Notes
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[1]
Cathel Kornig, chercheuse associée et Éric Verdier, directeur de recherche au CNRS: Laboratoire d’économie et de sociologie du travail (LEST) Aix-en-Provence.
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[2]
Association régionale pour l’amélioration des conditions de travail, membre du réseau de l’ANACT, agence nationale sous tutelle du ministère en charge du travail.
-
[3]
Travail opérationnel de suivi, de contrôle et d’appui.
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[4]
BTP, réparation automobile, hôtellerie-restauration, sanitaire et social.
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[5]
Les salariés étaient inclus dans l’enquête (cf. encadré 2) au même titre que leurs employeurs mais cette dimension ne fait pas ici l’objet d’une exploitation systématique. En effet, nous n’avons pu mener à bien les entretiens avec les salariés que dans une partie des entreprises: dans certains cas, le salarié ou l’apprenti était absent lors de notre ou de nos passages; dans d’autres, les entretiens, particulièrement brefs, ont dû être conduits en présence du patron; enfin, ce n’est parfois qu’après plusieurs relances que l’entretien avec le ou l’un des salarié(s) a pu se tenir. L’exploitation s’avère délicate et reste à ce jour inaboutie; nous n’avons donc mobilisé ces matériaux que très secondairement.
-
[6]
Ces deux auteurs proposent une quatrième catégorie, qualifiée de « double modèle professionnel (libéral ou flexible) » qui n’a guère de sens dans le contexte de la réparation automobile.
1En matière de santé au travail, les projecteurs de l’actualité se braquent régulièrement sur des évènements dramatiques survenant dans de grandes entreprises (AZF, Renault récemment) emblématiques de l’industrie moderne ou encore sur des problèmes devenus nationaux tel le « drame de l’amiante ». Ces événements précipitent des prises de conscience qui conduisent le personnel politique à « intervenir vigoureusement en transformant en décision “annonçable” ce qui est déjà largement instruit par l’administration, ce qui peut être facilement arbitré ou ce qui peut permettre une communication spectaculaire » (Henry, 2004). Il n’en a pas toujours été de même, loin s’en faut, avec les réalités du travail dans les petites et moyennes entreprises (PME) et en particulier dans les très petites entreprises (TPE), surtout si comme la restauration ou la réparation automobile, elles mènent des activités qui peuvent être conduites dans l’espace domestique.
2Pourtant c’est une banalité de dire que dans cette catégorie d’entreprises, non seulement la prévention des risques professionnels y est peu développée mais en outre ces derniers y sont plus élevés que dans les grands établissements (ainsi en PACA, en 2005, la fréquence des accidents du travail est sept fois plus élevée dans les PME de 10 à 19 salariés – cinq fois dans les TPE de 1 à 9 – que dans les entreprises de 1 500 salariés et plus): les pratiques de ces grandes entreprises y contribuent notamment par l’externalisation des risques qu’autorise la sous-traitance en cascade (Thébaud-Mony, 2007).
3Cette faiblesse de l’action préventive ressortit classiquement à une série de causes: le risque y est plus qu’ailleurs perçu comme une composante incontournable si ce n’est identitaire du métier; la conscience du danger est dépendante de la confrontation directe à un grave accident et en son absence, le statu quo paraît justifiable (Champoux, Brun, 2000); les responsabilités tendent à être rejetées sur les comportements et les attitudes individuelles; la dangerosité des équipements tend à être minimisée dès lors qu’existent des normes techniques réglementaires; le coût des accidents et arrêts de travail est largement sous-estimé (Favaro, 1999) alors qu’est fréquemment mise en avant la complexité excessive de la réglementation publique. S’y ajoutent, dans le cas français, des principes de tarification de la branche accidents du travail-maladies professionnelles de la Sécurité sociale (AT-MP) puisque la mutualisation est totale en dessous de dix salariés (Askenazy, 2004), ce qui n’est guère incitatif à investir sur la prévention.
4L’action publique tend à se préoccuper plus explicitement de cette mauvaise situation aux niveaux national et européen. Ainsi le Plan santé travail lancé en 2005 avance que les nombreuses mesures existantes, parfois à un stade expérimental, « nécessitent aujourd’hui d’être poursuivies et amplifiées pour garantir la pleine application du dispositif, notamment en direction des PME, et TPE, de façon (…) à accroître encore la culture de prévention des risques professionnels au sein de ces entreprises » (PST, 2005, p. 64). En 2004, la Commission des accidents du travail de la CNAM affirme que « la cible privilégiée des actions de prévention demeure les responsables de PME-PMI ». Dans une communication du 21 février 2007 intitulée « Améliorer la qualité et la productivité au travail: stratégie communautaire 2007-2012 pour la santé et la sécurité au travail », la Commission européenne souligne que certaines catégories d’entreprises sont plus vulnérables (« les PME, en particulier, ont moins de ressources pour mettre en place des systèmes complexes de protection des travailleurs, alors que certaines d’entre elles tendent à être davantage affectées par l’impact négatif des problèmes de santé et de sécurité »). En conséquence, les stratégies nationales sont appelées en priorité à mettre en œuvre « un ensemble d’instruments garantissant un niveau élevé de respect de la législation, notamment dans les PME et dans les secteurs à hauts risques ».
Dans ce contexte, cet article s’intéresse à une action publique d’initiative locale qui, depuis plusieurs années, s’est efforcée de favoriser le développement de la prévention des risques professionnels (PRP), notamment dans les PME, en se fondant sur l’obligation légale pour toute entreprise d’évaluer les risques et plus précisément, sur la nécessité de consigner les résultats de cette activité dans un document unique (DU), sous peine de sanctions pénales. Cette activité d’intermédiation entre des normes générales et des contextes d’applications spécifiques se nourrit de la distance initiale entre les principes civiques et industriels qui fondent les règles en jeu et des pratiques d’entreprises souvent inscrites dans un « monde domestique » fortement contraint par des pratiques inscrites dans le court terme (Salais, Storper, 1993). Dans le cadre d’une convention interprofessionnelle départementale signée le 30 octobre 2002 par les cinq centrales syndicales représentatives des salariés, l’Union pour les artisans (UPA) et l’Union pour les employeurs (UPE), ACT Méditerranée [2], l’Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), la Direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) des Alpes-Maritimes et trois associations de médecine du travail, cette action collective, impulsée en 2003 sous le nom de Tosca [3] par l’inspection du travail pour tenter de combler les carences réglementaires des entreprises en matière de prévention des risques, a rapidement privilégié les TPE (moins de 10 salariés) qui représentaient 93% des entreprises du département en 2003. Plus précisément, la finalité était double:
- d’une part, mettre à disposition des entreprises un guide pour l’élaboration du DU;
- d’autre part, enclencher une action de formation permettant aux entreprises de s’approprier la démarche.
Cette démarche recouvre des enjeux indissolublement institutionnels et cognitifs puisqu’elle vise à développer, dans un contexte qui n’y est guère favorable, « une réflexion centrée sur les conditions optimales d’émergence d’un processus “d’appropriation assistée” de démarches d’analyses et d’actions de prévention » (Favaro, 2004, p. 6).
Parmi les quatre branches initialement investies [4] par cette action, nous avons ici privilégié la réparation automobile où prévalent des conditions de travail particulièrement difficiles – activités à réaliser sous des températures avoisinant souvent les 40° C l’été et basses en hiver, port de charges, engins dangereux… dans un contexte d’intensification du travail. En outre ce secteur compte parmi les cinq qui, en France, exposent le plus leurs salariés aux produits cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR) (INRS, 2005) – par exemple, 41% des salariés sont exposés aux gaz d’échappement diesel et le risque lié à l’amiante y est plus fort que dans le BTP –; l’usage des outils vibrants y est en progression, comme l’exposition aux produits chimiques. De fait, tous les indicateurs – taux de fréquence des AT-MP, indice de fréquence, taux de gravité, indice de gravité – sont supérieurs aux résultats tous secteurs 2002 et à l’ensemble de la métallurgie (voir par exemple, Travail et sécurité, n° 5, 2005). Les accidents du travail sont liés principalement à des manutentions manuelles pour 41% d’entre eux, accidents de plain-pied pour 16%, chutes de hauteur pour 8%, chute d’outil pour 13% d’entre eux pour ne citer que les plus fréquents. Ces accidents occasionnent, dans l’ordre de fréquence, des plaies, des contusions, des lumbagos, entorses ou fractures. Les mécaniciens font partie des professions particulièrement exposées à un risque lombalgique (Inserm, 2000). Les enjeux de la prévention sont donc majeurs dans un secteur dont les employeurs se plaignent souvent des difficultés de recrutement.
Encadré 1: La démarche Tosca dans la réparation automobile
- le premier consiste à élaborer un guide d’évaluation des risques adapté aux spécificités de la profession;
- le second consiste à transférer le contenu du guide aux autres entreprises du secteur lors de réunions d’information avec la perspective plus large d’un transfert vers d’autres départements.
Les phases collectives (au début et à la fin notamment de l’action) rassemblent les entreprises tests, les inspecteurs du travail, la médecine du travail, les syndicats de salariés, les organisations professionnelles et les préventeurs qui échangent sur l’identification des dangers, les représentations du risque, les problèmes rencontrés.
Les phases individuelles reposent sur l’intervention dans l’entreprise d’un préventeur afin de recenser les risques et élaborer progressivement le document unique. Le groupe d’entreprises tests valide in fine le guide produit collectivement.
Le guide [1] ne cherche pas à prescrire mais à favoriser l’appropriation de démarches qui se veulent participatives afin de rendre les entreprises progressivement autonomes dans leur démarche évaluative et préventive. Très proche de l’esprit des textes officiels, la conception de la prévention portée par le guide consiste à rechercher les voies d’amélioration dans l’organisation du travail et pas seulement par des mesures de protection individuelles (EPI), en conformité stricte avec l’article L. 230-2 du Code du travail (réduire le risque à sa source) alors que pour beaucoup d’employeurs, la prévention se résume au port des équipements de protection individuelle; est dès lors mise en avant l’importance de l’étude du travail réel et de l’organisation du travail afin d’aboutir aux diagnostics nécessaires à la recherche de véritables solutions préventives.
6En se référant aux travaux de Favereau (1994) sur la dimension cognitive des règles et à l’analyse de l’apprentissage issu de la socioéconomie de l’innovation (Lundvall, Johnson, 1994 notamment), il s’agira de retracer comment se construisent, en matière de prévention, les capacités des acteurs et les compétences des organisations (en l’occurrence, non seulement des TPE mais aussi d’une action publique appréhendée comme une quasi-organisation). Si l’on admet que les acteurs individuels et collectifs développent constamment une activité d’interprétation des règles, législatives ou conventionnelles, de façon très générale, l’apprentissage peut être défini comme un processus d’acquisition de savoirs en vue d’améliorer la capacité à entreprendre des actions efficaces. En situation d’incertitude, ce qui est clairement le cas ici, l’apprentissage est résolument orienté vers la définition et la résolution des problèmes: ainsi l’incertitude peut être à la fois une contrainte et la source majeure de la création de nouveaux savoirs. Si l’acte d’apprentissage repose nécessairement sur des individus, néanmoins il requiert d’abord des capacités organisationnelles. En effet, l’apprentissage organisationnel a lieu si l’acquisition de nouveaux savoirs conduit à modifier les règles collectives et le comportement des entités, en l’occurrence, des TPE composées de salariés et de travailleurs indépendants. Ce processus collectif d’élaboration de compétences nouvelles est éminemment interactif et cognitif; en outre, il est profondément lié à la construction sociale des acteurs.
Cet article privilégie le point de vue et les pratiques des dirigeants d’entreprise [5]. La première partie, centrée sur le déroulement de l’action collective, fait ressortir que les effets d’apprentissage pour les dirigeants sont fortement liés à l’intensité de l’intervention dans l’entreprise. Il reste que les capacités d’appropriation d’une démarche préventive sont très dépendantes des types d’entreprise concernés.
La mise en œuvre de l’action collective en matière de prévention: quels apprentissages collectifs?
7Plusieurs registres sont en cause. Le premier tient à la légitimation de la démarche préventive. Le deuxième renvoie à l’efficacité de l’instrument privilégié qu’est le guide d’élaboration du document unique sur les risques professionnels. Le troisième tient aux représentations dominantes quant aux responsabilités en cas d’accident.
L’enjeu préliminaire: légitimer par la pratique, la prévention des risques professionnels en tant qu’investissement
8L’enquête notamment dans son volet institutionnel fait ressortir à quel point la légitimation de la prévention ne va pas de soi. Non seulement, des représentations bien ancrées de la norme ne vont pas dans ce sens mais en outre les conditions d’exercice tracent un contexte peu favorable à une appropriation positive des normes. Avec l’appui des pouvoirs publics, les organisations professionnelles cherchent à faire émerger un référentiel d’action partagé par les chefs d’entreprise de telle sorte que celles-ci « appréhendent la prévention non pas comme une contrainte supplémentaire mais comme un investissement. Si on ne suscite pas à l’employeur l’envie de faire plus de prévention, on n’avance pas. Si on présente cela comme une obligation supplémentaire on perd tout (…) Il faut leur montrer l’aspect “investissement” de la prévention. » (Responsable patronal).
Encadré 2: Méthode d’enquête
L’enquête repose sur différents instruments:
- Des entretiens semi-directifs (54) auprès:
- Des acteurs institutionnels responsables de l’action collective Tosca: dirigeants et inspecteurs du travail de la DDTEFP, responsables des syndicats de salariés et patronaux.
- Des entreprises à travers trois vagues d’enquêtes:
- la première portait sur des entreprises ayant été impliquées dans l’élaboration du guide de prévention des risques;
- la deuxième sur des entreprises qui ont participé à des réunions d’information sur l’usage du guide;
- la troisième a concerné des entreprises qui n’ont pas participé à l’action collective.
Au total, nous avons interrogé 25 personnes dans treize entreprises: dans tous les cas, le dirigeant de l’entreprise et dans la mesure du possible au moins un salarié (dans onze entreprises seulement), dans des conditions hétérogènes, en raison du temps très variable qu’ils pouvaient dégager durant leur travail mais également en raison des interrogations et peut-être des craintes que suscitaient cette enquête auprès des employeurs.
- Des acteurs intermédiaires: médecins du travail, consultants qui ont travaillé avec les entreprises.
- La participation à différentes réunions institutionnelles: à celles du comité de pilotage de l’action collective ainsi qu’aux Assises de la prévention (octobre-décembre 2006, janvier 2007) lors desquelles a été présenté l’état d’avancement de Tosca.
- Une analyse documentaire de différents types de textes: comptes rendus de réunions des séances de travail des réseaux; documents de prévention réalisés (par les acteurs de l’entreprise; par les organisations professionnelles; par l’État).
9À cet égard, le chemin à parcourir est perçu par les responsables patronaux comme particulièrement difficile. En effet l’action « planificatrice » (Thévenot, 2006), que suppose la mise en œuvre de la prévention, se heurte à des contraintes et à des logiques qui en contrebattent les fondements:
- La première, très classique dans le monde des TPE, tient à la forte inclination des artisans chefs d’entreprise vers des comportements de court terme. Ils rencontrent de grandes difficultés à s’engager dans une logique de prévention qui appelle une planification de l’action, et ce d’autant plus que « les petits patrons n’ont pas de bonnes connaissances en gestion »; or il s’avère souvent que les comptables sur lesquels ils s‘appuient « ne font pas leur devoir de conseil, ils se contentent de déposer leurs bilans et leurs comptes en temps et en heure. “C’est la pire des professions !” Elle ne joue pas le grand rôle qu’elle aurait pu jouer. Ils sont donc incapables de produire les repères collectifs minimaux » d’autant qu’« ils véhiculent des visions à courte vue alors que l’on peut apprendre à développer une vision positive de l’investissement dans la prévention des risques. » (Responsable patronal).
- De ce fait, la prévention tend à être assimilée aux seuls coûts immédiats engendrés par la mise aux normes; il en résulte que si « on n’a pas les moyens de suivre financièrement, (…), la prévention est perçue comme une contrainte pénalisante » (autre responsable patronal) pour l’exercice d’un métier fondé peu ou prou sur des règles coutumières.
- Une troisième raison tient à un rejet de ce qui est perçu comme une sorte d’inflation réglementaire qui engendrerait une course sans fin:
11Le cumul de ces difficultés nourrit « chez pas mal de professionnels une politique de l’autruche en matière de PRP » inscrite, plus fondamentalement dans une délégitimation de la réglementation publique.
12Pour y faire face, une attitude formaliste et stratégique consiste à recourir aux prestations d’intervenants extérieurs, censés réaliser des check-up de l’organisation mais qui, en réalité, ont pour véritable mission de protéger formellement les chefs d’entreprise de la mise en cause de leur responsabilité pénale. Aux dires même d’un responsable professionnel:
13« C’est souvent un remède pire que le mal. Les obligations sont formellement remplies mais cela n’a aucun sens: il n’y a aucune réflexion de la part tant des employeurs que des salariés ». De facto il s’agit de procédures préétablies: « On change le nom [de l’entreprise] et c’est tout. Aujourd’hui même pas 10% des entreprises ont un DU fait, et parmi ces 10%, 9% l’ont fait faire par un intervenant extérieur. Toujours pour la même raison: ils n’ont pas le temps de le faire. Donc ils préfèrent payer et le font faire et mettent ça dans un coin. Et en plus ça n’amène rien à l’entreprise. Et avec ça ils ne sont même pas en règle car l’inspection se rend vite compte qu’ils ne l’ont même pas lu. » (Ibid.)
En l’espèce, de tels comportements « court termistes » ou opportunistes exposent l’action collective à un risque permanent de décrédibilisations ou de dévoiement de la démarche engagée autour du guide.
Portée et limites d’une gouvernance par l’instrument (le guide)
14Les modalités d’action empruntent à deux registres fortement différenciés: l’un – la phase de test dans un nombre restreint d’entreprises qui déboucha sur la mise au point du guide – relève d’une expérimentation fondée sur une action relativement intense; l’autre de diffusion – les réunions d’informations sur le guide – touche a priori une population beaucoup plus conséquente. L’articulation entre ces deux phases – la mobilisation de l’expérience et la formalisation de celle-ci dans un outil collectif – vise à limiter les inconvénients habituels des actions standardisées et extensives liés à la distance entre experts concepteurs et utilisateurs diffus d’un guide (Favaro, 2004) venu de l’extérieur du territoire d’usage. L’évaluation du processus réalisée par les responsables professionnels a engendré un apprentissage collectif qui s’est lui-même concrétisé dans un nouveau dispositif.
L’effet levier de l’intervention d’un consultant
15Indéniablement, les entreprises parties prenantes du test – qui ont, à ce titre, bénéficié du passage durant une demi-journée puis du diagnostic d’un consultant – ont dans l’ensemble, retiré de cette phase des leçons favorables au développement d’une véritable évaluation des risques professionnels (voir tableau en annexe). Cependant si ces apprentissages légitiment les principes généraux de la prévention, ils ne s’avèrent pas suffisants pour être convertis en une règle capable d’institutionnaliser durablement la prévention dans ces entreprises. Les apports de cette participation directe à l’élaboration du guide résultent de trois étapes distinctes:
- L’intervention des consultants impulse une réflexion collective sur les risques présents dans l’entreprise, comme en témoigne l’exemple suivant, donné par le patron d’une carrosserie:
« Au départ on a dû réfléchir à tous les points en rapport aux risques. On a fait une chronologie de l’arrivée jusqu’à la sortie du client. Le travail, les déplacements, et imaginer tous les risques. Et réfléchir dessus, en salle. Ensuite on a essayé chacun de creuser et ensuite des consultants sont venus dans l’entreprise. Lors des réunions on était une dizaine. Les salariés ne sont pas venus. C’était pour former et proposer ensuite concrètement des choses aux autres garages. Mais moi j’en parlais aux salariés. Ils étaient contents. Cela a permis de nous faire réfléchir sur des risques, des dangers auxquels on n’avait même pas pensé. En échangeant lors des réunions. Tiens là il faudrait faire quelque chose… Par exemple ne pas laisser le client rentrer dans le garage avec sa voiture pour qu’il ne blesse pas quelqu’un. Un consultant est venu, seul, une demi-journée. Il était génial, très intéressant. » - La mise en œuvre du guide incite à analyser l’organisation du travail dans son ensemble et à dépasser les approches intuitives des risques fondées par exemple sur le repérage visuel des anomalies et autres situations de travail manifestement problématiques:
« Mais ce livret éveille sur des choses toutes simples. Par exemple boucher les trous dans la cour qu’il y avait depuis des années. C’est tout bête mais bon. Après les choses où il y a un investissement monstrueux. Mais bon, ça prouve que malgré tout il faut chercher les moindres choses qui paraissent au départ insignifiantes et qui en fait sont un risque… On s’en rend compte après: tiens là on avait un risque, on n’a jamais eu de problème mais bon… une installation, une disposition… mettre les objets à tel endroit… ça évite aussi des fatigues inutiles… » (Patron d’un garage de mécanique multimarques). - Les recommandations des consultants favorisent une plus juste appréhension des risques résultant d’expositions régulières, parfois quotidiennes, mais perçues comme anodines:
« Jusqu’alors, la question des risques n’était abordée que très ponctuellement, à propos de telle ou telle tâche. Il est indéniable que l’expérimentation m’a ouvert sur les risques résultant de pratiques de long terme qui peuvent exposer à des risques du type TMS. » (Patron d’un garage de mécanique multimarques).
16« Dans des entreprises tests, Act Med et la médecine du travail sont restés à parler longuement avec les salariés. Mais à partir de ces réunions informelles dans l’atelier, ils ont mis plus souvent les gants de protection (…). Les intervenants ont été très pertinents dans leur domaine. » (Patron carrossier et responsable syndical).
17De même le mécanicien d’un agent franchisé a pris conscience, en cette occasion, de risques et de moyens de prévention qu’il ne connaissait pas: « les antidérapants sur les ponts et la barrière de sécurité devant l’accès à la partie basse de l’atelier, cela date de cet épisode ». Ceci dit, ce mécanicien souligne qu’il n’y a eu aucun retour organisé vers les salariés des résultats de ce test, ce qui est d’ailleurs, plus largement, reconnu par les chefs d’entreprise. Il est symptomatique que ce salarié ainsi motivé à l’égard de la démarche préventive n’avait jamais vu le guide dont l’examen engendra toutefois une réaction plutôt favorable.
18Enfin l’ancrage durable de l’évaluation et de la prévention dans l’organisation des entreprises s’est avéré pour le moins incertain, compte tenu de la nécessité réglementaire d’actualiser le DU en cas de changement technique, organisationnel ou gestionnaire. Anticipant cette récurrence, certains patrons, surtout si leur gestion était peu formalisée, n’ont même pas été jusqu’au bout de l’élaboration du document unique:
19« Par définition, le document unique n’est pas parfait, toujours à reprendre. En outre, l’introduction d’une nouvelle machine doit donner lieu à une modification du document (…). Tout cela est assez dissuasif et renforce l’idée qu’il vaut mieux, pour un artisan, se passer de l’embauche d’un salarié plutôt que d’exposer sa responsabilité. » (Garage multimarques qui ne compte qu’un apprenti).
Sans actualisation régulière, l’évaluation des risques sombre fatalement dans un formalisme bien éloigné de l’exercice d’une véritable responsabilité gestionnaire.
Faible appropriation du guide méthodologique à l’issue des réunions d’information collective
20Il ressort de cette expérience que l’appropriation durable de cette méthode par les artisans et leurs employés requiert un service d’accompagnement et de suivi, d’autant qu’une fois que l’on en a compris l’économie, le guide s’avère facile à mettre en œuvre pour les employeurs:
21« Le guide de Tosca, je le trouve très bien, le problème c’est que le guide donné sans explication ça sert à rien. Donc on prévoit des accompagnements sur site, avec des consultants, qui vont sensibiliser le professionnel avec l’aide du guide ». Or « l’accompagnement n’a eu lieu que pour les entreprises tests, et même pour elles, il a manqué une journée d’intervention. » (Président d’un syndicat professionnel).
22Les limites de la démultiplication qu’a constituée la mise sur pied de réunions collectives destinées à présenter le guide méthodologique aux entreprises sont patentes, sur un plan tant quantitatif que qualitatif:
- ces réunions n’ont touché qu’un nombre limité de professionnels – une cinquantaine par réunion collective – soit entre 100 et 150 professionnels sur un total de plus de 1 300 établissements dans le département des Alpes-Maritimes;
- en outre, « le problème des artisans, c’est qu’ils n’osent pas dire quand ils ne comprennent pas. Ils auraient dû exprimer leur souci à ce moment-là. Ils parlent de décalage, mais ça veut dire qu’en fait ils avaient besoin de plus d’explication ! » (Ibid.). Le faible impact d’une démarche essentiellement informative n’en est que plus ressorti;
- le manque de dialogue entre garages fait qu’il n’émerge pas, pour l’instant pas de « communautés de pratiques » autour de cet enjeu qu’est la PRP: pour la gérante d’une carrosserie – fort active par ailleurs –, « les garages fonctionnent “dans leur coin”, et il n’y a pas de dialogue concernant la sécurité et les risques ».
Un apprentissage institutionnel: de l’expérience à la règle de gestion
23Un responsable patronal s’est rapproché de la chambre des métiers, dont l’aptitude à construire des médiations institutionnelles adaptées aux particularités des TPE artisanales, est manifestement reconnue parmi les petits employeurs. Grâce à la mobilisation de crédits du Fonds social européen (FSE), a été mis sur pied un dispositif d’appui-conseil en matière de prévention des risques professionnels et de protection de l’environnement, d’une durée de cinq jours par entreprise. Le but de ces formations-actions était de sensibiliser aux divers types de risques, de rédiger le document unique et d’insérer la prévention dans les règles de gestion. Les grands thèmes abordés ont trait à la gestion des déchets et à la prévention des risques tandis qu’est offert en outre un petit module sur l’assurance (responsabilité civile de l’entreprise). Sur ces trois volets, des cours par groupe de dix employeurs ont été dispensés puis les consultants sont venus dans l’entreprise pour stimuler la mise en application de ce qui avait été transmis lors des cours. La somme versée par l’entreprise de 650 euros, est assez modique vis-à-vis des crédits consommés par la chambre des métiers, de l’ordre de 4 500 euros par entreprise.
24Dans la limite des places, le projet – encore en cours – a été proposé aux 1 200 entreprises du département, 58 y participent. À la fin de l’action, l’entreprise est appelée à aller au-delà de la rédaction du DU pour déboucher sur le montage d’un plan d’action concret, destiné à installer durablement l’évaluation et la prévention des risques dans l’entreprise. Cette démarche est certes un gros investissement procédural initial mais ensuite la mise à jour doit devenir beaucoup moins lourde à la condition que soit inscrite dans les faits qu’il « s’agit d’un document pour votre entreprise et non pas pour satisfaire la législation, (…). Il faut que le guide soit compris comme un outil de management » (consultante). Il est encore trop tôt pour juger de la portée d’un dispositif manifestement plus approfondi que l’action Tosca mais on peut noter que l’association des salariés à la démarche reste seconde; or sans développement d’un management participatif, l’inscription de l’évaluation et de la prévention des risques dans l’organisation reste a priori assez aléatoire, ne serait-ce qu’en raison de la persistance de représentations sociales des risques centrées peu ou prou sur les comportements individuels.
La prévention des risques professionnels, une affaire de conduite individuelle?
25Comme on l’a vu, la démarche d’intervention directe dans l’entreprise engendre souvent, de la part des employeurs, une prise de conscience de l’exposition des salariés à des risques fortement négligés jusqu’alors, en raison de leur inscription dans la régulation organisationnelle ou de conséquences envisageables que sur le moyen-long terme. Il reste que la tentation classique d’associer les risques prioritairement aux comportements des salariés est toujours présente (Eakin, 1992). Cette tentation est d’autant plus forte que ces employeurs intègrent souvent les dangers comme une composante à part entière de la norme professionnelle: ainsi un patron, pourtant sensible aux enjeux de la prévention, raconte qu’il a eu de nombreux problèmes de santé, « mais ça, c’est le métier, on peut pas y couper (…) les hommes on est con, on se soigne pas tout de suite, on s’arrête pas quand on devrait s’arrêter et ensuite on est très mal (…). J’ai des problèmes de dos, mais c’est un travail manuel, même avec tout l’équipement de la terre, c’est le boulot, on ne peut pas y couper ».
26Dès lors, il n’est pas étonnant qu’ils insistent sur la « résistance » dont feraient preuve les jeunes salariés à l’égard de l’adoption de comportements préventifs, malgré des mises en gardes réitérées:
27« La perception des risques: il y en a une, par moi, le médecin du travail qui vient (avant une fois par an, maintenant une fois par semestre). Le problème c’est que par exemple ils ne mettent pas les casques antibruit. Les gants par contre ils les mettent. » (Patron d’une carrosserie).
28Il est alors ajouté que le fait de privilégier la protection des mains est directement lié au souci de préserver son apparence quotidienne immédiate. Pourtant derrière les comportements individuels, dans les dires de ces mêmes employeurs, on voit poindre des causes qui ont trait au rythme et à l’organisation du travail ou, plus précisément, à la manière dont les jeunes salariés tentent de s’en accommoder ou de se les approprier individuellement pour essayer de les rendre compatibles avec leurs conceptions de la vie au travail.
29Ainsi, d’un côté, un patron d’un garage multimarques estime que « dans le cas des jeunes, le comportement est également profondément décalé vis-à-vis des exigences posées par la prévention des risques: le jeune, il travaille “à l’arrache”; s’il est concentré sur son objet, il pourra s’entourer de nombreux outils sans se préoccuper de leurs positionnements respectifs au point de ne pas pouvoir bouger sans risquer de chuter ».
30De l’autre, il met en avant le fait que « le temps alloué par les experts des assurances est de plus en plus faible. Ils ne se rendent pas compte du rythme exigé sur les salariés. Nous, on est des intermédiaires, on ne peut pas y faire grand-chose. On essaye d’obtenir le plus possible des gens. Il y a des temps de réparation à respecter trop exigeants. Nous, on est donc obligé de stimuler les salariés à aller toujours plus vite ».
31En outre et d’une manière quasi unanime, les conditions thermiques d’exercice du métier dessinent un contexte de travail marqué, aux yeux de tous, par une pénibilité souvent très forte dans les petits établissements, durant certaines périodes hivernales et estivales. Cette situation atteste d’une forte différence vis-à-vis des conditions de travail dans les grands garages:
32« Là où l’on est en décalage flagrant vis-à-vis de la législation: il fait parfois trop froid en hiver – pas moins de 15° légalement alors que le matin, il peut faire pas plus de 8°, c’est un peu juste – et trop chaud l’été, comme cette année en juillet. Le nouveau grand garage Renault de Cannes est aux normes grâce à la climatisation et cela est certainement rentable grâce aux gains de productivité réalisés. Mais l’équivalent est trop coûteux pour un garage artisanal comme celui-ci. » (Garage cannois, six emplois).
Il est évident que les conditions parfois extrêmes dans lesquelles travaillent les mécaniciens ou les carrossiers les rendent plus vulnérables, en raison d’une fatigue alors générale, aux risques « classiques » de la profession, du moins tels qu’ils sont présentés par les chefs d’entreprise, ou encore incitent les ouvriers à ne pas respecter les consignes relatives à tel équipement de protection individuelle. Par-delà cette généralité, les conditions d’appropriation des règles préventives varient sensiblement d’un type de TPE à l’autre et justifient des interventions externes adaptées aux différents profils d’entreprises.
Trois modèles types de TPE face à la prévention des risques professionnels
33Compte tenu de leur hétérogénéité, toutes les TPE de ce secteur ne disposent pas d’une égale capacité à faire face aux nouveaux enjeux, notamment en matière de conditions de travail et d’emploi. En effet coexistent dans ce secteur de la réparation automobile des modèles de très petites entreprises sensiblement différents les uns des autres. En s’inspirant des travaux de Bentabet et alii (1999) et de Letowski et Trouvé (2004) [6], on peut identifier trois configurations idéal-typiques qui dessinent des relations à la main-d’œuvre spécifiques et au-delà, aux normes légales en matière de préventions des risques professionnels:
- la TPE « indépendante » et traditionnelle, se rapprochant du modèle du métier artisanal qui, en l’occurrence, correspondra souvent à de la réparation mécanique multimarques avec un salarié (souvent apprenti dans un premier temps);
- à l’opposé, la TPE « managériale » aura un mode de gestion de nature plus industrielle, fournissant des prestations de service standardisées: la figure type en sera l’agent d’une grande marque, dont la gestion comptable et la politique de prix seront fortement intégrées à celle du réseau structuré par le constructeur, qui mettra en œuvre des outils de travail – des bans électroniques – de ce même constructeur et comptera un effectif de plusieurs salariés plus fortement spécialisés sur telle ou telle tâche;
- enfin la TPE « entrepreneuriale » conserve l’indépendance du premier type et sera multimarques, qu’il s’agisse d’un carrossier ou d’un réparateur en mécanique, mais s’appuiera sur une haute maîtrise technique et des prestations annexes de qualité (en terme de délais et de mise à disposition de véhicules, par exemple) pour fidéliser sa clientèle malgré des tarifs plus élevés que ceux des néospécialistes et des agents: l’innovation de produit-service est une ressource clé dans cette configuration.
On peut faire l’hypothèse que plus l’entreprise s’apparente au modèle de l’entreprise indépendante traditionnelle, plus elle met à distance la prévention. À l’inverse, les entreprises qui se rapprochent le plus de la gestion formalisée des grandes entreprises réuniront davantage les conditions nécessaires à la mise en place de la prévention que les autres, en raison de plus fortes capacités de « planification » que requiert une prévention active. Adossé aux normes du réseau constructeur, l’agent de marque, figure type du modèle managérial, pourrait être celui qui s’inscrit le plus facilement dans une logique de mesure, de contrôle des processus et d’objectivation des problèmes techniques et gestionnaires, qui prédispose à la mise en œuvre de la prévention. Ceci dit, la valorisation des qualifications professionnelles des salariés et la recherche de qualité dans les prestations qui caractérisent la TPE entrepreneuriale, devraient favoriser l’appropriation de la démarche préventive et la capacité à assurer la maintenance du document unique. Dans les faits, chaque établissement est, à un moment donné, un dispositif composite (Thévenot, 1993) entre ces modèles mais dont l’un prédomine du point de vue de la gestion et de l’organisation. Cette typologie est pour partie au moins indépendante de l’action collective dans la mesure où les trois types se retrouvent parmi les entreprises de la phase test comme dans celles des réunions collectives et celles du « troisième cercle » (voir tableau annexé).
Le modèle de l’entreprise indépendante: la norme de prévention des risques mise à distance
35Cette configuration est fortement marquée par des relations de nature domestique ou de proximité avec les clients et les (éventuels) collaborateurs. Dans l’un des deux cas emblématiques de cette configuration, il s’agit d’un garage de réparation mécanique multimarques, qui rencontre des difficultés d’organisation, compte tenu des spécificités croissantes des constructeurs, notamment en terme électronique. L’unique salarié est un apprenti qui n’est autre que le frère du patron. La clientèle est locale et son attachement est fondé sur une relation de confiance. Ce cas est d’autant plus intéressant qu’il s’agit d’un employeur assez fortement investi dans son organisation professionnelle, ce qui l’a conduit à participer au test. L’autre entreprise provient d’un univers différent puisqu’il s’agit d’un garage de réparation mécanique rattachée au réseau Citroën mais qui était en passe de perdre son agrément constructeur après un déclin de plusieurs années, consécutif au décès du patron. À l’heure actuelle, la TPE, gérée par la femme et la fille de ce dernier qui ne sont pas affiliées à un syndicat professionnel, ne compte plus qu’un mécanicien à temps plein.
36Ces différences de trajectoire dessinent une relation différente à l’enjeu qu’est la prévention des risques professionnels même si en pratique, les situations ne sont guère éloignées compte tenu de leur caractère commun, artisanal et familial. Dans la première, le travail des consultants a fonctionné comme un révélateur de ce qu’il faudrait faire mais le processus reste largement inabouti. Dans la seconde, il s’agit avant tout de se protéger d’une mise en jeu de sa responsabilité juridique.
- Dans le garage multimarques, l’élaboration du document unique a été engagée sur les risques mais elle n’est pas achevée. Son élaboration est en effet perçue comme étant un investissement très lourd: « Pour une entreprise artisanale, c’est trop, compte tenu de la mise en place des 35 heures et du traitement durable des déchets ».
C’est d’autant plus le cas si le diagnostic préventif doit se traduire par des investissements afin de satisfaire les exigences légales:
« Si ça a un coût, des crédits, des endettements… par contre si l’amélioration peut être faite par nous, sans frais… moi j’estimais aussi que si le salarié était mieux dans son travail, il travaillait mieux, alors il fallait le faire à fond… on avait cet état d’esprit: on demandait le maximum en donnant, nous, aussi. »
Cependant le test a été l’occasion d’initier une démarche formalisée d’analyse des risques. Jusqu’alors, ce n’était qu’une question très ponctuellement abordée à propos de telle ou telle tâche. Il est indéniable que l’expérimentation a ouvert le patron sur les risques inscrits dans des pratiques de long terme, du type TMS. Pour ce qui est des postures dangereuses, chacun tente de faire systématiquement attention, notamment en cas de travail sur une boîte de vitesse. L’apport de la démarche est indéniable, en particulier à propos de la manipulation de produits dangereux: auparavant l’intéressé ne portait jamais de gants de protection. - Dans le garage encore franchisé Citroën au moment de l’enquête, suite à la visite de la médecine du travail en 2004, la fille de l’ex-patron a tenté de faire elle-même le DU mais un ingénieur de la prévention routière, qui les suit dans le cadre de Citroën, lui a conseillé d’aller voir un ingénieur d’une association de prévention routière. Connaissant bien l’entreprise, il l’a aidée initialement avant de la renvoyer vers un consultant, qui a fait le travail par téléphone: il s’est agi de répondre à quelques questions puis le DU lui a été envoyé en 2006 moyennant un coût de 300 euros. Depuis lors, il n’a pas été révisé. Cette approche formaliste de la prévention trouve son prolongement dans le fait qu’avec le salarié, les deux gérantes n’ont jamais de discussion sur les conditions de travail ni sur la santé:
« Pas d’accident, pas de problème de santé. Des petits bobos comme tout le monde. Pas de grosses choses. On ne discute pas de problèmes de santé ni de conditions de travail (…). Ce que j’en pense du DU? On a un tout petit garage vous savez ».
La TPE entrepreneuriale ou la fidélisation par la qualité (des conditions de travail)
37S’attacher ses clients et sa main-d’œuvre qualifiée est le moyen privilégié pour réduire les incertitudes résultant des conditions de fonctionnement d’un marché de plus en plus concurrentiel. Ce principe constitutif dessine un rapport aux normes de PRP qui tend à s’inscrire dans la durée. Il est symptomatique que l’entreprise qui, dans l’échantillon, se rapproche le plus du modèle idéal-typique, ait pour dirigeant un titulaire d’un bac technique qui a été, en tant que fonctionnaire, coopérant en Afrique et dont le père était expert-comptable. En outre, comme les gérants des autres entreprises qui – à un titre moindre – se rapprochent aussi de ce modèle, cet employeur est investi dans le syndicat professionnel, pour en être devenu, dans son cas, une véritable figure de proue.
Fidélisation de la clientèle
38La qualité de la prestation est destinée à attirer les « déçus » des pratiques à bas prix des « néospécialistes ». Dans ce type d’entreprise, le positionnement est construit et promu envers la clientèle sur le principe d’une qualité relationnelle, qui se manifeste par la volonté de faciliter la vie d’un client pénalisé par l’immobilisation de sa voiture, notamment grâce à une mise à disposition systématique de véhicules de remplacement (le dirigeant de l’une des entreprises enquêtées a été le premier à offrir ce service dans le département des Alpes-Maritimes):
« Être très à cheval sur la qualité de la prestation, une certaine agressivité commerciale, aller présenter le service. Fidéliser la clientèle. C’est notre force par rapport aux néospécialistes. Quand les gens se rendent compte de la qualité des néospécialistes, ils ne veulent plus y aller. Dans ces néospécialistes ils ont des gens non compétents, parfois même pas du métier… j’ai vu des choses ahurissantes. Eux n’ont aucune fidélité de la clientèle. Moi j’ai des clients depuis que j’ai commencé. Ils viennent pour beaucoup de choses, ils me demandent conseil… c’est l’avantage de l’indépendant, on a la proximité avec le client. Dans les concessions le client a un numéro et c’est tout. C’est le relationnel, le contact, l’accueil, c’est ça qui fait la différence. » (Carrossier).
Fidélisation du personnel et investissement sur les qualifications
39En cohérence avec la dimension précédente, l’investissement sur la main-d’œuvre et ses qualifications est une règle de gestion bien établie:
40« Je prends des apprentis qui poursuivent dans l’entreprise, je fais de la formation en interne (…). Ici ils rentrent pratiquement tous comme apprentis. Ensuite ils sont CDI à temps plein, 39 heures ».
41Cette configuration en terme de mini-marché interne du travail témoigne de l’importance du lien direct, quasi-domestique, avec des salariés dont il est beaucoup attendu sur le plan technique et commercial mais dont les qualifications sont reconnues afin notamment de fidéliser ce personnel: « Chez moi aucun turnover. Personne ne part, ils ne doivent pas être trop mal. Quand j’embauche quelqu’un, y compris un apprenti, soit il s’en va avant la limite des deux mois car il n’a pas envie de travailler, de progresser, sinon quelqu’un qui veut apprendre il reste et ensuite je lui fais faire une mention complémentaire, en fonction aussi de son niveau de base. » (Ibid.)
42De ce fait, le recrutement externe est limité aux créations d’emploi et aux remplacements en cas de départ, notamment à la retraite. Dans ces circonstances, le patron se détourne de salariés candidats qui ont construit leur expérience dans les garages aux processus les plus standardisés – ce qui inclut le personnel des concessionnaires:
43« On ne fait pratiquement pas de recrutement externe, car j’ai été très déçu et mécontent de la formation qu’ils ont. Souvent en concession. Le problème des concessions, c’est qu’on les met, par exemple à Renault Minute, et ils font toujours la même chose (changement des plaquettes de freins) et pas de diagnostic. Donc ils n’ont pas de capacité de diagnostic, ce ne sont pas des mécanos, des professionnels. » (Ibid.)
Ceci dit, la fidélisation du personnel n’est jamais définitivement acquise dans un secteur où prévalent des logiques de marché professionnel.
L’investissement sur la qualité de vie au travail: levier de performance économique
44En continuité avec les autres facettes de cette configuration, l’entreprise s’efforce d’améliorer les conditions de travail et fait très clairement de la prévention des risques un « investissement » profitable à l’entreprise sur le moyen terme:
45« Pénibilité: chez moi, et ça a plu à Act Med’, tous les postes sont équipés d’élévateurs ou de ponts. Je les change souvent, j’ai des contrôles Socotec. Moi j’en ai tellement bavé quand j’étais jeune… On gagne du temps, mais c’est plus pour le confort dans le travail. Mais ça va ensemble, et c’est ce que j’avais voulu montrer et convaincre mes confrères dans la réunion générale pour Tosca: il y a un retour à l’investissement très rapide dans la prévention. On y gagne sur beaucoup de domaines, il y a moins de lumbago, d’arrêt de travail… » (Carrossier).
46Dans une autre entreprise, la gestionnaire a évoqué son grand intérêt pour la prévention et a fait part de sa prise en compte effective du problème lié aux expositions aux risques dans le métier des deux roues. Selon elle, l’investissement dans du matériel de prévention est perçu comme un levier de performance économique pour l’entreprise. La gérante dit « discuter avec les salariés de leurs besoins » pour ensuite acheter le matériel. Cette dynamique est clairement perçue par des salariés, ainsi d’autant plus enclins à rester fidèle à leurs entreprises et à renforcer leurs compétences, tel ce salarié qui a choisi de rejoindre son employeur actuel pour ses conditions de travail jugées meilleures que dans les autres garages: « C’est une entreprise structurée. Le salaire, les conditions de travail, l’ambiance est meilleure qu’ailleurs. »
47Sur un plan plus formel, le document unique (DU) a été achevé. Dans ce cas, comme d’ailleurs dans les deux autres (carrossier d’une part, carrosserie-peinture), le DU n’est pas utilisé au quotidien et n’échappe pas à un certain formalisme. Mais « on en a parlé ensemble ». Le DU a « pris du temps à faire ». Mais il a permis « de faire un pas » vers plus de prévention, ce qui n’empêchera pas l’interlocuteur de déclarer promptement que le guide a été élaboré initialement « purement pour la réglementation ». Cette ambivalence n’empêche pas que le guide ait d’abord été utilisé en vue d’améliorer les conditions de travail et non pas d’emblée pour l’évaluation des risques. Il reste que cette implication « nous a fait prendre un peu plus conscience qu’il y avait un risque car avant on ne se posait pas la question » nécessaire.
48Malgré son caractère obligatoire, ce DU a été considéré comme un document finalement utile. De cette évolution en forme d’apprentissage, ressort l’idée que, pour certaines TPE, la meilleure compréhension de la contrainte réglementaire a fait de cette dernière le moteur d’une démarche préventive plus ou moins dynamique toutefois: dans l’atelier de carrosserie-peinture, le patron ne retrouve plus son DU:
49« C’est sa fille qui range et elle n’est pas là. C’était bien fait mais ne l’a pas retouché depuis quatre ans (ni à nouvelle embauche, ni chaque année). C’est normal qu’on fasse un DU, qu’on fasse attention aux gens qui travaillent. Le patron, c’est pas le tsar. Logique. Après c’est suivant les possibilités de l’entreprise qu’on peut faire ou pas ».
Deux caractéristiques importantes doivent être soulignées ici: ce modèle de TPE caractérise tout d’abord des entreprises en bonne santé économique (la contrainte financière pèse moins sur l’investissement), ce qui est évidemment un atout pour l’évaluation et la prévention des risques professionnels (ARACT Languedoc Roussillon, 2005). Ensuite, ces trois entreprises comptent parmi les plus importantes en taille – notamment du fait de leur implication dans la formation par apprentissage – et s’inscrivent dans une temporalité économique plus longue. Les dirigeants ont pu alors prendre du temps pour chercher à s’approprier progressivement les logiques de la prévention.
La TPE « managériale »: la prévention, norme de gestion encore faible
50La nécessité de s’ajuster à des standards de référence qui, pour des agents de marque, proviendront le plus souvent du constructeur, témoigne de la prégnance d’une gestion formalisée qui rend a priori plus aisée l’ajustement aux normes légales. Ceci dit, dans les cas rencontrés lors de cette première phase de l’enquête, aucune entreprise ne correspondait strictement à ce modèle. Celles qui s’en rapprochaient étaient fortement marquées par le modèle de l’artisan indépendant, tel cet agent d’une grande marque, en partance à la retraite, qui dirigeait ce garage de mécanique automobile avec ses deux frères et comptait, parmi ses cinq salariés, un neveu technicien breveté constructeur et une nièce qui assure la gestion administrative et commerciale dans l’entreprise.
Inscription dans un réseau technique et fidélisation de la clientèle
51Depuis une dizaine d’années, la mécanique automobile est confrontée à une révolution technique qui est celle de l’électronique embarquée et à laquelle s’est ajustée l’entreprise mais pas par l’intervention directe des gérants: « les vieux comme moi ne touchent pas les nouvelles voitures », sur lesquelles, en vue de réaliser les diagnostics, il faut travailler avec un ordinateur. Ces tâches sont donc totalement déléguées aux plus jeunes et en particulier, au neveu du chef d’entreprise, détenteur d’une certification constructeur de « coordonnateur technique mécanicien » acquise à l’issue d’une formation par alternance centrée sur les diagnostics et les conseils en matière électronique.
La clientèle est avant tout locale et fidélisée par une relation de confiance dans un marché qui tend à rétrécir. Dans ce contexte, les constructeurs et leurs réseaux proposent des prestations standardisées qui visent à drainer vers eux une partie de la clientèle traditionnelle des garages artisanaux – ce qu’était originellement cet établissement –. C’est l’excellence des diagnostics techniques qui est censée fidéliser le client.
Légitimité de la norme en matière de PRP mais difficulté d’application
- Tel chef d’entreprise, en contact régulier avec son syndicat professionnel – qui regroupe concessionnaires et agents – s’est engagé dans l’expérience, avec d’autant plus d’intérêt et de « curiosité » qu’il était de longue date sensibilisé à la question des risques. Il reconnaît d’ailleurs que désormais, il se préoccupe plus régulièrement de ces enjeux; il a d’ailleurs été conduit, dans le temps de la phase test à mettre en place des enrouleurs afin d’éviter que les outils de travail ne traînent dans l’atelier et exposent ainsi à des risques de chute. Il aurait en outre souhaité que les salariés soient plus impliqués dans le processus afin qu’ils s’approprient réellement des règles, souvent rappelées par le patron mais pas toujours mises en œuvre: de fait, l’enjeu de la prévention reste fortement associé à la bonne utilisation du matériel de sécurité par les salariés.
Malgré la qualité du guide, la procédure est perçue comme « trop lourde et ambitieuse pour des TPE qui sont prises dans le souci de leur quotidien (…). C’est bien fait, mais c’est très complexe ». D’ailleurs, sans accompagnement, il aurait été très difficile de remplir les grilles et malgré cela, l’élaboration du document unique n’a jamais été menée à son terme. En outre, cet agent fait part de son incapacité à mettre aux normes les conditions thermiques de travail, contrairement à ce qui a pu être réalisé chez le grand concessionnaire du même constructeur dans la même ville.
Plus généralement, cet établissement rencontre des difficultés pour pousser jusqu’au bout l’alignement de son organisation sur les normes légales. Ainsi les ponts, facteurs de risques, sont contrôlés annuellement par une société spécialisée, ce qui amène ses techniciens à passer deux jours dans le garage – pour les trois ponts et l’ensemble de l’appareillage électronique. C’est coûteux, de l’ordre de 1 500 euros. En principe, au moment de la mise en service, chaque pont doit être testé avec un véhicule pesant au moins 3,5 tonnes mais compte tenu du coût, le gérant n’y a jamais procédé, si ce n’est en chargeant lui-même la plus lourde des voitures réparées. Ce comportement rend compte du délicat compromis entre une logique managériale et un fonctionnement qui reste fortement marqué par la tradition de l’indépendant artisan. - De plus grande taille (douze salariés), cet autre concessionnaire de même marque dispose d’une assise commerciale et organisationnelle plus importante. Après avoir réalisé lui-même son DU, il a décidé de son propre chef (hors venue d’un consultant ou participation à une réunion collective) de recourir aux services d’un cabinet privé (avec l’aide de son syndicat) afin de se doter d’un diagnostic au plus près des normes légales: il avait pris conscience que sa pratique isolée du DU l’éloignait d’une véritable évaluation et donc d’une capacité d’action préventive réelle.
Conclusion
53Il ressort qu’une démarche d’intermédiation, telle qu’elle est mise en œuvre dans le cadre de cette action collective doit échapper au « confort » d’une démarche standardisée si elle veut s’adapter à la pluralité des logiques de fonctionnement des TPE visées. Sinon, la probabilité est grande d’en faire de facto un instrument sélectif bénéficiant d’abord aux TPE les plus aptes structurellement à élaborer un document unique et à s’approprier la démarche préventive: on peut d’ailleurs faire l’hypothèse que tel est le point de vue – non explicite – de certains promoteurs de cette initiative. Il importe d’ailleurs de prendre plus explicitement en compte les temporalités économiques de ces TPE telles qu’elles résultent des relations interentreprises auxquelles elles sont soumises: une partie des enjeux de la prévention s’y trouve.
54Il est frappant que dans une démarche initiée par la direction départementale du travail, la participation des salariés reste limitée, en tout cas toujours médiatisée par la parole de l’employeur. Or l’intériorisation du danger comme composante incontournable du métier est l’un des freins importants à l’appropriation dans le cours du travail quotidien de la démarche préventive. C’est l’une des raisons à notre sens, pour lesquelles les TPE les plus ouvertes à celle-ci en reste à une démarche formelle qui précisément exclut ou minore l’intervention du salarié sur les risques encourus à l’issue d’une démarche réflexive: « l’adhésion du personnel est nécessaire à une politique de prévention et la confiance entre direction et salariés est l’une des composantes essentielles de sa réussite » (Delgennes, Bregier, Giraud, 2006). Cette dimension est peu mise en avant par les employeurs qui proposent d’explorer deux autres voies de nature à réduire l’incertitude juridique et normative qu’engendre la procédure d’évaluation des risques.
55La première, à ce stade assez spéculative, consisterait à obtenir une évolution des formes du contrôle exercé par l’inspection du travail de telle sorte que celui-ci tienne compte des progrès, même modestes, réalisés par l’entreprise en matière de prévention: « moi je pense que quand ils contrôlent [l’inspection du travail], l’esprit c’est de voir si le chef d’entreprise a commencé à réfléchir à ces problèmes. Son rôle c’est de lui montrer de nouvelles choses ». Cette modulation du contrôle consisterait à en faire une incitation à agir plutôt qu’un cadre contraignant, en d’autres termes à faire muer progressivement le contrôle assorti de sanctions en conseil sur les transformations à mettre en œuvre ou même en une sorte d’incitation: « il faudrait en outre distinguer le traitement réglementaire entre les entreprises “qui font des efforts” (réglementation plus accommodante) et celles qui ne “font rien” (réglementation plus sévère) pour la prévention. » C’est sans doute l’esprit des prolongements que donne actuellement le syndicat professionnel à cette première action collective.
La deuxième relèverait d’une économie assez différente. Elle consisterait à construire une « norme de sécurité » propre aux TPE mais qui, aux yeux des employeurs, devrait en fait se rapprocher plus d’un label que d’une norme de type ISO 9002 qui « est pour les grosses concessions. Donc il faut un label accessible, avec de la bonne volonté et peu d’investissements. Cela pourrait inciter les gens à avoir une image de marque. Mais il faut voir à quel niveau serait la norme… si on peut pas l’avoir ça sert à rien ». Pour les représentants patronaux, il faut prévenir tout risque de décalage trop important entre ces exigences normatives et les pratiques artisanales. Ce label, dédié plus spécifiquement aux TPE, serait élaboré en lien étroit avec les chambres des métiers car ce sont elles « qui connaissent le mieux le monde artisanal, ce qu’oublie souvent la Direction du travail ». En quelque sorte, la contrainte plutôt que l’apprentissage.
Tableau synthétique des entreprises rencontrées dans le secteur de la réparation automobile
Tableau synthétique des entreprises rencontrées dans le secteur de la réparation automobile
Bibliographie
Bibliographie
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- THÉVENOT L., (2006), L’action au pluriel, sociologie des régimes d’engagement, La Découverte.
Notes
-
[1]
Cathel Kornig, chercheuse associée et Éric Verdier, directeur de recherche au CNRS: Laboratoire d’économie et de sociologie du travail (LEST) Aix-en-Provence.
-
[2]
Association régionale pour l’amélioration des conditions de travail, membre du réseau de l’ANACT, agence nationale sous tutelle du ministère en charge du travail.
-
[3]
Travail opérationnel de suivi, de contrôle et d’appui.
-
[4]
BTP, réparation automobile, hôtellerie-restauration, sanitaire et social.
-
[5]
Les salariés étaient inclus dans l’enquête (cf. encadré 2) au même titre que leurs employeurs mais cette dimension ne fait pas ici l’objet d’une exploitation systématique. En effet, nous n’avons pu mener à bien les entretiens avec les salariés que dans une partie des entreprises: dans certains cas, le salarié ou l’apprenti était absent lors de notre ou de nos passages; dans d’autres, les entretiens, particulièrement brefs, ont dû être conduits en présence du patron; enfin, ce n’est parfois qu’après plusieurs relances que l’entretien avec le ou l’un des salarié(s) a pu se tenir. L’exploitation s’avère délicate et reste à ce jour inaboutie; nous n’avons donc mobilisé ces matériaux que très secondairement.
-
[6]
Ces deux auteurs proposent une quatrième catégorie, qualifiée de « double modèle professionnel (libéral ou flexible) » qui n’a guère de sens dans le contexte de la réparation automobile.