Notes
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[1]
Cet article s’appuie sur une synthèse des travaux historiques et juridiques et sur une recherche originale sur la genèse de l’aide médicale d’État. Cette recherche s’appuie sur le dépouillement de la littérature grise, des débats parlementaires, d’archives publiques et privées, notamment associatives, et d’entretiens. L’auteure remercie très chaleureusement Lola Isidro et Antoine Math pour leurs relectures et leurs contributions à cet article.
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[2]
JORF, 18 juillet 1893.
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[3]
Articles L. 434-20 et R. 434-35 du Code de sécurité sociale.
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[4]
JORF, 18 juillet 1893.
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[5]
Demande du maire de Lyon au ministre de la Santé publique, Question écrite à l’Assemblée, 29 mai 1932. Citée par Brodiez-Dolino, 2013.
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[6]
Conseil national de la résistance, « Les jours heureux », 1re édition, 15 mars 1944.
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[7]
Ordonnance n° 45-2250, 4 octobre 1945.
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[8]
Ordonnance n° 46-1145, 22 mai 1946.
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[9]
GISTI (1988), Le guide de la protection sociale des étrangers en France, Paris, La Découverte.
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[10]
Circulaire ministérielle n° 35 SS du 21 mars 1957.
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[11]
Johanet G. et Nguyen C. (eds.) (1984), « Les immigrés et la protection sociale », volet n° 7 du rapport sur l’immigration issu des séminaires de la voie administration économique de la promotion Léonard de Vinci de l’ÉNA, juillet.
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[12]
À partir de 2009 et le traité de Lisbonne, l’égalité est désormais reconnue au titre de la citoyenneté européenne et est étendue à l’ensemble des citoyens communautaires et non plus seulement aux travailleurs et à leurs ayants droit, sous réserve d’un droit au séjour.
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[13]
Règlement n° 1408/71 du 14 juin 1971 relatif à l’application des régimes de Sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté.
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[14]
CJCE, 15 janvier 1986, Pinna c. Caisse d’allocations familiales de Savoie, aff. 41/84. CJCE, 2 mars 1989, Pinna c. Caisse d’allocations familiales de Savoie, aff. 359/87.
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[15]
CJCE 22 juin 1972 Frilli, aff. 1/72. 1.
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[16]
CJCE 9 octobre 1974 Biason, aff. 24/74 ; CJCE 24 février 1987 Giletti, aff. 379 à 381/85 et 93/86.
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[17]
Lettre ministérielle du 10 juin 1988, publiée dans un article de Droit ouvrier en 1988. Citée par Isidro, 2017.
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[18]
Règlement 1247/92 du 30 avril 1992.
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[19]
TA. Paris 19 mars 1986, M. Lévy c. Maire de Paris.
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[20]
CE 30 juin 1989 Ville de Paris – Bureau d’aide sociale de Paris c. M. Lévy.
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[21]
Décision n° 89-269 DC du 22 janvier 1990, Égalité entre Français et étrangers.
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[22]
CEDH, Gaygusuz c. Autriche, 16 décembre 1996.
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[23]
Loi n° 98-439 du 11 mai 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile, art. 42.
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[24]
Paru l’année suivante : Le Pors A. (1977), Immigration et développement économique et social, Paris, La Documentation française, collection « Études prioritaires interministérielles ».
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[25]
Circulaire du 17 octobre 1978, BO n° 47 du ministère de la Santé, confirmé par un décret du 11 juillet 1980 qui y ajoute une condition d’antériorité de résidence de 3 mois (la disposition sera codifiée en 1986 à l’article R.741-1 du Code de la sécurité sociale). L’assurance personnelle a été supprimée en 2000.
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[26]
Gilles Johanet et Christian Nguyen (eds.) (1984), « Les immigrés et la protection sociale », volet n° 7 du rapport sur l’immigration issu des séminaires de la voie administration économique de la promotion Léonard de Vinci de l’ÉNA, juillet. Archives privées.
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[27]
GISTI (1983), « Note sur le paiement des prestations-maladie aux ayants droit étrangers d’un assuré social », octobre. Archives privées. GISTI (1984), « Situation des ayants droit des travailleurs immigrés au regard de l’assurance maladie-maternité », septembre. Archives privées.
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[28]
Clouet P. et Silland S. (1984), L’admission des étrangers à l’aide médicale hospitalière, rapport de l’IGAS, juin. Archives nationales (19990278/4).
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[29]
Hessel S. (éd.) (1988), « Immigrations : le devoir d’insertion », Rapport du Commissariat au plan, La Documentation française.
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[30]
Haut Conseil à l’intégration (1991), Pour un modèle français d’intégration. Premier rapport annuel, La Documentation française, p. 117-141.
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[31]
Circulaire interministérielle (Affaire sociales, Intérieur, Travail) du 24 septembre 1993, Bulletin officiel du ministère du Travail, 93/23, 20 décembre 1993.
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[32]
Circulaire DAS n° 95-16 du 8 mai 1995 relative aux droits à l’aide sociale des étrangers résidant en France.
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[33]
Boulard J.-C. (1998), Rapport sur les conditions de mise en œuvre de la couverture maladie universelle, p. 72.
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[34]
Entretien du 5 janvier 2018.
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[35]
Loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d’une couverture maladie universelle.
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[36]
Boisguérin B. (2001), « Les bénéficiaires de la couverture maladie universelle au 31 mars 2001 », Études et résultats, 128.
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[37]
Boisguérin B. (2011), « Insertion socioprofessionnelle, état de santé et recours aux soins des bénéficiaires de l’AME : le rôle des réseaux d’entraide », Solidarités et santé, 19, 2011.
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[38]
Projet de loi de finances 2017 pour 2018. Annexe Programme 183 Protection maladie.
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[39]
« Chiffres clés de la Sécurité sociale. 2016 », Direction de la sécurité sociale, 2017.
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[40]
Par exemple : Azoulay J. et Chambaud L. (2007), Rapport sur la gestion de l’AME, Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales, mai ; Cordier A. et Salas F. (2010), « Analyse des dépenses au titre de l’AME », Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales, novembre.
Introduction
1En France, l’assurance maladie est la branche de la Sécurité sociale où s’est le plus clairement exprimé le projet d’universalisation de la protection sociale avec la création en 1999 de la couverture maladie universelle (CMU) et son prolongement récent, en 2015, la protection universelle maladie. Ces dispositifs réalisent une partie du projet de la déclaration de Philadelphie qui prescrit en 1944 aux nations « l’extension des mesures de sécurité sociale en vue d’assurer un revenu de base à tous ceux qui ont besoin d’une telle protection, ainsi que des soins médicaux complets » (Art III) (Supiot, 2010). Ainsi, ce n’est pas le moindre des paradoxes que s’adosse à ces lois une prestation d’aide sociale, l’aide médicale d’État (AME), couvrant, de façon sensiblement plus restreinte, les besoins de santé des exclus de ces dispositifs, les personnes étrangères en situation irrégulière résidentes sur le territoire français.
2L’universalité de la protection sociale peut renvoyer à trois dimensions : l’étendue de la population couverte, la nature des risques protégés et les conditions d’accès aux prestations servies (Borgetto, 2016). Si les trois sont présentes dans la CMU, c’est sur la première que la loi de 1999 a constitué l’avancée la plus notable : les individus qui remplissent le seul critère de résidence stable et régulière sur le territoire peuvent être affiliés à l’Assurance maladie indépendamment du tout statut socioprofessionnel. Progressivement, le caractère assurantiel de la couverture maladie, offrant une prise en charge durable des soins de santé, s’est estompé pour tendre à devenir une prestation universelle. Néanmoins, l’adjectif n’est ici pas compris dans son sens commun : « Qui s’étend à tout ou à tous ; qui se rapporte, s’applique à l’ensemble des hommes, à la totalité des choses » (Trésor de la langue française). Il est triplement modulé. D’abord, le critère territorial limite l’application de la loi aux frontières nationales. Ensuite, le droit à l’assurance maladie est réservé à des personnes résidentes stables, les individus de passage sur le territoire en sont exclus. Enfin, pour les étrangers, une condition de régularité de séjour est ajoutée. Ces trois conditions sont révélatrices de la butée théorique, juridique et politique que constituent les mobilités internationales et les migrations pour les projets d’extension de la protection sociale. La troisième condition prend une dimension particulière. Le droit au séjour étant reconnu à la discrétion de l’État, l’introduction d’une condition de régularité permet un contrôle accru de l’accès à la protection sociale des étrangers.
3À partir d’une étude de cas sur la couverture maladie et en retraçant la genèse de l’aide médicale d’État, cet article propose un retour historique sur l’introduction de la condition de la régularité de séjour pour l’accès à la Sécurité sociale et à l’aide sociale pour les étrangers et ses conséquences sur les tendances à l’universalisation de la protection sociale.
4Ainsi, le projet de protection sociale est guidé par les objectifs politiques de la construction nationale mais aussi des relations internationales de la fin du xixe siècle jusqu’aux années 1970. Le critère de nationalité est alors central et ne s’estompe que très progressivement dans la seconde moitié du xxe siècle, laissant place à la nécessité pour les étrangers de faire la démonstration du respect des lois relatives au séjour pour une part de plus en plus importante des prestations sociales, qu’elles répondent à une logique assistantielle ou assurantielle. Depuis un peu plus de trente ans, l’introduction de la condition de régularité illustre la mise au service des politiques de protection sociale à celles de contrôle des flux migratoires, même si certains principes, comme ceux de la santé publique, freinent cette évolution [1].
Une « nationalisation du social » toujours inachevée (xixe siècle-1945)
5Dans la seconde partie du xixe siècle, le développement de l’État social n’est pas seulement concomitant de la construction de la nation, il est en la « quintessence » (Isidro, 2017). Bien que la restriction aux nationaux soit toujours modulée par une tendance à l’internationalisation de la protection sociale, notamment pour les travailleurs immigrés, la citoyenneté reste indispensable pour accéder pleinement aux droits sociaux émergents.
L’État social comme projet de construction de la nation
6La Troisième République a besoin d’institutionnaliser la multitude en groupe social clos pour assurer la pérennité du régime. La première loi sur la nationalité est votée en 1889. Le texte met l’accent sur la « contrainte étatique au détriment de la liberté de choix » (Noiriel, 2007). Cependant, pour susciter un sentiment d’appartenance, la nationalité ne peut être qu’une simple relation formelle avec la puissance publique. Développer l’État social et le réserver aux nationaux est l’un des moyens d’attacher les individus, et pas uniquement les titulaires du droit de vote et les travailleurs, à la nation et de susciter leur loyauté, indispensable dans une perspective guerrière de revanche contre l’Allemagne (Noiriel, 2005). Les lois d’assistance participent au « travail de clôture nationale » (Bec, 1998). L’article 1er de la loi créant l’assistance médicale gratuite en 1893 souligne le caractère national de la prestation : « Tout Français malade, privé de ressources, reçoit gratuitement de la commune, du département, ou de l’État suivant son domicile de secours, l’assistance médicale à domicile, ou s’il y a impossibilité de le soigner utilement à domicile, dans un établissement hospitalier [2] ».
7La loi sur l’assistance aux vieillards infirmes et incurables de 1905 exclut les étrangers, même si des accords ultérieurs permettront l’accès aux ressortissants de certains pays. Les lois d’assistance aux femmes en couches et aux familles nombreuses de 1913 fonctionnent sur le même principe. Dans le champ des assurances sociales, la prestation étant une forme de salaire différée correspondant aux cotisations versées, l’exclusion des travailleurs étrangers n’est pas totale. Les lois de 1898 sur les accidents du travail, de 1919 sur les maladies professionnelles ne prévoient aucune condition de nationalité. Cependant, pour les accidentés du travail, la rente est divisée par trois si le travailleur étranger réside à l’étranger – une diminution toujours de rigueur [3]. Dans le cadre de la loi sur les retraites ouvrières et paysannes de 1910, les travailleurs étrangers peuvent cotiser, mais ils ne peuvent bénéficier des versements patronaux et des bonifications budgétaires. La loi sur les allocations familiales de 1932 ne prévoit aucune distinction entre familles des travailleurs français et étrangers, car les prestations sont entièrement dépendantes des cotisations versées par le patronat. Cependant, en 1939, pour les nouvelles dispositions destinées à encourager la natalité, la prime à la première naissance et l’allocation de la mère au foyer, une condition de nationalité est introduite (Isidro, 2017). Les étrangers ne bénéficient pas des prestations chômage prévues par les lois d’assurance de 1928 et 1930, même si des accords sont passés avec des pays d’émigration importants comme la Pologne, l’Italie et la Belgique (Slama, 2012). L’exclusion partielle des étrangers éclaire une dimension essentielle de ces textes : fonder la nation en faisant de celle-ci la communauté de référence. Pour que la nationalité française soit vécue comme liant les membres de la communauté à qui elle a été donnée mais aussi comme un privilège par rapport à ceux qui ne l’ont pas, l’exclusion des étrangers apparaît alors comme une nécessité.
De multiples exceptions à la clôture nationale
8Des exceptions à la logique d’exclusion des étrangers existent toutefois. La première est le décret du 27 juillet 1903 sur la vaccination gratuite : les étrangers résidant en France peuvent en bénéficier (Michelet, 2002). La vaccination n’a d’efficacité qu’à grande échelle car l’on est vacciné pour être immunisé mais aussi pour ne pas être vecteur de transmission de la maladie. C’est en tant que possible agent de diffusion plutôt que potentiel malade que les étrangers accèdent aux opérations d’injection. Si l’État peut priver l’étranger d’une protection contre les risques auxquels il fait face individuellement, il ne peut pas ne pas prévenir les risques que peut faire courir l’étranger à la communauté nationale.
9La seconde exception est la plus importante : la plupart des mesures d’assistance et d’assurance prévoient une dérogation à l’exclusion pour les ressortissants des pays ayant signé avec la France une convention de réciprocité (Rosental, 2011). C’est déjà le cas dans la loi sur l’assistance médicale gratuite de 1893 qui précise que : « les étrangers malades, privés de ressources, seront assimilés aux Français toutes les fois que le gouvernement aura passé un traité d’assistance réciproque avec la nation d’origine [4] ».
10Dans le cadre d’une diplomatie de la sécurité sociale qui se développe à partir de la fin du xixe siècle, se multiplient des accords bilatéraux prévoyant, avec des modulations, l’égalité entre immigrés étrangers et Français vivant sur le territoire national et immigrés français et ressortissants étrangers dans le pays signataire. La signature de ces accords, qui font souvent fi des différences de niveaux de protection et des déséquilibres en termes de flux de migration, est une manifestation de la protection sociale comme enjeu de relations internationales. Elle est une expression et une contrepartie de la loyauté envers la France : un pays avec lequel la France négocie un tel accord est un pays avec lequel on est en paix, voire sur lequel on pourra compter en cas de guerre. À ce titre, ses ressortissants vivant sur le sol français doivent bénéficier d’un traitement d’exception par rapport à ceux dont les pays d’origine ne sont pas pris dans ce réseau d’alliances. Le phénomène est loin d’être négligeable : en 1925, 54 % des étrangers soignés dans les hôpitaux parisiens sont couverts par un accord (Slama, 2012).
Une égalisation partielle
11Cependant, la logique d’égalisation dont sont porteuses les conventions bilatérales ne concerne qu’une partie des personnes vivant sur le territoire français. D’une part, tout en ayant la nationalité française, les sujets coloniaux, auxquels la citoyenneté n’est pas reconnue, ne bénéficient que très partiellement des innovations du système de protection sociale de la fin du xixe et du début du xxe siècle, qu’ils vivent dans les colonies ou en Métropole. La loi du 30 avril 1930 sur les assurances sociales n’est pas appliquée dans les trois départements algériens (Spire, 2003). L’assistance des Algériens résidant en Métropole est assurée en région parisienne par des services de la préfecture. Créé en 1925, le SAINA (Service d’assistance aux indigènes nord-africains) chargé du suivi sanitaire des Algériens travaille en étroite collaboration avec la Brigade Nord-Africaine, celle-ci menant des opérations répressives et de surveillance. Des ressortissants étrangers peuvent bénéficier d’un traitement plus favorable que les sujets coloniaux. Ainsi, alors que les conventions avec l’Italie, la Pologne et la Belgique prévoient que leurs ressortissants résidant sur le territoire français bénéficient des assurances chômage, les Marocains, « protégés nationaux » devant la loi, en sont durablement exclus (Rosenberg, 2004).
12D’autre part, les accords bilatéraux de Sécurité sociale ne sont pas toujours appliqués localement. Selon la conjoncture économique et politique, l’exclusion des étrangers peut apparaître comme une opportunité de limiter les coûts d’assistance, sans s’exposer directement à des sanctions électorales. Dans un contexte de montée de la xénophobie, en 1932, le maire de Lyon et député radical du Rhône, Édouard Herriot, s’est ouvert, dans une question écrite au ministre, de son inquiétude concernant les hospitalisations d’étrangers qui pèsent sur le budget de l’aide médicale, alors pris en charge par la ville (Brodiez-Dolino, 2013) : « Les communes ne sont aucunement responsables de l’admission en France de ces étrangers, ni aucunement responsables de la permission qui leur est donnée de résider sur leur territoire. Par conséquent, est-il équitable que les communes paient les frais inhérents à l’hospitalisation des étrangers ? Il semblerait plus logique que l’État qui les a laissés s’introduire en France, le département qui leur a accordé le certificat de séjour, soient considérés comme leurs tuteurs et en conséquence responsables des frais que peut occasionner soit leur maladie, leur incurabilité ou leur vieillesse [5] ».
13À cette occasion, il introduit un argument majeur, très régulièrement invoqué par les représentants des collectivités locales pour ne pas assurer la prise en charge des dépenses d’assistance des étrangers : le contrôle des frontières et du séjour des étrangers est une mission de souveraineté qui revient à l’État et celui-ci se doit donc de prendre en charge les étrangers qu’il a laissés entrer et demeurer sur son territoire. Le ministère rejette les propositions de l’édile lyonnais et plaide à cette occasion pour une multiplication des traités de réciprocité. Il n’en reste pas moins que la légitimité des étrangers à bénéficier de la protection sociale reste sujette à débat.
14À la veille de la Deuxième Guerre mondiale, le principe de citoyenneté, tempéré par les accords internationaux, est dominant pour la dimension assistantielle. Pour les assurances sociales, la situation est plus nuancée. De nombreuses dispositions, qu’il s’agisse des allocations familiales, des assurances accidents du travail et maladies professionnelles et des prestations contributives issues des lois d’assurances sociales, sont ouvertes sans condition de nationalité. Cependant, certaines prestations non contributives sont réservées aux Français (prestations aux chômeurs, prime de naissance, allocation de la mère au foyer, allocations et fractions de pensions non contributives, assurance facultative…).
La nationalité lentement battue en brèche (1945-1998)
15Le projet d’universalisation, débarrassé de la restriction aux citoyens nationaux, émerge dans les textes fondateurs de la Sécurité sociale en 1945. Il est ensuite aiguillonné par les relations qu’entretient la France avec les anciennes colonies, pourvoyeuses de main-d’œuvre, et les engagements européens. Pourtant, les pratiques et certaines dispositions du droit national font obstacle à la reconnaissance de l’égalité entre nationaux et étrangers résidents sur le territoire.
1945 : universalisation ou nationalisation ?
16Les textes fondateurs de la Sécurité sociale sont marqués par une instabilité sémantique sur la définition de la population concernée (Tabuteau, 2015). Le programme du Conseil national de la résistance du 15 mars 1944 annonce « un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’État [6] », l’ordonnance du 4 octobre 1945 évoque les « travailleurs et leurs familles [7] », sans mention de la nationalité, tandis que la loi du 22 mai 1946 étend le bénéfice de la Sécurité sociale à « tout Français résidant sur le territoire [8] », renvoyant à « un règlement d’administration publique » le soin de fixer les règles pour les étrangers. Se dessine en creux le projet d’une Sécurité sociale ouverte sur un pied d’égalité à l’ensemble des nationaux et des étrangers dès lors qu’ils travaillent et cotisent.
17Cependant, la question de l’accès aux prestations d’assistance, financées par l’impôt et accordées en fonction d’un besoin, reste en suspens. Le décret du 29 novembre 1953, marquant le passage de l’assistance à l’aide sociale, ménage des exceptions à l’exclusion des « étrangers non bénéficiaires d’une convention ». Ils peuvent bénéficier de l’aide médicale après trois ans de résidence ininterrompue sur le territoire français et de l’allocation aux personnes âgées et infirmes s’ils y ont résidé quinze ans avant l’âge de 70 ans. Néanmoins, dans certaines conditions, l’État d’origine doit rembourser les frais occasionnés par la prise en charge (Isidro, 2017). Par ailleurs, les étrangers sont exclus des prestations non contributives de sécurité sociale, l’allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS) créée en 1941, puis les autres prestations créées après 1945 pour garantir un « minimum vieillesse », jusqu’à la création en 1956 de l’allocation supplémentaire du Fonds national de solidarité (FNS) ou encore en 1975, de l’allocation aux adultes handicapés (AAH).
18Après la Seconde Guerre mondiale, des régimes dérogatoires subsistent pour les ressortissants français des territoires colonisés, y compris pour les Algériens, alors que l’ordonnance du 7 mars 1944 instaure l’égalité entre « Français musulmans » et non musulmans. Les ordonnances de 1945 sur la création de la Sécurité sociale ne sont pas mises en œuvre en Algérie, vers laquelle les « Français musulmans » ayant travaillé en Métropole ne peuvent exporter leurs prestations. Les inégalités les plus frappantes demeurent celles en matière d’allocations familiales. Les travailleurs en Métropole dont les familles vivent en Algérie touchent des prestations amputées des deux tiers alors qu’ils cotisent à taux plein. Quant aux Tunisiens et aux Marocains dans la même situation, ils sont tout simplement exclus de tout régime de prestations familiales (Spire, 2013).
Décolonisation, migrations, construction européenne et ouverture de la protection sociale aux travailleurs immigrés
19Les mouvements de décolonisation, la construction européenne et les textes internationaux qui en découlent battent en brèche le principe de préférence nationale dans le champ de la protection sociale (Math et Toullier, 2003).
20Dès la fin des années 1940, la France multiplie les signatures de conventions bilatérales, notamment avec des pays anciennement colonisés (Algérie en 1965, Tunisie en 1966, Sénégal en 1976…). Pas moins de trente accords sont signés entre 1949 et 1988 [9]. Ces textes répondent à plusieurs objectifs : garantir des relations diplomatiques harmonieuses, assurer l’influence de Paris sur ces États naissants et cogérer la population immigrée en France. Bien que chaque convention contienne des dispositions propres, elles prévoient généralement l’égalité pour les prestations dites de Sécurité sociale et offrent des possibilités d’exportation de celles-ci. Cependant, elles ne concernent souvent que les travailleurs et leurs ayants droit, les prestations familiales et le chômage. Pour les autres prestations, la situation est fluctuante. Par exemple, l’accès au FNS est ouvert aux Italiens, aux Belges et aux Luxembourgeois en vertu des conventions de réciprocité [10]. En 1984, 88 % des étrangers vivant en France sont couverts par une convention de Sécurité sociale [11]. Par ailleurs, la CEE (Communauté économique européenne), créée en 1957, puis l’Union européenne signent des conventions de sécurité sociale avec des pays tiers qui engagent les États membres.
21Dans le droit européen, le principe d’égalité de protection pour les travailleurs européens résidants d’un autre pays est établi au nom du respect de la libre circulation dans l’espace de la CEE [12]. Le règlement de coordination des régimes nationaux de Sécurité sociale de 1971 définit les modalités d’exportation des prestations entrant dans son champ d’application [13].
22Ce double mouvement permet à une fraction de plus en plus large des étrangers résidant sur le sol français d’accéder à la protection sociale.
Les résistances françaises à l’extension de la protection sociale aux étrangers
23Cependant, les institutions françaises sont particulièrement réticentes à la mise en place de législations conformes à leurs engagements internationaux et les contentieux se multiplient à partir de la fin des années 1970.
24La reconnaissance du statut d’égalité des étrangers européens avec les nationaux n’est que progressive. Premièrement, la possibilité de bénéficier de certaines prestations est refusée aux familles restées au pays de travailleurs européens résidant en France. Elles ne peuvent toucher les allocations familiales. Deux décisions de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) en 1986 et 1989 sont nécessaires pour faire reconnaître leurs droits [14]. Deuxièmement, la France refuse la définition européenne donnée aux prestations de sécurité sociale, telle qu’elle est établie dans la jurisprudence interprétant le règlement de 1971. L’article 4 de celui-ci exclut « l’assistance sociale » du champ d’application du régime de coordination, seules les prestations de sécurité sociale sont exportables. Cependant, ce règlement reste flou sur la définition à donner à une prestation de Sécurité sociale, laissant aux soins de la CJCE d’établir les distinctions. Dès 1972, un arrêt reconnaît à Mme Frilli, ressortissante italienne résidant en Belgique, la possibilité de bénéficier du revenu garanti aux personnes âgées pour compléter sa retraite [15]. Deux critères sont retenus par la Cour pour définir cette prestation comme relevant de la Sécurité sociale et non de l’assistance. D’une part, elle peut être rapportée à une des branches de la Sécurité sociale dans le périmètre du règlement, la vieillesse. D’autre part, elle est versée dès lors que la personne remplit les conditions prévues par la législation sans faire l’objet d’un examen discrétionnaire (Isidro, 2017). Pour la France, le conflit entre le droit communautaire et le droit national se concentre autour des prestations non contributives. L’opposition est particulièrement forte concernant l’allocation supplémentaire du FNS, prestation qui complète les petites retraites. La CJCE affirme à deux reprises en 1974 et 1987 qu’il s’agit d’une authentique prestation de Sécurité sociale se rapportant à la branche vieillesse [16]. Pour la France, son financement par l’impôt et son accès sous condition de ressources la renvoient du côté de l’assistance. En 1987, la Cour statue en faveur de Mme Gilletti, de nationalité italienne, qui après avoir travaillé en France, est partie vivre dans son pays d’origine et demande à toucher le FNS. Les résistances sont telles qu’en 1988, une instruction ministérielle secrète prescrit aux services de ne pas mettre en place l’exportation du FNS tout en veillant à « ne pas susciter de nouveaux contentieux devant la Cour de justice des communautés européennes en appréciant les situations au cas par cas lorsque les dossiers sont soumis aux tribunaux des Affaires sociales [17] ». Face au refus de l’État français de tenir compte de ses décisions, la Commission européenne ouvre une procédure d’infraction avant qu’un accord supranational, impliquant une révision du règlement de coordination, soit trouvé en 1992, ménageant à la France des limitations à l’exportation de certaines prestations, notamment celles non contributives de sécurité sociale [18].
25Des conditions de nationalité continuent d’exister pour certaines prestations. Leur abolition est obtenue par l’invocation des conventions internationales devant les juridictions mais aussi du principe d’égalité énoncé dans la Constitution. Les batailles juridiques se multiplient au cours des années 1980. L’un des jugements les plus marquants fait suite à la décision du Conseil de Paris, de créer en 1985 une « allocation municipale de congé parental d’éducation pour le troisième enfant » et de la soumettre à une condition de nationalité, excluant les ressortissants non communautaires, excepté les réfugiés et les apatrides. Suite à un refus, la situation est portée devant la justice. Le tribunal administratif annule la délibération, estimant qu’« aucun intérêt général en rapport avec le service public municipal [19] » ne justifie une rupture d’égalité, décision confirmée par le Conseil d’État en 1989 [20] (Guiraudon, 1999).
26En 1990, le Conseil constitutionnel condamne l’exclusion des ressortissants non communautaires du bénéfice du FNS et érige l’égalité entre étrangers, communautaires ou non, et nationaux comme principe en matière de protection sociale [21]. En 1996, l’arrêt Gaygusuz de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) reconnaît comme discriminatoire le refus de l’État autrichien d’octroyer à un travailleur turc au chômage en fin de droits une allocation d’urgence sur la base de sa nationalité considérant qu’il se trouve dans une situation comparable à celle de travailleurs autrichiens, notamment car il contribué au financement de la Sécurité sociale [22] (Docquir, 1999). Malgré de fortes résistances (Lochak, 1999) et alors que la France est sous la menace de sanctions financières et d’un recours en manquement de la Commission européenne et contrainte de se plier à la jurisprudence de la CEDH, la condition de nationalité est définitivement supprimée du Code de la sécurité sociale par la loi dite Chevènement sur l’immigration du 11 mai 1998 [23].
27Le principe d’égalité entre nationaux et étrangers devant la protection sociale est finalement inscrit dans la loi, mais cette introduction est le fruit de la nécessité de mise en conformité à des engagements internationaux plus que d’un projet politique porté par les pouvoirs publics.
L’universalisation à l’épreuve de la régularité de séjour
28L’égalisation progressive des étrangers et des nationaux dans l’accès à la protection sociale s’avère en décalage avec la volonté politique de limiter les flux migratoires et la conviction que la protection sociale est un facteur incitatif à l’immigration. La généralisation progressive d’une condition de régularité de séjour pour les étrangers se présente comme la conjonction de ces tendances contradictoires.
Le critère de régularité de séjour : une introduction par la haute administration et les pratiques administratives
29L’impossibilité juridique de plus en plus clairement affirmée par les tribunaux de limiter la protection sociale aux nationaux et à certaines catégories d’étrangers conduit à introduire un critère de régularité de séjour pour l’accès à la protection sociale des étrangers.
30À partir des années 1970, une conception économiste de la présence étrangère en France devient largement partagée par les acteurs étatiques de la politique d’immigration (Laurens, 2009). En 1976, le rapport annuel du Commissariat au plan sur la « Rationalisation des choix budgétaires » est consacré au coût de l’immigration. Deux questions sont posées à la science économique : combien coûtent et combien rapportent les immigrés à la protection sociale ? Le niveau de protection sociale français est-il de nature à « attirer » de nouveaux immigrés sur le sol national [24] ? Dans cette perspective, l’immigration familiale qui se développe depuis les années 1960 est au centre de toutes les préoccupations. Elle ferait entrer sur les territoires plus de femmes et d’enfants que d’hommes, plus d’ayants droit que de cotisants, plus de populations bénéficiant de droits sociaux spécifiques susceptibles de peser dangereusement sur les comptes sociaux. Parallèlement, une condition de régularité de séjour est introduite à cette époque pour de nombreuses dispositions. La loi du 17 janvier 1975 permettant l’accès à l’IVG prévoit une condition de résidence régulière de plus de trois mois. Depuis la loi du 4 juillet 1975 sur la généralisation de la Sécurité sociale, l’accès aux prestations familiales est également conditionné à la régularité de l’un des deux parents. L’accès à l’assurance personnelle en matière de maladie, mise en place par la loi du 2 janvier 1978, est soumis également à ce critère [25].
31En juillet 1984, un volet d’un rapport confidentiel sur les immigrés et la protection sociale, commandé à la promotion Léonard de Vinci de l’ÉNA, établit la doctrine et les grandes lignes de la politique poursuivie par la suite [26]. Le rapport est coordonné par Gilles Johanet, futur directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés-CNAMTS (1989-1993 ; 1998-2002). L’idée phare est que la politique de protection sociale doit être mise au service conjoint de l’insertion des immigrés et de la maîtrise des flux : « À la question “Comment utiliser la protection sociale pour améliorer l’insertion des immigrés ?”, une première réponse peut être de considérer que la mission de protection sociale est exclusivement de couvrir des risques sociaux […] Cette vision de la Sécurité sociale, qui s’apparente à la mythique “neutralité budgétaire”, abandonnée de longue date, doit être rejetée : un gouvernement peut difficilement se priver d’un instrument aussi puissant que la protection sociale, dont le budget dépasse celui de l’État, pour réaliser certains de ses objectifs et ce d’autant plus que le poids de certaines prestations dans les budgets des familles immigrées fait de la protection sociale un facteur non négligeable d’insertion ».
32Les auteurs ont procédé à une exploitation partielle des fichiers de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) et d’échantillons locaux pour la Caisse d’allocations familiales (CAF) et l’aide sociale. Tout en reconnaissant des limites méthodologiques à leur travail, les auteurs concluent qu’après avoir eu « un moindre coût dans le passé », les immigrés ont « une influence aujourd’hui légèrement défavorable » sur les comptes de la protection sociale. « La vieillesse et la maladie font apparaître un solde positif des cotisations [des travailleurs immigrés] sur les prestations [reçues] ». Les dépenses de santé moyennes sont inférieures à l’ensemble de la population, avec un recours plus fréquent à l’hospitalisation par rapport à la médecine de ville. Cependant, les auteurs constatent « un coût supérieur à celui des Français pour les prestations familiales, le chômage, les accidents du travail et l’aide sociale ». Ils s’inquiètent d’une « détérioration possible dans l’avenir », conséquence de la féminisation des nouveaux arrivants, de l’accroissement du nombre des naissances et du vieillissement des travailleurs arrivés précédemment. Sur un mode plus spéculatif, les auteurs s’interrogent sur l’effet d’attraction du système de protection sociale. Ils concèdent ne pas connaître le degré d’information des candidats au départ et tentent une modélisation comparant les pourcentages de dépenses du PIB entre pays d’accueil et pourcentage de la population immigrée. Ils concluent néanmoins que « l’effet de la protection sociale sur les flux de main-d’œuvre est probablement positif, mais faible », l’état du marché du travail étant l’élément déterminant. Ils affirment cependant avec certitude que « la protection sociale incite au regroupement familial non maîtrisé », tout particulièrement les prestations familiales.
33Cet état des lieux conduit à une série de propositions dont la plus importante est d’« interdire aux étrangers en situation irrégulière l’accès au système de protection sociale » et de soumettre l’ensemble des prestations sociales à une condition de régularité du séjour. Pour les allocations familiales, les auteurs proposent que les enfants soient également soumis à un contrôle de régularité pour s’assurer qu’ils ne sont pas entrés en France en dehors du regroupement familial. La promesse est celle d’une mesure capable de limiter le regroupement familial, un droit pour les immigrés consacré par la jurisprudence malgré les multiples tentatives de le restreindre : « Le “verrouillage” du système de protection sociale est susceptible d’exercer un fort effet dissuasif sur les flux irréguliers, tant par l’effet d’annonce qu’il provoquera que par son influence concrète sur la situation des intéressés ».
34Les énarques reconnaissent que la mesure d’extension de la condition de régularité ne serait pas sans inconvénients, notamment pour la santé publique : « Sur le plan sanitaire, la mesure n’est pas toujours souhaitable : la restriction de l’accès aux soins qui résultera de la suppression de la couverture maladie peut occasionner ultérieurement des cas d’urgence graves et coûteux, ou aller à l’encontre de la prévention sanitaire et de la lutte contre les épidémies ».
35Elle est également présentée comme un moyen de « mettre fin aux pratiques arbitraires de contrôle de la régularité du séjour par des caisses de Sécurité sociale et des bureaux d’aide sociale » en les inscrivant dans le droit. Plusieurs sources attestent du fait que l’exigence d’un titre de séjour, bien qu’illégale à cette époque, est devenue une pratique courante depuis le début des années 1980 dans les caisses d’assurance maladie et les bureaux d’aide sociale. Deux notes du GISTI (Groupe d’information et de soutien des travailleurs immigrés), en 1983 et 1984, rapportent des contrôles de la régularité des ayants droit d’assurés étrangers dans les caisses d’assurance maladie, une manière de cibler prioritairement les femmes et les enfants des travailleurs immigrés arrivés en France en dehors de la procédure de regroupement familial [27]. Un rapport de l’IGAS atteste que la vérification du séjour est systématique à Paris pour l’accès à l’aide médicale hospitalière, qui prend en charge les frais en établissements de santé pour les plus démunis [28]. Ce projet de légalisation « a posteriori des pratiques entreprises par des hauts fonctionnaires et déjà appliquées par les agents intermédiaires de l’État » constitue une véritable importation dans le domaine de la protection sociale des méthodes de la politique migratoire, pour laquelle les expérimentations aux marges de la loi des préfectures finissent souvent inscrites dans le droit (Spire, 2005).
36La proposition d’introduction d’une condition de régularité est triplement cohérente avec le nouveau référentiel de politique publique qui émerge alors. D’abord, elle marque la volonté d’une partie de la haute administration de refaire de la Sécurité sociale une affaire d’État et non plus le domaine réservé des partenaires sociaux. Ensuite, la protection sociale est de moins en moins un enjeu de fondation d’une communauté citoyenne et devient une question comptable, l’exclusion d’une partie des étrangers laissant espérer des économies. Enfin, le contrôle des flux migratoires devient un enjeu cardinal auquel peuvent être asservis d’autres pans des politiques publiques, comme la protection sociale. Les auteurs n’ignorent pas que la jurisprudence européenne et la multiplication des conventions de sécurité sociale menacent les derniers avatars de la condition de nationalité au profit de l’égalité des droits entre Français et étrangers. Ils proposent une alternative, les textes internationaux ménageant aux États une grande latitude sur la protection sociale minimale à offrir aux étrangers qui ne respectent pas les lois du séjour du pays. Ce nouvel instrument de régulation offre de grandes possibilités, le cadre légal d’accès au titre de séjour étant fixé par l’État lui-même.
1993 : une exclusion programmée des personnes en situation irrégulière de la Sécurité sociale
37La proposition des énarques fait son chemin. Dès 1986, à la condition de régularité du séjour exigée du chef de famille pour l’accès aux prestations familiales, s’ajoute celle de l’entrée des enfants nés à l’étranger dans le cadre de la procédure de regroupement familial. Les années suivantes, deux rapports reprennent l’idée de l’introduction d’une condition de régularité pour l’accès aux prestations de Sécurité sociale tout en réfléchissant au filet de sécurité, notamment pour la prise en charge des soins de santé, qui devrait accompagner l’exclusion des personnes en situation irrégulière : le rapport du Commissariat au plan, signé Stéphane Hessel, « Immigrations : le devoir d’insertion [29] » et la première production du Haut Conseil à l’intégration, intitulé « Pour un modèle français d’intégration [30] ». C’est sans surprise qu’après la victoire de la droite aux élections du 28 mars 1993, le projet de loi sur l’immigration porté par le ministre de l’Intérieur d’Édouard Balladur, Charles Pasqua, comporte une série de mesures relatives à la généralisation du critère de régularité dans la législation de la protection sociale. Le texte proposé est particulièrement restrictif, privant les étrangers en situation irrégulière non seulement de l’accès à la Sécurité sociale mais aussi d’une grande partie des prestations d’aide sociale, y compris l’aide médicale à domicile, qui permet l’accès aux soins de ville pour les plus pauvres, Français sans accès à la sécurité sociale et étrangers pouvant justifier de trois ans de résidence. L’intervention de Claude Malhuret, médecin, député RPR (Rassemblement pour la république)-UDR (Union des démocrates pour la république) et ancien président de Médecins sans Frontières, est nécessaire pour maintenir in extremis l’accès à l’aide médicale. Le parlementaire souligne la contradiction entre les projets d’extension de la couverture maladie, que ce soit au titre de la Sécurité sociale ou de l’aide médicale, portés y compris à droite, et la proposition du ministre. Le contexte – l’épidémie de VIH est à son pic et le procès du sang contaminé est en cours – a certainement contribué à éviter une exclusion des étrangers en situation irrégulière de l’aide médicale. Il n’en reste pas moins que la loi de 1993 rompt, pour une partie de la population, avec le contrat assurantiel qui voit dans les prestations une forme de salaire différé : au-delà de la période de maintien de droits, une personne étrangère qui aurait cotisé précédemment ne peut plus bénéficier de prestations de sécurité sociale si elle perd son titre de séjour. Cette exclusion concerne quasiment toutes les prestations de sécurité sociale (assurances maladie, maternité, décès, invalidité, vieillesse) à l’exception de l’assurance accidents du travail et maladies professionnelles.
Une exclusion de la Sécurité sociale modulée pour la santé
38Paradoxalement, la période qui suit la loi de 1993 marque une amélioration de l’accès à la couverture médicale pour les étrangers. La circulaire d’application desserre les conditions d’accès à une couverture maladie. La seule régularité permet désormais d’avoir accès à l’aide médicale à domicile pour les étrangers alors qu’ils devaient attendre de pouvoir justifier de trois ans de résidence auparavant. L’aide médicale hospitalière couvre désormais les hospitalisations mais également les consultations [31]. « Pour tenir compte des situations exceptionnelles », un texte autorise également le ministre de la Santé saisi d’une situation à déroger à la condition de régularité et à accorder l’aide médicale à domicile à des étrangers sur le territoire depuis moins de trois ans [32]. Ces mesures permettent notamment l’accès à une couverture médicale de nombreux étrangers séropositifs dont l’état de santé se dégrade en stade sida.
39Ces assouplissements sont révélateurs des mouvements contradictoires qui traversent le champ de la couverture maladie. Parallèlement au durcissement d’accès à la protection sociale pour les étrangers, la couverture maladie, que ce soit par le biais de l’Assurance maladie ou de l’aide médicale, s’étend progressivement aux catégories que leur situation sociale ou familiale prive de l’affiliation sur critère socioprofessionnel. La loi sur l’assurance personnelle en 1978, l’affiliation automatique des allocataires du RMI en 1988 et la réforme de l’aide médicale en 1992 ont élargi l’étendue de la couverture mais trop des personnes restent encore exclues de toute protection maladie, soit en raison de mauvais fonctionnements de l’aide médicale, alors gérée par les départements, soit car elles ne bénéficient pas d’une couverture complémentaire et ayant une prise en charge partielle de leurs soins, elles finissent par y renoncer. Portée par des associations comme Médecins du Monde ou Médecins sans Frontières, l’idée d’une affiliation à l’Assurance maladie sur seul critère de résidence ainsi que de la prise en charge par l’État de la part complémentaire pour les plus démunis est reprise à gauche comme à droite. La fiscalisation partielle du financement de la Sécurité sociale avec la création de la CSG (Contribution sociale généralisée) en 1991 facilite le principe d’une affiliation qui ne soit plus liée au versement d’une cotisation. Alain Juppé, alors Premier ministre, envisage la réforme dès 1995.
40Le mouvement social et la dissolution conduisent finalement à l’arrivée au pouvoir des socialistes : Lionel Jospin confie à Martine Aubry, ministre de l’Emploi et de la solidarité, le soin de mener la réforme. Parmi les nombreuses questions à trancher, celle concernant les étrangers en situation irrégulière est particulièrement épineuse. Le député de Sarthe, Jean-Claude Boulard, chargé d’un rapport préparatoire à la loi, envisage la fin du critère de régularité pour l’accès à l’assurance maladie au nom de la simplification : « Ne faut-il pas mettre en œuvre le seul critère de résidence durable pour ouvrir le droit à l’affiliation au régime de base et l’accès à la couverture complémentaire ? [33] ». Cependant, le ministère repousse cette proposition et opte pour une solution qui ne remet pas en cause la loi de 1993 : conserver l’aide médicale en la réservant aux étrangers en situation irrégulière alors que les anciens bénéficiaires de la prestation seront affiliés à l’Assurance maladie. Un haut fonctionnaire alors en poste à la CNAM explique ce choix : « On a eu une approche extraordinairement pragmatique : on ne va pas laisser des T4 [référence au marqueur du VIH dans le sang] traîner dans le métro et nous n’allons pas soulever un problème que nous sommes incapables de gérer politiquement [34] ».
41L’aide médicale d’État, votée dans le cadre de la loi CMU (couverture maladie universelle), a donc été le résultat d’un arbitrage entre des préoccupations de santé publique et le refus de revenir sur une exclusion désormais considérée comme indépassable, celle des étrangers en situation irrégulière [35]. La prestation offre une couverture légèrement inférieure à celle offerte par la Sécurité sociale de base, associée à la CMU complémentaire (CMU-C) : les prothèses dentaires, les traitements d’orthodontie, l’optique, les audioprothèses et certains dispositifs médicaux spécifiques ne sont pas couverts au-delà du « tarif de responsabilité » de la Sécurité sociale, alors que la CMU-C le prévoit. Le plafond est équivalent à celui de la CMU-C. Les personnes dont les revenus sont supérieurs sont exclues de toute couverture maladie. Au 31 mars 2001, 15 mois après la mise en vigueur, 5,2 millions de personnes ont obtenu la CMU-C soit 8,7 % de la population [36] et 150 000 étrangers en situation irrégulière environ sont couverts par l’AME [37]. Réalisation partielle du projet d’universalisation de la couverture maladie, la création de l’AME a paradoxalement nourri un débat permanent sur la légitimité d’une fraction de la population résidente sur le territoire à être couverte pour ses besoins de santé. Malgré la faiblesse des effectifs – 311 000 personnes [38] contre 61,5 millions d’assurés sociaux à la CNAM [39] en 2016 – et les rapports faisant unanimement la démonstration du caractère anecdotique de la fraude et de la pertinence de la prestation pour la santé publique [40], la suppression de l’AME est évoquée chaque année lors du vote de son budget à l’Assemblée et pendant les campagnes électorales. Ces polémiques permanentes ont renforcé la possibilité de soumettre les objectifs de santé publique et de cohésion sociale à ceux du contrôle migratoire. La réforme de la protection universelle maladie (PUMA) en 2015, qui s’était donnée pour ambition de finaliser la réforme de 1999 et de simplifier les conditions d’accès aux droits, n’est pas revenue sur le contrôle de la régularité de séjour pour l’accès à l’Assurance maladie.
Conclusion
42Si le projet d’universalisation de la protection sociale ne se résume pas à la reconnaissance de l’égalité pleine et entière entre Français et étrangers résidents, elle en constitue l’un des éléments importants (Borgetto, 2016). L’universalisation, entendue ici comme la reconnaissance d’une protection sociale sur seul critère de résidence, est bridée par les impératifs des politiques migratoires et le postulat que l’existence d’un haut niveau de couverture sociale suscite et entretient les migrations illégales. Les étrangers en situation irrégulière, qu’ils travaillent ou non, sont tendanciellement écartés de la protection sociale tandis que l’inclusion des étrangers en situation régulière s’est plus acquise dans les tribunaux que devant le Parlement. Cette ambiguïté est révélatrice de la multiplicité des projets politiques portés par le système de protection sociale, entre instrument de la construction de la communauté citoyenne et reconnaissance des droits humains attachés à l’individu. En France, le statut d’exception qu’occupe la couverture maladie accordée aux étrangers en situation irrégulière via une prestation d’exception, l’AME, est largement lié aux préoccupations de santé publique, porteuses d’une nécessité d’universalité. Comme l’écrit Danièle Lochak : « Le droit oscille entre un principe universaliste d’égalité, qui conduit à proscrire les discriminations, et un principe réaliste de souveraineté étatique, qui aboutit à multiplier les discriminations fondées sur la nationalité » (Lochak, 1990) ou plutôt désormais sur la régularité du séjour. Ce règne de la régularité en matière de protection sociale a désormais une dimension européenne, comme le montre l’évolution récente de la jurisprudence européenne. Dans son arrêt Dano en 2014, la Cours de justice de l’union européenne (CJUE) a considéré non seulement qu’une femme roumaine installée en Allemagne, bien que possédant un titre de séjour illimité, ne peut prétendre à un minimum social à destination des demandeurs d’emploi mais également que son absence d’emploi et d’éléments attestant de la volonté d’en trouver serait la preuve qu’elle a migré pour obtenir le bénéfice de l’aide sociale d’un autre État membre et qu’à ce titre, comme le prévoient les directives européennes, son droit au séjour peut être remis en cause. Désormais, l’accès à la protection sociale est en passe de ne plus seulement être soumis à la régularité mais même de l’attester, renforçant la circularité entre les deux notions encore récemment distinctes.
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- Spire A. (2005), Étrangers à la carte. L’administration de l’immigration en France (1945-1975), Paris, Grasset.
Notes
-
[1]
Cet article s’appuie sur une synthèse des travaux historiques et juridiques et sur une recherche originale sur la genèse de l’aide médicale d’État. Cette recherche s’appuie sur le dépouillement de la littérature grise, des débats parlementaires, d’archives publiques et privées, notamment associatives, et d’entretiens. L’auteure remercie très chaleureusement Lola Isidro et Antoine Math pour leurs relectures et leurs contributions à cet article.
-
[2]
JORF, 18 juillet 1893.
-
[3]
Articles L. 434-20 et R. 434-35 du Code de sécurité sociale.
-
[4]
JORF, 18 juillet 1893.
-
[5]
Demande du maire de Lyon au ministre de la Santé publique, Question écrite à l’Assemblée, 29 mai 1932. Citée par Brodiez-Dolino, 2013.
-
[6]
Conseil national de la résistance, « Les jours heureux », 1re édition, 15 mars 1944.
-
[7]
Ordonnance n° 45-2250, 4 octobre 1945.
-
[8]
Ordonnance n° 46-1145, 22 mai 1946.
-
[9]
GISTI (1988), Le guide de la protection sociale des étrangers en France, Paris, La Découverte.
-
[10]
Circulaire ministérielle n° 35 SS du 21 mars 1957.
-
[11]
Johanet G. et Nguyen C. (eds.) (1984), « Les immigrés et la protection sociale », volet n° 7 du rapport sur l’immigration issu des séminaires de la voie administration économique de la promotion Léonard de Vinci de l’ÉNA, juillet.
-
[12]
À partir de 2009 et le traité de Lisbonne, l’égalité est désormais reconnue au titre de la citoyenneté européenne et est étendue à l’ensemble des citoyens communautaires et non plus seulement aux travailleurs et à leurs ayants droit, sous réserve d’un droit au séjour.
-
[13]
Règlement n° 1408/71 du 14 juin 1971 relatif à l’application des régimes de Sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté.
-
[14]
CJCE, 15 janvier 1986, Pinna c. Caisse d’allocations familiales de Savoie, aff. 41/84. CJCE, 2 mars 1989, Pinna c. Caisse d’allocations familiales de Savoie, aff. 359/87.
-
[15]
CJCE 22 juin 1972 Frilli, aff. 1/72. 1.
-
[16]
CJCE 9 octobre 1974 Biason, aff. 24/74 ; CJCE 24 février 1987 Giletti, aff. 379 à 381/85 et 93/86.
-
[17]
Lettre ministérielle du 10 juin 1988, publiée dans un article de Droit ouvrier en 1988. Citée par Isidro, 2017.
-
[18]
Règlement 1247/92 du 30 avril 1992.
-
[19]
TA. Paris 19 mars 1986, M. Lévy c. Maire de Paris.
-
[20]
CE 30 juin 1989 Ville de Paris – Bureau d’aide sociale de Paris c. M. Lévy.
-
[21]
Décision n° 89-269 DC du 22 janvier 1990, Égalité entre Français et étrangers.
-
[22]
CEDH, Gaygusuz c. Autriche, 16 décembre 1996.
-
[23]
Loi n° 98-439 du 11 mai 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile, art. 42.
-
[24]
Paru l’année suivante : Le Pors A. (1977), Immigration et développement économique et social, Paris, La Documentation française, collection « Études prioritaires interministérielles ».
-
[25]
Circulaire du 17 octobre 1978, BO n° 47 du ministère de la Santé, confirmé par un décret du 11 juillet 1980 qui y ajoute une condition d’antériorité de résidence de 3 mois (la disposition sera codifiée en 1986 à l’article R.741-1 du Code de la sécurité sociale). L’assurance personnelle a été supprimée en 2000.
-
[26]
Gilles Johanet et Christian Nguyen (eds.) (1984), « Les immigrés et la protection sociale », volet n° 7 du rapport sur l’immigration issu des séminaires de la voie administration économique de la promotion Léonard de Vinci de l’ÉNA, juillet. Archives privées.
-
[27]
GISTI (1983), « Note sur le paiement des prestations-maladie aux ayants droit étrangers d’un assuré social », octobre. Archives privées. GISTI (1984), « Situation des ayants droit des travailleurs immigrés au regard de l’assurance maladie-maternité », septembre. Archives privées.
-
[28]
Clouet P. et Silland S. (1984), L’admission des étrangers à l’aide médicale hospitalière, rapport de l’IGAS, juin. Archives nationales (19990278/4).
-
[29]
Hessel S. (éd.) (1988), « Immigrations : le devoir d’insertion », Rapport du Commissariat au plan, La Documentation française.
-
[30]
Haut Conseil à l’intégration (1991), Pour un modèle français d’intégration. Premier rapport annuel, La Documentation française, p. 117-141.
-
[31]
Circulaire interministérielle (Affaire sociales, Intérieur, Travail) du 24 septembre 1993, Bulletin officiel du ministère du Travail, 93/23, 20 décembre 1993.
-
[32]
Circulaire DAS n° 95-16 du 8 mai 1995 relative aux droits à l’aide sociale des étrangers résidant en France.
-
[33]
Boulard J.-C. (1998), Rapport sur les conditions de mise en œuvre de la couverture maladie universelle, p. 72.
-
[34]
Entretien du 5 janvier 2018.
-
[35]
Loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d’une couverture maladie universelle.
-
[36]
Boisguérin B. (2001), « Les bénéficiaires de la couverture maladie universelle au 31 mars 2001 », Études et résultats, 128.
-
[37]
Boisguérin B. (2011), « Insertion socioprofessionnelle, état de santé et recours aux soins des bénéficiaires de l’AME : le rôle des réseaux d’entraide », Solidarités et santé, 19, 2011.
-
[38]
Projet de loi de finances 2017 pour 2018. Annexe Programme 183 Protection maladie.
-
[39]
« Chiffres clés de la Sécurité sociale. 2016 », Direction de la sécurité sociale, 2017.
-
[40]
Par exemple : Azoulay J. et Chambaud L. (2007), Rapport sur la gestion de l’AME, Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales, mai ; Cordier A. et Salas F. (2010), « Analyse des dépenses au titre de l’AME », Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales, novembre.