Notes
-
[1]
Toute ma gratitude va à Catherine Omnès, Olivia Samuel et François Théron, qui ont discuté une première version martyre de ce texte et m’ont donné l’impulsion pour essayer de le perfectionner, tout comme Marie Ghis Malfilatre, Jean-Noël Jouzel, Sylvain Brunier et Giovanni Prete ainsi qu’Aurélie Gonnet et Armèle Cloteau. Ce texte doit également aux lecteurs/rices anonymes de la RFS et aux membres de son comité de lecture, que je remercie vivement pour la grande qualité et la précision de leurs retours.
-
[2]
Le choix des catégories n’est pas neutre tant il traduit une manière de définir la situation et d’y faire face. En matière de santé au travail, il pose la question de savoir si la cause du problème relève du travail, et donc de la responsabilité de l’employeur, ou bien du salarié. Afin de prêter attention aux catégories mobilisées par les acteurs et aux luttes qu’elles recouvrent, j’emploierai les termes souffrance ou trouble psychique pour désigner à la fois les maladies reconnues dans les classifications médicales internationales (états dépressifs, troubles anxieux, stress post-traumatique, etc.) et des formes de souffrance plus diffuses et non reconnues médicalement, telles que le burn out. Sur ces enjeux de catégorisation, voir Michel Lallement et al. (2010) et Marc Loriol (2012).
-
[3]
Le syndrome de stress post-traumatique (1979), le suicide (1986) ou la dépression (2003).
-
[4]
Voir Marc-Olivier Déplaude (2003), Jean-Claude Devinck et Paul-André Rosental (2009), Nicolas Hatzfeld (2009), Emmanuel Henry (2017), Anne Marchand (2018), Judith Rainhorn (2019), Catherine Cavalin et al. (2020).
-
[5]
L’accès à ces documents est laissé à la discrétion du ministre.
-
[6]
Les enquêtes « Conditions de travail » (1998) et « Surveillance médicale des expositions aux risques » (2003).
-
[7]
Entretien de l’auteur avec une chercheuse de l’inrs, mars 2015.
-
[8]
Voir ihs-cgt, 163 cfd 56, Note interne, « Harcèlement moral », Fichier pour le groupe de travail, 19 octobre 1999 ; ihs-cgt, 163 cfd 29, 37 et 40.
-
[9]
ihs-cgt, 163 cfd 40, Actes de la première rencontre pluridisciplinaire « Santé et travail », Sénat, 8 avril 1999 (p. 1).
-
[10]
Loi no 2002-73 du 17 janvier 2002.
-
[11]
Questions au gouvernement publiées au Journal officiel : C. Estrosi, question no 27255, p. 8097 et Bérengère Poletti, question no 29074, p. 8883, 27 octobre 2003 ; Philippe Vuilque, question no 33588, p. 983, 10 février 2004 ; Francis Saint Léger, question no 38779, p. 3251, 4 mai 2004 ; Ch. Estrosi, question no 41953, p. 4602, 22 juin 2004 ; Source : http://www.assemblée-nationale.fr[consulté le 10 janvier 2018].
-
[12]
C. Estrosi, question no 27255, p. 8097, 27 octobre 2003, op.cit.
-
[13]
La sénatrice a reçu près de 700 témoignages sur son site internet de salarié·e·s de France Télécom qui dénoncent le harcèlement ou la souffrance dont ils sont victimes. ihs-cgt, 163 cfd 56, « France télécom, explosion de la souffrance au travail », Conférence de presse organisée par M.-C. Beaudeau, sénatrice du Val-d’Oise, Sénat, 23 juin 2004.
-
[14]
Questions au gouvernement publiées au Journal officiel : M.-C. Beaudeau, question no 9709, 6 novembre 2003. Source : https://www.senat.fr/quesdom.html [consulté le 10 janvier 2018].
-
[15]
Réponse à la question de Mme M.-C. Beaudeau, question au gouvernement, question no 9709, 6 novembre 2003, juillet 2004. Source : http://www.assemblée-nationale.fr[consulté le 10 janvier 2018].
-
[16]
Ibid.
-
[17]
cfdt, 24 ce 7, ces, Comité exécutif, « Dialogue social, résultats des négociations sur le stress », Bruxelles, 9-10 juin 2004.
-
[18]
cfdt, 24 ce 7, cfdt, Compte rendu du séminaire sur le stress organisé par la ces et l’unice, sous l’égide de la Commission européenne, 25 et 26 février 2003, Bruxelles.
-
[19]
cfdt, 24 ce 7, ces, 9-10 juin 2004 (p. 12).
-
[20]
Accord-cadre européen sur le stress au travail, 8 octobre 2004 (p. 2). Source : http://www.travail-emploi.gouv.fr[consulté le 19 janvier 2018].
-
[21]
Ibid. (p. 2).
-
[22]
Ibid. (p. 2).
-
[23]
ihs-cgt, 163 cfd 32, Gilles Seitz, Note sur l’accord proposé sur le stress au travail au niveau européen, 6 juin 2004, p. 3 ; cfdt, 24 ce 7, cfdt, Note sur l’accord-cadre signé le 8 octobre, 2004.
-
[24]
Entretien de l’auteur avec une chargée de mission à la drt, 24 avril 2020.
-
[25]
Le choix de ces acteurs doit être approuvé par les membres des organisations représentatives.
-
[26]
dgt, 2011/010/07/ct2, drt, « Lancement d’un groupe de réflexion sur les psychopathologies au travail », Note au directeur des relations de travail, 25 janvier 2005.
-
[27]
Psychopathologies : « L’ensemble des maladies psychiques, psychosomatiques et psychologiques liées au stress d’origine professionnelle et aux risques psychosociaux, tels que le harcèlement et tous les autres risques liés aux conditions de travail », dgt, 2011/010/07/ct2, drt, « Lancement d’un groupe de réflexion sur les psychopathologies au travail », Note au directeur des relations de travail, 25 janvier 2005 (p. 1).
-
[28]
Ibid. (p. 4).
-
[29]
Ibid. (p. 1).
-
[30]
dgt, 2011/010/7, Annotations manuscrites sur le document : drt, « Lancement d’un groupe de réflexion sur les psychopathologies du travail, » Note à Jean-Denis Combrexelle, directeur des relations du travail, 25 janvier 2005.
-
[31]
Laurent Hénart (31 mars 2004-31 mai 2005) et Gérard Larcher (2 mai 2005-15 mai 2007).
-
[32]
dgt, 2011/010/07/ct2, drt, Jean-Denis Combrexelle, « Lancement d’un groupe de réflexion sur les psychopathologies au travail », Note à la directrice de cabinet du ministère du Travail, 27 février 2005.
-
[33]
cfdt, 24 ce6, csprp, Compte rendu de l’Assemblée plénière du 24 mai 2006.
-
[34]
dgt 2011/010/07/ct2, dgt, « Mission du rapporteur du groupe de travail “psychopathologies” », Note au directeur de cabinet du ministre du Travail, 29 septembre 2006.
-
[35]
Le nom de cet acteur a été changé.
-
[36]
apr-cfdt, csprp, « Groupe de réflexion sur les psychopathologies », Compte rendu, réunion 5 octobre 2006.
-
[37]
apr-cfdt, csprp, « Groupe de réflexion sur les psychopathologies », Compte rendu, réunion 5 octobre 2006.
-
[38]
apr-cfdt, csprp, « Groupe de réflexion sur les psychopathologies », Compte rendu, réunion 6 mars 2007.
-
[39]
apr-cgt, M. Simon, Psychopathologie et travail… (op. cit., p. 41).
-
[40]
apr-cgt, M. Simon, Psychopathologie et travail (op. cit., p. 39).
-
[41]
Ibid. (p. 39-40).
-
[42]
Ibid. (p. 8).
-
[43]
À l’image du manuel statistique et diagnostic des troubles mentaux (dsm42), ouvrage de référence publié par l’Association américaine de psychiatrie.
-
[44]
Décret no 91-577 du 03/09/1991, Journal officiel du 07/09/1991. Source : http://www.inrs.fr [consulté le 27 juillet 2019].
-
[45]
dgt 2011/010/07/ct2, M. Simon, Courrier au chef du bureau ct2, 24 août 2007.
-
[46]
apr-cgt, M. Simon, Psychopathologie et travail. Première partie. Rapport, 24 août 2007 (p. 37).
-
[47]
Ibid. (p. 41).
-
[48]
X. Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, Dossier de presse « Conférence sociale tripartite sur les conditions de travail », jeudi 4 octobre 2007 (p. 5). Source :http://www.travail.emploi.gouv.fr[consulté le 23 janvier 2018].
-
[49]
https://www.humanite.fr/node/389389 [consulté le 29 avril 2020].
-
[50]
Archives du responsable confédéral cgt49 en charge de l’activité « Travail-santé », Compte rendu 2e séance de négociation sur le stress au travail, 5 mai 2008.
-
[51]
https://www.20minutes.fr/france/346279-20090909-salarie-france-telecom-poignarde-pleine-reunion[consulté le 19 septembre 2020].
-
[52]
https://www.vie-publique.fr/ressources/mots-cles/suicide?page=2[consulté le 19 septembre 2020].
-
[53]
À la suite du rapport Nasse-Légeron, le ministre confie à un second groupe d’experts le soin de construire un « indicateur de mesure et de suivi des risques psychosociaux » (Gollac, 2012).
-
[54]
dgt 2011/010/07/ct2, coct, csmp, Compte rendu, réunion 20 janvier 2010.
-
[55]
« Dépression mélancolique » liée à l’exposition au bromure de méthyle (Tableau no 26) ; « Troubles psychiques aigus avec confusion mentale, délire onirique » ou « Troubles psychiques chroniques avec états dépressifs et impulsions morbides » (Tableau no 22, exposition au sulfure de carbone) ; « Manifestations psychopathologiques […] syndrome dépressif » (Tableau no 24, résultant de la brucellose).
-
[56]
Entretien de l’auteur, novembre 2014.
-
[57]
Entretien de l’auteur avec deux représentants de la cgt à la csmp, avril 2020.
1En France [1], rares sont les enjeux de santé au travail qui bénéficient d’une visibilité dans l’espace public et dans le champ politique. Si les dangers liés à l’amiante ont connu une forte publicité dans les années 1990, la construction de ce « scandale improbable » (Henry, 2007) s’est accompagnée d’un effacement de la dimension professionnelle des expositions à ce toxique. Les ressorts de cette visibilité limitée de la santé professionnelle sont bien connus. Ils tiennent à la fois aux dynamiques propres au champ médiatique (Henry, 2003a ; Jouzel et Prete, 2016), aux modalités d’élaboration des savoirs sur ces questions (Henry, 2017 ; Thébaud-Mony, 2014), aux pratiques de production du doute déployées par les employeurs (Markowitz et Rosner, 2002), aux dispositifs visant à identifier et prévenir les risques professionnels (Counil et Henry, 2016 ; Dedieu et Jouzel, 2015 ; Jouzel et Prete, 2017) ou encore au système de reconnaissance des maladies professionnelles (Jouzel et Dedieu, 2013 ; Marchand, 2018 ; Thébaud-Mony, 1991) et à la difficile judiciarisation de ces enjeux (Henry, 2003b ; Marichalar, 2017). Les organisations syndicales ont elles-mêmes fait face à de nombreux obstacles pour construire des mobilisations d’ampleur autour des questions de santé au travail (Jouzel, 2013 ; Ponge, 2018 ; Ghis Malfilatre, 2018 ; Rainhorn, 2019).
2En outre, les politiques de gestion des risques professionnels reposent largement sur des compromis négociés dans des « arènes discrètes » (Gilbert et Henry, 2012), à l’ombre du débat public, par les représentant·e·s des travailleurs/ses et des employeur·e·s dont les intérêts divergent fortement. Ces espaces se caractérisent par le fait que des valeurs, a priori incommensurables, telles que la santé humaine, sont mises en équivalence avec d’autres qui leur sont habituellement subordonnées dans l’espace public, comme les intérêts économiques. La logique des compromis passés dans ces arènes peut entrer en contradiction avec les principes mis en avant par l’action publique. Ces compromis sont donc d’autant plus stables qu’ils ne sont pas publicisés, et ces arènes se caractérisent par le fait que seuls peuvent y intervenir les acteurs autorisés, ces derniers cherchant rarement à attirer l’attention du public sur leurs actions. À cela s’ajoute les pratiques d’indécision de l’État caractérisées par le fait de laisser aux organisations patronales et syndicales le soin de s’accorder sur les modalités de gestion des risques professionnels, et à ne pas prendre position sur les sujets disputés. Ce mode de traitement confiné de ces enjeux renforce leur faible visibilité dans l’espace public.
3Dans ce paysage, les souffrances psychiques liées au travail (stress, dépression, burn out, risques psychosociaux, etc.) se distinguent des autres pathologies professionnelles [2]. Alors que les dynamiques propres au champ médiatique et la distance sociale entre journalistes et ouvriers malades de l’amiante, par exemple, ont freiné l’appropriation de ce sujet par les médias (Henry, 2003a), ces mécanismes ont, à l’inverse, suscité l’intérêt de ces acteurs pour le stress des cadres (Delmas, 2011). Les troubles psychiques font en outre l’objet d’une mobilisation ancienne de la part d’un ensemble d’acteurs – syndicats, organisations internationales, scientifiques, médecins du travail (Ponge, 2018). Si ces mobilisations sont restées cantonnées aux professionnels de la santé au travail jusque dans les années 1990, elles ont ensuite été portées par des acteurs en capacité de leur donner une diffusion plus large : journalistes, associations de victimes et parlementaires. Elles ont fait l’objet d’un travail de politisation, c’est-à-dire qu’elles ont été définies par un ensemble d’acteurs comme trouvant leur origine dans l’organisation du travail, ce qui pose la question politique de la responsabilité des employeurs vis-à-vis de la santé de leurs salarié·e·s. Par ailleurs, elles ont été constituées en un problème public (Gusfield, 2008) appelant une réponse de l’État. Aussi, contrairement à la majorité des maux du travail, les souffrances psychiques bénéficient aujourd’hui d’une large visibilité dans l’espace public et politique (Robatel, 2009).
4À partir de ce cas, je souhaite interroger ce que la politisation d’un problème social peut produire sur le fonctionnement des arènes discrètes et des acteurs jusque-là en charge de la gestion de ce problème. Ce faisant, il s’agit d’éclairer de manière originale les processus à travers lesquels se trouve tracée la frontière entre les maux du travail jugés comme acceptables et ceux devant être proscrits ou, formulé autrement, entre ceux dont la prise en charge relève de la collectivité et ceux pour lesquels elle est renvoyée à l’individu. Ma démarche s’inscrit dans le prolongement de travaux qui défendent l’idée selon laquelle comprendre le traitement d’un problème social requiert d’analyser les « luttes définitionnelles » (Gilbert et Henry, 2012) que se livrent les acteurs en prise avec ce problème, dans les espaces les plus publics (médias, parlement), mais aussi dans des endroits plus discrets (Bourdeaux et al., 2009 ; Jouzel, 2009). Suivre cet axe de recherche encore peu exploré par la sociologie des problèmes publics (Neveu, 2015) fait apparaitre que le produit des luttes que se livrent les acteurs dans les arènes discrètes peut concourir à rendre évidentes ou naturelles les propriétés d’un problème social et contribuer, in fine, à imposer certaines manières de le prendre en charge. Par ailleurs, elle souligne que l’action publique peut elle-même être façonnée par les compromis passés dans ces espaces, ce qui a pour effet de masquer les rapports de force et de pouvoir au fondement des catégorisations sur lesquelles elle repose.
5Mon entrée sera celle des luttes politiques et syndicales de la première décennie 2000 autour de l’élaboration d’un tableau de maladie professionnelle (tmp) pour les souffrances psychiques. Alors que les mobilisations sociales ont entrainé une reconnaissance sociale inédite de ces souffrances, désormais assimilées pour certaines d’entre elles à des accidents du travail [3], elles n’ont pas pour autant débouché sur la création d’un tableau. Or, les tmp constituent la principale voie pour faire reconnaitre l’origine professionnelle d’une pathologie et obtenir réparation (Encadré 1). Cette séquence historique du début des années 2000 est heuristique à plusieurs titres. De riches travaux ont rendu compte des résistances qui expliquent l’évolution très lente des tmp, à partir de l’étude de différentes pathologies (saturnisme, lombalgies, silicose, troubles musculo-squelettiques, cancers professionnels) [4]. Néanmoins, ils ont en commun de porter sur des projets de tableaux qui ont vu le jour, même s’ils ont le plus souvent débouché sur des codifications très restrictives. En outre, les débats qui ont entouré la création de ces tmp se sont, à de rares exceptions, déroulés dans une relative indifférence publique. Enfin, si l’absence ou la fragilité des connaissances disponibles contribuent, dans de nombreux cas, à l’invisibilité des effets du travail sur la santé (Henry, 2017), les liens entre facteurs de risques professionnels et stress sont scientifiquement bien documentés au début des années 2000, même si cela ne vaut pas absence de controverses.
Encadré 1. − Les voies de la reconnaissance en maladie professionnelle
6J’articulerai ici l’analyse de trois arènes qui ont participé à la politisation et à la définition des souffrances psychiques : l’arène scientifique, l’arène politique, l’arène administrative et paritaire. Après être revenu sur les ressorts de la politisation de cet enjeu, je rendrai compte des conditions sociales qui ont permis de faire obstacle à sa reconnaissance en maladie professionnelle. Celles-ci tiennent à l’asymétrie des ressources entre les organisations syndicales et patronales en matière de santé au travail, à la spécificité du système des tableaux et aux pratiques d’indécision de l’État en ce domaine. Enfin, je soulignerai comment le produit des négociations discrètes des acteurs du paritarisme sur le stress au travail a façonné la prise en charge publique, par l’État, de la question des souffrances psychiques, et soutenu la psychologisation des rapports de travail et l’individualisation de la réparation de ces maux. Les pratiques d’indécision de l’État dans le domaine de la santé professionnelle et le recours au compromis entre les organisations syndicales et patronales contribuent à la perpétuation des inégalités sociales entre ces deux groupes d’acteurs et participent, dans une certaine mesure, à la sous-reconnaissance des dégâts du travail. À travers cet article, j’éclairerai certains des mécanismes qui contribuent à dépolitiser les dégâts sanitaires du travail et à en faire des problèmes personnels.
Encadré 2. – Méthodes et données de l’enquête
Malgré de multiples relances, les représentant·e·s des employeurs n’ont pas donné suite à mes demandes d’entretien, de même que les différents ministres du Travail (de 2007 à 2012), sollicités afin de consulter les archives de leur cabinet ministériel [5]. Ces refus sont révélateurs de la dimension conflictuelle des débats au csprp et du fonctionnement de cette instance. Les travaux en sciences sociales, tout comme les archives et les entretiens, soulignent l’opposition forte des représentant·e·s des employeurs à l’extension des tmp, particulièrement en matière de santé psychique. On peut supposer que le fonctionnement du csprp repose sur des règles du jeu qui ne peuvent perdurer que parce qu’elles sont maintenues à l’écart du regard extérieur (Henry, 2017). Les tmp sont en effet le produit d’arbitrage entre un souci de préservation de la santé des salarié·e·s et les intérêts économiques des entreprises. Rendre publics ces compromis ferait courir le risque de voir remise en cause la légitimité des principes qui fondent le fonctionnement du csprp (Marchand, 2018) ainsi que le positionnement des organisations représentatives et de l’État vis-à-vis des risques liés au travail. Les difficultés d’accès aux archives des ministres du Travail me semblent refléter cette modalité de l’action publique marquée par la discrétion et l’indécision.
La politisation des souffrances psychiques liées au travail
7La politisation des souffrances psychiques observée à la fin des années 1990 en France est alimentée par les instances internationales et communautaires et portée par une coalition d’acteurs issus de plusieurs champs sociaux (scientifiques, professionnels de la santé au travail, militants syndicaux, associations, parlementaires, médias). Il ne s’agira pas ici de revenir sur les différents ressorts de cette dynamique, mais de prêter attention à ceux qui ont rendu possible la politisation de la question de la réparation des souffrances psychiques.
La définition du stress comme problème lié au travail : l’engagement des instances internationales
8Dès 1974, le Bureau international du travail (bit) et l’Organisation mondiale de la santé (oms) font de la lutte contre le « stress et les contraintes psychosociales » l’une de leurs priorités (Loriol, 2008). Ces instances contribuent à diffuser les recherches de scientifiques (médecins, psychologues, sociologues) qui entendent dépasser les approches biologiques et médicales du stress en les articulant à l’étude des « facteurs psychosociaux de risques » liés aux conditions de travail (Marichalar, 2014). Le bit a ainsi donné une forte visibilité au modèle d’analyse du stress professionnel construit à la fin des années 1970 par le psycho-sociologue américain Robert Karasek (1979) et qui constitue aujourd’hui une référence mondiale en ce domaine. À la différence de modèles plus individualisants ou psychologisants, celui de R. Karasek met l’accent sur l’organisation même du travail dans la survenue du stress professionnel. En insistant sur l’équilibre qui doit être trouvé entre les exigences du travail (charge de travail, manque de temps, demandes contradictoires, etc.) et l’autonomie du salarié, il vient étayer les recommandations pour l’amélioration des conditions de travail que porte le bit. En accueillant et en recrutant des scientifiques engagés qui participent activement au développement des recherches sur le stress professionnel (Lecoeur, 2018), le bit a contribué à promouvoir cette thématique, qu’il définit comme un enjeu de santé publique et l’« un des plus graves problèmes du xxe siècle » (ilo, 1993, p. 288).
9Cette dynamique a été renforcée par l’action des instances communautaires européennes. La directive-cadre de 1989 illustre particulièrement cette impulsion européenne. Elle instaure l’obligation pour les employeurs de garantir la santé et la sécurité des travailleurs et est traduite deux ans plus tard dans le droit français. Si les avancées européennes restent modestes en matière sociale (Freyssinet, 2018), l’action des instances communautaires (publications, enquêtes, rapports, résolution du parlement européen, déclaration de la Commission européenne, etc.) soutient la diffusion, dans le champ scientifique français, des notions de stress et de « risque psychosocial » (Massin, 2014). À partir de la fin des années 1990, les items du questionnaire de R. Karasek sont inclus dans deux enquêtes nationales du ministère du Travail, et le stress professionnel devient une thématique à part entière des études épidémiologiques sur les risques professionnels (Niedhammer et al., 2006) [6]. Ces enquêtes contribuent à objectiver ce trouble et à mettre en lumière l’ampleur du nombre de salarié·e·s confronté·e·s à des conditions de travail pathogènes (Quéruel, 2009). De son côté, l’inrs, organisme paritaire spécialisé dans la prévention des risques professionnels, promeut la notion de « risque psychosocial » et lance un vaste programme d’actions sur le sujet (recrutement d’une chercheuse spécialisée, formations, recherches, publications, colloques) [7]. Quant aux bit et à l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, ils publient un ensemble de manuels et de brochures qui incitent les entreprises à lutter contre le stress en modifiant l’organisation du travail (Loriol, 2008). En le définissant comme nouveau « risque psychosocial » à prévenir, ils contribuent à en faire un enjeu collectif. Cette campagne de publicisation soutient la politisation de cette thématique ainsi que de celle du harcèlement moral et des violences au travail par les instances européennes qui encouragent les États membres à s’emparer de ces questions. En 2000, le Conseil de l’Union européenne adopte une directive qui leur impose d’inscrire dans leur droit national la notion de harcèlement moral (Salah-Eddine, 2008).
Dynamiques de rapprochement entre les champs politique et syndical
10En France, les débats autour de la loi sur le harcèlement moral, thématique fortement médiatisée et alimentée par les impulsions européennes (Salah-Eddine, 2008), ainsi que le scandale de l’amiante (Henry, 2007) font entrer dans le champ politique les enjeux de santé au travail, habituellement traités dans les espaces discrets du paritarisme. Cette dynamique est portée par les associations de victimes et par une coalition d’acteurs hétérogènes (scientifiques, professionnels de la santé au travail, militants syndicaux et parlementaires). Des collaborations entre des parlementaires communistes et des militants de la cgt se mettent en place, ces derniers étant fortement sollicités par des salarié·e·s en souffrance. Le conseiller confédéral en charge des questions de santé au travail à la cgt, Serge Dufour, et son responsable Jean-François Perraud, s’engagent sur ce sujet dès 1995 à travers la mise en place d’un ensemble de dispositifs (constitution d’un groupe de réflexion, formations, publications, enquêtes) (Ponge, 2018). Ils s’appuient sur un réseau de militants et de chercheurs engagés et spécialisés dans l’analyse du travail (ergologie, psychodynamique et psychologie du travail) épaulés par des médecins du travail cgt, souvent formés à ces disciplines (Salman, 2008). Ces savoirs, élaborés dans le champ scientifique, sont étroitement articulés à l’enjeu politique que constitue l’amélioration des conditions de travail. Ils servent de support aux militants syndicaux pour objectiver et dénoncer les souffrances psychiques liées au travail dans leurs entreprises (Benquet et al., 2010 ; Ghis Malfilatre, 2017). Les responsables confédéraux et les médecins du travail de la cgt jouent un rôle de passeurs entre le champ scientifique et les champs syndical et politique. La cfe-cgc endosse un rôle similaire en faisant de la dénonciation du stress un élément-clé de son répertoire revendicatif sur les questions de santé au travail (Marichalar, 2011 ; Salengro, 2005). Cette dénonciation, couplée à la revendication de la reconnaissance du stress en maladie professionnelle, est pour ce syndicat une manière d’exprimer le malaise des cadres et leur peur du déclassement (Loriol, 2011). Ces actions connaissent un indéniable succès médiatique (Delmas, 2011).
11Avec l’aide de plusieurs acteurs issus de différents espaces sociaux (avocats, chercheurs, médecins et inspecteurs du travail, associations de victimes, responsables confédéraux de la cgt), les parlementaires communistes s’engagent dans un travail de politisation des questions de santé au travail et de souffrances psychiques. En 1999, ils proposent la création d’une loi sur le harcèlement moral et organisent une série de conférences au Sénat, en même temps que s’ouvrent d’importantes négociations interprofessionnelles sur la réforme du système de prévention des risques professionnels [8]. Ces actions sont impulsées par la sénatrice Marie-Claude Beaudeau, qui s’appuie sur les responsables confédéraux de la cgt. Des syndicalistes cgt (responsables confédéraux, militants d’entreprise, médecins et inspecteurs du travail) et des scientifiques proches de ce syndicat (le psychologue du travail Yves Clot, les toxicologues Henri Pézerat et André Cicolella) participent à ces rencontres aux côtés de militants associatifs et de membres de l’administration du Travail. Les questions de « souffrances et [d’]usure mentale (stress) », mises à l’agenda par ces acteurs, y sont largement débattues [9]. M.-C. Beaudeau est elle-même sensible à ces questions et s’est rapprochée de la cfe-cgc et du syndicat Sud-ptt de France Télécom fortement investis sur ce sujet dans leur entreprise. Dans le sillon d’un processus européen de libéralisation du secteur des télécommunications, cette entreprise connait en effet de profondes transformations qui affectent durement la santé de ses salarié·e·s (Delmas, 2012). En même temps qu’est votée la loi sur le harcèlement moral en 2002, l’obligation de sécurité et de prévention de la santé « physique » des salarié·e·s, qui incombe aux employeurs, est étendue à la santé « mentale » [10].
12La multiplication des sondages et des études sur le stress donne une importante visibilité à cette question tout en offrant des arguments aux parlementaires pour souligner l’importance, pour l’État, de se saisir de cette question. Repris au-delà des clivages partisans, ces éléments soulignent la diffusion de la thématique du stress dans le champ politique. Dans le sillon du vote de la loi sur le harcèlement moral, plusieurs parlementaires, issus de différents partis, interpellent le ministre du Travail au sujet des souffrances psychiques [11]. Christian Estrosi, député ump, avance que « certains sondages relèvent que de nombreux salariés déclarent être tendus à cause de leur travail, et éprouvent des difficultés à concilier vie professionnelle et vie privée » [12]. M.-C. Beaudeau interpelle à deux reprises le ministre de l’Économie au sujet du développement de la « souffrance au travail » chez les salarié·e·s de France Télécom et organise une conférence de presse sur le sujet [13]. Elle interroge le ministre du Travail, François Fillon, sur « les mesures qu’il envisage de prendre pour inclure le stress dans les tableaux de maladies professionnelles » [14]. Cependant, malgré les multiples relances des parlementaires et la publicité du sujet, il faut attendre plus d’un an pour que le ministre du Travail ne leur réponde. Ce dernier affirme travailler au développement d’une « politique partenariale » qui associe l’ensemble des acteurs de la prévention (institutions, partenaires sociaux, organismes préventeurs, experts) [15]. Il fait valoir la difficulté à obtenir des données précises sur la « pénibilité mentale par rapport à la pénibilité physique. Aucun élément objectif et quantitatif ne permet de considérer en tant que tel le stress comme une maladie professionnelle » [16]. Le délai et la nature de la réponse du ministre soulignent qu’il n’entend pas sortir des modalités habituelles d’action publique marquée par le retrait et l’indécision de l’État, qui laisse aux soins des organisations représentatives la gestion des questions de santé au travail.
Individu ou travail ? Les causes disputées du stress professionnel
13En parallèle des débats hexagonaux, les instances tripartites de l’Union européenne constituent des espaces d’actions pour les syndicalistes, à l’image du Comité consultatif pour la sécurité, l’hygiène et la protection de la santé sur le lieu de travail qui assiste la Commission européenne. La France y est représentée par la cgt. Les instances européennes et les organisations syndicales font pression au niveau communautaire sur les représentant·e·s des employeurs afin qu’ils acceptent de s’engager dans des négociations interprofessionnelles sur la prévention du stress professionnel. Face à la forte publicisation de ce sujet, les organisations patronales finissent par céder, cherchant à éviter une législation contraignante, telle qu’une directive, et à garder la main sur la définition du stress et des modalités de sa prise en charge dans les entreprises. S’engagent durant neuf mois des négociations sur le sujet.
14Bien que les instances internationales soulignent le lien entre facteurs de risques professionnels et stress, la définition de cette catégorie demeure l’objet de controverses scientifiques. Certains auteurs mettent davantage l’accent sur la dimension subjective du stress. Selon eux, ce ne sont pas tant les « facteurs de stress » ou les conditions de travail qui affectent le salarié que le vécu subjectif qu’il en a et ses capacités à y faire face (Rascle, 2014). Le modèle transactionnel du psychologue cognitiviste Richard Lazarus (Lazarus et Folkmann, 1984), qui bénéficie d’une légitimité importante dans le champ scientifique, s’inscrit dans cette perspective. Dans cette démarche, les actions de prévention ne doivent pas cibler les conditions de travail, mais plutôt les capacités des individus à y « gérer » le stress. Cette perspective individualisante et les travaux qui la sous-tendent ont accompagné le développement d’un important marché de la « gestion du stress » et du coaching en entreprise (Salman, 2013). La définition du stress renvoie directement à celle des causes de la souffrance et constitue donc un point central de désaccord entre représentant·e·s des salarié·e·s, qui entendent mettre l’accent sur les conditions de travail, et les employeurs, qui soulignent les facteurs individuels [17].
15Tout au long de la négociation, les organisations patronales mobilisent cette approche individualisante du stress afin d’imposer une définition qui dégage l’employeur de sa responsabilité en la matière. Elles défendent que le stress n’est jamais uniquement lié au travail, mais bien à des éléments d’ordre privé et personnel, tels que la personnalité du travailleur [18]. La fédération patronale italienne s’oppose à ce que l’accord fasse référence à l’organisation du travail, ce qui permettrait aux organisations syndicales d’ouvrir des négociations sur le sujet dans les entreprises [19]. À l’inverse, les syndicats de travailleurs défendent une approche centrée sur l’organisation du travail. Produit de ces controverses, le contenu de l’accord de 2004 reflète le rapport de force qui s’est établi entre ces deux groupes d’acteurs. Le stress y est défini comme : « Un état accompagné de plaintes ou dysfonctionnements physiques, psychologiques ou sociaux, et qui résulte du fait que les individus se sentent inaptes à combler un écart avec les exigences ou les attentes les concernant. […] Toute manifestation de stress au travail ne doit pas être considérée comme du stress lié au travail. » [20].
16L’accord introduit l’idée que le stress ne serait pas nocif en soi, mais que « l’exposition prolongée au stress peut réduire l’efficacité au travail et causer des problèmes de santé » [21]. Si les organisations de salarié·e·s ne sont pas parvenues à écarter une approche individualisante, elles ont néanmoins réussi à inscrire dans l’accord que ce trouble « peut être provoqué par différents facteurs tels que le contenu et l’organisation du travail, l’environnement de travail, une mauvaise communication, etc. » [22]. Selon les interprétations, l’accord de 2004 laisse donc entendre que c’est soit le travail qui est en cause, soit les failles personnelles de l’individu face aux exigences de son activité. Bien que les responsables confédéraux de la cfdt comme de la cgt en regrettent les limites, cet accord a selon eux l’intérêt de tracer un lien de causalité entre travail et stress et d’en faire un risque professionnel que l’employeur se doit de prendre en charge [23]. Cet accord soutient la politisation de ce sujet en modifiant l’espace du « dicible » (Barthe, 2008, p. 38) et en rendant plus difficile pour les organisations patronales de continuer à nier tout lien de causalité entre stress et travail.
La santé professionnelle, un domaine d’action publique marqué par l’indécision de l’État
17La dynamique de politisation du stress professionnel et l’accord signé dans l’espace du dialogue social européen vont modifier les rapports de force au sein de la Commission spécialisée des maladies professionnelles (csmp) en faveur des organisations syndicales. Néanmoins, cette dynamique n’entraine pas d’évolution dans les modalités d’action du ministère du Travail qui restent marquées par l’indécision sur les questions de santé professionnelle.
La reconnaissance des maladies professionnelles : entre rapports de force et asymétrie des ressources
18Comprendre les transformations au sein de la csmp suppose de revenir sur la configuration d’acteurs qui y a cours. Le système de réparation des maladies professionnelles est le produit des incertitudes et des enjeux politiques devenus inhérents à la reconnaissance des liens entre travail et santé. Pour la plupart des maladies attribuées au travail, il n’existe en effet « aucun marqueur spécifique qui permettrait de les relier à une profession ou à une activité » (Marchand, 2018, p. 266). Au début du xxe siècle, face à l’impossibilité d’établir avec certitude un lien de causalité exclusif entre travail et maladie, les parlementaires ont décidé de recourir à un système de tableaux négociés entre les représentant·e·s des salarié·e·s et des employeurs. Chaque tableau fait l’objet de luttes souvent très dures, dans la mesure où la reconnaissance de nouvelles pathologies entraine un coût supplémentaire pour les patrons, seuls chargés de financer la réparation. Au sein de la csmp, les relations entre les représentant·e·s des salarié·e·s et de l’administration du Travail d’un côté, et ceux des employeurs de l’autre sont historiquement marquées par une asymétrie de ressources majeure qui n’a guère évolué depuis la création de ce système des tableaux puis de la csmp en 1984 (Déplaude, 2003 ; Ponge, 2018 ; Marchand, 2018). Les représentant·e·s des salarié·e·s exercent en effet le plus souvent leur mandat de manière bénévole. Lorsqu’ils sont permanents de leur organisation, cette activité s’ajoute à de nombreuses responsabilités syndicales. Dans le cadre de leurs travaux à la csmp, ils gèrent plusieurs dossiers, souvent très techniques et qui demandent une bonne connaissance scientifique et un investissement en temps non négligeable. Or, faute de moyens pour rémunérer des experts, ils doivent s’appuyer sur des scientifiques bénévoles. De plus, ils travaillent de manière isolée vis-à-vis de leur confédération qui leur délègue largement l’action dans cet espace, sans mettre de ressources à leur disposition. L’administration du Travail a elle-même des moyens très modestes pour assurer le suivi des travaux de la csmp. Ses membres, qui animent les travaux de la commission, sont peu nombreux (huit) et traitent beaucoup de dossiers, ce qui les contraints à réduire le nombre de groupes de travail de la csmp (trois maximum) et de réunions (quatre par an), limitant le rythme de création des tableaux de maladies professionnelles (tmp) [24]. Ces acteurs ne sont pas spécialistes de l’ensemble des sujets traités et n’ont pas de fonds pour réaliser des recherches. Ils sont obligés de s’en remettre aux membres de la commission pour effectuer ce travail, notamment aux représentants patronaux ou aux personnalités « qualifiées » (scientifiques, professeurs de médecine, toxicologues, etc.) nommées en vertu de leurs compétences techniques et scientifiques selon le sujet traité [25].
19Les représentants patronaux ont quant à eux plus de temps à consacrer à la préparation des dossiers. Ils peuvent rémunérer des experts, s’appuyer sur les services internes et le personnel de leurs organisations pour les aider dans la préparation des réunions, l’analyse des dossiers, etc. À cette asymétrie de ressources s’ajoutent les pratiques d’indécision du ministère du Travail, dont l’action en matière de santé professionnelle consiste à renvoyer aux organisations représentatives le soin de parvenir à un consensus et à ne pas prendre position sur les sujets disputés. Cette configuration est largement favorable aux organisations patronales car, en l’absence d’accord, c’est le statu quo qui prévaut. Or, les représentant·e·s des employeurs sont historiquement farouchement opposé·e·s à toute reconnaissance des troubles psychiques quand les organisations syndicales n’ont, elles, pas les moyens de les contraindre à parvenir à un consensus.
20Depuis les années 1980, l’opposition du patronat à la création d’un tableau sur les psychopathologies et l’indécision publique en ce domaine ont bloqué toute avancée en la matière, malgré les demandes répétées des organisations syndicales (cgt, cfdt, cfe-cgc). Toutefois, à partir de 2004, les incitations européennes et la mobilisation d’une coalition d’acteurs issus de champs sociaux hétérogènes (professionnel, syndical, scientifique, politique) conduisent à modifier le positionnement des membres de l’administration du Travail vis-à-vis des représentant·e·s des salarié·e·s. Ces représentant·e·s de l’État, habituellement en retrait au sein de la Commission spécialisée des maladies professionnelles, soutiennent la demande des organisations syndicales d’ouvrir des négociations pour la création d’un tmp sur les souffrances psychiques. Ce changement de position est encouragé par la mise en lumière des failles des Comités régionaux de reconnaissance de maladies professionnelles (crrmp). Créés en 1993, les crrmp avaient vocation à offrir une voie de reconnaissance aux malades du travail dont la situation n’entre pas dans le cadre des tmp. Ce dispositif s’est jusque-là révélé inadapté pour traiter des souffrances psychiques puisque plus des trois quarts des dossiers sont rejetés sans examen, au motif qu’ils ne répondent pas aux critères administratifs exigés et calqués sur les maux du corps (Ponge, 2020). Moins de quarante cas sont reconnus entre 2000 et 2003 [26]. Enfin, avec la signature de l’accord de 2004 sur le stress professionnel, les organisations patronales ne peuvent plus nier tout lien entre conditions de travail et stress. À court d’arguments et pressées par les représentants syndicaux et l’administration du Travail, elles acceptent la mise en place d’un « groupe de réflexion » sur l’élaboration d’un tmp pour les troubles psychiques.
Les acteurs de l’administration du Travail aux prises avec l’indécision de leur ministère
21En 2005, le sous-directeur des conditions de travail du ministère du Travail (drt) adresse une longue note argumentée à son supérieur, présentant l’objectif du groupe de réflexion : définir les « psychopathologies » qui pourraient faire l’objet d’une reconnaissance et réfléchir à l’opportunité de créer un tmp [27]. Si le sous-directeur ne cache pas l’opposition patronale sur le sujet, il rappelle amplement et avec force détails l’historique des mobilisations qui ont jalonné le début des années 2000, et les multiples encouragements des instances communautaires à avancer sur ce sujet. Il affirme que les psychopathologies en lien avec le travail sont « une réalité » qui coûte très cher et dont la non-reconnaissance obère le régime général de la Sécurité sociale. Aussi, souligne-t‑il, « le régime d’indemnisation des maladies professionnelles a également pour vocation, en faisant supporter aux entreprises le coût de la réparation, de les inciter à la prévention » [28]. Par-delà l’argument de la difficile intégration de troubles « multifactoriels » dans un tableau, le sous-directeur objecte que « c’est aujourd’hui le cas de nombre de maladies que le ministère tente de faire reconnaitre comme professionnelles » et que l’importance du sujet fait « qu’il n’est pas possible de retarder encore la nécessaire réflexion » [29]. Cependant, face à un sujet jugé « très sensible », le directeur de la drt, Jean-Denis Combrexelle, suggère que l’action en la matière obtienne l’aval du ministre du Travail [30]. Mais la drt va se heurter à l’absence de réponse des différents ministres [31], malgré deux relances entre 2005 et 2006, chaque fois assorties d’arguments supplémentaires en faveur de la création d’un tel groupe [32]. En 2006, soit plus d’un an après l’envoi du premier courrier et alors que l’administration est toujours sans réponse de son ministre, celui-ci déclare devant les organisations représentatives lors d’une séance du csprp que la mise en place d’un groupe de travail sur les psychopathologies est d’ores et déjà prévue. Tout au long de la séance, les représentant·e·s des différentes organisations syndicales l’ont vivement interpelé à ce sujet [33]. Malgré cette annonce qui prend de court l’administration du Travail, il faut à nouveau six mois pour obtenir une confirmation écrite du ministre pour la mise en place du groupe de réflexion. Ce n’est donc que fin 2006 que le groupe voit le jour.
22Cette séquence donne à voir le retrait du ministre du Travail et de son cabinet sur ce sujet débattu. Son indécision face aux questions soulevées par son administration tend à favoriser les représentant·e·s des organisations patronales, qui s’efforcent de retarder toute avancée vers la reconnaissance des troubles psychiques. Ce n’est que sous l’effet combiné de la mobilisation d’un ensemble d’acteurs et face à la politisation croissante du problème des troubles psychiques que le ministère est finalement contraint de prendre position. Néanmoins, son action consiste à nouveau à renvoyer aux organisations représentatives le soin de parvenir à un consensus.
Les résistances du système paritaire de gestion des risques professionnels
23La politisation des souffrances psychiques entraine l’ouverture d’une négociation concernant leur réparation dans l’arène de la Commission spécialisée des maladies professionnelles. Toutefois, l’asymétrie des ressources qui marquent les relations des organisations syndicales et patronales et les pratiques d’indécision de l’État ne vont pas permettre aux représentant·e·s des salarié·e·s de remettre en jeu la définition des maladies professionnelles et d’ouvrir la réparation aux maux de l’esprit.
Les stratégies patronales de production du doute
24Contrairement aux groupes de travail habituels du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, celui sur les psychopathologies n’a pas pour objectif d’élaborer un tmp. Il doit en évaluer la « faisabilité » – sans obligation d’établir un consensus – faire un état de la littérature scientifique et définir les psychopathologies qui pourront éventuellement être reconnues [34]. La question des savoirs mobilisables pour identifier des troubles psychiques (définition des pathologies, outils de diagnostics, symptomatologie, etc.) et établir un lien avec le travail est au cœur des débats du groupe. Il se réunira à cinq reprises et auditionnera plusieurs acteurs (psychiatres, sociologues, médecins du travail, représentante de la Sécurité sociale).
Encadré 3. – Composition du groupe de réflexion sur les psychopathologies
25Tout au long des réunions, les représentant·e·s des salarié·e·s travaillent de concert afin de présenter un front uni. Cette position n’est pas nouvelle au sein de la csmp. L’antagonisme d’intérêts très fort qui structure les relations entre les représentant·e·s des employeurs et des salarié·e·s facilite en retour la cohésion interne entre les membres respectifs de ces deux groupes d’acteurs. L’extrait suivant, tiré des archives de la représentante cfdt, donne une idée de la teneur des échanges et des positions défendues. « La [première] réunion commence par plusieurs interventions agressives du représentant de la cgpme qui remet en cause systématiquement les objectifs et les initiatives proposées par le rapporteur ou l’administration, et s’applique avec efficacité à bloquer le démarrage des débats. Attitude très limite vis-à-vis du rapporteur, opposition à la désignation de M. D. comme président après la première phase (son nom avait pourtant été proposé en plénière le 19 septembre, sans susciter d’opposition), etc., et surtout réticence farouche à ce qu’on commence à parler d’un tableau… » [36].
26Au fil des échanges, les représentants patronaux déploient des stratégies dilatoires et de production du doute récurrentes dans cette arène (Déplaude, 2003 ; Marchand, 2018). Une première pratique consiste à valoriser les recherches qui pointent le rôle de la perception individuelle et des facteurs extraprofessionnels dans la survenue du stress, à l’image des recherches du psychiatre Éric Albert, l’une des figures de proue de la « gestion du stress ». Auditionné à la demande du représentant du medef, il insiste sur le fait que le stress est un « phénomène complexe », que la dépression est le fait de « facteurs croisés personnels, génétiques, de trajectoires » et du contexte de travail, et qu’il n’y a pas « d’organisation du travail idéale » [37]. Si le vécu subjectif ne peut être évacué pour appréhender les effets du travail sur la santé, qu’elle soit physique ou mentale, les représentant·e·s patronaux s’appuient sur ce type d’analyse pour refuser la création d’un tmp au motif qu’un lien de causalité univoque ne peut être établi. C’est ce qui justifie, de leur point de vue, l’instruction des demandes de reconnaissance des salarié·e·s au cas par cas, via les crrmp. Ils mettent également en avant des travaux épidémiologiques qui ont conclu à l’insuffisance d’éléments probants permettant d’établir un lien entre certaines conditions de travail et des troubles psychiques [38].
27À ces stratégies de production du doute s’ajoute une disqualification systématique des « savoirs de terrain » mobilisés par les représentant·e·s des salarié·e·s. Ces dernier·e·s, ne disposant pas de la possibilité de réaliser des études ou de s’adjoindre les services d’experts, sauf lorsqu’ils acceptent à titre bénévole, s’appuient sur leur propre expérience ou sur des enquêtes de terrain menées par les militants. Les représentant·e·s de la cgt et de la cfdt assurent en effet des consultations de pathologies professionnelles dans lesquelles ils reçoivent des salarié·e·s en souffrance qu’ils accompagnent dans leur demande de reconnaissance en maladie professionnelle. La somme de ces cas individuels illustre, selon eux, l’incidence de cet enjeu et les effets pathogènes de certaines conditions de travail. Faisant valoir l’impératif de « rigueur scientifique » et la nécessité d’appuyer les débats de la csmp sur de véritables études scientifiques, portant sur des échantillons de population représentatifs, le représentant de la cgpme refuse que ces données des représentant·e·s syndicaux ne soient présentées [39]. À cette « expertise militante », la partie patronale oppose les critères de « l’expertise institutionnelle » dont l’objectif est d’abord d’être irréprochable scientifiquement et dont le modèle dominant est celui de l’épidémiologie causale (Henry, 2017, p. 111‑113), modèle que ne rencontre nullement la somme des cas relevés par les représentant·e·s des salarié·e·s.
28Cependant, ces pratiques patronales de production du doute se heurtent à l’ampleur et à la légitimité scientifique des données produites sur le stress professionnel et les facteurs psychosociaux de risques. En plus de bénéficier d’une forte légitimité au niveau international et d’avoir été en partie intégré dans les grandes enquêtes nationales du ministère du Travail, le modèle de R. Karasek voit sa validité scientifique reconnue par plusieurs chercheurs de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) (Niedhammer et al., 2006). Dans son rapport final, le rapporteur du groupe, M. Simon, souligne qu’en matière de psychopathologie, « et ce n’est pas si fréquent en pathologie professionnelle, nous disposons d’enquêtes françaises, récentes, vastes, détaillées et de méthodologies éprouvées » [40]. Malgré l’opposition patronale, il affirme que de nombreux travaux soulignent les effets pathogènes de certains « facteurs de stress » et que les études disponibles confirment le « rôle statistique déterminant des conditions de travail dans la souffrance psychique » [41] et l’ampleur du problème : « Il est reconnu que ces manifestations, qui vont du simple mal-être léger jusqu’aux phénomènes anxieux suicidaires, voient leur fréquence s’accroitre rapidement depuis une vingtaine d’années, et deviennent une des principales causes de l’absentéisme dans les entreprises. Le phénomène est mondial. » [42].
29Selon le rapporteur, il est envisageable d’établir un tmp, et des outils médicaux reconnus existent pour diagnostiquer et caractériser des affections mentales [43]. Élaborer un tableau supposerait donc de prendre en compte les pathologies psychiques les mieux caractérisées médicalement et d’utiliser les facteurs de stress, identifiés par exemple dans le modèle de R. Karasek, pour définir les conditions de travail pathogènes qui seraient inscrites dans le tableau. Le rapport de M. Simon, sans nier que les troubles psychiques peuvent aussi relever de causes individuelles, suggère donc la poursuite des réflexions pour la création d’un tableau sur ce modèle ou, a minima, une amélioration des conditions de reconnaissance devant les crrmp. Néanmoins, s’engager dans cette voie revient à interroger frontalement l’organisation de la réparation et à remettre en cause la définition restrictive du lien de causalité entre travail et maladie au cœur des tableaux.
La réparation des troubles psychiques : une remise en cause frontale des tableaux de maladies professionnelles
30Alors qu’il n’existe pas de marqueur spécifique permettant de relier une maladie à une activité, les représentants patronaux, parfois soutenus par des parlementaires et des ministres (Ponge, 2020), ont bataillé durant plus d’un siècle afin d’exclure du champ des tableaux toute maladie dont le lien avec le travail ne serait pas « certain » et « exclusif » (Marchand, 2018, p. 275). Ils se sont employés à imposer, au fondement des tmp, un modèle causal associant une cause/agent unique à une pathologie objectivable par des lésions organiques. Ce modèle, qui représente une forme de fiction sociale, est aujourd’hui celui de la très grande majorité des tableaux. Cette opposition patronale s’est par ailleurs fortement durcie après l’assouplissement, en 1991, des modalités de reconnaissance des troubles musculo-squelettiques (tms) de l’épaule [44]. Le nombre de cas de maladies professionnelles reconnues, qui se situait jusque-là en dessous de 5 000 cas annuels, passe à environ 17 000 en 1999, les tms représentant près des deux tiers de cette augmentation (Déplaude, 2003). Si cette modification règlementaire n’explique pas à elle seule ces évolutions (Hatzfeld, 2006), elle apparait aux représentant·e·s des employeurs comme un précédent qu’il faut absolument éviter de reproduire. Dans cette logique, ils défendent la création d’un système de « causalité partagée » entre les facteurs professionnels et non professionnels (Henry, 2017, p. 55). Ce qui est en jeu n’est donc plus seulement la question de la reconnaissance de telle ou telle pathologie, mais celle de la redéfinition de la catégorie de maladie professionnelle, car « plus elle est définie de manière large, plus elle risque de coûter cher aux employeurs » (Déplaude, 2003, p. 717).
31Par ailleurs, la création des crrmp en 1993 devait, comme le souhaitaient ses défenseurs, faciliter la reconnaissance des pathologies professionnelles et accompagner l’évolution des tableaux. Or, elle a institutionnalisé la notion de maladie « multifactorielle » et entériné l’idée qu’il y aurait des maladies pour lesquelles l’origine professionnelle peut être établie de manière certaine et relevant des tableaux, et d’autres, multifactorielles, devant faire l’objet d’un traitement moins favorable. Dans le rapport Simon et dans les échanges des représentant·e·s de l’administration du Travail, la qualification récurrente des troubles psychiques comme maladies multifactorielles souligne la diffusion de cette représentation, mais aussi combien la reconnaissance de ces troubles entre en tension avec les représentations associées aux tmp. C’est ce qu’illustrent les propos de M. Simon dans une note adressée à la drt, en complément du rapport : « Nous entrons dans un champ de la réparation, jamais véritablement mis en forme par le législateur, celui des étiologies mixtes, et le modèle traditionnel des tableaux semble toucher ses limites. Faudrait-il à l’occasion des psychopathologies inventer une modalité supplémentaire […] ? C’en serait l’occasion. Mais une solution aussi novatrice ne peut être envisagée à court terme. […] À défaut d’une solution législative prochaine, la voie la plus rapidement accessible serait celle d’un aménagement du dispositif complémentaire. » [45].
32Pourtant, le caractère multifactoriel des troubles psychiques, qu’ils partagent avec de nombreuses autres pathologies inscrites aux tableaux (tms, cancers professionnels, pathologies cardiaques, vasculaires, digestives, etc.), ne constitue pas une spécificité. Le problème posé par leur reconnaissance est qu’elle reviendrait à remettre en cause la fiction sociale qui sous-tend le modèle étiologique des tableaux associant une pathologie à une cause unique et exclusive. Si les études statistiques ou épidémiologiques valident le rôle des facteurs psychosociaux au travail sur la santé mentale identifiés par le modèle de Karasek (Niedhammer et al., 2006), elles ne permettent pas d’établir l’imputabilité au sens des tableaux. C’est ce qu’a fait ressortir l’audition du sociologue Christian Baudelot, sollicité par les représentant·e·s syndicaux pour présenter à la csmp les connaissances disponibles sur les suicides professionnels, thématique de plus en plus publicisée (voir infra) [46]. Il a montré que si la sociologie permet d’identifier les facteurs structurels qui expliquent les différents taux de suicide entre groupes sociaux (actifs/inactifs, femmes/hommes, jeunes/personnes âgées, etc.), les données existantes ne peuvent établir de lien de causalité entre des conditions de travail et un acte suicidaire (Vatin, 2011). La complexité des causes de la souffrance psychique est donc indéniable, et construire un tableau sur le modèle des facteurs psychosociaux reviendrait à remettre en cause la fiction étiologique au cœur de ce dispositif de reconnaissance.
33Par ailleurs, la visibilité sociale croissante des plaintes de souffrance alimente l’idée que ces situations seraient largement répandues. C’est pourquoi les représentants patronaux sont farouchement opposés à leur inscription au système des tableaux, dont ils redoutent qu’elle n’entraine une importante augmentation du coût de la réparation, qu’ils sont seuls à financer. Dans une longue note argumentée rédigée en réaction au rapport Simon, la cgpme et le medef s’appuient sur les approches en termes de gestion du stress pour souligner que ce mal serait un phénomène multifactoriel et « subjectif », fortement dépendant de la situation personnelle ou conjugale du travailleur (divorce, séparation ou décès du conjoint). Il ne pourrait donc pas faire l’objet d’un tableau, car cela reviendrait à indemniser des maladies non professionnelles [47]. Après avoir remis entre les mains du ministère du Travail le soin de décider de la voie dans laquelle s’engager, le rapporteur n’obtiendra aucune réponse de sa part. Celui-ci refuse à nouveau de prendre position et de remettre en cause le modèle des tmp existant depuis 1919. Cette pratique d’indécision de l’État, encouragée par la forte opposition patronale, est permise par le fait que le rapport Simon ne sera pas rendu public, comme le veut l’usage au sein du csprp. Les pratiques d’indécision du ministère du Travail et les stratégies de production du doute des employeurs contribuent à la « psychologisation des rapports de travail, entendue comme la substitution à un langage politique, organisationnel ou social d’un langage psychologique pour énoncer, analyser et résoudre des problèmes de travail et d’emploi » (Stevens, 2008, p. 1).
De la question de la réparation des souffrances psychiques à celle de leur mesure : redéfinition d’un enjeu politique
34Les années 2000 sont marquées par une forte publicisation des suicides de salarié·e·s, produit d’un travail de mise en forme médiatique et syndical, d’autant plus efficace qu’il porte sur des suicides survenus dans des entreprises où l’État est actionnaire (Renault) et employeur (France Télécom). Cette mise en visibilité rend de plus en plus difficile pour le ministre du Travail d’éviter durablement le sujet des souffrances psychiques et entraine une évolution progressive de son discours et de ses pratiques. Néanmoins, son action va consister, en s’appuyant sur le compromis noué au niveau européen par les organisations syndicales et patronales au sujet du stress, à redéfinir le problème en un enjeu de mesure et d’évaluation, laissant de côté l’embarrassante question de la réparation des troubles psychiques professionnels.
De la réparation à la mesure : psychologisation et individualisation des troubles psychiques
35Entre 2006 et 2007, les suicides de trois salariés de l’entreprise Renault à Guyancourt connaissent une large visibilité médiatique. En réaction à ces événements, le ministre du Travail, Xavier Bertrand, se rend sur place. Quelques mois plus tôt, il avait organisé une « conférence sociale » entre organisations représentatives dont l’objectif était de dégager des propositions d’amélioration des conditions de travail. Cet événement avait souligné, de son propre aveu, l’actualité du thème des « risques psychosociaux ». Mais le sujet reste disputé dit-il, car « il n’existe à ce jour aucun indicateur scientifique indiscutable permettant de mesurer le nombre de salarié·e·s sujet aux risques psychosociaux ou de mesurer les conséquences de l’exposition à ces risques sur la santé des travailleurs » [48]. Cette déclaration peut surprendre quand on sait que, quelques mois plus tôt, le rapport Simon soulignait la solidité scientifique des enquêtes existantes. Suite à cet événement et en réaction à la médiatisation croissante des suicides au travail, X. Bertrand confie au statisticien Philippe Nasse et au psychiatre Patrick Légeron la mission de « conduire une réflexion prospective sur les indicateurs permettant d’identifier, de quantifier et de suivre les risques psychosociaux » (Légeron et Nasse, 2008, p. 19). En faisant appel à des experts, acteurs au croisement des champs scientifique et politique, le ministre tente d’exporter « une légitimité acquise dans le champ scientifique pour fonder des décisions sur des questions disputées dans le champ politique » (Hassenteufel, 2011, p. 218). La mesure, opération cognitive et politique (Desrosières, 2014), permet à l’État d’éviter d’avoir à prendre position sur la remise en cause du modèle des tmp. Cette décision se comprend également au regard des nouvelles modalités de l’action publique en matière de risques professionnels qui entendent, à la suite de la crise de l’amiante, appuyer plus fortement les décisions administratives et politiques sur l’expertise scientifique (Henry, 2017). Ce faisant, le ministre rouvre un espace de controverses et redéfinit le problème des souffrances psychiques. La question politique de la capacité du système de réparation à intégrer de nouvelles pathologies est mise de côté, et le problème est désormais celui d’un risque qu’il s’agit de mesurer et d’évaluer. L’arrêt des travaux de la csmp et le recours aux termes « risques psychosociaux » (rps) traduisent cette redéfinition. En mettant en cause un environnement à risques et en insistant sur le caractère multifactoriel, la catégorie de rps rend plus difficile l’imputation de responsabilité que celle de souffrance (Martin et Marichalar, 2011)
36Le jour même de la remise du rapport au ministre du Travail, un nouveau suicide survient au Technocentre Renault de Guyancourt et relance le débat sur le lien entre souffrances psychiques et conditions de travail [49]. À la demande du ministre, et suivant une des recommandations du rapport Nasse-Légeron, des négociations nationales interprofessionnelles sur le stress sont ouvertes. En 2008, elles aboutissent à un accord qui transpose, quasiment mot pour mot, celui conclu au niveau européen quatre ans plus tôt. Il ne tranche donc pas la définition du stress qui, selon les interprétations, continue d’être appréhendé comme un problème lié à l’organisation du travail ou à l’incapacité du salarié à faire face aux exigences de son métier. En outre, au cours de la négociation, les organisations patronales ont refusé de discuter des enjeux de réparation ou que « l’accord final puisse laisser penser à une reconnaissance en maladie professionnelle » [50]. En parallèle, la couverture médiatique des suicides de travail se poursuit, alimentée par des cas parfois spectaculaires, à l’image de ce salarié de France Télécom qui tente de se donner la mort en se poignardant devant ses collègues lors d’une réunion où lui est signifiée la suppression de son poste et sa mutation [51]. Quelques jours plus tard, une jeune salariée décède après s’être défenestrée suite à l’annonce de la réorganisation de son service. Entre 2008 et 2010, ce sont cinquante-huit salarié·e·s de l’entreprise France Télécom qui se donnent la mort (Baudelot et Gollac, 2015, p. 197), et ce sujet fait l’objet d’une importante mobilisation syndicale au sein de l’entreprise. Cette médiatisation, associée à l’action de la cfe-cgc et de Sud-ptt de France Télécom, qui travaillent à dénoncer ces événements (Delmas, 2012), contribue à faire évoluer le discours des membres du gouvernement, qui se trouvent de plus en plus questionnés à ce sujet lors de leurs passages devant les journalistes [52]. Alors que le lien entre les suicides et l’activité professionnelle était, jusque-là, soit remis en cause soit minimisé (Rabatel, 2010), le nouveau ministre du Travail, Xavier Darcos, change de ton. Devant le Conseil d’orientation des conditions de travail, anciennement csprp, il déclare fin 2009 : « Les risques psychosociaux nous les avons surement sous-estimés, car il est plus facile de repérer quelqu’un qui tombe d’un haut fourneau que quelqu’un qui souffre. Ils sont pourtant réels, comme la situation humaine et sociale à France Télécom l’a montré de façon particulièrement dramatique. » (cité par Y. Clot, 2010, p. 25).
37La publicité qui entoure la question des suicides dans des entreprises dont l’État est un des actionnaires majoritaires et la nécessité qui lui est faite de se positionner rapidement encourage sans doute le ministère du Travail à se tourner vers ce qui fait consensus et est déjà instruit, comme a pu le montrer E. Henry (2004) au sujet de l’amiante. L’accord sur le stress de 2008 offre alors une définition du problème et une manière de le prendre en charge. X. Darcos présente un « plan d’urgence » qui entend obliger les entreprises de plus de mille salarié·e·s à ouvrir des négociations sur la prévention du stress au travail. Ce faisant, il redéfinit le problème autour des seuls enjeux de prévention et évacue les questions de réparation. Ce traitement public des souffrances psychiques par l’État est étroitement façonné par le compromis formé dans des arènes discrètes du paritarisme par les organisations représentatives. L’autonomie dont dispose la csmp rend possible, pour le ministre, le maintien de l’indécision sur les questions de réparation, et l’accord sur le stress donne une solution clé en main pour agir à travers une catégorie d’action consensuelle. Loin d’être neutre, le recours à la catégorie ambivalente de stress semble avoir contribué à brouiller les liens entre souffrance et organisation du travail, « en orientant le débat sur des éléments statistiques et le dépistage de fragilités individuelles » (Davezies et Clot, 2011). C’est ce que suggère l’analyse des accords signés à la suite de ce « plan d’urgence ». En mettant en place, au sein de la drt, une « cellule rps » constituée de trois personnes chargées de suivre ces négociations, l’État apporte par ailleurs une réponse classique à un problème public, consistant à dédier un corps de fonctionnaires au traitement de ce problème (Neveu, 2015, p. 217). Cette solution ne remet pas en cause l’asymétrie des rapports de force qui a cours au sein de la commission chargée de définir les maladies professionnelles et fait obstacle à leur reconnaissance dans le système des tableaux. Enfin, l’appel aux experts et la redéfinition du problème des souffrances psychiques en un enjeu de quantification par le ministère du Travail s’accompagnent de la mise à l’écart des acteurs de la csmp [53].
La domestication de la question de la réparation des souffrances psychiques
38Les travaux de la csmp ne reprendront qu’en 2010, soit trois ans après la parution du rapport Simon. La question n’est plus celle de la création d’un tableau, mais de l’assouplissement des conditions de reconnaissance des troubles psychiques devant les crrmp. Le problème des souffrances psychiques a été « domestiqué », c’est-à-dire qu’il a été reformulé dans des termes moins problématiques pour les pouvoirs publics (Jouzel et Prete, 2017). Le nouveau chef du bureau de la direction des relations de Travail du ministère, en charge du dossier des maladies professionnelles, sa chargée de mission, et leur homologue de la direction de la Sécurité sociale ont contribué à cette domestication en appuyant la délimitation du débat dans le cadre juridique existant. Dans une note présentée aux représentant·e·s patronaux et syndicaux visant à évaluer les évolutions règlementaires possibles pour assurer une meilleure réparation des souffrances psychiques, ils soulignent les obstacles juridiques existants à la création d’un tmp. Ils précisent que les tableaux sont définis par l’article L 461-2 du Code de la Sécurité sociale, et recouvrent trois familles de pathologies : 1) les manifestations morbides d’intoxications aiguës ou chroniques présentées par les travailleurs exposés d’une façon habituelle à l’action des agents nocifs ; 2) les infections microbiennes qui sont présumées avoir une origine professionnelle ; 3) les affections résultant d’une ambiance ou d’attitudes particulières nécessitées par l’exécution des travaux limitativement énumérés. C’est dans cette dernière catégorie que pourraient, selon les responsables de l’administration du Travail, être incluses les psychopathologies. Cependant, cela supposerait de modifier le Code de la Sécurité sociale, car il ne serait pas possible, selon eux, de reconnaitre que des conditions de travail pathogènes pour la santé mentale seraient nécessaires à l’exécution du travail [54]. Pourtant, des troubles psychiques ont déjà été inscrits dans des tmp au milieu du xxe siècle. S’ils sont associés à des intoxications chimiques ou infectieuses, cela pourrait aussi être analysé comme une reconnaissance du nécessaire risque que font courir certaines activités à la santé psychique des travailleurs [55]. Sans une modification de la loi, la seule voie envisageable est celle des crrmp. De fait, la question de l’évolution du cadre légal, et donc de l’intervention de l’État et du parlement, seuls habilités à faire évoluer la loi, est évacuée.
39Bien que les organisations syndicales rappellent leur revendication que soit créé un tmp, en l’absence de soutien de la part du ministère du Travail, elles n’ont pas le pouvoir de contraindre les organisations patronales à s’engager dans cette voie, et ce d’autant plus que les responsables confédéraux n’appréhendent pas la csmp comme un espace d’action stratégique. Au sein des confédérations syndicales, cette commission est vue comme un espace routinier du paritarisme, où se jouent des débats techniques plutôt que politiques. Les responsables confédéraux sont très peu investis dans le dossier des maladies professionnelles, dont la gestion est déléguée à des militants, parfois retraités, qui s’en sont fait une spécialité et siègent durant de nombreuses années à la csmp (quinze, parfois vingt ans) (Marchand, 2018 ; Ponge, 2020). À la cfdt et à la cgt, cette situation est d’autant plus aiguë à partir de 2006 où les équipes confédérales en charge de la santé au travail sont renouvelées. Les nouveaux responsables, s’ils ne sont pas opposés à la création d’un tmp concernant les souffrances psychiques, ne portent pas cette revendication en dehors de l’espace du csprp. Pour le secrétaire national de la cfdt en charge de l’emploi et des conditions de travail, la priorité n’est pas à l’accompagnement des salarié·e·s vers la réparation, mais à la prévention. La première approche risquerait selon lui d’enfermer les syndicalistes dans une démarche individuelle et victimaire, au détriment d’une action sur les causes organisationnelles des problèmes [56].
40L’action des confédérations syndicales est en outre imprégnée du souci de ne pas remettre pleinement en cause le système de réparation et ses limites. Alors que les syndicalistes sont nombreux à avoir publicisé et politisé la question des souffrances psychiques liées au travail, les responsables confédéraux ne semblent pas s’être saisis de cette stratégie pour dénoncer l’inertie de la csmp. Comme ont pu le montrer certains auteurs au sujet de l’amiante (Henry, 2017) ou des solvants toxiques (Jouzel, 2009), aussi imparfaits qu’apparaissent le csprp et la csmp, ces espaces permettent néanmoins, à leurs yeux, d’obtenir des avancées et demeurent les lieux légitimes d’élaboration des politiques de santé au travail. Dès lors, en acceptant ces règles du jeu, ces acteurs sont contraints de développer des pratiques et des revendications qui restent cantonnées dans les règles de fonctionnement de ces espaces. Les ressorts de l’attachement à ce système reposent à la fois sur la crainte de se voir écartés des processus d’élaboration des politiques de gestion des risques professionnels et sur celle qu’un changement ne débouche sur un système qui ne leur soit encore moins favorable. Cette représentation est d’autant plus marquée qu’à partir des années 2000 leur rôle dans l’élaboration des tmp est de plus en plus remis en question. Pour faire face à l’inertie du fonctionnement de la csmp, l’État décide en effet de découpler la phase d’expertise scientifique de celle relevant de la négociation sociale. Il confie aux agences sanitaires le soin de faire le point sur l’état des connaissances, dans un premier temps, concernant le lien entre une pathologie et le travail (Benamouzig et al., 2018). Les organisations syndicales doivent, dans un second temps, s’appuyer sur les résultats de cette expertise pour débattre des modalités de réparation, et se trouvent privées de la possibilité d’influer sur le processus de sélection et de discussion des savoirs scientifiques [57]. Les représentant·e·s syndicaux à la csmp sont très critiques de ces changements qu’ils appréhendent comme une perte de leur capacité d’action. Expérimenté dès les années 2000, ce processus est institutionnalisé en 2019 avec la création d’une commission « Maladie professionnelle » constituée d’acteurs du champ scientifique, au sein de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.
41En revenant sur les débats autour de la réparation des souffrances psychiques liées au travail, j’ai souhaité rendre compte des processus à travers lesquels se trouve tracée la frontière entre les maux du travail relevant de la responsabilité des employeurs et ceux considérés comme personnels. Le travail de politisation des souffrances psychiques porté par une coalition d’acteurs issus de champs sociaux hétérogènes (scientifiques, syndicalistes, professionnels de la santé au travail, parlementaires) a permis d’ouvrir une fenêtre d’opportunité en faveur de leur reconnaissance en maladie professionnelle. Néanmoins, cette dynamique s’est heurtée aux contraintes structurelles inscrites dans la gestion paritaire de ce sujet. Celles-ci reposent sur l’importante asymétrie de ressources entre organisations syndicales et patronales, qui ne permet pas aux premières de contraindre les secondes à accepter une évolution de la définition restrictive de ce qu’est une maladie professionnelle. Ces contraintes se sont révélées d’autant plus fortes que l’inscription des troubles psychiques dans le système des tableaux aurait conduit à remettre en cause frontalement la fiction sociale, associant une maladie à une cause unique, sur laquelle repose depuis un siècle le modèle étiologique au cœur de ce dispositif de réparation. Enfin, les pratiques d’indécision de l’État dans le domaine de la santé professionnelle ont constitué un obstacle supplémentaire.
42Le cas étudié ici permet également de souligner de quelle manière l’action publique peut se trouver façonnée par les compromis formés dans des arènes discrètes. En s’appuyant sur ces compromis, l’État a maintenu son indécision sur ce sujet disputé et participé à la perpétuation des inégalités sociales entre les organisations syndicales et patronales. Cette indécision publique a soutenu la psychologisation des rapports de travail et l’individualisation de la réparation des souffrances psychiques, contribuant, dans une certaine mesure, à la sous-reconnaissance de ces maux. Couplée à une forte opposition patronale, elle a ainsi participé à la dépolitisation de cet enjeu et à sa définition comme un problème personnel. L’individualisation du traitement des effets du travail sur la santé mentale des salarié·e·s semble s’inscrire dans un mouvement général de remise en cause des modalités de traitement des problèmes publics marqué par la progression des discours et pratiques qui renvoient aux victimes le soin de prendre en charge leur problème (Neveu, 2015). Un·e salarié·e qui souhaiterait faire reconnaitre l’origine professionnelle de sa souffrance psychique doit aujourd’hui présenter sa demande devant un Comité régional de reconnaissance de maladies professionnelles et faire la preuve du lien avec son travail. Or, l’inertie du système des tableaux et l’augmentation continue des activités des crrmp, qui évaluent désormais 20 % des demandes de reconnaissance (Assurance maladie, 2017), invite à interroger les évolutions actuelles de la réparation des dégâts sanitaires du travail. En instaurant la notion de risque professionnel et celles d’accident du travail et de maladie professionnelle, le droit instituait une responsabilité patronale limitée, mais automatique, réduisant les effets de l’asymétrie de pouvoir qui marque la relation salariale. Avec la montée en puissance des crrmp, à cette responsabilité limitée s’ajoute sa conditionnalité, prenant à rebours les évolutions juridiques du début du xxe siècle. On peut dès lors se demander si l’on n’assiste pas à un mouvement simultané de responsabilisation des travailleurs/ses et de déresponsabilisation des employeurs et de l’État vis-à-vis des dégâts du travail.
- Assurance maladie, 2017, Risques professionnels. Rapport annuel 2017.
- Barthe Y., 2008, « Quand l’incertitude vient du passé : du principe de précaution au principe de présomption », Natures sciences sociétés, 16, 1, p. 36-40.
- Baudelot C., Gollac M., 2015, « Que peuvent dire les suicides au travail ? », Sociologie, 6, 2, p. 195-206.
- Benamouzig D., Borraz O., Jouzel J.-N., Salomon D., 2018, « L’expertise en sciences sociales : une affaire politique ? Le cas de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) », Sociologies pratiques, 37, 2, p. 39-47.
- Benquet M., Marichalar P., Martin E., 2010, « Responsabilités en souffrance. Les conflits autour de la souffrance psychique des salariés d’edf-gdf (1985-2008) », Sociétés contemporaines, 79, p. 121-143.
- Bourdeaux I., Gilbert C., Henry E., 2009, « Lire l’action publique au prisme des processus de définition des problèmes » dans C. Gilbert, E. Henry (dir.), Comment se construisent les problèmes de santé publique, Paris, La Découverte, p. 7-33.
- Cavalin C., Henry E., Jouzel J.-N., Pélisse J. (dir.), 2020, Cent ans de sous-reconnaissance des maladies professionnelles, Paris, Presses de l’École des Mines.
- Clot Y., 2010, Le travail à cœur. Pour en finir avec les risques psychosociaux, Paris, La Découverte.
- Counil É., Henry E., 2016, « Produire de l’ignorance plutôt que du savoir ? L’expertise en santé au travail », Travail et emploi, 148, p. 5-29.
- Davezies P., Clot Y., 2011, « Des accords sur le stress qui sonnent faux », Santé & travail, 74, p. 26-29.
- Dedieu F., Jouzel J.-N., 2015, « Comment ignorer ce que l’on sait ? », Revue française de sociologie, 56, 1, p. 105-133.
- Delmas C., 2011, « “Stress” et “souffrance au travail” des cadres : enjeu syndical et médiatique » dans P. Bouffartigue, C. Gadéa, S. Pochic (dir.), Cadres, classes moyennes : vers l’éclatement ? Paris, Armand Colin, p. 249-259.
- Delmas C., 2012, « Mobilisation syndicale et expertise en matière de risques psychosociaux. L’Observatoire du stress et des mobilités forcées à France Télécom », La Revue de l’ires, 74, p. 163-174.
- Déplaude M.-O., 2003, « Codifier les maladies professionnelles : les usages conflictuels de l’expertise médicale », Revue française de science politique, 53, 5, p. 707-735.
- Desrosières A., 2014, Prouver et gouverner, Paris, La Découverte.
- Devinck J.-C., Rosental P.-A., 2009, « “Une maladie sociale avec des aspects médicaux” : la difficile reconnaissance de la silicose comme maladie professionnelle dans la France du premier xxe siècle », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 56, 1, p. 99-126.
- Freyssinet J., 2018, « L’Europe sociale : quelles politiques, quels modèles, quels syndicalismes ? », La Revue de l’ires, 96-97, p. 7-38.
- Ghis Malfilatre M., 2017, « La cgt face au problème de la sous-traitance nucléaire à edf. Le cas de la mobilisation de Chinon (1987-1997) », Sociologie du travail [En ligne], 59, 1 | Janvier-Mars 2017, mis en ligne le 01 février 2017, consulté le 02 décembre 2020 : http://journals.openedition.org/sdt/570 ; doi : https://doi.org/10.4000/sdt.570.
- Ghis Malfilatre M., 2018, Santé sous-traitée. Ethnographier les mobilisations contre les risques du travail dans l’industrie nucléaire en France (1968-2018), Thèse pour l’obtention du doctorat de sociologie, Paris, ehess.
- Gilbert C., Henry E., 2012, « La définition des problèmes publics : entre publicité et discrétion », Revue française de sociologie, 53, 1, p. 35-59.
- Gollac M., 2012, « Les risques psychosociaux au travail : d’une “question de société” à des questions scientifiques. Introduction », Travail et emploi, 129, p. 5-10.
- Gusfield J., 2008, La culture des problèmes publics. L’alcool au volant : la production d’un ordre symbolique, Paris, Économica.
- Hassenteufel P., 2011, Sociologie politique : l’action publique, Paris, Armand Colin [2e éd.].
- Hatzfeld N., 2006, « L’émergence des troubles musculo-squelettiques (1982-1996). Sensibilités de terrain, définitions d’experts et débats scientifiques », Histoire & mesure, 21, p. 111-140.
- Hatzfeld N., 2009, « Les malades du travail face au déni administratif : la longue bataille des affections périarticulaires (1919-1972) », Revue d’histoire moderne contemporaine, 56, p. 177-196.
- Henry E., 2003a, « Du silence au scandale », Réseaux, 21, 122, p. 237-272.
- Henry E., 2003b, « Intéresser les tribunaux à sa cause », Sociétés contemporaines, 52, p. 39-59.
- Henry E., 2004, « Quand l’action publique devient nécessaire : qu’a signifié “résoudre” la crise de l’amiante ? », Revue française de science politique, 54, 2, p. 289-314.
- Henry E., 2007, Amiante : un scandale improbable. Sociologie d’un problème public, Rennes, Presses universitaires de Rennes.
- Henry E., 2017, Ignorance scientifique et inaction publique. Les politiques de santé au travail, Paris, Presses de Sciences Po.
- ilo, 1993, Preventing Stress at Work. Conditions of Work Digest 2/92, International Labour Organization.
- Jouzel J.-N., 2009, « Entre deux mondes : la trajectoire publique d’une menace chimique à bas bruit » dans C. Gilbert, E. Henry (dir), Comment se construisent les problèmes de santé publique, Paris, La Découverte, p. 195-212.
- Jouzel J.-N., 2013, Des toxiques invisibles. Sociologie d’une affaire sanitaire oubliée, Paris, ehess.
- Jouzel J.-N., Dedieu F., 2013, « Rendre visible et laisser dans l’ombre. Savoir et ignorance dans les politiques de santé au travail », Revue française de science politique, 63, 1, p. 29-49.
- Jouzel J.-N., Prete G., 2016, « Des journalistes qui font les victimes ? Traitement médiatique des maladies professionnelles liées aux pesticides », Études rurales [En ligne], 198 | 2016, mis en ligne le 01 décembre 2018, consulté le 02 décembre 2020 : http://journals.openedition.org/etudesrurales/11361 ;doi : https://doi.org/10.4000/etudesrurales.11361.
- Jouzel J.-N., Prete G., 2017, « La normalisation des alertes sanitaires. Le traitement administratif des données sur l’exposition des agriculteurs aux pesticides », Droit et société, 96, p. 241-256.
- Karasek R. A., 1979, « Job Demands, Job Decision Latitude, and Mental Strain: Implications for Job Redesign », Administrative Science Quarterly, 24, 2, p. 285-308.
- Lallement M., Marry C., Loriol M., Molinier P., Gollac M., Marichalar P., Martin E., 2010, « Maux du travail : dégradation, recomposition ou illusion ? », Sociologie du travail [En ligne], Vol. 53 - no 1 | Janvier-Mars 2011, mis en ligne le 15 novembre 2018, consulté le 02 décembre 2020 : http://journals.openedition.org/sdt/5998 ;doi : https://doi.org/10.4000/sdt.5998
- Lazarus R. S., Folkmann S., 1984, Stress: Appraisal and Coping, New York, Springer.
- Lecoeur G., 2018, De la gestion des maux au « travail des mots ». Contribution à une sociologie historique d’un répertoire sémantique des maux du travail (xviie siècle à nos jours), Thèse pour le doctorat de sociologie, Paris, Cnam.
- Légeron P., Nasse P., 2008, Rapport sur la détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail, Rapport public, ministère du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité.
- Loriol M., 2008, « La reconnaissance juridique du stress au travail » dans M. Buscatto, M. Loriol, J.-M. Weller (dir.) Au-delà du stress au travail. Une sociologie des agents publics au contact des usagers, Toulouse, Érès, p. 91-109.
- Loriol M., 2011, « Pourquoi tout ce stress ? », Sociologie du travail, 53, 1, p. 9-14.
- Loriol M., 2012, La construction du social. Souffrance, travail et catégorisation des usagers dans l’action publique, Rennes, Presses universitaires de Rennes.
- Marchand A., 2018, Reconnaissance et occultation des cancers professionnels : le droit à réparation à l’épreuve de la pratique (Seine-Saint-Denis), Thèse pour l’obtention du doctorat d’histoire et de sociologie, Évry, Université Paris-Saclay.
- Marichalar P., 2011, Prévenir ou produire. Autonomie et subordination dans la médecine du travail (France, 1970-2010), Thèse pour l’obtention du titre de docteur de l’ehess en sociologie, Paris, ehess.
- Marichalar P., 2014, « Un pas de côté vers le psychisme. La recherche sur les facteurs psychosociaux de risque liés au travail en Suède » dans L. Lerouge (dir.), Approche interdisciplinaire des risques psychosociaux au travail, Toulouse, Octarès, p. 299-208.
- Marichalar P., 2017, Qui a tué les verriers de Givors ? Paris, La Découverte.
- Marichalar P., Martin E., 2011, « Les syndicats et la souffrance », Sociologie du travail, 53, 1, p. 30-36.
- Markowitz G., Rosner D., 2002, Deceit and Denial: The Deadly Politics of Industrial Pollution, Berkeley (ca), University of California Press/Milbank Memorial Fund.
- Massin B., 2014, « Épistémologie des risques psychosociaux » dans P. Zawieja, F. Guarneri (dir), Dictionnaire des risques psychosociaux, Paris, Le Seuil, p. 265-268.
- Neveu E., 2015, Sociologie politique des problèmes publics, Paris, Armand Colin.
- Niedhammer I., Ganem V., Gendrey L., David S., Degioanni S., 2006, « Propriétés psychométriques de la version française des échelles de la demande psychologique, de la latitude décisionnelle et du soutien social du “Job Content Questionnaire” de Karasek : résultats de l’enquête nationale sumer », Santé publique, 18, 3, p. 413-427.
- Ponge R., 2018, Pour ne plus perdre son esprit au travail. Sociologie historique d’une préoccupation syndicale pour la santé des travailleurs/ses (1884-2007), Thèse pour l’obtention du doctorat de sociologie, Université Paris-Saclay.
- Ponge R., 2020, « Un droit des corps meurtris. Retour sur les ressorts de la résistance du système des tableaux aux souffrances psychiques », dans C. Cavalin, E. Henry, J.-N. Jouzel, J. Pélisse (dir.), Cent ans de sous-reconnaissance des maladies professionnelles, Paris, Presses de l’Ecole des mines, p. 107-124.
- Quéruel N., 2009, « Mal être au travail : une enquête incontestable », Santé & travail, 065.
- Rabatel A., 2010, « Le traitement médiatique des suicides à France Télécom de mai-juin à mi-août 2009 : la lente émergence de la responsabilité du management dans les suicides en lien avec le travail », Studia Universitatis Babes Bolyai - Studia Philologia, 55, 1, p. 31-52.
- Rainhorn J., 2019, Blanc de plomb. Histoire d’un poison légal, Paris, Presses de Sciences Po.
- Rascle N., 2014, « Coping » dans P. Zawieja, F. Guarneri (dir), Dictionnaire des risques psychosociaux, Paris, Le Seuil, p. 157-160.
- Robatel N., 2009, « Depuis quand parle-t-on de stress ? » dans A. Thébaud-Mony, N. Robatel (dir.), Stress et risques psychosociaux au travail, Paris, La Documentation française, p. 80-81.
- Salah-Eddine L., 2008, Le harcèlement moral au travail : analyse sociologique, Thèse pour l’obtention du doctorat de sociologie, Paris, Université Paris-Descartes (Paris V).
- Salengro B., 2005, Le stress des cadres, Paris, L’Harmattan.
- Salman S., 2008, « Fortune d’une catégorie : la souffrance au travail chez les médecins du travail », Sociologie du travail, 50, 1, p. 31-47.
- Salman S., 2013, Une hygiène psychique au travail ? Genèse et usages du coaching en entreprise en France, Thèse pour l’obtention du doctorat de sociologie, Nanterre, université Paris Ouest Nanterre.
- Stevens H., 2008, « Quand le psychologique prend le pas sur le social pour comprendre et conduire des changements professionnels », Sociologies pratiques, 17, p. 1-11.
- Thébaud-Mony A., 1991, De la connaissance à la reconnaissance des maladies professionnelles en France : acteurs et logiques sociales, Paris, La Documentation française.
- Thébaud-Mony A., 2014, La science asservie. Santé publique : les collusions mortifères entre industriels et chercheurs, Paris, La Découverte.
- Vatin F., 2011, « La question du “suicide de travail” », Commentaire, 134, p. 405-416.
Mots-clés éditeurs : Action publique, Travail, État, Syndicat, Stress, Maladie professionnelle, Risques psychosociaux
Date de mise en ligne : 24/03/2021
https://doi.org/10.3917/rfs.613.0435Notes
-
[1]
Toute ma gratitude va à Catherine Omnès, Olivia Samuel et François Théron, qui ont discuté une première version martyre de ce texte et m’ont donné l’impulsion pour essayer de le perfectionner, tout comme Marie Ghis Malfilatre, Jean-Noël Jouzel, Sylvain Brunier et Giovanni Prete ainsi qu’Aurélie Gonnet et Armèle Cloteau. Ce texte doit également aux lecteurs/rices anonymes de la RFS et aux membres de son comité de lecture, que je remercie vivement pour la grande qualité et la précision de leurs retours.
-
[2]
Le choix des catégories n’est pas neutre tant il traduit une manière de définir la situation et d’y faire face. En matière de santé au travail, il pose la question de savoir si la cause du problème relève du travail, et donc de la responsabilité de l’employeur, ou bien du salarié. Afin de prêter attention aux catégories mobilisées par les acteurs et aux luttes qu’elles recouvrent, j’emploierai les termes souffrance ou trouble psychique pour désigner à la fois les maladies reconnues dans les classifications médicales internationales (états dépressifs, troubles anxieux, stress post-traumatique, etc.) et des formes de souffrance plus diffuses et non reconnues médicalement, telles que le burn out. Sur ces enjeux de catégorisation, voir Michel Lallement et al. (2010) et Marc Loriol (2012).
-
[3]
Le syndrome de stress post-traumatique (1979), le suicide (1986) ou la dépression (2003).
-
[4]
Voir Marc-Olivier Déplaude (2003), Jean-Claude Devinck et Paul-André Rosental (2009), Nicolas Hatzfeld (2009), Emmanuel Henry (2017), Anne Marchand (2018), Judith Rainhorn (2019), Catherine Cavalin et al. (2020).
-
[5]
L’accès à ces documents est laissé à la discrétion du ministre.
-
[6]
Les enquêtes « Conditions de travail » (1998) et « Surveillance médicale des expositions aux risques » (2003).
-
[7]
Entretien de l’auteur avec une chercheuse de l’inrs, mars 2015.
-
[8]
Voir ihs-cgt, 163 cfd 56, Note interne, « Harcèlement moral », Fichier pour le groupe de travail, 19 octobre 1999 ; ihs-cgt, 163 cfd 29, 37 et 40.
-
[9]
ihs-cgt, 163 cfd 40, Actes de la première rencontre pluridisciplinaire « Santé et travail », Sénat, 8 avril 1999 (p. 1).
-
[10]
Loi no 2002-73 du 17 janvier 2002.
-
[11]
Questions au gouvernement publiées au Journal officiel : C. Estrosi, question no 27255, p. 8097 et Bérengère Poletti, question no 29074, p. 8883, 27 octobre 2003 ; Philippe Vuilque, question no 33588, p. 983, 10 février 2004 ; Francis Saint Léger, question no 38779, p. 3251, 4 mai 2004 ; Ch. Estrosi, question no 41953, p. 4602, 22 juin 2004 ; Source : http://www.assemblée-nationale.fr[consulté le 10 janvier 2018].
-
[12]
C. Estrosi, question no 27255, p. 8097, 27 octobre 2003, op.cit.
-
[13]
La sénatrice a reçu près de 700 témoignages sur son site internet de salarié·e·s de France Télécom qui dénoncent le harcèlement ou la souffrance dont ils sont victimes. ihs-cgt, 163 cfd 56, « France télécom, explosion de la souffrance au travail », Conférence de presse organisée par M.-C. Beaudeau, sénatrice du Val-d’Oise, Sénat, 23 juin 2004.
-
[14]
Questions au gouvernement publiées au Journal officiel : M.-C. Beaudeau, question no 9709, 6 novembre 2003. Source : https://www.senat.fr/quesdom.html [consulté le 10 janvier 2018].
-
[15]
Réponse à la question de Mme M.-C. Beaudeau, question au gouvernement, question no 9709, 6 novembre 2003, juillet 2004. Source : http://www.assemblée-nationale.fr[consulté le 10 janvier 2018].
-
[16]
Ibid.
-
[17]
cfdt, 24 ce 7, ces, Comité exécutif, « Dialogue social, résultats des négociations sur le stress », Bruxelles, 9-10 juin 2004.
-
[18]
cfdt, 24 ce 7, cfdt, Compte rendu du séminaire sur le stress organisé par la ces et l’unice, sous l’égide de la Commission européenne, 25 et 26 février 2003, Bruxelles.
-
[19]
cfdt, 24 ce 7, ces, 9-10 juin 2004 (p. 12).
-
[20]
Accord-cadre européen sur le stress au travail, 8 octobre 2004 (p. 2). Source : http://www.travail-emploi.gouv.fr[consulté le 19 janvier 2018].
-
[21]
Ibid. (p. 2).
-
[22]
Ibid. (p. 2).
-
[23]
ihs-cgt, 163 cfd 32, Gilles Seitz, Note sur l’accord proposé sur le stress au travail au niveau européen, 6 juin 2004, p. 3 ; cfdt, 24 ce 7, cfdt, Note sur l’accord-cadre signé le 8 octobre, 2004.
-
[24]
Entretien de l’auteur avec une chargée de mission à la drt, 24 avril 2020.
-
[25]
Le choix de ces acteurs doit être approuvé par les membres des organisations représentatives.
-
[26]
dgt, 2011/010/07/ct2, drt, « Lancement d’un groupe de réflexion sur les psychopathologies au travail », Note au directeur des relations de travail, 25 janvier 2005.
-
[27]
Psychopathologies : « L’ensemble des maladies psychiques, psychosomatiques et psychologiques liées au stress d’origine professionnelle et aux risques psychosociaux, tels que le harcèlement et tous les autres risques liés aux conditions de travail », dgt, 2011/010/07/ct2, drt, « Lancement d’un groupe de réflexion sur les psychopathologies au travail », Note au directeur des relations de travail, 25 janvier 2005 (p. 1).
-
[28]
Ibid. (p. 4).
-
[29]
Ibid. (p. 1).
-
[30]
dgt, 2011/010/7, Annotations manuscrites sur le document : drt, « Lancement d’un groupe de réflexion sur les psychopathologies du travail, » Note à Jean-Denis Combrexelle, directeur des relations du travail, 25 janvier 2005.
-
[31]
Laurent Hénart (31 mars 2004-31 mai 2005) et Gérard Larcher (2 mai 2005-15 mai 2007).
-
[32]
dgt, 2011/010/07/ct2, drt, Jean-Denis Combrexelle, « Lancement d’un groupe de réflexion sur les psychopathologies au travail », Note à la directrice de cabinet du ministère du Travail, 27 février 2005.
-
[33]
cfdt, 24 ce6, csprp, Compte rendu de l’Assemblée plénière du 24 mai 2006.
-
[34]
dgt 2011/010/07/ct2, dgt, « Mission du rapporteur du groupe de travail “psychopathologies” », Note au directeur de cabinet du ministre du Travail, 29 septembre 2006.
-
[35]
Le nom de cet acteur a été changé.
-
[36]
apr-cfdt, csprp, « Groupe de réflexion sur les psychopathologies », Compte rendu, réunion 5 octobre 2006.
-
[37]
apr-cfdt, csprp, « Groupe de réflexion sur les psychopathologies », Compte rendu, réunion 5 octobre 2006.
-
[38]
apr-cfdt, csprp, « Groupe de réflexion sur les psychopathologies », Compte rendu, réunion 6 mars 2007.
-
[39]
apr-cgt, M. Simon, Psychopathologie et travail… (op. cit., p. 41).
-
[40]
apr-cgt, M. Simon, Psychopathologie et travail (op. cit., p. 39).
-
[41]
Ibid. (p. 39-40).
-
[42]
Ibid. (p. 8).
-
[43]
À l’image du manuel statistique et diagnostic des troubles mentaux (dsm42), ouvrage de référence publié par l’Association américaine de psychiatrie.
-
[44]
Décret no 91-577 du 03/09/1991, Journal officiel du 07/09/1991. Source : http://www.inrs.fr [consulté le 27 juillet 2019].
-
[45]
dgt 2011/010/07/ct2, M. Simon, Courrier au chef du bureau ct2, 24 août 2007.
-
[46]
apr-cgt, M. Simon, Psychopathologie et travail. Première partie. Rapport, 24 août 2007 (p. 37).
-
[47]
Ibid. (p. 41).
-
[48]
X. Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, Dossier de presse « Conférence sociale tripartite sur les conditions de travail », jeudi 4 octobre 2007 (p. 5). Source :http://www.travail.emploi.gouv.fr[consulté le 23 janvier 2018].
-
[49]
https://www.humanite.fr/node/389389 [consulté le 29 avril 2020].
-
[50]
Archives du responsable confédéral cgt49 en charge de l’activité « Travail-santé », Compte rendu 2e séance de négociation sur le stress au travail, 5 mai 2008.
-
[51]
https://www.20minutes.fr/france/346279-20090909-salarie-france-telecom-poignarde-pleine-reunion[consulté le 19 septembre 2020].
-
[52]
https://www.vie-publique.fr/ressources/mots-cles/suicide?page=2[consulté le 19 septembre 2020].
-
[53]
À la suite du rapport Nasse-Légeron, le ministre confie à un second groupe d’experts le soin de construire un « indicateur de mesure et de suivi des risques psychosociaux » (Gollac, 2012).
-
[54]
dgt 2011/010/07/ct2, coct, csmp, Compte rendu, réunion 20 janvier 2010.
-
[55]
« Dépression mélancolique » liée à l’exposition au bromure de méthyle (Tableau no 26) ; « Troubles psychiques aigus avec confusion mentale, délire onirique » ou « Troubles psychiques chroniques avec états dépressifs et impulsions morbides » (Tableau no 22, exposition au sulfure de carbone) ; « Manifestations psychopathologiques […] syndrome dépressif » (Tableau no 24, résultant de la brucellose).
-
[56]
Entretien de l’auteur, novembre 2014.
-
[57]
Entretien de l’auteur avec deux représentants de la cgt à la csmp, avril 2020.