Couverture de RFSE_009

Article de revue

De la couverture maladie universelle aux politiques d'accès à l'assurance-maladie complémentaire : diversité des modèles et des protections

Pages 171 à 189

Notes

  • [1]
    La loi d’orientation relative à l’exclusion est votée le 29 juillet 1998.
  • [2]
    L’Aide médicale de l’État est un dispositif financé sur crédits budgétaires, destiné à prendre en charge, sous condition de ressources, les soins des étrangers en situation irrégulière. Depuis 2003, les conditions de résidence exigées subordonnent le bénéfice de l’AME à une condition de résidence ininterrompue depuis plus de trois mois. Un aménagement a toutefois été apporté pour la prise en charge des soins urgents.
  • [3]
    Nous nous appuyons dans les développements qui suivent sur l’excellente analyse de B. Frottiée [2004 et 2006].
  • [4]
    Brigitte Frottiée rappelle que la CGT qui s’était fermement opposée au projet AMU aborde avec la même hostilité les débats concernant la CMU, mais assouplira par la suite sa position [Frottiée, 2006, p. 59].
  • [5]
    Arrêté du 3 février 2005 portant approbation de la convention nationale des médecins généralistes et des médecins spécialistes, publié au Journal officiel du 11 février 2005.
  • [6]
    En lien avec la création en 1980 du secteur 2 à honoraires libres, les dépassements d’honoraires ont continûment creusé un écart significatif entre les bases de remboursement et les tarifs pratiqués dans certaines spécialités ; ils ont contribué à l’augmentation des restes à charge des patients à l’origine des renoncements aux soins observés dans différentes enquêtes.
  • [7]
    Une disposition de la loi de Finances pour 2011 a transformé la contribution CMU en taxe de solidarité additionnelle et porté son taux à 6,27 %.

1 – Introduction

1Dans un contexte de déficits sociaux importants et d’érosion des soutiens politiques aux États-providence, les processus contemporains de recomposition des systèmes de protection sociale renvoient à une diversité de modèles et de normes. Ceux-ci paraissent plus en tension qu’en conflit, moins « clivants » qu’illustratifs de changements issus de compromis qui vont trouver leur traduction concrète plus souvent dans des juxtapositions d’institutions que dans des innovations strictement orientées [Streeck et Thelen, 2005]. Nous cherchons dans ce papier à caractériser cette dynamique générale à l’exemple des transformations contemporaines de la couverture du risque maladie qui témoignent en France à la fois de l’importance croissante des « droits à » dérivés des droits-créances constitutionnels et de la pénétration de la logique de l’assurance dans la couverture du risque. Alors que la première est corrélative de l’extension de la sphère de l’État-providence, la deuxième participe de la redynamisation « libérale » de la protection sociale par le marché [Batifoulier et al., 2009]. Pour autant, les protections qui en résultent ne passent pas par l’éviction de l’une au profit de l’autre, mais elles font bouger leurs limites respectives et leurs interactions pour combiner, dans des montages encore non stabilisés, les trois types stylisés de protection sociale (l’assistance, l’assurance sociale et l’assurance privée). À l’œuvre dans le champ de l’assurance-maladie, ce processus a été enclenché par l’importante loi CMU de 1999. La couverture maladie universelle (CMU) et sa complémentaire (CMUc) sont en effet exemplaires des « droits-créances » devenus normes de référence de l’action publique [Gay, 2007]. Avec la première, toute personne résidant régulièrement sur le territoire français bénéficie d’une assurance-maladie de base. Avec la deuxième, tout assuré peut bénéficier, sous condition de ressources, d’une couverture complémentaire gratuite qui lui garantit la couverture totale de ses dépenses en étant dispensé de l’avance de frais. Au regard des objectifs poursuivis qui étaient de « boucler » la généralisation de l’assurance-maladie de base et de garantir aux plus démunis l’accessibilité réelle au système de soins, le bilan de la loi CMU est globalement positif. Bien qu’essentiel, ce n’est toutefois pas sous l’angle de l’évaluation que l’on s’intéresse ici à la CMU.

2Si l’on souhaite revenir sur les débats qui ont jalonné le processus législatif (première partie), c’est pour rappeler les ambitions, et les ambiguïtés, d’un dispositif qui a cherché à s’affranchir d’une approche assistancielle pour garantir aux exclus les droits de tous, c’est-à-dire le droit d’accéder à une couverture assurantielle et, ce faisant, en mobilisant les acteurs de l’assurance à organiser la CMUc selon les règles classiques du marché. Pourtant, sans modification substantielle de son cadre formel, mais dans un contexte nouveau que nous analysons dans la deuxième partie le dispositif CMUc a évolué de façon assez sensible. L’influence de la réforme de l’assurance-maladie intervenue en 2004 (réforme Douste-Blazy) puissamment orientée par la logique de responsabilisation individuelle, a placé chaque bénéficiaire dans une stricte logique de droits et de devoirs qui tendent à affaiblir les principes originels de gratuité et de garantie des droits. L’accès aux soins des bénéficiaires de la CMUc s’est ainsi éloigné de la mise en œuvre d’un droit pour rejoindre les pratiques de l’assistance, l’étatisation des institutions contribuant de son côté à distendre les liens entre le dispositif et son ancrage assurantiel. En outre, au moment où se met en place la réforme de 2004 qui repose avec une acuité particulière la question des effets sur l’accès aux soins de l’abaissement du niveau de couverture de l’assurance-maladie obligatoire, il est clairement établi que le dispositif CMUc restera destiné aux plus démunis étroitement ciblés par un seuil de ressources, inférieur au seuil de pauvreté. Au-delà, la couverture du risque maladie non pris en charge par les assurances sociales est le domaine de l’assurance santé complémentaire volontaire, acquise collectivement ou individuellement, que les autorités publiques vont chercher à généraliser. Par rapport à la période précédente, les choix politiques ne sont pas les mêmes. La question du « droit aux soins » qui bornait l’horizon du législateur de 1999 et l’avait conduit à proposer une couverture maladie universelle et une couverture « universelle » de la dépense a glissé vers un objectif plus circonscrit qui est le « droit à une couverture complémentaire ». S’il est attentif à l’effectivité de ce droit, le régulateur public fait ici confiance à un ensemble d’incitations, sociales et fiscales, d’aides à l’achat d’assurances complémentaires individuelles ou collectives, ces dernières plus proches du modèle des assurances sociales que de l’assurance « pure ». Au bout du compte une cartographie complexe des assurances maladie émerge, segmentant les populations selon le mode d’accès et le statut, plus ou moins protecteur, attaché à leur couverture complémentaire.

2 – La couverture maladie universelle, comme exemple de « droit à » : du principe à son organisation

3La loi CMU du 27 juillet 1999 s’est insérée dans le processus qui a vu, un an auparavant, le vote de la loi d’orientation relative aux exclusions? [1] qui elle-même poursuivait le programme inauguré par l’instauration du RMI, au moment où de nombreux acteurs soulignaient le caractère d’urgence que revêtait la question de l’accès aux soins des plus démunis. Le dispositif institué est ambitieux. Ses deux volets, CMU de base et CMU complémentaire ayant fait l’objet de présentations détaillées [Borgetto, 2000 ; Lafore, 2000 ; Chauchard et Marié, 2000], nous n’y revenons ici que de manière synthétique.

2.1 – CMU de base : l’ouverture des droits à la Sécurité sociale sur un critère de résidence

4La CMU de base est destinée à ouvrir le droit à l’assurance-maladie pour les individus restés en dehors d’un processus qui, entamé dès 1948, avait multiplié les critères d’affiliation et conduit à ce que quasiment l’ensemble de la population ait accès à la couverture maladie de base. À la fin des années 1990, on estimait à 150 000 le nombre de personnes n’ayant pas de couverture sociale, à quelque titre que ce soit. L’adjonction du critère de résidence aux critères d’affiliation existants est venue corriger cette situation, la nouvelle loi disposant que toute personne exclue de la protection de « droit commun » est obligatoirement affiliée à l’assurance-maladie, à la condition qu’elle réside de façon stable et régulière sur le territoire national. Le régime de l’assurance personnelle est en conséquence supprimé. L’ouverture des droits est dorénavant automatique, dès que la personne en fait la demande, et immédiate, le contrôle des conditions de résidence notamment ne pouvant intervenir qu’a posteriori. Aucun effort contributif préalable n’est exigé, mais une cotisation est demandée aux personnes dépassant un certain niveau de ressources. C’est donc un nouveau régime qui a été défini, mais un régime subsidiaire, dans la mesure où le régime « résident » n’intervient que par défaut [Lafore, 2000]. Dans ce processus de changement, l’empreinte bismarckienne de la Sécurité sociale ne disparaît pas et l’universalisation de la protection est atteinte, non par la mise en place d’un régime universel, mais par la reconnaissance d’un droit personnel à l’assurance-maladie. En ce sens, le « U » de la CMU n’est pas similaire au « U » du projet d’AMU (Assurance maladie universelle) porté précédemment par Alain Juppé, qui, s’il avait vu le jour, aurait converti le système professionnel existant en un système universel puisqu’il posait, simultanément, le principe de l’ouverture d’un droit personnel aux prestations, droit universel pour tout résident en situation régulière et celui de l’harmonisation progressive des efforts contributifs et des droits aux prestations. Cette dernière perspective avait vocation à déboucher sur l’unification institutionnelle des différents régimes, question politique délicate au moment où le même plan Juppé préparait la disparition des régimes spéciaux de retraite. Ce n’est qu’allégée de cette perspective de réforme institutionnelle radicale que l’Allocation maladie universelle a pu revenir sur l’agenda politique. L’enjeu des débats ne porte que sur les critères de stabilité et de régularité de la résidence qui conditionnent l’ouverture des droits. La question est politiquement sensible car tangente à celle des « sans papiers » [Borgetto, 2000]. La solution de maintenir dans l’aide médicale, devenue Aide médicale d’État (AME), les étrangers et les personnes en situation administrative précaire, apparaît clairement comme une voie médiane. En retrait par rapport aux « droits fondamentaux de la personne » défendus par certains [Lévy et al., 2000], mais supérieure au durcissement des critères voulu par d’autres, elle apparaît comme un choix pragmatique et prudent? [2]. En fait, pour le gouvernement, les enjeux cruciaux se situent davantage sur le volet complémentaire de ce qui est à partir de ce moment dénommé « couverture » et non plus « allocation » universelle.

5Pour essentielle qu’elle soit du point de vue de la reconnaissance et de l’ouverture des droits à la sécurité sociale, la Couverture maladie universelle n’offre pas aux personnes vulnérables des garanties suffisantes à un accès effectif aux soins. Dès lors que la consommation des biens et des services médicaux laisse à la charge du malade une part de la dépense et/ou l’expose à une avance de frais au-delà de ses capacités financières, être assuré social en ne disposant que de la couverture de base ne suffit pas à garantir un accès effectif au système de soins. Ainsi que le rappellera l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi, le ticket modérateur s’est révélé être un redoutable outil de renonciation aux soins pour raisons financières. Ce phénomène est dénoncé par les associations intervenant auprès des populations vulnérables et fait l’objet de diagnostics approfondis qui soulignent les interrelations dramatiques entre état de santé et exclusion. Un consensus émerge alors autour de l’idée qu’un accès « aidé » à une couverture complémentaire serait de nature à résoudre les questions de l’accès au tiers-payant et de la prise en charge du ticket modérateur, auxquelles le projet AMU, y compris en évoluant vers la CMU, n’apportait pas de solutions. Une fois admis, le principe d’une CMU « complémentaire » devait être mis en œuvre.

2.2 – CMU Complémentaire : la gratuité des soins sous condition de ressources

2.2.1 – Les options possibles

6Au moment où les contours de la CMUc commencent à se dessiner, l’implication des organismes de l’assurance complémentaire (mutuelles, compagnies d’assurance et institutions de prévoyance) est acquise. S’agit-il d’une sollicitation seulement financière ou d’un engagement de nature opérationnelle dans la gestion du dispositif ? Cette question n’est pas tranchée lorsque le député Jean-Claude Boulard propose à l’issue de la mission qui lui avait été confiée les trois scenarii qui vont structurer les débats. Le premier scénario, dit de la couverture décentralisée encadrée, reste dans la logique et les mécanismes de l’action sociale territorialisée en maintenant l’aide médicale gratuite départementale. S’il présente un bon rapport « qualité-coût-complexité », il n’apparaît toutefois pas dans l’axe principal de la réforme qui vise à « ouvrir aux personnes en difficulté le système de soins de tous ». Face au conservatisme du précédent, le scénario de la recentralisation propose d’instaurer un droit d’affiliation au régime général sur critère de résidence et de greffer sur le régime général un régime complémentaire sous condition de ressources. Le premier volet pose les principes de ce qui deviendra la CMU de base : suppression de l’assurance personnelle et centralisation des enveloppes redéployées au profit du régime général. La question du financement de l’extension complémentaire est, elle, plus ouverte. Il est envisagé que le bénéfice d’une prise en charge à 100 % du ticket modérateur, réservé aux patients souffrant d’une maladie longue et coûteuse, soit étendu aux assurés ayant de faibles ressources. Les caisses primaires d’assurance-maladie paraissent disposées à passer d’une gestion administrative à une gestion personnalisée des affiliés et donc à ajouter au critère médical, un critère social d’exonération du ticket modérateur et de tiers payant. Il est prévu que le seuil de revenu rendant éligible à une prise en charge de la dépense de soins sans co-paiement soit celui du minimum vieillesse ; le financement étant assuré par le recyclage des enveloppes départementales de l’aide médicale consacrées à la couverture complémentaire. Enveloppes et dotation alimenteraient un fonds spécifique de façon à garantir une gestion autonome du régime complémentaire « social » au sein du régime général, autonome mais piloté de façon centralisée. Face aux options « conservatrice » et « centralisée », le troisième scénario, qui partage avec le précédent les mêmes options quant à l’assurance de base, joue, sur le volet complémentaire, la carte de l’innovation et du partenariat. Innovation, parce que la proposition porte sur l’extension aux populations défavorisées d’un « droit commun » à l’assurance ; partenariat parce qu’il implique les organismes complémentaires dans la gestion même du dispositif. Il est prévu que les droits des bénéficiaires du RMI continuent à être gérés par le régime général selon les dispositions de la loi de 1992 (« bloc de couverture base et complémentaire » avec tiers payant), la question de la solvabilisation ne se pose donc que pour les personnes dont le revenu se situe entre le RMI et le minimum vieillesse. L’option présentée est celle d’une allocation personnalisée santé (APS), financée comme précédemment par le redéploiement des enveloppes départementales, paramétrée de façon à couvrir une part du coût annuel d’accès à une couverture complémentaire et gérée par les caisses d’allocation familiales.

2.2.2 – Soutiens politiques et arbitrages ministériels? [3]

7Les organismes complémentaires (OC) sont a priori plutôt ouverts à une proposition qui les met dans le jeu, mais l’adhésion au scénario partenarial ne se fait pas sans réserve ni sans calcul. Au moment de la mise en place de la concertation, la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) et son président sont plutôt sur la ligne classique qui considère que le financement de l’accès aux soins des plus pauvres doit relever de la solidarité nationale [Renaudin, 2000]. Si l’assistance s’accommode mal avec l’assurance, elle ne s’accommode pas plus aisément avec la « prévoyance, libre et volontaire » qui est au cœur du projet mutualiste, défendu par la Fédération nationale de la Mutualité française (FNMF). À la différence des assureurs, les mutuelles peuvent toutefois se prévaloir de leur implication, facilitée par l’étendue de leurs réseaux de proximité, dans de nombreuses actions sociales en faveur des personnes les plus démunies. Les deux familles se rapprochent néanmoins dans leur volonté de se voir reconnaître un rôle accru dans la gestion du risque maladie. De ce point de vue, la réflexion autour du contenu et du périmètre de la CMUc leur apparaît comme étant un pas en direction de négociations avec les professionnels pour une maîtrise médicalisée des filières ou de réseaux de soins. En outre, la réglementation des activités d’assurance qui est alors sur l’agenda constitue une conjoncture propice à des « échanges politiques ». La transposition des directives qui doivent parachever la construction d’un marché unique de l’assurance vise l’alignement des statuts de l’ensemble des organismes complémentaires sur celui de prestataires de services. L’enjeu est crucial pour la Mutualité française qui entend faire valoir la spécificité de sa vocation sociale et citoyenne et voir reconnues ses activités comme relevant de services d’intérêt général et échapper ainsi à la concurrence commerciale. La participation au dispositif CMU aurait été de nature à renforcer cette qualification, sésame d’un « futur institutionnel » protégé. Les assureurs sont, quant à eux, plus soucieux d’obtenir la levée de la taxe sur les assurances à laquelle (à la différence des mutuelles) ils sont assujettis, au moins dans un premier temps, sous la forme d’un allégement dont le produit aurait pu être affecté au financement de l’extension de la couverture complémentaire. Ce « marchandage » sera toutefois repoussé par Jean-Claude Boulard, sans pour autant perdre le soutien des assureurs qui, suivant la famille mutualiste, se rallient au scénario partenarial en acceptant de participer au financement du dispositif, via l’alimentation d’un fonds dont la forme n’est pas encore définie, en contrepartie de la promesse d’avoir le monopole de l’organisation de la partie complémentaire de la CMU. C’est une ligne semblable qu’adoptent les institutions de prévoyance, acteurs minoritaires sur le marché de la complémentaire santé individuelle, mais favorables également, sous certaines conditions, à contribuer au dispositif. Finalement, lorsqu’il exprime son attachement pour le scénario partenarial, Jean-Claude Boulard est certain de l’engagement de participation et de contribution financière des grandes organisations représentatives des acteurs de la complémentaire santé.

8Quelles sont les positions des acteurs de l’assurance-maladie ? Les deux grandes orientations de la loi, généralisation de la couverture et suppression du frein financier à l’accès aux soins, font l’objet d’un assez large consensus. Bien qu’elles continuent de réclamer une Sécurité sociale forte, les organisations syndicales et leurs élus dans les caisses reconnaissent qu’elle ne couvre pas l’ensemble de la population et qu’il est devenu nécessaire d’instaurer un filet de sécurité pour les plus démunis? [4]. Jusqu’où la gestion du dispositif doit-elle incomber à l’assurance-maladie ? Sur cette question, les positions sont moins consensuelles. Face à la CGT ou FO favorables à une complémentaire proposée par le régime général, gérée par les caisses et financée par l’État, le président du Conseil d’administration de la CNAMTS (CFDT) défend le maintien d’une stricte étanchéité entre l’assistance et l’assurance [Frottiée, 2004]. Il fait valoir que le financement de la Sécurité sociale étant assuré par des contributions proportionnelles aux revenus, il n’est ni légitime ni souhaitable que les caisses d’assurance-maladie offrent des prestations soumises à des conditions de ressources ; elle doit demeurer un système assurantiel qui rembourse en fonction des pathologies et non des revenus. Derrière ce rappel de la distinction entre assurance et solidarité, il faut sans doute lire la volonté de réaffirmer la place des partenaires sociaux dans les régimes d’assurances sociales, au moment où les changements de gouvernance initiés par la réforme Juppé semblent donner in fine plus de poids à l’intervention étatique que permettre l’expression d’une indépendance retrouvée [Hassenteufel et Palier, 2005]. En même temps, tout en se déclarant partisan de la mise en place d’actions favorisant l’accès des personnes économiquement faibles à la couverture complémentaire, le président de la CNAMTS affiche son hostilité à l’intervention des caisses dans ce qu’il considère comme étant dans le domaine de compétences des organismes de protection sociale complémentaire. Cette posture ne fait pas l’unanimité au sein même de l’institution de l’assurance-maladie, puisque l’Association des directeurs des caisses d’assurance-maladie soutient quant à elle l’option d’une recentralisation de l’aide médicale départementale – dont les Conseils généraux ont accepté de se dessaisir – et semble prête à assumer l’intégralité de la gestion du dispositif CMU [Frottiée, 2004]. Mais à ce point de l’avancée des auditions, les caisses ne sont pas encore dans le dispositif (ibid.). Elles n’y rentreront effectivement qu’après l’arbitrage ministériel qui définira, sous la pression des associations, un « scénario mixte », ni complètement centralisé, ni complètement partenarial.

9Le scénario partenarial a les faveurs de nombreuses associations qui le défendent au nom de l’argument que les bénéficiaires de la CMU devront pouvoir accéder aux « droits de tous », y compris au droit de choisir leur complémentaire. Mais méfiantes face à l’entrée des assureurs privés, d’autres associations, comme MSF, militent en faveur du scénario centralisé, la voix de MSF ayant d’autant plus d’impact que sa capacité de mobilisation médiatique et politique est bien réelle. Face à l’offensive de MSF, un accord est négocié entre la CNAMTS, la FNMF et la FFSA, accord par lequel les organismes complémentaires précisent leur contribution au financement, s’engagent sur un certain nombre de dispositions garantissant l’accès aux couvertures complémentaires des bénéficiaires de la CMU et sur la prohibition de la sélection des risques. En échange, les signataires introduisent le principe d’une limitation réciproque des champs d’action des assurances maladie obligatoire et complémentaire. La ministre repoussera cet accord et imposera finalement que les caisses du régime général puissent gérer la CMU complémentaire. L’arbitrage ministériel introduit toutefois un droit d’option qui permet que le service de la couverture complémentaire soit assuré, au choix du bénéficiaire, soit par son régime de sécurité sociale, soit par un organisme complémentaire, les caisses d’assurance-maladie gardant le rôle de guichet unique à l’entrée. C’est une solution qui sert indéniablement l’objectif de la simplification recherchée par le projet de CMU. Mais ce choix donne de facto une position de monopole aux caisses en amont tout en les mettant en concurrence avec les Organismes complémentaires d’assurance maladie (OCAM) en aval. Si ces derniers peuvent regretter l’asymétrie des positions, les représentants de la Sécurité sociale peuvent également craindre que le dispositif ne soit l’amorce de l’abandon du monopole de la Sécurité sociale sur la couverture de base. Cette crainte est à l’origine d’un deuxième protocole d’accord signé par la CNAMTS et les OCAM, qui affirme une nouvelle fois qu’il n’entre pas dans la vocation actuelle des organismes gestionnaires des régimes obligatoires ou complémentaires de se concurrencer sur leur terrain respectif. Au moment où se dénoue la question « institutionnelle », les débats sont d’ores et déjà engagés sur la question de l’opérationnalisation du dispositif.

2.2.3 – L’économie du dispositif CMU

10L’arbitrage ministériel a mis la CMUc sur les rails d’une « prestation » servie sous conditions de ressources. Le choix du gouvernement s’est porté sur une couverture intégrale des dépenses de soins à partir d’un seuil de ressources. Bien qu’elle n’ait pas été dans le débat, l’option d’un renforcement de la sécurité sociale de base, notamment par l’extension du périmètre des dépenses remboursables et la hausse des taux de remboursement, qui présentait l’avantage de neutraliser en amont le problème de l’accessibilité aux soins, avait les faveurs des organisations syndicales et de certaines composantes du monde mutualiste. Cette option était inenvisageable pour le gouvernement, alors sur le front de la résorption des déficits sociaux, et d’ailleurs tranchée avant que les négociations débutent autour du projet CMU. A également été finalement repoussée l’idée d’une prestation qui aurait élargi, sur critère social, le bénéfice de l’exonération du ticket modérateur et du tiers payant aux pauvres, l’argument dirimant en la matière étant que l’assurance-maladie n’a pas vocation à redistribuer selon les revenus. La solidarité attachée au projet de la sécurité sociale est « horizontale » et s’opère des plus chanceux vers les moins chanceux, pas « verticale », des riches vers les pauvres. Si l’idée d’une modulation du ticket modérateur en fonction du revenu chemine aujourd’hui, elle n’avait alors guère de défenseurs. Restent donc, face à face, l’option « complémentaire gratuite » sous conditions de ressources et l’option « aide à l’achat ».

11L’aide personnalisée, inscrite dans le scénario partenarial, avait les faveurs du rapporteur qui s’était également prononcé en faveur de la contribution du bénéficiaire. L’une et l’autre sont également défendues par la FFSA. S’inspirant de l’Aide personnalisée au logement (APL), il est envisagé que l’aide personnalisée santé prenne la forme d’une allocation dégressive destinée à alléger (totalement ou partiellement) la dépense des individus ou ménages acheteurs d’une assurance complémentaire. Lors des débats parlementaires, cette option est abandonnée. L’urgence a certainement conduit le législateur à préférer, avec l’appui des associations pour lesquelles une autre option aurait été un recul, le modèle de gratuité et de la non-contributivité déjà en place dans certains départements. La réécriture par le Sénat du projet de loi en faveur de l’APS sera également rejetée. À l’équipement des ménages en assurance privée, librement choisie, et à la solvabilisation de la demande, le décideur public préfère donc la gratuité de la couverture, choix à forte dimension symbolique mais qui l’expose aux deux questions difficiles du seuil de ressources d’une part, du périmètre de la couverture d’autre part. La question de la fixation du seuil de ressources a suscité de longs débats. Le paramétrage clef du dispositif s’effectue de concert avec le ministère des Finances. Au final, le seuil de revenu rendant éligible à la CMUc est fixé à un niveau inférieur au seuil de pauvreté avancé alors par l’Insee, ce qui n’était pas sans poser quelques problèmes puisque dans certains départements, l’Aide médicale gratuite était ouverte à un niveau supérieur. En outre, le seuil CMU est inférieur à l’allocation pour les adultes handicapés et au minimum vieillesse. Ce plafond de ressources est considéré par de nombreuses associations comme étant trop bas, mais il est compatible avec la contrainte budgétaire imposée, compte tenu de l’évaluation faite des redéploiements de ressources de l’aide départementale et compte tenu également de l’estimation de la population potentiellement concernée (six millions de personnes). Situé à un niveau inférieur au minimum vieillesse, il présente, du point de vue des assureurs, l’avantage de ne pas faire entrer dans la population éligible la population âgée dont le profil de consommation de soins est un facteur d’alourdissement des coûts. Sans doute est-il également envisagé que le dispositif d’exonération du ticket modérateur pour les personnes atteintes d’affections longues et coûteuses puisse protéger une proportion significative de personnes âgées ou handicapées, exclues du fait du seuil de la couverture complémentaire CMU.

12En ce qui concerne les prestations de la CMUc, le rapport Boulard a très tôt fixé la direction souhaitable : l’application du tiers payant, la non-application des dépassements d’honoraires, la négociation de tarifs opposables pour les biens et les services « à prix libre » et remboursés par la Sécurité sociale dans le cadre des tarifs de responsabilité. En clair, ce dernier item signifie le plafonnement du prix d’un certain nombre de prestations de façon à ce que le reste à charge du bénéficiaire soit nul. L’idée du projet gouvernemental est bien, sous la pression des associations, de mettre en place une « couverture universelle de la dépense » pour les plus pauvres. Pour tenir l’objectif, les accords avec les professionnels ont été obtenus de haute lutte, à l’image de l’histoire « compliquée » des relations conventionnelles entre l’État, la CNAMTS et le corps médical, dès lors que les honoraires sont en jeu. À ce stade final des débats, les choix ont donc retenu une prestation servie pour le compte de l’État soit par les caisses d’assurance-maladie, soit par adhésion à une mutuelle ou souscription d’un contrat auprès d’une compagnie d’assurance ou d’une institution de prévoyance. Ce dispositif est financé grâce à un fonds d’État auquel contribuent les organismes complémentaires. L’idée d’un fonds – qui présente l’avantage de mieux distinguer ce qui relève de l’assurance sociale et ce qui relève de la solidarité – était, dès le début des discussions, acceptée, de même qu’avait été actée l’idée de la participation des assureurs. C’est une solidarité composite qui est ainsi instituée, solidarité nationale par abondement budgétaire, solidarité des assurés par prélèvement d’une taxe sur le chiffre d’affaires de l’assurance-maladie complémentaire [Badel, 2009].

2.2.4 – Les « droits à » entre assistance et assurance

13Avec la loi CMU, deux déplacements sont en jeu. D’abord un changement de perspective qui tend à refondre la protection sociale à partir des « droits à », garantis à chacun, alors que le système de protection sociale est traditionnellement pensé à travers la matrice assurantielle fondée sur les « risques ». Ensuite, alors que l’évolution institutionnelle du système d’assurance-maladie était jusqu’alors analysée au seul prisme des rapports entre l’État et les partenaires sociaux, les organismes complémentaires ont été introduits dans la configuration de l’assurance-maladie. En effet, s’il s’agissait, avec la CMUc, de construire un dispositif dont la vocation immédiate était d’assurer les besoins fondamentaux des populations défavorisées, cette exigence d’assistance devait se combiner avec le souci du respect de la liberté des personnes concernées (s’assurer, comme les autres et dans les mêmes conditions). Cette posture plus proche de l’égalitarisme libéral que du minimalisme protecteur des programmes d’assistance revenait de facto à faire le choix d’impliquer les opérateurs privés de l’assurance complémentaire, d’une part, à laisser la liberté de choix aux bénéficiaires, d’autre part, puisque tel est l’esprit du modèle de « prévoyance » sur lequel fonctionne la protection complémentaire, à l’écart tant du modèle de « l’assistance », tutélaire et gratuit, que du modèle de « l’assurance sociale », obligatoire, professionnel et contributif. Pour autant, au terme des arbitrages ministériels, la portée innovatrice du dispositif CMU s’est effacée devant des éléments de continuité. Certes au prix d’une fragmentation accrue – la CMU de base est un régime subsidiaire qui confère à une catégorie de bénéficiaires un ensemble de droits spécifiques – l’architecture de l’assurance-maladie reste formellement inchangée. La CMUc ne remet pas en cause l’incomplétude originelle de la couverture de base. En écartant l’option d’un niveau de remboursement en fonction des ressources qui aurait assuré aux démunis la gratuité des soins au sein du régime général, elle ne fait qu’aménager l’accès à une complémentaire pour les faibles revenus, dans un cadre qui, certes, assigne des responsabilités nouvelles aux assureurs, mais qui, au fil des débats, a pris ses distances avec le modèle partenarial et a vu le rôle de l’État se renforcer. Au final, les arbitrages ministériels révèlent la préférence du décideur public pour un modèle « hybride » qui revient à développer un programme ciblé sur les plus démunis (logique de l’assistance), avec les moyens (logistiques) de l’assurance sociale et (financiers) de l’assurance privée. Sa forte valeur symbolique – la gratuité des soins pour les pauvres, dans des conditions qui se rapprochent du « droit commun » – permet d’engranger, à coût modéré pour les finances publiques, les gains politiques d’une démarche volontariste de consolidation des droits sociaux via la question de leur effectivité. De ce point de vue, les débats relatifs à la CMU ont introduit une rupture profonde, et durable, dans la vision que l’on pouvait avoir du système d’assurance-maladie. En révélant la faiblesse des remboursements des régimes de base, la CMUc a très clairement montré que la non-accessibilité aux soins pour raison financière violait le principe constitutionnel de la protection de la santé, mais, ce faisant, la question du « droit aux soins » a glissé vers celle du « droit à une couverture complémentaire ». Cette orientation ne fera que se renforcer par la suite.

3 – L’assurance-maladie complémentaire et la rupture de la réforme de 2004 : les aménagements du « droit à »

14La loi du 13 août 2004 portant réforme de l’assurance-maladie a mis la « responsabilité du patient » au centre des mécanismes de régulation des dépenses de santé. Une des pierres angulaires de la loi est la promotion d’une nouvelle organisation de l’accès aux soins qui fait du médecin traitant le point d’entrée dans le système et le « pilote » du parcours du malade. Pour amener le patient à se conformer aux exigences du parcours de soins, la loi de 2004, précisée ultérieurement par la convention médicale de 2005? [5], a introduit différents mécanismes incitatifs [Batifoulier et al., 2009]. En cas du non-respect du parcours de soins, le patient s’expose en effet à des taux de remboursement réduits (principe de la majoration du ticket modérateur) ou au versement de suppléments d’honoraires (principe de la majoration tarifaire). Libre à lui de respecter le parcours ou non – l’obligation n’est pas inscrite dans la loi –, mais lorsqu’il ne déclarera pas de médecin traitant à sa caisse d’assurance-maladie ou lorsqu’il consultera en dehors du parcours de soins (par exemple en accédant directement à un médecin spécialiste), il devra assumer les conséquences de son choix, c’est-à-dire s’exposer à des majorations de ticket modérateur ou à des majorations tarifaires pouvant ou non être réassurées. De ce point de vue, le statut de bénéficiaire de la CMUc n’apparaît être qu’imparfaitement protecteur face au glissement insidieux qui s’opère entre « droits de tous » et « devoirs de tous ». Si la réforme de 2004 constitue une rupture, c’est aussi parce qu’elle a ouvert la voie à de nouvelles mesures qui ont amplifié le transfert de charges de l’assurance-maladie obligatoire vers les ménages et vers l’assurance-maladie complémentaire. Toutefois si la question des conditions d’accès à une couverture complémentaire est revenue sur l’agenda politique, les solutions adoptées tiennent à distance le modèle CMUc au profit des modèles concurrents qui n’avaient pas été qualifiés par les arbitrages ministériels de 1998.

3.1 – Le dispositif CMU à l’épreuve des plans de maîtrise des dépenses de santé

3.1.1 – L’érosion du principe de la gratuité des soins

15La CMU complémentaire a été pensée de façon à permettre l’effectivité du recours aux soins des personnes à faibles ressources. La loi CMU qui impose à tous les praticiens, quel que soit leur secteur conventionnel, de pratiquer le tarif de la sécurité sociale protège les bénéficiaires des dépassements d’honoraires? [6]. S’ils sont également dispensés des participations forfaitaires, ils ne sont pas, en revanche, exempts des majorations de tarif que la loi de 2004 a introduites. En effet, si la convention nationale de 2005 a réaffirmé le principe de la gratuité des soins, elle a néanmoins prévu que les médecins peuvent pratiquer des dépassements sur les tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires, en cas d’exigence particulière du patient ou en application du droit à dépassement autorisé pour les soins délivrés par les médecins spécialistes en dehors du parcours de soins coordonné. Dans ce cas, le bénéfice du tiers-payant est maintenu mais le bénéficiaire de la CMUc doit s’acquitter directement auprès du médecin du montant de la majoration autorisée en cas de non-respect du parcours ou de la majoration pour exigence particulière. Les données disponibles montrent qu’un petit nombre (moins de 2 %) des consultations concernant les bénéficiaires de la CMU avaient donné lieu en 2007 à un dépassement d’honoraires [Aballéa et al., 2007]. De fortes variations selon les spécialités médicales et les lieux de consultation étaient observées, sans toutefois qu’il ait été possible d’isoler les dépassements illégaux et des dépassements autorisés (cas du non-respect du parcours de soins ou de l’exigence particulière). Sachant qu’un nombre important (du moins plus important, 37 %, qu’en population générale, 20 %) de bénéficiaires n’avaient pas déclaré de médecin traitant, la fréquence des facturations paraissait toutefois faible. Ce qui pouvait laisser supposer que, face à la situation du bénéficiaire de la CMUc, les médecins ne mettaient pas tous en œuvre les dépassements autorisés pour non-respect du parcours ou pour exigence du patient [Rebecq, 2009]. En dépit de cette forme de régulation compassionnelle, les bénéficiaires de la CMUc peuvent donc se voir facturer une « exigence particulière » ou une pénalisation du fait du non-respect du parcours de soins. Ces sollicitations financières viennent s’ajouter à ce qu’ils doivent débourser lorsqu’ils demandent une prestation au-delà de ce que prévoit le panier de soins, notamment en matière de biens médicaux. Le problème est que, faute d’information ou d’une bonne compréhension du fonctionnement du système de soins et plus particulièrement du parcours de soins, c’est souvent à leur insu que les bénéficiaires de la CMUc sortent de la logique de gratuité ou de tiers-payant intégral [ATD Quart Monde, 2009].

3.1.2 – L’affaiblissement de la garantie de prise en charge

16Pour les praticiens exerçant dans le secteur à honoraires libres, soigner un patient bénéficiaire de la CMUc est pénalisant dans la mesure où il ne peut (ou ne veut) pas appliquer le dépassement tarifaire auquel il a droit. À ce coût d’opportunité viennent s’ajouter d’autres « pertes », comme les majorations de coordination qui ne sont pas reversées aux médecins par les caisses lorsque le patient est « hors parcours ». Les uns et les autres ne sont pas sans conséquences sur le refus de soins dont différentes enquêtes ont montré qu’il n’est ni « marginal ni anecdotique » [Desprès, 2009]. Le caractère très ciblé du dispositif contribue sans doute à ces dérives qui renvoient les bénéficiaires à leur situation sociale défavorable et renforcent leur stigmatisation. En tout état de cause, il prend à contre-pied une politique qui avait voulu promouvoir l’inclusion sociale, mais qui s’avère devenir un instrument d’exclusion de patients éloignés des normes sociales supposées être respectées par un patient ordinaire. Face à cette situation, différentes mesures ont été préconisées pour améliorer l’information par les caisses de sécurité sociale et l’accompagnement des bénéficiaires de la CMUc. Sans pour autant que l’on puisse en déduire que les refus de prise en charge aient diminué, les publics bénéficiaires se sont rapprochés de la norme de responsabilisation. La figure du « devoir » s’est aussi imposée par la contrainte. Les règles se sont en effet durcies au fil des lois de financement de la sécurité sociale (LFSS) : en 2007, dispense d’avance de frais conditionnée à l’acceptation de médicaments génériques ; en 2008, prise en charge du ticket modérateur et dispense d’avance de frais subordonnées au respect du parcours de soins coordonnés. Certes la suppression du tiers-payant et de la gratuité des soins en cas de non-déclaration de médecin traitant est restée une « menace » (les décrets n’ont pas été publiés), mais c’est une menace crédible dès lors qu’elle se conjugue au renforcement des mécanismes permettant de détecter les fraudes. Depuis 2006, les LFSS ont rendu obligatoire pour les caisses le déclenchement d’enquêtes en cas de fraude soupçonnée et, si celle-ci est avérée, le dépôt de plainte ; elles ont instauré un mécanisme permettant de ne pas attribuer ou renouveler la CMUc lorsque le train de vie est en disproportion marquée avec les ressources déclarées et étendu les pénalités prévues en cas d’inobservation de la réglementation entraînant une prise en charge indue par l’assurance-maladie à la CMUc. Parallèlement les formalités d’inscription ont été rendues plus compliquées, au risque de contredire l’esprit et la lettre de la loi CMU qui était de rendre immédiat et automatique l’accès aux droits, au risque en conséquence d’entraîner des comportements de non-recours.

3.1.3 – Un dispositif de plus en plus étatique mais une solidarité de moins en moins nationale

17Les organismes assureurs participent peu à la gestion du dispositif ; selon les données du Fonds CMU, 13 % seulement des bénéficiaires ont recours à un organisme complémentaire pour la gestion de leur couverture complémentaire. Lors de la mise en place du dispositif, l’implication des assureurs était plus forte, mais beaucoup sont sortis du dispositif pour des raisons financières. Leur « défection » semble renvoyer au déficit de gestion qui naît du décrochage entre le coût moyen CMU et le montant du remboursement forfaitaire. Si la consommation de soins des bénéficiaires de la CMUc a eu tendance, à âge, sexe et état de santé comparables, à s’aligner sur celle des assurés couverts par une assurance complémentaire, les bénéficiaires ont toutefois globalement un état de santé plus dégradé. Il suffit donc que la part des bénéficiaires de CMU soit importante dans le portefeuille de l’assureur pour que la structure des risques portés soit déséquilibrée. De fait, ce sont surtout les petites mutuelles qui sont sorties du dispositif. S’ils participent peu, les organismes complémentaires sont en revanche devenus les principaux puis les seuls contributeurs au fonds CMU. La structure des recettes du fonds CMU a considérablement évolué en dix ans. D’une part, le taux de contribution des organismes complémentaires, fixé à 1,75 % de leur chiffre d’affaires santé lors de la mise en place de la loi a été porté à 5,9 % en 2008? [7]. Cette hausse très significative du financement privé a pour corollaire l’annulation totale de la contribution de l’État – il est vrai dénommée dans la loi « subvention d’équilibre » – les taxes sur le tabac et les alcools qui s’étaient partiellement substituées à la dotation budgétaire étant parallèlement redéployées vers l’assurance-maladie. Dans son organisation, le dispositif est aujourd’hui loin du scénario « partenarial ». Les organismes complémentaires sont soupçonnés d’organiser le marché de façon à extraire une « rente », récupérable et récupérée in fine pour la solidarité nationale sous forme d’une taxation du chiffre d’affaires. Or celui-ci est constitué des produits des cotisations et primes, versés par les assurés. Il est fort probable que la taxation se répercute sur le prix des couvertures complémentaires, processus qui in fine ne peut que contribuer à augmenter le taux d’effort des ménages aux revenus les plus faibles. Les enjeux distributifs de cette décision, qu’il serait nécessaire de documenter et d’analyser plus à fond, ne sont pas mineurs. Au final, financé par la seule solidarité des assurés complémentaires, étroitement contrôlé, requérant du bénéficiaire l’adhésion à un ensemble de normes en échange des prestations, le dispositif CMU a évolué selon une trajectoire qui témoigne d’un net repli du principe originel d’inclusion sociale des exclus qui en avait dessiné l’orientation et l’organisation. Le cœur du dispositif CMU reste néanmoins intouchable. Est-ce pour autant que le modèle de solidarité sur lequel il repose a vocation à s’étendre ?

3.2 – L’accès aux couvertures complémentaires : diversité des modèles, diversité des statuts

18Aujourd’hui, par rapport à la fin des années 1990 et au contexte d’urgence sociale qui avait entouré l’élaboration d’une couverture maladie universelle cherchant à inclure les exclus, les situations d’appauvrissement induites, notamment, par les processus de précarisation sur le marché du travail, contribuent en quelque sorte à faire remonter vers le « centre » de la société les questions d’accès aux soins auxquelles la CMUc a voulu répondre mais en les cantonnant à la « périphérie ». Délaissant le relèvement significatif du plafond de ressources, les options politiques ont privilégié le subventionnement de l’achat de couvertures assurantielles.

3.2.1 – L’aide à l’acquisition d’une assurance santé individuelle : le chèque-santé

19L’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) est introduite dans la loi de 2004. Intitulée « crédit d’impôt », elle a vocation à atténuer l’effet de seuil de la CMUc. Elle est réservée aux personnes dont les ressources n’excèdent pas de plus de 15 % le plafond d’attribution de la CMU complémentaire. La demande est effectuée par l’assuré social auprès de sa caisse d’assurance-maladie. Si les conditions d’éligibilité sont réunies, la caisse remet à l’assuré une attestation, individuelle ou familiale, qui indique en fonction de l’âge des bénéficiaires le montant du crédit d’impôt annuel. Le bénéficiaire dispose d’un délai de six mois pour utiliser cette attestation auprès de l’organisme complémentaire de son choix et obtenir ainsi une réduction de prime ou de cotisation annuelle d’un montant équivalent au crédit d’impôt auquel il a droit. La montée en charge a été très lente et ne concernait, deux ans après son installation, qu’un peu plus de 200 000 personnes, résultat bien en deçà des deux millions de personnes visées par le gouvernement [Franc et Perronnin, 2007]. Différentes mesures de revalorisation ont été décidées dans le but d’améliorer le taux de recours et le vocable (impropre) de « crédit d’impôt » a fait place à celui de « chèque santé ».

20Cette formule qui a longtemps peiné à trouver son public et donc son efficacité a été préférée, pour des raisons de coût, au crédit d’impôt que la Mutualité propose depuis plusieurs années pour alléger l’effort d’acquisition d’une couverture individuelle et rétablir ainsi l’équité avec les contrats collectifs qui bénéficient, eux, comme on le verra plus bas, d’un traitement social et fiscal de faveur [Canard, 2003]. Le mécanisme de l’ACS est par ailleurs moins ambitieux que l’option de l’allocation personnalisée santé qui avait été défendue lors de la préparation de la loi CMU, parce que l’aide n’est pas dégressive selon le revenu. Ces différentes formules de « subventionnement de la demande » reposent cependant toutes sur l’idée que la correction des mécanismes de marché ne passe pas nécessairement par la disparition du marché. L’idée première du chèque-santé est qu’il laisse s’exprimer les préférences du consommateur sur un marché qui, bien que régulé, est devenu lui-même concurrentiel [Kerleau, 2009].

3.2.2 – Les incitations aux couvertures collectives : le modèle de « l’assurance sociale »

21Lors des débats qui ont accompagné la loi CMU, les confédérations syndicales s’étaient prononcées en faveur du renforcement des couvertures complémentaires d’entreprise, négociées collectivement. Cette question était d’ailleurs revenue de façon un peu inattendue dans le texte de loi [Hélary-Olivier, 2000]. À la demande des parlementaires communistes, l’article 21 insère en effet dans le Code du travail une disposition selon laquelle « lorsque les salariés ne sont pas couverts par un accord de branche ou par un accord d’entreprise définissant les modalités d’un régime de prévoyance maladie, l’employeur est tenu d’engager chaque année une négociation sur ce thème ». Dans l’obligation de se concerter, les parties ne sont toutefois pas tenues d’aboutir. Partant de cette donnée et du constat de la faiblesse du nombre de petites et de moyennes entreprises offrant une couverture complémentaire, les autorités publiques ont invité, en 2007, les partenaires sociaux à engager des négociations, dans un cadre interprofessionnel, afin de rendre la complémentaire maladie obligatoire dans les petites et moyennes entreprises. Si ce projet n’est toujours pas concrétisé, il n’en est pas de même de l’accord national interprofessionnel de 2008 sur la modernisation du marché du travail qui permet au salarié dont le contrat de travail est rompu, de conserver, sous certaines conditions, son assurance santé.

22Ces différents encouragements à la négociation collective ont été renforcés par les mécanismes incitatifs. L’assurance santé d’entreprise – il en est de même pour la retraite complémentaire et pour l’assurance décès, invalidité et incapacité – bénéficie d’un traitement fiscal avantageux qui autorise le salarié à déduire les cotisations versées par le salarié à ses régimes complémentaires de son revenu imposable. Les cotisations patronales au profit des salariés sont, quant à elles, exclues de l’assiette des charges sociales propres à chaque salarié. Déductibilité et exemption interviennent dans certaines limites et surtout sous certaines conditions. Celles-ci ont été significativement modifiées par la réforme Fillon de 2003 qui ont réservé les avantages aux seuls contrats collectifs obligatoires. La couverture complémentaire doit en effet être rendue obligatoire pour pouvoir bénéficier de la règle de neutralité sociale alors que le régime antérieur ouvrait le droit à l’exonération indépendamment des modalités retenues dans le contrat d’assurance qui pouvait être collectif ou individuel, à affiliation obligatoire ou facultative. Dorénavant la couverture doit avoir un caractère collectif (c’est-à-dire bénéficier de façon générale et impersonnelle à l’ensemble du personnel de l’entreprise ou à une ou plusieurs catégories de salariés objectivement définies) et elle est opposable (sauf quelques cas dérogatoires) à tous les salariés. En revanche, le caractère obligatoire était une condition d’ouverture du droit au bénéfice fiscal, et bien entendu il le reste, mais d’autres conditions d’éligibilité ont été introduites. Ainsi, les cotisations doivent comporter une participation effective de l’employeur et elles doivent être fixées à un taux uniforme à l’égard de toutes les personnes appartenant à une même catégorie objective de personnel. L’incitation socio-fiscale et la mobilisation des partenaires sociaux tendent à se conjuguer pour tendre vers l’objectif de généralisation des couvertures complémentaires par l’intermédiaire de l’entreprise. Favoriser le modèle obligatoire et, à travers lui, le modèle paritaire est aussi, pour les autorités publiques, l’occasion de renouer avec les pratiques de concertation centralisée qui ont permis et accompagné la construction de la protection sociale. Le partage de responsabilités entre l’État et les interlocuteurs sociaux permet ainsi de construire des cadres négociés où peuvent être affirmés et se maintenir certains principes de solidarité et d’équité tout en atténuant le coût politique de l’affaiblissement des régimes de base. Le modèle préféré par le décideur public révèle ainsi une plus grande proximité avec le modèle de « l’assurance sociale » qu’avec le modèle assurantiel « pur », à la différence près (cruciale) que l’édifice de la Sécurité sociale reposait sur le principe d’un système obligatoire organisé en dehors de l’entreprise, alors que ce qui en jeu avec les couvertures collectives, c’est l’organisation et la rationalisation d’un système de protection dans l’entreprise. Si l’ancrage de la protection sociale dans le modèle professionnel d’origine est préservé, c’est au profit de collectifs étroits, au bout du compte très diversement protégés [Kambia-Chopin et al., 2008].

4 – Conclusion

23Essayons de cadrer le récit des changements intervenus dans le champ de l’assurance-maladie complémentaire par rapport aux questions qui ont orienté la démarche : celles des mécanismes du changement institutionnel et celles de ses effets, moins pour boucler l’analyse que pour ouvrir des perspectives de recherche nouvelles.

24Quand elle ne met pas en exergue l’inertie et la résistance au changement, qu’elle saisit par la notion de path dependency, la littérature sur le changement institutionnel montre la diversité des formes qu’il peut revêtir, de la mise sur agenda qui transforme un problème donné en objet de politique publique, aux processus plus graduels et aux effets moins immédiatement visibles qui caractérisent les changements incrémentaux. Plutôt que les opposer, K. Thelen et W. Streeck [2005] cherchent à combiner ces différentes lectures du changement en articulant la capacité d’adaptation des institutions et les éléments de permanence ou de continuité dans des trajectoires dynamiques. La loi CMU, dans son volet complémentaire, illustre bien à notre sens cette conception d’une trajectoire institutionnelle « incertaine ». Dans le domaine des politiques sociales, les débats qui ont accompagné le processus législatif de la CMU se sont inscrits dans une double rupture. D’une part, le principe traditionnel d’assistance aux plus démunis a été combiné avec des principes nouveaux fondés sur l’énoncé de droits fondamentaux des personnes, non pas dissociées mais reliées à des groupes plus larges dans des protections communes [Lafore, 2008]. D’autre part, a été montré le rôle décisif que jouait dorénavant l’assurance-maladie complémentaire dans l’accès aux soins [Tabuteau, 2010]. Toutefois, comme nous l’avons vu, les principes nouveaux ne sont pas tous ressortis avec la même saillance dans les choix politiques qui ont été actés par le vote de la réforme et surtout, quelques années après, dans une nouvelle conjoncture et avec une autre majorité politique, les choix ont été réactualisés. Permis très certainement par les ambiguïtés d’un dispositif qui pouvait à la fois être identifié comme le symbole de la justice sociale et comme celui de la pénétration de la logique assurancielle, le recadrage de la CMUc lui a fait perdre ses ambitions fondatrices et novatrices avant de la soumettre à l’impératif de la gestion responsabilisante qui s’opère à partir de la réforme de 2004 sous un strict contrôle de l’État soucieux de l’équilibre des droits et des devoirs. L’assurance-maladie complémentaire s’installe, quant à elle, visiblement et durablement dans l’architecture du système de protection sociale, où elle est le vecteur de la pénétration de la logique de marché. Alors que l’insuffisance, en quantité, de la protection publique est clairement assumée, les règles du marché confrontent offreurs et demandeurs sur la base de la concurrence entre les fournisseurs et le libre choix des acheteurs. Cette remise sur le marché de la protection est toutefois pilotée politiquement, le rôle du décideur public étant de faciliter et d’organiser la généralisation des couvertures complémentaires. Celles-ci reposent toutefois sur deux modèles différents en compétition : le modèle de l’assurance « pure », individuel, et le modèle de l’assurance « sociale », collectif et catégoriel. Le deuxième a indéniablement marqué des points significatifs depuis les changements introduits par la réforme Fillon de 2003. Sans doute tire-t-il sa force politique du « renouveau » ou de la « modernisation » du dialogue social, mais son modèle économique est tributaire de la capacité à payer des entreprises, dans un contexte de compétitivité aiguë et de menaces sur les « niches fiscales et sociales ».

25En gardant à l’esprit cette incertitude sur l’évolution future de l’assurance-maladie et son articulation avec l’assurance santé complémentaire, les changements récents paraissent plutôt relever de ce que K. Thelen appelle « sédimentation institutionnelle », processus par lequel de nouvelles institutions s’ajoutent les unes aux autres sans provoquer le démantèlement irréversible des institutions existantes. Cette métaphore illustre bien la logique de piliers qui commande l’évolution de l’assurance-maladie : une assurance sociale de base universelle dans sa couverture mais incapable de fournir une protection complète, universelle, de la dépense ; une assurance complémentaire qui se construit sur l’empilement de normes et de modèles qui relèvent de l’assistance, de l’assurance et de l’assurance sociale. Cette organisation est instable, porteuse de contradictions et d’enjeux distributifs au niveau de son financement et surtout productrice d’inégalités dans les modes d’accès à la complémentaire santé. Si les premiers sont peu perçus, a fortiori pas élucidés, on commence à prendre la mesure des deuxièmes. Derrière l’enchevêtrement institutionnel qui caractérise aujourd’hui l’assurance-maladie, différentes lignes de fracture se durcissent : entre ceux qui bénéficient de la CMUc et ceux qui, dans des situations individuelles très proches, doivent supporter l’effort de financement de leurs couvertures individuelles, quand bien même l’effort est allégé par l’ACS, entre le noyau dur des salariés les plus stables et les mieux protégés et la proportion croissante de la population qui travaille dans l’insécurité et la précarité qui doit supporter, seule ou avec l’aide de l’ACS, l’effort de financement de ses couvertures complémentaires, au prix de couvertures de médiocre qualité, et, au sein même des salariés protégés, entre les salariés des grandes entreprises et ceux des petites et moyennes entreprises. En l’état actuel, le processus de généralisation de l’assurance-maladie complémentaire, non seulement n’a pas évité le risque de dualisation du système qui, malgré les espoirs du dispositif CMU, assigne aux plus défavorisés le statut d’assisté, et aux autres celui d’assuré. Mais loin de conférer un accès et un niveau homogènes de protection, ce dernier dépend fondamentalement des situations des individus selon leur statut professionnel.

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Notes

  • [1]
    La loi d’orientation relative à l’exclusion est votée le 29 juillet 1998.
  • [2]
    L’Aide médicale de l’État est un dispositif financé sur crédits budgétaires, destiné à prendre en charge, sous condition de ressources, les soins des étrangers en situation irrégulière. Depuis 2003, les conditions de résidence exigées subordonnent le bénéfice de l’AME à une condition de résidence ininterrompue depuis plus de trois mois. Un aménagement a toutefois été apporté pour la prise en charge des soins urgents.
  • [3]
    Nous nous appuyons dans les développements qui suivent sur l’excellente analyse de B. Frottiée [2004 et 2006].
  • [4]
    Brigitte Frottiée rappelle que la CGT qui s’était fermement opposée au projet AMU aborde avec la même hostilité les débats concernant la CMU, mais assouplira par la suite sa position [Frottiée, 2006, p. 59].
  • [5]
    Arrêté du 3 février 2005 portant approbation de la convention nationale des médecins généralistes et des médecins spécialistes, publié au Journal officiel du 11 février 2005.
  • [6]
    En lien avec la création en 1980 du secteur 2 à honoraires libres, les dépassements d’honoraires ont continûment creusé un écart significatif entre les bases de remboursement et les tarifs pratiqués dans certaines spécialités ; ils ont contribué à l’augmentation des restes à charge des patients à l’origine des renoncements aux soins observés dans différentes enquêtes.
  • [7]
    Une disposition de la loi de Finances pour 2011 a transformé la contribution CMU en taxe de solidarité additionnelle et porté son taux à 6,27 %.
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