La photographie est un outil aussi bien pour les aménageurs de la ville que pour la chercheuse. Pour cette dernière, c’est un matériau à exploiter en obéissant à deux nécessités contradictoires. D’une part, il est délicat d’aborder la photographie sans avoir vu d’autres documents d’archives, ce croisement déterminant la fertilité du questionnement appliqué aux photographies. Et d’autre part, la photographie n’est pas une illustration, ni un supplément d’âme, de ce qu’on a lu dans d’autres documents. On doit se donner la chance d’y découvrir des choses, la regarder avec un œil neuf. Grâce à une forme de « virginité contrôlée du regard », on peut satisfaire cette double injonction. Cette exigence n’est pas propre à la photographie, elle est également mobilisée dans le travail ordinaire de l’historienne qui navigue entre plusieurs fonds d’archives en acceptant de voir parfois ses certitudes ébranlées.
C’est à partir de l’un de mes terrains d’enquête, la zone non aedificandi, que j’éprouverai cette tension entre photographies et archives. Elle permet d’éclaircir les motivations de l’opération urbaine et de nuancer les raisons invoquées par les chercheurs au moment où de grands aménagements urbains sont lancés sur cet espace voisin de Paris dans les années 1930. À cet égard, la photographie est à manipuler avec prudence, son effet de réel pouvant induire des diagnostics tranchés qu’on doit peser à la lumière d’un contexte et d’un jeu d’acteurs complexes. Le choix d’envisager la zone à partir de la photographie relève un dernier défi : cet espace urbain a entièrement disparu, englouti sous l’effet des destructions, expropriations, expulsions et, enfin, de la construction du périphérique, anneau de grande circulation autour de Paris…
Mots-clés éditeurs : photographie, banlieue, zone, Paris, expropriation
Mise en ligne 23/09/2024
https://doi.org/10.3917/gen.135.0037Cet article est en accès conditionnel
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