Couverture de RFSE_011

Article de revue

L'organisation publique de la concurrence est-elle source d'efficience ? L'aide à domicile

Pages 81 à 100

Notes

  • [1]
    Je remercie vivement les référés anonymes pour leurs critiques constructives sur une version précédente de cet article, je remercie également J.-P. Domin et M. Nieddu pour leurs commentaires sur différentes versions antérieures de ce travail. Je reste seule responsable de ses erreurs et insuffisances.
  • [2]
    Notamment des mesures d’exonérations fiscales dédiées et des dispositifs de grandes enseignes nationales supposées permettre l’industrialisation du secteur et l’émergence d’une consommation de masse.
  • [3]
    « Un espace de régulation est défini par deux dimensions : une structure productive (un système d’échanges ou transactions) et un ordre institutionnel (règles). » [Allaire, 2002, p. 165] L’espace de régulation ne correspond pas nécessairement à un mode de régulation complet, ce qui permet d’interroger la cohérence entre les différents espaces de régulation.
  • [4]
    Le mode de production caractérise une forme d’organisation de la production dans laquelle la relation de service est gérée par un dispositif institutionnel particulier.
  • [5]
    « Si l’on y réfléchit bien, le blocage du développement du secteur […] résulte principalement de l’action délibérée des autorités de tutelle. […] L’argent qui a été refusé du côté de l’action gérontologique va être distribué, avec d’autres logiques, du côté de l’insertion. Des moyens étant dégagés, l’affaire ne serait pas très grave si, conduite fort maladroitement, elle n’avait produit une déstabilisation encore plus grande du secteur de l’aide à domicile en favorisant grâce à l’aide publique un nouveau marché. » [Noguès, 2008]
  • [6]
    Sans remettre en cause la possibilité d’une stratégie de profit, le recours à la « stratégie de compétitivité » autorise la prise en compte des organisations productives n’ayant pas pour finalité la maximisation du profit, ce qui est le cas dans une partie des activités que nous étudions : les formes associatives et publiques ainsi que le salariat dans l’emploi direct.
  • [7]
    Certains conseils généraux fixent cependant deux tarifs, l’un correspondant aux services d’auxiliaire de vie, le second aux services d’aide-ménagère. Pour plus de précisions, le lecteur pourra se référer aux travaux réalisés sur la région Nord-Pas-de-Calais [Jany-Catrice & Vatan, 2011 ; Vatan, 2011].
  • [8]
    La dépendance est mesurée en Groupes iso ressources (GIR), le niveau 1 correspondant à des personnes particulièrement dépendantes, le niveau 6 à des personnes très peu dépendantes.
  • [9]
    Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés.
  • [10]
    Caisses d’assurance retraite et santé au travail.
  • [11]
    Directrice d’une association d’aide à domicile.
  • [12]
    Sur les conditions d’emploi dans les services à la personne, voir notamment Devetter, Jany-Catrice et Ribault [2008].

1 – Introduction

1Depuis les années 1990, les évolutions de la régulation des services sociaux, en premier lieu ceux d’aide à domicile, suivent une tendance similaire dans l’ensemble des pays de l’OCDE : le passage d’une régulation tutélaire à une régulation concurrentielle subventionnée et organisée par la puissance publique [Laville, 2008]. La coordination des acteurs est organisée par le biais de quasi-marchés où la puissance publique n’est plus fournisseur mais simplement acheteur de services sociaux auprès de fournisseurs de toute forme, mis en concurrence (organismes publics, associations, entreprises commerciales). Le financement des services peut être centralisé par la puissance publique qui agit en tant qu’acheteur principal ou organisé par le biais d’allocations (vouchers) accordées aux consommateurs qui déterminent librement leur fournisseur. Cette forme d’organisation, qui trouve ses origines dans les préconisations du new public management [Pollitt et Bouckaert, 2011 (1999)], vise à limiter la contribution de la puissance publique dans le financement des services. Pour ses partisans, un tel système est supposé permettre l’organisation d’une réponse « de plus grande qualité, avec une plus grande réactivité, une plus grande efficience et [constituer] une organisation plus équitable que les autres alternatives » [Le Grand, 2007, p. 213, nous traduisons].

2En France, la mise en œuvre d’une régulation concurrentielle de l’aide à domicile s’est réalisée de façon progressive depuis le milieu des années 1990, dans un contexte particulier. Celui-ci correspond à la confluence de logiques différentes. D’une part, l’action sociale auprès des personnes âgées se renforce, l’introduction de la Prestation spécifique dépendance en 1997 puis de l’Allocation pour l’autonomie en 2001, qui en assouplit les conditions d’éligibilité, permet un desserrement des contingentements de la régulation tutélaire. D’autre part, des politiques ciblées sur les emplois familiaux, puis les services à la personne viennent abaisser le coût du travail. Enfin, les départements tentent de contenir leurs charges d’action sociale, l’ensemble sous une contrainte générale de maîtrise des dépenses publiques [Gardin et al., 2010]. Il se forme un empilement de dispositifs institutionnels relevant de logiques différentes. Le Plan Borloo de développement des services à la personne (2005) vient s’ajouter à cette complexité, tout en prétendant ignorer l’épaisseur de la construction historique des services qui en sont la cible.

3À des fins de création d’emplois, ce Plan cherche à unifier en un même secteur un ensemble d’activités diversifiées, comprenant à la fois des services sociaux d’aide à domicile et des services de confort comme le soutien scolaire, des services de ménage et repassage, etc. Il enjoint de fait les organismes à diversifier leur portefeuille d’activité. La construction d’un secteur des services à la personne repose sur l’instauration d’un ensemble de dispositifs institutionnels [2] censés faire système et donner sa cohérence à un régime économique de fonctionnement sectoriel voulu unique.

4Pourtant, cette cohérence attendue apparaît ténue. Dans les faits, plusieurs types de configurations productives persistent, chacune ayant des modalités de régulation propres et constituant autant d’espaces de régulation [3] différents. Et, alors que les services à la personne sont supposés être un secteur aux perspectives d’évolutions dynamiques, les opérateurs historiques du secteur connaissent, depuis 2009, une crise de financement qui remet en cause les fondements de l’aide à domicile aux personnes âgées. Ces acteurs historiques sont les associations d’aide à domicile, dont la fédération UNA estimait dès fin 2009 que 300 à 400 sont en situation de grande fragilité économique, plusieurs ayant déjà déposé le bilan. Cette crise nous semble révélatrice de contradictions dans la régulation concurrentielle du secteur.

5Dans la configuration actuelle de quasi-marché, la personne âgée peut choisir librement entre des modes de production [4] différents que sont le prestataire, le mandataire et l’emploi direct. La question est de savoir comment la concurrence et le choix opèrent concrètement. H. Noguès [2008] souligne la mise en concurrence de régimes de financements [5]. De ce fait, on peut se demander si la forme concrète de la concurrence n’est pas une concurrence entre plusieurs régimes de prix, entendus comme des modalités de répartition des coûts de production entre organismes producteurs, consommateurs et intervenants salariés. Ces régimes de prix renvoient aux types de relations de service qu’engagent les modes de production, et donc au contenu des services. Dans cette optique, la compétitivité des organismes dépend du mode de production dans lequel ils s’inscrivent et de facto du régime de prix sur lequel ils reposent.

6La crise des associations d’aide à domicile traduit leur incapacité, au moins pour certaines, à se maintenir au sein d’un régime de prix particulier dans cet environnement concurrentiel. C’est donc par l’examen des régimes de prix et des modalités de leur concurrence sur le quasi-marché qu’il est possible de comprendre la crise des organismes historiques. Pour résoudre cette crise, l’expertise publique propose un nouveau renforcement de la concurrence et une segmentation du marché autour de services homogènes [Bruant-Bisson et al., 2010], ceci alors que la régulation concurrentielle est une cause majeure de la crise des associations. L’objectif affiché par les experts est la recherche de l’efficience du système. Mais cette recherche doit-elle se résumer à la réduction de la charge du financement de l’aide à domicile, par des incitations au développement des formes les moins onéreuses, quitte à appauvrir le contenu réel du service ? Identifier l’existence de plusieurs régimes de prix conduit à discuter l’efficience sous une autre optique : peut-on réduire l’activité professionnelle de service à la formation d’un « produit » unidimensionnel ou doit-on considérer que les différences de régime de prix traduisent des différences de prise en charge de la multi-dimensionnalité de cette activité (en termes de qualité, d’équité, de cohérence territoriale…) ?

7Notre propos est organisé en trois temps. Tout d’abord, nous caractérisons des régimes de prix (2) à partir d’entretiens auprès de responsables d’organismes d’aide à domicile (cf. encadré 1). Les travaux menés par la « plate-forme de l’aide à domicile en Champagne-Ardenne » permettent ensuite de souligner comment la concurrence entre régimes de prix et le financement de la dépendance conduisent à une crise des organismes historiques (3). Nous montrons enfin que les nouvelles modalités de concurrence proposées par la puissance publique, en réponse à la crise des associations d’aide à domicile, viendraient affaiblir la capacité des offreurs à développer un modèle productif compatible avec des services de qualité (4).

Encadré 1. Modalités de recueil des données empiriques

Dix-neuf monographies de modèles productifs d’organismes d’aide à domicile ont été réalisées à partir d’entretiens semi-directifs auprès de leurs responsables (directeurs, gérants) implantés en Champagne-Ardenne.
Ces éléments sont complétés par une observation participante de longue durée (2007-2011) au sein de l’Uriopss Champagne-Ardenne. En collaboration avec le directeur et le bureau, nous y avons coanimé les travaux de la « Plate-forme de l’aide à domicile ». Ce groupe de travail comprend toutes les fédérations d’aide à domicile de la région ainsi que la chambre régionale d’économie sociale. Ces fédérations représentent l’ensemble des organismes non lucratifs autorisés de la région (environ 300 associations et centres communaux d’action sociale, 8 000 salariés et 21 000 bénéficiaires).

2 – Régimes de prix en concurrence dans le sous-secteur de l’aide à domicile aux personnes âgées dépendantes

8La catégorie de modèles productifs [Boyer & Freyssenet, 2000] offre un cadre d’étude de la diversité de la manière dont les organismes forment leur compétitivité. Dans ce cadre interprétatif, la compétitivité de la firme repose sur l’adéquation de son modèle productif avec le mode de croissance et de distribution du revenu national mais aussi avec les dispositifs institutionnels et le régime économique de fonctionnement du secteur. Ce cadre met en cohérence un compromis de gouvernement d’entreprise et une stratégie de profit, ou une stratégie de compétitivité[6]. Cette stratégie s’applique à la fois au niveau de l’organisme et du sous-secteur, entendu comme un groupe d’acteurs obéissant aux mêmes règles et agissant conjointement pour l’évolution et/ou le maintien de celles-ci. Le compromis de gouvernement d’entreprise articule, quant à lui, la politique produit, la division du travail et la relation salariale. Au regard du poids de la rémunération des salariés dans le prix du service (entre 85 et 100 %), la relation salariale est un élément central du modèle productif. Mis en relation avec la régulation sectorielle et macroéconomique, le modèle productif contribue donc à rendre compte, à un niveau fin, des transformations du rapport salarial.

9Le mode de régulation de la qualité et les formes d’organisation de la production constituent des régularités suffisantes pour caractériser les régimes de prix en place dans l’aide à domicile : l’emploi direct (2.1), le mandataire (2.2), l’autorisation (2.3) et l’agrément qualité (2.4). Chacun traduit des logiques d’intervention différentes. Le mode de l’autorisation renvoie à une logique sociale, l’organisme autorisé se voit « investi officiellement d’une mission par le président du conseil général : celle de répondre sur son territoire aux besoins recensés dans le schéma » [Debons, 2006, p. 93]. À l’inverse, l’agrément qualité renvoie à une logique de création d’emplois par le développement d’un marché des services à la personne où la fragilité des clients exige une régulation publique de la qualité. L’emploi direct mêle à la fois une logique historique de domesticité, une logique de création d’emplois et une logique sociale, certains employeurs fragiles (i.e. les personnes de plus de 70 ans) bénéficiant à ce titre d’exonérations spécifiques destinées à faciliter leur prise en charge à domicile. Le mode mandataire combine ces logiques, les associations ayant tiré profit d’une législation avantageuse de l’emploi direct pour développer de nouveaux services destinés à faciliter le maintien à domicile des personnes âgées [Gallois, 2010].

10Ces quatre modes de production ont des modalités de fixation et de répartition des coûts de production entre opérateurs, salariés et clients différentes, certaines tâches nécessaires à la production pouvant, dans certaines configurations, être supportées par le client, si bien que le service réellement échangé n’est pas strictement le même (cf. tableau 1). Les régimes de prix guidés par ces modes de production se trouvent pourtant en situation de concurrence (2.5) puisque tous produisent des heures d’aide ménagère et sont éligibles dans le cadre de l’allocation pour l’autonomie (APA), le choix du producteur revenant au client.

Tableau 1

Logiques des régimes de prix et répartition des coûts

Tableau 1

Logiques des régimes de prix et répartition des coûts

Réalisé par nos soins

2.1 – Formation des salaires dans l’emploi direct

11Le prix final, réellement supporté par le client, est supposé constituer une variable déterminante dans le choix de recours à des services à la personne [Flipo & Olier, 1998]. L’emploi y est réputé peu qualifié car les activités domestiques réalisées dans ce cadre peuvent être aussi autoproduites aisément. Dans le cas de l’emploi direct, le service acheté est le travail d’un salarié intervenant, et le prix des heures d’aide à domicile se situe donc près des minima conventionnels, eux-mêmes proches du SMIC. La variation des prix devrait donc suivre celle des salaires conventionnels, ce qui n’apparaît pas en courte période puisque la capacité de négociation du salarié intervient dans la formation du prix. 73 % des mises en relation entre un offreur de travail et un demandeur d’aide à domicile ont lieu par le biais du réseau social de l’employeur qui lui recommande un certain salarié potentiel [Angotti et al., 2008]. La recommandation de ses qualités permet au salarié potentiel d’être partiellement exclu de la concurrence et d’imposer son prix par une capacité de négociation accrue. De manière générale, ce régime de prix, proche du modèle de concurrence monopolistique de Chamberlin [1953], résulte de comportements stratégiques d’acteurs. En ce sens, le prix résulte des relations qui existent entre le producteur/travailleur et ses clients/employeurs et permettent au producteur de distinguer son produit/travail relativement à ses concurrents. Le salaire horaire en emploi direct est alors, en moyenne, un peu plus élevé que celui au sein d’un organisme prestataire [ANSP, 2010] même s’il reste proche du minimum conventionnel.

2.2 – Formation des prix et des salaires dans le cadre mandataire

12Dans le cadre du mandataire, un organisme apporte un appui à un particulier dans son rôle d’employeur. Une division du travail originale est à l’œuvre : le client est l’employeur, mais le service mandataire lui offre un appui pour la recherche d’un intervenant et pour la gestion des formalités administratives liées au statut d’employeur (contrat de travail, fiches de paye…). Dans ce mode d’organisation, plusieurs systèmes de formation des prix et salaires coexistent. Deux grandes configurations sont à distinguer. Dans la première, prix et salaires sont compris dans un même forfait, celui-ci pouvant varier selon les exonérations auxquelles le statut du particulier-employeur ouvre droit et le salaire correspond au minimum conventionnel. Dans la seconde configuration, les frais de gestion et les salaires sont distincts. Les frais de gestions sont déterminés par le mandataire. Ils peuvent être exprimés en fonction du nombre d’heures (avec un tarif dégressif selon le volume) ou consister en un forfait mensuel couvrant l’ensemble des frais de gestion. Dans cette configuration, le particulier employeur est informé par l’organisme mandataire de l’existence de minima conventionnels et peut, s’il le souhaite, rémunérer son salarié au-delà. Cette pratique est néanmoins marginale, l’information du particulier employeur par le mandataire conduisant à une diminution du pouvoir de négociation du salarié.

2.3 – Formation des prix dans le régime de l’autorisation

13D’un point de vue formel, la formation des prix pour les organismes autorisés relève d’une procédure de tarification par le conseil général (CG) et concerne tant les associations historiques que les entreprises nouvellement entrées dans le champ. Dans le cadre de la tarification, le service d’aide à domicile établit un budget prévisionnel (BP) en fonction de ses coûts et de ses perspectives d’activités. Ce budget traduit le projet autorisé par le CG, la délivrance de l’autorisation étant elle-même soumise à l’adéquation du BP aux capacités financières de l’autorité. Ainsi, le Code de l’action sociale et des familles prévoit que « l’autorisation [… peut] être refusée […] lorsque les coûts de fonctionnement sont manifestement hors de proportion avec le service rendu ou avec ceux des établissements fournissant des services analogues. Il en est de même lorsqu’ils sont susceptibles d’entraîner, pour [les] collectivités territoriales, des charges injustifiées ou excessives » (Art. L318-8). Le BP correspond donc aux modalités financières de réponse à des besoins préalablement identifiés par le CG à travers les schémas départementaux. L’autorité doit alors intégrer dans la tarification les dépenses normales de fonctionnement et les charges obligatoires.

14Ces dépenses reposent sur l’évaluation par l’organisme de son activité (public pris en charge, volume d’intervention prévu…) et sur la démonstration par celui-ci que les moyens proposés sont des moyens normaux. Ils incluent les coûts matériels et humains nécessaires à la production d’un service d’aide à domicile relevant du champ médico-social : en premier lieu des salaires, déterminés par des conventions collectives agréées par l’État, puis des frais de structure et des frais de déplacements. Il s’agit également des frais afférents à l’exercice d’une mission sociale.

15La procédure de négociation contradictoire permet au CG de faire connaître ses demandes de modification de coûts à l’organisme. Celles-ci doivent être justifiées au regard des pratiques en vigueur pour la production de ce service. Néanmoins, la procédure « est souvent perçu[e] comme dur[e][…] ; beaucoup de structures soulignent […] l’absence de justification – voire d’explication – de certaines décisions prises de retenir ou non telle ou telle dépense » [Bruant-Bisson et al., 2010, p. 31]. La procédure de tarification conduit à une formation du prix à partir des coûts de production jugés nécessaires par le Conseil général. La formation des prix renvoie ici à une certaine forme de justice sociale [Hedoin, 2008] correspondant à un marché subordonné à des critères sociaux. Le tarif fixé s’applique alors à tous les clients, et l’organisme ne peut pas facturer au-delà.

16Néanmoins, le tarif reflète des coûts qui varient selon le statut juridique de l’organisme : les entreprises n’étant pas parvenues à élaborer une convention collective ne sont pas soumises à son application, mais elles doivent intégrer à leurs coûts une TVA de 5,5 % (et un éventuel impôt sur les sociétés) là où les associations s’acquittent d’une taxe sur les salaires (taux en fonction de la masse salariale). D’autre part, la littérature relative aux associations [par exemple, Laville & Nyssens, 2000] pourrait faire penser que les associations mobilisent des ressources particulières et spécifiques, leur permettant de réduire leurs coûts de production : des ressources ne relevant pas de l’échange marchand (subventions, mise à disposition de locaux par la collectivité) et des ressources non monétaires, issues du bénévolat. Cependant, il est apparu au cours de notre enquête de terrain que les entreprises mobilisaient également des ressources non marchandes et non monétaires (locaux à prix réduit en pépinières d’entreprises, travail non rémunéré des gérants, sollicitation de subventions…). En outre, par leur création récente, ces entreprises peuvent même accéder à d’autres formes de ressources comme des exonérations de cotisations sociales et de certaines taxes par des implantations en zone franche urbaine/zone de revitalisation rurale…

2.4 – Formation des prix des prestataires agréés qualité

17Alors que l’autorisation implique une tarification à l’échelle du département et la mise en œuvre d’une mission sociale, les organismes agréés peuvent construire leurs prix à l’échelle locale ou nationale, éventuellement en ajustant les prix selon les villes (à Paris et Lyon, les prix sont habituellement plus élevés) et effectuer une sélection de leurs clients.

18Les logiques de construction des prix sont variées mais renvoient toutes au référentiel qu’est le prix de marché pour les services relevant de l’Apa et, pour les services relevant des grands comptes au prix imposé par ces derniers, caisses de retraite et assureurs. Selon le gérant d’une entreprise d’aide à domicile, « une méthode de fixation des prix consiste à regarder le prix de l’entreprise la plus chère et de l’association la plus chère sur la zone de chalandise puis à calculer la moyenne, qui donne un prix de référence ». L’organisme se trouve alors dans une situation de price taker, le prix de marché dépendant des financements publics [Gallois, 2009]. À partir de ce prix, l’organisme ajuste ses coûts de production et développe une activité permettant d’atteindre son seuil de rentabilité (i.e. d’équilibrer ses comptes et, s’il s’agit d’une entreprise, de dégager du profit servant à la rémunération des actionnaires et/ou des dirigeants non salariés). Cette forme de fixation des prix, à partir d’une cascade informationnelle dont l’origine est le prix résultant de la tarification, peut être considérée comme rationnelle dans la mesure où la décision des uns peut refléter des informations que les autres n’ont pas. Elle n’en est pas pour autant optimale, la cascade informationnelle liée à un effet de troupeau constitue une externalité négative contraignant le prix [Banerjee, 1992].

19L’ajustement des coûts de production au prix de marché résulte de la combinaison des éléments formant le compromis de gouvernement d’entreprise : la politique produit, le rapport salarial, la division du travail et la place de l’organisme dans la relation de service.

20Il est ainsi fréquent de trouver des politiques produits très élaborées, avec des grilles tarifaires complexes où le prix est fonction à la fois du type de service et de la durée d’intervention mensuelle que l’on ne retrouve théoriquement pas dans le régime de l’autorisation [7]. Le recours à cette forme de fixation des prix permet aux organismes d’optimiser la division du travail entre intervenants qualifiés et non qualifiés, mais aussi de limiter le travail administratif d’organisation des prestations.

21Par ailleurs, il n’est pas rare que les grilles tarifaires incluent des frais de déplacement si le domicile du client se trouve au-delà de la zone urbaine d’intervention. Cette pratique de transfert des coûts de transport de l’organisme au client est particulièrement développée au sein des organismes qui rémunèrent (en partie) des frais de déplacement aux salariés. On peut également y trouver des frais de dossiers contribuant à amortir les coûts administratifs nécessaires à la mise en place des prestations, les coûts de structure sont alors répercutés sur le client. Il s’agit in fine d’une décomposition du service produit permettant de rémunérer spécifiquement le rôle tenu par l’organisme (organisation de la prestation, évaluation de la demande…).

22Une dernière manière de réduire les coûts de production consiste à limiter les coûts salariaux ou à les répercuter sur le salarié. Cela est rendu possible par l’absence de convention collective qui permet de jouer directement sur les salaires. La réduction (parfois à outrance) des heures non productives rémunérées permet également de jouer sur la masse salariale. Ces dernières peuvent être liées au transport entre deux clients (le « principe d’un client pour un intervenant » les supprime) ou bien liées à de la formation (formation d’une journée rémunérée à hauteur d’une demi-journée), à des temps collectifs ou administratifs (non rémunération du temps mensuel de rendu des feuilles d’heures).

2.5 – Une concurrence entre services aux contenus différents

23Ces quatre formes productives développent des produits différents même si tous sont considérés comme des « heures d’aide à domicile ». Associées à des régimes de prix spécifiques, elles conduisent à des coûts de production différents : les frais de structure sont absents de l’emploi direct car ils n’existent pas, ils sont largement réduits dans le cadre du mandataire où seule une partie de l’organisation du travail est mise en œuvre. Au sein des organismes prestataires, la répartition de la prise en charge des coûts de production varie même si les coûts sont relativement similaires entre les deux régimes de prix.

3 – Crise du régime de l’autorisation ou crise des financements publics ?

24Là où les organismes agréés peuvent répercuter certains coûts de production sur le salarié ou le client au-delà du tarif affiché (par exemple le coût de transport), cette pratique n’est pas possible pour les organismes autorisés, généralement des associations, du fait de la double contrainte de la tarification et de l’application d’une convention collective. Ainsi, malgré un accroissement des besoins, les associations autorisées font face à un problème structurel de rentabilité puisque, de façon quasi générale, leur tarif ne couvre pas les coûts de production (3.1). Cette sous-tarification découle de l’organisation du financement de la dépendance (3.2) et résulte d’une double contrainte : 1) l’accroissement des coûts de production des organismes lié à un effort de qualification des intervenants, encouragé par la loi rénovant l’action sociale et médico-sociale et 2) la non-compensation par l’État d’une partie des dépenses d’action sociale transférées aux conseils généraux qui peinent à faire face à l’augmentation des besoins [Jany-Catrice, 2010a ; Uriopss Champagne-Ardenne, 2010].

3.1 – Des difficultés structurelles malgré un accroissement des besoins

25Globalement, les besoins des populations augmentent, malgré des disparités sur les territoires. Pour le cas de la Champagne-Ardenne, le nombre de bénéficiaires de l’Apa à domicile connaît une croissance régulière depuis la mise en place du dispositif (8,6 % en moyenne annuelle entre 2003 et 2009 et 5 % pour la seule période 2008-2009), avec d’importantes disparités départementales qui traduisent la structure de la population : 10,7 % de croissance dans les Ardennes contre 0,8 % dans la Marne. Pourtant, paradoxalement, presque tous les services autorisés de la région enregistrent un bilan déficitaire malgré l’accroissement des besoins, souligné ici par le biais du nombre de bénéficiaires de l’Apa. Certaines associations bénéficient d’une tarification suffisante pour prendre en charge le coût de revient des prestations, mais cette situation tient de l’exception. Parmi les membres de la plate-forme de l’aide à domicile, des écarts significatifs entre le prix de revient de certains services et le tarif payé sont constatés, les pertes réalisées sont estimées entre 0,50 € et 3,50 € par heure d’intervention. Cette situation de sous-tarification relativement aux coûts de revient est confirmée par les récents travaux menés à l’échelle nationale par l’inspection générale des Affaires sociales [Bruant-Bisson et al., 2010]. Ils accusent le surcoût des charges salariales, liées à des dispositifs institutionnels spécifiques aux associations (les conventions collectives) et celui de l’organisation du travail des intervenants par les organismes dans le cadre de leur compromis de gouvernement d’entreprise. Les conventions collectives, qui ne concernent que le champ non lucratif de l’aide à domicile, constituent ainsi un coût important à supporter pour ces opérateurs alors même qu’elles sont jugées encore insuffisantes pour assurer la qualification nécessaire à la prise en charge de personnes âgées dépendantes. Pourtant, ce coût ne se retrouve pas chez les opérateurs privés avec qui les associations sont en concurrence. Cette concurrence entre régimes de prix et des dispositifs institutionnels spécifiques à certains types d’acteurs accentue l’effet de concurrence sur le prix de l’heure entre les différentes formes de producteurs.

26Toutefois, plusieurs dispositifs (dédiés ou non au secteur) se chevauchent afin de réduire le coût du travail : les exonérations dites « services à la personne », les exonérations pour l’aide auprès de personnes de plus de 70 ans et les exonérations générales sur les bas salaires. Ces dispositifs contribuent effectivement à réduire le coût du travail, mais leur instabilité renforce les difficultés de l’aide à domicile. Ainsi, la suppression par la loi de finances 2011 des exonérations services à la personne accroît les prix de revient horaire de 20 à 30 centimes pour les services d’aide à domicile aux personnes âgées. Les services à domicile recourent également à des dispositifs extra-sectoriels pour diminuer leurs coûts de production : les dispositifs de contrats aidés sont fréquemment utilisés pour l’emploi de personnel administratif, ce qui permet une baisse du coût de production. Mais ces dispositifs sont également instables. Les possibilités de recours à ce type de contrat aidé diminuent, ce qui pèse à nouveau sur les coûts de production.

27Dans les faits, l’ensemble de ces dispositifs qui se subsument en la formation des prix conduit certaines associations à envisager de sortir du régime de l’autorisation pour qu’elles puissent établir des prix couvrant leurs coûts de production. Cela implique de sortir des dispositifs spécifiques du médico-social pour entrer dans des dispositifs concurrentiels qui s’appliquent à l’ensemble du secteur. Ce changement de régime viendrait remettre en cause la logique de solidarité associative et contribuerait à renforcer un phénomène de chalandisation du social [Chauvière, 2010 (2007) ; Jany-Catrice, 2010b].

3.2 – Le financement de la dépendance, variable-clé du régime de prix

28Le régime de l’autorisation constitue une première explication des difficultés des organismes d’aide à domicile, à laquelle s’ajoutent le rôle du financement de la dépendance dans ces régimes de prix et les modalités de leur concurrence. Deux grands modes de financement de la prise en charge de la dépendance à domicile coexistent et agissent de façon spécifique sur la concurrence entre les régimes. Ces dispositifs répondent à des niveaux de dépendance différents : le dispositif de l’Apa concerne les personnes ayant une dépendance moyenne à importante (GIR [8] 4 à 1) et les dispositifs de la CNAVTS [9], mis en œuvre par les Carsat [10], répondent aux besoins des personnes peu dépendantes (GIR 5 et 6).

29Dans le cadre de l’Apa, le consommateur peut librement choisir son producteur, celui-ci peut donc relever du régime de prix associé à l’emploi direct, au mandataire, à l’agrément qualité ou à l’autorisation. De fait, les quatre régimes de prix dans l’aide à domicile se trouvent directement en concurrence bien que les services réellement produits ne soient pas strictement les mêmes. Mais le montant des plans d’aide n’est pas déterminé de façon strictement proportionnelle au type de producteur choisi. Il dépend du niveau de dépendance, du volume d’heures d’aide à domicile déterminé par le plan d’aide élaboré par les équipes du conseil général et dans une certaine mesure du type de producteur, le tout en respectant les montants maxima des plans, fixés nationalement pour chaque GIR. La concurrence entre les formes de production éligibles à des financements Apa dont le montant global est plafonné conduit à un rationnement : plus les besoins d’aide sont élevés, plus les bénéficiaires devront se tourner vers des formes d’aide moins onéreuses, de l’emploi direct [Raymond et al., 2009]. Si elle peut sembler relever avant tout de la formation de la demande, cette mise en concurrence, n’est pas sans conséquence sur les régimes de prix, a fortiori ceux des services prestataires. Ainsi, « les coûts d’intervention horaire deviennent la référence et la qualification, le travail d’intermédiation, l’évaluation… représentent des surcoûts pourtant essentiels à la qualité du service et de l’emploi mais qui ne sont pas imposés à tous » [Gardin et al., 2010, p. 528]. Le contenu du service réellement produit est modifié, mais c’est sur la base de cette possibilité du moindre coût que les conseils généraux ne prennent plus en compte dans la tarification soit les charges liées à l’évaluation de la qualité (l’évaluation externe en particulier), soit encouragent à la déqualification des salariés, soit ne reconnaissent plus les conventions collectives alors que ces éléments s’imposent aux organismes dans le cadre du régime de l’autorisation médico-sociale.

30Dans ce système, le Conseil général organise à la fois la formation de la demande en solvabilisant les besoins via l’Apa et la formation de l’offre par les organismes autorisés. Or la revalorisation des plafonds de l’Apa s’effectue en fonction de l’inflation, agrégat déterminé au niveau macroéconomique, alors que les tarifs évoluent selon des coûts de production non directement liés à l’inflation mais relevant de dispositifs institutionnels sectoriels instables. Le manque de cohérence entre ces deux dispositifs conduit à une baisse de la demande réelle pour les services sous forme prestataire : la revalorisation de l’Apa étant inférieure à l’évolution des tarifs. Cette baisse de la demande ne correspond pas pour autant à une baisse des besoins, le niveau de dépendance ayant même tendance à s’accroître au fil du temps. Face à ce paradoxe, les organismes autorisés ont deux possibilités. La première entre en conflit avec le principe de solidarité qui guide leurs actions. Il s’agit de faire contribuer directement le bénéficiaire au-delà du plan d’aide. La seconde consiste à fractionner les interventions en réduisant leur durée et en recentrant le service sur des actes prioritaires pour permettre le maintien à domicile [Jany-Catrice & Puissant, 2010]. Cette alternative a des répercussions négatives à la fois sur le bénéficiaire, puisque la prise en charge est partielle, sur sa famille qui pourra être amenée à compenser la réduction de la durée des interventions, et sur l’association, le fractionnement des interventions ne conduisant pas à une réduction des coûts de production de même ampleur compte tenu de l’existence de coûts fixes par intervention (temps et frais de déplacement, contraintes organisationnelles…).

31En outre, bien que la tarification détermine un tarif opposable correspondant aux coûts de production acceptables, ce dernier n’est pas celui reconnu par la Carsat pour les prestations d’aide à domicile qui relèvent de sa compétence. Celle-ci impose en effet aux prestataires avec lesquels elle a passé convention un tarif unique déterminé au niveau national, le plus souvent inférieur à celui du CG. Ce tarif national ne reflète pas la réalité des coûts de l’organisme qui sont déterminés au niveau local et qui varient avec le niveau de qualification des salariés, les formes d’organisation du travail, le périmètre géographique couvert, etc. Ainsi, l’emploi de personnels d’intervention qualifiés accroît la masse salariale par le jeu de la convention collective, de la même manière, l’intervention en milieu rural tend à accroître les frais de déplacement. Pourtant, ces coûts ne sont pas considérés par la Carsat alors que le conventionnement des organismes ne leur permet pas de sélectionner leurs clients selon les coûts inhérents des interventions. Les coûts de production des organismes découlent également des procédures des prises en charge des bénéficiaires. Or la réorganisation des services de la Carsat et la « variation incessante des procédures et des barèmes [11] » accroissent, pour les organismes, les coûts des interventions liées à ces financements en introduisant des coûts d’apprentissage. La réorganisation des services et la mise en place d’un nouveau système informatique ont conduit à de nombreux dysfonctionnements qui se sont répercutés sur les prestataires travaillant avec la Carsat. Des retards très importants (plus d’un an) pour le règlement des prestations ont été constatés, ce qui suppose pour les organismes d’avancer la trésorerie nécessaire, éventuellement par le biais d’un emprunt bancaire.

4 – Une réorganisation du secteur au détriment de la qualité de service

32Les modalités de financement de la dépendance, qui contribuent à l’organisation d’une concurrence entre régimes de prix, constituent, si ce n’est la principale, au moins l’une des variables clés de la crise que connaissent les associations autorisées d’aide à domicile. Les fédérations ont appuyé leurs revendications sur cet axe, demandant la refonte d’un système de financement qu’elles savent à bout de souffle compte tenu de l’étranglement des départements entre des dépenses qui augmentent et des recettes au mieux stagnantes [Jamet, 2010 ; Uriopss Champagne-Ardenne, 2010]. Face à leur insistance, les pouvoirs publics ont entrepris une longue réflexion sur la situation.

33Le rapport prescriptif établi par l’Igas et l’IGF pour la mission relative aux questions de tarification et de solvabilisation des services d’aide à domicile en direction des publics fragiles en constitue une pierre angulaire qu’il convient d’analyser de façon systémique. Les recommandations émises ne visent pas directement le financement de la dépendance, pourtant clé de voûte du système, mais se centrent sur l’organisation de la production (relevant du compromis de gouvernement d’entreprise) et sur l’organisation de nouvelles règles de concurrence. En conséquence, il est possible d’examiner, de façon exploratoire, la manière dont les dispositifs institutionnels suggérés par l’Igas et l’IGF se traduiraient en termes de régime économique de fonctionnement et de modèles productifs. L’examen des différentes possibilités nous amènera à pointer que rechercher l’efficience de la prise en charge des personnes dépendantes en réorganisant uniquement le système de production par de nouvelles règles de concurrence ne peut que conduire à une qualité de service dégradée. Nous montrerons pourquoi (4.2.) après avoir présenté les principales recommandations de l’Igas et de l’IGF (4.1.).

4.1 – Le nouveau régime économique de fonctionnement proposé par l’Igas et l’IGF

34Le rapport se centre sur l’organisation interne des organismes, et surtout les possibilités existantes pour compresser des coûts relevant de moyens normaux de fonctionnement. Le modèle productif est envisagé essentiellement à travers le seul compromis de gouvernement d’entreprise et non au regard de l’environnement dans lequel il s’insère. Dès lors, la crise apparaît appréhendée non pas comme étant issue de contradictions dans la régulation de l’aide à domicile, mais comme relevant avant tout d’un problème organisationnel. Ce positionnement n’empêche pas la mission d’affirmer que « les marges de manœuvre des services pour améliorer leur rentabilité et conserver ou retrouver un équilibre financier […] demeurent limitées » [Bruant-Bisson et al., 2010, p. 3] et d’émettre des préconisations contraignant le compromis de gouvernement d’entreprise par de nouvelles règles de concurrence reposant sur une uniformisation du produit et une segmentation accrue du quasi-marché.

35La première préconisation est l’instauration d’un référentiel national pour la fixation des prix afin de limiter les écarts départementaux en matière de tarification. Pour la mission, « l’existence d’un tel référentiel permettrait […] d’accélérer la convergence tarifaire entre services » [ibid., p. 28]. Concrètement, cela revient à instaurer des méthodes de gestion où les organismes sont sommés de se conformer à un prix homogène sans se soucier de l’hétérogénéité des produits réels. Nous avons déjà montré que, selon les formes productives, le contenu du service d’« heures d’aide à domicile » différait. Mais l’hétérogénéité du produit « heures d’aide à domicile » doit être poussée au-delà. Le service, qui se compose d’un process de production et de son résultat, varie d’un bénéficiaire à l’autre puisque les services sont coproduits par l’intervenant et le consommateur au sein d’un environnement donné [Gadrey, 2003]. Le service est donc hétérogène par essence.

36La recherche d’une homogénéisation des services par leurs coûts de production a déjà été mise en œuvre dans le secteur hospitalier avec l’introduction de la tarification à l’activité. Or les conséquences négatives de cette organisation sont connues, tant en termes de qualité de soins que d’équilibre économique des organismes [Or & Renaud, 2009]. Pour l’aide à domicile, ce changement ne serait pas non plus exempt de conséquences : les coûts induits par des spécificités territoriales (avec des temps de déplacements plus importants dans des zones rurales que dans des grandes métropoles) n’entreraient plus pleinement dans la formation des prix, de même que ceux liés à la prise en charge de certains publics en situation de grande fragilité sociale. L’harmonisation des méthodes de fixation des prix dans l’aide à domicile risque d’entraîner de plus grandes inégalités d’accès entre les demandes de prise en charge simples et les demandes plus complexes, de la même manière que la standardisation des prix avec des groupes homogènes de malades a conduit à une sélection des patients dans le secteur hospitalier [ibid.]. On pourrait alors assister dans le champ de l’aide à domicile à des refus d’intervention si la situation est trop lourde ou encore si l’étage de l’appartement est trop élevé, comme cela est déjà constaté dans le champ du soin à domicile. De même, il serait possible de trouver des territoires non couverts car non rentables du fait de déplacements entre domiciles trop importants. Autrement dit, on assisterait à une sélection des personnes prises en charge en fonction du coût que représente l’intervention.

37La seconde recommandation de la mission Igas-IGF vise à segmenter le marché tout en renforçant l’organisation quasi marchande de l’aide à domicile. À partir du postulat que seules les interventions auprès de personnes particulièrement dépendantes nécessitent des salariés formés et une structure d’organisation, la mission recommande que soient distinguées deux formes de coordination selon le niveau de dépendance. Dans chaque configuration, le client est directement subventionné à hauteur d’un tarif standard national pour l’achat d’une prestation sociale proposée par une grande variété d’opérateurs locaux en concurrence.

38Pour les personnes les plus vulnérables (GIR 1 et 2), dont la prise en charge d’aide à domicile repose sur des « aides à la personne » légitimant une qualification des salariés, les interventions seront effectuées par des organismes prestataires. La mise en concurrence sur le quasi-marché sera double. Un premier niveau mettra en concurrence les opérateurs (associations, entreprises) via des appels d’offre et un second les mettra en concurrence par le choix du client entre plusieurs offreurs de services publics.

39Pour les services destinés aux personnes âgées moins dépendantes (GIR 3 et 4), dont la prise en charge repose sur des « aides à l’environnement » au regard desquelles une qualification spécifique n’est pas considérée comme nécessaire, les interventions relevant du particulier-employeur, où aucune forme de régulation publique de la qualité n’existe, seront encouragées. Sur ce quasi-marché, les prix seront libres et le client subventionné à hauteur d’un tarif standard déterminé au niveau national.

40En modifiant les règles de concurrence et en introduisant une segmentation renforcée, reposant sur une standardisation du produit et plusieurs phases de mise en concurrence, la mission organise une remise en cause du prestataire comme mode d’organisation pertinent pour la production de services d’aide à domicile auprès de personnes moyennement dépendantes. En prônant le recours au particulier-employeur dans le cadre de l’aide à domicile aux personnes moyennement dépendantes, elle modifie le contenu du service. De plus, elle se positionne radicalement à l’opposé des associations qui revendiquent la nécessité d’organiser la prise en charge de la dépendance par des services prestataires assurant une continuité de service et employant des salariés formés aux temps de travail suffisants. En organisant une segmentation des prises en charge, elle modifie également l’organisation du travail, ne laissant que « les cas les plus lourds » aux prestataires alors que ceux-ci cherchent justement à organiser une répartition de la « lourdeur » des interventions afin de limiter la charge psychique supportée par les salariés. Loin de répondre à la problématique de financement des associations, la mission les fragilise encore plus en délégitimant leur intervention auprès des GIR 3 et 4, qui représentent près de 80 % des bénéficiaires de l’Apa à domicile [Debout & Lo, 2010]. Ce faisant, elle entérine l’emploi direct et son rapport salarial parfaitement flexible [12] comme mode de production efficient et légitime d’aide à domicile. Mais, dans une telle configuration, comment contrôler la qualité du service ? Ce renforcement de la concurrence entre producteurs permettra-t-il une plus grande efficience (sachant que les marges de manœuvre internes sont limitées) ou sera-t-il source de nouvelles inégalités de prise en charge comme le suggère l’exemple hospitalier ?

4.2 – L’imposition d’un nouveau compromis de gouvernement d’entreprise

41Il est surprenant de chercher à organiser une plus grande efficience de la prise en charge de la dépendance en visant la réorganisation du système de production seulement. Au regard des dépenses publiques qui y sont consacrées, le système de quasi-marché influe sur la répartition de ces sommes entre producteurs et non sur leur montant global. La théorie du public choice suggère même que seule une concurrence très accrue entre producteurs pourrait permettre de réaliser ainsi une réduction des dépenses [Glennerster & Le Grand, 1995]. Une telle concurrence existe pour la prise en charge des GIR 3 et 4. Il s’agit de l’offre de l’emploi direct et des entreprises commerciales développant des modèles productifs spécifiques, reposant sur une sélection des clients et reproduisant la relation salariale flexible associée à l’emploi direct. Mais quid de la prise en charge des personnes les plus dépendantes ?

42Pour assurer leur compétitivité, les producteurs doivent trouver de nouveaux compromis de gouvernement d’entreprise, sous contrainte de tarifs uniques, d’un marché artificiellement segmenté et de marges de manœuvre internes limitées. Les organismes agréés fixent déjà leurs prix dans une logique proche puisqu’ils adaptent leurs coûts de production au prix du marché. Néanmoins, ils disposent d’une certaine latitude dans la détermination de leur politique produit, par exemple en proposant des formules où le prix horaire décroît selon le volume ou en facturant des éléments n’étant pas directement des « heures d’aide à domicile » à leurs clients. Or cette nouvelle organisation restreint encore les variables sur lesquelles l’organisme peut agir pour trouver un compromis de gouvernement d’entreprise lui permettant d’être compétitif. En effet, l’imposition d’un prix national et de la segmentation du marché contraint à mener une politique produit spécifique ; l’organisme, ne pouvant agir que sur les conditions de production organisées par la division du travail – la relation de service et la relation salariale –, n’a d’autre choix que de dégrader la qualité des services produits et des emplois.

43Schématiquement, la structure des coûts des organismes autorisés comporte 80 à 90 % de frais de personnel, dont 75 à 80 % sont liés à la rémunération des intervenants à domicile. Parmi ces coûts la mission Igas-IGF relève des « frais de personnel excessifs au regard de l’activité et des produits » et « un nombre d’heures non productives trop important » (p. 12). Ces frais de personnel excessifs renvoient à la présence de conventions collectives qui organisent la rémunération d’heures de travail hors de la présence de l’usager (déplacement, coordination…). Il est donc suggéré de modifier le compromis de gouvernement d’entreprise et de développer une vision industrielle en ne rémunérant que les heures effectuées au domicile de l’usager, seules considérées comme productives. Or le concept de productivité est « typiquement “fordiste”, bien adapté à l’analyse des performances des systèmes de production de masse de produits standardisés et relativement peu diversifiés » [Gadrey, 2003, p. 68]. La vision industrialiste de la notion d’heures productives développée par l’Igas ne permet pas de tenir compte de certaines étapes (déplacements, travail d’équipe, continuité du service) nécessaires à l’aboutissement du processus de production d’un service par nature hétérogène qu’est l’aide à domicile. Si la remise en cause de ces étapes modifie les contours du service, elle va au-delà en ouvrant la porte à un affaiblissement de la position salariale dans l’aide à domicile par un renforcement des coûts de production qui seraient supportés par le salarié, comme cela existe déjà dans certaines entreprises commerciales et dans l’emploi direct.

44Or, compte tenu de l’inscription sociale des services, l’évaluation de la qualité de ceux-ci est fortement conventionnelle et repose sur la relation de service. Celle-ci peut être caractérisée comme les « modalités de connexion entre les prestataires et les clients à propos de la résolution du problème pour lequel le client s’adresse au prestataire (l’objet du service) » [Gadrey, 1994, p. 24]. Analysé comme une relation triangulaire, « le rapport social de service […] est accolé à un rapport salarial entre salarié et direction de l’entreprise » [Zarifian, 2007, p. 37], et la relation salariale devient centrale dans l’évaluation subjective de la qualité du service. Sous cette optique, la qualité du service est interdépendante de la qualité de l’emploi. La dégradation des conditions d’emploi conduit alors mécaniquement à une dégradation de la qualité du service.

45À l’opposé, certains travaux issus de l’expertise publique [Poletti, 2012] suggèrent que la qualité de l’aide à domicile serait essentiellement liée à sa durée (la qualité serait donc quantitative). En ce sens, parvenir à réduire le prix des services en transférant une partie des coûts de production sur le salarié pourrait permettre d’accroître (quantitativement) la qualité du soutien à domicile à coûts constants pour l’usager et les pouvoirs publics. Une plus grande équité dans la réponse aux besoins des personnes âgées pourrait ainsi être mise en œuvre au prix d’une dégradation des conditions de travail des aides à domicile impliquant davantage d’iniquité dans l’emploi.

46Une autre marge de manœuvre peut être envisagée par la réinterprétation de la politique produit, mais elle modifie le contenu du service et/ou les logiques de solidarité prévalant pour l’aide à domicile. Ceteris paribus, les organismes peuvent chercher l’équilibre économique en diversifiant leurs activités vers de nouveaux services et de nouveaux clients. Le renforcement de leur offre en services de confort, encouragés par le plan Borloo, permettrait de dégager des bénéfices qui viendraient couvrir les pertes réalisées pour la production des services d’aide. Une nouvelle logique de solidarité serait à l’œuvre : la prise en charge de la dépendance à domicile telle qu’aujourd’hui financée par l’État et les Conseils généraux serait soutenue par les clients recourant à des services de confort offerts par des associations. Cependant, la concurrence avec des formes d’offre moins coûteuses (entreprises et emploi direct) est exacerbée pour les services de confort et, si la diversification peut contribuer à limiter les coûts de production globaux, il est peu probable que les bénéfices dégagés par ces nouvelles activités permettent de combler les déficits de l’aide à domicile.

47Enfin, la diminution des coûts de production peut provenir d’une modification du service réellement mis en œuvre : les services d’aide à domicile étant mal définis, il est possible de les réduire à de simples gestes techniques, codifiés, qui permettraient de réduire la durée des actes nécessaires au maintien à domicile. Mais, dans cette configuration, le service n’est plus le même : il ne contribue plus à prévenir la dépendance (par la possibilité de faire avec la personne et non au lieu de la personne) mais uniquement à gérer la dépendance tout en accroissant les risques de maltraitance induits par une intervention trop brusque, manquant d’adaptabilité. La baisse des coûts de production peut aussi intervenir par une sélection du client en fonction des difficultés inhérentes à la réalisation de la prestation. Ainsi, des interventions ne répondant pas à des standards habituels de production du fait de difficultés particulières (éloignement géographique, absence d’aidants naturels, problèmes de comportement de la personne…) présentent un coût de production plus important, qui pourrait ne plus être compensé par des interventions plus simples et, de fait, devenir insoutenables et infaisables pour le producteur remettant finalement en cause la possibilité d’un soutien à domicile.

5 – Conclusion

48Depuis les années 1990, la régulation de l’aide à domicile prend une forme concurrentielle combinant une logique sociale d’aide aux personnes âgées et une logique de création d’emplois. Plusieurs formes productives d’aide à domicile se trouvent en concurrence au sein d’un quasi-marché où le consommateur est directement subventionné. Mais, à ce jour, « la mise en concurrence organisée par les pouvoirs publics de manière indifférenciée conduit à une situation où les services prestataires, les plus qualifiés, ne répondent qu’à 44 % des personnes les plus dépendantes mais à 63 % de celles qui sont en GIR 4 […]. L’inverse de ce qui serait souhaitable » [Noguès, 2011, p. 65-66]. Les institutions organisant la prise en charge de la dépendance tendent ainsi à renforcer une concurrence entre des régimes de prix aux modalités de répartition des coûts de production différents. Les effets de cette concurrence sont révélés par la crise que connaissent les opérateurs historiques.

49Face à cette situation, les pouvoirs publics proposent de rechercher l’efficience du système de soutien à domicile en modifiant les règles de concurrence entre opérateurs et en contraignant la possibilité pour les organismes de définir leur politique produit. Dans cette reconfiguration, les organismes n’auraient, pour rester compétitifs, que de faibles marges de manœuvre : dégrader des conditions de travail déjà précaires, standardiser des services en les réduisant à des gestes techniques ou bien sélectionner leurs clients en fonction des coûts individuels inhérents à la prestation afin de ne conserver que les plus rentables. Dans chacune de ces configurations, la qualité des services de soutien à domicile se verrait dégradée.

50Avec la crise des associations autorisées d’aide à domicile, c’est finalement la qualité du soutien à domicile aux personnes âgées qui est remise en cause. La réforme attendue du financement de la dépendance ne devra pas ignorer cet enjeu sociétal.

Bibliographie

  • Allaire G. (2002), « L’économie de la qualité, en ses secteurs, ses territoires et ses mythes », Géographie, Économie, Société, vol. 4, n° 2, p. 155-180.
  • Angotti M. et al. (2008), Étude sur le statut de particulier employeur, Rapport du CREDOC pour la FEPEM, Paris.
  • ANSP (2010), « Première édition du baromètre de la qualité et de la professionnalisation des emplois de services à la personne », ANSP.
  • Banerjee A. V. (1992), « A simple model of herd behavior », The Quarterly Journal of Economics, vol. 107, n° 3, p. 797-817.
  • Boyer R. & Freyssenet M. (2000), Les modèles productifs, Paris, La Découverte.
  • Bruant-Bisson A. et al. (2010), Mission relative aux questions de tarification et de solvabilisation des services d’aide à domicile en direction de publics fragiles, Rapport IGAS et IGF, Paris.
  • Chamberlin E. H. (1953), « The product as an economic variable », The Quarterly Journal of Economics, vol. 67, n° 1, p. 1-29.
  • Chauvière M. (2010 [2007]), Trop de gestion tue le social, essai sur une discrète chalandisation, Paris, La Découverte.
  • Debons P. (2006), Les services à la personne, réglementation, financement, organisation, Lyon, Juris associations.
  • Debout C. & Lo S.-H. (2010), « L’allocation personnalisée d’autonomie et la prestation de compensation du handicap au 30 juin 2009 », Études et Résultats, vol. 710.
  • Devetter F.-X. et al. (2008), Les services à la personne, Paris, La Découverte.
  • Flipo A. & Olier L. (1998), « Faut-il subventionner les services à domicile ? », Économie et Statistique, n° 316, p. 3-19.
  • Gadrey J. (1994), « Les relations de service dans le secteur marchand », in J. De Bandt & J. Gadrey J. (dir.), Relations de service, marchés de services, Paris, CNRS Éditions, p. 23-41.
  • Gadrey J. (2003), Socio-économie des services, Paris, La Découverte.
  • Gallois F. (2009), « Politiques sociales à destination des personnes âgées et emploi dans les services à la personne : une analyse en termes de complémentarité institutionnelle », in T. Barnay & F. Legendre (dir.), Emplois et politiques sociales, trajectoires d’emploi et rémunérations, Paris, L’Harmattan, p. 223-236.
  • Gallois F. (2010), « Le mandataire dans l’aide à domicile : émergence, diffusion et appropriation par l’État », in F. Degrave et al. (dir.), Transformations et innovations économiques et sociales en Europe : quelles sorties de crise ? Regards interdisciplinaires, Louvain, Presses universitaires de Louvain, p. 169-185.
  • Gardin L. et al. (2010), « Les quasi-marchés dans l’aide à domicile : une mise en perspective européenne », Annals of Public and Cooperative Economics, vol. 81, n° 4, p. 509-536.
  • Glennerster H. & Le Grand J. (1995), « Le développement des quasi-marchés dans la protection sociale », Revue française d’économie, vol. 10, n° 3, p. 111-135.
  • Hedoin C. (2008), « Interprétation institutionnaliste des droits sociaux : Schmoller, Commons, Polanyi et les droits sociaux dans le cadre du système capitaliste », in J.-P. Domin et al. (dir.), Au-delà des droits économiques et des droits politiques, des droits sociaux ?, Paris, L’Harmattan, p. 55-67.
  • Jamet P. (2010), Rapport a? Monsieur le Premier ministre sur les finances de?partementales, Paris.
  • Jany-Catrice F. (2010a), « L’aide à domicile aux personnes âgées. Silence, on ferme ! », LeMonde.fr, n° 25 février 2010.
  • Jany-Catrice F. (2010b), « La construction sociale du “secteur” des services a? la personne : une banalisation programme?e ? », Sociologie du travail, vol. 52, p. 521-537.
  • Jany-Catrice F. & Puissant E. (2010), « L’aide a? domicile face aux services a? la personne et registres d’action contradictoires : des politiques aux organisations », Revue de l’IRES, vol. 64, n 1, p. 121-147.
  • Jany-Catrice F. & Vatan S. (2011), « Les pratiques tarifaires des organismes d’aide à domicile en Nord-Pas-de-Calais », Les synthèses de la DIRECCTE, vol. 9, p. 1-40.
  • Laville J.-L. (2008), « Services aux personnes et sociologie économique pluraliste », Revue française de socio-économie, n° 2, p. 43-58.
  • Laville J.-L. & Nyssens M. (2000), « Solidarity-based third sector organizations in the “proximity services” field: A European francophone perspective », Voluntas: International Journal of Voluntary and Nonprofit Organizations, vol. 11, n° 1, p. 67-84.
  • Le Grand J. (2007), « The politics of choice and competition in public services », Political Quarterly, vol. 78, n° 2, p. 207-213.
  • Noguès H. (2008), « Les services d’aide à domicile aux personnes âgées. De la “démarchandisation” à un nouveau marché-providence », Cahiers du Cleirppa, vol. 29 et 30.
  • Noguès H. (2011), « Régulation publique et accompagnement du vieillissement : La chronique des barres parallèles », in P. Batifoulier et al. (dir.) Santé et politiques sociales : entre efficacité et justice, autour des travaux de Maryse Gadreau, Paris, Eska, p. 56-69.
  • Or Z. & Renaud T. (2009), « Principes et enjeux de la tarification a? l’activite? a? l’hôpital (t2a) enseignements de la the?orie e?conomique et des expe?riences e?trange?res », Working paper IRDES, vol. DT23.
  • Poletti B. (2012), « Mission relative aux difficultés financières de l’aide à domicile et aux modalités de tarification et d’allocation de ressources des services d’aide à domicile pour publics fragiles », Mission pour le ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale, Paris.
  • Pollitt C. & Bouckaert G. (2011 [1999]), Public management reform: A comparative analysis, Oxford, Oxford University Press.
  • Raymond M. et al. (2009), Enquête sur les conditions de la qualité des services d’aide à domicile pour les personnes âgées, Paris, IGAS.
  • URIOPSS Champagne-Ardenne (2010), « Manifeste de l’aide à domicile et synthèse d’un secteur en crise », Note d’information URIOPSS du 10/05/2010, n° 55450.
  • Vatan S. (2011), « L’économie sociale et solidaire face à l’évolution de la tarification dans l’aide à domicile, le cas de la région Nord-Pas-de-Calais», XIes Rencontres du RIUESS. Poitiers.
  • Zarifian P. (2007), « Histoire et enjeux du service durable », in E. Heurgon & J. Landrieu (dir.), L’économie des services pour un développement durable, nouvelles richesses, nouvelles solidarités, Paris, L’Harmattan, p. 27-46.

Mots-clés éditeurs : aide à domicile, quasi-marché, services, modèle productif, régulation sectorielle

Date de mise en ligne : 10/05/2013

https://doi.org/10.3917/rfse.011.0081

Notes

  • [1]
    Je remercie vivement les référés anonymes pour leurs critiques constructives sur une version précédente de cet article, je remercie également J.-P. Domin et M. Nieddu pour leurs commentaires sur différentes versions antérieures de ce travail. Je reste seule responsable de ses erreurs et insuffisances.
  • [2]
    Notamment des mesures d’exonérations fiscales dédiées et des dispositifs de grandes enseignes nationales supposées permettre l’industrialisation du secteur et l’émergence d’une consommation de masse.
  • [3]
    « Un espace de régulation est défini par deux dimensions : une structure productive (un système d’échanges ou transactions) et un ordre institutionnel (règles). » [Allaire, 2002, p. 165] L’espace de régulation ne correspond pas nécessairement à un mode de régulation complet, ce qui permet d’interroger la cohérence entre les différents espaces de régulation.
  • [4]
    Le mode de production caractérise une forme d’organisation de la production dans laquelle la relation de service est gérée par un dispositif institutionnel particulier.
  • [5]
    « Si l’on y réfléchit bien, le blocage du développement du secteur […] résulte principalement de l’action délibérée des autorités de tutelle. […] L’argent qui a été refusé du côté de l’action gérontologique va être distribué, avec d’autres logiques, du côté de l’insertion. Des moyens étant dégagés, l’affaire ne serait pas très grave si, conduite fort maladroitement, elle n’avait produit une déstabilisation encore plus grande du secteur de l’aide à domicile en favorisant grâce à l’aide publique un nouveau marché. » [Noguès, 2008]
  • [6]
    Sans remettre en cause la possibilité d’une stratégie de profit, le recours à la « stratégie de compétitivité » autorise la prise en compte des organisations productives n’ayant pas pour finalité la maximisation du profit, ce qui est le cas dans une partie des activités que nous étudions : les formes associatives et publiques ainsi que le salariat dans l’emploi direct.
  • [7]
    Certains conseils généraux fixent cependant deux tarifs, l’un correspondant aux services d’auxiliaire de vie, le second aux services d’aide-ménagère. Pour plus de précisions, le lecteur pourra se référer aux travaux réalisés sur la région Nord-Pas-de-Calais [Jany-Catrice & Vatan, 2011 ; Vatan, 2011].
  • [8]
    La dépendance est mesurée en Groupes iso ressources (GIR), le niveau 1 correspondant à des personnes particulièrement dépendantes, le niveau 6 à des personnes très peu dépendantes.
  • [9]
    Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés.
  • [10]
    Caisses d’assurance retraite et santé au travail.
  • [11]
    Directrice d’une association d’aide à domicile.
  • [12]
    Sur les conditions d’emploi dans les services à la personne, voir notamment Devetter, Jany-Catrice et Ribault [2008].

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Retrouvez Cairn.info sur

Avec le soutien de

18.97.14.80

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions