Couverture de RFSE_017

Article de revue

L’intérim transfrontalier : les marges de l’emploi aux marges des territoires

Pages 43 à 63

Notes

  • [1]
    Article 1 (f) du Règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale.
  • [2]
    Les intérimaires pris en compte sont les salariés ayant pour employeur une ETT au Luxembourg.
  • [3]
    Le coût de la main-d’œuvre annuel couvre tous les coûts liés au travail : rémunérations brutes régulières mais aussi irrégulières (bonus de fin d’année, 13e mois, indemnités de licenciement, etc.), avantages en nature, charges patronales, autres coûts indirects (coûts de formation, frais de recrutement, etc.) de l’ensemble des salariés (qu’ils soient couverts par une convention collective ou non). Le coût horaire est égal au coût annuel divisé par le nombre d’heures effectivement travaillées (cf. STATEC, 2014).
  • [4]
    Décret n° 2016-27 du 19 janvier 2016.
  • [5]
    Le Républicain lorrain, 9 novembre 2015, « Prud’hommes de Thionville : salarié français, droit français ».

1 – Introduction

1Cet article s’intéresse aux dynamiques du travail frontalier au sein de la Grande Région Saar-Lor-Lux. Ce territoire transfrontalier comprend deux Länder allemands (la Sarre et la Rhénanie-Palatinat), une région française (la Lorraine), une région belge (la Wallonie) et un État (le Grand-Duché de Luxembourg) (carte 1). Ce cadre géographique possède la spécificité de se trouver aux marges de territoires nationaux. Ces marges territoriales peuvent se définir à la fois par leur éloignement par rapport aux centres, ainsi que par leur situation frontalière. Aux confins d’un territoire et d’une souveraineté, ces espaces frontaliers se caractérisent par les relations et échanges qu’ils entretiennent avec leur(s) voisin(s) et qui leur confèrent une certaine dynamique. Celle-ci se manifeste notamment par les 213 400 travailleurs frontaliers qui habitent et travaillent dans deux États différents. La Grande Région caractérise à elle seule le quart des flux de travailleurs frontaliers de l’ensemble de l’Union européenne (UE27) [OIE, 2014], ce qui révèle la richesse de ce terrain d’observation et d’étude. Les impacts et enjeux de ce phénomène sur le développement des territoires de part et d’autre des frontières ne sont pas neutres. Ils sont à la fois économiques, sociaux, environnementaux, etc. [Belkacem et al., 2012]. Une législation européenne sur la coordination des systèmes de sécurité sociale [1] définit le travailleur frontalier comme « toute personne qui exerce une activité salariée ou non salariée dans un État membre, et qui réside dans un autre État membre où elle retourne en principe chaque jour ou au moins une fois par semaine ». Mais derrière cette définition se cachent des réalités très diverses.

2Le travail frontalier a des origines historiques anciennes. Il est aujourd’hui fortement ancré dans les économies locales. Tout en se structurant, il s’est aussi diversifié. L’une de ses formes est le travail intérimaire transfrontalier dont la particularité est la mise en relation de trois acteurs (un travailleur, une agence d’intérim et une entreprise utilisatrice) séparés par une ou plusieurs frontières. Peu de travaux se sont intéressés à ce sujet. Cet article se propose de réunir les informations et les résultats de travaux de terrain, afin de fournir une première analyse de cette forme particulière d’emploi, de ses dimensions et de ses fonctions économiques dans cet espace transfrontalier. L’intérim transfrontalier est défini comme une forme d’emploi en marge de la norme de l’emploi stable ou permanent, caractérisé par le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) et par l’unicité de l’employeur.

3Cet article commencera par définir l’objet ainsi que le cadre théorique de l’analyse, en s’appuyant sur les travaux portant sur l’intérim. L’hypothèse formulée est que cette forme d’activité constitue un instrument de régulation territorialisée de la force de travail dans ce contexte transfrontalier particulier. Dans un second temps, le développement du travail intérimaire transfrontalier sera mis en regard avec le contexte spécifique de la Grande Région Saar-Lor-Lux : des besoins et des disponibilités en main-d’œuvre et/ou en qualifications qui peuvent être situés dans deux pays différents. Le développement de l’intérim transfrontalier a été permis par l’apparition d’intermédiaires de l’emploi ayant développé des fonctions territoriales de gestion du travail frontalier (les agences de travail temporaire). Il s’agira de cerner, dans une dernière partie, leurs pratiques dans les processus de mobilisation et de mise à disposition de ces travailleurs auprès des entreprises utilisatrices au sein de cet espace transfrontalier.

2 – Objet et cadres théoriques

2.1 – L’intérim transfrontalier, une forme d’emploi aux contours très flous

4Le travail intérimaire se définit classiquement par la présence de trois acteurs. Un travailleur qui met sa force de travail et sa disponibilité à la disposition d’une entreprise ou agence de travail temporaire (ETT), que cette dernière loue à une entreprise utilisatrice (EU). Chaque pays dispose de sa propre réglementation de l’intérim (tableau 1). En contexte transfrontalier, cette relation d’emploi triangulaire se complexifie par la présence de frontières qui peuvent s’intercaler entre ces trois acteurs. À défaut d’un cadre réglementaire européen homogène [Belkacem et al., 2011], cette superposition de législations peut aussi être source de points épineux au sein du statut de ces travailleurs, les fragilisant davantage. En effet, suivant la position de la frontière entre les trois acteurs, les conséquences en matière de sécurité sociale, de droit du travail ou même encore de fiscalité vont être différentes. Les configurations seraient trop nombreuses pour toutes les envisager. Nous ne retiendrons que les plus fréquentes. Un Lorrain inscrit auprès d’une agence d’intérim située au Luxembourg, et envoyé en mission par celle-ci, aura le statut de travailleur frontalier au sens classique du terme, car son employeur (l’agence d’intérim) est situé de l’autre côté de la frontière. Il relèvera ainsi des législations en vigueur au Luxembourg pour les questions de salaire et de protection sociale. Sur le plan fiscal, il sera soumis à la retenue à la source dans le pays d’emploi (le Luxembourg) en cohérence avec la convention fiscale en vigueur entre la France et le Luxembourg. Envoyé en mission auprès d’une entreprise utilisatrice située au Luxembourg, c’est de la législation luxembourgeoise que dépendront également les questions de conditions de travail, de sécurité, de santé au travail. Ce premier cas de figure est le plus facilement identifiable et sera analysé dans la seconde partie de cet article. Autre configuration : si le travailleur lorrain est inscrit dans une agence de travail temporaire localisée en Lorraine et que sa mission est effectuée dans un autre pays (par exemple le Luxembourg, la Belgique ou l’Allemagne), on parle alors de détachement. Cette configuration n’est pas rare, mais difficilement mesurable. La législation en vigueur pour les questions de salaire, de contrat de travail et de protection sociale sera celle du pays de localisation de l’agence de travail temporaire (ici la France). L’intérimaire n’est en effet plus considéré comme travailleur frontalier étant donné qu’il est salarié de l’agence d’intérim située dans son pays de résidence. En conséquence, il relève également de la législation fiscale française pour le paiement des impôts, même si sa mission s’effectue à l’étranger. Pour les conditions de travail, la santé, la sécurité au travail, la législation en vigueur sera celle du pays où se déroule la mission. Une autre configuration de détachement existe également : des candidats à l’intérim passent effectivement la frontière pour s’inscrire dans une agence de travail temporaire au Luxembourg, mais se voient proposer une mission dans un autre pays (par exemple dans leur propre pays de résidence). Frontaliers dans les chiffres, ces personnes peuvent ne pas traverser la frontière pour aller travailler. Tout ceci nous amène également à souligner les difficultés de mesure et d’identification de cette forme particulière d’emploi.

Tableau 1

Conditions d’exercice de l’intérim dans les pays de la Grande Région

Tableau 1

Conditions d’exercice de l’intérim dans les pays de la Grande Région

Source : Rapport économique et social, PRISME, 2012, p. 49-50.

5Ces dernières années, de plus en plus d’entreprises utilisatrices situées en dehors du Luxembourg ont ainsi eu recours à des intérimaires inscrits auprès d’agences d’intérim localisées au Luxembourg, et donc détachés par ces dernières. Le contexte transfrontalier et l’ambivalence du cadre réglementaire de l’intérim transfrontalier sont à l’origine de ces pratiques. Les différentiels de coûts patronaux de la main-d’œuvre entre les espaces régionaux de la Grande Région sont relativement importants et expliquent en grande partie ces pratiques opportunistes. Deux rapports parlementaires ont récemment fait état de ces usages de détachements controversés, alertant sur les risques de dumping social et de concurrence déloyale liés aux différences dans les coûts du travail et les nombreux enjeux qui en découlent [Bocquet, 2013 ; Savary et al., 2013]. Le premier souligne que les entreprises de travail temporaire peuvent également être impliquées dans le contournement des règles du pays d’accueil. Certaines n’ont par exemple pas d’activité réelle au Luxembourg et certains intérimaires français n’ont même jamais travaillé au Luxembourg. Ces pratiques de détachements ont été naturellement favorisées par le cadre européen. En effet, les principes de libre circulation des travailleurs, l’élimination des entraves à cette liberté de circulation et l’interdiction de toute forme de discriminations entre travailleurs européens ont été clairement affirmés dès le traité de Rome en 1957 et consacrés dans les règlements européens qui définissent la coordination des systèmes de sécurité sociale (CE 1408/71 et 883/2004). Néanmoins, ce dernier règlement 883/2004 en vigueur depuis le 1er mai 2010 est venu organiser ces formes particulières de détachements. Par exemple, le salarié d’une agence de travail temporaire localisée au Luxembourg qui est détaché à raison de plus de 25 % dans un autre pays, sera désaffilié (même rétroactivement) de la Sécurité sociale luxembourgeoise et affilié à la sécurité sociale du pays où est effectuée la mission. Par ailleurs, il faut que le salarié détaché ait été affilié plus d’un mois à la Sécurité sociale de l’État d’envoi avant qu’il puisse être détaché à l’étranger.

6Nous observons une grande proximité des conditions réglementaires de l’intérim en Belgique, en France et au Luxembourg. En Allemagne, cette activité apparaît moins réglementée, dans la mesure où il n’y a pas de motifs de recours à ces travailleurs ni de durée maximale des missions. Cependant, à la différence des autres pays, l’intérim en Allemagne reste interdit dans le bâtiment, particulièrement pour les activités de gros œuvre.

2.2 – Quels cadres théoriques pour l’analyse de l’intérim transfrontalier ?

7Peu de travaux se sont intéressés à l’intérim transfrontalier. Nous pouvons cependant mobiliser les concepts et outils d’analyse portant sur l’intérim en général afin de questionner cette activité en contexte transfrontalier.

2.2.1 – Un facteur d’ajustement entre l’offre et la demande de travail

8Dans un cadre de pensée néoclassique, le travail dans ses multiples formes (contrat de travail à durée indéterminée, à durée déterminée, à temps partiel, travail saisonnier, occasionnel, travail intérimaire, etc.) importe peu. Il est ramené aux seuls principes d’actes des offreurs et des demandeurs sur un marché du travail concurrentiel. Ces actes sont perçus en dehors du cadre territorial et temporel (a-historique) et en dehors du cadre institutionnel, ce qui explique la non-pertinence des formes d’emploi. Partant d’une hypothèse d’existence d’imperfections du marché du travail entravant la rencontre automatique et naturelle de l’offre et de la demande de travail, ces travaux présentent les entreprises de travail temporaire à la fois comme des révélateurs de ces imperfections et comme des instruments de rapprochement de son fonctionnement réel au fonctionnement idéal qui devrait être en principe le sien. Concernant les travailleurs intérimaires, ils formulent deux hypothèses centrales. Tout d’abord, en recourant aux services d’une agence de travail temporaire, qu’elle soit implantée d’un côté ou de l’autre des frontières, ces travailleurs mettent en œuvre une stratégie optimale de recherche d’information sur les emplois et les entreprises. Ensuite, au travers des différentes missions qu’on leur propose, les travailleurs intérimaires réaliseraient des investissements dans leur propre capital humain [Carey et al., 1987 ; Mangum et al., 1985].

9Les travaux qui se situent sur le versant de la demande de travail ont deux types d’argumentations pour spécifier le rôle du travail intérimaire : les modèles de « filtres » et de « signalement », référents théoriques aux travaux sur l’intérim. Le premier aborde l’agence de travail temporaire comme un filtre qui, à la demande des entreprises, permet la sélection des candidats (qu’ils soient frontaliers ou non). L’autre considère les caractéristiques sociales et démographiques des candidats comme éléments de signalement de leur potentialité productive. Dans ce cas, le recours aux agences de travail temporaire permettrait de contrôler les coûts variables liés à la gestion de la main-d’œuvre ou de réduire les coûts fixes dans l’entreprise. Cette dernière analyse sera reprise et complétée à partir du concept de flexibilité du travail par les auteurs affiliés à la théorie de la segmentation du marché du travail.

2.2.2 – Une forme particulière d’emploi contribuant à la flexibilité du travail

10Dans un contexte de segmentation du marché du travail, l’intérim est analysé comme un nouvel axe des politiques de gestion de la main-d’œuvre [Freyssinet, 1979 ; Rérat et al., 1979 ; Germe et al., 1979, Azoulay et al., 1979]. Il représente un statut dérogatoire au modèle de l’emploi permanent habituellement caractérisé par le contrat à durée indéterminée. S’interrogeant sur le sens qu’il convient de donner à ces transformations, Germe et Michon [1979] abordent l’intérim comme une modalité de diversification de la relation salariale alimentant et alimentée par ce processus de segmentation du marché du travail. L’intérim est pour ces auteurs une forme particulière d’emploi (FPE) parmi d’autres (comme le contrat à durée déterminée, les contrats aidés…), présentes sur les marchés externes du travail. Cette particularité est renforcée si nous considérons le contexte transfrontalier. D’une part, parce qu’elle dédouble la figure de l’employeur dont les droits et les devoirs sont ventilés par la loi, entre un employeur d’usage qui utilise l’intérimaire, et un employeur de fait qui le rémunère, ceux-ci pouvant être localisés dans différents pays avec leurs propres systèmes de règles. D’autre part, c’est pour l’entreprise utilisatrice une forme d’extériorisation de la main-d’œuvre pouvant couvrir des situations de travail détaché. Mais en tant qu’outil de gestion de la main-d’œuvre, le travail intérimaire est caractérisé comme instrument de flexibilité du travail par excellence [Michon, 1986, 1987]. Il autorise en effet une adaptation rapide du niveau des effectifs salariés aux besoins de production en fonction des aléas de cette dernière. Pour cet auteur, l’adaptation rapide du niveau des effectifs aux besoins de production que permet l’intérim peut se faire sur deux plans. Elle peut porter sur les volumes de travail et les effectifs de travailleurs (flexibilité quantitative) ; le recours à l’intérim permet alors d’assurer une adéquation entre nombre de salariés et quantité de production. Mais elle peut porter également sur les caractéristiques professionnelles des travailleurs (flexibilité qualitative). Le recours à ces travailleurs permet cette fois-ci d’ajuster les qualifications des salariés à la nature des besoins de production, d’équilibrer en quelque sorte les structures de qualification aux requis de l’activité de l’entreprise utilisatrice. Cette perspective théorique peut être fructueuse pour analyser le développement du travail intérimaire transfrontalier.

2.2.3 – L’expression d’une forme contemporaine du rapport salarial

11Une troisième perspective théorique nous est offerte par l’école de la Régulation. Dans ce cadre de pensée, le travail intérimaire transfrontalier peut être analysé comme l’expression d’une des formes observables empiriquement du rapport salarial. Le rapport salarial se présente « comme la codification d’un ou plusieurs rapports sociaux fondamentaux » [Boyer, 1986, p. 48]. Il se définit par la complémentarité des institutions qui encadrent le contrat de travail et est compatible avec le mode de régulation en vigueur. De ce fait, le rapport salarial varie dans le temps et dans l’espace. À une époque et dans un espace donnés, il caractérise une combinatoire de relations entre « différents types d’organisation du travail, le mode de vie et les modalités de reproduction des salariés » [Boyer, 1986, p. 49]. La notion de rapport salarial désigne alors « l’ensemble des conditions qui régissent l’usage et la reproduction de la force de travail, qu’il s’agisse de l’organisation du procès du travail, de la hiérarchie des qualifications, de la mobilité de la force de travail ou encore de la formation et de l’utilisation du revenu salarial » [Boyer, 1980, p. 494]. D’un point de vue analytique, il se compose de cinq éléments qui définissent des phases historiques du rapport capital-travail : (1) le type de moyens de production ; (2) les formes de la division technique et sociale du travail ; (3) les modalités de mobilisation et d’attachement de la main-d’œuvre à l’entreprise ; (4) les déterminants du revenu salarial, directs ou indirects ; (5) enfin, le mode de vie salarié en relation plus ou moins avec l’acquisition de marchandises ou l’utilisation de services collectifs hors marché (ibid., p. 49). L’intérim transfrontalier constitue ainsi une des formes observables du rapport salarial. Cette forme particulière du rapport salarial se caractérise par une forte instabilité de ses composantes, puisque celles-ci varient à la fois dans le temps, mais surtout dans l’espace, en raison de la variabilité des règles et des institutions qui l’encadrent des différents côtés de la frontière. Cette approche théorique nous invite à analyser l’intérim transfrontalier comme une construction sociale définie par des règles, des institutions pouvant être différentes de part et d’autre des frontières, ainsi que des pratiques évolutives, et non comme le résultat d’actes d’offreurs et de demandeurs sur un marché du travail autorégulé.

2.2.4 – L’intérim transfrontalier : un ressort de la régulation territorialisée de la force de travail ?

12Le cadre d’analyse théorique de la Régulation permet d’aborder l’intérim transfrontalier comme une forme institutionnelle du rapport salarial qui contribue à la régulation territorialisée de la force de travail. L’hypothèse que nous formulons est que l’intérim transfrontalier participe à l’organisation spatiale de la mobilisation de la main-d’œuvre, de sa mise à disposition et de ses différentes formes d’usage en fonction des besoins de production des entreprises de l’autre côté des frontières. Cette régulation est permise par des différences en dotations de main-d’œuvre et se nourrit de divergences de dynamiques de développement économique et social de part et d’autre des frontières. Elle opère en fonction et autour de repères produits par des pratiques, des règles et des institutions. Les pratiques concernent les différents modes de recrutement, de gestion de la main-d’œuvre et de son attachement à l’entreprise. Les règles sont produites par les législations nationales du travail et de l’emploi, le cadre réglementaire européen de la libre circulation des travailleurs et les conventions bilatérales entre pays. Cette régulation s’inscrit dans un contexte socio-économique et sociopolitique spécifique. Aussi, la régulation territoriale des réserves transfrontalières de main-d’œuvre permet-elle plus qu’une adaptation, plus qu’un simple ajustement des besoins en main-d’œuvre et qualifications aux ressources transfrontalières existantes. Elle contribue à la construction de modes spécifiques de mobilisation et d’usage de la main-d’œuvre et par conséquent de rapports particuliers au travail et à l’emploi. Et à ce titre, elle est productrice de nouvelles marges d’emploi.

13La perception du travail intérimaire dans la théorie économique et l’application qui peut en être faite dans un contexte transfrontalier ainsi mieux cernées, il convient à présent de détailler ses évolutions et ses principales caractéristiques. Ceci permettra de mieux connaître et comprendre cette forme particulière d’emploi qui évolue au sein d’un territoire transfrontalier et dans un contexte socioéconomique particulier.

3 – La Grande Région : un contexte socio-économique spécifique…

14Ce contexte transfrontalier se caractérise par des dynamiques économiques et sociales très différentes de part et d’autre des frontières. Elles favorisent donc le développement du travail frontalier, ses pratiques à la marge illustrées par le travail intérimaire transfrontalier et les détachements de travailleurs de l’autre côté des frontières.

3.1 – … favorisant le développement de mobilités transfrontalières

15Les origines du travail frontalier au sein de cet espace sont anciennes et liées aux richesses du sous-sol (fer, charbon). Les savoir-faire et les compétences industrielles s’employaient déjà de l’autre côté des frontières durant la période d’industrialisation. Par ailleurs, la croissance et la diversification du travail frontalier s’expliquent par les divergences de développement économique et social, mais aussi d’organisation de l’activité économique entre les composantes de la Grande Région : certains territoires ont des besoins de main-d’œuvre (comme le Luxembourg ou la Sarre, ayant un emploi intérieur supérieur à la population active totale résidente), d’autres ont des disponibilités en termes de main-d’œuvre (comme la Lorraine) (tableau 2).

Tableau 2

Caractéristiques principales des territoires de la Grande Région

Tableau 2

Caractéristiques principales des territoires de la Grande Région

Source : Offices statistiques de la Grande Région.

16L’existence de différentiels de part et d’autre des frontières (dans les coûts du travail, les niveaux de rémunération ou encore les coûts de l’immobilier, etc.) alimente aussi le développement du travail frontalier [Belkacem et al., 2011].

17La carte 1 révèle l’attractivité du Luxembourg qui constitue la principale destination des travailleurs frontaliers de la Grande Région. Les frontaliers constituent 44 % de l’emploi salarié intérieur dans ce pays. La Lorraine, quant à elle, est le principal « fournisseur » de travailleurs frontaliers au sein de ce grand espace géographique. Seule région française (avant la récente réforme territoriale) partageant ses frontières avec trois pays voisins, elle compte plus de 100 000 personnes qui ont leur emploi de l’autre côté des frontières, dont les trois quarts au Luxembourg (et près de 20 % en Allemagne). Cela signifie que près d’un Lorrain sur dix exerce son activité outre-frontière. Au-delà de ces chiffres généraux, il importe de souligner la situation d’interdépendance entre les territoires, et le poids que le travail frontalier a pris dans les économies locales. Si, à l’échelle de la Lorraine, un dixième des actifs va travailler dans un pays voisin, dans certaines zones d’emploi comme celle de Longwy, ancien bastion sidérurgique du nord de la région, directement contigu avec le Luxembourg et la Belgique, c’est la moitié des actifs locaux qui travaille dans le pays voisin. Quant aux petites communes directement frontalières, certaines voient entre 70 et 80 % de leur population active occupée de l’autre côté de la frontière [Belkacem et al., 2012].

Carte 1

Les flux de travail frontalier au sein de la Grande Région Saar-Lor-Lux en 2014

Carte 1

Les flux de travail frontalier au sein de la Grande Région Saar-Lor-Lux en 2014

Source : Instituts statistiques de la Grande Région (cartographie Malte Helfer, université du Luxembourg).

3.2 – L’intérim transfrontalier : une des modalités du travail frontalier

18Au sein de la Grande Région, le développement du travail frontalier s’est accompagné d’une relative diversification de ses formes, notamment avec l’émergence du travail intérimaire transfrontalier. Cette pratique était déjà courante dans les années 1970 entre la Lorraine et la Sarre, particulièrement dans le domaine de la construction, où ces travailleurs intérimaires, plutôt qualifiés, nommés à l’époque travailleurs de location représentaient près de 10 % des flux de travailleurs frontaliers entre la Lorraine et la Sarre [Belkacem et al., 2012]. Au Luxembourg, le développement du travail intérimaire est plus récent et est encadré par une loi du 19 mai 1994.

19Depuis 2009, les évolutions en données mensuelles indiquent une légère augmentation du travail intérimaire au Luxembourg [2]. La saisonnalité de la série apparaît clairement avec un creux systématique en décembre, et des pics en juin et septembre-octobre, correspondant aux variations saisonnières de l’activité des principaux secteurs ayant recours à l’intérim (industrie, construction, hôtellerie-restauration…) (graphique 1). Cette observation confirme une des fonctions principales de l’intérim comme instrument de gestion des variations (prévues ou même imprévues) de l’activité des entreprises. Au Luxembourg, la construction est la plus grande utilisatrice de travail intérimaire (5,7 % des heures effectuées le sont par des travailleurs intérimaires), tout comme l’industrie (3,8 %) ou encore l’agriculture, le commerce et l’hôtellerie-restauration (1,2 % chacun) [STATEC, 2014]. Le second trimestre 2015 montre une hausse de 16 % (par rapport au même trimestre de l’année précédente) due au secteur de la construction, son principal utilisateur.

Graphique 1

Évolution mensuelle récente des intérimaires travaillant au Luxembourg (2009-2015)

Graphique 1

Évolution mensuelle récente des intérimaires travaillant au Luxembourg (2009-2015)

Source : Université du Luxembourg, d’après les données IGSS/CCSS.
Tableau 3

Travail intérimaire au Luxembourg (1995-2015)

Tableau 3

Travail intérimaire au Luxembourg (1995-2015)

20En analysant plus en détail les caractéristiques des travailleurs intérimaires inscrits dans les agences de travail temporaire au Luxembourg en mars 2013, il apparaît que la majeure partie réside en France. Les frontaliers de France sont largement surreprésentés au sein de la population des intérimaires par rapport à l’emploi salarié total du Luxembourg (graphique 2). Les intérimaires sont des travailleurs relativement jeunes par rapport à l’ensemble des salariés du pays. Près de la moitié (49 %) a moins de 35 ans et 16,5 % des intérimaires ont moins de 25 ans en 2014 (contre respectivement 35 % et 7 % pour l’ensemble des salariés). La jeunesse de ces travailleurs est aussi une marque de volatilité de cette population de travailleurs pour qui l’intérim n’est souvent qu’un moment dans une trajectoire professionnelle [Faure-Guichard, 1999].

Graphique 2

Structure du travail intérimaire et de l’emploi salarié au Luxembourg (mars 2014)

Graphique 2

Structure du travail intérimaire et de l’emploi salarié au Luxembourg (mars 2014)

Source : Université du Luxembourg, d’après les données IGSS/CCSS.

21Les motifs de passage par l’intérim au Luxembourg sont nombreux. Pour les cerner, nous pouvons nous appuyer sur les typologies proposées par Jérôme Domens [2011] ou encore par Catherine Faure-Guichard [1999]. Il peut s’agir, comme le notait par exemple le second auteur, d’un intérim d’insertion [1999, pp. 4-7]. Ce motif a du sens surtout dans un contexte de chômage élevé sur les territoires de résidence de ces travailleurs. Beaucoup de jeunes travailleurs utilisent les services des agences d’intérim afin d’entrer dans le marché de l’emploi luxembourgeois, attractif par des salaires plus élevés, s’y faire une expérience et accéder à un emploi stable au Luxembourg. En 2010, 23 % des entreprises qui ont eu recours à l’intérim au Luxembourg ont recruté au moins un intérimaire en CDD ou CDI à la fin de leur mission [Genevois, 2013]. L’intérim peut également être un intérim de transition. Cette logique de passage par une agence d’intérim luxembourgeoise concerne de nombreux travailleurs aux profils socioprofessionnels très hétérogènes, concevant cette phase d’intérim comme une étape dans leur trajectoire professionnelle et pour des raisons très diverses (recherche d’un emploi suite à un licenciement, recherche de revenus d’appoint ou d’un niveau de salaire plus élevé, etc.). À côté de ces deux motifs (d’insertion et de transition), cette pratique peut constituer un choix volontaire et durable [ibid., pp. 11-15]. Il s’agit alors d’un intérim de profession. Les intérimaires frontaliers au Luxembourg constituent une population de travailleurs non seulement très hétérogène, mais aussi évolutive. Ceci peut être illustré par les travaux de Jérôme Domens [2011] qui distingue cinq situations spécifiques d’intérimaires à la fois du point de vue des profils socioprofessionnels et des motivations à l’égard de l’intérim. Il peut s’agir d’intérimaires occasionnels, en insertion progressive, intensifs récents ou encore irréguliers, mais aussi d’« intérimaires permanents ». Ce dernier statut est alors un véritable choix assumé par ces travailleurs. Ils détiennent des qualifications spécifiques sur le marché du travail transfrontalier qui leur assurent une relative continuité des missions. Ce sont des personnels qualifiés, voire très qualifiés dans les métiers du bâtiment que les agences d’intérim cherchent à fidéliser. C’est parmi ces derniers que sont choisis les travailleurs détachés sur des missions de l’autre côté des frontières.

22Du point de vue des entreprises, l’intérim transfrontalier remplit une fonction classique d’instrument de flexibilité du travail [Michon, 1986, 1987]. Il joue aussi d’autres rôles en tant que moyen de pré-recrutement (en lien avec les théories du filtre et du signalement). Mais dans un contexte transfrontalier, il peut avoir d’autres fonctions plus spécifiques via la pratique du détachement.

3.3 – Le détachement de travailleurs de l’autre côté des frontières

23Le détachement signifie qu’un intérimaire inscrit dans une agence d’intérim (au Luxembourg dans notre cas d’étude) peut se voir proposer une mission de l’autre côté de la frontière (en Lorraine par exemple).

24Ces pratiques ont connu de fortes hausses au Luxembourg jusque 2010, mais d’après les dernières données officielles, elles seraient en baisse depuis et ne représenteraient qu’une faible part du travail intérimaire transfrontalier. Les dimensions et le développement de ces pratiques sont très utiles à étudier afin de comprendre la complexité des dynamiques transfrontalières dans les rapports à l’emploi et au travail. Leur développement s’est inscrit dans un contexte transfrontalier très spécifique : celui de la croissance du travail frontalier et surtout de l’existence de disparités de part et d’autre des frontières en matière de législations sociales et fiscales. Le coût salarial patronal plus faible au Luxembourg rend intéressant le recours aux intérimaires inscrits dans une agence de travail temporaire luxembourgeoise pour les entreprises localisées de l’autre côté de la frontière. Alors qu’en 2005, 18 % des intérimaires inscrits au Luxembourg étaient détachés de l’autre côté de la frontière, quatre ans plus tard, ils étaient 25 % dans ce cas [STATEC, 2012]. Cependant, l’entrée en vigueur le 1er mai 2010 du règlement (CE) 883/2004 (qui coordonne les systèmes de sécurité sociale et réglemente entre autres le temps de travail passé à l’étranger) s’est accompagnée d’une diminution de la proportion de travailleurs détachés du Luxembourg vers les territoires limitrophes [STATEC, 2012]. Ainsi, entre 2009 et 2011, la part des intérimaires inscrits au Luxembourg détachés à l’étranger est passée de 25 % à moins de 9 % [STATEC, 2012]. Les dernières données publiées par les services lorrains d’inspection du travail montrent cependant que ce phénomène n’est pas marginal, si on le place à l’échelle de l’ensemble des détachements effectués en Lorraine. Rappelons qu’une entreprise qui détache du personnel en France doit préalablement informer l’inspection du travail du lieu où doit s’exécuter cette prestation de service. C’est ce que font les agences de travail temporaire luxembourgeoises qui envoient en mission des intérimaires en Lorraine. La position frontalière de la Lorraine favorise naturellement ces détachements transfrontaliers. Pour l’année 2014, 7 370 déclarations de détachements de travailleurs ont été recensées pour cette région, dont plus du tiers (36,2 %) émanent des seules entreprises de travail temporaire luxembourgeoises. Ce phénomène est relativement concentré sur le département de la Moselle qui accueille environ les trois quarts de ces détachements d’intérimaires.

25Toute la problématique transfrontalière du détachement d’intérimaires du Luxembourg vers la Lorraine est selon nous bien posée à travers ces extraits d’entretien. Pour les responsables d’intérim enquêtés en 2014, le détachement est une pratique légale c’est-à-dire en conformité avec les réglementations nationales et européennes. C’est même « un système gagnant-gagnant pour les travailleurs qui touchent des salaires plus élevés, et pour les entreprises qui ont moins de charges… ». Mais selon un responsable syndical enquêté, « les boîtes d’intérim luxembourgeoises qui envoient des intérimaires en Lorraine ne contribuent pas aux dépenses collectives… Elles ne versent pas de cotisations employeurs ; elles ne participent pas non plus aux financements des collectivités (CVAE), et aux autres charges fiscales ; elles ne peuvent pas assurer non plus un suivi efficace sur la santé, la sécurité des travailleurs détachés […] et pour finir elles prennent le gagne-pain aux agences d’intérim lorraines […] ». Pour les inspecteurs du travail rencontrés en 2015, ces pratiques du détachement tendent à être de plus en plus organisées, structurées et déguisées. Les abus sont nombreux, mais difficilement identifiables. En implantant des agences de part et d’autre des frontières, une société mère à un endroit, une agence localisée à un autre endroit, c’est une stratégie d’optimisation des différentiels des législations nationales qui est recherchée. « Ces configurations spatiales autorisent des montages d’opérations pouvant être complexes et par conséquent difficilement identifiables. » Dans un contexte transfrontalier, le détachement favorise en fin de compte la déconnexion des règles fiscales et sociales du travail de leur espace d’application. Les tarifs luxembourgeois de facturation de la main-d’œuvre intérimaire sont retenus pour des missions qui peuvent être réalisées en Lorraine.

26Les études portant sur les profils des travailleurs intérimaires détachés sont rares. Des travaux indiquent à partir des enquêtes réalisées auprès de responsables d’agences d’intérim (cf. encart) qu’il s’agit de travailleurs relativement expérimentés et disposant d’une ancienneté dans l’intérim importante, des profils plutôt d’intérimaires professionnels qui tireraient également profit des différences de salaires existant entre le Luxembourg et les régions voisines. Selon les responsables d’agences entendus, les missions de travailleurs détachés sont généralement plus longues. Si la durée moyenne des missions d’intérim au Luxembourg est d’environ trois semaines (deux semaines en France), pour les travailleurs détachés, ces missions peuvent s’échelonner sur plusieurs mois avec des prolongations.

27Il est à noter cependant que l’intérim transfrontalier et les détachements de travailleurs sont des activités qui ne répondent pas uniquement à des logiques opportunistes de gestion des coûts de la main-d’œuvre. Elles ont été façonnées par les pratiques des agences d’intérim opérant dans ce contexte transfrontalier, se positionnant ainsi comme de nouveaux acteurs en matière de ressources humaines et proposant des prestations de plus en plus diversifiées comme l’aide à l’insertion professionnelle, la recherche de qualifications pointues, le conseil, le portage salarial et la formation.

4 – Les agences d’intérim comme nouveaux acteurs de gestion territoriale de la main-d’œuvre dans l’espace transfrontalier

28Au sein de la Grande Région Saar-Lor-Lux, les agences d’intérim ont développé de véritables fonctions de gestion territoriale de la main-d’œuvre frontalière.

Cette analyse s’appuie sur deux recherches empiriques. En 2006-2007, une première investigation a concerné le rôle des agences d’intérim dans la régulation du marché du travail transfrontalier (programme EURES 2006-2007). En 2014-2015, la seconde investigation dans le cadre de l’agence d’objectifs FO-IRES (n° 2014-03) porte sur les pratiques de détachements de travailleurs en Union européenne, leur importance, leurs formes et les enjeux de l’intérim transfrontalier, particulièrement au sein de la Grande Région Saar-Lor-Lux (Belkacem et al., 2007). La méthodologie de ces deux recherches a été ordonnée autour de différents travaux de terrain, dont des entretiens semi-directifs auprès des principaux responsables d’agences de travail temporaire localisées au Luxembourg et spécialisées ou non dans le détachement outre-frontière d’intérimaires. À côté d’une cinquantaine de questionnaires distribués auprès des principales enseignes de travail temporaire affiliées ou non à l’union luxembourgeoise des ETT (ULEDI), douze entretiens avec des responsables d’agences ont été menés dans le cadre de la première recherche. À l’occasion de la seconde recherche, des entretiens exploratoires à la fois auprès de deux responsables d’agence d’intérim, de deux inspecteurs du travail, de 8 intérimaires en cours de détachement et de trois responsables syndicaux ont été réalisés.

4.1 – À la recherche d’un ancrage territorial au cœur de l’espace transfrontalier

29Le nombre d’agences de travail temporaire a fortement progressé au Luxembourg. C’est un marché très concurrentiel. Ces agences ont cherché à accroître leur inscription territoriale au sein de ce grand espace transfrontalier. Depuis les années 1990, dans un contexte de développement important du travail frontalier, les grands leaders de l’intérim (Adecco, Manpower…) ont multiplié leurs localisations tout le long des frontières du Luxembourg avec l’Allemagne et la France, en face d’anciens bastions industriels caractérisés par des taux de chômage élevés et la disponibilité de la main-d’œuvre. Le nombre d’établissements de travail temporaire est ainsi passé de 20 en 1996 à 73 aujourd’hui [ULEDI, 2012 et CIETT, 2013]. Directement frontalière de la France, la ville luxembourgeoise d’Esch-sur-Alzette, compte à elle seule 32 agences d’intérim selon le ministère du Travail et de l’Emploi luxembourgeois [2015] pour une population de 33 000 habitants. De l’autre côté de la frontière, la zone d’emploi de Longwy en France ne compte que deux agences d’intérim, pour environ 111 000 habitants [Insee, 2015].

30La structuration du secteur de l’intérim s’est opérée suivant une logique bicéphale, entre d’un côté les agences généralistes, essentiellement indépendantes et de petite taille, et de l’autre des agences de plus en plus spécialisées dans trois principaux secteurs d’activité (industrie, construction et finance) ou bien dans des corps de métiers (cadres, métiers du bâtiment). Il s’agit le plus souvent de petites agences structurées autour de quatre ou cinq personnes permanentes, ce qui facilite ainsi leur ancrage territorial et leur adaptation rapide aux évolutions des besoins du tissu productif transfrontalier local. Les agences appartenant à de grands groupes internationaux comme Adecco ou Manpower sont ainsi insérées dans un réseau très large d’agences du même groupe à l’échelle non seulement transfrontalière, mais également européenne, voire mondiale. Cette mise en réseau spatial permet des échanges rapides d’informations sur le profil des intérimaires ou encore des entreprises. Mais chaque agence du même groupe se voit toujours définir son propre espace d’action en termes de délégations d’intérimaires. Les actions de délégations d’intérimaires (dont de détachements) peuvent aussi s’inscrire dans des contrats avec les entreprises utilisatrices négociés directement à l’échelle du groupe lui-même, les modalités de ces délégations pouvant être précisées à l’échelle locale et transfrontalière.

4.2 – Quatre principales fonctions de gestion de la main-d’œuvre frontalière

31Ces agences de travail temporaire font ainsi office de nouveaux vecteurs d’organisation de la main-d’œuvre frontalière. Elles remplissent quatre principales fonctions territoriales de gestion de la main-d’œuvre, des fonctions classiques et spécifiques qui sont : (i) une fonction de drainage spatial de la main-d’œuvre disponible de l’autre côté des frontières ; (ii) une fonction de sélection des candidats à l’intérim ; (iii) une fonction de délégation ou de détachement des travailleurs sélectionnés et, enfin (iv), par les opérations de détachement, elles peuvent assurer aussi une fonction de minimisation des coûts salariaux pour les entreprises utilisatrices situées de l’autre côté des frontières.

4.2.1 – Une fonction de drainage spatial et de mise en réserve de la main-d’œuvre

32Cette première fonction correspond à l’enregistrement de candidats à l’intérim. Il s’agit de la constitution de fichiers de travailleurs potentiels suivant trois modalités.

33La première consiste à inscrire les candidats à l’agence. Ces fichiers comprennent les éléments d’identification, de résidence et de qualification des candidats. Les agences enquêtées répertorient différemment les candidats à l’intérim, selon que les missions se déroulent au Luxembourg ou de l’autre côté des frontières, afin de faciliter les opérations de recherche de profils de candidats en fonction des besoins spécifiques des entreprises.

34La seconde modalité concerne des partenariats avec d’autres intermédiaires de l’emploi de l’autre côté de la frontière. Ainsi, des collaborations entre les agences situées au Luxembourg et le pôle emploi côté lorrain existent-elles de longue date. Elles se traduisent par des échanges d’informations sur des candidats potentiels et des offres de missions d’intérim. Selon les responsables locaux du pôle emploi de Longwy, ces propositions de mission peuvent représenter jusqu’à la moitié de l’ensemble des offres d’emploi de la zone d’emploi. Des actions de communication (conférences, distributions de tracts de présentation, propositions de stage…) sont régulièrement menées par les responsables d’agences de travail temporaire en direction des étudiants des écoles, universités et IUT des villes frontalières. Elles concernent les opportunités en termes d’insertion, d’expériences qu’offre l’intérim à ces publics diplômés.

35La troisième modalité s’opère à l’intérieur d’un même groupe de travail temporaire. Aussi, reliées grâce à des réseaux informatisés de transmission d’information, les agences sont en contact permanent avec d’autres agences du même groupe, géographiquement décentralisées (en Belgique, en France, voire en Allemagne). Elles disposent ainsi de « pools » de main-d’œuvre élargis facilitant les opérations de tri dans le cas d’une main-d’œuvre qualitativement recherchée ou quantitativement peu abondante sur la zone.

4.2.2 – Une fonction de sélection de plus en plus structurée

36La seconde fonction concerne la « sélection des candidats » à une mission d’intérim. Une attention particulière est portée à la maîtrise des langues, les besoins étant différents en fonction du secteur d’activité. Les niveaux de qualification et d’expérience constituent d’autres critères de sélection particulièrement dans les domaines du bâtiment, de la soudure, de la tuyauterie, de la mécanique et de l’électricité. Si la personne est qualifiée et qu’elle répond à des besoins immédiats en termes de délégation auprès d’entreprises ou de détachement, un premier entretien est réalisé pour recueillir des informations sur son parcours, son expérience. Entre l’enregistrement administratif et la mission d’intérim se déroule un processus de sélection relativement structuré. Dans la pratique, seulement 20 à 30 % des candidats sont effectivement retenus pour une mission. Nous voyons ici l’importance des attributs de filtre qu’ont ces agences d’intérim. Dans un contexte d’abondance de candidats à l’intérim, les agences d’intérim peuvent se permettre d’orienter ainsi leur stratégie sur la qualité des intérimaires qu’elles envoient en mission ou qu’elles détachent de l’autre côté des frontières. Aussi établissent-elles pour chaque candidat une fiche compétence qu’elles déterminent à partir de différents tests. Dans les filiales des grands groupes, les candidats sont mis en situation et sont confrontés à des contextes réels de travail. Ils sont soumis à des tests de connaissances, de rapidité, de précision, de mesure de la dextérité, et aussi des tests de langues pour certaines missions. Plus le niveau de qualification est élevé et plus ce processus de sélection est long. Cette phase se termine par un entretien avec un conseiller en recrutement. L’objectif de cet entretien est triple : (i) opérer une vérification des informations recueillies (CV notamment), (ii) cerner les attentes du candidat et (iii) dégager le noyau des compétences les plus importantes.

4.2.3 – Une fonction de mise à disposition de travailleurs auprès des entreprises utilisatrices

37La troisième fonction correspond à la mise à disposition de travailleurs auprès d’entreprises utilisatrices. Ces agences d’intérim permettent de fournir une main-d’œuvre aux qualifications spécifiques, non présentes sur le marché du travail local. Dans les enquêtes réalisées, les responsables d’agences d’intérim ont insisté sur trois autres utilités de l’intérim transfrontalier.

38La première est qu’il constitue une réponse au caractère cyclique de certaines activités économiques, particulièrement dans la construction et les hôtels-restaurants. Les durées des missions peuvent être très courtes, de quelques heures seulement à quelques jours, dépassant très rarement trois semaines selon l’étude réalisée en 2006 et en 2007 (cf. encart supra.). Mais concernant les détachements d’intérimaires de l’autre côté des frontières, les missions sont généralement plus longues, pouvant atteindre plusieurs mois avec des renouvellements successifs. Compte tenu des secteurs d’activité où se déroulent les missions, ces intérimaires détachés outre-frontière sont surtout des hommes, relativement plus âgés et plus expérimentés que leurs homologues qui réalisent leur mission au Luxembourg.

39La seconde utilité est la sélection de travailleurs avant des embauches fermes. Il s’agit surtout des entreprises du secteur des banques et des assurances qui ont des besoins en qualifications spécifiques comme dans les métiers du back-middle office (administration, informatique, gestion) ou front office (gestion de patrimoine). Dans ces secteurs, les durées des missions sont les plus longues (82,8 jours en moyenne contre 26,5 jours dans le secteur de la construction) et en 2015 plus de 70 % des intérimaires de Randstad dans les métiers tertiaires ont signé un CDI après trois mois d’intérim. Pour les intérimaires détachés qui ont souvent la plus grande ancienneté dans l’agence, l’embauche n’est pas l’objectif principal recherché. Pour ces travailleurs, les avantages du détachement résident dans le salaire. À niveau égal de qualification, les taux horaires de salaire sont comparativement plus élevés au Luxembourg par rapport à la France. À ces salaires s’ajoutent des suppléments tels que des primes de déplacement. La fiscalité est plus favorable et les prestations sociales plus avantageuses qu’en France (par ex. les allocations familiales).

40Enfin, la troisième utilité exprimée par les responsables d’agences est que l’intérim permet d’accompagner les restructurations industrielles. Le recours à des intérimaires permet en effet d’amortir les effets des plans de licenciement.

4.2.4 – Une fonction de gestion des différentiels de coûts patronaux de part et d’autre des frontières

41Concernant plus particulièrement les détachements d’intérimaires, nous pouvons mettre en évidence une quatrième utilité de l’intérim transfrontalier (souvent non exprimée par les responsables d’intérim) : permettre aux entreprises utilisatrices de tirer avantage des différentiels de coûts patronaux de part et d’autre des frontières. En effet, par rapport aux régions frontalières, le coût horaire incluant à la fois les coûts directs et indirects [3] est plus faible au Luxembourg dans les secteurs les plus utilisateurs de l’intérim, comme l’industrie et la construction (graphique 3) [STATEC, 2014].

Graphique 3

Coût horaire moyen de la main-d’œuvre par secteur (en euros) en Grande Région (en 2012)

Graphique 3

Coût horaire moyen de la main-d’œuvre par secteur (en euros) en Grande Région (en 2012)

Source : STATEC, Eurostat (enquête Coût de la main-d’œuvre 2012), en équivalents temps plein, inclus les apprentis.

42Ces écarts de coûts avantagent naturellement les agences d’intérim localisées au Luxembourg, le plus souvent situées à quelques kilomètres de la frontière. Ces dernières peuvent ainsi mettre à disposition dans des délais brefs une main-d’œuvre non seulement formée, mais aussi qualifiée, à des tarifs très avantageux en regard de ceux pratiqués par les agences en France. Aussi, dans un contexte de différences des législations nationales de l’intérim et d’écarts prononcés des coûts liés à la gestion de la main-d’œuvre, l’intérim transfrontalier a-t-il encore de beaux jours devant lui.

5 – Conclusion

43Au sein du territoire transfrontalier analysé ici, la hausse des mobilités transfrontalières de travail s’est accompagnée de la consolidation de formes particulières d’emploi telles que l’intérim transfrontalier, en marge du modèle classique de l’emploi (caractérisé par l’unicité de l’employeur et un contrat de travail à durée indéterminée). Cette forme d’emploi est le résultat d’un long processus historique de décomposition-recomposition de rapports salariaux. Son développement a été ainsi permis par trois principaux processus tenant au contexte géographique spécifique, aux pratiques d’acteurs de gestion de la main-d’œuvre et aux règles :

  • des dynamiques de développement économique et social contrastées de part et d’autre des frontières ;
  • un contexte de libre circulation garanti par une codification juridique et des réglementations européennes complétées par des conventions bilatérales qui participent à définir un cadre d’action ;
  • des pratiques singulières de gestion de la main-d’œuvre intérimaire.

44En opérant un drainage du marché du travail transfrontalier, ces agences d’intérim assurent des fonctions classiques de sélection des travailleurs frontaliers selon les besoins des entreprises utilisatrices. Elles assurent également des délégations de travailleurs auprès des entreprises utilisatrices. Elles apportent ainsi des solutions aux problématiques classiques de gestion de la main-d’œuvre (absence de salariés, flexibilité du travail, pré-recrutement, etc.). Dans ce contexte de besoin en qualifications et en main-d’œuvre dans certains territoires, et d’excédents dans d’autres, elles participent à la régulation du marché du travail transfrontalier.

45Mais elles assurent également des fonctions singulières du fait de l’existence de différentiels dans les législations sociales et fiscales de part et d’autre des frontières. Elles favorisent la gestion des coûts du travail à travers notamment les opérations de détachement des travailleurs. Par ce système, les entreprises utilisatrices peuvent en effet bénéficier de coûts salariaux comparativement plus faibles et utilisent le travail intérimaire transfrontalier de manière opportuniste par le biais du détachement. Néanmoins, ces pratiques de détachement sont plus encadrées ces dernières années, depuis la modification de la réglementation européenne en matière de coordination des systèmes de sécurité sociale ((CE) 883/2004). Très récemment, un décret français [4] est venu préciser les obligations en cas de détachement à l’étranger (contenu de la déclaration…).

46Les enjeux liés au développement de cette forme particulière d’emploi aux marges des territoires restent nombreux. Ils ouvrent d’intéressantes discussions à venir. Du fait du contexte transfrontalier, cette ambivalence des cadres réglementaires est une source de points problématiques au sein même du statut de ces travailleurs, fragilisés du fait de leur situation le plus souvent précaire. Accidents de travail, invalidité et retraite ne sont pas définis et indemnisés de la même façon entre les différents pays. La reconnaissance même de l’accident du travail et de son degré de gravité fait l’objet de différents systèmes et définitions entre les quatre pays concernés. Cette question est d’autant plus cruciale que le secteur de l’intérim se caractérise par des taux d’accidents du travail largement supérieurs aux moyennes nationales dans les différents pays observés. En termes d’invalidité, il n’existe pas de définition commune de l’invalidité et des taux d’invalidité. Deux régimes sont applicables dans l’Union européenne. La durée d’affiliation est prise en compte au Luxembourg et en Allemagne, alors que c’est la réalisation du risque qui s’applique en Belgique et France. Lorsqu’une personne a été assurée successivement sous les deux régimes, comme il n’est pas rare pour les travailleurs frontaliers, il peut y avoir des conséquences financières sur le montant de la pension. À ces problèmes s’en ajoutent d’autres comme celui de l’âge légal de la retraite qui est variable entre les pays et qui complexifie la situation des frontaliers ayant eu des carrières mixtes, et notamment des intérimaires ayant eu des successions de contrats.

47L’ambivalence des règles est aussi une source de pratiques dérogatoires qui posent des questions de déontologie, notamment avec les détachements (par exemple lorsque le travailleur est en mission dans son propre pays de résidence). Par ailleurs, en cas de litige, il est parfois difficile de savoir quelles sont les législations et juridictions compétentes. L’exemple récent d’un intérimaire résidant en France, inscrit dans une ETT au Luxembourg et détaché dans une entreprise en France le montre. Le salarié contestant son éviction par l’entreprise utilisatrice française, cette dernière soulève une « exception d’incompétence territoriale au profit de la juridiction du travail luxembourgeoise », car l’employeur de ce salarié est l’entreprise de travail temporaire luxembourgeoise, et l’affaire relèverait donc, selon l’entreprise utilisatrice française, du droit luxembourgeois. Le conseil de prud’hommes de Thionville puis la Cour d’appel de Metz ont pourtant confirmé la compétence de la juridiction française et non luxembourgeoise. La loi applicable est celle « du pays dans lequel, ou, à défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail ». Une sorte de « droit du sol » social qui montre ici toute la complexité de telles situations [5]

48Dans ce contexte de la Grande Région, l’intérim transfrontalier est l’expression empirique d’un rapport salarial dominé aux contours flous. En effet, les travailleurs concernés sont non seulement subordonnés à deux types d’employeurs aux motivations et aux logiques d’action distinctes (l’un les rémunérant, l’autre utilisant leur force de travail), mais leur emploi est en plus encadré par des règles et des institutions différentes de part et d’autre des frontières. Ceci génère des tensions au sein même de leur statut, fragilisant davantage ces travailleurs déjà vulnérables.

Bibliographie

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Notes

  • [1]
    Article 1 (f) du Règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale.
  • [2]
    Les intérimaires pris en compte sont les salariés ayant pour employeur une ETT au Luxembourg.
  • [3]
    Le coût de la main-d’œuvre annuel couvre tous les coûts liés au travail : rémunérations brutes régulières mais aussi irrégulières (bonus de fin d’année, 13e mois, indemnités de licenciement, etc.), avantages en nature, charges patronales, autres coûts indirects (coûts de formation, frais de recrutement, etc.) de l’ensemble des salariés (qu’ils soient couverts par une convention collective ou non). Le coût horaire est égal au coût annuel divisé par le nombre d’heures effectivement travaillées (cf. STATEC, 2014).
  • [4]
    Décret n° 2016-27 du 19 janvier 2016.
  • [5]
    Le Républicain lorrain, 9 novembre 2015, « Prud’hommes de Thionville : salarié français, droit français ».
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