Couverture de RFSE_001

Article de revue

Mutation du patient et construction d'un marché de la santé. L'expérience française

Pages 27 à 46

Notes

  • [1]
    Une version antérieure de ce texte a été présentée aux xviiies Journées des économistes de la santé français (université de Bourgogne, 23-24 novembre 2006) et a bénéficié des remarques d’Olivier Biencourt et de Franck Amalric. Les auteurs tiennent également à remercier les évaluateurs anonymes de la revue pour leur lecture critique stimulante du texte. Ils restent seuls responsables des insuffisances de cet article.
  • [2]
    EconomiX, Université Paris X-Nanterre.
  • [3]
    OMI, Université de Reims Champagne-Ardenne.
  • [4]
    LEG, Université de Bourgogne.
  • [5]
    La littérature anglo-saxonne est, sur ce sujet, foisonnante. Pour une revue de ces travaux, on se reportera à Moumjid-Ferdjaoui et Carrère (2000). Plus généralement, l’analyse économique du colloque singulier est marquée par un renouveau théorique prenant appui non plus sur la dimension stratégique de l’information, mais plutôt sur la sélection des informations pertinentes par les acteurs [Batifoulier, Gadreau, 2006].
  • [6]
    Le terme de patient apparaît vers 1120 dans la langue française. Il désigne l’individu endurant qui supporte les souffrances « sans murmurer les adversités ». Au sens étymologique il caractérise celui qui souffre, qui est passif et résigné. À partir du xive siècle, il est substantivé pour désigner le malade face au médecin. Le patient se définit en opposition par rapport à l’agent, ce qui, au sens économique n’est pas sans certaines implications.
  • [7]
    Depuis le premier mars 2006, 156 médicaments dont le SMR a été jugé insuffisant par la HAS ne sont plus remboursés par la Sécurité sociale. Les veinotoniques sont également déremboursés à partir de 2008.
  • [8]
    « Le report du financement des dépenses vers les régimes complémentaires pour éviter la hausse des prélèvements obligatoires n’est qu’un habillage… Il s’agit simplement de jouer sur les mots et les définitions : si les ménages doivent cotiser à des mutuelles ou à des assurances privées, il s’agit de prélèvements obligatoires privés, mais qui ont exactement le même effet sur le revenu, la consommation … que les prélèvements publics » [Artus, 2004, p. 105].
  • [9]
    Anesthésistes, cardiologues, chirurgiens (dont chirurgiens orthopédistes), dermatologues, gastro-entérologues, gynécologues, ophtalmologues, ORL, pédiatres, pneumologues, psychiatres (dont neuropsychiatres), radiologues rhumatologues, stomatologues.

Introduction

1Cette analyse propose une lecture comparée de deux évolutions parallèles majeures du système de soins : sur le plan théorique, la tendance de fond de l’ensemble des sciences sociales de santé est de prendre en considération le patient comme acteur autonome. C’est le cas de l’économie, de la sociologie (patient actif par exemple) et du droit (droit des patients et consentement éclairé). En matière de politique économique, l’accent est mis sur la demande de régulation de la dépense de santé. Ainsi, par exemple, en cherchant à combattre l’aléa moral, la loi du 13 août 2004 vient contester le rôle moteur de l’offre dans la dépense de santé. Le patient est davantage mis à contribution financièrement.

2Sur la base d’une analyse compréhensive de l’évolution de la microéconomie de la santé et des réformes actuelles du système de santé qui, au plan de la méthodologie, emprunte à la rhétorique et à l’herméneutique [Gadamer, 2005], nous montrerons que l’ensemble fait système. La façon dont on conçoit le patient a une influence sur le type de régulation choisi par le décideur politique.

3La clef de voûte de ce système est la notion de marché qui doit être pensé comme un processus construit, et non pas naturel. Parler de marché en matière de santé ne peut s’appuyer sur le concept de marché pur walrasien qui n’existe pas, ni même (uniquement) sur l’existence d’un marché qui s’engouffre dans les espaces laissés vacants par la régulation publique (dans le cadre du partage entre assurance maladie obligatoire et complémentaire par exemple). La notion de marché qui semble pertinente en matière de santé est celle du « marché institué » reposant sur des évolutions historiques et sociales et prenant des configurations diverses selon les arrangements institutionnels [Coriat, Weinstein, 2005]. La réhabilitation du rôle du patient, par la théorie comme par la politique économique, construit une forme de marché de la santé particulière et sectorielle. Dans cette construction, l’État doit être pensé en complémentarité, et non pas en opposition, avec le marché.

4Nous organiserons notre argumentation en deux temps. Dans la première partie, nous présentons les deux mutations majeures du statut du patient : l’autonomisation du patient et l’apparition d’une démocratie sanitaire d’une part et l’accentuation du décalage entre la dépense de santé et la dépense socialisée pour la majorité des patients d’autre part. Ces deux évolutions, si elles sont considérées dans le cadre d’une complémentarité institutionnelle (et non prises isolément), permettent d’étayer l’idée de construction d’un marché de la santé.

5Cette double évolution conduit à l’émergence d’un patient consommateur dont on cherche à cerner les contours dans la seconde partie. La mutation du patient vers un statut de consommateur s’inscrit dans une pluralité de registres et ne peut s’exprimer que dans le cadre de compromis. Nous cherchons à montrer que des mesures récentes comme la standardisation des soins et la réforme du « médecin traitant » peuvent constituer des leviers à la logique marchande. Nous en dégagerons l’impact en termes d’équité et d’efficacité.

1 – La consécration du patient, condition de la construction d’un marché

6La notion de contrôle profane évoquée par la sociologie des professions et contestant le pouvoir de monopole du médecin a été récemment étendue à la prise en considération d’un véritable sens critique du patient, débouchant plus largement sur une condamnation du modèle paternaliste. Cette transformation majeure du colloque singulier consacrant l’autonomisation du patient lui donne un pouvoir de marché (1.1.). Cette évolution majeure s’inscrit dans un contexte où le patient est davantage mis à contribution pour le financement de ses dépenses de santé. Le durcissement des politiques de ticket modérateur conduit à accentuer le décalage entre la dépense de santé et la dépense socialisée, ce qui laisse une place plus grande à la libre prévoyance et à l’espace marchand (1.2). Ces nouvelles règles du jeu ont en commun d’être davantage marchandes.

1.1 – Autonomisation du patient et pouvoir de marché

7Depuis la fin des années 1980, le système de soins connaît d’importantes transformations. Une des plus intéressantes est sans aucun doute le développement du concept de démocratie sanitaire qui consacre l’entrée du patient comme décideur dans un colloque singulier dont il est le principal concerné. En contestant à la fois la doctrine et la pratique du paternalisme médical, de même que la conception du « patient infantile », la démocratie sanitaire souligne un rééquilibrage de la relation de soins, plus démocratique, dans le sens où les pouvoirs sont moins inégalement répartis. On peut trouver trace de ce concept sur deux niveaux. La démocratie sanitaire a, en effet, accéléré l’émergence d’un patient actif, capable de discuter avec le praticien, dont on trouve trace dans la refonte du code de déontologie médicale et de la jurisprudence entérinée par la loi du 4 mars 2002 (1.1.1.). Cette évolution donne un pouvoir de marché au patient en réduisant l’asymétrie d’information avec le professionnel. Ce rééquilibrage qui a accéléré la fin du paternalisme s’observe dans les pratiques réelles en médecine où émerge un modèle de décision partagée (1.1.2.).

1.1.1 – La naissance du patient actif : une double évolution

8La démocratie sanitaire résulte d’un important mouvement de mobilisation des malades au tournant des années 1980-1990. La pandémie du sida joue un rôle majeur dans cette transformation. Avec elle, les associations de malades se sont structurées, notamment en politisant l’ensemble des questions de santé [Barbot, 2002]. Leurs principales revendications reposent sur la contestation du paternalisme médical et sur le nécessaire rééquilibrage de la relation de soins au profit des patients. Cette entrée dans l’espace public a contribué à déplacer la frontière de la pratique médicale, de la sphère privée au domaine public. Désormais, le malade est plus actif, il est informé par le biais de la communauté et intervient dans le choix des thérapies. Cette évolution traduit le passage de la tradition clinique à la modernité thérapeutique d’État [Dodier, 2003]. La loi du 4 mars 2002 a définitivement consacré ce principe.

9Les différentes associations de malades ont ainsi favorisé le modèle du patient actif [Barbot, Dodier, 2000] : le malade ne délègue plus aux médecins les initiatives, mais il intervient dans le processus de décision. Le modèle du patient actif est différent selon les associations de première génération (Aides) ou de seconde génération (Act Up, Actions traitements, Positifs). Pour Aides, le malade est gestionnaire de sa maladie, ses compétences doivent être reconnues par les médecins dans la mise en place du protocole de soins. Pour Act Up, le modèle du malade émancipé par le collectif suppose que la relation entre le malade et le médecin soit marquée par les rapports de pouvoir et de domination existant au sein de la société. D’autres, comme Actions traitements, proposent un modèle de malade consommateur de pointe cherchant à obtenir les produits les mieux adaptés à la pathologie. Enfin, Positifs soutient le concept de malade expérimentateur en relation avec la recherche thérapeutique [Barbot, 2002].

10Au total, l’émancipation du malade a accéléré l’évolution du rapport au médecin qui n’est qu’une instance de savoir parmi d’autres. Il s’ensuit un contexte renouvelé pour l’expression du colloque singulier.

11L’introduction du droit des malades au sein du code de déontologie médicale est le fruit d’un long travail de mobilisation des associations de malades, d’une évolution du corps médical sur la question de ses devoirs envers les patients et plus généralement d’une réflexion menée depuis le milieu des années 1980 sur la bioéthique [Jaunait, 2005]. La transformation du Code de déontologie médicale, de sa version de 1979 à celle de 1995, s’est appuyée sur deux caractéristiques : le droit à l’information et la recherche du consentement éclairé. Cette transformation s’est effectuée en trois temps distincts.

12Une première étape est caractérisée par l’introduction de deux nouveaux articles (35 et 36). L’article 35 prévoit expressément que « le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il propose ». Le conseil de l’ordre va même plus loin en précisant que cette information doit être adaptée à la personnalité du patient. L’article 36 précise que « le consentement de la personne examinée et soignée doit être recherché dans tous les cas ». La recherche du consentement du patient suppose que le respect de sa dignité passe par la proposition, et non l’imposition, de la thérapeutique. D’autre part, l’acceptation de la thérapeutique nécessite une obligation d’information pour le praticien. Le malade est ainsi associé à la prise de décision.

13L’évolution jurisprudentielle de la Cour de cassation, que l’on peut caractériser par trois arrêts principaux, constitue la deuxième étape. Le premier arrêt dit Hédreul (25 février 1997) précise que « le médecin est tenu d’une obligation particulière d’information vis-à-vis de son patient ». L’arrêt dit Guyomar (14 octobre 1997) confirme cette tendance en inversant la charge de la preuve. Enfin, un arrêt de la Cour de cassation du 9 octobre 2001 affirme que le devoir d’information « trouve son fondement dans l’exigence du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » [Harichaux, 2002].

14Enfin, troisième étape, la loi du 4 mars 2002 pose comme principe que « toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé » et précise que l’information incombe au professionnel de santé et non plus seulement au seul praticien. La loi confirme l’obligation d’information, préalable aux soins, et étend certains droits du malade. Toutefois, le droit demeure limité par certaines circonstances relatives à l’acte médical [Harichaux, 2002]. L’information est principalement orale et le médecin devra, dans cette perspective, apprécier la capacité du malade à la recevoir.

1.1.2 – Un pouvoir de marché pour le patient

15Cette évolution est en phase avec les recommandations de la théorie économique. En effet, depuis les travaux d’Arrow (1963), on considère le marché de la santé comme durablement marqué par des asymétries d’informations, elles-mêmes motrices des comportements stratégiques des agents. Ce dysfonctionnement rend inopérante l’approche néo-classique standard qui repose sur l’indépendance de l’offre et de la demande.

16Dans la relation thérapeutique appréhendée comme une relation d’agence, le patient délègue son pouvoir de décision au médecin. Or, ce dernier n’est pas un agent parfait, il utilise ses connaissances et ses compétences à son avantage. L’information qu’il détient sur la qualité du service qu’il produit est susceptible de conduire à un phénomène d’antisélection. La relation est également parasitée par le risque moral concernant le comportement de diagnostic et de prescription du praticien. Le patient peut difficilement se réapproprier l’information dans la mesure où les coûts de recherche sont prohibitifs. Sauf à être médecin lui-même, le patient est confiné dans son statut de profane par rapport à la qualité d’expert du praticien [Darbon et Letourmy, 1983]. En mesurant les comportements stratégiques en dividendes informationnels, cette conception donne une nouvelle assise théorique à la théorie de l’induction de la demande par l’offre. Cette induction, née du pouvoir discrétionnaire du médecin, permettrait à ce dernier de développer une activité supérieure à celle requise par les besoins de ses patients. Il pourrait ainsi ajuster son revenu réel à son revenu désiré.

17Comme l’existence d’un tiers payeur bouleverse cette microéconomie des relations bilatérales en santé, c’est généralement à la tutelle que revient la prérogative d’édifier des bonnes règles et montages institutionnels compensant, pour le médecin, la désutilité de l’effort à être honnête. Il s’agit alors de contester le différentiel d’information par la recherche d’information et son utilisation stratégique et, in fine, de jouer l’information contre l’information. Le problème de contrôle du médecin devient alors un problème de coût de l’information, et plaide pour un consommateur informé et un marché concurrentiel.

18Face au pouvoir informationnel du médecin, le patient peut « voter avec ses pieds » et consulter un autre médecin. Cette menace sera d’autant plus crédible que le degré de monopole professionnel sera faible et les coûts de recherche d’information, non prohibitifs [Rochaix, 1997]. Cette stratégie de contrainte de marché suppose que le patient puisse comparer les offres selon les informations dont il dispose avant de faire son choix. Il revient alors à la tutelle de développer ce pouvoir de marché pour le patient.

19La démocratie sanitaire et l’autonomisation du patient participent à cette reconfiguration marchande du patient. En effet, elles permettent de contrecarrer le déséquilibre informationnel et la dépossession du pouvoir (sur son propre état de santé) dont il est victime. Cependant, une véritable logique marchande repose sur l’encouragement par la tutelle de stratégies exit où le patient a la capacité de refuser un diagnostic médical pour en préférer un autre. Il semble que le développement d’une démocratie sanitaire ne conduise pas à la construction de ce patient héroïque que modélise la théorie économique, pour deux raisons. D’abord, la démocratie sanitaire ne conduit pas à un patient « bayesien » adaptant ses croyances en fonction de l’information acquise de différentes sources. Ce patient est supposé être un bon épidémiologiste, capable d’apprécier l’information médicale complexe obtenue de ses réseaux et de juger du diagnostic médical pour refuser le traitement et demander une seconde opinion (ce qui peut correspondre à un doctor shopping, encourageant le nomadisme médical !). Ensuite, si le patient bayésien est bien actif à la fois avant la relation médicale et après, il est inexistant pendant. Le concept de démocratie sanitaire insiste au contraire sur l’implication du patient pendant la relation médicale. Dans ce cas, le patient utilise davantage sa voix que ses pieds. Le modèle de « décision partagée » qui prend appui sur l’observation des diagnostics et thérapeutiques dans les services médicaux trace davantage une perspective de voice que d’exit. En constituant une extension économique du concept de démocratie sanitaire, il établit un compromis entre le modèle canonique de l’agence et le modèle où le patient décide, au travers d’un médecin bienveillant, simple conseiller technique [Gafni et al., 1998]. Dans le modèle de décision partagée [5], le médecin met alors en œuvre une démarche de révélation des préférences du patient, ce dernier conservant la décision finale (Ferdjaoui et al., 1999, Moumjid et al., 2003). L’échange d’information est alors bilatéral : le médecin transmet ses connaissances au patient qui, lui, fait état de ses préférences ; le processus de délibération sur les options de traitement est caractérisé par l’interaction ; la décision de traitement est prise par les deux parties.

20La démocratie sanitaire et le modèle économique de l’agence ont en commun d’offrir un dépassement du modèle paternaliste à partir d’un rééquilibrage de l’information. Ils permettent de contester la conception jugée surannée du médecin décideur pour privilégier la visée du patient employeur du médecin. Ce renversement d’orientation a besoin d’un véritable pouvoir de marché pour le patient. La prise en considération du patient acteur est une façon de réhabiliter la notion de marché, malmenée notamment par la thématique de la demande induite. La démocratie sanitaire participe à l’édification d’un pouvoir de marché pour le patient, capable dorénavant de choix autonomes et susceptible de peser sur la décision médicale. Cependant, elle ne peut à elle seule suffire à identifier une demande autonome et à organiser un espace marchand.

1.2 – La prédominance d’une politique de régulation par la demande

21Le rééquilibrage de l’information au profit du patient dresse de nouvelles règles du jeu. Même si l’on ne peut pas inférer de causalité entre la démocratie sanitaire et le marché de la santé, cette nouvelle configuration conduit à développer un pouvoir de marché pour le patient. Cette évolution s’inscrit dans une période où le recours aux mécanismes de coassurance s’accentue. Le patient finance une partie croissante de ses frais de santé. Ainsi, si les droits du patient sont renforcés, ses devoirs contributifs le sont également.

22La loi du 13 août 2004 sur la réforme de l’assurance maladie couronne ainsi un long processus de transformation favorisant une politique de régulation par la demande. Une telle régulation n’est pas nouvelle, mais elle s’exprime dorénavant avec plus de force comme l’illustre le durcissement des mesures liées au ticket modérateur (1.2.1.). De telles politiques de désocialisation organisent un espace marchand pour la santé dont on peut trouver trace dans le nouveau partage des soins entre l’assurance maladie obligatoire et l’assurance maladie complémentaire (1.2.2.).

1.2.1 – La régulation par la demande et le durcissement du ticket modérateur

23L’un des aspects majeurs de la réforme de l’assurance maladie est de développer les mécanismes de coassurance qui sont assis sur la notion de risque moral ex post. Ils finalisent l’objectif majeur assigné à la politique économique en matière de santé : maîtriser la dépense. L’un des moyens privilégiés est d’imposer aux assurés sociaux de payer une partie croissante du prix de leurs soins.

24L’évolution de la politique économique française en matière de santé est caractérisée par l’existence de mécanismes de partage des coûts, appelés tickets modérateurs (TM) en hausse tendancielle. Les frais de santé non remboursés sont laissés à la charge du patient et/ou de sa complémentaire santé. Le TM mesure donc le degré de désocialisation de l’assurance maladie. Compte tenu de sa définition, la notion de TM n’intègre pas les dépassements d’honoraires qui interviennent au-delà du tarif d’autorité. Cependant, ces honoraires libres ont le même effet qu’un TM sur les ressources du patient. Leur addition forme le reste à charge. Les tickets modérateurs sont élevés en médecine ambulatoire où ils représentent en moyenne 40 % du coût des soins (beaucoup plus pour certains soins comme l’optique et la dentisterie). Ils sont plus faibles à l’hôpital sans être inexistants (forfait journalier et forfait sur certains soins).

25Comme ces TM sont autorisés à réassurance, ils sont considérés comme sans effet sur la consommation médicale. L’efficacité (en termes de réduction des dépenses de santé) de cette lutte contre les comportements d’aléa moral est douteuse pour ceux qui disposent d’une complémentaire couvrante. C’est pourquoi, les réformes récentes introduisent un TM d’ordre public comme le forfait de 1 €, non rachetable par l’assuré, qui correspond à un coût fixe d’entrée. Les sanctions financières en cas de non-respect du parcours de soins et les vagues récentes de déremboursement de médicaments, non pris en charge par les complémentaires, ainsi que les franchises introduites en 2008 peuvent également être lues dans ces termes en accroissant le reste à charge pour le patient.

26Cette évolution vise à une désocialisation de la dépense de santé et non à une réduction de la consommation médicale. Celle-ci peut continuer à augmenter. L’objectif n’est en effet pas de réduire la dépense de santé mais uniquement la prise en charge publique. La consommation, sous forme d’automédication de médicaments récemment déremboursés ou encore le non-respect du parcours de soins ne sont pas prohibés. Ils sont autorisés si le patient est à prêt à supporter la dépense. Le patient est donc mis en position de choisir sa propre consommation au-delà du panier de soins remboursables et de l’assumer financièrement. Il se transforme en assuré-gestionnaire de son capital santé.

27La réforme de l’assurance maladie organise donc le décalage entre la dépense de santé et la dépense socialisée. Pour autant, la désocialisation est peu visible dans les statistiques. Ainsi, la mise en place de la réforme dite du parcours de soins coordonnés s’est traduite par une légère croissance du reste à charge des ménages de 8,56 % en 2006 à 8,48 % de la consommation de soins et biens médicaux (CSBM) en 2005. Cette évolution résulte essentiellement de la modulation des taux de remboursement qui passent de 70 % (dans le cadre du parcours de soins) à 60 % (hors parcours). L’économie de 150 millions d’euros réalisée par la CNAMTS (Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés) s’est reportée en grande partie sur les ménages dans la mesure où les organismes complémentaires d’assurance maladie (Ocam) ont été fiscalement incités à ne pas prendre en charge ces déremboursements [Fénina, Geffroy, 2007]. C’est dans le domaine des soins ambulatoires que le reste à charge des ménages progresse le plus rapidement (12,2 % en 2006 contre 11 % en 2004).

28Si la dépense de santé privée ou privatisée s’accroît, la dépense socialisée n’est pas forcément en recul. Elle reste relativement stable autour de 76 % du total. Cependant, en ayant perdu 4 points depuis 1980, la désocialisation est bien réelle. Elle est d’autant plus saillante si l’on prête attention au fait qu’un nombre croissant de personnes sont exonérées du paiement du ticket modérateur : les malades en Affection de longue durée (ALD) et plus récemment les plus pauvres avec la Couverture maladie universelle complémentaire (CMUC). Dans ce contexte d’activation de l’assuré et de durcissement de la politique de TM, certains patients bénéficient d’un traitement différent en étant exonéré du TM. Cette exonération est loin d’être marginale puisqu’elle touche 12,2 millions de personnes, soit près de 25 % des 47,1 millions de personnes relevant du Régime général. Ainsi, la désocialisation, si elle reste faible à un niveau agrégé, est forte pour le patient individuel, non ciblé par la solidarité collective.

1.2.2 – Un nouveau rôle pour l’assurance complémentaire

29L’organisation de cette segmentation des patients légitime le durcissement des politiques de TM. C’est parce que les patients les plus fragiles ou les plus démunis sont épargnés par les mécanismes de coassurance qu’apparaît légitime, aux yeux de la politique publique, de mettre davantage à contribution les autres trois quarts des assurés sociaux. Ce retrait ciblé de l’assurance maladie laisse vacants des espaces de soins ouverts à de nouvelles formes de financement.

30Le patient doit faire appel à un assureur complémentaire pour une part croissante des soins. Parce qu’elle s’exprime par un mécanisme de balancier imparfait (en raison du TM d’ordre public) où la part de l’assurance obligatoire diminue en même temps que la part de l’assurance complémentaire augmente, cette désocialisation peut être vue comme une preuve de la prégnance des mécanismes marchands dans la régulation de l’assurance maladie. En effet, ce durcissement de la politique de la demande redessine le rôle de la protection sociale complémentaire.

31La politique de la demande accroît le poids des organismes privés dans la gouvernance de l’assurance maladie. Le retrait de l’assurance de base conduit les assureurs complémentaires à être davantage des payeurs et à relayer la politique publique pour la prise en charge du TM. Ce relais se manifeste également dans le rôle de non-payeurs que cherche à assigner la puissance publique aux assureurs complémentaires dans le cas du TM d’ordre public, non autorisé à remboursement. Dans les deux cas, les organismes complémentaires doivent dorénavant participer à la stratégie de réduction des dépenses d’assurance maladie, poursuivie par le législateur [Batifoulier, Domin, Gadreau, 2007].

32La nouvelle gouvernance proposée par la loi du 13 août 2004 institutionnalise ce partage des rôles entre la Sécurité sociale et les assureurs complémentaires. Cette organisation nouvelle accroît l’étatisation de la couverture de base et ouvre la gestion de l’assurance maladie aux assureurs complémentaires. La loi crée une Union nationale des caisses d’assurance-maladie (Uncam) regroupant la CNAMTS, la Mutualité sociale agricole (MSA) et la Caisse maladie des artisans, commerçants, industriels et des professions libérales (Canam). Ce nouvel organisme prend les décisions en matière d’actes et de prestations pris en charge par l’assurance-maladie, et fixe la participation des assurés aux prestations (taux de remboursement et ticket modérateur). Dans les textes, l’Uncam dispose d’une délégation de gestion élargie. La définition du panier de soins est donc transférée de l’État vers l’assurance maladie obligatoire [Del Sol, Turquet, 2005].

33Par ailleurs la réforme organise la complémentarité entre l’État et le marché. Elle met en place une Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire (Unocam) qui regroupe des représentants des mutuelles, des assurances et des institutions de prévoyance dont le rôle est d’émettre des avis sur les décisions prises par l’Uncam et relatives à la définition du périmètre de soins remboursables. La loi innove donc en associant, pour la première fois, les assureurs complémentaires à la détermination des actes et prestations remboursables. Cette architecture contribue à brouiller les frontières entre l’assurance maladie obligatoire et l’assurance maladie complémentaire [Del Sol, Turquet, 2005].

34Cette évolution entraîne un transfert des risques, de la collectivité et du médecin, sur le patient qui devient le principal responsable de l’augmentation des dépenses de santé. De façon artificielle et contestable, l’émergence des assurances transforme l’incertitude radicale dans le domaine de la santé en risque probabilisable [Domin, 2006a], avec un patient-assuré, théoriquement consommateur libre et éclairé.

2 – L’émergence d’un consommateur de soins

35L’autonomisation du patient doit être analysée positivement dans la mesure où elle constitue un progrès indéniable pour le patient. Mais, l’évolution en cours est plus complexe qu’elle ne paraît, car elle s’inscrit dans un contexte où le patient est davantage mis à contribution financièrement. Ces nouvelles règles du jeu sont donc davantage marchandes. Elles imposent aux agents un nouveau cadre institutionnel qui leur fournit également des ressources cognitives sur lesquelles vont se fonder les comportements et se déployer les stratégies d’acteurs [Coriat, Weinstein, 2004].

36La modification des règles du jeu installe de nouveaux arrangements institutionnels qui vont nourrir les représentations. L’une des conséquences de cette mutation organisée du patient est de développer des attitudes de consommateur. Il n’y a en effet pas de marché sans l’édification d’un consommateur souverain, capable de choisir entre différentes opportunités qu’il peut évaluer. La loi du 4 mars 2002, en insistant sur le développement d’une démocratie sanitaire, a favorisé le passage du patient au consommateur de soins.

37La loi du 13 août 2004 poursuit le processus de transformation du système de soins en faisant de l’assuré social le gestionnaire de son capital santé. Cette seconde partie cherche à montrer en quoi les réformes en cours conduisent à l’édification d’un tel consommateur (2.1.), ce qui n’est pas sans effet sur les inégalités de santé (2.2.).

2.1 – L’émergence d’un consommateur de soins

38La mutation du patient vers un statut de consommateur s’inscrit dans une pluralité de registres et ne peut s’exprimer que dans le cadre de compromis. Les logiques à l’œuvre dans la réforme du système de santé ne sont pas toutes des logiques marchandes. Pour autant les nouvelles logiques réformatrices peuvent constituer un levier à la logique marchande. Ainsi en est-il de la réforme du parcours de soins (2.1.1.) et des processus de standardisation (2.1.2.) qui conduisent à l’apparition d’un « client responsable ».

2.1.1 – Le parcours de soins et l’activation du consumérisme médical

39La réforme du médecin traitant relève a priori d’une logique domestique au sens de la grammaire de l’économie des conventions. Elle entend favoriser les liens de proximité et de confiance en valorisant le médecin de famille. Contrairement aux préceptes de la démocratie sanitaire et aux canons d’une logique marchande, la réforme n’augmente pas la liberté du patient contraint dans ses choix : le patient s’inscrit sur la liste d’un médecin et est davantage dépendant de lui. En revanche, la loi du 13 août 2004 responsabilise le patient, sanctionné financièrement s’il ne respecte pas le parcours de soins. Cet aspect de la réforme participe au développement d’une logique marchande.

40Pierre-Louis Bras (2006) a montré que la rationalité de la réforme n’est pas à chercher dans la réduction des dépenses ou la mise en place d’une coordination. Elle consiste à concilier le système de gatekeeping avec la liberté tarifaire. La grande nouveauté est d’introduire un droit à dépassement d’honoraires pour tout médecin (donc y compris en secteur 1) en le déconnectant de la nature des soins prescrits et de la demande des patients. Cette surfacturation est due si l’assuré est hors parcours de soins. C’est l’assuré qui est sanctionné au bénéfice du médecin. En effet, l’infidélité du patient est une récompense pour le praticien qui est autorisé à percevoir un dépassement d’honoraire, non remboursé par les assurances obligatoires et complémentaires (dans le cadre d’un contrat responsable). Le malus de l’un est un bonus pour l’autre. La logique de prix libre, revendication récurrente de la médecine libérale et notamment des médecins spécialistes a trouvé satisfaction, sans lever le gel du secteur 2 à honoraires libres [Vacarie, 2005].

41Cette construction tarifaire incite le patient à faire des choix en s’appuyant sur un système de prix. La liberté tarifaire des médecins s’accompagne de l’arbitrage des patients. Le patient optimisateur doit faire face à plusieurs options qui peuvent plaider pour le non-respect rationnel du parcours de soins. Ainsi, si le médecin traitant est en secteur 2, faut-il respecter le parcours de soins ou choisir l’accès direct au spécialiste sachant que le surprix acquitté par le patient peut être non significatif ? Plus généralement, le non-respect du parcours entraîne un débours de 10 %. Les patients aisés ont déjà coutume de consulter directement les spécialistes (à l’inverse des patients modestes) et l’argument tarifaire peut les conforter dans ce choix tout en accroissant les inégalités sociales de santé.

42Cette marchandisation est le revers de la responsabilisation financière. Seuls les patients soumis au durcissement du TM peuvent arbitrer entre ces différentes options. Ceux qui en sont exonérés (bénéficiaires de la CMUC ou du régime ALD) sont obligés de respecter le parcours de soins sous peine de perdre le statut qui leur donne droit à exonération. Le statut de consommateur éclairé est donc l’apanage des patients payeurs.

43Le patient dans ce compromis domestique/marchand est ainsi incité à se conduire en optimisateur par un calcul coût/avantage. La réforme n’installe donc pas un patient vertueux, elle le transforme en client en favorisant le rapprochement entre son comportement de celui d’un consommateur. L’évolution du statut juridique du patient confirme cette mutation. La loi du 4 mars 2002 en rapprochant le droit des malades du droit des consommateurs participe d’un consumérisme médical [Pitcho, 2004]. Une information détaillée sur le coût des prestations, un délai de réflexion et un droit de rétractation forment le socle de l’obligation d’information due au patient pour obtenir son consentement éclairé. La double obligation d’information et de sécurité, qui relève des techniques consuméristes, transforme le patient en consommateur et l’autorise à être défendu par des associations de consommateurs.

44En affirmant sa liberté de choix, le patient [6] devient progressivement un consommateur de soins. Il devient un « malade sachant » [Le Pen, 2005], un agent capable de choix rationnels et susceptible d’évoluer au sein d’un espace marchand. Le contexte renouvelé dans lequel se déroule le colloque singulier participe ainsi à la reconnaissance d’un consommateur de soins, bénéficiant d’une créance de confiance et d’une créance de sécurité, fondements du consumérisme médical [Pitcho, 2004]. Une sphère de la demande, antérieurement sous la tutelle des médecins et des financeurs, se constitue progressivement [Chernichovsky, 2002]. La revalorisation « du rôle du malade amène assez logiquement à soumettre à une régulation marchande les biens et services dont le patient-consommateur est capable de juger la qualité et dont les différences de consommation ne mettent pas en jeu la santé publique et la justice sociale » [Le Pen, 2005, 110].

45Avec l’application du droit de la consommation, l’acte médical se transforme profondément : le médecin devient un prestataire de services et doit « s’abstenir de toutes pratiques individuelles ou collectives restrictives de concurrence » [Laude, 2005, p. 119]. Cependant, la confiance consumériste entre un prestataire et un consommateur, appliquée au cas particulier de la santé, a besoin de médiateur. Un tiers, digne de confiance, doit pouvoir dispenser des informations fiables sur la qualité des produits. Les agences d’État jouent ce rôle. Elles vont fournir un point d’appui aux calculs des acteurs, tout particulièrement en standardisant les produits de santé.

2.1.2 – La standardisation des produits et le rôle du médiateur de marché

46Un consommateur ne peut décider souverainement que s’il est capable de comparer les offres multiples. Pour faire jouer la concurrence, il doit prendre sa décision en toute connaissance de cause. L’information accessible doit donc être formatée de façon à objectiver le bien santé. La standardisation du produit est une condition nécessaire à l’existence d’une évaluation marchande de la qualité. Elle introduit une logique industrielle qui va servir d’appui à la logique marchande. Le système de santé français connaît depuis quelques années une grande entreprise de standardisation, audacieuse dans un secteur où les prestations sont souvent idiosyncrasiques. En effet, la nature du bien santé et l’incertitude radicale qui entoure la pratique médicale rendent délicates, conceptuellement et pratiquement, toutes les tentatives d’homogénéisation.

47La volonté d’industrialiser un bien comme la santé se heurte à la difficulté de le reproduire et de le copier à l’identique, comme pour une production de masse. La solution est alors de définir la standardisation en termes de codification, comme le soulignent Boltanski et Chiapello (1999). Pour des biens où la recherche et la valorisation de la différence s’opposent à une standardisation brute, la codification va permettre « d’introduire des variations de façon à obtenir des produits relativement différents mais de même style » (p. 538).

48L’activisme des pouvoirs publics à standardiser, dans une optique de concurrence monopolistique, le bien santé tout en conservant sa singularité s’observe tout d’abord dans la construction en 1991 de Références médicales opposables. Ces référentiels techniques viennent du courant clinique de l’evidence based medicine qui produit des recommandations de « bonnes » pratiques médicales. L’effort de codification se poursuit avec l’édification de critères de certification de la qualité et d’accréditation, porté par l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES) puis par la Haute autorité de santé (HAS) qui formule également des listes de médicaments au service médical rendu (SMR) faible et donc sujets à déremboursement [7].

49Les groupes d’experts, constitués en « agence », jouent un grand rôle dans ce processus de codification, en rendant publique une information fiable. Ils suppléent l’individu ou le sponsorisent (selon l’expression d’Alain Enthoven) en faisant contrepoids aux prestataires de services médicaux (médecins et assureurs). Ces corps intermédiaires ont pour mission de permettre une évaluation de la qualité par le patient consommateur quand il ne dispose pas de l’information pour y parvenir seul. La diffusion de l’information se fait par l’intermédiaire de sponsors (courtiers) dont le rôle est de faire jouer la concurrence à la place du malade [Enthoven, 1993]. Deux solutions sont envisageables. Un régulateur de type monopolistique assure la diffusion de l’information médicale. Celle-ci peut également être confiée à des organismes représentant les patients [Domin, 2006b].

50Dans le premier cas, le régulateur assure la diffusion de l’information et joue également sur l’offre en accélérant la diffusion de bonnes pratiques [Choné, Grignon, Mahieu, 2001]. La mise en place d’une formation continue et de procédures de benchmarking est censée améliorer l’efficacité des prestations [Demange, Geoffard, 2004]. La loi du 13 août 2004 sur la réforme de l’assurance maladie met en place la HAS dont le rôle est de définir le périmètre de soins et de biens remboursables, d’évaluer le service médical rendu des médicaments et d’élaborer les bonnes pratiques.

51La diffusion des informations passe aussi par des organismes de représentation des malades. Dans les pays ayant ouvert leur système de santé à la concurrence (Nouvelle-Zélande, Israël, Pays-Bas), des institutions de gestion et d’organisation de la consommation de soins (Organizing and Managing Consumption of care OMCC) s’intercalent entre les producteurs de soins et la demande. En France, certaines associations de malades de sida (Actions traitements, par exemple) se sont démarquées des autres en promouvant une remise en cause totale de la régulation étatique du marché des médicaments et l’édification d’un consommateur de soins [Barbot, 2002].

52Le panier de soins couronne l’édifice en permettant au consommateur de soins, qui devient gestionnaire de son capital santé, de choisir une assurance couvrant de façon optimale ses dépenses de santé. Dans un système concurrentiel, la production de soins s’articule autour d’un produit objectivé qui correspond à la prise en charge médicale du malade. Ce dispositif organise la production de soins en standardisant l’offre et délimite la zone de couverture par l’assurance obligatoire [Demange, Geoffard, 2004]. Il s’accompagne d’un cahier des charges correspondant à la garantie, par la collectivité, d’un droit minimal aux soins pour chaque personne.

2.2 – Un accroissement des inégalités de financement des soins

53L’édification d’un patient consommateur conduit à la construction d’un espace davantage marchand. Le patient, plongé dans un état de consommateur, peut arbitrer entre différentes options et choisir souverainement les soins dont il assumera une partie du financement. Cet arbitrage n’est réellement possible que si la contrainte financière des patients est desserrée. Dans les autres cas, il développe des inégalités de financement des soins. Ces inégalités sont particulièrement criantes pour les patients au seuil des dispositifs protecteurs (CMUC et ALD). Mais les inégalités ne s’arrêtent pas à ces populations, quand l’encouragement donné à la libre prévoyance conduit au transfert des financements vers l’assurance maladie complémentaire (2.2.1.). Ces inégalités sont aggravées par la logique de liberté tarifaire qui, au-delà du ticket modérateur, devient une source primordiale d’inégalités en santé (2.2.2).

2.2.1 – Assurance complémentaire et accroissement des inégalités

54Quand le prix devient un argument de l’échange médical, la capacité à payer le prix opère un effet de sélection des patients-consommateurs. La pression tarifaire et la désocialisation imposent aux individus de consacrer de nouvelles ressources pour une protection identique (pour le ticket modérateur autorisé à réassurance) voire plus faible (puisque la part du ticket modérateur non remboursable s’accroît). L’acquisition d’une assurance complémentaire, qui apparaît comme un prélèvement obligatoire privé [8], contraint les budgets les plus serrés, obligeant à la contraction d’autres postes de consommation.

55Si le pouvoir couvrant des complémentaires atténue l’effet de la désocialisation, celui-ci est inégalement réparti. L’acquisition d’une complémentaire et son niveau de couverture sont fonction du revenu et de la position sur le marché du travail. Si l’assurance maladie opère une redistribution horizontale (des bien portants vers les malades), elle assure également une redistribution verticale (notamment les prélèvements sont croissants en fonction du niveau de revenu). Cependant, en tenant compte de l’ensemble de l’assurance (obligatoire et complémentaire), le reste à charge est de 5,4 % du revenu brut des ménages pour le premier décile contre 0,8 % pour le dernier [Caussat et al., 2005]. Cette redistribution inversée n’est pas corrigée par l’effet de l’âge et est légèrement redressée par la prise en considération de l’état de santé. Cette forte inégalité est accentuée par le rétrécissement programmé de la couverture de base.

56Le désengagement de l’assurance maladie obligatoire au profit de l’assurance complémentaire renforce les inégalités : le niveau de garanties dépend essentiellement du prix qui varie en fonction du niveau de risque de l’assuré et de sa situation sociale. Ainsi, les contrats collectifs sont plus favorables aux salariés que les contrats individuels, ce qui renforce évidemment les inégalités. D’autre part, les dispositions réglementaires favorisent les contrats collectifs en réduisant leur coût. Les contrats individuels offrent de moins bonnes garanties que les contrats collectifs [Couffinhal, Perronnin, 2004]. Les contrats d’entrée de gamme sont plus souvent souscrits de façon individuelle (15 %) que de manière collective (5 %) et prévoient essentiellement des remboursements du ticket modérateur. A contrario, les contrats haut de gamme sont majoritairement collectifs (11 %) et offrent des garanties deux à trois fois supérieures à celles des contrats standard [Arnould, Rattier, Raynaud, 2006] et sont avantagés fiscalement par le législateur [Domin, Ginon, 2007].

57Les entreprises jouent un rôle important dans l’acquisition d’une couverture complémentaire. Une étude de l’INSEE montre, dès 1997, que 96 % des salariés ayant la possibilité de souscrire une couverture complémentaire par l’intermédiaire de leur entreprise sont effectivement couverts contre 78 % ne bénéficiant pas de cette possibilité [Blanpain, Pan Ke Shon, 1997]. Toutefois, les contrats collectifs n’empêchent pas les inégalités entre les salariés en fonction de leurs statuts, de leur catégorie ou de leur entreprise. Ainsi, les salariés des grandes entreprises sont mieux couverts que ceux des petites et moyennes entreprises [Turquet, 2002 ; 2004]. Les cadres peuvent bénéficier de régimes catégoriels plus efficaces. Dans les faits, ces inégalités s’ajoutent à celles qui existent déjà : les salariés précaires, les chômeurs et les inactifs peuvent bénéficier d’une couverture complémentaire individuelle ou de la couverture maladie universelle complémentaire, mais dans des conditions moins favorables que celles des contrats collectifs.

58De manière générale, selon la théorie néo-classique standard, la décision de souscription d’une assurance résulte d’un comportement rationnel. Or, dans les faits, la rationalité est assez différente. Des études économétriques montrent que le statut salarial a une influence dans la décision. Les personnes qui perdent leur travail ne peuvent plus bénéficier d’une mutuelle d’entreprise et ne souscrivent pas forcément un contrat individuel. D’autre part il n’y a pas de corrélation entre la probabilité de développer une pathologie (le risque) et le niveau d’assurance. En matière d’assurance santé, un haut revenu est déterminant dans la décision de souscription [Saliba, Ventelou, 2007].

59Il apparaît ainsi que le nouveau partage des rôles entre domaine de l’assurance maladie obligatoire et assurance complémentaire répercute, en matière de santé, les inégalités existantes en matière d’emploi et de revenu. C’est un recul évident par rapport à l’objectif initial de solidarité de la Sécurité sociale.

2.2.2 – La liberté tarifaire comme argument commercial

60Le concept de libre prévoyance des assurés va de pair avec la liberté tarifaire chez les praticiens. L’esprit des réformes, couplé à la logique de la médecine libérale, conduit à une permissivité marchande conduisant à une hausse des prix dont témoigne l’importante des honoraires libres. Les stratégies tarifaires du médecin peuvent être lues comme la contrepartie d’une souveraineté accrue du patient consommateur.

61L’Inspection générale des affaires sociales (Igas) [Aballea et al., 2007] a dressé un constat alarmant sur ces pratiques en montrant que la fermeture du secteur 2 a pu enrayer le développement des dépassements, mais n’a pas réussi à les éteindre. Au contraire, on observe une croissance importante des dépassements. Leur taux a doublé entre 1990 (année de fermeture du secteur 2) et 2002. L’importance des dépassements, leur concentration géographique, le monopole du secteur 2 pour certaines spécialités médicales remettent en question le principe d’égal accès aux soins.

62La liberté tarifaire a été entérinée par les réformes récentes du système de santé. Elle se traduit dans la période récente par une envolée des dépassements d’honoraires, fréquents en médecine de ville, plus rares à l’hôpital mais d’un montant très élevé. Ces dépassements ne sont pas restreints au secteur 2 (honoraires libres) mais concernent aussi les médecins en secteur 1 avec l’augmentation de plus 30 % entre 2000 et 2002 des dépassements exceptionnels pour exigence particulière du malade [CNAMTS, 2003]. En 2002, le nombre de consultations donnant lieu à un dépassement d’honoraires a été multiplié par deux. Il y a donc une diffusion progressive de ces comportements chez les professionnels [CNAMTS, 2003].

63Dans les faits, les dépassements ont majoré les honoraires de 8 % en moyenne en 2002 [CNAMTS, 2003]. En 2004, le poids des dépassements a représenté 5,5 % des honoraires totaux des omnipraticiens et 14,4 % de certains spécialistes [9]. Entre 2003 et 2004, le taux d’évolution des dépassements a diminué de 3,5 % pour les médecins généralistes. Dans le même temps, il a augmenté de 5,1 % pour les spécialistes étudiés. Chez ces derniers, ce sont les stomatologues qui abusent le plus des dépassements avec 40,4 % des honoraires totaux. Après eux, les gynécologues (25,9 % des honoraires totaux) et les ophtalmologues (22,9 % des honoraires totaux) prennent de plus en plus de liberté avec la réglementation tarifaire [Legendre, 2006].

64La généralisation des dépassements d’honoraires est génératrice d’inégalités. Une étude par testing réalisée dans six villes du Val-de-Marne s’est intéressée à l’accès aux soins des bénéficiaires de la CMU [Desprès, Naiditch, 2006]. Elle montre que les médecins généralistes (secteurs 1 et 2) ont un taux de refus imputable à la CMU de 4,8 %. Le même taux est de 41 % pour les spécialistes (secteurs 1 et 2). Ce taux est proche de celui des dentistes (39 %). Parmi les spécialistes, ce sont les psychiatres qui refusent le plus (50 %). La raison invoquée par certains praticiens pour justifier ce refus est de ne pas pénaliser le patient en lui faisant payer des dépassements. Or, la loi interdit aux médecins d’appliquer des dépassements aux bénéficiaires de la CMU. Pour les auteurs, le taux de refus s’explique essentiellement pour des raisons liées à la solvabilité de ces patients.

65L’évolution des pratiques tarifaires des médecins se répercute, par un effet boule-de-neige, sur l’activité de l’assurance maladie complémentaire dans la mesure où la prise en charge des dépassements constitue un argument commercial. Plus des deux tiers des contrats collectifs offerts par les mutuelles et les institutions de prévoyance couvrent les dépassements (39 % des contrats collectifs des mutuelles et 44 % des contrats collectifs des institutions de prévoyance). Les contrats individuels sont moins favorables pour ce type de prise en charge (seulement 17 % des contrats individuels des mutuelles).

66En revanche, 70 % des contrats individuels haut de gamme proposés par les compagnies d’assurance couvrent les dépassements [Martin-Houssart, Rattier, Raynaud, 2005]. Si les contrats individuels haut de gamme des compagnies d’assurance sont relativement performants, ils ne couvrent qu’une partie assez faible des assurés. A contrario, 90 % des contrats d’entrée de gamme ne prennent pas en charge les dépassements d’honoraires et cette proportion atteint 97 % pour les contrats individuels des mutuelles.

Conclusion

67L’évolution du système de santé est marquée, en France, comme dans la plupart des autres pays, par une évolution marchande significative. Cette orientation n’est pas inéluctable en ce sens qu’elle ne résulte pas d’un processus spontané et naturel. Elle est construite. Ainsi deux lois participent à cette édification. La première, celle du 4 mars 2002 sur le droit des malades et la qualité du système de soins, favorise l’autonomisation du patient. Elle accélère de facto la construction d’un consommateur de soins. La seconde, la loi du 13 août 2004 sur la réforme de l’assurance maladie, insère ce consommateur de soins dans un univers marchand caractérisé par un parcours tarifaire incitatif, des sponsors dédiés à la diffusion de l’information, un panier de soins censé participer à la responsabilisation des acteurs et un nouveau partage des rôles entre assurance maladie obligatoire et assurance complémentaire. Cette évolution qui trouve sa justification dans l’objectif des réductions des dépenses conduit à un accroissement des inégalités.

68Il apparaît ainsi que la construction d’un consommateur de soins légitime une politique de régulation par la demande dont les effets sont pour le moins discutables. La notion de démocratie sanitaire qui s’attache aux nouveaux droits des malades, ne serait-elle qu’un leurre cachant de fait une politique de rigueur ainsi légitimée dont le patient devenu client responsable ferait les frais ? On peut penser qu’une véritable recomposition en réseaux du système de santé, auquel la loi du 4 mars 2002 donne un nouveau cadre réglementaire, constituerait un garde-fou à certaines dérives potentielles. En organisant la coordination entre acteurs autour du patient, sur le mode de la coopération susceptible de valoriser la confiance et les engagements spontanés, elle offrirait une réponse hors marché aux insuffisances inhérentes à la dérive marchande du système de santé.

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Notes

  • [1]
    Une version antérieure de ce texte a été présentée aux xviiies Journées des économistes de la santé français (université de Bourgogne, 23-24 novembre 2006) et a bénéficié des remarques d’Olivier Biencourt et de Franck Amalric. Les auteurs tiennent également à remercier les évaluateurs anonymes de la revue pour leur lecture critique stimulante du texte. Ils restent seuls responsables des insuffisances de cet article.
  • [2]
    EconomiX, Université Paris X-Nanterre.
  • [3]
    OMI, Université de Reims Champagne-Ardenne.
  • [4]
    LEG, Université de Bourgogne.
  • [5]
    La littérature anglo-saxonne est, sur ce sujet, foisonnante. Pour une revue de ces travaux, on se reportera à Moumjid-Ferdjaoui et Carrère (2000). Plus généralement, l’analyse économique du colloque singulier est marquée par un renouveau théorique prenant appui non plus sur la dimension stratégique de l’information, mais plutôt sur la sélection des informations pertinentes par les acteurs [Batifoulier, Gadreau, 2006].
  • [6]
    Le terme de patient apparaît vers 1120 dans la langue française. Il désigne l’individu endurant qui supporte les souffrances « sans murmurer les adversités ». Au sens étymologique il caractérise celui qui souffre, qui est passif et résigné. À partir du xive siècle, il est substantivé pour désigner le malade face au médecin. Le patient se définit en opposition par rapport à l’agent, ce qui, au sens économique n’est pas sans certaines implications.
  • [7]
    Depuis le premier mars 2006, 156 médicaments dont le SMR a été jugé insuffisant par la HAS ne sont plus remboursés par la Sécurité sociale. Les veinotoniques sont également déremboursés à partir de 2008.
  • [8]
    « Le report du financement des dépenses vers les régimes complémentaires pour éviter la hausse des prélèvements obligatoires n’est qu’un habillage… Il s’agit simplement de jouer sur les mots et les définitions : si les ménages doivent cotiser à des mutuelles ou à des assurances privées, il s’agit de prélèvements obligatoires privés, mais qui ont exactement le même effet sur le revenu, la consommation … que les prélèvements publics » [Artus, 2004, p. 105].
  • [9]
    Anesthésistes, cardiologues, chirurgiens (dont chirurgiens orthopédistes), dermatologues, gastro-entérologues, gynécologues, ophtalmologues, ORL, pédiatres, pneumologues, psychiatres (dont neuropsychiatres), radiologues rhumatologues, stomatologues.
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