Notes
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[*]
Auteur correspondant : sandrine.emin@univ-angers.fr
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[1]
Voir Chesnel et al., 2013 pour une application à l’analyse des clusters créatifs
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[2]
Ce groupe informel rassemble des économistes mais aussi des sociologues, des géographes et des gestionnaires.
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[3]
Nous retenons cette présentation, même si les institutionnalistes ont milité pour la conservation d’une dimension institutionnelle de la proximité à leurs côtés.
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[4]
Le travail d’investigation, mené en juin et juillet 2009, est le fruit d’une recherche collective qui associe le groupe de recherche angevin en économie et management (GRANEM, UMR MA 49) et le laboratoire d’économie et management de Nantes Atlantique (LEMNA, EA 4272) en partenariat avec la société d’aménagement de la métropole ouest atlantique (SAMOA). L’équipe de chercheurs ayant participé à l’élaboration de l’étude et au recueil des données est composée de Jean-Pierre Bréchet, Brigitte Charles-Pauvers, Sandrine Emin, Christine Gonzales, Dominique Sagot-Duvauroux, Nathalie Schieb-Bienfait, Caroline Urbain.
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[5]
Les filiales (6 % de l’échantillon) sont des microfiliales (moins de 5 salariés).
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[6]
Les analyses ont été menées sur le logiciel SPSS.
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[7]
Voir Emin et al., 2010.
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[8]
Nantes Création, créée en juin 2007 à l’initiative de Nantes Métropole, est une vitrine de l’offre culturelle et créative de la ville ainsi qu’un portail au service de ses entrepreneurs créatifs. À sa création, Nantes Création a été logée au cœur des Halles, sur le Plateau.
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[9]
Atlantic 2.0 est un réseau dont l’objectif est de dynamiser les acteurs de l’innovation et de la création numérique à Nantes et dans la région.
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[10]
Scopitone est un festival annuel transdisciplinaire d’art numérique se déroulant dans plusieurs endroits de la ville de Nantes au mois de septembre. Les Halles accueillaient, pour l’occasion, la Friche numérique du festival.
Introduction
1 Les clusters créatifs font l’objet d’une attention croissante tant dans la littérature académique (Scott, 2010 ; Chesnel et al., 2013) qu’auprès des collectivités publiques et des médias. Est mis en avant l’intérêt, pour les très petites entreprises créatives, de se rapprocher géographiquement afin de faciliter le développement de projets qui exigent des compétences complémentaires et spécifiques. De l’hôtel d’entreprises au pôle de compétitivité, les pouvoirs publics s’interrogent sur la meilleure façon de faire naître des coopérations fructueuses entre entreprises.
2 L’analyse économique des clusters s’est organisée autour de trois grandes familles de recherches (Gordon et McCann 2000) [1]. La première, qui relève de l’économie spatiale, aborde la firme comme une entité abstraite attirée par les caractéristiques d’un territoire donné (pure agglomeration model, par exemple, Krugman 1991). La seconde, issue de l’économie industrielle, analyse la nature des coopérations qui se nouent entre organisations stratèges (firmes, laboratoire de recherche, collectivités publiques…) au sein d’un même territoire pour rendre collectivement ce territoire plus compétitif (Industrial complex model, par exemple Porter 1998). Enfin, une troisième famille associée aux travaux de la socio-économie étudie le rôle des relations interindividuelles et des phénomènes d’encastrement social dans la dynamique d’un cluster (social-network model par exemple Granovetter, 1985 ; Cohendet et al., 2010).
3 Cet article s’inscrit principalement dans la troisième famille et s’appuie sur la littérature sur l’économie de proximités. Selon cette école, le maillage de proximités est susceptible de favoriser le développement de différentes collaborations entre les acteurs. L’importance de la proximité géographique des acteurs est affirmée mais elle doit être activée par d’autres formes de proximités qualifiées d’organisées (similitude en termes cognitif ou culturel, appartenance aux mêmes réseaux sociaux ou organisationnels). Cette approche permet ainsi de dépasser les limites de l’économie spatiale, qui néglige les dimensions a-spatiales dans les phénomènes d’agglomérations, et celles de l’économie industrielle, qui surestime au contraire le rôle des institutions, les relations inter-firmes et les stratégies d’acteurs dans la réussite d’organisations co-localisées.
4 Cependant, les travaux empiriques précis sur le processus par lequel les différents types de proximité se combinent pour donner naissance à des collaborations sont peu nombreux (à l’exception de Torre 2010 et Torre et Beuret 2012). Notre article cherche à combler ce manque. À partir de l’analyse exhaustive des coopérations établies entre 50 entreprises créatives co-localisées au sein des anciennes Halles Alstom sur l’île de Nantes, nous nous concentrons sur la façon dont deux réseaux d’entreprises appartenant à la filière web-graphique se sont constitués au sein des Halles. Nous analysons comment les différentes formes de proximités s’encastrent les unes aux autres pour donner naissance à des coopérations.
5 Dans une première section, nous rappelons le socle théorique sur lequel s’appuient les travaux sur les dynamiques de proximité et comment notre recherche s’y inscrit. La seconde section présente la méthodologie et le cas étudié. La troisième section décrit les principaux résultats obtenus. Enfin, nous discutons la portée de ces résultats au regard de la littérature existante.
1 – Une inscription dans l’économie des proximités
6 Les recherches sur les économies de proximité se sont développées en France à partir du milieu des années 1990, à l’initiative des chercheurs du groupe « Dynamiques de Proximité » [2] (voir par exemple les numéros spéciaux de la RERU, 1993 et 2008 ; et les travaux de synthèse de Rallet et Torre, 1995, 2004 ; Bellet et al., 1998 ; Gilly et Torre, 2000 ; Pecqueur et Zimmermann, 2004 ; Talbot et Kirat, 2005 ; Bouba-Olga et Grossetti, 2008 ; Talbot, 2010 ; Torre 2010, Torre et Beuret 2012). Ces travaux distinguent deux formes de proximité [3] : géographique (ou spatiale, physique) et socio-économique (ou organisée). La proximité géographique traite de la séparation dans l’espace physique. Elle peut être subie ou voulue (Torre et Caron, 2005), permanente ou temporaire (Rallet et Torre, 2004). La proximité socio-économique (ou organisée) met l’accent sur les caractéristiques socio-économiques qui rapprochent les acteurs (individuels ou collectifs) : connaissances et savoir-faire, réseaux sociaux, valeurs… L’hypothèse fondamentale est que la proximité géographique doit être rendue active par la proximité socio-économique, le potentiel des réseaux territoriaux résidant dans la combinaison de ces deux formes canoniques de proximité. Sinon, les acteurs économiques sont agglomérés mais aucune relation localisée n’émerge (Rallet et Torre, 2004).
7 De nombreux travaux sur l’économie de proximités ont porté sur la définition des différentes formes de proximité socio-économique qui lient les acteurs et sur leurs regroupements dans des typologies (voir notamment Gilly et Torre, 2000 ; Rallet et Torre, 2004 ; Boschma, 2005 ; Bouba-Olga et Grossetti, 2008).
8 Une première typologie distingue des proximités organisées qui se réfèrent à une logique d’appartenance de celles qui se réfèrent à une logique de similitude (Gilly et Torre, 2000 ; Rallet et Torre, 2004). Selon la logique d’appartenance, les interactions entre les acteurs sont facilitées par leur appartenance à de mêmes ensembles (organisations, réseau social, syndicats…). Dans la logique de similitude, la proximité entre les acteurs repose sur leur ressemblance socio-économique (partage des mêmes connaissances, des mêmes systèmes de valeur, ressources matérielles voisines…) qui favoriserait leur capacité à interagir.
9 Bouba-Olga et Grossetti (2008) distinguent une proximité de ressources, qui évalue dans quelle mesure les ressources dont disposent les acteurs se ressemblent ou sont complémentaires (indépendamment des possibilités de coordination dont ils disposent), et une proximité de coordination, qui évalue les facilités ou les obstacles à leur coordination (indépendamment des caractéristiques individuelles). La proximité de ressources, assez proche de la logique de similitude développée précédemment, peut-être de type cognitif (on partage un certain nombre de savoirs, savoir-faire communs, manière de penser et d’agir) mais aussi de type matériel, sous l’angle de la position sociale et des ressources dont disposent les personnes (patrimoine, revenus, diplômes, statut social), au sens de Sorokin (1959) et Bourdieu (1979). La proximité de coordination des acteurs peut, quant à elle, s’expliquer par leur insertion au sein d’un même réseau social (proximité relationnelle) ou par leur mise en relation via des ressources de médiation (dispositifs tels qu’un site internet, un cabinet de recrutement, etc.).
10 Mais ne peut-on pas considérer comme une ressource les réseaux au sein desquels un acteur (individuel ou collectif) s’inscrit, renvoyant ainsi au concept de capital social (Becker, 1976) ? De même, un certain nombre de caractéristiques individuelles des acteurs conditionnent les possibilités de coordination. C’est le cas par exemple des connaissances ou plus largement de la langue. Par ailleurs, peut-on considérer comme un indice de proximité entre acteurs l’appui sur un dispositif de médiation pour être mis en relation ? Dès lors n’est-il pas préférable de considérer que les individus ou les organisations se caractérisent par un certain nombre d’attributs (caractéristiques socio-économiques, appartenance à des réseaux, stock de connaissances, localisation géographique…) qui les prédisposent à collaborer avec d’autres individus ou organisations ayant des attributs proches ou complémentaires et qui sont autant de formes de proximité. Par ailleurs, il existe des dispositifs – indépendamment des attributs individuels – qui favorisent la mise en relation ou la mise en connexion des acteurs. Les attributs (caractérisant un degré de proximité ou d’éloignement entre acteurs) doivent être ainsi rendus actifs pour donner lieu effectivement à des coopérations. Les ressources de médiation telles qu’un site internet ou un cabinet de recrutement semblent plutôt relever de ce registre de l’activation. Pour ces raisons, nous préférons remplacer la notion de proximité de coordination par celle de dispositifs de coordination activant les différentes proximités de ressources.
11 En vue d’identifier la base la plus large possible d’attributs qui rapprochent ou éloignent les acteurs, la typologie de Boschma (2005) nous paraît être opérationnelle. Il répertorie les différentes formes de proximité possibles et étudie les effets positifs et négatifs de la proximité entre acteurs (individus ou organisations) sur la coopération et l’innovation, c’est-à-dire le dosage optimal entre proximité et distance pour que les phénomènes d’apprentissage et d’innovation voient le jour. Chaque proximité doit ainsi être suffisamment forte pour favoriser les coopérations, sans être trop forte afin de ne pas entraver la capacité d’innovation (phénomène de lock-in). Ainsi, la proximité géographique facilite la mise en commun de l’information, les échanges informels et l’instauration d’une confiance mais trop de proximité géographique peut entraîner des processus de verrouillage géographique (un enfermement en deçà de la frontière).
12 Outre la proximité géographique, quatre catégories de proximités socio-économiques sont alors distinguées (proximité cognitive, proximité sociale, proximité organisationnelle, proximité institutionnelle) que l’on retrouve dans les autres classifications.
13 La proximité cognitive évalue le partage d’une même base de connaissance et de compétences par les acteurs (Boschma, 2005). L’hypothèse est faite qu’un niveau minimal de connaissance commune entre deux acteurs est nécessaire pour imaginer les complémentarités possibles entre leurs activités et des formes innovantes de coopérations.
14 La proximité sociale se définit comme l’appartenance des acteurs à un même espace relationnel. Elle implique des relations de confiance fondée sur l’amitié, la parenté ou l’expérience passée.
15 La proximité organisationnelle mesure l’appartenance à un même arrangement institutionnel au sens de Williamson (1985). Ce qui est mesuré, à travers le mode de gouvernance (hiérarchie, réseau, marché), est le degré d’indépendance juridique et économique existant entre les membres et le degré de contrôle qui peut être exercé sur les membres de l’arrangement organisationnel.
16 La proximité institutionnelle, introduite par Kirat et Lung (1999), traduit la capacité des acteurs à partager et à adopter des comportements en fonction de représentations, d’habitudes, de règles ou de procédures communes. Les institutions étant définies, au sens de Edquist et Johnson (1997 : 46) comme des « ensembles d’habitudes partagées, de routines, de pratiques établies, de règles ou de lois qui régulent les relations et les interactions entre les individus et les groupes ». Cette proximité institutionnelle inclut deux dimensions : formelle et informelle. La première met en avant le partage des mêmes lois et règlements, des mêmes normes de comportement ou des mêmes standards, en raison de l’appartenance à un même système institutionnel, à une même fédération d’acteurs ou à une même organisation professionnelle telle qu’un syndicat professionnel. La dimension informelle met en avant le partage d’une même culture, des mêmes valeurs, d’une même manière de concevoir le monde par les acteurs (Gertler, 1995).
17 Sur la base de cette typologie, notre travail a consisté alors à analyser comment les proximités se combinent et s’appuient sur des dispositifs pour donner lieu à des coopérations. Une synthèse des proximités est proposée dans le tableau 1.
Typologie de proximités socio-économiques
Typologie de proximités socio-économiques
2 – Méthode
2.1 – Le choix de l’étude de cas exploratoire
18 Étant donné le nombre limité de travaux empiriques sur l’encastrement des proximités, nous avons choisi de réaliser une étude de cas exploratoire (Wacheux, 1996). Elle a pour objectif d’identifier de manière inductive le mix de proximité qui favorise les relations interorganisationnelles entre des entreprises co-localisées. À cette fin, le cas des « Halles », constitué de cinquante entreprises créatives logées dans les anciennes usines Alstom de l’île de Nantes, à Nantes, nous a semblé pertinent. Les entreprises du secteur créatif semblent effectivement être un bon terrain d’analyse de l’économie de proximités (Moureau et Sagot-Duvauroux, 2014). Ce sont de très petites entreprises travaillant souvent sur des projets singuliers associant des compétences variées.
19 Torres (2008) souligne l’importance des effets de proximité dans le management des petites entreprises. Le dirigeant privilégierait dans ses choix stratégiques ceux qui lui sont proches, que ce soit géographiquement ou psychologiquement (ceux qui appartiennent aux mêmes réseaux ou qui lui ressemblent). Ce principe proxémique (en référence aux travaux des psychologues Moles et Rohmer, 1978) semble une réponse adaptée aux principes de rationalité limitée et d’asymétrie d’informations. La proximité est un gage de garantie, mais aussi un réducteur d’incertitude, surtout dans un contexte où l’entreprise ne dispose pas de moyens importants. L’intérêt au regroupement géographique dans le secteur créatif est par ailleurs de disposer sur place d’une offre de travail qualifiée susceptible d’être mobilisée sur différents projets, de réunir des compétences variées, mais dont la mobilisation est courte dans le temps, et de donner forme à des idées émergentes grâce à la rencontre d’acteurs aux qualités complémentaires (Scott et Leriche, 2005 ; Santagata, 2006). Des entreprises de petite taille, appartenant au secteur créatif, réunies sur un même espace, cumulent ainsi diverses raisons de coopérer, parce qu’elles sont très petites (principe proxémique) mais aussi parce que la réussite de ces entrepreneurs, qui travaillent principalement sur projet, est tributaire des liens de proximité établis entre les acteurs au sein d’un territoire ou d’un métier.
2.2 – Description du cas étudié
20 Les Halles Alstom sont un grand espace où l’on peut distinguer plusieurs zones, selon les propos des personnes qui y sont logées : les rez-de-chaussée des Halles 5 et 6, les coursives du 1er et du second étage et ce qui est nommé « le Plateau », sorte d’îlot d’une quinzaine d’entreprises situé au second.
21 Dans la majorité des cas, l’entrée des entreprises dans les Halles est spontanée et repose sur la particularité de l’offre proposée : la possibilité de louer une surface adaptée à leurs besoins en cœur de ville. La configuration des lieux permet en effet de répondre à différentes attentes de ces entrepreneurs, allant d’un bureau d’une surface de 10 m2 à de grands volumes et espaces de stockage en passant par des ateliers.
22 Les Halles Alstom accueillent des structures appartenant toutes au secteur créatif mais offrant une grande diversité de services : activités de création relevant de la propriété intellectuelle (architecture, photographie, art, design, scénographie, etc.), services informatiques et web mais aussi production, édition ou diffusion de produits culturels (télévision, radio, imprimerie, livre, presse) et fédérations ayant pour objet d’apporter services et conseils à leurs membres. Le profil type est une jeune SARL de petite taille (84 % des entreprises des Halles sont des micro-entreprises indépendantes de moins de 10 salariés dont environ 36 % ne comptabilisent que le seul dirigeant - salarié ou non -) et de dimension locale en Business to Business. Seules 5 structures ont un effectif supérieur à 10 personnes et 3 sont de très petites filiales de microgroupes. Au total 150 à 200 personnes se croisent quotidiennement dans les anciennes Halles Alstom. Les caractéristiques des 50 entreprises sont renseignées dans le tableau 2.
Caractérisation des entreprises présentes dans les Halles
Caractérisation des entreprises présentes dans les Halles
2.3 – Le recueil des données [4]
23 Le soutien apporté à notre recherche par l’aménageur et logeur au sein des Halles a assuré la bonne participation des entreprises à celle-ci. Notre projet était d’interroger systématiquement chacune des entreprises présentes afin d’obtenir une cartographie complète des relations nouées entre les entreprises. 48 des 50 entreprises logées dans les Halles ont pu être interviewées entre juin et juillet 2009. Le recueil des données de terrain a reposé sur des entretiens semi directifs, d’1 à 2 heures, avec au minimum le dirigeant de chaque structure. Les entretiens étaient organisés autour de quatre thèmes : (1) l’historique de l’entreprise : avant l’arrivée dans les Halles et ensuite, (2) son activité économique, (3) ses relations avec les autres entreprises : nature des relations, ambiance, (4) les perspectives : les perspectives de relocalisation, la pérennisation des relations.
24 Le repérage des relations que chaque acteur des Halles entretient avec les autres a été conduit à partir de la liste exhaustive des 50 entreprises présentes dans les Halles. Il était demandé à chaque structure si elle connaissait les autres entreprises (degré d’intimité de la relation), si elles avaient déjà collaboré et si oui, dans quelles circonstances, sous quelles formes, sur quels projets. Ce travail nous a permis d’identifier les formes de relations nouées et de construire une matrice des relations interorganisationnelles au sein des Halles. L’utilisation de la liste des entreprises présentes dans les Halles nous a assuré d’obtenir des données sur l’ensemble des relations qu’entretiennent entre elles les entreprises interrogées (réseau complet) et de réduire le biais de mémoire, la liste apportant une aide importante au répondant. D’autre part, comme il s’agit de très petites entreprises, le biais de non prise en compte de coopérations nouées par d’autres personnes que celles interrogées est faible. On sait l’importance du dirigeant (Julien et Marchesnay, 1988 ; Torrès, 2008) dans les petites entreprises (moins de 50 salariés) qui constituent la totalité de notre échantillon [5], celui-ci étant très proche physiquement (souvent le même bureau ou celui d’à côté) de ses salariés.
2.4 – Les analyses conduites
25 Notre travail a reposé sur la combinaison de méthodes quantitatives, qualitatives et structurales. Les analyses quantitatives – tris à plat et tris croisés – ont permis la description du cas et notamment la mesure de l’intensité des relations nouées entre les entreprises. Les analyses qualitatives, qui se sont appuyées sur des entretiens semi-directifs, ont eu pour objet de comprendre la dynamique des collaborations identifiées par l’analyse quantitative à partir de la grille de l’économie des proximités. L’étude a reposé sur l’identification de la contribution des différentes formes de proximité socio-économique (cognitive, sociale, organisationnelle, institutionnelle) à l’émergence des collaborations interentreprises et la façon dont les formes de proximité s’encastrent et se renforcent.
26 Ce travail a été complété par l’analyse structurale d’un réseau complet (celui constitué de l’ensemble des relations professionnelles nouées entre les entreprises logées en juin 2009 dans les anciennes Halles Alstom de l’île de Nantes) pour représenter le système relationnel au sein des Halles par l’utilisation du logiciel UCINET.
3 – Résultats
27 Cette étude a permis de dégager plusieurs résultats empiriques : repérage de neuf formes de coopération marchande ou non marchande et mesure de leur récurrence au sein des Halles, établissement d’une carte des réseaux de coopération au sein des Halles, mise en évidence de l’importance des activités et de l’organisation spatiale des lieux dans le développement de coopérations (3.1). Nous nous concentrons cependant, dans cet article, sur l’analyse fine de deux sous réseaux denses de coopération entre des entreprises de la filière créative/ web (3.2), de façon à mettre en évidence l’encastrement des proximités donnant naissance à une coopération (3.3).
3.1 – Les caractéristiques générales du réseau de collaboration inter-organisationnelle au sein des Halles
28 Au sein des Halles, la proximité des acteurs débouche sur des collaborations professionnelles variées et l’utilisation du voisinage en tant que ressource. Les collaborations professionnelles vont de la simple relation non marchande, n’entraînant ni contrat ni échange financier, à des relations innovantes plus formalisées.
29 En moyenne, chaque entreprise est ainsi en relation avec près de 11 autres entreprises des Halles (cf. Tableau A, annexe 1) [6]. D’une part, 92 % des entreprises présentes entretiennent des relations non marchandes au sein des Halles. Les trois quarts des entreprises logées échangent ainsi des informations (bons conseils, réponses à des questions administratives ou plus spécialisées) et se prêtent ou mutualisent du matériel (par exemple prêt à titre gracieux d’une salle de réunion). Environ la moitié n’hésite pas à faire profiter les autres de son carnet d’adresses ou à les recommander tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des Halles (54 % d’entreprises pratiquent la mise en relation) et favorise leur reconnaissance médiatique (mise en valeur) via des reportages et des interviews (46 %).
30 D’autre part, 84 % des entreprises entretiennent des relations professionnelles marchandes en interne. En moyenne, une entreprise est en relation avec 3 à 4 entreprises sur les 50. Environ 70 % d’entre elles ont des relations de type client-fournisseur plus ou moins complexes et la même proportion est engagée dans de la co-construction de projets. Celle-ci constitue la forme la plus aboutie de collaboration et correspond au montage d’un projet commun ou d’une réponse innovante à un appel d’offres. Les liens noués donnent alors vie à des projets professionnels qui n’auraient pas existé sans la co-localisation. Par ailleurs, la dynamique collaborative semble tendre vers un renforcement dans le temps (cf. Tableau A, annexe 1). En moyenne, une entreprise se voit bien collaborer, à l’avenir, avec 2 nouvelles entreprises qu’elle a eu l’occasion de rencontrer dans les Halles. Au final, une entreprise est, a été ou pourrait à l’avenir être en relation professionnelle marchande, en moyenne, avec 6 à 7 entreprises sur les 50 présentes dans les Halles.
31 L’analyse quantitative met par ailleurs en avant l’importance du secteur d’activité et de la configuration des lieux [7]. Les entreprises collaborent, de façon attendue, davantage par affinité sectorielle. C’est ainsi qu’artistes et architectes qui collaborent peu avec d’autres entreprises au sein des Halles, ont cependant des relations entre eux. Cet effet se retrouve pour toutes les activités (cf. graphiques I et II, annexe 2) : chaque acteur collabore davantage avec les entreprises de son secteur qu’avec les autres. Chaque entreprise collabore également davantage au sein de son espace géographique (Rez-de-chaussée de la Halle 5 ou 6, Coursive du 1er ou du second, Plateau) qu’avec une entreprise d’un autre espace (cf. Tableau 2, Annexe 2), le Plateau et la coursive du second étant les espaces générant le plus de collaborations.
3.2 – Les dynamiques de proximité au sein des Halles : une approche recentrée sur la filière creative/web
32 Pour mettre en avant la façon dont les formes de proximités s’entrecroisent, nous avons isolé au sein des Halles les entreprises appartenant à la filière créative/web. Le choix de cette filière s’explique par l’intensité des coopérations constatées en leur sein et par le fait que l’analyse structurale révèle que, bien qu’appartenant à la même filière, deux réseaux se dégagent assez nettement. Ce ne sont donc pas seulement la proximité cognitive et l’intérêt économique de travailler ensemble (je travaille dans la même filière, je suis complémentaire) qui expliquent les collaborations mais d’autres facteurs qu’il importe de mettre en évidence. Ces réseaux concernent majoritairement des entreprises des deux localisations les plus actives (le Plateau et la coursive du second, cf. Annexe 2, Tableau 1).
33 Ces entreprises, proches géographiquement, collaborent-elles toutes avec la même intensité et sinon pourquoi ? Quelles sont les formes de proximité à l’œuvre dans la constitution des relations ? Le réseau de l’ensemble des relations (marchandes et non marchandes) entre ces entreprises est donné par le graphique III (Annexe 3). Il montre une forte intensité des échanges mais dégage deux pôles, l’un organisé autour des sociétés Infography, Creativ’, ConceptInfo, IdentitéSo que nous qualifierons de réseau A, l’autre autour de ConseilInfo, ConseilDigi, IndéInfo, WebDev, ConseilLog (réseau B). Le réseau des seules relations marchandes est fourni par le graphique IV (annexe 3). La comparaison des deux graphiques montre que le réseau A développe des relations qui se concrétisent par des échanges marchands, tandis que le second (réseau B) a surtout mis en place des formes d’échanges non marchands, qui ne se concrétisent pas toujours en activités commerciales.
3.2.1 – Le réseau A
34 Le réseau A illustre la façon dont se nouent des liens marchands entre organisations co-localisées impliquées dans une même filière d’activité. Quatre sociétés ont joué un rôle moteur dans la constitution de ce réseau : ConceptInfo, Infography, Creativ’, IdentitéSo.
35 ConceptInfo est une entreprise individuelle créée par Antonin, spécialisée dans la conception de sites internet qui travaillait en collaboration avec Eno, d’Infography, infographiste, avant d’arriver dans les Halles. Sur les conseils d’un de leurs amis qui s’occupe de la gestion immobilière des Halles au sein de la Samoa (la société d’économie mixte qui a la charge de l’aménagement de l’Ile de Nantes), ces deux sociétés décident de s’installer dans les Halles en 2007 (ils travaillaient à domicile auparavant).
36 Peu de temps après leur arrivée, Antonin (entreprise ConceptInfo) rencontre, par l’intermédiaire d’un client (proximité sociale), Cedric, qui a créé la société RandomSanté, spécialiste de la randomisation dans le domaine de la santé (applications web associées à des serveurs vocaux). Une commande de cartes de visite par RandomSanté à ConceptInfo permet aux deux responsables de faire connaissance et de constater la complémentarité des compétences informatiques de RandomSanté et de ConceptInfo (proximité cognitive). Les compétences pointues en programmation, technique et sécurité web de RandomSanté pourraient être utilement mobilisées dans la conception de sites web élaborés par ConceptInfo et Infography. Sur les conseils d’Antonin, RandomSanté s’installe alors dans les Halles et intègre le GIE constitué de Infogaphy, ConceptInfo, Gwenaelle (comptable) et désormais RandomSanté. RandomSanté et Infography ont par ailleurs ensuite créé une marque commune (proximité organisationnelle). De son côté, Eno fait venir dans les Halles son ami Achaba (proximité sociale), ancien boxeur pro qui a créé la société TshirtSA, spécialisée dans l’impression de T-shirts et avec lequel ils ont l’intention de créer une marque de vêtements.
37 Toutes ces entreprises se retrouvent sur le « Plateau », une des zones les plus actives des Halles, partagent des valeurs commerciales (ils sont là pour « faire du business ») (proximité institutionnelle informelle), savent parfaitement ce que les autres savent faire (proximité cognitive). Enfin, à l’origine de ces collaborations on trouve l’appartenance à un même réseau social d’Antonin, Eno et Achaba (proximité sociale).
38 Sur ce même Plateau, deux autres sociétés vont jouer un rôle déterminant dans le développement de projets collaboratifs : Créativ’ et IdentitéSo.
39 Créativ’ est une société créée par deux journalistes (Guillaume et Marie). Guillaume fut pendant un an et demi conseiller éditorial dans une agence de communication parisienne. Guillaume et Marie ont été informés de l’existence des Halles par la voie du « Bouche à Oreille ». Ce lieu les intéresse pour le prix mais aussi pour la concentration d’entreprises susceptibles de travailler avec eux. En effet, le modèle économique de Créativ’ est celui de l’externalisation. Créativ’ négocie un projet de communication avec un client, s’occupe de la direction éditoriale et sous-traite ensuite les autres aspects du projet. La proximité géographique de compétences complémentaires est donc une ressource importante. Ce mode de fonctionnement conduit Guillaume à faire rapidement le tour des compétences disponibles dans les Halles et à les mobiliser en fonction de ses différents projets (proximité cognitive). Sa nature très sociale facilite ce travail de mise en relation : « Je traîne dans les couloirs et lorsque je vois quelqu’un que je ne connais pas, je rentre dans le bureau et je discute » (compétence de coordination).
40 Il rencontre ainsi Maxime, créateur de la société IdentitéSo, spécialisée dans la réalisation de vidéos et d’ambiances sonores pour des sites internet. « Il y avait des instruments de musique, il avait l’air sympa… on a discuté ». Rapidement les deux hommes se rendent compte de leur complémentarité (proximité cognitive). IdentitéSo est en relation avec de nombreuses agences de communication pour lesquelles il réalise des vidéos d’introduction de site internet et l’ambiance sonore. Il fait alors appel à Créativ’ pour écrire les scénarios de ces films. Parmi ces agences, ConseilDigi située dans les Halles, est dirigée par un ami d’enfance de Maxime (proximité sociale). Il en découle des échanges soutenus entre ConseilDigi et IdenitéSo dont Créativ’ sera ici le sous-traitant (proximité sociale). En réciprocité, Créativ’ associe IdenitéSo aux projets qu’il développe en intégrant dès l’amont les compétences de Maxime dans ses propositions (proximité cognitive). Maxime précise : « Avec Créativ’, on a fait énormément de choses. Ils font de la création éditoriale et de l’écriture de scénario. Donc, j’ai fait appel à eux pour pas mal de films que j’ai réalisés. Eux, ils ont fait appel à moi également pour des projets de réalisation, notamment le projet de film de recettes de cuisine et pour la création d’un DVD également. Il y a énormément de projets en vue et qui ont déjà été faits ».
41 Dans une logique de complémentarité, Créativ’ et IdentititéSo ont naturellement fait appel aux compétences graphiques et informatiques d’Eno et Antonin (ConceptInfo) dans leurs projets (proximité cognitive). Le rapprochement avec Eno (Infography) et Antonin a également été motivé par l’ancrage nantais de ces derniers, dont le dense réseau professionnel local s’est avéré une ressource importante. « Eux, ce sont des gens d’ici, ils ont passé leur vie à Nantes, ils connaissent tout le monde, c’est des bons pilotes pour nous. Ils ont un réseau de contacts large. »
42 Ces coopérations ont été activées par la configuration des lieux. Le lieu de la pause cigarette, l’organisation en carré des bureaux ont facilité les prises de contacts et permis de rapprocher la paire Infography/ConceptInfo de la paire Créativ’/IdentitéSo.
43 Finalement, l’intensité des coopérations au sein de ce réseau s’explique par un encastrement fort entre types de proximités socio-économiques, notamment sociale (confiance fondée sur l’amitié et les expériences passées), cognitive (connaissance fine des activités et de leur complémentarité) et institutionnelle informelle (« on est là pour faire du business dans une ambiance conviviale »). Ces proximités sont activées par une configuration des lieux particulièrement adaptée et la personnalité de Guillaume, de Créativ’, qui joue le rôle de Gatekeeper, notamment grâce à ses compétences de coordination. Tout cela a débouché sur la mise en place d’une proximité organisationnelle, puisque ces quatre sociétés ont décidé de développer un projet de GIE, auquel est associé RandomSanté, et de déménager dans un nouveau local commun.
3.2.2 – Le réseau B
44 Le second réseau - moins dense en ce qui concerne les relations marchandes mais au sein duquel de nombreux échanges non marchands existent - est principalement constitué d’acteurs impliqués dans la communauté des logiciels libres et dans le domaine du web et des nouvelles technologies. Cinq sociétés ont joué un rôle majeur dans la constitution de ce réseau : ConseilInfo, ConseilDigi, IndéInfo, et WebDev et ConseilLog.
45 La société ConseilInfo, localisée sur la coursive du second, entreprise de conseil en systèmes et logiciels informatiques et d’ingénierie documentaire (gestion de fonds documentaires), est à l’origine de la venue d’un petit groupe d’entreprises membres comme elle d’Alliance libre dans les Halles. « Alliance libre » est un pôle d’expertise en Logiciels Libres de la région nantaise, créé sous forme associative fin 2006 à l’initiative d’entreprises et d’indépendants engagés depuis des années dans le développement et la promotion du Logiciel Libre (proximité institutionnelle formelle, informelle et proximité cognitive). ConseilInfo accueille en 2007, dans leur vaste espace rénové, Vincent d’IndéInfo et la société ConseilLog (deux sociétés de conseil en systèmes et logiciels informatiques membres d’Alliance Libre).
46 Patrice, de WebDev (développement web), rencontre, à l’occasion d’un bar camp organisé dans les Halles, Jean, de ConseilInfo, qui l’appuie alors dans sa recherche de bureau auprès de la société d’aménagement locale. Les bars camps sont des rencontres d’un soir ou d’un week-end, qui prennent la forme d’ateliers participatifs sur des thèmes liés à l’innovation en matière d’applications internet, de logiciels libres et de réseaux sociaux, et où le contenu est fourni par les participants eux-mêmes, selon le principe « pas de spectateur, tous participants ! ». Patrice s’installe sur le Plateau et contacte parallèlement Alliance Libre, dont le projet associatif l’intéresse, et dans la foulée intègre l’association. Anne, qui a une formation en ingénierie culturelle et fait du conseil éditorial, a connu les Halles par des connaissances. L’aménageur local lui propose de partager le bureau de Patrice, de WebDev (configuration des lieux), ce qui la met en contact avec son réseau au sein des Halles (réseau fondé sur la culture libre). C’est encore la configuration des lieux qui rapproche Sabine, de Scéno (scénographie), des entreprises ConseilInfo, IndéInfo et ConseilLog. Ayant pris connaissance des Halles par un ami qui les découvre par hasard, elle s’installe sur la coursive du second et les rencontre par ce biais.
47 Les rencontres entre les membres de ce réseau et avec d’autres entreprises situées au sein des Halles sont activées par des protocoles ou routines. Ces dispositifs sont un moyen de développer la proximité cognitive, dans une ambiance conviviale, de créer une « communauté sympathique », selon les mots de l’un de nos interlocuteurs. Trois entreprises (ConseilInfo, ConseilDigi et ConseilLog) décident par exemple d’organiser un bar camp, à l’origine de la rencontre avec Patrice de WebDev. Trois autres bars camps seront ensuite co-organisés, notamment avec Nantes Création [8] et Atlantique 2.0 [9], dans le cadre du festival Scopitone [10] ou encore en 2010, dans le cadre du mois de l’économie sociale et solidaire.
48 Autre dispositif : des repas ouverts à tous sont organisés, au moins une fois par an, au départ à l’initiative de Pernille, de ConseilDigi (société de conseil en tactique digitale, coursive du 1er), puis par Sabine, de Scéno, et Pernille, qui se sont rencontrées par ce biais. Pernille est aussi à l’origine du principe d’un repas organisé une fois par mois entre un petit groupe d’acteurs, dans lequel le dernier arrivant, amène, lors du repas suivant, une personne nouvelle pour que chacun connaisse plus de monde dans les Halles. « C’est lors d’un des déjeuners conviviaux (pique-nique) organisé entre les entreprises des Halles qu’Anne a rencontré l’entreprise B. et que l’on va peut-être faire un projet ensemble » (Patrice de WebDev). Troisième exemple, Vincent d’indéInfo a créé une mailing list, au sein de laquelle des informations de nature professionnelle et extraprofessionnelle – par exemple sur les événements collectifs organisés – circulent.
49 Enfin, les valeurs éthiques liées à l’engagement dans le logiciel libre (Alliance libre) contribuent à cimenter ce groupe (proximité institutionnelle informelle). Auxquelles s’ajoutent les valeurs d’entraides entre toutes petites entreprises : « [Pour ma recherche de prestataire] J’ai fait ma recherche dans les Halles. Ici il y a XX qui est assez importante mais je préfère travailler avec de petites sociétés ou des personnes indépendantes (…), monter une équipe à taille humaine sans passer par des barrières administratives, trouver des personnes souples et flexibles. ConseilDigi m’a donné un contact d’un ancien salarié qui lui s’est mis à son compte dans ce domaine. ».
50 Au sein de ce réseau, Patrice, de WebDev, joue un rôle de catalyseur ; pour lui, les Halles sont un lieu privilégié pour créer du lien et apprendre à connaître ses voisins (proximité sociale et cognitive). Ceci est d’autant plus important qu’il fonctionne, tout comme Créativ’, sur un modèle externalisé. « Pour faire du web on a besoin de beaucoup de partenaires : hébergement, référencement, design, contenu visuel et contenu textuel ». Il est un des passeurs, avec le réseau A, non seulement en raison de sa personnalité et de son modèle économique de fonctionnement, mais également parce qu’il est logé sur le Plateau. Il fait appel à ConceptInfo pour du graphisme, à IndéInfo pour une prestation d’hébergement et il n’hésiterait pas à faire appel à Maxime de IdentitéSo, à Anne et à Guillaume de Créativ’ s’il avait des besoins dans leurs champs de compétences respectifs.
51 Ainsi, proximités institutionnelles formelles et informelles, sociales et cognitives jouent ici encore un rôle déterminant dans le développement de collaborations. Mais elles sont notamment activées par la mise en place de routines qui favorisent les échanges informels, alors que la configuration des lieux d’implantation des entreprises du réseau s’y prête moins.
3.3 – Les leviers des coopérations au sein des Halles
52 L’analyse des deux réseaux montre premièrement que les dynamiques des collaborations au sein des Halles s’organisent autour d’une combinaison de proximités parmi lesquelles les proximités sociale, cognitive et institutionnelle jouent un rôle central. Deuxièmement, ces proximités se transforment en collaborations d’autant plus facilement qu’elles sont activées par des dispositifs spécifiques. Cela peut-être lié à la configuration des lieux comme sur le Plateau, mais aussi à des protocoles comme les Bar Camps ou à des routines comme les repas mensuels. Troisièmement, la mise en relation repose également sur des hommes et des femmes qui disposent de compétences relationnelles spécifiques leur permettant de jouer le rôle de Gatekeepers.
53 Sur le premier point, notre travail conduit à mettre en avant l’importance de la proximité institutionnelle informelle, au sens d’une proximité de valeurs dans les dynamiques collaboratives. Elle conditionne, dans le cas proposé, l’établissement de relations et explique à la fois la forte intensité des collaborations au sein de chacun des réseaux et la faible intensité des relations inter-réseaux. Ces réseaux, qui s’inscrivent dans une même filière mobilisant des compétences proches, se distinguent d’abord par des systèmes de valeurs différents : d’un côté, l’objectif des collaborations est avant tout commercial, il s’agit de faire des affaires, de l’autre, ce sont notamment les valeurs attachées aux logiciels libres à l’entraide entre petites entreprises qui rapprochent les acteurs. D’où la question de savoir s’il y a lieu d’en faire une catégorie spécifique de proximité, question qui sera discutée par la suite.
54 Sur le second point, nos résultats mettent en lumière que les relations interorganisationnelles dépendent de la structure de l’espace physique (séparation horizontale et verticale des bureaux dans l’espace) et de la position des entreprises au sein des Halles (soit de la distance qui les sépare), ce qui met en évidence l’effet de la configuration des lieux sur celles-ci. Nous montrons, en effet, qu’il y a plus de relations nouées entre entreprises d’une même localisation qu’entre entreprises logées dans des espaces distincts. De nombreux propos soulignent la distance ressentie entre le Plateau et le reste des Halles : « L’architecture du lieu fait qu’il y a une séparation entre le Plateau et le reste des Halles » (entretien ConseilDigi), « il y a deux mondes entre le Plateau et les coursives, il faudrait créer des passerelles pour favoriser les relations » (entretien B.). Au-delà, l’organisation des bureaux sur le Plateau apparaît particulièrement propice au développement des échanges, d’abord informels puis formels : « le Plateau c’est un petit monde à part (…), un petit endroit fermé où automatiquement, dès qu’on sort de son bureau, on voit des gens. Donc il y a pas mal d’échanges » (entretien O), « la configuration de plateau c’est génial, je ne vous aurais jamais dit la même chose si j’étais de l’autre côté » (entretien W). Et, contrairement au reste du bâtiment, dans lequel les lieux de circulation ne sont pas chauffés, le Plateau – espace fermé – l’est. Passer d’un bureau à l’autre, s’arrêter discuter en dehors de son bureau n’est donc pas naturel en hiver, sauf sur le Plateau.
55 Au-delà d’un environnement physique garantissant que les partenaires potentiels se croisent, la coopération s’appuie sur la mise en place de routines et d’événements partagés pour que les gens se rencontrent effectivement et communiquent. Les pots de fin d’année, la galette de rois et autres moments conviviaux, ainsi que le rituel des repas partagés, sont très importants dans la dynamique sociale et cognitive créée au sein des Halles. La mailing list est encore une initiative porteuse d’échanges, ainsi que le projet avorté de trombinoscope de compétences (qui fait quoi dans les Halles).
56 Enfin, notre étude de cas confirme qu’un lieu existe par les gens qui l’investissent. L’analyse des deux réseaux (A et B) montre que les proximités doivent s’accompagner d’une coordination qui repose sur des hommes ou des femmes créateurs de liens professionnels tels Guillaume, de Créativ’, et Patrice, de WebDev. Ils vont à la rencontre des autres et sont capables d’imaginer des collaborations fructueuses. Pour reprendre les propos d’un des locataires des Halles, ce sont des acteurs qui sont un peu « architectes dans leur tête ».
4 – Discussion
57 Trois résultats principaux se dégagent de notre travail : (1) la nécessité de personnalités Gatekeeper, (2) le rôle des dispositifs spécifiques de mise en connexion des acteurs (configuration des lieux, protocoles) dans le développement des collaborations et (3) l’intérêt d’identifier plus formellement une proximité de valeurs au sein des catégories existantes de proximité socio-économique. Ces résultats apportent une contribution empirique à des travaux existants, qu’ils confirment et précisent. Sur le premier point, nous ne faisons que confirmer une littérature fournie, qui met en exergue l’importance de la personnalité et du comportement des entrepreneurs sur la formation et la construction des réseaux sociaux (Rychen et Zimmermann, 2006 ; Chauvet et Chollet, 2010) et souligne qu’à l’origine des projets collaboratifs on trouve des leaders visionnaires (Filion, 1991) ou tout au moins des personnes ou groupes de personnes qui jouent un rôle moteur, catalyseur ou fédérateur (Bréchet et al., 2009). C’est pourquoi nous centrons notre discussion sur les deux autres résultats.
4.1 – Dispositifs et collaborations
58 Notre travail met en évidence l’importance des dispositifs spécifiques pour activer les proximités entre acteurs et produire de la collaboration. Ces dispositifs de mise en connexion des acteurs sont à rapprocher de ce que ce que Bouba-Olga et Grossetti qualifient, dans leur typologie, de ressources de médiation. Ils renvoient aux travaux mettant en évidence l’importance de tiers lieux, protocoles, routines dans le développement des coopérations, qualifiés de middleground par Cohendet et al. (2010).
59 Notre travail suggère de considérer la configuration spatiale des lieux comme une forme de ressources de médiation. Les travaux d’Allen et Henn (2007) montrent que la probabilité que deux individus appartenant à la même organisation communiquent entre eux décroît rapidement lorsque la distance qui les sépare augmente et qu’elle atteint un niveau asymptotique à environ 50 mètres. La structure de l’espace physique s’évalue à la fois sur un plan horizontal et vertical. Un de leurs résultats marquants est la faible probabilité de communication entre des individus logés dans deux ailes d’un bâtiment pourtant situées au même étage (séparation horizontale). Par ailleurs, les probabilités de communication diminuent également entre les salariés qui ne sont pas logés au même étage (séparation verticale).
60 On retrouve, dans les Halles, ces effets de séparations. Pour encourager la communication créative, Allen et Henn préconisent la création de situations favorisant des rencontres fortuites et les contacts occasionnels entre les salariés appartenant à des fonctions différentes qui n’ont pas vocation à se rencontrer. Il est ainsi possible de concevoir des espaces partagés, de leur affecter des matériels communs ou de créer un atrium central, qui constitue un moyen efficace de fournir un contact visuel entre les étages d’un bâtiment. Concevoir les bâtiments en tenant compte du risque de séparation spatiale, verticale et horizontale, décloisonner des lieux existants, en ajoutant, par exemple, une passerelle entre deux espaces physiquement séparés ou encore favoriser la circulation à l’intérieur des lieux permet d’améliorer les relations interorganisationnelles.
61 Selon Fayard et Weeks (2007), pour favoriser les interactions informelles, les espaces partagés (tel qu’une salle de photocopie) ne doivent pas seulement être centraux physiquement mais également disposer d’une centralité fonctionnelle. La centralité fonctionnelle repose sur les raisons pour lesquelles les gens se rendent dans cet espace (pour les photocopies mais également parce que s’y trouve la boîte aux lettres, le tableau d’affichage, qu’il est près des toilettes, etc.). S’appuyant sur le concept d’affordance de Gibson (1986) (i.e. les possibilités ou le potentiel d’action d’un environnement) ils montrent comment le lieu façonne les pratiques. L’affordance sociale d’un lieu (i.e. le potentiel d’interactions sociales qu’il rend possible) dépend du contexte de l’action (les individus se sentent-ils légitimes à y aller voire à y rester quelque temps pour discuter ?). Les Halles ne disposent pas de passerelles, de lieux centraux et fonctionnels pour favoriser les rencontres fortuites inter-zones. Une salle de repos a été créée par les locataires de la Passerelle du second mais en raison de sa localisation - au bout de la passerelle du second - et de la précarité des lieux - intempéries, pas de chauffage des communs et présence de pigeons – elle ne devint pas fédératrice. Il en est de même de l’espace cuisine du Plateau, pénalisé par son exiguïté et son absence de lumière naturelle. Et sa localisation ne favorise pas non plus les échanges interlieux.
62 Ce sont d’autres lieux (le lieu de la pause cigarette située près des toilettes du Plateau et à l’entrée/sortie de celui-ci) ou d’autres occasions (moments conviviaux organisés) qui favorisent les rencontres. Ainsi selon la configuration des lieux (ou leur plus ou moins grand potentiel d’interactions sociales), la coordination pourra être directe ou devra être médiatisée. À ce niveau, elle repose sur des personnes investies dans l’animation du lieu, créant des événements ou des dispositifs qui sont autant d’occasions de rencontres. C’est une difficulté au sein des Halles, ou aucun tiers ne prend en charge l’animation du lieu (on pense par exemple au trombinoscope de compétences avorté faute de temps de la part de l’entrepreneur bénévole prêt à s’en charger et à la question épineuse du nettoyage des communs – le lieu de la pause cigarette, par ex).
63 C’est ainsi que les responsables de la Ruche, espace collectif de travail pour entrepreneurs sociaux à Paris, et de « tiers lieux » tels les espaces de co-working (ex. la cantine à Nantes) organisent, au-delà d’espaces de travail pérennes et temporaires – ce qui favorise l’introduction de nouveaux entrepreneurs -, des événements, certains ouverts uniquement aux membres et d’autres accessibles au plus grand nombre. Les responsables de la Ruche vont même jusqu’à organiser des changements de bureaux, de manière à favoriser au maximum les rencontres inédites, même s’ils se heurtent parfois à la réticence de certains membres (Fabbri et Charue-Duboc, 2013). L’entrée et la sortie d’entreprises tout au long de la vie des Halles, l’organisation de bars camps, son insertion au cœur du Quartier de la création en émergence à Nantes, apportent, dans le cas étudié, une ouverture sur l’extérieur. Ces résultats confortent les travaux de Simon (2009) et Cohendet et al. (2010) sur l’importance du middleground (espaces informels physiques ou non, temporaires ou permanents) entre l’underground des individus (où émergent les idées) et l’upperground des organisations (où ces idées se transforment en projets économiques ou politiques publics). Ils peuvent être utiles aux aménageurs cherchant à favoriser les collaborations et les innovations dans des espaces délimités.
4.2 – La spécificité de la proximité de valeurs
64 Notre étude souligne l’importance qu’il y a à identifier plus formellement une proximité de valeurs au sein des catégories existantes de proximités socio-économiques. En effet, notre travail de terrain fait apparaître une forme particulière de proximité institutionnelle que nous choisissons, à la suite de Chesnel (2015), de qualifier de proximité de valeurs et « qui comprend l’ensemble des convictions, des idéaux, des façons de faire et habitudes de travail défendus par les individus ». Plusieurs éléments motivent ce choix.
65 Premièrement, notre analyse met bien en évidence la nécessité de partager une culture, une représentation commune du monde pour développer des coopérations qu’une proximité institutionnelle formelle n’induit pas nécessairement. Or, le travail de Boschma (2005) reste assez imprécis sur le concept de proximité institutionnelle. Celui-ci, très large, intègre à la fois une composante formelle (au sens des lois et règlements partagés) et une composante informelle (au sens d’une culture commune), sans qu’elles ne soient formellement distinguées. Deuxièmement, Boschma pose très clairement au niveau macro la définition de la proximité institutionnelle, ce qui la distingue notamment de la proximité sociale, qui relève quant à elle du niveau micro. Il écrit : « alors que la proximité sociale a été définie en termes de relations socialement encastrées entre les acteurs au niveau micro (relations fondées sur l’amitié, la parenté et l’expérience passée), la proximité institutionnelle sera associée au cadre institutionnel au niveau macro » (Boschma, 2005, p. 67).
66 La proximité que nous qualifions de proximité de valeurs relève du niveau micro. Elle fait référence au partage d’une même culture, d’un même système de valeurs, tout comme la proximité institutionnelle informelle de Boschma mais au niveau micro. Elle caractérise ainsi les valeurs humaines d’un individu (ce qu’il valorise ou ne valorise pas) ou encore celles d’une organisation (au sens de la culture organisationnelle). Le niveau d’analyse n’est pas le niveau macro, au sens du partage d’une même culture nationale ou des mêmes valeurs ethniques ou religieuses, même si les valeurs portées individuellement s’inscrivent dans un contexte culturel global. Cet argument justifie, selon nous, l’utilité à distinguer la proximité de valeurs de la proximité institutionnelle, même dans sa composante informelle.
67 Ce résultat nous conduit à opérer un rapprochement entre les travaux socio-économiques sur les mondes (Becker, 1982) ou les cités (Boltanski et Thévenot, 1991) de ceux développés par l’école de la proximité. Le concept de « mondes de l’art » de Becker met en avant l’existence, au sein d’un même secteur artistique, de communautés relativement étanches, qui ne collaborent pas, faute de partager la même conception de l’art. Moureau et Sagot-Duvauroux (2012, 2014) ont vérifié cette étanchéité sur cinq agglomérations françaises. Des galeries d’art partageant proximités géographique et cognitive ne collaboraient pas, faute d’un accord sur des valeurs artistiques communes.
68 Dans « L’économie des grandeurs », Boltanski et Thévenot décrivent quant à eux des cités idéales caractérisées, comme chez Becker, par le partage de valeurs communes qui permettent de distinguer ce qui vaut et ce qui ne vaut pas, ce qui est grand et ce qui est petit. La capacité des espaces destinés à regrouper des entreprises (des hôtels d’entreprises aux clusters), à produire de la collaboration et de l’innovation, dépend alors de l’efficacité des mécanismes de sélection d’acteurs partageant des valeurs communes. Le Rendu (2014) met en évidence les difficultés de mutualisation dans le secteur culturel, au regard de la pluralité des systèmes de valeur des acteurs. Chesnel (2015) montre comment la coopération au sein d’un cluster de jeux vidéo se heurte aux mêmes écueils. Il faut, sans doute, rechercher là les raisons du développement des cantines numériques, qui, grâce à leur mode de fonctionnement, génèrent un processus d’auto-sélection de participants sur des valeurs communes d’indépendance et d’entrepreneuriat.
Conclusion
69 Notre travail est une contribution empirique au courant de recherche sur l’économie des proximités. En précisant la façon dont se sont nouées des collaborations au sein d’un ensemble d’entreprises créatives co-localisées il montre comment s’encastrent les différentes formes de proximité pour donner lieu à des coopérations. Au-delà du rôle central que jouent ici les proximités sociale, cognitive et institutionnelle, la recherche souligne qu’elles se transforment en collaboration d’autant plus facilement qu’elles sont activées par des dispositifs spécifiques. À ce titre, l’organisation de l’espace apparaît comme plus ou moins propice aux interactions sociales (affordance) et est analysée comme une ressource de médiation. Les séparations spatiales, de nature verticale et horizontale, au sein d’un bâtiment, jouent comme autant de barrières qui limitent les opportunités de rencontres d’individus portant des compétences différentes mais susceptibles de collaborer dans des projets communs. Ces barrières peuvent être levées par la mise en place de tiers lieux (cafétéria, salles de photocopie…) qui structurent durablement la circulation au sein d’un espace. Elles peuvent aussi être contournées par la mise en place de protocoles ou d’événements (bar camps) qui, cette fois-ci de façon temporaire, modifient cette circulation.
70 Cette recherche souligne également l’intérêt qu’il y a à distinguer une forme de proximité institutionnelle, que nous qualifions, à la suite de Chesnel (2015), de proximité de valeurs. Le partage des mêmes valeurs semble effectivement déterminant dans le développement des coopérations entre les acteurs et relève d’un niveau micro plutôt que macrosocial. Ces résultats se retrouvent-ils à d’autres échelles (quartiers créatifs par exemple) ou dans d’autres contextes (en dehors du secteur créatif) ? Des analyses comparatives pourraient être entreprises de manière à confronter nos travaux à d’autres terrains et les conforter.
L’intensité des relations au sein des Halles
Les différents types de relations observées
Les différents types de relations observées
LectureLe tableau A ne donne pas d’information sur la fréquence des relations ; il précise le nombre d’entreprises avec lesquelles des relations de chaque type ont été engagées à la date de l’étude.
Pour le tableau A, Ligne 1 :
- Colonne 1 : En moyenne chaque entreprise interrogée a eu des relations professionnelles avec 10,86 entreprises présentes sur les Halles.
- Colonne 2 : 1 entreprise n’a jamais développé de relations professionnelles au sein des Halles ;
- Colonne 3 : L’entreprise ayant le plus eu de relations professionnelles a développé des relations de ce type avec 23 entreprises présentes sur les Halles.
- Colonne 4 : 49 entreprises sur 50 (98 %) développent des relations professionnelles avec d’autres entreprises des Halles.
Les relations selon la localisation
Nombre de relations par localisation
Nombre de relations par localisation
Lecture :10,86 : En moyenne, une entreprise des Halles est en relation avec 10,86 autres entreprises des Halles, soit 21,7% des entreprises des Halles
11,47 : En moyenne, une entreprise du Plateau est en relation avec 11,47 entreprises des Halles, soit 23% des entreprises
Les effets de localisation sur les collaborations au sein des Halles
Les effets de localisation sur les collaborations au sein des Halles
Lecture :0,22 : En moyenne, une entreprise des Halles est en relation avec 22% des autres entreprises des Halles.
0,23 : En moyenne, une entreprise du Plateau est en relation avec 23% des autres entreprises des Halles.
0,39 : En moyenne, une entreprise du Plateau est en relation avec 39% des autres entreprises du Plateau.
Réseau de relations entre les entreprises selon leur localisation au sein des Halles (toutes relations, taille des nœuds en fonction du degré)
Réseau de relations entre les entreprises selon leur localisation au sein des Halles (toutes relations, taille des nœuds en fonction du degré)
Réseau des relations marchandes entre les entreprises selon leur localisation au sein des Halles (relations marchandes, taille des nœuds en fonction du degré)
Réseau des relations marchandes entre les entreprises selon leur localisation au sein des Halles (relations marchandes, taille des nœuds en fonction du degré)
Les relations des créatifs et entreprises informatiques
Relations professionnelles marchandes et non marchandes entre les entreprises informatiques et de services créatifs
Relations professionnelles marchandes et non marchandes entre les entreprises informatiques et de services créatifs
Relations professionnelles marchandes entre les entreprises informatiques et de services créatifs
Relations professionnelles marchandes entre les entreprises informatiques et de services créatifs
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- Torrès O., 2008. L’ambivalence du management de proximité des TPE In A. Jaouen et O. Torrès (eds), Les très petites entreprises, un management de proximité. Hermès Lavoisier.
- Wacheux F., 1996. Méthodes qualitatives et recherche en gestion, Economica, Paris.
- Williamson O.E., 1985. The Economic Institutions of Capitalism. Free Press, trad. française : Les institutions de l’économie, Inter-éditions, 1994.
Mots-clés éditeurs : industries créatives, économie de proximités, réseaux, proximité de valeurs
Date de mise en ligne : 30/12/2016
https://doi.org/10.3166/ges.18.525-550Notes
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[*]
Auteur correspondant : sandrine.emin@univ-angers.fr
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[1]
Voir Chesnel et al., 2013 pour une application à l’analyse des clusters créatifs
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[2]
Ce groupe informel rassemble des économistes mais aussi des sociologues, des géographes et des gestionnaires.
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[3]
Nous retenons cette présentation, même si les institutionnalistes ont milité pour la conservation d’une dimension institutionnelle de la proximité à leurs côtés.
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[4]
Le travail d’investigation, mené en juin et juillet 2009, est le fruit d’une recherche collective qui associe le groupe de recherche angevin en économie et management (GRANEM, UMR MA 49) et le laboratoire d’économie et management de Nantes Atlantique (LEMNA, EA 4272) en partenariat avec la société d’aménagement de la métropole ouest atlantique (SAMOA). L’équipe de chercheurs ayant participé à l’élaboration de l’étude et au recueil des données est composée de Jean-Pierre Bréchet, Brigitte Charles-Pauvers, Sandrine Emin, Christine Gonzales, Dominique Sagot-Duvauroux, Nathalie Schieb-Bienfait, Caroline Urbain.
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[5]
Les filiales (6 % de l’échantillon) sont des microfiliales (moins de 5 salariés).
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[6]
Les analyses ont été menées sur le logiciel SPSS.
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[7]
Voir Emin et al., 2010.
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[8]
Nantes Création, créée en juin 2007 à l’initiative de Nantes Métropole, est une vitrine de l’offre culturelle et créative de la ville ainsi qu’un portail au service de ses entrepreneurs créatifs. À sa création, Nantes Création a été logée au cœur des Halles, sur le Plateau.
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[9]
Atlantic 2.0 est un réseau dont l’objectif est de dynamiser les acteurs de l’innovation et de la création numérique à Nantes et dans la région.
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[10]
Scopitone est un festival annuel transdisciplinaire d’art numérique se déroulant dans plusieurs endroits de la ville de Nantes au mois de septembre. Les Halles accueillaient, pour l’occasion, la Friche numérique du festival.