Notes
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[1]
Aisenstein M. (1988), « Une histoire de rouge à lèvres », in Cahiers du Centre de psychanalyse et de psychothérapie, n° 16-17, « Comment le corps vient aux filles », pp. 87-106.
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[2]
Premier écrivain chrétien de langue latine, il vécut à Carthage. Converti à 30 ans, son œuvre est marquée par la passion. Sa volonté d’ascétisme le mène à un rigorisme de plus en plus sévère et le conduira même à rompre avec l’église et à fonder une secte dérivée du Montanisme.
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[3]
J’aimerais signaler un passage où H. Deutsch anticipe la question des mères-porteuses : « Si ce que nous imaginons là devenait la réalité, il y aurait lieu de se demander laquelle des deux femmes devrait être considérée comme la mère, celle dont la cellule germinale […] vit dans le nouvel individu ou celle qui l’a porté […] et l’a mis au monde » (1949, pp. 144-145).
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[4]
Le mot boucherie contient d’ailleurs le vocable bouche, et contrairement à l’affirmation de Cassandre rapportée au début de cet article, les adolescents se « barbouillent » avec leurs premiers bâtons de rouge.
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[5]
Si le vagin est longtemps maintenu comme « zone silencieuse » selon l’expression de Denise Braunschweig et Michel Fain (1971), la jeune fille ne peut ignorer le développement de ses seins. La « coupure » de Cassandre doit être en rapport avec des investigations anciennes devant un miroir et probablement des fantaisies masturbatoires.
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[6]
Cette phrase est citée dans un très remarquable article de C. Parat (1987).
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[7]
Surdéterminé dans son histoire par l’existence d’une mère biologique « disparue » alors que la mère de l’Œdipe était « effacée » par l’éclat d’Hélène et le regard qu’elle voyait porté sur elle par son père.
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[8]
Je me suis parfois interrogée sur la plus grande longévité accordée aux femmes par de nombreuses statistiques, alors que les causes organiques invoquées – activité, surmenage, tabagisme, etc. – paraissent de moins en moins distinctes chez l’un et l’autre sexe. Il me semble – mais cela reste de l’ordre de la supposition et serait à étudier – que des réinvestissements masochiques et narcissiques de défaillances dues à l’âge ou à la maladie se font parfois plus aisément chez la femme, peut-être en relation avec l’intensité et la qualité du remaniement engendré par la survenue de ce moment de crise que représente la ménopause, entamée ou à venir.
… « la pensée est acte de chair »
1 Après s’être longuement tue, puis avoir pleuré silencieusement, elle me dit en sanglotant : « C’est une histoire de rouge à lèvres… ». Cassandre a 40 ans, elle est brune et pulpeuse, en analyse depuis trois ans ; elle me semble être à l’acmé de sa beauté, différente de la jolie femme conventionnelle qui m’avait à l’époque demandé une cure. J’avais immédiatement compris, et une grande émotion montait en moi pendant que Cassandre continuait : « Le rouge à lèvres, le premier, c’est celui que l’on dérobe à sa mère, puis on oublie, on le met “par cœur”, pas besoin de miroir, ni de pinceau, ni de crayon, les lèvres naturellement ourlées, le rouge s’étale seul. Ensuite vient imperceptiblement et inexorablement le jour où il faut se rendre à l’évidence : se mettre du rouge nécessite attention et précision du geste. Cela ne se voit pas, mais nous, nous le savons… ». Elle avait dit « nous. À qui s’adressait-elle ? À sa seule analyste ou à toutes les femmes ? Peu importe, mais nous étions, elle et moi, bouleversées. Je me disais que c’était là la définition même de la nostalgie, étymologiquement = la douleur (algie) d’un retour = (nostos) qui ne peut pas se faire. Je me demandais comment j’aurais accueilli cette confidence – je la vivais comme telle en raison du partage de l’affect – il y a dix ans. Cassandre aurait-elle dit nous ? Dans le transfert, probablement, pensais-je, mais le contre-transfert ? Aurait-elle pu en parler ainsi à un analyste homme, et comment aurait-il entendu ce matériel ?
2 Cassandre poursuit. Elle m’explique les modifications tissulaires ; elle sort de ce moment de tristesse en se lançant dans un discours scientifique, celui de sa profession. Je pense qu’il s’agit d’une parade défensive de bon aloi et me souviens des difficultés que nous avions rencontrées à retrouver ce qui est de l’ordre du corps au travers d’un matériel toujours intéressant mais désincarné. Je me surprends à rester dans la nostalgie alors qu’elle l’a pour l’instant dépassée. Je me demande pourquoi la vie serait à ce point inexorable que bien des femmes ne retrouveraient leur corps au travers de l’analyse qu’à l’instant où elles croient qu’elles vont le perdre.
3 C’est le point de départ d’une réflexion sur la représentation de ce moment qu’est la ménopause dans la fantasmatique féminine. Ma question, à vrai dire, a surgi du rapprochement des deux termes : retrouver-trouver et perdre. À « ne peut-elle le retrouver que pour le perdre ? » s’est accolé : ne l’a-t-elle retrouvé si tumultueusement que parce qu’elle se pensait sur le point de le perdre ? À 37 ans, Cassandre, bien que médecin, situait vers 45 ans l’âge de la fin de la sexualité au sens large. Ainsi marqué, cet « âge de la fin » me semble, en général et suivant des modalités différentes, en relation avec l’âge de la mère à un moment spécifique de l’adolescence de la fille, selon que celle-ci éprouve le besoin d’imaginer sa mère en dehors de la sexualité ou le contraire. Il s’agirait là soit de la recherche, soit de l’évitement d’une connivence qui implique le registre de l’homosexualité latente. À partir de Cassandre, je me pris à penser à plusieurs analyses de femmes ayant dépassé la trentaine.
4 Consciente de faire à ma manière comme Cassandre, j’entrevoyais la rédaction d’un article tout en pensant au sort étrange qui est celui de l’analyste : débusquer le pulsionnel au sein des contre-investissements et des sublimations « trop bien réussies », et invoquer ces dernières lorsque l’affect devient par trop envahissant. À partir de remarques banales et personnelles, donc aléatoires, et à propos de deux cures de patientes femmes dont je relaterai certains mouvements et fragments, je voudrais poser ici quelques questions.
5 La temporalité régit le psychisme, et ce qu’il est communément convenu d’appeler la « crise du milieu de la vie » nous affecte tous, hommes et femmes. Néanmoins, une des spécificités de la sexualité féminine est d’être prise entre deux pôles biologiques : puberté = survenue des règles, ménopause = fin des règles. Hélène Deutsch (1949) dit de la ménopause qu’elle se passe sous le signe d’une humiliation narcissique, elle écrit :
Le processus biologique actuel ou imminent est perçu intérieurement avant les changements organiques […] Ce signal intérieur, associé à la perception des premiers signes de l’âge, renforce l’intérêt que la femme porte à sa propre personne. Une lutte s’installe pour protéger la féminité…
7 L’auteur de La psychologie des femmes compare la pré-ménopause à la pré-puberté et signale un cas de figure qu’elle considère fréquent :
Le premier stade peut continuer l’à-coup pré-ménopausique d’activité, mais il est caractérisé par un accroissement de l’excitation sexuelle, par une aptitude sexuelle augmentée, et selon la situation de vie de la femme, par une lutte plus ou moins sévère contre ces sensations, exactement comme lors de la puberté.
9 Si elles restent parfois quelque peu phénoménologiques, les notes et la clinique d’H. Deutsch me paraissent souvent très pertinentes et d’une étonnante modernité [3]. Je proposerai quant à moi une opinion divergente de celle d’H. Deutsch qui, dans les pages qui suivent, laisse déduire, sans l’ériger en théorie, que cette excitation serait « défensive » devant un tableau dépressif. Il me semble, et c’est là une de mes questions, que l’on pourrait présenter l’hypothèse inverse. L’intrication du vécu fantasmatique féminin du « trop tôt » et du « trop tard », avec les noyaux organisateurs, que je crois opposés, de l’hystérie et de la dépression, me ferait comprendre ces moments dépressifs comme des « recouvrements » ou couverture de la co-excitation libidinale engendrée par l’idée de la perte à venir. Je me suis aussi demandé s’il n’y avait pas chez les femmes en analyse une resexualisation dans le transfert, accrue par la co-excitation de cette perte figurée et datée (fut-ce de façon imaginaire). J’ai d’ailleurs cru noter que les analystes femmes parlent moins fréquemment du transfert érotique, que feraient sur elles des patients hommes, que ne le font leurs collègues hommes à propos de celui de leurs patientes femmes. Dans la perspective proposée ici, cela pourrait être compris ainsi : les patientes femmes en analyse confronteraient plus fréquemment l’analyste femme ou homme à cette modalité transférentielle.
10 Si le regard du ou des parents est d’emblée constitutif de l’auto- érotisme, lui-même organisateur de la sexualité humaine, le regard dans sa fonction et son poids fantasmatique me paraît différemment investi dans l’un et l’autre sexe. La constitution de la différence des sexes ouvre pour la fillette, qui se voit privée de pénis, la recherche qui la conduit à désirer son père et inaugure ainsi l’entrée dans l’Œdipe. La castration se situe donc différemment chez la femme. L’intérêt pour son anatomie se transpose d’organes génitaux internes et invisibles au corps entier, conférant ainsi à ce dernier dans son ensemble une valeur phallique. On peut imaginer qu’au travers des interactions complexes de l’invisible et du vu, du caché et du montré, le recours ou le détour, fut-il fantasmatique, par le regard de l’autre, même en tant qu’objet interne, prend chez la femme plus d’importance. C’est dans la problématique de la castration – renoncement à la possession d’un pénis dont l’existence et l’intégrité sont vérifiables, conjugué à la difficulté de l’acceptation et de la représentation des sensations internes et diffuses – que j’aurais personnellement tendance à inclure tout ce qui touche au regard ou à l’apparence dans le discours des femmes (les premières rides de Cassandre). Préfigurée comme deuil à venir, la ménopause, dont les signes précurseurs « se voient », provoquerait alors une douleur morale de deuil que le retournement hystérique peut transformer en excitation sexuelle et devant laquelle le tableau dépressif serait défensif.
11 Bien évidemment, il ne s’agit pas de proposer ici une clinique de la ménopause ou de la pré-ménopause, encore que telle présentation ne manquerait pas d’intérêt, mais peut-être que tenir compte de ce bouleversement de l’organisation psychique inscrit dans le temps et daté pourrait permettre un éclairage particulier de l’économie psychosomatique chez la femme.
Cassandre et Hélène
12 Issus de l’épopée homérique, ces deux surnoms ne sont pas fortuits. Cassandre, dont j’ai déjà parlé, est entrée dans mon bureau un soir d’été. Sa demande d’analyse est des plus singulières. Elle me consulte en raison de ses rêves : « Tout va bien dans ma vie, mais mes nuits sont une horreur ». Elle est en effet régulièrement réveillée par des cauchemars terribles qui la laissent pantelante. Dès le premier entretien, j’avais été frappé par les contrastes en elle, contraste dans son récit entre ses jours et ses nuits, contraste dans son visage : elle souriait avec les lèvres tandis que son regard restait tragique. Associativement s’était imposée à moi l’illustration d’un livre d’enfant sur l’Iliade. La princesse Cassandre y était représentée nonchalamment étendue dans un cadre agréable alors que par un effet d’optique voulu par le dessinateur, l’horreur d’un incendie se reflétait dans ses prunelles. Troie brûlait dans ses yeux comme dans un miroir. Je pensais aussi à la Cassandre sculptée par Pradier, au musée d’Avignon : elle offre un étonnant contraste entre la suavité de la pose et des formes et l’expression d’intense douleur qui en émane. La Troyenne maudite avait été condamnée à prévoir et à prédire les catastrophes. Celle que j’ai appelée Cassandre me parut contrainte de l’intérieur à garder dans le regard trace des catastrophes de ses rêves. Plus tard, lors de « l’histoire du rouge à lèvres », je devais encore me dire qu’elle était « une vraie Cassandre » pour voir ainsi se faner le contour de ses lèvres à 40 ans.
13 À 37 ans, Cassandre offre l’image d’un parcours réussi ; dès 17 ans, elle s’est brillamment lancée dans une carrière scientifique et passionnément engagée dans un militantisme de gauche. Ce dernier l’a longtemps tenue éloignée de l’analyse, et c’est pour elle une défaite que de venir me demander de l’aide. Elle est née dans un milieu très défavorisé. Son père est l’enfant illégitime d’une femme qui l’a abandonné. Il fut quitté par sa première femme avant que d’épouser la mère de Cassandre. Le couple semble être allé d’échec en échec, passant d’une banlieue pauvre à une autre encore plus misérable. Il en a été de même pour les logements et les places. Cassandre est leur seule enfant. Ils l’ont profondément aimée. Pour elle, ils travaillaient jour et nuit, me dit-elle. De son enfance, elle garde peu de souvenirs : une pièce unique où elle faisait sans bruit ses devoirs pendant que son père dormait quelques heures entre son travail de la journée et le second emploi qu’il occupait la nuit. Elle se souvient aussi de la honte d’être lavée par sa mère dans l’évier d’une cuisine partagée avec des voisins de palier. Cassandre a épousé un homme qu’elle aime et estime, ils font de la recherche ensemble ; pour elle, le mariage est aussi un engagement profond et irrévocable. Sa vie est pleine, riche, agrémentée d’amitiés et de goûts artistiques, elle a de la peinture moderne une connaissance authentique. Elle est mère de trois filles âgées de 9, 6 et 3 ans. Avec la naissance de la dernière a coïncidé l’arrivée et l’installation à la maison du fils, âgé de 12 ans, d’un premier mariage de son mari. Elle a accueilli ce garçon avec chaleur et générosité. À ma question : depuis quand ses nuits sont-elles peuplées de cauchemars, dans un premier temps elle avait répondu que cela avait toujours été ainsi. Il devait s’avérer qu’elle avait, enfant, fait quelques cauchemars « classiques » : elle y était poursuivie par un homme dont elle ne voyait pas le visage, deux camions entraient en collision, sa mère chérie venait à mourir. Ce n’est qu’après la puberté que le rythme et le contenu de ces « mauvais rêves » devinrent préoccupants. Elle était souvent, mais non pas quotidiennement, réveillée par des rêves flous d’où émergeaient dans son souvenir des visions de boucherie : des étalages de viandes sanglantes, ce n’était pas des scènes car il n’y avait personne dans ces rêves-là. D’autres rêves, qu’elle appelait aussi cauchemars, étaient des rêves typiques : rêve de nudité, rêve d’examen, rêve de la mort d’un parent aimé, et m’avaient rassurée quant à la qualité et la persistance d’une névrose infantile. Les cauchemars s’étaient intensifiés depuis la naissance de ses enfants et étaient devenus quotidiens depuis près de trois ans (naissance de la dernière fille et venue de Didier, le fils de son mari). Contre ses scénarios de la nuit, elle avait tenté toutes sortes de remèdes dont l’efficacité aurait pu lui en prouver les fondements physiologiques ou neurologiques. S’il lui fallait maintenant admettre qu’elle n’était pas entièrement étrangère à ses cauchemars, Cassandre n’était néanmoins pas prête à accepter l’idée d’en être le metteur en scène.
14 Dès les premiers mois de l’analyse, Cassandre parut apaisée de pouvoir parler de ses nuits. J’avais d’emblée pensé à l’importance et même à la nécessité de la création d’un cadre où les visions de la nuit puissent se construire en récit. Elle put se souvenir de ses rêves, se les racontant au matin afin de me les dire. Les thèmes récurrents actuels étaient des accidents. Elle se voyait présente, mais impuissante à secourir ses filles. Longtemps je restai silencieuse, ne sachant pas comment intervenir au cours des récits de ces rêves violents et rendus opaques par leur apparent manque de déguisement. Une première modification de l’attitude de Cassandre à mon égard survint quand elle se mit à rêver parfois qu’elle parvenait enfin à sauver ses enfants. Ces fois-là, sa mère ou une femme inconnue se trouvait immobile derrière elle. Je me gardai bien de triompher devant ce matériel trop clair, mais Cassandre y vit un signe de ce que sa vie nocturne était modifiable. Parce que modifiable par une démarche par elle engagée, elle lui sembla plus proche. Sans lui imposer la pensée qu’elle était l’auteur de ses rêves, je lui laissai faire ce même chemin, rendu acceptable par le biais d’une relative maîtrise qu’elle crut retrouver. Il lui fallut ensuite admettre que s’il est possible de modifier des scénarios de rêves, ces derniers vous appartiennent. J’étais néanmoins perplexe devant la crudité, le sadisme et l’aspect répétitif des contenus manifestes. Je m’interrogeai sur la valeur économique d’une interprétation qui, bien que donnant sens, n’aurait souligné que le sado-masochisme, alors que la persistance des thèmes suggérait une resexualisation du surmoi, soit même l’hypothèse d’un éventuel potentiel traumatique. Il me fallut près de huit mois pour me faire la réflexion de ce que, quelles que fussent les modalités des accidents que Cassandre rêvait, une constante y figurait : les jambes des fillettes étaient toujours mentionnées et attaquées (mordues par des chiens, broyées par des voitures, coupées par des trappes, etc.). Ma première intervention fut de lui faire part de cette remarque. J’ajoutai qu’elle souhaitait sans doute des filles qui ne puissent « plus courir… ». La polysémie du verbe courir dans sa veine érotique (échapper, s’échapper, séduire, être séduite – amorale – infidèle, etc.) devait amener un matériel considérable et nous permettre de lier les cauchemars de Cassandre à son histoire trans-générationnelle et infantile. Sa grand-mère paternelle avait été taxée d’être une « coureuse » ; son fils, le père de la patiente, avait été abandonné par une première femme. S’il n’en parlait jamais, Cassandre avait pourtant conclu qu’elle était une séductrice infidèle. Cela lui avait permis une construction imparable : cette première femme ayant été le seul objet d’amour de son père, il n’y aurait eu entre ses deux parents aucune vie sexuelle en dehors du rapport unique effectué en vue de sa naissance.
15 La mise à jour de cette histoire soigneusement édifiée nous permit d’en aborder les raisons et de la mettre en rapport avec les « blancs » qui occultaient ses souvenirs. Des liens devinrent possibles entre la petite fille attentive qu’elle avait été et les cauchemars de l’époque. Parallèlement, la lecture du livre La maladie humaine de Fernandino Camon (1984), que le hasard nous fit faire en même temps, devait me fournir le prétexte d’une interprétation « par petites touches » de ses rêves de boucherie de l’adolescence dans lesquels je soulignai l’importance des négations : les pièces de viande ne sont pas de la chair vivante, les boucheries vides ne sont pas chambres habitées, le sanguinolent et le mort n’ont rien à voir avec le sang des règles et la chaleur du ventre [4]. La surdétermination du rouge, rouge sang, devait nous fournir un éclairage partiel mais nouveau de son militantisme passionné. La lutte des classes, me dit un jour Cassandre, était sa lutte à elle contre la promiscuité (la chambre unique) des sexes et des générations. La survenue des règles avait été vécue telle une blessure humiliante. Refusant les images de femmes de sa lignée : grand-mère paternelle et première femme du père = coureuses infidèles, grand-mère maternelle et mère = servantes mal aimées, Cassandre avait préféré se vivre comme une « camarade » (ambi/asexuée). Les relations amoureuses devenaient ainsi la suite logique de tâches et d’idéaux en commun. Longtemps, elle était restée discrète sur sa vie sexuelle, le récit d’un cauchemar ancien, datant de quelques mois après son premier accouchement, devait l’amener à livrer par bribes un douloureux secret. Cassandre n’avait pas pu être mère et rester amante. Dès la naissance de sa première fille, après l’avoir allaitée avec plaisir, elle n’avait pu supporter des contacts érotisés du sein ou de la bouche. La mise au monde de deux autres enfants n’avait fait qu’aggraver cette difficulté. Si Cassandre était peu à peu devenue (s’était rendue) frigide, elle continuait pourtant d’avoir des rapports sexuels, à condition que les contacts soient limités au-dessous de la taille. Elle se disait coupée en deux, le haut du corps : la poitrine et les lèvres étant la « partie mère », le bas était la « partie femme » [5]. Je lui fis un jour remarquer que de se séparer ainsi en deux était peut-être la seule façon possible pour elle de réunir aussi deux images de femmes. Elle avait imaginé sa mère frigide et soumise, si les femmes passionnées-coureuses-abandonneuses étaient assimilées à des prostituées ; se donner passivement, sans préliminaires (comme une pute), à son mari, était une manière, la plus mauvaise sans doute, d’être à la fois comme l’une et comme l’autre, tout en évitant d’imaginer qu’une mère tendre puisse aussi avoir des désirs érotiques. La compréhension de la prégnance quasi-traumatique de la scène primitive dans sa vie fantasmatique – son idéal contenant ce qu’elle avait à tout prix cherché à éviter, cela l’avait contrainte à une activité dont la valeur pare-excitante s’avérait insuffisante –, la mise à jour de contorsions psychiques coûteuses en elle induites par une série d’évitements et de contre-investissements devaient amener Cassandre à (re)trouver à la fois des nuits plus tranquilles, mais un corps le jour. Cette rencontre tumultueuse avec une sensualité qu’elle pensait ignorer devait la surprendre et l’inquiéter et avait précédé de peu un mouvement apparemment dépressif et rapidement rationalisé où se situe « l’histoire du rouge à lèvres ».
16 Afin d’exposer maintenant quelques éléments du travail mené avec Hélène, il me faut mettre ici un terme au récit de l’analyse de Cassandre, dont je n’ai d’ailleurs tracé que certaines lignes me paraissant éclairer mon propos. J’ai notamment passé sous silence toute l’analyse de l’homosexualité. Je suis d’autant plus consciente de l’aspect discutable de ce parti pris, qui vise à centrer mon propos sur le concept de coexcitation libidinale, que l’homosexualité n’en est pas absente. J’ai toutefois voulu, pour des raisons multiples, limiter le matériel des deux patientes à ce qui m’a semblé l’essentiel de l’argument.
17 De la coexcitation, Freud pense en 1924 qu’il s’agit d’un mécanisme physiologique infantile qui tendrait par la suite à s’épuiser. Dans L’Éphémère, texte rédigé en 1915 à l’occasion d’une parution commémorative sur Goethe, il écrit que la limitation du temps de la vie, les dégradations corporelles ne donnent que plus de prix aux possibilités de jouissance : « la brièveté de notre existence ne la rend que plus excitante » [6]. Propos qui peut être compris dans le sens d’une permanence de l’excitabilité. La coexistence de ces deux thèses ne me paraît pas antinomique compte tenu de l’intensité des aléas internes et externes qui peut à tout moment bouleverser l’économie psychique de chacun, engendrant le recours ou le retour à des modalités issues du passé. Je vois dans les sensations liées aux réalités biologiques et dans la perception, ou même la préfiguration de la perception de cette limitation qu’est le vieillissement, des excitations sensorielles qui viendraient réveiller ou raviver la coexcitation libidinale.
Hélène :
18 Ce surnom n’est pas seulement dû à quelque effet de contamination lié à l’évocation de la guerre de Troie. La femme de Ménélas, pour qui les armées grecques devaient combattre dix ans, est à la fois l’objet de la guerre et la figure la plus absente de l’épopée dont elle reste l’éternelle étrangère. Hélène, ma patiente, est belle. Je l’avais constaté dès le premier entretien. De cette beauté austère, sans fard, mais éclatante, elle ne faisait pas état. Je m’étais dit qu’elle était de ces femmes belles qui n’ont pas misé sur la beauté. Je ne repérai pourtant aucune tentative névrotique pour s’enlaidir ou s’affadir.
19 Elle ne jouait en rien de la séduction qui émanait d’elle, sans néanmoins la disqualifier. Hélène m’avait paru porter son physique comme s’il lui était quelque peu étranger. Bien plus tard nous relierons cela à une mère « étrangère » à elle. Hélène a en effet été adoptée, sa mère naturelle lui est inconnue, celle qui l’a élevée ne lui ressemble en rien. Les parents sont présentés comme des gens assez remarquables, cultivés et chaleureux. La personnalité brillante d’un père séduisant et autoritaire ainsi que la connaissance de sa filiation réelle semblent avoir rendu difficile le deuil œdipien marquant l’adolescence d’Hélène d’une succession de conflits violents et de moments dépressifs qu’elle put surmonter grâce à des sublimations de qualité. Menant une vie ascétique, elle fit de très bonnes études. Elle est haut fonctionnaire et a souvent opté pour des postes à la fois difficiles et lointains. Hélène est mariée à un homme de quinze ans son aîné qu’elle m’avait dit beaucoup aimer. J’avais été étonnée par une phrase : « J’ai épousé un Monsieur », formulation qui m’avait paru curieuse dans la bouche d’une femme de ce niveau socioculturel et que j’avais relevée. Je devais comprendre qu’il s’agissait là d’une condensation qui contenait deux niveaux de négation (pas un homme, pas une femme), car nous verrons plus tard qu’elle a, contre la séduction œdipienne, choisi un homme en qui, en dépit d’un premier attachement érotique important, elle a recherché une fonction maternelle pare-excitante.
20 Quand elle vint me consulter, elle avait 36 ans et vivait définitivement à Paris depuis la naissance de son fils âgé de six ans. Après quelques hésitations, je lui avais proposé une psychothérapie à deux séances par semaine en face-à-face. Cette prudence se fondait en partie sur une grande réticence de sa part à entamer une analyse ; elle l’eût probablement surmontée si j’avais insisté, mais la présence d’épisodes somatiques ponctuels mais graves à la fin de l’adolescence et après une grossesse m’en avaient dissuadée. La cause de sa venue, selon son expression, était « une dépression dans laquelle elle s’engluait ». Elle avait demandé des médicaments, et un psychiatre, après lui avoir prescrit un traitement antidépresseur léger, me l’avait conjointement adressée.
21 Malgré l’âge de ses enfants, son fils et une fillette de quatre ans, et bien qu’elle n’ait, selon ses dires, « plus grand-chose à se prouver sur le plan de sa carrière », elle me paraît faire preuve d’un surinvestissement professionnel considérable et d’une hyperactivité discrète et très rationalisée. Actuellement, elle se sent sans goût pour la vie. Hors son travail, tout lui pèse. Elle se plaint de ce qu’elle appelle « la tristesse du matin », et décrit un sentiment douloureux, sans motif conscient, qui l’affecte dès qu’elle émerge d’un sommeil en général sans rêves. Elle est pourtant présente à ses dossiers et à ses collègues, mais se dit traverser ses soirées telle une automate. Elle fait les choses prévues, parle à ses enfants, dîne, sort, mais rien ne lui procure le moindre plaisir. Elle continue pourtant de lire et d’écouter de la musique, mais plutôt par une volonté de ne pas s’abandonner que dans une autre perspective. Le père d’Hélène est mort il y a plus de six ans, peu avant la naissance de son petit-fils. Elle pense avoir surmonté cette perte grâce à la présence de son mari et du bébé. Elle a néanmoins fait six mois après une septicémie, médicalement mal expliquée et qui semble avoir mis ses jours en danger. Elle a avec son fils aîné des rapports difficiles, conflictuels ; elle supporte très mal les mouvements œdipiens de l’enfant, elle entre dans des colères violentes qui la laissent épuisée et très coupable. La « dépression » dont elle fait état s’était déclenchée deux ans auparavant après un événement triste, mais qu’elle aurait pu vivre sur un mode plus anodin. Elle avait, pour des raisons familiales, refusé une courte mission à l’étranger. Une de ses rares collègues femmes s’en était chargée, mais n’en était jamais revenue, ayant fait un infarctus au cours de ce voyage. Cette femme plus âgée se savait atteinte d’un rétrécissement mitral, elle avait insisté pour partir à la place d’Hélène avec qui elle avait entretenu des rapports cordiaux et courtois, mais sans plus. Hélène avait été très affectée, envahie par le regret. Elle semblait très consciente de sa culpabilité, tout en se montrant incapable de la lier à son histoire infantile. Les mois passaient, et si Hélène avait « oublié » Madame C., sa tristesse persistait tout en lui devenant de plus en plus opaque.
22 Dans le cours de la psychothérapie qui s’était d’emblée avérée très psychanalytique, voire facile, ce matériel [7] put être repris dans le transfert, et deux ans après, alors qu’Hélène me disait revivre, je commençais à entrevoir la fin du traitement. Restaient son surinvestissement professionnel et la suractivité que je me suis surprise à rationaliser moi aussi, me disant qu’elle avait somme toute un métier passionnant. Je dus, pendant un temps, n’être pas assez vigilante à écouter et à entendre qu’elle acceptait sans cesse de nouvelles responsabilités, se mettant ainsi dans des situations qui la rendaient constamment anxieuse. Ceci l’a amenée à prendre, sans m’en parler d’abord, des petites doses d’anxiolytiques et de somnifères. C’est dans ce contexte qu’elle me raconte deux rêves de la même nuit. Dans la séance, elle venait de mentionner « des petits instants » de désespoir, très différents des moments de tristesse d’il y a deux ans ; elle les relie à son travail. Ce matin, il lui fallait donner un coup de téléphone avant 7 h 45 ; mise en retard par son fils, elle n’a appelé son correspondant qu’à 7 h 50. Elle n’a trouvé personne alors que c’était important. Elle s’est sentie inquiète et désespérée. Au volant de sa voiture, elle avait les larmes aux yeux, elle s’est intérieurement traitée de « con » et de « conne ». Elle se souvient brusquement de deux rêves désagréables de cette nuit. Au réveil, elle s’est brièvement dit qu’elle devenait « folle ».
23 Le premier rêve : elle est à une conférence, il y a beaucoup de monde ; soudain, elle aperçoit son mari dans la salle, elle est surprise de le voir là parmi ses collègues à elle (son mari exerce une profession différente de la sienne). Il demande à parler, monte à la tribune et dit : « Elle est une droguée, une folle ». Hélène est, dans le rêve, si blessée et submergée de colère qu’elle crie. Elle est réveillée par son mari qui rit de la voir dans cet état, elle met quelques secondes à se calmer.
24 Après s’être à nouveau endormie, elle rêve « qu’elle est malade, elle a très mal à la gorge, elle se dit que c’est très grave, qu’elle a un cancer du larynx, elle ne pourra pas parler, elle se tâte le cou ». La douleur la réveille. Éveillée, elle constate qu’elle a effectivement mal. Elle pense couver une angine et songe que cela tombe mal ; sa semaine est très chargée. Le lendemain matin, elle est stupéfaite de n’avoir rien à la gorge, « pas l’ombre d’une douleur ».
25 Je lui fais là remarquer qu’elle me le dit sans « l’ombre d’un soulagement », cela semble même l’angoisser. Elle acquiesce, elle est anxieuse de comprendre. Elle avait cru que les rêves avaient été provoqués par un début d’angine. Je lui demande ce qui lui fait lier les deux rêves, elle ne répond pas, et je lui suggère que des cris retenus peuvent donner mal à la gorge. Après un silence, elle s’étonne de la violence de ses affects dans le premier rêve. Je ne citerai pas toutes les séries associatives qui me permettent de lui montrer la connotation sexuelle des termes « con », « conne » (doublement femme) et « folle » et de relier la violence apparue dans le rêve à une surcharge d’excitation qui la fait par deux fois sortir du cadre du rêve, les figurations n’étant pas parvenues à éteindre son angoisse.
26 Il m’a semblé que c’est essentiellement à partir de cette séance que j’ai pu aborder la complexité de l’apparition, puis du maintien de la dépression chez cette patiente, pour qui se vivre « déprimée » s’est avéré bien plus tolérable que « folle » = avec des désirs. Le maintien de l’état dépressif premier lié à un deuil se poursuit et survient dans un deuxième temps comme le « régulateur d’une pression du noyau hystérique » (Ody, 1986 ; Fain, 1986). Tout récemment, dans un mouvement un peu comparable à celui de Cassandre, à peine confrontée à son corps – Hélène se voit maintenant belle, se regarde, se maquille, a envie d’être désirable –, s’abrite-t-elle derrière un « état dépressif troisième version » invoquant la peur d’un vieillissement à venir.
27 Dans L’Éphémère (1915), Freud raconte une promenade effectuée avec deux jeunes amis qui, sensibles à la précarité des saisons, ne parviennent pas à se réjouir de la beauté de la nature. Freud de leur opposer : « Une fleur ne connaîtrait qu’une seule nuit sa pleine floraison, son éclosion ne nous en paraîtrait pas moins somptueuse ». C’est là le point de départ d’une réflexion qui l’amène à écrire :
Ce devait être une révolte de l’âme seelig contre le deuil qui avait dévalorisé leur jouissance esthétique. La représentation de l’éphémère de la beauté donnait […] un avant-goût du deuil qu’occasionne son déclin, et comme l’âme se rétracte instinctivement devant la douleur, ils percevaient – à la pensée de la précarité de leur plaisir – leur jouissance esthétique comme une agression (p. 571).
29 Un peu plus loin, Freud mentionne les « obscurités » de « cette grande énigme » que constitue le deuil. Deuil à venir tissé dans la représentation de la féminité, biologiquement la ménopause signe la fin de l’aptitude à la maternité. L’arrêt de la menstruation indique que l’ovulation a cessé et implique un bouleversement de l’activité endocrinienne. Il s’agit donc d’une rupture qui ne trouve sa solution que si elle est précédée par une réorganisation de l’économie psychique. Hélène Deutsch parle « d’exigences accrues de la libido avant le renoncement définitif ». Les refoulements, les contre-investissements et les sublimations sont, dit-elle, en danger, si des remaniements identificatoires ne sont pas mis en place. Je pense, pour ma part, qu’est là en jeu l’équilibre du narcissisme et du masochisme et que, comme toute « crise » (par exemple « la crise de l’adolescence »), celle-ci devrait instaurer un véritable travail d’élaboration psychique [8].
30 « L’anatomie c’est le destin ». Cette phrase fameuse qui fut souvent décriée, comme de nombreux textes de Freud traitant de la sexualité féminine, me paraît ici encore particulièrement vraie. La ménopause, en tant que fin d’une fonction : la procréation, et perte d’un signe visible : le sang des règles, ne me paraît pas superposable au moment, certes difficile, que d’aucuns ont appelé « l’andropause ».
31 Avant de conclure, je dirai que l’ensemble des écrits freudiens sur « le continent noir » me semble plus complexe et plus riche qu’on ne l’a parfois laissé entendre. L’affirmation selon laquelle la découverte du vagin ne se fait seulement qu’à la puberté est contredite par la mention en 1923 (Freud, 1923 ; 1924) des « sensations corporelles qui doivent être considérées comme un éveil prématuré de l’appareil génital féminin » que Freud situe au moment où la fillette se tourne électivement vers son père (Lucas, 1983 ; Diatkine, 1983).
32 Même s’il semble aujourd’hui communément admis que la triangulation s’organise plus tôt que Freud ne l’avait pensé, que le bébé a déjà une identité sexuelle, que la reconnaissance des sexes est de l’ordre du renoncement et que d’accepter des sensations internes est souvent aussi difficile que la déception de n’avoir pas de pénis, l’importance pour la théorie analytique de textes tels que « Quelques conséquences psychologiques de la différence anatomique entre les sexes » (Freud, 1925) n’est en rien amputée. Il en est de même de tous les écrits sur la sexualité féminine ; je ne les citerai pas, ils parsèment l’œuvre de Freud.
33 Une de ses phrases pourtant m’a longtemps plongée dans la plus grande perplexité. À l’issue de cet exposé, j’en proposerai ma lecture d’aujourd’hui. Il s’agit de ce fameux passage « de la féminité » (Freud, 1933). Avant que de résumer ses thèses sur la sexualité féminine, Freud s’y adresse à l’auditoire :
De tout temps les hommes se sont creusé la tête sur l’énigme de la féminité […] Vous aussi, vous ne vous êtes sans doute pas exclus de cette réflexion dans la mesure où vous êtes des hommes : on ne l’attend pas des femmes qui se trouvent parmi vous, elles sont elles-mêmes cette énigme (pp. 151-152).
35 Dans l’avant-dernière page de ce texte, Freud écrit :
Je ne peux m’empêcher de mentionner une impression qu’on éprouve souvent dans l’activité analytique. Un homme dans la trentaine nous apparaît comme un individu juvénile, plutôt inachevé […] Par contre une femme au même âge nous effraie fréquemment par sa rigidité psychique et son immuabilité. Sa libido a pris des positions définitives et semble incapable de les abandonner pour d’autres (p. 180).
37 En relisant attentivement ces quelques lignes, à mon sens énigmatiques, on voit que Freud citait une « impression éprouvée au cours de l’activité analytique », donc dans la pratique de ses cures. À la « femme de 30 ans » de 1915, compte tenu de l’évolution médicale et sociale, coïnciderait plutôt en 1988 celle qu’il conviendrait d’appeler « la femme de la quarantaine ». Ne peut-on se demander si, dans le cadre de l’analyse d’une femme de cet âge par un psychanalyste-homme, cette rigidité que Freud déplore n’est pas à comprendre comme une « rigidification », dans le sens d’une pétrification dépressive de la motion pulsionnelle, face à une mobilisation rendue dangereuse par le transfert et (peut-être) par le processus engagé contre la coexcitation libidinale engendrée par la perte à venir et que cet article a évoqué ?
Bibliographie
Bibliographie
- Braunschweig D. & Fain M. (1971), Éros et Antéros, Paris, Payot, 279 pages.
- Deutsch H. (1949), La psychologie des femmes, Paris, Puf, t. II, Maternité, trad. de l’anglais par H. Benoit, 418 pages.
- Camon F. (1984), La maladie humaine, Paris, Gallimard.
- Diatkine R. (1983), « Que savent de la sexualité féminine les psychanalystes s’occupant d’enfants ? », in Les textes du centre Alfred Binet, n° 2, pp. 109-118.
- Fain M. (1986), « À propos des réflexions de M. Ody sur noyau dépressif et noyau hystérique », in Revue française de psychanalyse, t. L, n° 3, pp. 973-978.
- Freud S. (1915), « L’Éphémère », in Revue française de psychanalyse, trad. de l’allemand par F. Levy, t. XLV, n° 3, 1981, pp. 569-573.
- Freud S. (1923), « L’organisation génitale infantile », in La vie sexuelle, Paris, Puf, trad. de l’allemand par J. Laplanche, 1969, pp. 113-116.
- Freud S. (1924), « La disparition du complexe d’œdipe », in La vie sexuelle, Paris, Puf, trad. de l’allemand par D. Berger, 1969, pp. 117-122.
- Freud S. (1925), « Quelques conséquences psychiques de la différence entre les sexes », in La vie sexuelle, Paris, Puf, trad. de l’allemand par D. berger, 1969, pp. 123-132.
- Freud S. (1933), Nouvelles conférences sur la psychanalyse, trad. de l’allemand par A. Berman, Paris, Gallimard, 1971, 243 pages.
- Lucas G. (1983), « La sexualité féminine en psychanalyse d’enfant », in Les textes du centre Alfred Binet, n° 2, pp. 1-16.
- Ody M. (1986), « De l’opposition entre hystérie et dépression », in Revue française de psychanalyse, t. 50, n° 3, pp. 905-922.
- Parat C. (1987), « À propos de la coexcitation libidinale », in Revue française de psychanalyse, t. LI, n° 3, pp. 925-936.
Notes
-
[1]
Aisenstein M. (1988), « Une histoire de rouge à lèvres », in Cahiers du Centre de psychanalyse et de psychothérapie, n° 16-17, « Comment le corps vient aux filles », pp. 87-106.
-
[2]
Premier écrivain chrétien de langue latine, il vécut à Carthage. Converti à 30 ans, son œuvre est marquée par la passion. Sa volonté d’ascétisme le mène à un rigorisme de plus en plus sévère et le conduira même à rompre avec l’église et à fonder une secte dérivée du Montanisme.
-
[3]
J’aimerais signaler un passage où H. Deutsch anticipe la question des mères-porteuses : « Si ce que nous imaginons là devenait la réalité, il y aurait lieu de se demander laquelle des deux femmes devrait être considérée comme la mère, celle dont la cellule germinale […] vit dans le nouvel individu ou celle qui l’a porté […] et l’a mis au monde » (1949, pp. 144-145).
-
[4]
Le mot boucherie contient d’ailleurs le vocable bouche, et contrairement à l’affirmation de Cassandre rapportée au début de cet article, les adolescents se « barbouillent » avec leurs premiers bâtons de rouge.
-
[5]
Si le vagin est longtemps maintenu comme « zone silencieuse » selon l’expression de Denise Braunschweig et Michel Fain (1971), la jeune fille ne peut ignorer le développement de ses seins. La « coupure » de Cassandre doit être en rapport avec des investigations anciennes devant un miroir et probablement des fantaisies masturbatoires.
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[6]
Cette phrase est citée dans un très remarquable article de C. Parat (1987).
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[7]
Surdéterminé dans son histoire par l’existence d’une mère biologique « disparue » alors que la mère de l’Œdipe était « effacée » par l’éclat d’Hélène et le regard qu’elle voyait porté sur elle par son père.
-
[8]
Je me suis parfois interrogée sur la plus grande longévité accordée aux femmes par de nombreuses statistiques, alors que les causes organiques invoquées – activité, surmenage, tabagisme, etc. – paraissent de moins en moins distinctes chez l’un et l’autre sexe. Il me semble – mais cela reste de l’ordre de la supposition et serait à étudier – que des réinvestissements masochiques et narcissiques de défaillances dues à l’âge ou à la maladie se font parfois plus aisément chez la femme, peut-être en relation avec l’intensité et la qualité du remaniement engendré par la survenue de ce moment de crise que représente la ménopause, entamée ou à venir.