Notes
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Pour une approche plus complète de ces travaux, le lecteur pourra se reporter à (Béjean, Kletz, Moisdon, Sicotte 2016).
Introduction
1Dans le monde hospitalier, les pouvoirs publics sont les plus grands promoteurs des technologies de l’information. Le cas américain est à ce titre exemplaire : du Office of the National Coordinator (ONC) for Health Information Technology, établi en 2004, dont la tâche est depuis de coordonner les efforts fédéraux, aux quelque 27 milliards de dollars alloués en 2009 par le Président Barack Obama lors du Health Information Technology for Economic and Clinical Health (HITECH) Act, les dépenses publiques pour la mise en œuvre et l’utilisation des technologies de l’information en santé sont considérables. Le cas français n’est pas en reste. Depuis 2012, s’inspirant de l’expérience américaine, le Ministère de la Santé a mis en place le programme « Hôpital Numérique ». S’étalant sur cinq ans, les investissements qui en découlent sont également très importants.
2Devant ces dépenses publiques de grande ampleur, reflétant les enjeux véhiculés par ce sujet, la question de l’objectivation de la valeur créée par les technologies de l’information dans les hôpitaux est sensible. Pour les décideurs publics, il s’agit d’évaluer et justifier leurs investissements par la démonstration de gains potentiels et mesurables. Pour la recherche, il s’agit de contribuer à une théorie de l’évaluation des technologies de l’information. Dans le cas du système hospitalier, la théorie dominante identifie la qualité, la sécurité et l’efficience comme les paramètres principaux à mesurer. Mais cette approche dominante de la valeur des technologies de l’information à l’hôpital tend à être de plus en plus critiquée en pratique, comme en théorie.
3En pratique, si les estimations de « gains potentiels » ont parfois rejoint les espérances des décideurs publics (Hillestad et al. 2005), la plupart des travaux constate un important hiatus entre la valeur escomptée et la réalité des gains dégagés (Black et al. 2011), notamment en raison d’un faible niveau d’adoption des technologies sur le terrain (Koppel 2012). Face à ce constat, la recherche mentionne un ensemble de « facteurs organisationnels » parmi les éléments explicatifs de ces échecs répétés (Black et al. 2011). D’autres travaux se focalisent ainsi sur l’usage des technologies de l’information en situation, ouvrant à une variété d’analyses organisationnelles, par exemple : la structuration des connaissances, la disparition des savoirs portés par l’oral, la rigidité du système d’information, confronté au caractère coopératif du travail soignant, ou les difficultés posées par la coordination entre ces différents acteurs (Fitzpatrick et al., 2012).
4L’objectif de ce papier est de contribuer à ces recherches organisationnelles sur la valeur des technologies de l’information à l’hôpital en analysant le cas français du Dossier Patient Informatisé (DPI). Pour ce faire, l’article présente les résultats d’une recherche multi-sites sur le DPI, sollicitée en 2012 par le Ministère de la santé et l’ANAP (Agence Nationale d’Appui à la Performance). S’appuyant sur une théorie des outils de gestion prenant le couplage « outil-organisation » comme objet de recherche (Hatchuel 1992, Moisdon 1997), il étudie les interactions, plutôt que les « impacts », entre le DPI et l’organisation hospitalière existante, en particulier celle des unités cliniques. Utilisant la catégorisation « conformation-exploration » des usages des outils de gestion conceptualisée par Moisdon (1997), cet article contribue à l’analyse de la transformation organisationnelle induite par le DPI en France en déterminant si les usages du DPI se limitent encore à une logique de conformation ou s’ils s’ouvrent à de nouveaux apprentissages collectifs.
5L’article est organisé comme suit : après avoir précisé le fondement conceptuel de notre approche, nous présenterons nos questions de recherche et exposerons la méthodologie suivie pour les explorer. Nous dégagerons alors les principaux résultats de la recherche et conclurons en nous interrogeant sur la nature des évolutions constatées. Ceci nous permettra de discuter, à partir du cas du DPI, de la notion de « valeur organisationnelle ».
1 – Fondement conceptuel de la recherche
1.1 – Informatique hospitalière et dossier du patient
6En France, l’informatisation des données médicales hospitalières n’est pas nouvelle. L’instauration du PMSI (Projet de Médicalisation des Systèmes d’Information) en 1982 est souvent donnée comme l’événement fondateur de son déploiement officiel (Lenay et Moisdon 2003). Inspiré des DRG américains (Diagnosis Related Group), le PMSI visait alors une analyse médicalisée des budgets hospitaliers français. Pensé comme un outil médico-économique, il cherchait à établir un lien entre les caractéristiques médicales d’un « Groupe Homogène de Malades » (GHM) et le coût de sa prise en charge. À cette époque, les tutelles mettaient déjà en avant l’intérêt d’une collecte d’information médicalisée organisée autour du patient. La circulaire 275 du 6 janvier 1989 du Ministère de la Santé français, fournissant une définition officielle du système d’information d’un établissement de santé, statuait ainsi : « Gérer l’information médicale c’est […] contribuer à la cohérence globale des fonctions du système d’information hospitalier à tous les stades de la prise en charge du patient par les unités de soins et les unités médicotechniques : ces fonctions s’articulent autour de trois pôles prioritaires : le dossier du patient, la planification des soins, la communication interne et externe à l’établissement. » (p. 6) Depuis, c’est cette orientation « centrée patient » qui a structuré l’ensemble des mesures concernant l’informatisation des données médicales hospitalières, même si les choses ont pris plus de temps que prévu.
7Ainsi, alors que le PMSI met une vingtaine d’années à se déployer, à coups d’expérimentations successives, pour être utilisé nationalement à partir de 2004 lors de la mise en œuvre de la T2A (Tarification à l’activité), il faut attendre encore une dizaine d’années pour que le DPI connaisse, lui, un véritable plan de déploiement national. Son ambition, en effet, va bien au-delà de la liste limitée d’informations codifiées contenues dans le PMSI : situation clinique du patient, résultats d’examens, prescriptions, résumé des séjours précédents, chaînage des processus de soins etc. Rappelons que le DPI est censé éviter les inconvénients bien connus d’un dossier patient manuscrit parfois illisible, et que l’on recherche de bureau en bureau ; il permet de transmettre ou de recevoir en un clic les données médicales d’un patient, parfois anciennes ; il facilite, en outre, par copier/coller la constitution du compte rendu de sortie. En bref, il s’agit d’un outil qui se présente davantage comme une aide à la pratique que comme l’ajout d’une contrainte éloignée des valeurs professionnelles, telle la contrainte économique, sous ses diverses traductions.
8On conçoit ainsi, compte tenu des spécificités de l’activité de soin hospitalière, qu’un tel projet n’a rien d’évident. Ce n’est d’ailleurs qu’en 2012, sous l’impulsion du programme « Hôpital Numérique », que les tutelles décident de lui donner, à nouveau, officiellement une place centrale dans les processus de soin. L’esprit de la circulaire de 1989 est conservé : l’information médicale doit contribuer à l’amélioration de la qualité, de la sécurité et de l’efficience de la prise en charge en se centrant sur les données du patient. En apportant à tout moment et à tout professionnel hospitalier habilité un ensemble d’informations riche et structuré sur le patient, le DPI offre de fortes promesses. Par sa traçabilité, sa lisibilité et la cohérence des informations, il est présenté comme un outil pouvant permettre la réduction des examens redondants, des décisions plus rapides, ou encore une meilleure coordination entre professionnels.
9En résumé, si on limite la notion de valeur organisationnelle du DPI aux aspects de facilitation des tâches quotidiennes ou, encore, de respect des processus de travail qu’il institue, qui ne font que reproduire les processus officiels, tels celui de la prescription médicamenteuse, sa valeur organisationnelle semble d’emblée acquise. Mais de même que le PMSI, autant que la T2A, est aujourd’hui accusé de nombreuses limites (Moisdon 2017), le tout « jeune » DPI est déjà l’objet de tous les regards, notamment critiques. L’hypothèse de création de valeur organisationnelle mérite à ce titre d’être discutée, d’autant que les expériences étrangères montrent de nombreuses difficultés organisationnelles à son déploiement.
1.2 – Facteurs organisationnels et difficultés du déploiement du DPI
10La littérature internationale portant sur les rapports entre informatisation des données du patient et production hospitalière ne manque pas. En revanche, elle est dominée par des contributions de type quantitatif visant à évaluer, par des techniques essentiellement économétriques, le triptyque qualité, sécurité, efficience. Les travaux en théorie des organisations portant spécifiquement sur le DPI, mobilisant des démarches plus qualitatives, sont beaucoup moins fréquents. Il ne s’agit pas ici d’en faire une recension exhaustive [1], mais d’en analyser la portée pour la compréhension des transformations organisationnelles induites par le DPI, et notamment en termes de « création de valeur organisationnelle ».
11La grande majorité de ces travaux s’appuient sur des recherches empiriques approfondies, souvent via des analyses ethnographiques minutieuses. S’appuyant sur divers courants théoriques, comme l’approche sociotechnique, l’acteur-réseau ou la théorie de la structuration (Greenhalgh et al. 2009), ces travaux décrivent les problèmes organisationnels rencontrés lors de l’implantation du DPI et suggèrent des comparaisons internationales. Par exemple, ils montrent comment la codification, telle qu’elle est incluse dans l’outil, est distante des démarches de pensée des médecins (Sicotte 1998, Creswell 2012) ou des pratiques de construction collective du diagnostic (Reddy 2001, Hartswood 2003). Dans ces derniers cas, l’implantation du DPI ne conduit pas à des apprentissages, certains auteurs notant même des phénomènes de désapprentissage, les jeunes médecins accordant trop de crédit aux logiciels d’aide à la prescription souvent présents dans les outils tels que le DPI (Campbell 2006). Les modalités informelles et spontanées de coordination entre acteurs concourant à la prise en charge d’un patient seraient mises à mal par la logique formelle et linéaire contenue dans un DPI (Aarts 2007, Campbell 2006). De même, l’usage d’un DPI ferait perdre du temps aux médecins, même s’il en fait gagner aux infirmières, notamment dans la demande et le suivi des examens (Poissant 2005). De façon symétrique, plusieurs recherches mettent en évidence la diminution du temps passé avec le patient et la dégradation de la qualité de la relation (Vikkelso 2005, Noteboom 2012). Enfin, plusieurs auteurs reviennent sur le « zéro papier » promu par les DPI, en en montrant l’impossibilité, voire la nuisance (Bruni 2005, Chen 2010, Saleem et al. 2009, Hardstone et al. 2004).
12Ces analyses aident ainsi à mieux comprendre les transformations de l’organisation hospitalière induites par le DPI, en particulier leurs difficultés. Cependant, explorant souvent un site unique ou une seule problématique organisationnelle (ex. : le temps passé auprès du patient), ces travaux ne permettent pas d’analyser suffisamment l’articulation de différentes dimensions organisationnelles, ce qui est pourtant essentiel pour aborder les questions de transformation organisationnelle au-delà des analyses « micro-pratiques locales » (Besson et Rowe 2011, 2012 ; Habib et al. 2017). En réalité, malgré ses apports, la littérature existante semble porteuse d’une vision opposant outil et organisation. Ce faisant, elle analyse des décalages entre la représentation de l’organisation, inscrite dans (et prescrite par) l’outil, avec celle de l’organisation « réelle », c’està-dire telle qu’elle peut être décrite par une analyse des pratiques concrètes, notamment de division du travail, de coordination et d’évaluation de ses résultats. C’est peut-être à ce titre que la grande majorité des auteurs raisonnent en termes d’ « impact », comme si l’outil se comportait de façon balistique, venant perturber une collectivité de travail, ses pratiques et ses routines. Du coup, la relation entre outil et organisation devient une sorte de face-à-face hostile, avec des dégâts de part et d’autre. Il manque donc encore des travaux envisageant les situations où apparaissent des formes organisationnelles inédites à l’occasion de l’introduction d’un nouvel outil de gestion. Ces transformations ne se traduisent pas tout de suite par de la création de valeur au sens habituel des outcomes, mais représentent une capacité d’action supplémentaire, qui ne se donne jamais spontanément au regard extérieur et qu’il faut alors révéler par des modes d’investigation spécifiques.
1.3 – DPI et transformation organisationnelle : une approche par les outils de gestion
13Comme évoqué précédemment, cette recherche entend explorer la notion de « valeur organisationnelle » en développant une conceptualisation particulière de la transformation des organisations, grâce à l’analyse de l’interaction entre outil et organisation. Le cadre théorique mobilisé renvoie à l’approche par les « outils de gestion » développée au Centre de Gestion Scientifique de Mines ParisTech (Moisdon 1997) et s’inscrit dans un champ de recherche très actif aujourd’hui en gestion, comme dans d’autres disciplines (Aggeri et Labatut, 2010). En particulier, l’approche par les outils de gestion est actuellement beaucoup utilisée dans le domaine de la gestion et du management public, notamment pour aborder les problématiques d’évaluation, d’appropriation et de transformation des organisations publiques (Gillet et Gillet, 2013 Mériade et Mainetti 2013, Martineau 2014, Pupion et Chappoz, 2015).
14Dans le cadre que nous utilisons ici un système d’information est défini comme une « technologie gestionnaire » au sens de Moisdon (2005) : « une technologie de gestion est prescriptive : elle donne à voir et conforme une conduite ; elle la discipline, elle crée même l’acteur lui-même, lui assignant une place, définissant pour lui un système de valeurs par une spécification de performances, lui indiquant comment il doit se coordonner avec les autres » (Moisdon, 2005, p. 165). Ainsi appréhendée, l‘analyse par les outils de gestion se focalise non plus sur l’idée d’une opposition frontale entre outil et organisation, mais sur le processus d’« individuation » de la technologie gestionnaire, couplée à l’émergence de son « site organisationnel », qui peut être perçu comme son « milieu associé » au sens de Simondon (1964). La théorie nous dit que ce processus est fragile et que son devenir est largement indéterminé. Le système d’acteurs en jeu peut produire de nombreuses révisions au cours du temps, voire aboutir à son rejet. Dans le meilleur des cas, ces processus d’objectivation et de révision multiples, au sein desquels le chercheur-intervenant peut avoir une place centrale (Moisdon 1984) moyennant une « pratique immersive » (Béjean et Moisdon 2017), se succèdent jusqu’à ce que la technologie reformatée trouve son site organisationnel. Cette fin idéale n’est pas donnée au début du processus, mais sera éventuellement coproduite lors du processus d’individuation de la technologie gestionnaire concernée.
1.4 – Le DPI : outil de conformation ou d’exploration du nouveau ?
15Dans le contexte théorique que nous venons de définir, la « valeur organisationnelle » d’une technologie gestionnaire comme celle du DPI se mesure donc par l’accroissement du pouvoir d’agir des acteurs, que le processus d’individuation permet ou non. Nos questions de recherche ne portent ainsi pas sur la mesure d’une variation, même positive, du triptyque sécurité, qualité, efficience sur des routines de travail connues, mais sur une mesure de l’accroissement de ce pouvoir d’agir, sur la production éventuelle de nouvelles routines, pour le moment inconnu. À ce titre, Moisdon (1997) distingue deux types d’usage d’un outil de gestion, l’un n’affectant qu’à la marge le pouvoir d’agir d’un acteur individuel ou collectif, l’autre régénérant ses capacités à partir d’une exploration du nouveau.
16Le premier usage renvoie à celui d’un « outil de conformation », il ne modifie pas substantiellement les routines existantes. Dans le cas du DPI cela consisterait à constater une résilience du système organisationnel antérieur : imposé par les tutelles le DPI serait utilisé, facilitant et normalisant les processus de travail, mais sans chercher à transformer l’organisation hospitalière existante. Le second usage renvoie à celui d’un « outil d’exploration », cette fois-ci l’outil devient générateur d’apprentissage collectif en permettant l’exploration de nouvelles possibilités. Dans le cas du DPI cela signifierait l’observation d’une appropriation féconde de cet outil par les professionnels de santé et leurs organisations, allant éventuellement jusqu’à inventer de nouvelles possibilités, par exemple de nouvelles pratiques de formation ou de recherche, de nouveaux indicateurs d’évaluation ou de pilotage de l’activité clinique, ou encore de nouvelles modalités de dialogue avec les patients. C’est ce type d’observations que notre recherche a visé à conduire à partir d’une enquête de terrain.
17Les acteurs hospitaliers ont-ils su profiter ou non du DPI pour imaginer et inventer de nouveaux dispositifs organisationnels ? Le DPI a-t-il perturbé ou reconfiguré leurs routines et pratiques instituées en générant des apprentissages collectifs ? Observe-t-on un usage de conformation ou d’exploration du DPI dans les organisations hospitalières ? La section suivante détaille le contexte et la méthode pour explorer ces questions de recherche.
2 – Contexte et méthode de la recherche
18Cette section fournit des éléments de définition et de contexte de notre recherche. Elle précise également la méthodologie retenue pour la conduire en détaillant les différentes phases et sites de collecte des données, ainsi que la méthode retenue pour les analyser.
2.1 – Définitions
19Lorsqu’on évoque le DPI, d’aucuns pensent spontanément à l’outil informatique obtenu par la dématérialisation du dossier médical. Il s’agit alors des données administratives (âge, sexe etc.) et médicales du patient (diagnostic, antécédents, observations tout au long du séjour, prescriptions, résultats d’examen…), incorporant éventuellement des données relatives à des passages du patient dans d’autres unités médicales (comptes rendus d’hospitalisation par exemple, qui peuvent être transmis par informatique si les unités en question disposent de ce même logiciel ou d’un logiciel compatible). Cependant, l’usage du dossier médical pris dans ce sens restrictif ne peut être indépendant de celui d’autres systèmes du même type concernant la prise en charge du patient par l’unité clinique : logiciels de prescription des produits et des actes, retour informatisé des résultats d’examen, dossier de soins (planification et enregistrement des actes infirmiers), éventuellement dossier anesthésiste, etc. Le DPI doit être vu comme renvoyant à l’ensemble des outils informatiques inter-reliés que le personnel d’une unité clinique est amené soit à alimenter, soit à consulter pour un patient particulier, et dont il doit suivre les préceptes en termes de processus de travail. Évidemment pour un site donné, ce système peut ne pas être complet, ni intégré en un seul logiciel. D’un point de vue organisationnel, ce qui est pertinent est bien la prise en charge par l’informatisation des différentes actions accomplies autour d’un patient et de leurs interdépendances. Cette définition du DPI est donc plus large que beaucoup d’acceptions.
20Quant à l’organisation, dont on sait qu’il existe des représentations multiples, nous avons choisi volontairement, là aussi, une acception large, reposant sur une définition par extension : tous les ingrédients de l’activité pouvant avoir une influence sur les performances multidimensionnelles d’une unité clinique (qualité des soins, sécurité des patients, coûts et productivité, conditions de travail, etc.). Cette position amène aussi bien à examiner les compétences individuelles et collectives, la division du travail, les mécanismes formels ou et informels de coordination, le système d’évaluation des performances, les relations de travail, aucune liste a priori n’étant considérée comme exhaustive, l’analyse bibliographique et les premiers entretiens étant justement destinés à repérer dans les contributions portant sur le thème les paramètres les plus caractéristiques de l’interaction étudiée entre le DPI et l’organisation.
21La recherche a ainsi visé à analyser les changements organisationnels qui s’opèrent lors de la mise en place des outils du type DPI. Comme synthétisé et illustré par le Tableau 1, ces changements pouvaient être de différentes natures, qu’il s’agisse des modes de coordination instrumentés ou non (plannings ou routines), des pratiques des acteurs et de leurs capacités cognitives (le métier), des modulations dans les délégations de tâches, des conditions de travail, des relations entre acteurs, dont les relations hiérarchiques, de la plus ou moins grande adoption de normes extérieures, des modes d’évaluation de la performance, de la relation au patient, etc.
Cadre d’analyse pour la collecte de données
TYPE D’USAGE DE L’OUTIL DE GESTION | ||
---|---|---|
DIMENSIONS D’OBSERVATION (exemples d’effets induits potentiels) | CONFORMATION | EXPLORATION |
Savoirs métier | Intégration de l’information fournie par le DPI dans les routines métiers existantes, structuration de l’information existante sur le patient | Création, suppression, évolution des tâches métiers, nouveaux protocoles, nouvelles relations au patient, nouveau type d’information formalisée |
Modes de division du travail et de coordination | Clarification des rôles existants, renforcement de la structure de rôle existante (prescrite), formalisation et amélioration des règles informelles de transmission et partage de l’information selon les modalités existantes (transmission, staffs…) | Modification de la structure des rôles dans l’établissement pour la mise en œuvre d’un diagnostic, d’un plan de traitement ; transfert de tâches, nouvelles organisations du travail dans les unités cliniques, réduction des supports existants (communication orale, papier, téléphone, fax…) |
Modes d’évaluation de la performance | Meilleur contrôle des unités clinique selon les critères existants | Meilleur contrôle des unités clinique selon de nouveaux indicateurs de pilotage |
Modes d’apprentissage | L’amélioration des pratiques existantes, soutenue par le DPI | Le DPI comme nouveau moyen d’apprendre et d’enseigner (recherche clinique, structuration des données…) |
Cadre d’analyse pour la collecte de données
2.2 – Contexte
22La recherche a essentiellement reposé sur une démarche qualitative, à travers des observations dans une vingtaine d’établissements, une série d’entretiens et un questionnaire administré auprès de professionnels hospitaliers (médecins, soignants, cadres, secrétaires médicales). Les établissements de l’échantillon ont été choisis à partir de plusieurs critères : existence d’un système d’information mature en place et en fonctionnement quotidien, conseil provenant d’un établissement déjà visité, orientation par une fédération d’établissements, etc. Au total, ce sont 23 structures (15 établissements publics, 3 ESPIC, 1 CLCC, 4 cliniques privées) qui ont été impliquées dans la recherche ; 140 personnes ont été rencontrées à ce jour, dont une soixantaine de médecins et 55 questionnaires ont été administrés, dont 25 médecins. Les établissements et les unités cliniques rencontrés se caractérisent par une importante variété dans leur nature (taille et statut pour les établissements, spécialités pour les unités cliniques), mais aussi dans celle de l’informatisation : les logiciels utilisés sont différents, les fonctions informatisées également (le système DPI « extensif » défini ci-dessus est rarement complet), ainsi que les stratégies de déploiement (entre le big bang et la progressivité lente et prudente). Loin d’être un obstacle à la recherche, cette variété a été une ressource pour notre travail, du fait des questions que nous nous posions. Rappelons que l’idée était essentiellement d’avoir une vue qualitative d’un maximum de changements organisationnels liés au DPI et non pas de documenter finement un seul de ces aspects.
2.3 – Collecte des données
23Sur le plan de la collecte de données, une première phase exploratoire s’est déroulée en 2014. Elle a consisté à réaliser des entretiens non directifs dans quatre hôpitaux parisiens récemment équipés d’un DPI. En parallèle, une analyse de la littérature internationale a permis d’établir une catégorisation des effets recherchés et des types d’ « interactions » entre le DPI et l’organisation (cf. partie précédente). Nous avons ainsi retenu 5 rubriques : changements dans les savoirs professionnels et apprentissages, dans l’effectuation des activités individuelles, dans la division du travail et valorisation/dévalorisation professionnelle, dans les formes de coordination et, enfin, dans le processus de travail (avec insertion de la problématique de la « résilience papier » issue de la littérature). À partir de cette première exploration et de ce premier codage des entretiens, nous avons étendu les observations à sept autres établissements, en mettant progressivement au point le questionnaire.
24Une seconde phase de la recherche s’est déroulée entre 2015 et début 2016, et 11 nouveaux établissements y ont été intégrés. À partir du travail de structuration des thèmes de la première phase de recherche, nous avons administré trois types de questionnaires à des professionnels de soins, un pour chaque catégorie de personnel étudiée (médecins, cadres et infirmières, secrétaires). Ces questionnaires comportaient chacun une quarantaine de questions. Les premières questions portaient sur le contexte, par exemple : « votre service accueille-t-il une activité programmée, non programmée, mixte ? » ou « depuis combien de temps (en nombre de mois) le DPI est-il installé » ? Ou encore des questions plus précises sur la structure du DPI (imagerie, biologie, prescriptions, aide à la décision…). Comme l’illustre le Tableau 2, les autres questions portaient sur le ressenti des répondants, par exemple : « Pensez-vous que les échanges oraux entre professionnels de l’équipe ont diminué avec l’arrivée du DPI ? », ainsi que sur les évolutions concrètes de l’organisation, par exemple : « Y a-t-il eu des modifications des processus de travail ? ». Pour éviter des entretiens trop longs, les réponses étaient en général du type « oui/non », souvent avec des listes pré-remplies, sauf pour quelques questions mobilisant un positionnement sur une échelle de Likert, par exemple sur le thème du temps gagné ou perdu par l’usage du DPI. D’autres questions étaient semi-ouvertes. La réponse aux questionnaires était quasiment toujours mise en correspondance avec de courtes observations dans les unités cliniques et les secrétariats concernés.
Structure des entretiens et questionnaires
TYPE D’USAGE DE L’OUTIL DE GESTION | ||
---|---|---|
DIMENSIONS D’OBSERVATION (exemples de questions) | CONFORMATION | EXPLORATION |
Savoirs métier | Le DPI vous permet-il de mieux respecter les protocoles de soins ? | Le DPI vous a-t-il conduit à élaborer de nouveaux protocoles de soins ? |
Modes de division du travail et de coordination | Le DPI améliore-t-il la coordination entre corps de métiers au sein du service ? Le DPI améliore-t-il la coordination entre les spécialités médicales au sein de l’établissement ? Le DPI a-t-il conduit à une formalisation des processus de travail ? | Le DPI induit-il de nouveaux partages de tâches ? entre seniors et internes ? entre médecins et soignants ? entre médecins et secrétaires ? Le DPI a-t-il conduit à une redéfinition du rôle de la pharmacie ? Cette « aide pharmaceutique » conduit-elle à une amélioration de la prescription ? Le DPI a-t-il conduit à une évolution des processus de travail ? |
Modes d’évaluation de la performance | Le DPI vous permet-il de mieux contrôler l’activité du service ? | Le DPI contribue-t-il à faire émerger de nouveaux indicateurs d’évaluation et de pilotage du service ? |
Modes d’apprentissage | Le DPI améliore-t-il la traçabilité ? L’apprentissage des internes ? | Le DPI vous permet-il de mieux capitaliser sur les connaissances nouvelles de votre spécialité ? Le DPI est-il un nouvel outil pour la recherche épidémiologique ? La recherche clinique ? Le retour d’expérience ? |
Structure des entretiens et questionnaires
25L’administration à distance de ce questionnaire, telle que l’envisageait la DGOS initialement s’est révélée difficile pour des raisons pratiques, d’où la nécessité d’un face-à-face. Les investigations ont duré entre 0,5 journée et 2,5 journées par site. Le schéma général débutait par une première réunion avec la direction et les membres du management directement impliqués (directeur des systèmes d’information, cadre infirmier, direction des finances et contrôle de gestion, etc.), puis en rencontrant deux ou trois unités cliniques pour discuter avec les professionnels de soins, observer sur écran le fonctionnement du système, et, le cas échéant, procéder à l’administration du questionnaire. Ce schéma général a été respecté dans douze sites au total. Dans les autres, l’investigation s’est trouvée parfois limitée du fait de situations locales problématiques.
2.4 – Analyse des données
26En termes d’analyse des données, suite au premier codage thématique des entretiens exploratoires en 2014, les questionnaires ont été dépouillés et interprétés à partir de fin 2015. Si le dépouillage s’est effectué de façon collective, chacun des chercheurs a ensuite effectué sa propre interprétation des données avant de la confronter à ses collègues, permettant ainsi d’enrichir l’analyse et de la rendre plus robuste. En revanche, l’effectif réduit des questionnaires n’a pas justifié l’emploi de développements statistiques approfondis, le simple décompte des réponses suffisant souvent à révéler un effet de saturation sur beaucoup de questions. Par exemple, à la question « le DPI vous a-t-il permis de passer plus de temps avec le patient », la réponse était « non » pour la totalité des 55 répondants, assortie du commentaire « plutôt moins ». Les entretiens plus qualitatifs, ainsi que les nombreuses remarques émaillant l’administration du questionnaire ont par ailleurs renforcé les conclusions générales que les chercheurs pouvaient extraire de ce dernier et qui sont recensées ci-après. Enfin, des rendez-vous réguliers ont été organisés au sein d’un consortium avec d’autres équipes de recherche, étudiant de leur côté d’autres aspects du DPI. Ces rencontres ont permis de confronter les interprétations, de les affiner, voire de les préciser.
3 – Résultats
27L’un des principaux constats de notre recherche est le faible changement organisationnel que génère pour l’instant l’introduction du DPI dans les hôpitaux français, et ce, malgré le déploiement qu’il a connu et les multiples propriétés « vertueuses » que présente a priori cet outil. En revanche, nous avons pu repérer un certain nombre de signaux faibles qui laissent à penser que le DPI est potentiellement porteur de changements organisationnels plus importants, que nous avons interprétés comme créateurs de « valeur organisationnelle », mais qui nécessiteraient d’être mieux identifiés et accompagnés dans le temps long de ces transformations.
3.1 – La résilience du système : une logique dominante de conformation
28Le point de départ de notre recherche visait à documenter la variété des changements organisationnels liés à l’informatisation récente du dossier patient en France. À ce niveau, les résultats montrent que l’utilisation de l’outil est globalement acceptée par les acteurs. Certes, nous avons observé des effets de résistance conformes à la littérature internationale (en particulier de la part de certains médecins), mais avec une intensité bien moindre. Les avis sont ainsi parfois critiques ou nuancés, mais on observe une conformation à son usage en pratique. Par exemple, sur la perception des gains de temps, si les médecins ne perçoivent pas de gain induit par le DPI (d’où, d’ailleurs, un phénomène de contournement de certains, qui continuent à utiliser des dossiers papier), ils apprécient la plus grande traçabilité et l’accessibilité des données dans leur grande majorité. Et le personnel infirmier, malgré des difficultés lors de la mise en œuvre, ne pourrait plus s’en passer, estimant majoritairement gagner du temps (consultations fréquentes du dossier et alimentation du DPI pour tout ce qui concerne le dossier de soins) ; le secrétariat estime en gagner davantage encore (pré-rédaction du Compte rendu de sortie par des médecins, recherche d’informations etc.). Enfin, aucun des interviewés ne souhaite revenir en arrière, certains disant même « la tutelle a bien fait de nous forcer la main ».
29En revanche notre recherche n’a pas conduit à observer une remise en cause profonde du mode d’organisation des unités cliniques hospitalières : même si elle est parfois facilitée et accélérée, la coordination entre acteurs n’a ainsi pas changé et l’aspect coopératif du travail soignant a été préservé dans la plupart des sites. Par exemple, les échanges oraux n’ont guère évolué, ni au sein du service, ni entre services. Plus étonnant, il semble que l’usage des supports papier n’ait pas diminué dans les proportions escomptées, voire soit demeuré important à certains endroits. Par ailleurs, mis à part un transfert de tâches marginal généré par le DPI (ex. : les médecins ne peuvent plus passer des prescriptions aux infirmières à l’oral mais doivent les saisir en s’authentifiant dans le DPI), mais qui revenait en réalité à corriger des pratiques s’étant éloignées des fiches de postes prescrites, le partage des tâches et des rôles est en général resté inchangé.
30Nous n’avons pas, ou peu, observé de ruptures au niveau des savoirs professionnels en usage. En effet, les répondants estiment que le DPI n’a eu que des incidences faibles sur les savoirs professionnels, que ce soit au niveau de l’apprentissage du métier ou à celui de la recherche et aucun des acteurs (médecins, cadres, infirmières, secrétaires) n’estime que le statut de leur métier, ou leur identité professionnelle, ont été modifiés par l’arrivée du DPI. De même, l’adaptation des logiciels aux processus de travail n’a pas eu d’incidence sur le pilotage, le DPI n’ayant pas encore généré de nouveaux indicateurs de gestion, ni de nouvelles modalités de pilotage des services ou des unités. Enfin, l’ensemble du personnel hospitalier rencontré pense que les changements de la relation avec le patient sont invisibles, voire négatifs : moins de temps consacré à l’examen clinique du patient, concentration sur l’écran, etc., ce qui semble convergent avec les analyses de la littérature internationale rappelée dans notre première section.
31La « valeur organisationnelle » du DPI, autrement dit ce qu’il permettrait de faire en plus et non ce qu’il permet de continuer à faire, même mieux, paraît faible pour le moment. Seules quelques évolutions limitées, liées aux savoirs métiers et à la recherche ou à l’élaboration de nouveaux outils de suivi par les unités cliniques et pour leurs besoins propres ont été observées. Parmi les exemples rencontrés au cours de nos investigations, il est possible de citer : des protocoles locaux rédigés en vue de gain de temps, l’insertion du DPI dans le dispositif de gestion des lits, des petits outils personnels fabriqués à partir du DPI pour améliorer une organisation locale (liste de patients de la semaine à venir par un cadre de santé, tâches à ne pas oublier, suivi de la douleur, etc.). Globalement, on peut ainsi parler de « résilience » du système organisationnel précédent. Cela dit, comme nous allons le voir dans la section suivante, dans quelques situations rencontrées, nous avons été confrontés à des évolutions, certes encore en émergence, qui dérogeaient à l’observation d’une conservation du système organisationnel existant. La plus notable à nos yeux concerne le rôle et le statut de la pharmacie hospitalière.
3.2 – La pharmacie clinique : les signaux faibles d’une logique exploratoire
32Malgré le constat précédent, des signaux faibles sont cependant perceptibles, allant dans le sens d’un usage du DPI plus exploratoire et donc d’une « création de valeur » plus forte, c’est-à-dire au sens d’un accroissement du pouvoir d’agir des acteurs et de leurs organisations. Le cas le plus net est celui de la pharmacie hospitalière, qui, grâce à la connaissance du dossier du patient, semble susceptible de passer d’un statut de fournisseur interne à celui d’aide et de conseil à la prescription médicale.
33D’après nos recherches, il apparaît ainsi que l’accès au DPI permet au pharmacien d’analyser la prescription médicamenteuse en la référant aux données cliniques du patient. Du coup, dans plusieurs établissements visités, le rôle du pharmacien se transforme, passant de la simple prestation à la participation au diagnostic et aux soins. Cette transformation est toutefois plus ou moins importante, selon les cas étudiés.
34Dans certains cas, il s’agit d’une aide simple, le pharmacien adressant un avis ou une alerte au prescripteur ou à son service. Cette intervention constitue déjà une avancée considérable, les établissements de notre échantillon expérimentant cette façon de faire appréciant dans l’ensemble cette aide permettant d’éviter un certain nombre d’incidents, liés notamment aux interactions médicamenteuses. Dans d’autres cas, cette aide peut s’appliquer à l’ensemble du séjour du patient, dès l’admission, avec le support d’information constitué par les prescriptions de ville, se terminant par la sortie, avec un travail d’analyse sur l’ordonnance de sortie. On entre d’ailleurs là dans le processus dit de « conciliation médicamenteuse », veillant à la cohérence de la prescription tout au long du séjour du patient.
35Mais le processus de « conciliation médicamenteuse » suppose une organisation complexe que nous n’avons pas observée sur notre échantillon : d’une part il s’agit de faire en sorte que le pharmacien puisse effectivement intervenir à chaque étape du circuit, donc d’organiser les dispositifs d’échange entre lui et les prescripteurs (cette organisation allant dans le sens d’une insertion physique des pharmaciens dans les services cliniques, mouvement que l’on constate dans certains pays), d’autre part, la charge de travail supplémentaire exclut en général que cette conciliation puisse s’appliquer à l’ensemble des patients, ce qui suppose une réflexion collective sur les cibles : on peut procéder par choix de services, ou de pathologies, ou encore par filtrage à partir des résultats biologiques. Les établissements étant arrivés à ce stade de maturité sont encore assez rares, mais le mouvement d’ensemble est relativement incontestable, comme le montrent les expérimentations lancées par la HAS (Haute Autorité de Santé). Sur la base de ces résultats on peut émettre l’hypothèse d’une accélération progressive de cette dynamique. Il s’agit donc d’un changement potentiel important.
36Le Tableau 3 suivant synthétise l’ensemble de ces observations.
Synthèse des résultats des observations et questionnaires
TYPE D’USAGE DE L’OUTIL DE GESTION | ||
---|---|---|
DIMENSIONS D’OBSERVATION (exemples de questions) | CONFORMATION | EXPLORATION |
Savoirs métier | Le DPI est utilisé par les métiers. Son usage a permis de préserver et parfois améliorer l’information du patient, sans en modifier grandement la structure. Il pose en revanche des difficultés techniques pour s’adapter aux logiques métiers, par exemple pour produire un « volet synthétique » polymorphe, utile et interprétable par chaque spécialiste. | Le DPI a conduit à l’élaboration de protocoles de soins, mais rarement d’un type nouveau. Si le personnel médical n’utilise pas encore le DPI pour changer ses pratiques métiers, le personnel administratif et l’encadrement soignant semblent être en cours de transformation de leurs pratiques professionnelles, mais de façon encore marginale. |
Modes de division du travail et de coordination | Les échanges oraux interservices (mais pas intra-service), ainsi que le papier ont diminué, cependant les usages du DPI préservent plutôt les modes de coordination existants, notamment au sein des unités cliniques. | La pharmacie hospitalière se transforme dans certains établissements, notamment pour l’aide à la prescription, rapprochant les pharmaciens des services d’hospitalisation et cherchant à s’intégrer dans la conciliation médicamenteuse. |
Modes d’évaluation de la performance | Le DPI est utilisé pour suivre les indicateurs existants, comme le plan de soins. | Quelques professionnels utilisent le DPI pour fabriquer de nouveaux indicateurs, par exemple sur le suivi de la douleur. |
Modes d’apprentissage | Dans certains établissements, le DPI est utilisé au cours de staff en support de l’animation ou pour certaines réunions de travail, par exemple avec les internes. | Il y a encore peu d’usages faisant du DPI un nouvel outil d’apprentissage ou de recherche, notamment pour des raisons techniques limitant l’ergonomie de la requête des informations. |
Synthèse des résultats des observations et questionnaires
4 – Discussion
37Que nous enseigne le cas du DPI sur la valeur organisationnelle des technologies de l’information à l’hôpital ? Peut-on en tirer quelques implications d’ordre plus général qui pourraient, entre autres, permettre aux directeurs d’établissements comme aux décideurs publics de sortir d’une vision focalisée sur la « mesure d’impact » ?
4.1 – Valeur organisationnelle et « usage constructif » des technologies de l’information à l’hôpital
38Si les difficultés organisationnelles, décrites dans la littérature, associées à l’implantation d’un DPI, ou équivalent, ont bien été observées, elles l’ont été pour la plupart de façon atténuée, le collectif de travail ayant réussi à utiliser le système. Certes, cela s’est parfois fait au prix d’une perte de temps et de quelques contournements, lui permettant de préserver les pratiques de coopération et de coordination précédentes, mais la mise-en-œuvre s’est opérée. En revanche, nous avons vu que les reconfigurations de l’organisation, dues à l’outil restent limitées, et renvoient moins à un processus de changement profond, qu’à celui d’une accommodation de la structure à l’outil, finalement accepté et jugé positivement par la plupart des professionnels. Face à ce constat, on peut se rappeler qu’en analysant la mise en place de l’informatisation de production des soins dans un grand hôpital parisien, Berbain montrait, dès 2001, que les professionnels savent franchir les deux obstacles de l’apprentissage technique (savoir manipuler l’outil) et de l’apprentissage gestionnaire (savoir adapter les routines de fonctionnement aux prescriptions de l’outil), mais qu’ils ont plus de difficultés pour entrer dans un apprentissage organisationnel (savoir se saisir de l’outil pour inventer de nouvelles façons de faire et de progresser). Ces observations sont cohérentes avec la littérature sur l’appropriation des outils de gestion (Grimand 2006).
39Si nos investigations confirment donc la réalité du déploiement du DPI, dans un sens voulu par la tutelle, et notamment le programme « Hôpital Numérique », elles montrent toutefois que la manière dont sont pensés et déployés ces grands programmes d’investissement public ont tendance à laisser pendante la question de la création de valeur organisationnelle. Cette tendance semble d’ailleurs réduire le potentiel de transformation en pratique. En effet : si on a affaire à un processus dominé par l’esprit de conformation, ne s’agit-il pas d’un exemple patent d’appropriation incomplète d’une technologie gestionnaire ? Dans le cas du DPI, les potentialités latentes du dispositif, c’est-à-dire telles que les unités cliniques pourraient les explorer en situation (et non pas telles que définies a priori par les pré-requis institutionnels d’un déploiement centré sur le respect de processus de travail normés par un centre lointain) ne sont-elles pas limitées de ce fait ? Le cas de l’aide pharmaceutique, qui suggère l’intérêt d’une logique exploratoire, tout en étant encore limité à ce jour en pratique, semble plaider dans ce sens. La logique en question serait fondée, non sur l’observance de processus dans une optique proche des ERP (Enterprise Resource Planning), mais sur une évolution très différente à savoir l’irruption d’un acteur porteur de connaissances propres et complémentaires à celles des prescripteurs, irruption permise par le DPI. Les difficultés pratiques rencontrées semblent bien renvoyer à des modes de conceptualisation restrictifs de la notion de « valeur organisationnelle ».
40Cette discussion renvoie également à des travaux en théorie de l’activité. Prenant l’activité médiatisée par des instruments comme unité d’analyse, Rabardel (2005) oppose « l’activité productive, orientée vers l’atteinte des buts en situation » et « l’activité constructive, orientée vers l’accroissement, le maintien, la reconfiguration des ressources du sujet pour l’activité productive à venir ». Si nous reprenons la distinction proposée par Rabardel, nous pouvons distinguer entre un « usage productif » et un « usage constructif » des technologies de l’information à l’hôpital. L’usage productif renverrait à la logique de conformation, dominante dans le cas du DPI, et l’usage constructif, à la logique d’exploration et de création de valeur organisationnelle, émergente dans le cas du DPI. Cette dernière semble, pour le moment du moins, encore mal comprise et faiblement soutenue par les décideurs publics.
4.2 – Information de coordination vs Information de contenu
41Avant de discuter des implications managériales de notre travail, il n’est pas inutile de mentionner un dernier élément de discussion issu de notre enquête de terrain. En effet, devant les situations très contrastées que nous avons rencontrées, il nous est apparu nécessaire d’opérer une distinction entre deux types d’information que le DPI semble chercher à intégrer, à savoir : une « information de contenu », liée au contenu cognitif de l’activité clinique elle-même, et une « information de coordination », qui nourrit des mécanismes de coordination entre des professionnels variés. Cette distinction est progressivement devenue un moyen de rendre compte du contraste observé entre les services étudiés, selon que l’activité du service impliquait une dépendance plus ou moins forte de l’information de contenu avec celle de coordination. La dépendance semble, par exemple, forte dans les services de réanimation, d’urgences ou dans certaines spécialités ; autrement dit, dans ces situations, la coordination des acteurs ne peut s’établir sans référence au contenu du travail clinique lui-même. En revanche, cette dépendance peut paraître beaucoup plus faible, par exemple dans un service de chirurgie orthopédique, où la coordination semble pouvoir largement s’opérer sans impliquer un travail d’interprétation clinique fortement collectif et/ou discuté.
42L’intérêt de cette distinction est que, dans notre enquête du moins, elle rend compte fidèlement des situations où la mise en place d’un DPI a semblé presque naturelle (dépendance faible), alors qu’elle a été « une véritable souffrance » dans d’autres services (dépendance forte). Certaines observations de la littérature vont d’ailleurs dans ce sens. Par exemple, à partir de l’observation du fonctionnement d’un DPI dans 8 unités de soins aigus d’un hôpital, Reddy et al. (2001) mettent l’accent sur le travail d’interprétation auquel doivent se livrer les différents métiers concourant aux soins du patient, cela, dans le cadre de leurs savoirs et pratiques propres, alors qu’ils disposent par le dispositif d’une information unique et faiblement polymorphe. Certes l’EHR (Electronic Health Records, équivalent du DPI dans les pays anglo-saxons) a son rôle dans le travail collectif et peut être un atout selon les auteurs, mais il est loin de suffire : il ne supprime pas la discussion, la construction par chacun de la compréhension des différentes dimensions du cas, et de ce qu’il convient de faire par la suite. Ce problème est accentué quand le DPI est commun à plusieurs unités, de spécialités différentes. Les auteurs en viennent à critiquer le concept de CIS (Common Information Space) qui, pour eux, renvoie plutôt à l’information partagée et non à la construction d’une représentation de l’information. Même pour une équipe seule, le concept fonctionne mal, compte tenu des différenciations fortes entre métiers. Par exemple les médecins ont une vision rétrospective de l’information, alors que les soignantes se situent dans une vision prospective, devant planifier leurs séquences de soins. L’ensemble montre de fortes tensions entre clinique et coordination. De même, Ellingsen (2006) montre comment l’effort de structuration résultant de la mise en place d’un DPI peut engendrer des pertes d’efficacité et des frustrations lorsqu’il concerne la coordination de professionnels ayant des structures cognitives différentes (information de contenu). Enfin, Oborn et al. (2011) observent aussi les tensions qui émergent de la variété des types de pratiques cliniques (information de contenu) dans un service d’oncologie où avait été mise en place un DPI unique.
43Cet élément semble particulièrement important ici. Il rappelle qu’il n’y a pas « une » médecine mais « des » médecines, chacune explorant à partir de son histoire propre et de ses modes opératoires les plus récents, la richesse des potentialités offertes par un DPI. Il suggère également que les risques de tensions liées à la dépendance de l’information de contenu et de coordination sont accrus lorsque le DPI est perçu comme un outil devant intégrer toute l’information dans un cadre unique. Ceci renforce donc l’idée que le DPI gagne à être plutôt entendu dans une acception large, pouvant inclure différents outils, même si des problèmes techniques d’interopérabilité pourront émerger de cette constellation. Dans la mesure où ces observations suggèrent que la valeur organisationnelle dépend étroitement de la prise en compte des différences dans les pratiques cliniques et soignantes, elles ont des implications managériales que nous allons maintenant aborder.
4.3 – Implications managériales
44Soulignons tout d’abord deux constantes issues de nos observations. En premier lieu, la durée des types de déploiement étudiés dans cette recherche est longue. Dans la totalité des cas, les temps de déploiement se sont étalés sur plus de 10 ans et le système le plus étendu et sophistiqué que nous ayons observé, celui d’une clinique privée, a mis plus de quinze ans à se concrétiser malgré le volontarisme du management, et encore n’est-il pas complètement abouti aux yeux de ce dernier, notamment au niveau de la structuration de l’information médicale. La gestion de telles transformations ne doit donc pas être abordée comme un changement sur le court terme, mais doit se penser et se décrire comme un changement profond s’inscrivant dans le temps long. À ce titre, elle nécessite des efforts continus et suppose des possibilités d’apprentissage collectif.
45En second lieu, l’invention d’usages constructifs de la technologie et, partant, la génération de valeur organisationnelle associée à ces usages, supposent toutes deux la prise en compte des potentialités latentes des outils, qui ne peuvent être décidées à l’avance mais doivent être explorées en situation par les acteurs. Or ces potentialités, nous l’avons vu, dépendent des connaissances et des représentations propres aux acteurs, ce sont les ressources principales avec lesquelles ils s’engagent dans des logiques constructives des outils. Le cas de la pharmacie clinique est à cet égard instructif car il montre comment une appropriation forte et signifiante peut se développer en s’appuyant sur une logique professionnelle exploratoire. Le cas du DPI instancie ainsi une situation caractéristique où la valeur organisationnelle d’une technologie de l’information, qui pourrait se construire à partir de la reconnaissance de l’invention d’usages constructifs d’une technologie gestionnaire par les acteurs en situation et de leur soutien par les décideurs publics, est actuellement limitée en pratique.
46En lien avec d’autres travaux de la littérature sur les aspects organisationnels, nos résultats semblent enfin suggérer que la limitation du processus de création de valeur organisationnelle peut être associée aux modalités d’évaluation et d’accompagnement des transformations induites par les technologies de l’information dans les hôpitaux. Il semble en effet que le pilotage de telles transformations au long cours ne puisse se faire uniquement sur la base de mesure d’impact cherchant à justifier l’ampleur des investissements, souvent publics, consentis, ou encore sur le suivi de l’adoption des processus de travail inclus dans le nouvel appareillage gestionnaire. De telles mesures et reportings ne sont pas inutiles en soi et contribuent certainement à l’évaluation d’un déploiement donné à un moment donné de son déroulement, mais elles ne semblent pas opératoires dans le pilotage stratégique de la création de valeur organisationnelle. Celui-ci nécessiterait une meilleure appréhension des activités en jeu et du sens que les acteurs sont capables de donner à ces technologies à partir d’un usage constructif qui s’élabore pas à pas.
47D’un point de vue managérial, ce que suggère notre recherche sur le DPI c’est donc que le « meaningful use » (Blumenthal 2009), tant recherché par les pouvoirs publics, ne s’instaure pas naturellement, ni ne se décrète, même avec la plus grande des convictions, mais se construit chemin faisant, à partir de la régénération des capacités d’action des acteurs en situation. Or ces transformations appellent un accompagnement spécifique. Cet accompagnement est même doublement spécifique : spécifique dans la mesure où il ne s’agit pas d’aider à se conformer, mais d’aider à inventer, spécifique aussi, car compte tenu de la pluralité des médecines, il appelle à une différenciation des efforts : il s’agit de s’intéresser et d’apporter de l’aide à ceux qui en ont besoin, c’est-à-dire les activités où la conciliation des deux types d’information de contenu et de coordination (cf. 4.2) est la plus difficile.
5 – Conclusion
48Traitant des transformations organisationnelles induites par une technologie de l’information, notre recherche a visé à analyser, à partir du cas du Dossier Patient Informatisé, ce que l’usage de l’informatique peut amener aux professionnels, et si elle permet une reconfiguration effective des dispositifs d’action, des relations et des savoirs, en vue d’améliorer les performances. L’orientation de notre travail a donc visé à discuter la notion de valeur organisationnelle à partir du développement ou non d’un pouvoir d’agir pour les acteurs, ou, dit autrement, d’une régénération des « capacités de faire », dans le sens de l’amélioration des performances, qu’il s’agisse de coûts, de délais ou de qualité.
49Si ces potentialités latentes ne se sont que très peu réalisées, c’est sans doute du fait d’un effort essentiellement axé sur les processus d’adoption et de déploiement, certes longs et difficiles, mais remettant à plus tard des réflexions sur l’appropriation de l’outil d’un niveau supérieur. Le cas de l’aide pharmaceutique, loin d’être systématiquement installée là où la maturité du système le permettrait pourtant, nous révèle que l’automatisme de la régénération d’une organisation par un instrument est évidemment discutable. Ce sont des acteurs en chair et en os, agissant dans le cadre de leurs contraintes et de leurs logiques professionnelles, qui peuvent, ou non, opérer ce type de transformation, et là aussi, comme sur le déploiement, un accompagnement se révèle le plus souvent indispensable (de Vaujany, 2005, Ologeanu-Taddei, 2015).
50En ce qui concerne le DPI, maintenant que le déploiement institutionnel est en bonne route, il convient sûrement de s’intéresser aux changements en cours pendant la période de vie des technologies associées, et notamment d’enregistrer les initiatives « constructives » et les capitaliser, telles celles qui sont en émergence autour de la conciliation médicamenteuse. On a là, en effet, l’exemple d’une reconfiguration substantielle des organisations et des dispositifs d’action, impliquant l’irruption de nouveaux acteurs dans les processus, et une redéfinition de leur rôle. Le type même de transformation que nous proposons ici de repérer, suivre, évaluer et éventuellement de stimuler.
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Mots-clés éditeurs : apprentissage, valeur organisationnelle, transformation organisationnelle, technologies de l’information, hôpital
Mise en ligne 26/02/2019
https://doi.org/10.3917/gmp.064.0009Notes
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[1]
Pour une approche plus complète de ces travaux, le lecteur pourra se reporter à (Béjean, Kletz, Moisdon, Sicotte 2016).