Couverture de GMP_082

Article de revue

Le couplage faible comme facteur de réussite des changements organisationnels publics : le cas de la mutualisation de services communaux

Pages 91 à 109

Notes

  • [1]
    Le Code Général des Collectivités Territoriales ne donne pas de définition juridique de la mutualisation.
  • [2]
    Les noms de l’EPCI et de la Ville-Centre ont été rendus anonymes.
  • [3]
    D’après une délibération du conseil de communauté de février 2016 : « le schéma de mutualisation devra concilier regroupement et optimisation des dépenses de fonctionnement tout en conservant la relation de proximité chère aux habitants des communes et des quartiers ».

Introduction

1Les changements organisationnels sont nombreux en secteur public (hôpitaux, universités, collectivités) pour des raisons d’adaptation des services proposés et de recherche d’efficacité et font l’objet de nombreuses recherches sur les facteurs de réussite au regard des échecs ou freins rencontrés (Moynihan 2006 ; Van Dooren et Thijs, 2010). Bien que plébiscités, ces changements, parfois appelés innovations managériales, ont du mal à s’implanter et produire des résultats significatifs au sein du secteur public. L’étude des facteurs de réussite apparaît donc importante d’autant plus que les caractéristiques spécifiques des organisations publiques (spécificités d’organisation, de fonctionnement et de valeurs) suggèrent des conditions d’implantation des changements distinctes du secteur privé (Birkinshaw et al., 2008).

2Dans ce sens, l’objectif de cette recherche est d’identifier de nouveaux facteurs clefs pour réussir la mise en œuvre d’un changement organisationnel de grande ampleur au sein d’une ou plusieurs organisations publiques.

3Nous mobilisons le changement organisationnel imposé en janvier 2015 par la loi de Réforme des Collectivités Territoriales (2010) portant sur la mutualisation de services publics, définie par la mise en commun de moyens [1] entre différentes organisations. L’intérêt de changement est, d’une part, que son application ne va pas de soi : « la mutualisation n’est pas déterminée automatiquement, ni dans son principe, ni dans ses modalités selon les caractéristiques des communes ou de leurs intercommunalités » (rapport Lebranchu et Baroin, 2015, p. 16). D’autre part, « les mutualisations suscitent parfois des craintes d’insuffisante réactivité des services ou d’un éloignement de l’usager, plus prompt à interpeller son maire qu’à se tourner vers un service communautaire » (ibid., p. 23) et les premières démarches concluent à des résultats nuancés (rapport Lambert et al., 2010).

4Les mutualisations intercommunales fournissent donc un support d’étude pertinent de changement récent imposé par la loi pour identifier des facteurs de réussite au regard des difficultés inhérentes à ces démarches.

5Pour étudier ces facteurs de réussite nous positionnons la recherche dans le cadre théorique des paradoxes organisationnels (Poole et Van de Ven, 1989 ; Barel, 1998 ; Perret et Josserand, 2003) dont la gestion est complexe comme l’ont récemment illustré Grimand et al. (2018). Les quatre paradoxes identifiés dans la littérature se retrouvent dans notre terrain d’étude et leurs modes de gestion font intervenir, selon les résultats de Grimand et al. (2018), les systèmes à couplage fort et faible développés par Orton et Weick (1990).

6Aussi, nous supposons que le recours à la modalité de couplage-découplage des systèmes organisationnels peut constituer un facteur de réussite pour les changements organisationnels publics. Cette modalité fait référence à la recherche de cohérence entre les éléments du système (pratiques, outils, discours) ou bien, dans un couplage faible ou découplage, à la liberté donnée aux composants du système sans rechercher de cohérence interne ni d’alignement au contexte organisationnel.

7Parmi les facteurs de réussite identifiés dans la littérature sur les changements organisationnels, le couplage ou découplage des sous-systèmes n’apparaît pas et cette étude vise donc à montrer en quoi le découplage entre des discours et des pratiques et entre des objectifs ambitieux et des résultats nuancés progressifs peut être un facteur de réussite dans un changement organisationnel public.

8Cette recherche, dont la portée concerne de nombreux changements et projets en secteur public, poursuit les études actuelles sur la gestion des paradoxes et sur les facteurs de succès dans les changements organisationnels.

9Après une explication des facteurs clés de succès issus de la littérature sur le changement organisationnel public, la mutualisation de services et du concept de paradoxe organisationnel introduisant le concept de découplage, sont présentés. Une deuxième partie présente la méthodologie de recueil et de traitement des données issus du cas. La troisième partie expose les résultats avant que la quatrième partie ne les discute et en tire des perspectives.

1 – Les conditions de réussite d’un changement organisationnel (la mutualisation de services) introduisant le couplage faible

10Le contexte théorique de cette recherche nécessite de présenter les mécanismes de changement dans le secteur public et les facteurs de réussite associés (1.1) avant d’analyser le couplage faible, comme facteur de réussite et mode de gestion des paradoxes organisationnels (1.2), pour montrer l’intérêt de ce concept dans les mutualisations de services communaux (1.3).

1.1 – L’étude d’un changement organisationnel en secteur public et ses facteurs de réussite

11La présentation d’un changement organisationnel soulève selon Barel et Frémeaux (2009) trois questionnements portant respectivement sur le sens de la conduite du changement (une démarche ascendante ou descendante), sur l’ampleur initiale du changement et sur les étapes du processus (Phillips, 1983). Ces interrogations rendent compte de l’indissociabilité du contexte, du contenu et du processus de changement évoquée par Pettigrew (1987). L’étude des facteurs de réussite d’un changement organisationnel s’inscrit donc dans une analyse intégrant ces trois éléments.

12La complexité du changement suppose une intégration des deux dimensions technico-économique et psychosociale. Les modèles technico-économiques, fondés sur une approche projet, se centrent sur la dimension technique du changement (objectif tangible) et sur ses caractéristiques économiques (coûts, budgets…). Ils abordent le changement comme un projet technique, à la différence des modèles psychosociaux développés dans la continuité de l’École des relations humaines et qui mettent l’accent sur le facteur humain (surmonter les résistances au changement, faciliter l’appropriation des nouveaux modes de management). La plupart de ces modèles s’articulent autour des trois phases psychologiques nécessaires à la réalisation d’un changement et identifiées par Lewin (1948), mais les approches plus récentes tentent de conjuguer les dimensions technique et humaine de la conduite de changement en s’inspirant des travaux réalisés sur l’innovation (Latour, 1993). Le modèle de développement de l’innovation rend en effet compte des itérations incessantes, de la succession des ajustements mutuels qui conduisent au changement en admettant que les objectifs et les étapes se précisent progressivement à la lumière des expérimentations menées. Notre étude analysera donc l’approche linéaire ou plutôt chaotique du changement en secteur public.

13Par ailleurs, les changements organisationnels émanent de différentes sources (internes et externes à l’organisation) et répondent à des besoins, des objectifs et des pressions qui sont souvent variés. Aussi les facteurs de réussite mobilisés dans les recherches sont multidimensionnels et nécessitent une synthèse. En reprenant les résultats de recherche sur les facteurs clefs de succès des changements menés en secteur public il est possible de faire apparaître deux grands types de facteurs :

  • Les facteurs humains liés au leadership et aux agents du changement : l’implication des responsables en faveur du changement (Damanpour et Schneider, 2008 ; Fernandez et Rayney, 2006), avec le leadership politique pour la légitimation et promotion socio-politique de la démarche (Moynihan et Pandey, 2005) et le leadership administratif centré autour des fonctions d’organisation et encadrement – actions de sensibilisation, d’information, de motivation interne (Walker, 2006) et de sécurisation de ressources (Howell et Shea, 2001). L’implication des différents niveaux organisationnels devient un facteur clé de succès de l’implantation du changement et favorise les expérimentations, qui participent à une culture organisationnelle favorable aux changements. Ces facteurs de réussite font donc référence selon les résultats de Carassus et al. (2012) à un soutien politique, soutien administratif et à l’association des acteurs.
  • Les facteurs méthodologiques et managériaux : la définition d’un plan d’actions et d’objectifs établissant un lien entre les actions à entreprendre et les résultats et effets espérés (De Lancer Julnes, 2008), le délai accordé (un rythme de changement incrémental progressif (Moynihan, 2006) s’avère déterminant pour favoriser les processus d’implantation et de diffusion des changements), l’intégration et la diversité des parties prenantes (Birkinshaw et al., 2008), la participation des agents et la communication sur le changement (Fernandez et Rayney, 2006, pour l’implication). Ces facteurs de réussite font donc référence, selon les résultats de Carassus et al. (2012), à une communication et une formalisation particulière, une structure de pilotage dédiée et à un temps prévu pour d’apprentissage.

14Ces nombreuses recherches portant sur des changements organisationnels dans les organisations publiques permettent d’identifier des facteurs clefs de réussite dont l’importance varie selon l’étape du changement (Pinto et Slevin, 1988 ; Cookes-Davies, 2001). Cependant, les changements introduisent des modifications de grandes ampleurs dans le fonctionnement de l’organisation publique et par là même des défis paradoxaux (Perret et Josserand, 2003) non abordés par les facteurs de succès. Pour gérer les paradoxes organisationnels les auteurs invitent à considérer le paradoxe non pas comme un obstacle mais comme un levier de changement des organisations, ce qui nécessite d’entrer dans une réflexion sur sa mise en œuvre. Nous présentons ainsi le cadre théorique des paradoxes organisationnels avec la modalité du couplage faible comme élément de réponse pertinent dans une organisation publique.

1.2 – L’enjeu du couplage faible comme moyen de gérer les paradoxes

15Le paradoxe organisationnel peut être défini comme « la présence simultanée de deux éléments exclusifs l’un de l’autre » (Quinn et Cameron, 1988), avec la précision apportée par Miller (1990) que le paradoxe n’est pas une tension qui produit un résultat inattendu (dilemme), mais se considère plutôt comme une contradiction durable, voire permanente, entre des éléments qui apparemment s’excluent l’un l’autre mais coexistent malgré tout. Différentes recherches ont alors identifié les paradoxes organisationnels. March (1991) a été parmi le premier à caractériser le paradoxe de l’apprentissage, apparaissant dans les changements et se caractérisant par une tension entre l’apprentissage par exploitation (approfondissement des routines existantes) et l’apprentissage par exploration (création de nouveaux savoirs). Par la suite, relativement au secteur public, Talbot (2003) met en exergue deux paradoxes caractérisant la nouvelle gestion publique. D’une part, l’opposition entre la rationalité du choix public et le jugement personnel de l’agent public ; d’autre part, l’opposition entre la volonté marquée de décentraliser progressivement les responsabilités et d’encourager la participation au niveau local à la centralisation décisionnelle et à l’obligation de rendre des comptes (la logique de contrôle face à l’autonomie affichée).

16Récemment, Smith et Lewis (2011) puis Jarzabkowski et al. (2013) identifient le paradoxe identitaire (qui se nourrit de la tension entre l’individu et le collectif, des conflits de rôles et de valeurs qu’elle engendre), le paradoxe de l’organisant (exprimant les tensions liées à l’accroissement de la complexité organisationnelle, notamment l’articulation entre stabilité et changement, la cohérence organisationnelle et la latitude d’action reconnue à chaque sous unité) et le paradoxe de la performance (associé à la diversité des parties prenantes et de leurs intérêts potentiellement contradictoires entraînant des tensions liées aux représentations divergentes des buts de l’organisation).

17Une synthèse de ces paradoxes organisationnels est proposée dans le tableau n° 1.

Tableau 1

Typologie des paradoxes organisationnels

Tableau 1
Type de paradoxe Organisant Identitaire De performance D’apprentissage Principe du paradoxe Dilemme organisationnel (routines face à nouvelles pratiques ; centralisation face à autonomie) Crispation des dimensions du pilotage sur l’individu ou sur le collectif Clivage des objectifs (représentations divergentes des parties prenantes) Tension liée à la modalité d’apprentissage par exploration ou exploitation

Typologie des paradoxes organisationnels

Source : synthèse de March (1991) ; Smith et Lewis (2011) ; Jarzablowski et al. (2013)

18Or, face à ces paradoxes les organisations vont développer des stratégies défensives dont la typologie classique d’Oliver (1991) présente un continuum. En effet, des travaux portant sur les modes de gestion de ces paradoxes (Poole et Van de Ven, 1989 ; Smith et Lewis, 2011 ; Jarzabkowski et al., 2013) ont suggéré plusieurs modes de gestion des paradoxes, allant du déni au dilemme en passant par le compromis.

19Selon Grimand et al. (2018), la gestion de ces paradoxes peut également être réalisée avec des phénomènes de couplage-découplage. En effet, certaines organisations développent un comportement réel en décalage avec leurs pratiques affichées. Ces dernières sont développées afin de permettre aux organisations d’acquérir ou de conserver une légitimité essentielle à leur survie dans le cadre d’environnements incertains ou parcourus de logiques institutionnelles contradictoires (Sharma et al., 2010 ; Lounsbury, 2008). Mais ces phénomènes de découplage ne se limitent pas à des stratégies d’hypocrisie organisationnelle (Brunsson, 1989) et peuvent masquer des comportements plus subtils (Carruthers, 1995). Ainsi, le découplage peut aussi être le reflet d’un comportement hautement rationnel des organisations cherchant alors à résoudre des contradictions exprimées par différentes catégories de parties prenantes dont les points de vue ne s’accordent pas (Brignall et Modell, 2000).

20Suivant les travaux fondateurs d’Orton et Weick (1990) sur la notion de « couplage faible » ou de découplage (caractérisé par un système simultanément ouvert et fermé, rationnel et indéterminé, par la non recherche de cohérence entre les sous-systèmes, les éléments sont distincts et en interaction), il apparaît que des systèmes faiblement couplés peuvent être un moyen d’associer les acteurs et de réduire les conflits.

21Par ailleurs, en s’appuyant sur une synthèse de 300 articles, Orton et Weick indiquent que les effets directs du couplage faible peuvent être la modularité (réduction des interdépendances jugées non nécessaires), la variété (plus les éléments sont peu couplés plus la transmission de l’information s’améliore), l’effet tampon (processus par lequel les perturbations d’une partie d’un système faiblement couplé (une direction dans la collectivité, une structure annexe dans le périmètre du changement) sont contenues, évitant d’affecter l’ensemble du système).

22À l’instar de Grimand et al. (2018, p. 7) supposant que l’inscription d’un outil de gestion dans un système faiblement couplé (loosely coupled system) est mieux à même de réguler les paradoxes, nous supposons que les changements organisationnels menés dans le cadre d’une méthodologie faiblement couplée peuvent plus aisément réguler les paradoxes que cristallise le changement dans les organisations publiques.

23Ainsi, le recours à un couplage faible ou un découplage temporaire durant le changement organisationnel peut constituer un critère de réussite, en permettant de gérer des paradoxes associés au changement et donc d’en faciliter la mise en œuvre.

24Cette modalité de facteur de réussite n’ayant pas fait l’objet d’étude particulière, nous souhaitons interroger l’intérêt de recourir à un couplage faible ou à un découplage temporaire pour favoriser la réussite d’un changement organisationnel dans une collectivité, en utilisant le cas des mutualisations de services comme changement d’ampleur.

1.3 – Les mutualisations de services, un changement complexe générateur de paradoxes

25Les cas de mutualisation de services entre collectivités locales ne sont pas récents. Scannel et Bannister (2012) font remonter une pratique pionnière de mutualisation en Irlande en 1973, quand vingt-neuf conseils de comtés et cinq conseils municipaux créent un conseil de mutualisation des services informatiques.

26Cette organisation a alors pour mission d’être prestataire informatique, plus particulièrement dans le développement de logiciels pour l’ensemble des collectivités territoriales d’Irlande. Les équipements informatiques sont également les premiers à être mutualisés aux États-Unis, les travaux de Price (1977) citant l’action d’une agence de mutualisation pilotée par la ville de Valdosta dans l’État de Géorgie, au bénéfice des communes avoisinantes.

27Stackler (1983) indique ensuite le cas de sept comtés dans l’État du Missouri ayant eu recours à des appels d’offres groupés pour l’achat de matériaux et permettant une économie de 45 000 $.

28Ces exemples s’insèrent dans le courant libéral des politiques économiques du début des années quatre-vingt aux États-Unis (« Reaganisme ») et au Royaume-Uni (« Thatchérisme ») servant de socle au développement de la première version du New Public Management. Plus récemment, on peut observer dans la quasi-totalité des pays de l’OCDE un discours largement laudateur au travers d’études menées en Australie « où les mesures de mutualisation des services sont promises à un grand succès selon tous les rapports menés » (Dollery et Akimov, 2007, p. 3), en Angleterre, en France (rapport Lebranchu-Baroin, 2015) aux États-Unis, au Canada (Honadle, 1984 ; Ruggini, 2006), en Nouvelle-Zélande (McKinlay Douglas Limited, 2006) et en Allemagne (Dollery et Robotti, 2008). Les économies d’échelle constituent le principal argument. Par exemple les comtés anglais du Northamptonshire et de Cambridgeshire ont économisé sept millions de livres dans l’acquisition commune de progiciels de gestion intégrés et ont pu réduire les coûts de fonctionnement induits sur les services de 26 % (Local Government Group, 2011). Dollery et Byrnes (2005) confirment cet argument en ajoutant que les économies peuvent être redéployées pour améliorer la qualité des services.

29Ces arguments sont repris en France : le rapport Lambert et al. (2010, p. 53) définit la mutualisation comme « un impératif catégorique » tandis que le guide pratique de la loi de Réforme des Collectivités Territoriales du 16 décembre 2010 (RCT) la considère comme « une étape majeure dans la construction de la France décentralisée de demain » (Richert, 2010, p. 3). De plus cette loi constitue le cadre législatif de référence de la mutualisation dans la mesure où ses articles 65 et 66 ont « pour objet de renforcer les procédures de mutualisation des services au sein du bloc local entre communes et communautés, et de les sécuriser au regard des règles de droit communautaire relatives au droit de la concurrence, dans un objectif de rationalisation des coûts en termes d’agents publics et donc d’économie d’échelle » (Jebeili, 2011, p. 59).

30Les raisons d’un tel discours sur la mutualisation sont quadruples. Les deux premières raisons sont la non-compensation intégrale des dotations de l’État aux collectivités territoriales (pour financer le transfert de compétences depuis les lois de décentralisation) et l’accroissement des charges de personnel. Les deux dernières concernent, quant à elles, la baisse des recettes fiscales (par la conjoncture économique et l’existence d’un plafond d’imposition standard à ne pas dépasser par les élus afin de ménager leur base électorale) et la demande croissante de services locaux de qualité. Néanmoins, en parallèle de ces travaux récents, vont émerger des analyses remettant partiellement en cause l’intérêt des mutualisations.

31Pour Dollery et Akimov (2007, p. 7), concernant le processus de mutualisation, « le trait frappant de la littérature internationale est le manque d’études empiriques dans la littérature de recherche ». Ils notent que les travaux menés montrent très peu de démarches mesurant les résultats, illustrent une possible utilisation politique pouvant amener une déconnexion entre la pratique et le discours, et paradoxalement des coûts supplémentaires à court terme.

32Le discours promouvant la mutualisation se heurte à la faible présence d’indicateurs chiffrés des impacts économiques, que constate Dollery (2007) dans ses travaux à l’échelle australienne. Il précise que très peu d’études apportent des « preuves incontestables » que les mutualisations génèrent des avantages et que les effets indirects sur l›organisation et les acteurs ne sont pas abordés en management.

33Lawson (2007), étudiant un panel de trente-quatre conseils municipaux dans le sud de l’Australie, conclut lui aussi qu’en dépit de fortes attentes en termes d’économies, peu de localités ont pu chiffrer ces dernières. Cette difficulté à faire ressortir des données quantitatives concerne également les cabinets de conseil. Ainsi le rapport de 2005 de PriceWaterhouseCoopers présente une intervention auprès d’une organisation de bienfaisance anglaise ayant créé un centre mutualisant une offre de prestations à deux collectivités rurales, que le cabinet qualifie de succès sans pouvoir décrire la méthodologie. Seul est mentionné comme résultat, le fait « d’atteindre le dernier quartile de la performance, tout en obtenant des économies significatives ».

34La seconde difficulté est politique mais nourrie par des considérations budgétaires. Les maires et élus des petites communes sont souvent réticents à supporter des charges qu’ils jugent inéquitables, en cas de prestations dont ils ne bénéficient pas à la même hauteur que les communes avoisinantes (Dollery et Johnson, 2007 ; Lambert et al., 2010). Cette situation est vécue comme une perte de pouvoir sur des compétences significatives avec par exemple le transfert de la voirie à la communauté urbaine. Ainsi pour Dollery (2007), la mutualisation, du fait de sa mobilisation significative de ressources (matérielles, humaines, financières, temporelles et organisationnelles) nécessite au préalable un audit approfondi avant toute conclusion de conventions. Cette recommandation va dans le sens du rapport Lambert et al. (2010) précisant, sans remettre en cause l’intérêt global de la mutualisation, que cette dernière engendre des charges supplémentaires sur le court terme, dues à une réindexation à la hausse des régimes indemnitaires.

35Ces résultats montrent des freins (notamment financiers) mais aussi des paradoxes organisationnels associés aux démarches de mutualisation. La présentation des quatre paradoxes organisationnels (identitaire, d’organisation, de performance et d’apprentissage) suggère que tous sont présents dans le cadre des mutualisations. Aussi, pour réussir un changement d’ampleur tel qu’une mutualisation de services, confrontés à des freins et paradoxes, il apparaît important de gérer les paradoxes organisationnels, dont le couplage faible des sous-systèmes de l’organisation est une modalité de réponse (Grimand et al., 2018). Nous mobilisons un cas spécifique de mutualisation de services pour illustrer les facteurs de réussite utilisés pour gérer ces paradoxes.

2 – La méthodologie qualitative retenue

36Pour répondre à notre question de recherche, une méthodologie fondée sur l’analyse d’un cas a été mobilisée. Cette section explicite en premier lieu l’intérêt du cas retenu et en second lieu les modalités de collecte et de traitement des données recueillies.

2.1 – Choix de l’étude de cas

37Cette recherche s’appuie sur un cas pratique, un tel choix se révélant tout particulièrement adapté à l’analyse d’évènements actuels et complexes. En effet cet outil méthodologique sert une vision idiographique, processuelle et contextuelle en appréhendant le terrain comme un construit social, et non comme une simple description (Ahrens et Chapman, 2006). En outre « l’étude de cas constitue une stratégie de recherche empirique adaptée à des questionnements sur les interactions plus ou moins implicites liées à un phénomène » (Wacheux, 1996, p. 89).

38Le cas étudié porte sur une mutualisation entre une Ville-Centre, un EPCI à fiscalité propre (communauté urbaine, antérieurement communauté d’agglomération) et un Centre Communal d’Action Sociale (Établissement Public Administratif) sur la période 2008-2017. L’EPCI analysé comprend 34 communes, rassemblant près de 275 000 habitants autour de la Ville-Centre, cette dernière atteignant presque 155 000 habitants.

39La mutualisation s’est faite de manière verticale entre les communes et l’EPCI, majoritairement par des mises à disposition de services et des mises en commun de moyens. Parallèlement, plusieurs ententes ont été créées entre la Ville-Centre et des communes de l’EPCI. Ainsi, trois modes de mutualisation sont à l’œuvre : la mise à disposition de services et d’équipements par des conventions, la création de services mutualisés spécifiques intervenant pour tous les participants et enfin, le transfert par une ou quelques communes de compétences vers l’EPCI, ce dernier les mettant ensuite à disposition de l’ensemble des communes membres.

40Ce cas permet donc de présenter une mutualisation, ce qui est rarement étudié, avec une bonne qualité de données : la ville centre a réalisé des analyses d’impacts et nous a permis d’étudier l’ensemble de la démarche, permettant une analyse fine du processus et l’accès aux différents acteurs.

2.2 – Collecte et traitement des données

41Les données mobilisées dans cette recherche comprennent des sources primaires et secondaires. Outre des documents internes et externes à la collectivité (tableau 2), la collecte des données comprend des entretiens semi-directifs, notre souhait étant de dépasser la connaissance stricte des faits au profit du sens que les acteurs portaient à ces derniers dans le cadre de la démarche de mutualisation (Demers, 2003). En outre nous avons voulu avoir une compréhension fine du process en interviewant les acteurs principaux (le comité de pilotage et le directeur général des finances de la ville puis du bloc mutualisé) comme les acteurs secondaires (agent mutualisé, administratrice auprès de la direction générale unique, ayant notamment comme mission la gestion du bilan qualitatif de la mutualisation).

Tableau 2

Données recueillies et acteurs de l’étude de cas

Types de donnéesDescription
Entretiens semi-structurés et acteurs du comité de pilotage de la mutualisationEntretiens enregistrés et retranscrits (environ 14 heures d’entretiens formels)
  • Député (2007-2017), maire (2008-), vice-président à la communauté d’agglomération (2007-2014)
  • Directeur du Conseil de Gestion Mutualisé (DCGM) Ville-Centre, Communauté Urbaine et Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) (2006-)
  • Directrice Générale Adjointe Ville-Centre, membre du comité de
    pilotage à la mutualisation (DGAM) (2008-2013) - Administratrice, chargée de mission auprès du DGSM – Directeur Général des Services Mutualisés – (bilan qualitatif de la mutualisation, mené en fin de process…) (2013-2017) (AGM)
  • Directeur du pôle Finances - Évaluation - Appui aux Politiques-Publiques (DFEVAP) (2014-)
  • Directeur des finances Communauté d’agglomération (2008-2011)
  • Directeur des finances mutualisé, Ville-Centre et Communauté d’Agglomération (2011-2014)
  • Agent au service financier au pôle FEVAP (AFEVAP)
Archives courantes (documentation opérationnelle des services)Programme fonctionnel de paramétrage (nouveau PGI…), supports d’animation (Powerpoint, Prezi) des comités et des réunions de dialogue de gestion, cahier des charges du PGI comptable
Archives courantes et intermédiaires (documentation non opérationnelle des services)Journaux du personnel (mutualisés : Ville-Centre et EPCI)
Rapports d’activité de la Direction du Conseil de Gestion Mutualisée (2011-2015)
Organigrammes : Ville-Centre, Centre Communal d’Action Sociale, Communauté d’Agglomération devenue Communauté Urbaine (2002-2014)
Journaux publics : « Métropole, le journal d’EPCI[2] devenu « Métropole, le magazine » (février 2005- juin 2017) ; « Vivre à Ville-Centre » (janvier 2003-mai 2017)
Documentation officielleDélibérations du conseil de communauté
Rapports d’auditsChambre Régionale des Comptes des Pays de la Loire (22/10/2014 ; 18/09/2014), audit social de la mutualisation

Données recueillies et acteurs de l’étude de cas

Source : auteurs

42Dans le cadre des entretiens menés, un guide a été élaboré pour recueillir des informations sur différents thèmes liés à la démarche de mutualisation (annexe 1) : les objectifs et leurs évolutions, le processus de mise en œuvre (acteurs, communication, instrumentation…), les résultats et les suites réalisées et prévues, ainsi que les difficultés rencontrées. Le recoupement des données issues des différents acteurs interviewés permet notamment de relever les différentes « sources » de « couplage faible », au sens d’Orton et Weick (1990).

43Le recueil des données s’est fait jusqu’à saturation théorique et ces dernières ont été traitées par une analyse de contenu manuelle, mettant en évidence les différents thèmes issus de la revue de littérature (étude des facteurs de réussite et de blocage, caractéristiques du couplage faible, des compensations apportées au couplage faible…).

3 – Les résultats obtenus

44Suivant les éléments présentés en revue de littérature, nous exposons la chronologie du changement représenté par la mutualisation de services communaux avec l’ampleur du changement (global et local), le sens (à la fois descendant et ascendant) et les étapes (approche technique et non linéaire). Les éléments de contexte montrent les facteurs de réussite et mettent en évidence les paradoxes associés au changement d’ampleur (3.1) et les modalités du couplage faible (3.2).

45La mutualisation de services a fait naître quatre paradoxes (3.1) régulés par un couplage faible (3.2).

3.1 – Quatre paradoxes associés à la mutualisation de services

46Dès le départ, la mutualisation est un projet qui ne va pas de soi : « on pressentait avec le directeur général des services que les élus de l’agglomération n’iraient pas plus loin dans le transfert de compétences » (DGAM). Le 1er MPCC et le DGS décident alors d’anticiper l’obligation légale de mutualisation (loi RCT, 2010), seule démarche selon eux pour maîtriser le futur bloc communal. Avec cette décision, le comité de pilotage crée intentionnellement une contrainte dans sa démarche de pilotage, contrainte se matérialisant par quatre paradoxes (de performance, organisant, d’apprentissage et identitaire). Le paradoxe de la performance se formalise à partir de l’annonce des objectifs ambitieux fixés. Non seulement ces objectifs d’envergure vont créer un cadre global de résistance au projet, mais la nature de ces objectifs et leur difficile conciliation vont renforcer cette réticence. Il est ainsi prévu d’atteindre simultanément des économies d’échelle significatives, une harmonisation des pratiques tout en conservant un haut niveau de qualité des services [3]. Ces objectifs élevés et simultanés font naître des représentations contradictoires de la performance du projet entre élus et managers. Pour les élus, ces objectifs remettent en cause leur stabilité politique. En effet, le transfert accru de compétences des communes au profit de l’EPCI et la perte d’une maîtrise organisationnelle sur ces services est mal perçue par les citoyens en les éloignant des services de proximité. Or cette caractéristique est primordiale dans l’élection/réélection des maires. À cette crainte d’un déficit démocratique, la résistance des élus se renforce en raison d’un financement jugé déséquilibré de leurs communes dans la refacturation des prestations calculées par la Ville-Centre. Par exemple, concernant le dispositif d’entente sur la fourrière, « il y a eu un peu de suspicion, avec les conventions, de perdre ou de gagner » (DGCM).

47Quant aux managers, les objectifs d’envergure sur le plan budgétaire rendent ces derniers résistants à la démarche, craignant une logique résolument financière, d’autant plus que la mutualisation doit s’effectuer à effectif constant. La résistance est d’ailleurs particulièrement vive de la part d’une majorité du personnel contractuel qui représente une partie non négligeable de l’effectif total, inquiet d’une possible suppression de leur poste ou d’une réduction de leur volet horaire.

48Le paradoxe de la mutualisation se double d’un paradoxe organisant et d’apprentissage, l’harmonisation des pratiques, garante de la cohérence organisationnelle étant difficilement conciliable avec les méthodes déjà existantes. Autrement dit, si à travers les pratiques, la mutualisation traduit une opposition irréductible entre des modes de socialisation professionnelle, c’est parce que la démarche pose la question d’un choix entre un mode d’apprentissage par exploration (en créant des nouveaux savoirs et pratiques) ou par exploitation (en approfondissant et poursuivant les routines déjà existantes). En effet la mutualisation handicape l’harmonisation des pratiques en raison de coûts cognitifs et de temps passé importants qui remettent structurellement en cause les objectifs. Ce qui entraîne une surcharge de travail, notamment de l’encadrement supérieur, altérant le pilotage opérationnel des services. Si « cela a été assez mal vécu au début au niveau global » (DFEVAP), c’est parce que les DGA consacrent en effet désormais moins de temps à des activités pourtant essentielles (analyses de risques financiers…) et en abandonnent d’autres (benchmarking pour certaines directions…). En outre, leur temps de restitution est augmenté en raison de l’autorité désormais doublée, occasionnant de l’incertitude aux yeux des agents mutualisés : « Vous aviez ici dans mon service une fois par mois une commission des finances puis un conseil. Vous avez maintenant deux commissions des finances et deux conseils. Nous produisions un budget primitif et un compte administratif, nous produisons maintenant deux budgets primitifs et deux comptes administratifs, ces tâches étant par définition forfaitaires et non réductibles » (DFEVAP). Les chefs de service remettent également en cause cette augmentation de l’activité notamment à travers les tâches journalières d’alimentation de refacturation des prestations. D’ailleurs deux conventions de mutualisation sur les ressources humaines et les systèmes d’information existaient déjà avant 2008 et avaient généré un climat de défiance au niveau opérationnel et fonctionnel.

49Le paradoxe organisant concerne aussi le partage des équipements, les trois organisations se caractérisant par des méthodologies dissemblables et des cultures de gestion différemment affirmées. Cette critique est notamment émise par les cadres intermédiaires de la Ville-Centre vis-à-vis de leurs collègues de l’EPCI, la commune se caractérisant en effet par une forte culture de gestion, à travers l’utilisation de pratiques et d’outils de contrôle de gestion innovants. D’ailleurs, d’après l’audit social commandé à un cabinet de conseil en fin de démarche (2016), « pour près de la moitié des répondants (49 %), la mutualisation a généré de la complexité dans les procédures, dans les circuits de décision » tandis que « l’accompagnement est jugé inadapté » et « la communication est perçue comme manquant de transparence et pas assez anticipatrice », (journal interne synthétisant l’audit, p. 3). L’importance de ces critiques est renforcée par le panel représentatif de l’étude car l’ensemble des agents mutualisés (553) ont été sondés ainsi que 847 agents non mutualisés appartenant ou non à des directions mutualisées. Le taux de réponse de 45 % est d’ailleurs particulièrement significatif pour ce type d’étude.

50Cette incertitude ressentie par les services sur la finalité gestionnaire participe d’un paradoxe identitaire par sa faculté à éloigner l’acteur au projet. L’étude menée par la Direction du Conseil de Gestion sur l’évaluation des impacts budgétaires et la facturation entre les trois organisations va cristalliser cet éloignement.

51L’étude conclue en effet à de faibles économies budgétaires (970 000 € : 640 000 € pour l’EPCI et 330 000 € pour la Ville-Centre), correspondant quasiment à l’effet GVT annuel, soit moins de 1 % du budget des ressources humaines mutualisées. Le caractère limité des gains se mesure aussi par rapport au coût de la démarche, évalué à près de 735 000 €, réparti en quatre natures de dépenses (personnel, formation, équipements et honoraires), cristallisant davantage le découplage entre les faibles résultats globaux, l’importance des ressources mobilisées (temporelles, managériales, politiques et techniques) et les objectifs élevés fixés.

52Ces quatre paradoxes ont pu être régulés par un couplage faible des sous-systèmes organisationnels, rendant progressivement effective la mutualisation.

3.2 – Le couplage faible des sous-systèmes organisationnels : outil de régulation des paradoxes

53Face aux paradoxes précédemment mis en évidence, la stratégie du comité de pilotage est de rechercher progressivement un consensus autour de la démarche par une stratégie de couplage faible. Le comité de pilotage va ainsi s’appuyer à restaurer un leadership administratif et politique (3.2.1.) pour ensuite déployer ses mesures ciblées de régulation des paradoxes, par des couplages faibles des éléments managériaux et méthodologiques (3.2.2), faisant ainsi de la mutualisation un changement organisationnel réussi.

3.2.1 – La nécessaire affirmation d’un leadership administratif et politique

54Les objectifs ambitieux fixés par le comité de pilotage nécessitent en premier lieu, pour ce dernier, d’affirmer son leadership politique et administratif.

55Au niveau politique, garantir une légitimité au comité de pilotage a été possible par un soutien fort des trois maires (MPCC) successifs à la démarche malgré leur appartenance politique différente. Cette implication forte et durable des élus se matérialise par un discours affirmé valorisant les objectifs et la conduite de la mutualisation dans les supports de communication, les procès-verbaux de séances de conseils (municipaux et communautaires), en parallèle d’une présence répétée dans les moments de restitutions. Par exemple, les trois MPCC ont présidé mensuellement une réunion ad hoc avec l’ensemble des DGS des communes de l’EPCI, « pour apprendre à se connaître, pour partager sur des problématiques communes de coopération » (DCGM). Une autre mesure forte a été la mutualisation du cabinet du maire en début de projet, ce qui a fortement contribué à asseoir une légitimité politique, ce type de service n’étant généralement que peu concerné en raison d’un faible impact budgétaire (peu de personnel et coût de fonctionnement faible), organisationnel et serviciel.

56Le leadership politique s’est doublé d’un leadership administratif, grâce à un comité de pilotage restreint, et faisant travailler à chaque fois ensemble le MPCC et les acteurs au plus haut niveau de l’encadrement (cf. tableau 1).

57Le caractère anticipé des actions du comité de pilotage a renforcé ce leadership administratif, avec comme première mutualisation, celle des trois directions générales (Ville-Centre, EPCI et CCAS), en 2008, avant l’obligation légale de mutualisation (loi RCT, 2010). D’ailleurs, selon le DCGM, « la direction générale, c’était indispensable qu’elle y passe, c’était un message fort ». Le comité de pilotage s’est ensuite attaché à des actions de motivation interne, nécessaire au couplage faible, rassurant les acteurs concernant l’harmonisation des pratiques et régulant de fait les paradoxes de l’organisant et de l’apprentissage.

58Le comité de pilotage s’est en effet attaché à utiliser en interne un discours externe valorisant ses pratiques. Par exemple, une première mesure de compensation a concerné la valorisation d’un document institutionnel : le rapport de la Chambre Régionale des Comptes des Pays de la Loire du 18 septembre 2014 (p. 2), établissant qu’« une démarche active de mutualisation des services entreVille-Centreet l’“EPCIa fait l’objet d’un premier bilan positif du comité de pilotage en termes d’efficacité et de développement de l’esprit « communautaire » par le comité de pilotage installé en 2008 ». Cette étude a joué un rôle stimulant primordial dans l’animation de la mutualisation par le comité de pilotage ; « c’était l’argument qui m’a permis de pousser, de tourner la roue » (DCGM). On comprend ainsi mieux pourquoi le bilan qualitatif commandé à un cabinet extérieur en fin de démarche (2016-2018) conclut « à un développement accru de services au bénéfice de l’ensemble des communes membres […] le partage d’une culture commune entre les acteurs des collectivités […] la gestion mieux coordonnée des dossiers communs ainsi qu’une meilleure cohérence des actions menées » (magazine interne synthétisant l’audit, p. 2).

59Le comité de pilotage va également valoriser l’étude que la direction du conseil de gestion mutualisé a menée en cours de processus pour évaluer les impacts budgétaires, ce rapport ayant été primé (Prix Territoria d’Or). Le poids institutionnel de l’organisation professionnelle ayant récompensé ce travail (l’Observatoire National de l’Innovation Publique), le caractère représentatif du pool d’experts (fonctionnaires territoriaux, hauts fonctionnaires du ministère des collectivités territoriales et maires de l’Association des Maires de France) et la préconisation de diffuser l’étude à d’autres collectivités, renforcent l’intensité et l’implication du comité de pilotage dans sa stratégie de valorisation de la mutualisation. Ainsi les élus et les administratifs du bloc communal, en ayant connaissance des gains budgétaires modestes calculés, ont été de moins en moins résistants au changement. D’ailleurs, le rapport du Prix Territoria (p. 2) montre qu’« aucune remise en cause de cette méthode ou des résultats n’a eu lieu lors des échanges avec les élus, notamment ceux relevant des communes de laVille-Centre” » car au final, la majorité des élus réticents, du conseil communautaire ont rapidement approuvé les schémas annuels de mutualisations.

60Ce ralliement politique rapide est confirmé par un rapport d’observations définitives sur la gestion de l’EPCI rédigé en 2014 par la Chambre Régionale des Comptes des Pays de la Loire indiquant qu’« en décembre 2008 [soit 5 mois seulement après le début de la démarche], le conseil d’agglomération a approuvé le principe de la mutualisation considérant comme nécessaire de renforcer la coopération entre les collectivités, d’ajuster l’organisation des services au projet politique, tout en optimisant les moyens ».

61L’affirmation de ce leadership politique et administratif à travers une stratégie proactive du comité de pilotage s’est imposée comme un préalable avant des mesures d’assouplissements dans les choix managériaux et méthodologiques caractérisant le couplage faible.

3.2.2 – Des faibles déconnexions méthodologiques et managériales

62Les objectifs ambitieux (économies financières, amélioration du service rendu, amélioration des conditions de travail) ont été associés à un rythme de changement très progressif. Mais la liberté d’ajustements des modes de suivis et des délais dans les directions, en créant des écarts avec les objectifs, va permettre de réussir les mutualisations de services.

63En effet, la méthodologie adoptée par le comité de pilotage a consisté à accompagner de manière différenciée les acteurs et les directions dans le projet de mutualisation, la logique étant de coupler progressivement les moyens aux résultats escomptés. Il s’agissait dans un premier temps de « passer d’abord par les services » (DGAM) pour ensuite convaincre les élus réticents de l’EPCI… C’est pourquoi les directions n’ont par exemple pas été mutualisées en même temps. En effet, si la direction des finances a été la dernière à être concernée par la mutualisation, c’est parce que cette dernière cristallisait le plus les contraintes et les objectifs budgétaires fixés. Il s’agissait ainsi de réguler les tensions et paradoxes par un rythme temporel spécifique. À l’inverse, la direction du conseil de gestion a été une des premières concernées par la démarche, au côté de la direction générale unique, dans la mesure où le Directeur du Conseil de Gestion était un des acteurs forts du comité de pilotage.

64D’ailleurs, concernant la méthodologie, le DCGM indique « on n’a pas mis les directions la « tête sous l’eau » en disant par exemple : 2 % d’économies à faire ». Cette latitude accordée et le caractère progressif souhaité par le comité de pilotage expliquent ainsi pourquoi la mutualisation s’est étalée au final sur huit ans (de 2008 à 2016), et que « parallèlement à d’autres communes, on est resté dans une démarche assez progressive » (DFEVAP). Plus précisément, « c’était une demande du maire de voir comment ça marche d’abord, et on verra après » (DCGM).

65Des mesures de compensations managériales, concernant la gestion du personnel ont été prises en cours de démarche, à l’instar du caractère facultatif du transfert des agents dans les directions mutualisées. Autrement dit, les acteurs administratifs ont pu, sur la base du volontariat, rester au sein de leurs services ou évoluer dans ceux nouvellement mutualisés : « Les agents sont tellement éclatés sur différents sites que dans un premier temps ce qui a été annoncé par le président c›est de laisser les gens là où ils sont » (DCGM).

66De plus, un budget discrétionnaire a été affecté au processus de mutualisation, alors que ce dernier devait s’effectuer à moyen et effectif constant. Un conseiller de gestion a ainsi été recruté à l’EPCI, « l’idée que j’ai vendue c’est que, certes je suis mutualisé, mais il ne faut pas que l’agglomération se sente perdante dans l’affaire » (DCGM). De plus, un technicien a été recruté pour être mis à disposition des communes de l’EPCI, de même qu’un expert fiscaliste.

67Une autre mesure de compensation phare a été la ré-indexation à la hausse du régime indemnitaire pour les agents des trois collectivités, mesure jugée nécessaire pour le DCGM : « Il y a eu un ajustement par le haut, partout […] globalement quand on parle avec les autres collectivités, c’est pareil, autrement ça ne marcherait pas » (DCGM).

68Ces mesures ont alors permis de rassurer les acteurs administratifs sur la finalité gestionnaire (paradoxe de performance et identitaire) de la démarche, permettant non seulement d’atteindre les objectifs : « en deux- trois ans, semestre après semestre, on a corrigé les process, si bien qu’aujourd’hui c’est un chantier qui est derrière nous » (DFEVAP) mais aussi de les dépasser : « l’idée était de tendre vers l’ensemble des services ressources même si on voit qu’on est arrivé jusqu’aux services techniques » (DCGM).

69En synthèse, le couplage faible entre les outils (formalisation progressive), les pratiques (harmonisation très progressive) et les objectifs (ambitieux pour être rationnel mais des résultats nuancés par les ajustements locaux), à certains moments de la démarche de mutualisation, permet le passage de la décristallisation (pour les agents politiques décideurs et certains agents administratifs réticents) à la recristallisation (l’adhésion générale) du changement.

70Le tableau n° 3 résume l’analyse menée en présentant une typologie des paradoxes observés lors de la mutualisation de services communaux.

Tableau 3

Typologie des paradoxes de la mutualisation de services communaux

Tableau 3
Type de paradoxe Organisant Identitaire De Performance D’apprentissage Principe Cohérence organisationnelle Niveau et sens du pilotage Clivage des objectifs Tension entre exploration et exploitation Manifestation Conflits des méthodes de partage d’équipements et des procédures de fonctionnement interne ; contrôle et autonomie Rôle initial attentiste de la majorité des élus du bloc face à l’engagement fort et continu du comité de pilotage Objectif politique (maintien service public de qualité) face à l’objectif administratif (économies d’échelle) Coûts cognitifs et temps de traitement des nouveaux savoirs face aux gains à venir de la mutualisation Régulation de type couplage faible Mutualisation très progressive des services, formalisation progressive des procédures Délais supplémentaires, Objectifs revus à la baisse, Ré-indexation à la hausse du régime indemnitaire Étude d’impacts (faible gain budgétaire) et diffusion des résultats Transfert progressif des agents dans les services mutualisés, Recrutement de nouveaux agents mutualisés

Typologie des paradoxes de la mutualisation de services communaux

Source : auteurs

4 – Discussion

71L’analyse de la situation du cas met en exergue deux éléments clefs dans la réussite de la conduite du changement organisationnel illustré par la mutualisation, à savoir la créativité des acteurs au gré des opportunités rencontrées et le couplage faible dans les choix managériaux et méthodologiques. Ces éléments s’inscrivent dans les deux familles de FCS identifiés dans la littérature, le premier en référence aux facteurs de leadership et le second aux facteurs méthodologiques, et ils permettent de gérer les paradoxes organisationnels de changements de grande ampleur.

72La revue de littérature avait permis d’identifier des facteurs de réussite et des paradoxes organisationnels. Selon Carassus et al. (2014, p. 5), « la nature des dispositifs et processus qui encadrent et accompagnent une innovation managériale déterminerait sa capacité d’adoption et d’implantation ». Ce commentaire sur des démarches de performance menées dans des collectivités françaises peut expliquer le résultat que nous obtenons sur le rôle clé joué par des systèmes de couplage faible.

73Le couplage faible entre les directions, les objectifs et pratiques, apparaît comme permettant l’acceptation du changement et facilitant son implantation. Le couplage faible semble un facteur de réussite de la mutualisation car, paradoxalement, la complexité de la démarche génère des résultats limités ainsi qu’une réticence d’acteurs politiques. Or, ces effets modestes se capitalisent progressivement et rassurent les différents détracteurs, permettant un consensus sur le sens et la conduite managériale de la mutualisation. En l’espèce, en laissant une créativité aux acteurs locaux et une meilleure transversalité du pilotage (la Direction du Conseil de Gestion Mutualisée a par exemple pu rationaliser les demandes de financement des organisations satellites à la Ville-Centre et à l’EPCI en les croisant) le couplage entre les objectifs et les réalisations s’est progressivement « renforcé » en formalisant des discours propices à la poursuite et à la réussite de la mutualisation.

74Face à des intérêts contradictoires, il est difficile d’avoir une cohérence interne entre les décisions et les discours à court terme et les marges de manœuvre laissées aux directions apparaissent indispensables : les marges de liberté dans la méthodologie du changement planifié ont permis aux directions de s’ajuster et aux acteurs de se préparer. Cette apparente déconnexion répond au pilotage des paradoxes identitaires, d’apprentissage, organisant et de performance.

75En effet, le couplage faible en laissant la possibilité de plusieurs voix de mise en œuvre de la mutualisation favorise la construction du sens de ce changement et un engagement dans l’action. De plus, la relative dé-liaison entre les directions, les pratiques et les objectifs affichés constitue une modalité de réponse aux injonctions de l’environnement et aux intérêts des parties prenantes. Suivant Brunsson (1989) certains paradoxes sont résolus par des actions appropriées et d’autres par des discours appropriés. Il s’agit alors d’organiser la dé-liaison entre discours, actions, et décisions dans la collectivité pour être plus efficaces. Néanmoins, suivant Orton et Weick, il faudrait éviter de tendre vers un réel découplage et rechercher un bon dosage entre couplage faible et couplage fort. Ce degré serait à trouver, selon notre cas, entre la nature du changement, les objectifs et les délais de la collectivité.

Conclusion

76Cette recherche tente de pallier un manque dans la littérature car, à notre connaissance, aucun travail sur les mutualisations ne s’est focalisé sur un bloc communal intégrant une commune, un EPCI et un CCAS. Les résultats complètent donc les recherches menées sur les réorganisations de services dans les organisations publiques locales et sur les facteurs de réussite dans les changements organisationnels.

77Un second apport théorique de notre travail est la mise en exergue d’une remise en cause de l’approche purement contingente du contrôle de gestion dans le secteur public local (Fabre, 2005) car ni la temporalité politique, ni plus précisément l’alternance politique (en l’espèce avec le troisième maire présent en fin de démarche de mutualisation) n’ont constitué de véritables freins au projet gestionnaire de la mutualisation. En outre, chaque MPCC a pris conscience de l’importance politique et économique de ce processus et s’est appuyé largement sur les mesures de son prédécesseur dans une logique de continuité et de capitalisation. Ce positionnement des trois maires peut aussi s’expliquer par leur connaissance des tensions managériales et politiques générées par la mutualisation, et leur ralliement rapide a facilité le pilotage politique du projet.

78Cette recherche illustre la possibilité de mener une mutualisation complète et large (en termes de nombre de directions et de collectivités concernées), à travers une démarche très progressive, mobilisant ainsi le concept de « couplage faible ». L›actualité des mutualisations dans les services communaux, avec les centres de services partagés (Banoun et Rochette, 2017), renforce l’intérêt du couplage faible pour les managers publics comme concept central en changement organisationnel.

79Néanmoins, le couplage faible ne permet pas à lui seul d’expliquer la réussite de la mutualisation. En effet, plusieurs élus de communes de taille modeste ont largement accepté l’ensemble des modalités des conventions de mutualisation, en raison de leur besoin important d’expertise, principalement sur des dossiers de nature technique. Par exemple, il était courant pour des agents techniques de ces collectivités de bénéficier gratuitement, avant la mutualisation, de conseils de leurs collègues de l’EPCI ou de la Ville-Centre, car ces localités ne pouvaient pas supporter le recrutement d’agents titulaires. Ainsi, ces élus ont accepté sans réserve la mutualisation en s’acquittant financièrement de ces prestations, malgré un budget de fonctionnement limité. Cette remarque, qui nuance l’influence du facteur méthodologique de couplage faible, va également dans le sens de la spécificité des observations menées : il est possible que notre cas, avec sa faible contrainte sur les délais du changement, soit peu représentatif de changements dans d’autres organisations publiques. À ce titre, les observations et résultats tirés du cas sont amenés à être complétés par d’autres études s’intéressant aux mutualisations de services.


Annexe 1

Extrait du guide d’entretien utilisé

80Objectifs de l’entretien : analyser les enjeux de la démarche de mutualisation, les effets directs et indirects ainsi que les difficultés rencontrées. Il s’agit d’un entretien semi-directif, les questions ne sont là que pour guider l’entretien. L’interviewé peut développer d’autres aspects non prévus dans notre guide, afin d’être le plus large possible dans notre collecte de données.

1. Mise en œuvre de la démarche de mutualisation
  • Quels sont les acteurs à l’origine de la démarche ?
  • Quand démarre le projet et quelles sont les priorités ?
  • La mutualisation est-elle présentée comme une obligation (loi 2015) ou un choix ? Quels étaient les objectifs poursuivis ?
  • Comment a été obtenu le soutien/relais de la sphère administrative et technique ?
  • Quel profil professionnel avait la personne chargée de la mission d’évaluation de la mutualisation qui a quitté ses fonctions en 2013 ?
  • Quelle a été la progression du périmètre des services concernés par la mutualisation depuis 2008 ?
  • Sur quels types de ratios s’organise la notation financière des organismes satellites ?
  • Intervenez-vous ou un de vos conseillers de gestion comme formateur au CNFPT, ou via d’autres organismes actuellement ?
2. Les effets directs
  • Quelles sont les économies attendues ?
  • Comment ces économies se sont traduites sur le plan opérationnel ?
  • Recherchez-vous à faire plus ou cela vous paraît suffisant ?
  • Quid dans les coûts de fonctionnement : l’acquisition partagée d’équipements ?
  • Quels sont les autres effets directs de la démarche de mutualisation ?
  • Quel pourcentage de renouvellement en moyenne suite aux départs en retraite ? des exemples de contractuels dans des services spécifiques non reconduits ?
  • L’exemple du départ du directeur ville partant en retraite : il venait de quel service ?
  • Quelles harmonisations avez-vous faites au niveau de la bonification indiciaire ?
  • Au niveau des règles d’avancements pour les personnels concernés, les primes de fin d’année et du 13e mois ? du compte épargne temps (cf. décret du 12 juillet 2001) et de manière générale de l’aménagement et de la réduction du temps de travail ?
3. Les effets indirects/organisationnels
  • Pensez-vous avoir obtenu des effets sur la capacité de travail collaboratif ?
  • Les prix de transferts entre services sont-ils un frein à la collaboration ?
  • Y a-t-il eu : gain de temps, procédures de travail unifiées avec la mutualisation d’équipements (acquisition partagée d’équipements, reporting unifié) ?
  • Le passage de la Communauté d’Agglomération en Communauté Urbaine avec le transfert de la compétence voirie a-t-il renforcé le caractère de mise à disposition « descendante » des modalités de la mutualisation ?
  • La capacité organisationnelle (travail collaboratif, temps) a-t-elle été impactée ? Si oui, comment ?
  • La démarche n’a-t-elle pas fait émerger des éléments visibles non attendus au niveau du fonctionnement opérationnel des services ou des comportements d’acteurs divers ?
  • Le changement de gouvernance politique a-t-il modifié votre lettre de mission (nouveaux objectifs éventuels) ? quelle place pour la direction du conseil de gestion vis-à-vis de la direction générale et du maire ?
4. Perception de la démarche de mutualisation
  • Quelles réactions d’un point de vue général la démarche a reçu de la part des élus des communes ?
  • Depuis 2008 et la mutualisation de la direction générale, comment a pu se traduire une éventuelle inquiétude des DGS des communes relatives à une perte de polyvalence de leur métier au profit d’une plus grande spécialisation ? Des actions de formation ont-elles accompagné ce changement ?
  • De manière générale, quelle publicité avez-vous fait de la démarche de mutualisation ?
  • Y a-t-il eu une publicité politique (conseil municipal…) ? publicité académique ? publicité auprès des habitants ? Et de quelles formes ?
5. Difficultés rencontrées
  • Qu’auriez-vous aimé faire ou refaire ? Les suites de la démarche ? (Des points auraient pu être évités, améliorés) ?
  • Y a-t-il d’autres voies de recherches d’économies ? avec nouvelles procédures d’organisation suite aux relectures des politiques publiques ? (travail sur les espaces verts, etc.)
  • Qu’est qui a été plus facile/difficile que prévu ? ce qui a étonné ? ce que vous feriez différemment ?
  • Qu’en est-il de votre nouveau SI intégrant en un même logiciel comptabilité analytique et comptabilité générale (intégration arrivée à terme ? Dysfonctionnements éventuels ? De quelle nature ?)

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Mots-clés éditeurs : changement, couplage faible, services publics, mutualisation, communes

Date de mise en ligne : 26/05/2021

https://doi.org/10.3917/gmp.082.0091

Notes

  • [1]
    Le Code Général des Collectivités Territoriales ne donne pas de définition juridique de la mutualisation.
  • [2]
    Les noms de l’EPCI et de la Ville-Centre ont été rendus anonymes.
  • [3]
    D’après une délibération du conseil de communauté de février 2016 : « le schéma de mutualisation devra concilier regroupement et optimisation des dépenses de fonctionnement tout en conservant la relation de proximité chère aux habitants des communes et des quartiers ».

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