozier (1987), État modeste, État moderne. Stratégies pour un autre changement, Paris, Seuil.
-
[18]
Cette préoccupation des approches « dépolitisantes » du politique a été très tôt présente dans les travaux de Pierre Birnbaum comme en témoigne La Fin du politique (Paris, Seuil, 1975).
-
[19]
L'auteur cite notamment P. Le Galès (2014), « Recomposition de l'État : changement d'échelle, normes extérieures, nouvelles organisation », dans P. Le Galès, N. Vezinat (dir.), L'État recomposé, Paris, PUF.
-
[20]
L. Rouban (2010), « Les élites de la réforme », Revue française d'administration publique, 136, p. 865-879.
-
[21]
P. Bezes (2009), Réinventer l'État, op. cit.
-
[22]
W. Genieys, P. Hassenteufel (2015), « The Shaping of the New State Elites. Healthcare Policymaking in France Since 1981 », Comparative Politics, 47 (3), p. 280-295.
-
[23]
P. Hassenteufel (2007), « L'État mis à nu par les politiques publiques ? », dans B. Badie, Y. Déloye (dir.), Le Temps de l'État. Mélanges en l'honneur de Pierre Birnbaum, Paris, Fayard, p. 311-329 ; P. Hassenteufel et al. (2010), « Programmatic Actors and The Transformation of European Health Care States », Journal of Health Politics, Policy and Law, 35 (4), p. 517-538 ; et P. Hassenteufel, B. Palier, « The French Welfare System », in R. Elgie, E. Grossman, A. G. Mazur (eds) (2016), The Handbook of French Politics, Oxford, Oxford University Press, p. 60-80.
-
[24]
P. Birnbaum (1979), Le Peuple et les Gros : histoire d'un mythe, Paris, Grasset.
-
[25]
D. King, P. Le Galès (2017), Reconfiguring European States in Crisis, op. cit., p. 14.
-
[26]
Ibid., p. 454.
-
[27]
Ibid., p. 465.
-
[28]
Sur la « communauté politique » comme variable constitutive de l'État, voir J. J. Linz (1997), « Construction étatique et construction nationale », Pôle Sud, 7, p. 5-26.
-
[29]
D. King, P. Le Galès (2017), Reconfiguring European States in Crisis, op. cit., p. 464.
-
[30]
Cette approche historiciste du Policy State que les auteurs lient à « l'ère progressiste » leur permet de le considérer comme de plus en plus à bout de souffle, en raison notamment de sa disjonction par rapport à la communauté politique (polity) américaine et ses principes démocratiques (d'où le sous-titre de l'ouvrage « Un malaise américain ») (K. Orren, S. Skowronek (2017), The Policy State, op. cit., voir notamment p. 192-198). D'une certaine manière, les auteurs remettent en question une vision de l'État réduite à ses seules politiques, s'interrogeant d'ores et déjà sur ce que pourrait être un « post-policy state » (p. 197).
-
[31]
K. Thelen (2003), « Comment les institutions évoluent : perspectives de l'analyse comparative historique », Association recherche et régulation, L'Année la régulation. Économie, institutions, pouvoirs, 7, Paris, Presses de Sciences Po, p. 35.
-
[32]
W. Genieys (2010), The New Custodians of the State. Programmatic Elites in a French Society, New Brunswick, Transactions Books, et W. Genieys, P. Hassenteufel (2012), « Qui gouverne les politiques publiques ? Par-delà la sociologie des élites », Gouvernement et action publique, 1 (2), p. 89-115.
-
[33]
B. Jobert Bruno, B. Théret (1994), « France : consécration républicaine du néo-libéralisme », dans B. Jobert (dir.), Le Tournant néo-libéral en Europe, Paris, L'Harmattan, p. 21-86.
-
[34]
W. Genieys, J. Joana (2015), « Bringing the State Elites Back In? Les gardiens des politiques de l'État en Europe et aux États-Unis », Gouvernement et action publique, 4 (3), p. 57-80.
-
[35]
W. Genieys, J. Joana (2017), « The Custodians of the State Policies dealing whit the Financial Crisis: A Comparison Between France and the US », International Relations and Diplomacy, 5 (6), p. 322-341. C'est dans cette perspective que va s'engager une recherche franco-allemande (ANR-DFG) sur la lutte intra élitaire dans le secteur de la santé sous la direction de Nils Bandelow et William Genieys : Programmatic Action in Times of Austerity: Elites' Competition and Health Sector Governance in France, Germany, the UK and the USA (2008-2018).
1
Desmond King, Patrick Le Galès (eds) (2017)
Reconfiguring European States in Crisis
Oxford, Oxford University Press
2Pierre Birnbaum (2018)
Où va l'État ? Essai sur les nouvelles élites du pouvoir
Paris, Seuil
3La question de l'État, de sa recomposition, de sa reconfiguration, voire de sa réaffirmation, connaît une nouvelle actualité. Nombre de politistes et sociologues s'interrogent sur son avenir. Pour rendre compte des différentes réponses apportées à cette question face aux effets conjugués du tournant néo-libéral et de la crise financière mondiale de 2008, deux chercheurs du CEPEL ont choisi de mettre en miroir leur lecture de deux ouvrages récemment publiés. William Genieys rendra compte de l'ouvrage collectif publié aux presses universitaires d'Oxford sous la houlette de deux spécialistes européens de l'analyse comparée de politiques publiques : Desmond King et Patrick Le Galès, Reconfiguring European States in Crisis (Oxford, Oxford University Press, 2017). De son côté, Mohammad-Saïd Darviche montrera en quoi le dernier opus de Pierre Birnbaum, Où va l'État ? Essai sur les nouvelles élites du pouvoir (Paris, Seuil, 2018), donne à voir de façon panoptique le futur du Léviathan français. La confrontation des deux ouvrages permettra, dans un troisième temps, aux deux lecteurs de s'interroger sur les perspectives offertes par la sociologie d'un État dont le développement est de plus en plus appréhendé au prisme de ses politiques publiques.
Vers une reconfiguration des États européens face à la crise ?
4L'imposant ouvrage collectif de plus de 23 chapitres et de 496 pages dirigé par Desmond King et de Patrick Le Galès propose une lecture originale de la transformation des États européens après la crise de 2008. Pour la grande majorité des contributeurs, c'est le changement dans les politiques publiques survenu depuis ces trente dernières années qui permet de saisir la reconfiguration des États démocratiques [1]. Partant de là, ils proposent un questionnement resserré sur les interactions entre changement dans les politiques publiques et recomposition de la capacité d'action des États européens. En se prêtant au jeu des filiations, il est clair que l'entreprise intellectuelle de Patrick Le Galès et Desmond King se situe dans le prolongement du classique Bringing the State Back In dirigé par Peter Evans, Dietrich Rueschemeyer et Theda Skocpol [2]. Fort de cette perspective, Reconfiguring European States in Crisis entend explorer la diversité des voies menant à la redéfinition de son pouvoir.
5L'ouvrage peut aussi être rapproché de The Unsustainable American State codirigé par Desmond King et Larry Jacobs [3]. En effet, la comparaison entre les États-Unis et l'Europe constitue le fil directeur caché du nouvel opus. Afin d'insister sur cette dimension, sera ici défendue l'idée selon laquelle ce livre est construit autour d'une ambition intellectuelle duale : d'une part, faire du changement dans les politiques la clef de la compréhension du processus de reconfiguration de l'État, et d'autre part, considérer les mutations contemporaines des États européens dans une perspective inspirée de l'American Political Development (APD) [4]. D'une certaine manière, les contributions de cet ouvrage pourraient constituer l'esquisse d'un futur courant de recherche visant à repérer les points de convergence et de divergence dans les transformations qui affectent les États en Europe. Par analogie, on pourrait qualifier ce courant de « European Political Development ».
6Si King et Le Galès affichent, dès l'introduction de l'ouvrage, leur volonté de situer la réflexion collective dans le droit fil de la sociologie de Michael Mann, c'est certainement pour répondre à ce double défi [5]. À la manière de ce dernier, ils proposent de discuter l'évolution du pouvoir infrastructurel des États. Le cas des États européens se prête particulièrement à ce type d'approche dans la mesure où chaque unité étatique est à la fois productrice de politiques propres, tout en étant intégrée à une Union européenne également productrice d'action publique. À cette fin, la préoccupation de King et Le Galès est d'amener plus loin que ne l'avaient fait Bruno Jobert et Pierre Muller, ou encore Peter Hall, l'analyse des États en action grâce au concept de policy state. Ce dernier constitue, selon Karen Orren et Stephen Skowronek, la forme contemporaine de l'État ; forme générée par la prolifération des politiques publiques dans les domaines les plus divers [6]. « L'État des politiques » permet ainsi de considérer les interactions changeantes entre institutions politiques et logique(s) de l'action publique comme une matrice sur la base de laquelle le pouvoir étatique évolue. En conséquence, le changement d'orientation programmatique dans les politiques peut servir de fil rouge à la compréhension du processus de reconfiguration des États.
7Pour mener à bien leur entreprise, King et Le Galès ont invité leurs co-auteurs à discuter quatre types de processus : le premier porte sur la question des changements d'échelle ; le deuxième aborde les effets des mutations du capitalisme ; le troisième traite des transformations de l'ordre bureaucratique ; et le quatrième concerne les questions sécuritaires au sens large. Outre l'intérêt central porté aux politiques publiques, les contributions relèvent le défi du comparatisme intra-européen, et osent parfois la comparaison transatlantique. N'ayant pas la possibilité de toutes les discuter ici, on présentera seulement les chapitres illustrant la perspective d'un European Political Development.
8Sur la question des effets des changements d'échelle, Chris Bickerton (chapitre 2) pointe comment le processus d'intégration à l'Union européenne des « États membres » a bousculé leur capacité d'action. Ce changement d'échelle les a obligés à se doter d'un cadre externe de gouvernement à caractère technocratique, entraînant un affaiblissement du rôle des partis politiques dans le processus de prise de décision. Par ricochet, l'action publique semble de plus en plus déconnectée des formes élémentaires de la démocratie représentative, accroissant ainsi le fossé entre citoyens et élites. Hendrik Spruyt explore la question de la reconfiguration des États « européens » à travers celle de la souveraineté pour souligner la particularité de son développement historique (chapitre 5, p. 99). Pour lui, l'Union européenne introduit une configuration hybride et unique conduisant à une déterritorialisation graduelle de l'autorité politique. La gouvernance multi-niveaux alors induite a favorisé la formation de réseaux transnationaux composés d'institutions et d'élites technocratiques qui ont accaparé des domaines d'action publique où l'autorité était précédemment exercée par les différents gouvernements nationaux. La politique économique et monétaire apparaît alors comme le résultat de compromis construits au-delà de l'État.
9Wolfgang Streeck évalue l'impact des mutations successives du système capitaliste sur le processus de reconfiguration des États en Europe (chapitre 7). Il montre en quoi, malgré la crise fiscale des États, le développement de la dette publique s'est imposé comme un redoutable instrument de redistribution. Comparant les États européens avec les États-Unis, Streeck souligne la façon asymétrique dont les politiques d'austérité ont impacté les pays du vieux continent notamment après la crise économique de 2008. De surcroît, les pratiques politiques (délibération secrète, style technocratique) de certains acteurs comme les banques centrales, endossant le rôle de juge des « marchés », donnent l'image d'États consolidés mais sous influence (ibid., p. 154). Cornelia Woll, observe, toujours dans le contexte de l'après-2008, l'action de l'État au prisme des relations entre gouvernements et institutions financières (chapitre 10). Elle montre comment, malgré le processus d'internationalisation de la finance, les États ont domestiqué les institutions financières privées dépendantes de l'aide publique en temps de crise (ibid., p. 211). Dès lors, acteurs publics et privés jouent des rôles complémentaires tant au niveau stato-national qu'au niveau de l'Union européenne. Paradoxalement, dans le secteur de la finance, les deux niveaux de gouvernement convergent vers une même vision des politiques publiques.
10Concernant le tournant néo-managérial, Philippe Bezes élargit la problématique du « souci de soi de l'État [7] » à la quasi-intégralité des situations européennes pour souligner la différenciation des réformes administratives en fonction de leur degré de pilotage ou de délégation (chapitre 11). Dans certaines configurations post-tournant néo-libéral, on assiste même à un phénomène de rebureaucratisation. Par ailleurs, il met en évidence que l'introduction du new management concorde avec le développement du policy state dans le contexte de la vieille Europe. De leur côté, Bruno Palier et Colin Hay partent en quête de la reconfiguration des Welfare State en Europe en analysant la mutation des trois paradigmes dominants : keynésien, néo-libéral, et de l'« investissement social » (chapitre 17). Questionnant le devenir des three worlds of welfare state, ils proposent une cartographie « néo-rokannienne » du changement : libéralisation en Grande-Bretagne ; « flexisécurité » pour les pays du Nord et libéralisation partielle et dualisation pour les pays d'Europe continentale. Palier et Hay conviennent que la crise de 2008 a eu un effet déstabilisant sur l'ensemble des États, mais indiquent que ceux engagés avant cette date sur la voie de l'« investissement social » (Allemagne, Autriche, et pays nordiques) subiront moins la loi du néo-libéralisme dans la restructuration de leurs systèmes que ceux ayant maintenu des systèmes compensatoires.
11Le politologue britannique Anand Menon s'intéresse au développement d'une politique de défense au niveau de l'ensemble européen qu'il compare avec celle des États-Unis (chapitre 19). Dans une perspective analytique explicitement inspirée de l'approche APD, Menon précise que si la forme fédérale des États-Unis a été, pendant longtemps, un frein à la mise en place d'une armée permanente, elle s'est montrée plutôt efficace pour la mobilisation d'une force armée lors des conflits internationaux. C'est ce qui, selon l'auteur, a permis la création d'un super-pouvoir militaire américain à l'issue de la Seconde Guerre mondiale dans un contexte favorable à l'émergence des États-Unis comme grande puissance. En Europe, au contraire, depuis l'âge d'or des États centralisés et militarisés du XIXe siècle, aucune politique de défense d'envergure n'a réussi à s'imposer. De fait, au sein de l'Union européenne, les politiques de défense souffrent d'un déficit d'existence institutionnelle et d'une concurrence des États malgré de nouveaux enjeux sécuritaires. Olivier Borraz et Lydie Cabane (chapitre 20) explorent la question sécuritaire face aux nouveaux « risques » sociétaux (catastrophes naturelles, attaques terroristes, etc.). S'appuyant sur l'exemple étasunien pour mieux faire ressortir les spécificités des États européens, Borraz et Cabane pointent le fait que les crises et scandales divers, précèdent, mais également provoquent une réponse à travers la création d'institutions (agences) et d'instruments d'action publique (programmes). Si aux États-Unis, « l'État sécuritaire » émerge selon des méthodes et instruments hérités de ceux de la guerre froide, en Europe, les États maintiennent la séparation entre défense civile et sécurité nationale (p. 409). Paradoxalement, la crise du management public a offert de nombreuses opportunités permettant d'élargir le périmètre d'action des États européens sur ces enjeux de politiques.
12Dans une conclusion ouvertement comparatiste, Desmond King et Patrick Le Galès reviennent sur la comparaison entre État américain rappelant qu'il a été qualifié à tort d'État faible [8] et États européens (chapitre 23). De leur point de vue, la comparaison entre les deux cas a surdéterminé la dimension bureaucratique de ces derniers et minoré la capacité de régulation des agences gouvernementales américaines. S'appuyant sur les recherches mobilisées au fil des différents chapitres, King et Le Galès considèrent qu'en Europe comme aux États-Unis, les réponses aux problèmes sociétaux communs passent par la mobilisation de répertoires de politiques publiques assez semblables. D'où une forme de convergence dans le développement de capacité d'action de l'État, de part et d'autre de l'Atlantique, que leur ouvrage met en avant de façon convaincante (ibid., p. 457-58). Toujours en effectuant une relecture « étatiste » du développement de l'État américain, nos auteurs pointent la relative force de son gouvernement fédéral notamment dans certaines administrations à forte autonomie d'action (Food and Drug Administration [FDA] ou encore la Federal Reserve System [Fed]) [9]. Dans le cas des États du vieux continent, même si la Banque centrale européenne (BCE), notamment en raison de la crise de la dette, ou encore certaines directions générales (DG agriculture et développement rural) ont une forte capacité de contrainte sur les États membres, ce n'est pas le cas dans des secteurs régaliens tels que la défense ou encore l'assurance maladie où il apparaît que certaines « élites des politiques » agissent pour maintenir la capacité d'action de « leur » État.
Comprendre la logique d'État au prisme de ses élites : le cas français
13Avec Où va l'État ?, Pierre Birnbaum revient, quarante années plus tard, sur la question abordée dans son ouvrage désormais classique Les Sommets de l'État [10]. Dans cet Essai sur l'élite du pouvoir en France, il indiquait que la « force » de l'État français résultait de l'autonomie de sa haute fonction publique vis-à-vis des intérêts particuliers. Cette autonomie pouvait varier suivant les époques et les régimes politiques mais, en dépit de ces variations, l'État français n'en demeurait pas moins fondamentalement « fort ». Dans son nouvel opus, Birnbaum s'interroge sur la perméabilité de l'État français aux injonctions du néo-libéralisme durant ces vingt dernières années. Pour lui, les évolutions de moyenne durée ne sauraient remettre aussi facilement en question des institutions et comportements structurés sur la très longue durée et la logique séculaire de l'État. L'ouvrage est constitué de cinq chapitres : les deux premiers s'interrogent sur les évolutions de l'ENA et des carrières des hauts fonctionnaires ; le troisième s'intéresse aux effets de la réforme de l'État sur ses élites ; enfin, les deux derniers sont consacrés à la question de la corruption des élites et ses conséquences sur la posture anti-oligarchique des partis populistes.
14Rappelons d'emblée que la distinction entre États « forts » et « faibles », sévèrement critiquée récemment [11], s'inscrit dans une longue filiation néo-marxiste et néo-weberienne. Formalisée à la fin des années 1970 par John Peter Nettl [12], elle est, quelques années plus tard, reprise par Bertrand Badie et Pierre Birnbaum sous la forme d'une sociologie historique comparée de l'État [13]. Le projet intellectuel consiste alors à différencier les trajectoires des États anglo-saxons réputés « faibles » car moins administrés, dépourvus de « culture d'État » et laissant une plus grande marge de manœuvre à la « société civile » des États « forts » d'Europe continentale (et en particulier l'État français) plus bureaucratiques et interventionnistes.
15Tout au long de son parcours intellectuel, Pierre Birnbaum n'a eu de cesse, en comparant notamment la France et les États-Unis, de défendre la pertinence de cette typologie mais en la rattachant aussi bien à Max Weber dont il rejette les interprétations évolutionnistes qu'Alexis de Tocqueville [14]. Rappelons également que la notion de « force » chez Birnbaum n'implique pas obligatoirement « efficacité » de l'action publique. Hanspeter Kriesi a montré qu'un État faible pouvait être mieux armé pour mettre en place des politiques publiques efficaces [15]. Donc, nul « mythe » ou encore d'« ironie » à voir de la « faiblesse » dans un État américain dont l'action peut s'avérer performante. La préoccupation de Birnbaum est ailleurs puisqu'il entend définir l'action publique à partir de la catégorie d'« intérêt général » contre une conception « américanisée » qui trouve sa légitimité dans la négociation entre intérêts particuliers.
16Dans l'œuvre birnbaumienne, la trajectoire « exceptionnelle » de l'État français ne saurait être facilement déviée ou « reconfigurée » sous la contrainte de l'européanisation et autre mondialisation capitaliste. Birnbaum s'était, très tôt, opposé à ceux qui en appelaient à sortir de « l'exceptionnalisme » français pour se mettre en adéquation avec les évolutions convergentes des États dans les pays capitalistes industrialisés [16] et, plus encore, à ceux qui invitaient l'État et sa bureaucratie, jugée envahissante, à plus de « modestie [17] ». C'est dans une perspective identique qu'Où va l'État ? se veut une réponse aux travaux annonçant la fin « du » politique au profit « des » politiques [18], et qui tendent à enlever à l'État une centralité qui favoriserait le développement d'« instruments » issus du nouveau management [19].
17Si Birnbaum fait un pas en direction de l'analyse de l'« État des politiques », c'est pour immédiatement s'en dissocier en mettant l'accent non pas sur les politiques et leur orientation programmatique, mais sur les élites qui les portent. Ce choix analytique est destiné à faire primer face à un « État stratège », souvent désincarné, une « logique [historique] de l'État » portée par des élites éponymes.
18Dès le début de l'ouvrage, l'auteur reconnaît une plus grande connexion, depuis une trentaine d'années, des élites de l'État avec le secteur privé. Étudiant la composition des cabinets de l'actuel président de la République, de son Premier ministre et du ministre de l'Économie, il constate, qu'à côté des « purs gardiens de l'État » (à la carrière exclusivement publique), un grand nombre est passé par des écoles de commerce de premier plan (en France ou à l'étranger) ou a fait des études économiques ou encore de politiques publiques. Par ailleurs, le traditionnel « pantouflage » intervenant en fin de carrière laisse place à de fréquents allers-retours entre secteurs public et privé. Birnbaum constate aussi une modification de la composition sociologique des gouvernants parmi lesquels on trouve de moins en moins d'énarques et de plus en plus de personnes issues de la « société civile ». De même, dans le dernier parlement élu, les professions liées au secteur privé sont plus fortement représentées. Ce phénomène, habituel dans les systèmes politiques anglo-saxons, semble avoir atteint l'espace politique français dans ses fondamentaux.
19Pour autant, doit-on considérer comme acquise la fin de l'État fort à la française ? Birnbaum répond par la négative. L'attachement à l'État reste toujours présent au sein de la haute fonction publique. Faire une école de commerce, travailler au sein d'un cabinet de conseil ou dans une grande entreprise du CAC 40 ne signifient pas nécessairement que les hauts fonctionnaires concernés soient des représentants des seuls intérêts du monde économique. Le passage par l'ENA demeure dans l'esprit de ses élèves un puissant marqueur de l'« État moral » dont ils se considèrent les dépositaires. Par ailleurs, le pantouflage ne concerne-t-il pas qu'une minorité d'énarques le plus souvent issus des grands corps et qui finissent par y revenir ? 8 % des énarques ont quitté durablement l'État entre 1980 et 2000 alors que sur la même période 78 % n'ont jamais exercé de responsabilité en entreprise.
20À l'idée d'une adaptation fonctionnelle de l'institution étatique aux normes néo-libérales, Birnbaum oppose celle d'une recomposition du new public management effectuée sous l'égide du Léviathan français. La réforme de l'État impulsée sous la présidence Sarkozy a été menée par des hauts fonctionnaires très majoritairement issus des grands corps [20]. S'il partage le point de vue de Bezes sur le « souci de soi de l'État [21] », Birnbaum y voit la patte d'une « tradition » dont ses élites administratives sont les dépositaires. Ces mêmes hauts fonctionnaires qui, face au développement de la rigueur budgétaire politique dans certains secteurs stratégiques, se sont attribués le rôle de « gardien des politiques » de l'État [22]. Dans le même sens, les acteurs de la réforme des systèmes d'assurances maladie depuis les années 1980 en France, en Allemagne, et au Royaume-Uni ont engendré une re-différenciation de l'État fort, d'un côté, et une dédifférenciation sociétale de politiques impopulaires dans les États faibles [23].
21L'ouvrage se termine sur deux chapitres consacrés au danger de corruption des élites auquel font écho les néo-populismes. Pierre Birnbaum y est volontiers plus normatif et circonspect quant au devenir de l'État fort. Tout en rappelant les cas de corruption de hauts fonctionnaires qui ont marqué l'histoire de la Ve République, il s'inquiète de la récente aggravation du phénomène. L'auteur retrouve ici une autre de ses préoccupations : la critique populiste des élites [24] encouragée par la corruption avérée de certaines d'entre elles. Pour juguler le populisme, l'auteur appelle, en creux, à se méfier de l'effacement des frontières entre public et privé et du recul de l'État. Une population française qui demeure « arc-boutée sur son État » pourrait alors se montrer sensible aux discours populistes : un populisme d'extrême gauche considérant comme acquis l'effacement de l'État au profit de l'« oligarchie » ; un autre, d'extrême droite, qui prétend réhabiliter l'État fort mais dans une version antirépublicaine, autoritaire, méprisant la neutralité des fonctionnaires et excluant des « communautés » jugées indésirables.
22D'une certaine manière, l'ouvrage se conclut sur un constat qui a valeur de prescription : l'État fort à la française demeure le meilleur rempart contre la corruption de ses élites et des populismes. Une vision de l'État comme simple producteur de politiques dont il faudrait améliorer les performances risque, de ce point de vue, de porter durablement atteinte à la fois à la cohésion de la société et à la légitimité de ses élites. En partant de l'exemple français, la sociologie historique de Pierre Birnbaum nous invite à un comparatisme élargi au-delà des politiques publiques des États, à leurs élites, leurs « sociétés civiles » et aux cultures qui les portent.
Entre recomposition, reconfiguration et réaffirmation : où vont les États européens ?
23L'approche de Birnbaum peut-elle s'avérer compatible avec celle de King et Le Galès ? À la lecture de ces deux ouvrages, on relève que politologues et sociologues jouent chacun leur propre partition, mais convergent dans leurs conclusions pour affirmer il est vrai avec plus ou moins d'intensité la capacité de résilience de l'État face aux crises et aux idéologies prétendant le mettre à terre.
24King et Le Galès ont fort opportunément laissé la porte ouverte à la contestation de l'idée d'un alignement des politiques publiques, de leurs instruments et acteurs, sur un standard commun en considérant une « reconfiguration » des États européens à la fois comme « nuancée et non linéaire [25] ». Cette reconfiguration qu'ils lient à la double contrainte systémique de l'européanisation et de la mondialisation pourrait donc connaître des destins divers ne menant pas forcément à un « État européen [26] ». En ce sens, la réflexion sur le développement politique en Europe ne considérerait pas comme acquise la convergence et l'uniformisation des États membres de l'Union européenne.
25De même, les populismes très différents dans leur intensité et leur expression que ces auteurs expliquent par la durée des politiques d'austérité et la crise de 2008 [27], pourraient aussi être compris au prisme de la spécificité de chacun des États, entendus comme « communautés politiques » (nations), pouvant contester, de manière différenciée, les injonctions systémiques [28]. Même si les auteurs reconnaissent l'importance de cette dimension de l'État fondée sur « une collection de symboles non matériels et de significations partagées par les citoyens en tant que membres [29] », force est de constater qu'elle pourrait être plus mobilisée pour expliquer la manière dont le contenu des politiques est façonné. C'est justement ce qu'Où va l'État ? tente de souligner en s'intéressant à la capacité de résistance de l'« État fort » français au tournant néo-libéral. Loin de se dissoudre sous les coups de boutoir des « systèmes », son « code culturel » garderait une efficacité suffisante pour en domestiquer les contraintes à partir de sa propre logique.
26Mais ici aussi, la perspective de King et Le Galès et le comparatisme implicite de Birnbaum peuvent se rejoindre sur l'interrogation quant à la capacité des États à renaître, à l'image du Phoenix, de leurs cendres. En poussant, leurs approches respectives dans un dernier retranchement, on pourrait tenter l'hypothèse selon laquelle le tournant « néo-libéral » ou encore le nouveau management public loin de se réaliser contre l'État ne peut trouver une traduction que par et dans l'État. Dans leur récent ouvrage, Karen Orren et Stephen Skowronek montrent, à partir de l'exemple étasunien, que l'avènement du Policy State, qu'ils situent au début du XXe siècle, correspond à une tendance à la cristallisation de l'autorité politique au niveau d'un État fédéral monopolisant une action publique de plus en plus inflationniste [30]. Dès lors et tel est l'apport de la perspective comparatiste défendue par King et Le Galès c'est en traquant les luttes qui se nouent autour de la définition des politiques et de leur mise en œuvre que l'on est à même de saisir dans quelle mesure et comment l'autorité des États démocratiques se recompose en Europe. « En politique, les perdants ne [disparaissant] pas nécessairement [31] », cette recomposition ne doit pas être posée a priori mais considérée comme un phénomène à démontrer notamment par l'observation non seulement des acteurs qui la portent mais aussi ceux qui la combattent.
27C'est la perspective adoptée par les recherches confrontant la sociologie des élites à l'analyse du changement dans les politiques publiques pour comprendre, notamment à partir du cas français, comment, dans certains secteurs stratégiques pour la survie de l'autorité de l'État (welfare et warfare), des petits groupes d'élites s'imposent en tant qu'acteurs programmatiques [32], là où les travaux classiques relatifs à l'analyse des politiques publiques en France avaient tendance à réduire le rôle de certaines élites de l'État à travers le processus de conversion certes contraint et subtil à celui d'« économistes d'État [33] ». De son côté, Pierre Birnbaum relativise l'impact des politiques d'inspiration libérale sur la structure globale de ces élites en reprenant à son compte l'idée du « souci de soi de l'État » de Philippe Bezes. Cet effort réflexif sur l'action étatique menée par ses « gardiens », loin de remettre en question sa « logique » participerait au contraire à sa relégitimation et son renforcement. Ce point mérite certainement une discussion plus poussée car si les États européens ont délégué en partie leurs compétences au niveau supra étatique, cette délégation est loin d'être acquise tant l'inéluctabilité du projet européen semble relativisée aujourd'hui.
28Quoi qu'il en soit, et au regard des perspectives que nous venons de discuter, il nous paraît pertinent de porter une attention particulière sur les batailles intra-élitaires qui peuvent survenir, au sein du pouvoir exécutif comme du législatif, au cours du processus de prise de décisions dans un domaine de politique publique donné. Un tel choix permet de considérer, dans un même effort de recherche, comment des trajectoires élitaires collectives se (re)définissent (autour de quel type circulation privé-public ?) dans la durée ; comment, également, l'acquisition par certaines élites d'un savoir-faire sur des politiques sectorielles leur permet de supplanter les élites bureaucratiques dotées d'un profil généraliste ; enfin, comment leurs trajectoires s'inscrivent dans l'aboutissement de projets de réforme de politiques finalisés par le renforcement de l'autorité de l'État [34]. De même, pour approfondir les effets des politiques de retranchement de l'État sur la recomposition du pouvoir de ses élites, il serait pertinent de se focaliser sur les conflits entre les élites rattachées aux ministères « financiers » (Économie, Trésor, Budget) prônant l'austérité et les élites sectorielles garantes de la durabilité de leur politique [35].
Notes
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[1]
King et Le Galès ont initié dans un style « oxfordien », sur plusieurs années, des séminaires durant lesquels la plupart des spécialistes européens ont présenté leurs travaux de recherche. William Genieys a participé à deux de ces séminaires (à Sciences Po et à Nuffield College d'Oxford).
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[2]
P. Evans, D. Rueschemeyer, T. Skocpol (eds) (1985), Bringing the State Back In, Cambridge, Cambridge University Press.
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[3]
L. Jacobs, D. King (eds) (2009), The Unsustainable American State, Oxford, Oxford University Press.
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[4]
Karen Orren et Stephen Skowronek définissent le « développement politique » comme « une transformation durable affectant l'autorité gouvernante » (K. Orren, S. Skowronek [2004], In Search of American Political Development, Cambridge, Cambridge University Press, p. 123). L'APD se présente comme une sous-discipline de la science politique susceptible de rassembler tous les travaux étudiant dans une perspective historique non évolutionniste les « réarrangement[s], redirection[s], reconstruction[s] » (p. 127) qui ont affecté le système politique américain depuis sa fondation. Au regard de cette approche extrêmement large, ces travaux dont certains peuvent être identifiés à la sociologie historique ou encore l'institutionnalisme historique s'avèrent extrêmement divers, voire contradictoires, quant à leurs objets, hypothèses ou conclusions. Concernant cette diversité, voir S. Mettler, R. M. Valelly (2016), « Introduction: The Distinctiveness and Necessity of American Political Development », in R. M. Valelly, S. Mettler, R. Liberman (eds), The Oxford Handbook of American Political Development, Oxford, Oxford University Press, p. 1-23.
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[5]
Cette perspective était déjà très présente dans leur premier état de l'art sur la question : D. King, P. Le Galès (2011), « Sociologie de l'État en recomposition », Revue française de sociologie, 52 (3), p. 453-480.
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[6]
K. Orren, S. Skowronek (2017), The Policy State. An American Predicament, Cambridge (Mass.), Harvard University Press.
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[7]
P. Bezes (2009), Réinventer l'État. Les réformes de l'administration française (1962-2008), Paris, PUF.
-
[8]
W. Novak (2008), « The Myth of American State », American Historical Review, 113 (3), p. 752-72 ; S. Mettler (2011), The Submerged State. How Invisible Government Policies Undermine American Democracy, Chicago (Ill.), University of Chicago Press.
-
[9]
D. P. Carpenter (2010), Reputation and Power. Organizational Image and Pharmaceutical Regulation at the FDA, Princeton (N. J.), Princeton University Press ; L. Jacobs, D. King (2016), Fed Power. How Finance Wins, Oxford, Oxford University Press.
-
[10]
P. Birnbaum (1977), Les Sommets de l'État. Essai sur l'élite du pouvoir en France, Paris, Seuil.
-
[11]
Voir, par exemple : W. J. Novak (2008), « The Myth of the “Weak” American State », op. cit. ; D. King, R. C. Liebermann (2009), « Ironies of State Building: A Comparative Perspective on the American State », World Politics, 61 (3), p. 547-588.
-
[12]
J. P. Nettl (1968), « The State as a Conceptual Variable », World Politics, 20 (4), p. 559-592.
-
[13]
B. Badie, P. Birnbaum (1979), Sociologie de l'État, Paris, Seuil.
-
[14]
P. Birnbaum (2012), Les Deux Maisons. Essai sur la citoyenneté des juifs (en France et aux États-Unis), Paris, Gallimard ; et P. Birnbaum (2015), Les Désarrois d'un fou de l'État, Paris, Albin Michel, p. 111.
-
[15]
H. Kriesi (2007), « La performance des États forts et des États faibles », dans B. Badie, Y. Déloye (dir.), Le Temps de l'État. Mélanges en l'honneur de Pierre Birnbaum, Paris, Fayard, p. 283-302.
-
[16]
P. Rosanvallon (2006), Le Modèle politique Français. La société civile contre le jacobinisme de 1789 à nos jours, Paris, Seuil, coll. « Points histoire », p. 116.
-
[17]
M. Crozier (1987), État modeste, État moderne. Stratégies pour un autre changement, Paris, Seuil.
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[18]
Cette préoccupation des approches « dépolitisantes » du politique a été très tôt présente dans les travaux de Pierre Birnbaum comme en témoigne La Fin du politique (Paris, Seuil, 1975).
-
[19]
L'auteur cite notamment P. Le Galès (2014), « Recomposition de l'État : changement d'échelle, normes extérieures, nouvelles organisation », dans P. Le Galès, N. Vezinat (dir.), L'État recomposé, Paris, PUF.
-
[20]
L. Rouban (2010), « Les élites de la réforme », Revue française d'administration publique, 136, p. 865-879.
-
[21]
P. Bezes (2009), Réinventer l'État, op. cit.
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[22]
W. Genieys, P. Hassenteufel (2015), « The Shaping of the New State Elites. Healthcare Policymaking in France Since 1981 », Comparative Politics, 47 (3), p. 280-295.
-
[23]
P. Hassenteufel (2007), « L'État mis à nu par les politiques publiques ? », dans B. Badie, Y. Déloye (dir.), Le Temps de l'État. Mélanges en l'honneur de Pierre Birnbaum, Paris, Fayard, p. 311-329 ; P. Hassenteufel et al. (2010), « Programmatic Actors and The Transformation of European Health Care States », Journal of Health Politics, Policy and Law, 35 (4), p. 517-538 ; et P. Hassenteufel, B. Palier, « The French Welfare System », in R. Elgie, E. Grossman, A. G. Mazur (eds) (2016), The Handbook of French Politics, Oxford, Oxford University Press, p. 60-80.
-
[24]
P. Birnbaum (1979), Le Peuple et les Gros : histoire d'un mythe, Paris, Grasset.
-
[25]
D. King, P. Le Galès (2017), Reconfiguring European States in Crisis, op. cit., p. 14.
-
[26]
Ibid., p. 454.
-
[27]
Ibid., p. 465.
-
[28]
Sur la « communauté politique » comme variable constitutive de l'État, voir J. J. Linz (1997), « Construction étatique et construction nationale », Pôle Sud, 7, p. 5-26.
-
[29]
D. King, P. Le Galès (2017), Reconfiguring European States in Crisis, op. cit., p. 464.
-
[30]
Cette approche historiciste du Policy State que les auteurs lient à « l'ère progressiste » leur permet de le considérer comme de plus en plus à bout de souffle, en raison notamment de sa disjonction par rapport à la communauté politique (polity) américaine et ses principes démocratiques (d'où le sous-titre de l'ouvrage « Un malaise américain ») (K. Orren, S. Skowronek (2017), The Policy State, op. cit., voir notamment p. 192-198). D'une certaine manière, les auteurs remettent en question une vision de l'État réduite à ses seules politiques, s'interrogeant d'ores et déjà sur ce que pourrait être un « post-policy state » (p. 197).
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[31]
K. Thelen (2003), « Comment les institutions évoluent : perspectives de l'analyse comparative historique », Association recherche et régulation, L'Année la régulation. Économie, institutions, pouvoirs, 7, Paris, Presses de Sciences Po, p. 35.
-
[32]
W. Genieys (2010), The New Custodians of the State. Programmatic Elites in a French Society, New Brunswick, Transactions Books, et W. Genieys, P. Hassenteufel (2012), « Qui gouverne les politiques publiques ? Par-delà la sociologie des élites », Gouvernement et action publique, 1 (2), p. 89-115.
-
[33]
B. Jobert Bruno, B. Théret (1994), « France : consécration républicaine du néo-libéralisme », dans B. Jobert (dir.), Le Tournant néo-libéral en Europe, Paris, L'Harmattan, p. 21-86.
-
[34]
W. Genieys, J. Joana (2015), « Bringing the State Elites Back In? Les gardiens des politiques de l'État en Europe et aux États-Unis », Gouvernement et action publique, 4 (3), p. 57-80.
-
[35]
W. Genieys, J. Joana (2017), « The Custodians of the State Policies dealing whit the Financial Crisis: A Comparison Between France and the US », International Relations and Diplomacy, 5 (6), p. 322-341. C'est dans cette perspective que va s'engager une recherche franco-allemande (ANR-DFG) sur la lutte intra élitaire dans le secteur de la santé sous la direction de Nils Bandelow et William Genieys : Programmatic Action in Times of Austerity: Elites' Competition and Health Sector Governance in France, Germany, the UK and the USA (2008-2018).