Couverture de RFS_523

Article de revue

Contributions historiennes au renouveau de la sociologie de l'État Regards croisés franco-américains

Pages 579 à 602

Notes

  • [1]
    Le choix de restreindre ce texte aux travaux américains et français découle donc avant tout de la nature archétypale de ces deux cas. Une évolution comparable se retrouve cependant ailleurs. En Allemagne, par exemple, l’État a cessé d’être l’un des facteurs pris en compte dans l’histoire sociale pour devenir l’objet même de l’investigation (Gosewinkel, 2006).
  • [2]
    Ce premier groupe de travaux américains porte notamment sur le genre (Gordon L., 1994), la conquête de l’Ouest (White, 1991) ou encore les questions environnementales (Hays, 1987).
  • [3]
    Comme le montrent, par exemple et de manière exemplaire, la bibliographie et la table des matières de Baruch et Duclert (2000).
  • [4]
    Pour une histoire détaillée du développement de ce sous-champ, voir Graham (1993) et Zelizer (2000).
  • [5]
    Sur ce point, voir la discussion organisée à l’occasion des cinquante ans de la parution de Building a new American State (Balogh, 2003 ; Zelizer, 2003).
  • [6]
    Pour un débat sur ce point, voir Zelizer (2005) et Pierson (2005).
  • [7]
    Plus récemment, Mashaw (2005) a mis en évidence l’existence, dès la création des États-Unis, d’un véritable droit administratif qui témoigne de la présence d’une administration centralisée.
  • [8]
    Voir également John (2006).
  • [9]
    Dans cette catégorie figurent les travaux sur la Civil war, dont le rôle fut fondamental dans le développement de l’État américain (Wilson, 2006).
  • [10]
    Pour la période précédente, voir Braddick (1996).
  • [11]
    Voir également Stasavage (2003).
  • [12]
    Dans la même perspective, et dans le domaine cette fois de la science politique, en 1980, commentant la sortie alors récente de l’ouvrage devenu classique de Birnbaum et Badie, Lavau considérait déjà que « plus on voit fonctionner le couple conceptuel “société civile”- “État”, plus grandit la perplexité. D’abord parce qu’il n’est pas sûr que ce couple conserve beaucoup de sens lorsqu’on le détache des configurations théoriques d’ensemble (chez Hegel, chez Marx, chez Gramsci) à l’intérieur desquelles les éléments de ce couple faisaient sens » (1980, p. 410).
  • [13]
    Dans ce domaine, voir bien sûr la recherche pionnière de Charle (1987). Lire également Gribaudi (1998), Gribaudi et Magaud (1999).
  • [14]
    Pour une lecture critique par cet auteur du concept même d’État dans son acception courante, voir Raggio (1995). Voir également Cerutti (1990).
  • [15]
    Une approche comparable se retrouve dans les travaux qui portent attention non à l’articulation entre État fédéral et états, mais entre l’administration fédérale et les cours de justice locales, qui, tout en étant indépendantes du pouvoir administratif, furent très tôt l’un des principaux acteurs de son implémentation à l’échelon local (Schiller, 2005).
  • [16]
    Pour une autre étude de cas, sur une période plus récente, voir Lieberman (2009).
  • [17]
    Pour une synthèse sur cette question, voir la communication de Chatriot (2010).
  • [18]
    Lui-même également utilisé puisqu’il est question « d’organisation de l’État » (Baruch et Duclert, 2003, p. 509). Les termes employés relèvent de l’organique, à l’image de « machinerie de l’État » ou d’« appareils d’État » (Baruch et Duclert, 2000, pp. 6-7). Dans ses premiers travaux, Baruch emploie le terme d’ossature en précisant de quelle manière, à travers l’administration, c’est bien de l’étude de l’État dont il est question : « sans que l’administration se confonde juridiquement avec l’État, elle en constitue l’ossature » (1997, p. 14). Voir également Baruch et Duclert (2002).
  • [19]
    Ces travaux font figure d’exemple dans l’historiographie française, mais ils ne sont pas les seuls à avoir réintroduit l’histoire sociale et politique de l’administration comme une voie d’accès à celle de l’État (Viet, 1994 ; Kott, 1995 ; Dard, 2002 ; Andrieu, 2002). Également pour une approche de l’administration du renseignement (Laurent, 2004, 2007), de l’État en période de crise (Thénault, 2001 ; Bancaud, 2002) ou encore du cas soviétique (Cohen, 2003).
  • [20]
    Notamment Baruch et Bezes (2006).
  • [21]
    Les débats déjà anciens qui ont suivi le développement de la micro-histoire italienne et son traitement de l’État semblent également porteurs de réflexions stimulantes. Pour deux synthèses, lire Chittolini (1995) et Guarini (1995). Il est à cet égard surprenant de voir que ces travaux ne sont que très rarement cités dans les débats historiens ou politistes contemporains, qui semblent redécouvrir aujourd’hui certains des thèmes abordés à l’époque.
  • [22]
    Sur ce point précis, lire Gensburger (2010).
  • [23]
    Pour une prise en compte historienne convergente du welfare, voir Jacoby (1997) et Katz (2001).
  • [24]
    Sur cette question, lire également Gordon C. (2003).

1 Dans l’Hexagone comme outre-Atlantique, l’intérêt des historiens pour l’État est relativement récent  [1]. En 1990, encore, Rosanvallon déplorait le fait que l’État demeurait un « non-objet historique » (p. 9), tandis que, quatre ans plus tôt, pour Leuchtenburg, alors président de l’Organization of American historians, l’État restait un domaine à conquérir, une « new frontier », pour sa discipline (1986, p. 589). Le « retour aux acteurs » a, depuis, conduit les historiens à rencontrer l’État (Revel, 1995 ; Guéry, 1997 ; Boucheron, 1998 ; Chatriot, 2006). Aux États-Unis, « social and cultural historiansfollowed their stories inside city hall [and] State houses » (Balogh, 2003, p. 458)  [2]. En France, et pour ne prendre que l’exemple de l’histoire moderne, au demeurant pionnière sur cette thématique, la focale s’est, de même, peu à peu déplacée : de l’attention aux facteurs de la formation des États (Tilly, 1975, 1990) à celle aux simples « sujets » du roi (Te Brake, 1998 ; Gorski, 2001).

2 Si, dans les deux pays, ces travaux aboutissent à des reformulations théoriques majeures, ils connaissent cependant des institutionnalisations différenciées : au sein de la discipline historique, d’une part, dans les relations qu’ils entretiennent avec la sociologie et la science politique, de l’autre. Dans l’Hexagone, l’intérêt des historiens du contemporain pour cette thématique a été encouragé par la création de comités d’histoire dont la fin des années 1980 a vu la multiplication, à l’image du Comité d’histoire économique et financière instauré en 1986 par le ministère de l’Économie, des Finances et du Budget (Margairaz, 1991). À la même époque, des financements publics permettent la conduite d’un important programme européen sur la « Genèse de l’État moderne », consacrant le rôle central de l’histoire moderne dans le développement de recherches historiennes sur l’État (Descimon et Guéry, 1989 ; Schaub, 1996 ; Genet, 1997). Peut-être du fait de cette césure entre historiens aux périodes de spécialisation différentes et malgré un certain nombre de réflexions historiographiques sur ce qui prend peu à peu la forme d’une « histoire de l’État » (Fridenson, 2000 ; Chatriot, 2006), cette dernière n’a toutefois pas connu de véritable institutionnalisation. Cet état de fait va de pair avec la faiblesse du dialogue de ces travaux historiens avec ceux produits par la sociologie et la science politique, à l’image du peu de place que les historiens donnent aux recherches qui s’inscrivent dans la mouvance de la socio-histoire (Quennouëlle, 2002)  [3]. À cet égard, les publications les plus récentes marquent une rupture. Ce n’est pas, alors, la sociologie de l’État proprement dite, mais l’analyse des politiques publiques qui est mobilisée. Tandis que, désormais, cette dernière cherche elle-même à opérer un retour au concept d’État, elle est vue ici, et donc de manière paradoxale, comme un moyen de renouveler l’approche historienne en la matière (Capuano, 2009 ; Delalande, 2009).

3 Dans le cas américain, le chemin est inversé  [4]. Un intérêt historien pour l’État se fait d’abord jour dans les années 1970, pour partie du fait de la pénurie d’emplois académiques offerts aux historiens. Ce Public history movement aboutit alors à la création d’une association professionnelle et d’une revue, The public historian. Ce n’est cependant qu’à la fin de la décennie que cette évolution rejoint véritablement la recherche universitaire. En 1987, une nouvelle revue, cette fois strictement académique, est créée. Si The journal of policy history ne traite pas uniquement de l’État, la question de la nature, du fonctionnement et des recompositions de celui-ci y tient une place croissante, aujourd’hui centrale. Cette institutionnalisation réussie d’un sous-champ tient d’abord à l’importance du dialogue de ces historiens avec l’institutionnalisme historique, qui a connu un développement exponentiel au sein de la science politique américaine  [5]. Comme le résume Zelizer, historien et directeur du Journal of policy history : « Given the state of politics within the history profession, some of the most prominent political historians by the 1990s tended to be political scientists. » (2004, p. 128). Aujourd’hui les échanges demeurent constants entre l’institutionnalisme historique, et plus largement l’American political development, et les travaux historiens qui traitent de l’État  [6]. La question de la continuité et du changement est au cœur de ce dialogue. L’enjeu pour les historiens est ainsi de déterminer, d’un côté, s’il est pertinent de parler de State building, c’est-à-dire d’un début et d’une fin ; de l’autre, si l’État – en l’espèce américain – a le même sens, le même but et le même pouvoir selon les époques. Cette interrogation se retrouve dans l’Hexagone – et donc dans un tout autre paysage académique : « Tout se passe en effet comme si l’on considérait que l’État n’avait pas véritablement d’histoire, son développement n’étant que la pure reproduction, sans cesse agrandie, d’une figure qui aurait été formée à l’origine. » (Rosanvallon, 1990, p. 10).

4 Ainsi, malgré l’éclatement des travaux historiens qui traitent de l’État en France, et la reprise par les historiens américains de nombre des questionnements de l’American political development, des axes transversaux apparaissent. Ils constituent autant de perspectives à partir desquelles enrichir la reformulation en cours de la sociologie de l’État. Ceux-ci relèvent d’approches de l’État, respectivement organisationnelle, relationnelle et cognitive.

La remise en cause d’une approche unidimensionnelle de l’État

5 « Les États ne sont pas tant plus forts ou plus faibles les uns des autres que qualitativement différents. » (Baldwin, 2005, p. 13). Cette citation résume parfaitement la conclusion principale à laquelle les travaux historiens sur l’État ont abouti ces dernières années. Ils sont ainsi le plus souvent comparatistes. Dans Birth of the Leviathan (1997), Ertman reprend, par exemple, la thèse classique du rôle de la guerre dans la naissance de l’État pour s’interroger plus spécifiquement sur les causes de la différenciation entre les régimes dotés d’administrations bureaucratiques et ceux structurés autour d’une dynamique principale de patrimonialisation. Il conclut sur la nécessité de dépasser l’opposition entre État absolutiste et État constitutionnaliste pour proposer une nouvelle typologie croisant deux axes : absolutisme/constitutionnalisme (regime structure) et patrimonialisme/bureaucratie (administrative infrastructure). Cette nouvelle catégorisation conduit à un renversement de perspective. L’État français habituellement considéré comme bureaucratique apparaît à structure patrimoniale, au motif que la dépatrimonialisation y a été particulièrement tardive. À l’inverse, l’État anglais, d’ordinaire caractérisé par son peu d’interventionnisme, devient un État doté d’une bureaucratie protomoderne (Mann, 2000, pp. 333-334). De même, les travaux comparatifs dirigés par Brewer et Hellmuth (1999) mettent en évidence les limites théoriques de l’opposition traditionnelle entre les États prussien (bureaucratique, absolutiste, militaire) et britannique (constitutionnaliste, parlementaire, commercial). Mais, même lorsque les recherches historiennes sur l’État sont d’ordre monographique, elles ont pour horizon implicite la comparaison entre des États américain ou anglais, tous deux traditionnellement caractérisés par leur faiblesse au regard d’une « société civile » qui tient le premier rôle, et un État français, vu comme le modèle du « véritable État », doté d’une administration forte imperméable aux corps intermédiaires. À cet égard, la remise en cause simultanée de ces deux visions archétypales marque un tournant.

La « découverte » de l’interventionnisme de l’État américain

6 Dans cette évolution, l’historiographie américaine joue un rôle moteur. La vulgate historienne a longtemps considéré que l’État fédéral américain était traditionnellement inexistant et que le principe du laissez-faire caractérisait son action. Seuls le tournant de la Progressive era du début du XXe siècle et surtout la mise en place du New deal dans l’entre-deux-guerres auraient donné naissance à un véritable État, qui, malgré des signes de puissance au niveau international, aurait continué à être en retrait. Bien entendu les travaux de Skowronek (1982) ont marqué une première remise en cause de cette lecture. Mais ils se limitent au XIXe siècle et, tout en affirmant l’existence et l’autonomie de l’État, le décrivent comme structuré par les partis et les tribunaux et donc dans un état d’incomplétude par rapport aux États européens, français ou allemand. Ainsi, les recherches historiennes ont depuis mis en évidence l’existence d’un État administré et centralisé, et ce bien avant la fin du XIXe siècle. « The American State is and always has been more powerful, capacious, tenacious, interventionist, and redistributive than was recognized in earlier accounts of U.S. history. » (Novak, 2008, p. 758). L’histoire du droit a été pionnière dans cette révision historiographique. L’ouvrage de Novak (1996) compte parmi ceux qui ont ouvert la voie  [7]. Il s’appuie sur un corpus juridique, qui avait été jusqu’ici presque totalement négligé par les historiens, pour mettre en évidence l’interventionnisme de l’État dans les domaines de l’économie, de l’urbanisme, des transports, des mœurs, de l’hygiène ou encore de la santé publique. Il forge alors le concept de « well-regulated society » pour décrire la manière dont, aux États-Unis, les intérêts et les droits des individus sont effectivement encadrés par l’État. Novatrice, cette recherche laisse cependant ouverte tant la question des effets de cette réglementation abondante que celle de la construction par l’État de non-droits et de discriminations.

7 Des études thématiques qui mêlent sources législatives et archives de leur mise en œuvre ont depuis comblé cette lacune. L’État apparaît alors comme ayant fortement encadré, permis et organisé le développement économique au pays du « laissez-faire ». L’étude de la création du système postal par John (1995) fait à cet égard figure de classique. L’auteur y montre comment le développement d’un réseau postal est l’œuvre du gouvernement fédéral et y insiste sur le rôle central que celui-ci a joué dans la naissance d’une économie nationale, en dessinant, par exemple, les voies de communications ou le rythme de la vie collective. De même, les ouvrages de Bensel (1991, 2000) décrivent de manière systématique comment l’industrialisation des États-Unis a été encadrée, portée et facilitée par l’État fédéral  [8]. Un deuxième grand domaine d’étude concerne, lui, la délimitation de l’espace national et de ses frontières  [9]. Le livre de White (1991) montre comment, loin d’être un lieu de non-droit, l’Ouest américain fut une création continue du gouvernement fédéral. En retour, son développement a structuré la mise en place d’une véritable bureaucratie, importante en nombre et répartie sur l’ensemble du territoire, à tel point que, symbole de l’individualisme américain, l’Ouest apparaît comme le laboratoire du « big government ». Parmi les politiques mises en œuvre par l’administration figurent, également, celles qui visent à la catégorisation des citoyens et des non-citoyens. La mise en place de l’esclavage puis de la ségrégation raciale constitue ainsi une illustration particulièrement saisissante de l’existence d’un État interventionniste aux États-Unis (King, 1995 ; Fehrenbacher, 2001 ; Ngai, 2004). Lié à cette question, le « police power », qui va jusqu’au contrôle des mœurs et des comportements intimes, constitue enfin un important champ d’investigation. Ces tentatives de contrôle étatique sur le privé, jusqu’à l’intime, manifestent ainsi avec d’autant plus de force l’existence d’un État américain bien avant le début du XXe siècle, comme l’ampleur de son interventionnisme comparé à celui de ses équivalents européens, davantage en retrait sur ces questions (Stearns, 1999 ; Gordon S.B., 2002 ; Tomlins, 2008).

L’entre-deux britannique

8 Le changement de paradigme se retrouve à l’identique dans l’étude du cas britannique. Les travaux de Daunton (2001, 2002) sur la mise en place de la taxation en Grande-Bretagne ont ainsi montré comment les institutions britanniques – et notamment la place qu’y tient l’articulation entre gouvernement central et pouvoirs locaux – ont permis le développement, au XIXe siècle, d’un système fiscal qui a rendu possibles la collecte d’une part du revenu national bien supérieure aux prélèvements alors effectués par l’État français, mais aussi la contraction d’emprunts d’État par un nombre de citoyens largement supérieur, ou encore la mise en place d’impôts directs plus tôt et plus largement  [10]. Dès lors que l’on considère que le prélèvement fiscal et le consentement à l’impôt comptent parmi les principaux critères d’existence d’un État, il apparaît qu’une plus faible institutionnalisation de l’État britannique va de pair avec une large emprise sur la société  [11]. L’étude de ce que l’on appellerait aujourd’hui des politiques de santé publique aboutit aux mêmes conclusions. La mise en place, à l’époque des grandes épidémies, par l’Allemagne et la France de contrôles et de restrictions aux frontières a jusqu’ici été interprétée comme le signe de la puissance de ces États, l’absence de mesures comparables pour le cas britannique constituant un symptôme de la faiblesse de cet État. Les travaux de Baldwin (1999) renversent la perspective pour montrer que cet interventionnisme à la marge du territoire n’a fait que compenser l’impuissance des administrations allemande et française à mettre en place les actions nécessaires à la prise en charge de l’épidémie à l’intérieur du pays. À l’inverse, forts de leur expérience en matière d’hygiène publique et de lutte contre l’insalubrité, les Britanniques ont disposé d’un ensemble de services dédiés, dépendant de l’État central mais organisés dans un rapport articulé avec les pouvoirs locaux et les villes, ce qui leur a permis de laisser franchir leur frontière, y compris aux malades. Vu sous cet angle, l’État britannique apparaît comme clairement interventionniste : « A strong State, one might be tempted to conclude, is not seen, while a weak one flails about noisily. » (Baldwin, 2005, p. 24). Ce type de travaux a donné naissance à une nouvelle hypothèse : « still interventions run deep », en d’autres termes, l’invisibilité de l’État pourrait être un signe de son omniprésence.

9 Plus largement, ces deux travaux d’envergure invitent à substituer une approche qualitative et pluridimensionnelle de l’État à l’approche quantitative longtemps dominante. Elles convergent sur ce point avec la réflexion de Laborde (2000a) qui porte également sur le cas anglais mais relève, elle, de l’histoire des idées politiques. L’auteure s’intéresse à l’utilisation du terme même d’« État » dans le débat politique anglais. À partir de cette étude de cas, elle renvoie dos-à-dos les tenants de l’idée que l’Angleterre serait non seulement sans État, mais qu’elle ne connaîtrait pas jusqu’au concept même d’État (Nettl, 1968 ; Badie et Birnbaum, 1979 ; Dyson, 1980) et leurs contestataires, qui, preuves à l’appui, montrent que l’Angleterre a connu historiquement un tel concept – entendu comme État fort bureaucratique – dans son débat politique (Meadowcroft, 1995). Ces travaux montrent en effet que le concept d’État n’est pas plus présent en France qu’en Angleterre, ni l’inverse, mais que le même mot désigne des réalités différentes que l’étude des représentations permet de saisir. D’où, une fois de plus, une invitation à emprunter de nouvelles voies pour penser l’État : « La recherche comparative sur le concept d’État serait affinée, dès lors, si au lieu de distinguer entre traditions “avec État” et traditions “sans État”, on s’attachait à analyser les différents degrés et types de contestabilité du concept dans des traditions différentes. Et qui sait si, dans cette optique, les étrangers ne nous apparaîtront non plus comme désespérément dépourvus, mais plutôt comme différemment dotés. » (Laborde, 2000b, p. 82).

Retour critique sur la caractérisation de l’État français comme modèle

10 On l’aura compris, dans ces travaux, l’État français constitue le canon du véritable État. Il est donc frappant de constater que cette remise en cause de la caractérisation des États américain et britannique comme des États faibles, en retrait voire inexistants, est exactement concomitante d’un retour critique sur l’interventionnisme et la force supposés de cet État français. Dans son ouvrage Origins of the French welfare State, Dutton (2002 ; voir aussi 2007) met, par exemple, à mal la vision d’un État centralisé et jacobin où l’intérêt général et le traitement universaliste prévaudraient. À travers l’étude de la mise en place des allocations familiales et de l’assurance sociale, il montre, au contraire, que l’État social français s’est construit à travers une négociation permanente avec un grand nombre d’acteurs collectifs, au premier rang desquels les sociétés d’aide mutuelle et les associations familiales.

11 Au-delà de cet ouvrage majeur, depuis quelques années, les travaux se multiplient pour nuancer l’idée même de « différenciation », centrale pour la sociologie de l’État, et finalement inviter au dépassement de l’opposition traditionnelle entre « jacobinisme » et « corporatisme » (Lemercier, 2005a). Le rôle de relais, mais aussi d’expertise ou encore d’informateurs joué par plusieurs organisations ou groupements privés dans la conduite et la détermination de l’action de l’État au XIXe siècle a ainsi été mis en évidence (Kaplan et Minard, 2004). De même, la notion d’« impératif de gouvernabilité » a été forgée pour expliquer le statut donné, au cœur même de l’interventionnisme étatique et dès l’origine, à certaines organisations détentrices d’un savoir et d’une compétence dont l’administration est le plus souvent dépourvue (Rosanvallon, 2004)  [12]. Rejoignant de nombreux travaux de micro-histoire, ces recherches insistent toutes sur la perméabilité qui existe entre État et notables. Situées à une échelle différente, mais portant également sur le XIXe siècle  [13], les recherches de Gribaudi sur l’administration arrivent à un constat identique. Dans un article récent, il étudie les 534 employés et fonctionnaires qui ont travaillé dans les bureaux chargés de la tutelle des organismes de la Santé et de l’Hygiène publiques au ministère de l’Intérieur et à celui de l’Agriculture et du Commerce entre 1803 et 1910. Il montre alors que : « Loin d’apparaître comme un organisme bien structuré et délimité par ses fonctions, l’administration se révèle donc plutôt comme une ruche bourdonnante et totalement intégrée à l’intérieur d’une société qui se transforme sous le tiraillement de forces contradictoires. […] Le fonctionnement administratif lui-même ne peut sortir indemne de ces transformations ; il n’est pas non plus autonome par rapport aux tensions, tant profondes que souvent invisibles, produites par les différentes appartenances sociales originaires des employés, par les relations qu’ils nouent aussi à travers l’administration, par la configuration complexe et variable dans laquelle ils sont inscrits au fil de leur carrière. » (2009, pp. 37-38).

Vers une nouvelle théorisation de l’État

12 Ce cheminement croisé des deux historiographies nationales donne aujourd’hui naissance à deux interrogations convergentes. Pour ce qui concerne l’État américain, la question n’est plus « why is it so weak in comparison to some European equivalents, but why is so much of it arranged outside the State ? » (Baldwin, 2005, p. 15). Pour ce qui concerne l’État français, le « problème théorique » devient, réciproquement, celui de « l’organisation des rapports entre État et société civile » (Lemercier, 2005a, p. 169). Si cette reformulation des questionnements entraîne une remise en cause de plusieurs des concepts traditionnels de la sociologie de l’État, au premier rang desquels celui de différenciation, elle ne rompt pas, loin s’en faut, avec la théorie wébérienne de l’État. Elle ouvre, au contraire, de nouvelles pistes pour comprendre comment s’exercent, effectivement, la contrainte et le pouvoir étatiques, fût-ce à travers une hybridation entre public et privé (Baldwin, 2003). Toutefois, cette révision historienne n’a pas, pour l’heure, abouti à de réelles propositions théoriques alternatives. Cette absence ne s’explique que très partiellement par le goût pour le particulier et la contextualisation, toujours singulière, qui caractérise la discipline historique. Les politistes américains qui dialoguent avec les historiens déplorent également ce manque d’explication intégrée, même s’ils tentent, avec peut-être davantage de systématisme, de faire émerger de nouvelles grilles d’analyse (Hacker, 2005 ; King et Lieberman, 2009). Dans ce qui suit, il sera donc question d’approches historiennes de l’État plutôt que de théories ou de modèles, même si certaines d’entre elles peuvent faire l’objet d’explicitation formelle. Ces trois approches sont distinguées ici sur le mode idéal-typique et entretiennent, bien sûr, des liens étroits.

L’État comme organisation : de la nécessité des jeux d’échelles

13 La première est la plus explicite et peut-être la plus révisionniste en ce qu’elle rompt avec la conception de l’État comme une bureaucratie centralisée et impersonnelle qui constituait encore l’arrière-plan théorique de la première vague de travaux sur l’histoire de l’État conduits dans la lignée de Skocpol. Pour ce qui est du champ français, cette nouvelle approche a notamment été théorisée par Fridenson, qui, s’inspirant de l’histoire des entreprises, propose de construire « une histoire de l’État contemporain comme organisation », c’est-à-dire de porter attention aux « stratégies des principaux rouages de l’État, l’évolution de leurs structures, en faisant toute leur place aux pratiques et aux représentations des usagers comme des agents de l’État » (2000).

14 Là encore, l’histoire médiévale et moderne a ouvert la voie. Les travaux issus du programme européen sur la genèse de l’État ont ainsi démontré que celle-ci ne peut se comprendre que dans son rapport aux structures de pouvoir – principalement les villes et les cités – qui sont déjà là ou émergent en parallèle, et avec lesquelles il est parfois en symbiose, parfois en concurrence, mais toujours en négociation et en interaction. L’étude désormais classique de Raggio (1990) sur la République de Gênes aux XVIe et XVIIe siècles fournit une illustration de ce type de conceptualisation  [14]. « Dans les deux bourgs de la Fontanabuona qu’il observe, l’État moderne en formation est une réalité lointaine. Ce qui ne veut pas dire qu’il soit absent : mais il n’existe qu’au prix de composer avec les règles locales : celles, coutumières, de ces communautés montagnardes, et plus profondément avec celles qui sont liées au fonctionnement de la parenté. » (Revel, 1995, p. 83). Plusieurs contributions de l’ouvrage déjà évoqué de Brewer et Hellmuth aboutissent à un renversement de perspective identique. En Grande-Bretagne certes, mais également en Prusse, au XVIIIe siècle, l’autorité et le pouvoir de contrainte de l’État sont d’abord le produit de la capacité de celui-ci à mettre en place une coopération avec les autorités déjà établies. Une nouvelle proposition de définition de l’État émerge alors : « a conglomerate of all institutions which spend public money and exert legitimate force » (Brewer et Hellmuth, 1999, p. 20). L’une des contributrices de l’ouvrage, Innes, suggère ainsi de porter attention à la manière dont l’État est le produit de ces « articulations ». Sans le savoir, elle rejoint la proposition théorique de Rosanvallon, qui inclut également l’idée, et le terme même, d’articulation parmi les quatre dimensions auxquelles porter attention pour saisir et comprendre l’État : « la déglobalisation ; la hiérarchisation ; l’articulation et la totalisation » (1990, p. 14). Ces propositions théoriques sont particulièrement stimulantes pour la sociologie de l’État, en ce qu’elles invitent à questionner l’équivalence entre existence d’une bureaucratie et existence de l’État. Ce dernier peut exercer une réelle contrainte par d’autres voies, notamment en s’appuyant sur des autorités intermédiaires et non centralisées.

15 Tandis qu’elle contient un dépassement de la distinction entre « centre » et « périphérie » qui a longtemps structuré les approches sociologiques classiques de l’État, cette proposition de renouvellement théorique trouve des échos dans plusieurs travaux récents de science politique qui ne font finalement que « redécouvrir », sans forcément y faire référence, les conclusions des historiens modernistes. L’articulation est ici saisie à l’échelle du fédéralisme. Reprenant la distinction de Mann ([1986] 1993) entre « despotic » et « infrastructural power », Ziblatt (2006) compare ainsi la construction des États italien et allemand. La force de l’État allemand s’explique alors par l’existence préalable de structures intermédiaires de pouvoir sur lesquelles la construction de l’État va s’appuyer. La conception de l’État comme organisation conduit ici à cesser de voir le fédéralisme comme un obstacle à l’action et à l’existence de l’État pour le considérer plutôt comme l’un des moyens possibles de son intervention, y compris coercitive. Dans le cas américain, cette perspective a conduit à reconsidérer la question du rapport entre l’État et les états pour ne plus les considérer dans une relation de concurrence, ou même de subsidiarité, mais pour faire de l’articulation entre ces deux composantes de l’organisation l’objet même de l’analyse (Howard, 1999) et un « pattern of American governance » (Gerstle, 2009). Johnson (2007) montre, par exemple, comment, bien avant le New deal et au cœur de périodes considérées comme celles du « laissez-faire », l’État fédéral a agi directement sur la société et l’économie tout en s’appuyant sur des acteurs non étatiques  [15]. Il a pour cela eu recours à ce que Johnson conceptualise sous le terme de « intergovernmental policy instruments », à l’image des prêts fédéraux aux états, dont l’attribution était conditionnée à la mise en œuvre de certaines politiques  [16].

16 Dans le cas français, et en l’absence de fédéralisme, c’est l’État bureaucratique lui-même qui s’est d’abord vu décomposé comme une organisation, en un ensemble d’éléments articulés : du plus grand (le corps d’État et le ministère) au plus petit (le serviteur de l’État). L’ouverture de la boîte noire de cet État-organisation a ainsi donné naissance à de nombreux travaux, au croisement de l’histoire de l’État et de l’histoire économique : de l’étude de la direction générale des impôts (Tristram, 2005) aux directeurs généraux des douanes (Clinquart, 2000 ; Bordas, 2004) en passant par la direction du Trésor (Quennouëlle-Corre, 2000) ou encore l’organisation de la prévision économique au ministère des Finances (Terray, 2002)  [17]. À l’image de l’histoire économique, l’histoire du XIXe siècle a de même été substantiellement transformée par cette approche (Luc, 2002 ; Stanziani, 2005 ; Karila-Cohen, 2008 ; Le Bihan, 2008 ; Galvez-Behar, 2008 ; Houte, 2010). « La relation qui s’établit entre le fonctionnement intérieur de l’État et son action sur l’économie et la société est l’une des perspectives de l’histoire de l’État les plus récentes, qui devrait permettre d’apprécier les liens entre les choix délibérés des hommes politiques et des acteurs administratifs – qu’il s’agisse d’individus, de groupes, de corps ou d’institutions – et leurs effets sur les décisions publiques et donc sur la société. » (Quennouëlle, 2002, p. 73).

17 S’ils utilisent davantage le terme de « système » que celui d’« organisation »  [18], les travaux de Baruch et Duclert (2000) sur l’administration, ou plus exactement sur les serviteurs de l’État que sont les administrateurs, relèvent également de cette approche  [19]. Ils ont ainsi porté une attention particulière aux services interministériels, d’abord sur la période 1875-1945, puis sous la IVe République, pour étudier moins « la nature des politiques – économiques, sociales, diplomatiques, militaires, etc. – conduites par le régime que de descendre dans la salle des machines pour tenter de comprendre l’État […] comme système administratif » (Baruch et Duclert, 2003, p. 505). À l’image de l’étude de l’articulation entre « État » et « états » au cœur du fédéralisme américain, cette approche de l’administration comme système va de pair avec l’adoption de changements d’échelles, en l’espèce hiérarchiques mais aussi géographiques. Fortement développée en France, où elle fait figure de principale approche historienne de l’État, cette perspective n’est pas sans parallèle outre-Atlantique. L’un des premiers à se présenter comme historien de l’État, et rompant avec la conception tocquevillienne dominante de l’espace politique américain, Balogh (1991) a montré, par exemple, comment la politique énergétique nucléaire aux États-Unis ne pouvait se comprendre que par l’étude de l’organisation administrative, alors même que la « demande sociale », tant des groupes d’intérêts économiques que des citoyens, était totalement inexistante. Plus récemment, et venant lui de la science politique, l’ouvrage désormais classique de Carpenter (2001) n’est pas sans écho avec l’approche de Duclert et Baruch puisqu’il s’intéresse également aux fonctionnaires de niveau hiérarchique moyen et à la manière dont ceux-ci se situent les uns par rapport aux autres. Par son approche des réseaux, il relève cependant plus centralement de la deuxième perspective, bien entendu étroitement imbriquée avec la première. Plus récemment, le développement d’une histoire transnationale de l’État peut être rattaché à la définition de celui-ci comme organisation. Ce n’est plus seulement sa structuration interne qui est étudiée, mais la manière dont son action et sa composition s’articulent avec celles d’autres États ou plutôt d’autres organes dans une dynamique en réalité trans-étatique et trans-ministérielle. Les recherches de Douki, Feldman et Rosental (2006) sur l’articulation entre les actions des ministères du Travail, respectivement italien, anglais et français, s’inscrivent dans cette perspective.

L’État comme relation : de la nécessité des croisements de points de vue

18 Ces auteurs qualifient cependant leur démarche comme relevant d’une « histoire relationnelle ». Le terme relationnel n’est en effet pas étranger à la reconceptualisation en cours de l’État. Cette deuxième conception recoupe pour partie la précédente. Elle s’en distingue cependant en ce qu’elle prend comme point de départ non tant les relations entre des parties de l’État-organisation que celles entre État et société. Là encore, cette reformulation est commune à l’ensemble des historiographies considérées. À partir de son analyse des différences entre les gestions des risques sanitaires par les États européens au moment des grandes épidémies, Baldwin (2005) suggère ainsi de dresser une typologie des États en fonction des modalités de leur interaction avec la société civile. Rosanvallon considère de même que « faire l’histoire de l’État consiste à analyser les conditions dans lesquelles se sont formées des figures du rapport État/société. Car il n’y a pas d’histoire de l’État hors de la saisie d’une relation : l’État n’existe que par rapport à la société » (1990, p. 15).

19 Dans cette approche, il s’agit avant tout de saisir la nature « privée » des serviteurs de l’État comme celle « publique » des initiatives d’acteurs non étatiques. Parce qu’elle prend l’individu comme unité d’analyse, l’histoire de l’administration construite par Baruch et Duclert relève donc également de cette seconde perspective. Le « serviteur de l’État » y est pris en compte dans sa globalité. Il est replacé dans l’ensemble de ses relations, à travers l’étude de ses origines sociales, de sa trajectoire, de sa formation et bien sûr de ses engagements, puisqu’il est question d’une « histoire politique de l’administration ». Dans cette perspective, le terme réseau est fortement mobilisé. Pour ce qui est de l’étude de l’administration de la IVe République, la conduite d’une analyse de l’État à la fois organisationnelle et relationnelle amène ainsi ces deux auteurs à théoriser la longue absence de « réforme de l’État ». Ils s’inscrivent ainsi en dialogue avec le renouveau de la sociologie de l’État porté par les travaux de Bezes (2009)  [20]. Tandis que, sous la IVe République, des administrations nouvelles et légères créées sur des bases relationnelles, issues des anciens réseaux de résistance et/ou de formation initiale, conduisent la réforme de la politique économique, le fonctionnement organisationnel de l’État perdure sur le modèle classique de la pyramide administrative (Baruch et Duclert, 2003). Déjà au cœur des travaux sur l’État moderne (Descimon, Schaub et Vincent, 1997), l’analyse de réseau est également le trait distinctif du travail de Carpenter (2001), qui démontre que le gain d’autonomie des administrateurs américains s’explique par leur mobilisation de nombreux réseaux au croisement des champs, notamment économique, social et ethnique. Ici, et de manière à première vue paradoxale, ce sont les relations entretenues avec le privé qui permettent aux acteurs publics de gagner en autonomie administrative et en emprise sur la société.

20 Sur un plan méthodologique, cette redéfinition relationnelle de l’État conduit à un usage extensif de la prosopographie (Genet, 1997 ; Lemercier, 2003, 2005b). La reconstitution de réseaux et de trajectoires croisées s’est ainsi largement développée ces dernières années pour devenir un point de passage obligé de l’histoire de l’État. Là encore, les travaux des historiens modernistes, malheureusement peu cités par les historiens du contemporain ou les politistes, ont donné lieu à d’importantes avancées conceptuelles. Au lieu de se cantonner à l’étude des assemblées représentatives, Reinhard (1996) a ainsi fait le choix de s’intéresser à l’ensemble des relations sociales existant au sein d’un groupe d’acteurs à la fois privés et publics saisis dans un continuum : les « élites au pouvoir ». Cette approche permet de saisir la genèse de l’État moderne non seulement à partir du haut, mais également à l’aune de l’action des acteurs : du sujet du roi à l’homme du commun en passant par les membres desdites assemblées. Promu lui par des historiens spécialistes des XIXe et XXe siècles, le projet de saisir l’État par ses marges a donné naissance à la notion de « pratiques consultatives de l’État » (Chatriot et Lemercier, 2002, 2008) ou encore à celle d’« espace intermédiaire » (Chatriot, 2010, p. 5), qui semblent elles aussi particulièrement opératoires. L’État est alors saisi à travers les relations qu’il entretient : avec le musée social (Horne, 2004), les chambres de commerce (Lemercier, 2003), le Conseil national économique (Chatriot, 2002), les prud’hommes (Cottereau, 1987), la Poste (Join-Lambert, 2001) ou encore les chambres syndicales ouvrières (Soubiran-Paillet et Pottier, 1996).

21 Mais c’est, sans surprise, au sein de l’historiographie américaine que cette relation entre public et privé a donné lieu à la conceptualisation la plus poussée  [21]. Un nouveau paradigme d’analyse de l’État s’articule autour de ce qui peut être qualifié d’« invisibilité » de l’État  [22]. Bien que l’idée soit nettement plus ancienne et que la nature hybride de l’État américain ait donné lieu, depuis longtemps, à des travaux historiens, sa conceptualisation comme un « hidden State » est récente. Elle est due à un politiste et est à l’origine restreinte à l’étude du welfare State. En 1997, Howard a en effet proposé de redéfinir la politique sociale de l’État américain en ne prenant plus seulement en compte les dépenses directes, mais également les déductions fiscales accordées par le gouvernement au titre de l’action sociale (« tax expenditures with social welfare purposes »). Il désigne alors cette politique sociale comme celle d’un « hidden welfare State ». Pour étudier ce dernier, il s’inscrit dans une perspective historique – ce qui en fait aujourd’hui une référence systématique des travaux historiens – en conduisant des études de cas de l’amont comme de l’aval de quatre programmes fédéraux de déductions fiscales votés respectivement en 1914, 1926, 1975 et 1978. Ainsi calculées, les dépenses de welfare aux États-Unis atteignent un niveau comparable à celui des pays européens, et ce bien avant la mise en place du New deal. Fort de cette conclusion, Howard invite à rapporter les différents types d’État aux divers instruments de politique publique qu’ils mobilisent. Faisant finalement écho à la réflexion de Johnson sur l’existence d’instruments propres au fédéralisme, ce second point a, plus récemment, conduit Howard à formuler un nouveau questionnement : « [it] may not be why the U.S. government does relatively little compared to European governments. Rather, the question is why governments of similar size devote comparable resources to pursue similar policy objectives through such a diverse mix of policy tools » (2003, p. 415). Plusieurs travaux historiens s’inscrivent dans la suite de cet intérêt pour le « hidden State »  [23].

22 Un premier groupe confirme l’intuition sur la nature cachée de l’État américain en matière de welfare. Il rejette cependant l’idée que les objectifs de ces politiques sont les mêmes que dans le cas des pays européens privilégiant l’instrument de la dépense publique. Ils sont notamment beaucoup moins redistributifs et plus inégalitaires (Gottschalk, 2000 ; Klein, 2003)  [24]. En 2002, Hacker a ainsi publié un ouvrage désormais classique qui généralise l’approche de Howard tout en s’en distinguant sur la question de la neutralité du choix de l’instrument. Tandis que l’un prenait comme objet intermédiaire les déductions fiscales, l’autre étudie les politiques sociales assises sur l’emploi. C’est ainsi la chronologie différentielle de l’action directe de l’État, respectivement en matière de retraite et de Sécurité sociale, qui explique la part respective qu’y jouent les canaux publics ou privés en la matière. Cependant, à la différence de Howard, Hacker constate que les effets des différents types d’instruments ne sont pas le mêmes, pour finalement distinguer vertical et horizontal welfare States (2006) et s’interroger : « by what standard are we to call the indirect policy tools and government-supported private benefits that are characteristic of American social provision part of that body of State activity conveniently, if often imprecisely, termed the “welfare State” ? » (2005, p. 139).

23 Plus récemment, cette notion d’« invisibilité » de l’État américain a été reprise au-delà de la seule question du welfare. Edling s’est ainsi intéressé à la manière dont, lors de la rédaction de la Constitution, les fédéralistes ont développé « a conceptual framework that made it possible to accomodate the creation of a powerful national government to the strong anti-statist current in the American political tradition » (2003, p. 219). L’invisibilité de l’État s’est alors imposée comme la solution pour des rédacteurs qui, ayant à l’esprit les exemples européens, voulaient effectivement doter leur nouvelle nation de pouvoirs régaliens seuls susceptibles de permettre la défense du territoire et le maintien d’une indépendance récemment acquise. Ainsi, si des pouvoirs forts ont effectivement été donnés au gouvernement par la Constitution, leur exercice est d’emblée organisé pour peser non sur l’intérieur du pays et se dérouler sous les yeux des Américains, mais pour s’imposer à l’extérieur et n’être visible qu’aux frontières du territoire. En lieu et place d’une conscription obligatoire qui s’imposerait aux citoyens, c’est la voie d’une armée de métier, faite d’hommes volontaires, payés et entraînés, qui a été choisie, tandis que les ressources fiscales devaient provenir du recours au protectionnisme et à la dette, principaux modes de financement d’un État fédéral interventionniste dès l’origine.

24 Balogh (2009) va plus loin. Il met en évidence comment, loin d’être limité à la période fondatrice, rester « out of sight » a été pour l’État fédéral le moyen d’agir de manière continue sur l’ensemble du XIXe siècle, pourtant considéré comme le siècle du « laissez-faire ». À travers des études de cas – l’activité des cours de justice, le système postal ou encore la réglementation économique, notamment –, l’auteur décrit l’organisation de son invisibilité par l’administration fédérale : l’installation des casernes militaires loin des zones de peuplement ou celle de l’administration fiscale sur les ports à distance des centres urbains. Il montre le déguisement systématique et délibéré de l’action de l’État sous les traits d’acteurs publics locaux. Il propose finalement une grille d’analyse laissant de côté l’étude des acteurs pour s’intéresser à la question de savoir comment, et à quel degré, cette nature out of sight de l’État américain, née d’une conjoncture particulière au moment de la rédaction de la Constitution, a pu s’institutionnaliser au cours du XIXe siècle, au point de constituer, selon l’auteur, une institution centrale de la société américaine contemporaine. On retrouve ici, sous-jacente, l’idée que le type d’instrument utilisé est susceptible de constituer la spécificité d’un mode de fonctionnement étatique. Ces divers travaux invitent enfin à s’interroger, en retour, sur la nature « visible » de l’État français et sur ses implications. King et Lieberman ont ainsi tenté de forger un modèle théorique à vocation comparative à partir de l’étude de cette redécouverte de l’État américain : « How American patterns offer comparative lessons. » (2009, p. 549). Les approches qui viennent d’être détaillées font ainsi directement écho à la grille théorique multidimensionnelle proposée par ces deux auteurs. L’État comme organisation embrasse tant la notion d’« administrative State » que celle de « fragmented State », tandis que l’État comme relation correspond à celle d’« associationnal State ».

L’État comme matrice cognitive : de la nécessité d’une histoire au second degré

25 Il en va de même des deux autres dimensions mises en évidence par King et Lieberman. Le « standardizing State » et le « segregated State » correspondent en effet à une ultime approche historienne de l’État qui consiste, elle, à contourner explicitement la question de la définition de l’objet pour faire l’histoire de l’État « au second degré ». L’objectif est alors « de ne plus confondre les représentations idéales et en grande partie imaginaires que l’État, par l’intermédiaire de quelques-uns de ses théoriciens appointés, a voulu donner de lui-même, et la réalité des pratiques intellectuelles, des formes de pensée et de mise en ordre du monde, des routines bureaucratiques par lesquelles il se forme, se perpétue, se légitime jour après jour avec ce que l’on appelle aujourd’hui la continuité de l’État » (Bourdieu, Christin et Will, 2002, p. 6). L’idée sous-jacente est que l’État « se perpétue par les catégories par lesquelles il pense et donne à penser ce qu’il pense » (Lenoir, 2000, p. 96). En un mot, il est « une forme efficace de représentation sociale » (Rosanvallon, 1990, p. 14).

26 En lien avec les approches de l’État comme organisation et comme relation, l’étude du colbertisme conduite par Minard (1998), à partir de celle du corps des inspecteurs des manufactures, relève ainsi de cette appréhension de l’État comme matrice cognitive. Cette histoire concrète des pratiques administratives de contrôle de la société donne en effet à voir la manière dont l’État encadre la vie économique et la normalise, au sens fort du terme. En s’intéressant à la manière dont les fabricants ont réagi à l’institutionnalisation de contrôle étatique, Minard parvient notamment à saisir cette imbrication entre État et société. Un certain nombre de travaux sur la statistique s’inscrivent également dans cette perspective. En considérant que les représentations sont des réalités et en produisent, l’histoire des catégories et du calcul statistiques constitue ainsi un domaine privilégié d’étude de l’État (Desrosières, 1993, 2005, 2008 ; Karady, 2008). Aux États-Unis, Childs (2001) a mis en évidence comment, sur la période 1889-1945, l’État central américain a utilisé les statistiques pour uniformiser la politique de régulation qu’il mettait en place de manière pourtant indirecte, puisqu’à travers les états. Plus largement, l’étude des questions raciales aux États-Unis a donné lieu à de nombreux travaux sur les catégories démographiques, à l’image des travaux de King (1995). En France, l’ouvrage de Brian (1994) sur la « mesure de l’État » est lui exemplaire. L’auteur y retrace l’histoire administrative et intellectuelle des dénombrements de population dans la France du XVIIIe siècle, en prenant l’œuvre de Colbert comme fil rouge. Cet ouvrage fait notamment le lien entre la division du travail statistique et la nature de ce travail, saisie à travers la catégorisation du monde qu’il produit. L’État est alors saisi au-delà de la distinction entre représentations et réalités. Le livre contemporain, et désormais classique, de Desrosières suggère lui que l’histoire et les contours différentiels de la statistique administrative permettent de comparer les conceptions et l’organisation des États entre eux – en l’espèce pour les cas français, britannique, allemand et américain. Comme, à partir de l’étude du cas soviétique, Blum et Gousseff le résument clairement, l’histoire de la statistique démographique est un « domaine qui revendique une forte perspective comparative et qui s’offre comme un point de vue privilégié pour appréhender certains aspects de la construction de l’État, des relations entre administration et pouvoir politique, d’une part, et entre État et société, de l’autre, à travers notamment la construction des représentations sociales » (1997, p. 441). Ces recherches, menées à l’origine de manière relativement isolées les unes des autres, ont finalement dessiné ce que Rosental (2003, 2006) a qualifié d’« histoire politique des populations ». Celle-ci tente de saisir les processus d’« autocréation » des sociétés, et notamment d’y cerner le rôle d’un État conçu d’emblée comme organisation et relation, à l’image des travaux de Rosental sur l’interministériel en matière de travail ou encore de migration (2009).

27 Poussée à sa limite, cette approche appelle une réflexion épistémologique sur la manière dont l’histoire comme discipline a conceptualisé l’État, à travers le temps et l’espace. La focale se situe alors au croisement de l’histoire sociale et de l’histoire des idées. Le livre classique de Skinner (1978) constitue à cet égard un modèle. Pour le cas français, l’ouvrage de Rosanvallon (2004) sur les limites d’une approche en termes de jacobinisme consacre une large place à l’analyse du succès qu’a, jusqu’à récemment, rencontré ce concept pour penser l’État français. L’article de Novak (2008) sur le mythe de la faiblesse de l’État américain s’engage sur cette voie, tout comme le texte de King et Stears (2009). Ces derniers s’y interrogent sur les raisons du peu d’intérêt de la science politique américaine pour l’État après 1945. Cette troisième composante des travaux historiens sur l’État nous apprend ainsi que toute réflexion sur les recompositions contemporaines de celui-ci devrait inclure une réflexion au second degré sur les recompositions du regard que le chercheur, historien mais aussi sociologue, pose sur cet objet.

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Notes

  • [1]
    Le choix de restreindre ce texte aux travaux américains et français découle donc avant tout de la nature archétypale de ces deux cas. Une évolution comparable se retrouve cependant ailleurs. En Allemagne, par exemple, l’État a cessé d’être l’un des facteurs pris en compte dans l’histoire sociale pour devenir l’objet même de l’investigation (Gosewinkel, 2006).
  • [2]
    Ce premier groupe de travaux américains porte notamment sur le genre (Gordon L., 1994), la conquête de l’Ouest (White, 1991) ou encore les questions environnementales (Hays, 1987).
  • [3]
    Comme le montrent, par exemple et de manière exemplaire, la bibliographie et la table des matières de Baruch et Duclert (2000).
  • [4]
    Pour une histoire détaillée du développement de ce sous-champ, voir Graham (1993) et Zelizer (2000).
  • [5]
    Sur ce point, voir la discussion organisée à l’occasion des cinquante ans de la parution de Building a new American State (Balogh, 2003 ; Zelizer, 2003).
  • [6]
    Pour un débat sur ce point, voir Zelizer (2005) et Pierson (2005).
  • [7]
    Plus récemment, Mashaw (2005) a mis en évidence l’existence, dès la création des États-Unis, d’un véritable droit administratif qui témoigne de la présence d’une administration centralisée.
  • [8]
    Voir également John (2006).
  • [9]
    Dans cette catégorie figurent les travaux sur la Civil war, dont le rôle fut fondamental dans le développement de l’État américain (Wilson, 2006).
  • [10]
    Pour la période précédente, voir Braddick (1996).
  • [11]
    Voir également Stasavage (2003).
  • [12]
    Dans la même perspective, et dans le domaine cette fois de la science politique, en 1980, commentant la sortie alors récente de l’ouvrage devenu classique de Birnbaum et Badie, Lavau considérait déjà que « plus on voit fonctionner le couple conceptuel “société civile”- “État”, plus grandit la perplexité. D’abord parce qu’il n’est pas sûr que ce couple conserve beaucoup de sens lorsqu’on le détache des configurations théoriques d’ensemble (chez Hegel, chez Marx, chez Gramsci) à l’intérieur desquelles les éléments de ce couple faisaient sens » (1980, p. 410).
  • [13]
    Dans ce domaine, voir bien sûr la recherche pionnière de Charle (1987). Lire également Gribaudi (1998), Gribaudi et Magaud (1999).
  • [14]
    Pour une lecture critique par cet auteur du concept même d’État dans son acception courante, voir Raggio (1995). Voir également Cerutti (1990).
  • [15]
    Une approche comparable se retrouve dans les travaux qui portent attention non à l’articulation entre État fédéral et états, mais entre l’administration fédérale et les cours de justice locales, qui, tout en étant indépendantes du pouvoir administratif, furent très tôt l’un des principaux acteurs de son implémentation à l’échelon local (Schiller, 2005).
  • [16]
    Pour une autre étude de cas, sur une période plus récente, voir Lieberman (2009).
  • [17]
    Pour une synthèse sur cette question, voir la communication de Chatriot (2010).
  • [18]
    Lui-même également utilisé puisqu’il est question « d’organisation de l’État » (Baruch et Duclert, 2003, p. 509). Les termes employés relèvent de l’organique, à l’image de « machinerie de l’État » ou d’« appareils d’État » (Baruch et Duclert, 2000, pp. 6-7). Dans ses premiers travaux, Baruch emploie le terme d’ossature en précisant de quelle manière, à travers l’administration, c’est bien de l’étude de l’État dont il est question : « sans que l’administration se confonde juridiquement avec l’État, elle en constitue l’ossature » (1997, p. 14). Voir également Baruch et Duclert (2002).
  • [19]
    Ces travaux font figure d’exemple dans l’historiographie française, mais ils ne sont pas les seuls à avoir réintroduit l’histoire sociale et politique de l’administration comme une voie d’accès à celle de l’État (Viet, 1994 ; Kott, 1995 ; Dard, 2002 ; Andrieu, 2002). Également pour une approche de l’administration du renseignement (Laurent, 2004, 2007), de l’État en période de crise (Thénault, 2001 ; Bancaud, 2002) ou encore du cas soviétique (Cohen, 2003).
  • [20]
    Notamment Baruch et Bezes (2006).
  • [21]
    Les débats déjà anciens qui ont suivi le développement de la micro-histoire italienne et son traitement de l’État semblent également porteurs de réflexions stimulantes. Pour deux synthèses, lire Chittolini (1995) et Guarini (1995). Il est à cet égard surprenant de voir que ces travaux ne sont que très rarement cités dans les débats historiens ou politistes contemporains, qui semblent redécouvrir aujourd’hui certains des thèmes abordés à l’époque.
  • [22]
    Sur ce point précis, lire Gensburger (2010).
  • [23]
    Pour une prise en compte historienne convergente du welfare, voir Jacoby (1997) et Katz (2001).
  • [24]
    Sur cette question, lire également Gordon C. (2003).
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