Couverture de RFDC_097

Article de revue

Jurisprudence du Conseil constitutionnel

Pages 121 à 174

Notes

  • [*]
    Guylène Nicolas, Maître de conférences de droit public HDR, UMR 7268 ADES, Aix?Marseille Université, EFS CNRS ; Tamara Lajoinie, Doctorante contractuelle à l’ILF?GERJC, CNRS UMR 7318, Aix?Marseille Université ; Olivier Négrin, Professeur, Aix?Marseille Université ; Lukasz Stankiewicz, Maître de conférences de droit public, Université Lyon 3 ; Mathieu Disant, Maître de conférences HDR à l’École de droit de la Sorbonne, Université Paris I ; Sofian Anane, Doctorant, Aix?Marseille Université ; Audrey Oudoul, ATER à l’Université d’Auvergne ; Jean?Baptiste Perrier, Maître de conférences à l’Université d’Auvergne.
  • [1]
    D. Orliac, Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi, 20 mars 2013.
  • [2]
    Cette loi a toutefois fait l’objet d’une QPC : CC, décis. n° 2012?249 QPC du 16 mai 2012, Société Cryo?Save France.
  • [3]
    Loi n° 94?654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, JO, 30 juillet 1994, p. 11060.
  • [4]
    Ancien article L. 152?8 du Code de la santé publique.
  • [5]
    Ancien art. L. 152?8.
  • [6]
    Ancien art. L. 152?8.
  • [7]
    Celle de priver les scientifiques français d’objet d’expérimentation inestimable alors que seraient exploitées en France les découvertes faites à l’étranger si des thérapeutiques innovantes en découlaient, Ch. Thibault, « De la nécessité de l’expérimentation sur l’embryon humain et de son contrôle », in B. Le Mintier (dir.), Les lois “bioéthiques” à l’épreuve des faits : réalités et perspectives », Puf, collection Droit et Justice, 1999.
  • [8]
    CCNE, Avis n° 53 sur la constitution de collections de cellules embryonnaires humaines et leur utilisation à des fins thérapeutiques ou scientifiques, 11 mars 1997.
  • [9]
    CCNE, Avis n° 60 sur le réexamen des lois de bioéthique, 25 juin 1998.
  • [10]
    Conseil d’Etat, « Les lois de bioéthique : cinq ans après », Paris, La Documentation française, Collection « Les études du Conseil d’État », 1999.
  • [11]
    L’arrêté avait fait l’objet d’un référé, le 13 novembre 2002, le Conseil d’Etat avait décidé de suspendre pour quatre mois l’exécution de la décision du ministre jugeant que l’on pouvait émettre « un doute sérieux sur la légalité de la décision ministérielle » et rappelant l’interdiction législative de recherche embryonnaire. Toutefois, le 17 janvier 2003, le tribunal administratif de Paris a rendu un avis contraire à celui du Conseil d’État considérant que « les cellules souches pluripotentes humaines d’origine embryonnaire ne sont pas des embryons », que la décision du ministre n’avait donc « ni pour objet, ni pour effet de permettre une expérimentation sur l’embryon ». C’est rappeler à quel point l’interprétation des normes législatives encadrant l’usage de l’embryon et de ces cellules était sujet à controverse.
  • [12]
    Le Sénat a inversé le principe posé dans le projet gouvernemental et imposé l’article L. 2151?5 al. 1 csp « la recherche sur l’embryon est interdite ».
  • [13]
    L. 2151?5 al. 4 csp.
  • [14]
    La recherche apporte ainsi une solution au sort des embryons cryoconservés, 176 500 dans l’azote liquide au 31 décembre 2006, avec une augmentation de 25 % par rapport à 2005 selon le rapport annuel de l’Agence de la Biomédecine de 2007. Après l’autorisation d’une soixantaine de protocole de recherche, l’Agence estime à 171 417 le nombre d’embryons cryoconservés au 31 décembre 2010 dont 3,9% sans projet parental, voir le site de l’agence.
  • [15]
    CC, décis. n° 2004?498 DC du 29 juillet 2004, loi relative à la bioéthique, JO, 7 août 2004, p. 14077 voir notamment J.?C. Galloux, « L’article 17 de la loi bioéthique relatif à la question de la brevetabilité du corps humain n’est pas contraire à la Constitution », JCP, 2004 (44?45), pp. 1979?1982.
  • [16]
    Actuel Art. L. 2151?5.?II.
  • [17]
    Le préambule de la Constitution de 1946 d’où découle depuis, traditionnellement, le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
  • [18]
    Al. 10 et 11 du préambule de 1946.
  • [19]
    X. Bioy, « À la recherche de l’embryon… », note sous CC, décis. n° 2013?674 DC, 1er août 2013, Constitutions, 2013, p. 443.
  • [20]
    La jurisprudence du Conseil d’État sur le lancer de nain en reste la célèbre illustration fondatrice : CE, 27 octobre 1995, Commune de Morsang?sur?Orge, Rec. Lebon p. 372
  • [21]
    Rappelons que le Conseil constitutionnel a dénié toute valeur constitutionnelle à la protection du patrimoine génétique de l’humanité, considérant 11 de la décision n° 94?343/344 DC.
  • [22]
    Cette consultation citoyenne était constituée en triptyque : un site internet accessible à tous (70 000 visites), 226 événements sous l’égide des espaces éthiques en santé mais aussi des communautés religieuses et des groupes de réflexion spirituelle et, enfin, trois forums régionaux.
  • [23]
    C. Bergoignan?Esper, « Les états généraux de la bioéthique, un tournant dans la réflexion », D., 2009, p. 1837.
  • [24]
    A. Graf, « États généraux de la bioéthique », Rapport final, 1er juillet 2009, p. 36, consultable sur : http://www.etatsgenerauxdelabioethique.fr/uploads/rapport_final.pdf.
  • [25]
    Ibid.
  • [26]
    Article 47 de la loi de 2011.
  • [27]
    X. Bioy, « À la recherche de l’embryon… », op. cit.
  • [28]
    Convention pour la protection des Droits de l’Homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine signée à Oviedo, le 4 avril 1997.
  • [29]
    Ratification le 13 décembre 2011, avec une entrée en vigueur le 1er avril 2012, alors que la France l’avait signé en 1997.
  • [30]
    Article 18 §1 et §2 de la Convention.
  • [31]
    En 2008 a été constitué, à la demande du Président de la République, un comité dirigé par Mme Simone Veil afin d’étudier la nécessité de compléter le préambule de la Constitution de 1958 par des normes de bioéthique.
  • [32]
    Pour plus de développement voir G. Nicolas, « De l’universalité de la bioéthique : réflexions sur la transposition des valeurs de la Convention d’Oviedo dans le Pacifique », in Mélanges en l’Honneur du Professeur Mémeteau, B. Py et F. Vialla (sous la dir.), Bordeaux, LEH, à paraître.
  • [33]
    Plutarque, Vie de Solon, XXI.
  • [34]
    Voir à ce propos, P. Malaurie, « Le mariage à la française », Petites affiches, 29 juin 2009 no 128.
  • [35]
    F. Chénedé, « Le constitutionnalisme est un justnaturalisme : brèves réflexions sur un débat doctrinal relatif au mariage entre personnes de même sexe », Petites affiches, no 37, 20 février 2013, p. 6.
  • [36]
    CC, décis. no 2013?669 DC, 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, considérant no 92, JORF du 18 mai 2013 p. 8281.
  • [37]
    M. Aligisakis et S. Dascalopoulos, Multiculturalismes et Identités en Europe, Édition L’Harmattan/ Academia, Publications de l’Institut Européen de l’Université de Genève (10), p. 33.
  • [38]
    J. Carbonnier, Droit civil, t. 1, Introduction, Les personnes, la famille, l’enfant, le couple, Puf, coll. Quadrige manuels, 2004, no 522, p. 1139.
  • [39]
    P. Malaurie, « Le mariage à la française », op. cit., p. 6.
  • [40]
    Sur ces tendances contraires, v. G. Raoul?Cormeil, « La question du genre dans le Code civil », RRJ, 2009, pp. 183?208.
  • [41]
    L. Burgorgue?Larsen, « La jurisprudence des Cours constitutionnelles européennes en droit des personnes et droit de la famille », in Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, Dalloz, no 39, 2013/2, p. 227.
  • [42]
    CC, décis. no 2013?353 QPC, 18 octobre 2013, M. Franck M. et autres [Célébration du mariage – Absence de « clause de conscience » de l’officier de l’état civil], JORF du 20 octobre 2013 page 17279.
  • [43]
    Le régime des empêchements reste majoritairement inchangé comme le champ des interdits sociaux qui se voient réaffirmés par le législateur à l’image du maintien de la prohibition de la polygamie proscrite depuis plus de deux siècles, dans les mêmes termes, à l’article 147 du Code civil. L’article 162 relatif à la prohibition de l’inceste, mis à part quelques modifications sensibles, conserve les mêmes termes. En ce sens, il convient de relever que l’intitulé « mariage pour tous » n’est pas la formule législative la plus appropriée pour qualifier le mariage à la française, certes caractérisé par le principe de liberté, voir en ce sens, P. Malaurie, « Le mariage à la française », Petites affiches, op. cit., p. 6?7, mais aussi l’exclusion constante de certaines catégories de « prétendants » au mariage.
  • [44]
    Concernant le droit des succession, voir le statut du conjoint survivant tel qu’il résulte de la loi no 2001?1135 du 3 décembre 2001, ainsi que les modalités nouvelles de versement de la pension de réversion dont bénéficient aujourd’hui les conjoints de même sexe.
  • [45]
    Voir à cet effet les récentes décisions rendues en la matière par le juge constitutionnel. CC, no 2011?631 DC, 9 juin 2011, Loi relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, JORF du 17 juin 2011, p. 10306 CC, no 2013?667 DC, 16 mai 2013, Loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, JORF du 18 mai 2013 p. 8258.
  • [46]
    CC, décis. no 2013?669 DC, 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, considérant no 92, op. cit. Voir en ce sens, G. Drago, « La loi et l’étendue du contrôle du Conseil constitutionnel », RFDA 2013 p. 936, à propos de la restriction du champ du contrôle du juge constitutionnel en l’espèce.
  • [47]
    Dans sa nouvelle formulation, l’article 143 du Code civil dispose désormais que : « le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe ».
  • [48]
    Lequel dispose que : « l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités » relèvent du domaine de la loi.
  • [49]
    CC, décis. no 2010?92 QPC, 28 janvier 2011, Mmes Corinne. C et autre, JORF du 29 janvier 2011, p. 1894.
  • [50]
    T. Douville, « Brèves réflexions sur la suppression de la condition d’altérité sexuelle des époux », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 20.
  • [51]
    Idem, p. 21.
  • [52]
    Voir en ce sens, G. Raoul?Cormeil, « Le rayonnement de l’alliance après la loi no 2013?404 du 17 mai 2013 », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 59.
  • [53]
    V. Goesel?Le Bihan, « Le contrôle de proportionnalité exercé par le Conseil constitutionnel, technique de protection des libertés publiques ? », Jus politicum, no 7, mars 2012.
  • [54]
    F. Chénedé, et P. Deumier, « L’œuvre du Parlement, la part du Conseil constitutionnel en droit des personnes et droit de la famille », in les nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, no 39, 2013, pp. 7?8.
  • [55]
    Ibidem.
  • [56]
    P. Murat, « La Constitution et le mariage : regard d’un privatiste », Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, Dalloz, 2013/2 no 39, p. 21.
  • [57]
    Idem, p. 20?21.
  • [58]
    Voir à ce propos l’article 34 de la Constitution qui fait une allusion très indirecte à l’institution matrimoniale en incluant dans le domaine de la loi l’édition des règles concernant les régimes matrimoniaux.
  • [59]
    « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ».
  • [60]
    CC, décis. no 2010?92 QPC, Mmes Corinne. C et autre, op. cit.
  • [61]
    Lettre de saisine des 60 députés (Site du Conseil constitutionnel).
  • [62]
    Voir à cet effet, l’article de X. Dupré de Boulois, « Le mariage homosexuel, la Constitution et l’agrégée des facultés de droit », RDLF, chronique no 23, p. 2012.
  • [63]
    D. Rousseau, « Le « mariage pour tous » relève bien de la compétence du législateur ordinaire », Gazette du Palais, no 348, 13 décembre 2012, p. 5.
  • [64]
    CC, décis. no 86?224 DC, 23 janvier 1987, Conseil de la concurrence, considérant no 15, JORF du 25 janvier 1987, p. 924.
  • [65]
    CC, décis. no 88?244 DC, 20 juillet 1988, Loi portant amnistie, considérant no 12, JORF du 21 juillet 1988, p. 9448.
  • [66]
    CC, décis. no 98?407 DC, 14 janvier 1999, Loi relative au mode d’élection des conseillers régionaux et des conseillers à l’Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux, considérant no 9, JORF du 20 janvier 1999, p. 1028.
  • [67]
    Commentaire de la décision no 2013?669 DC, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, Les cahiers du Conseil constitutionnel, p. 15.
  • [68]
    CC, décis. no 2006?542 DC, 9 novembre 2006, Loi relative au contrôle de la validité des mariages, JORF du 15 novembre 2006, p. 17115. Un principe qu’il consacre sur le fondement de la liberté personnelle rattachée à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme.
  • [69]
    J.?M. Larralde, « Le mariage pour tous est conforme à la Constitution (Quelques considérations d’un publiciste sur la décision du Conseil constitutionnel no 2013?669 DC du 17 mai 2013) », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 7.
  • [70]
    CC, décis. no 80?119 DC, 22 juillet 1980, JORF du 24 juillet 1980, p. 1868.
  • [71]
    Ainsi au considérant no 15 de la décision précitée, le Conseil remarque que : « conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs, figure au nombre des “principes fondamentaux reconnus par les lois de la République” celui selon lequel, à l’exception des matières réservées par nature à l’autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l’annulation ou la réformation des décisions prises, dans l’exercice des prérogatives de puissance publique ».
  • [72]
    Voir en ce sens, E. Millard, « Le droit constitutionnel de la famille », in Code civil et Constitution, M. Verpeaux, (Ed.) (2005), p. 65?81.
  • [73]
    CC, décis. no 2010?92 QPC, 28 janvier 2011, Mmes Corinne. C et autre, op. cit.
  • [74]
    À savoir la violation du principe de liberté individuelle, de la liberté de mariage, du droit de mener une vie familiale normale et enfin, du principe d’égalité.
  • [75]
    J.?F. de Montgolfier, « La QPC et le droit de la famille au Conseil constitutionnel », AJ fam., 2012, p. 578.
  • [76]
    Voir en ce sens, CC, décis. no 93?321 DC, 20 juillet 1993, Loi réformant le code de la nationalité, JORF du 23 juillet 1993, p. 10391, et décis. no 89?254 DC, 4 juillet 1989, Loi modifiant la loi no 86?912 du 6 août 1986 relative aux modalités d’application des privatisations, JORF du 5 juillet 1989, p. 8382.
  • [77]
    J. Hauser, « Le Conseil constitutionnel et le droit de la famille », in Dossier : le Conseil constitutionnel et les diverses branches du droit, Cahier du Conseil constitutionnel no 16, 2004, p. 1.
  • [78]
    N. Merley « La non?consécration par le Conseil constitutionnel de principes fondamentaux reconnus par les lois de la République », RFDA mai?juin 2005, p. 621 sq.
  • [79]
    E. Millard, « Le droit constitutionnel de la famille », in Code civil et Constitution, op. cit.
  • [80]
    CC, décis. no 71?44 DC, 16 juillet 1971, JORF du 18 juillet 1971, p. 7114.
  • [81]
    CC, Décis. no 2011?157 QPC du 5 août 2011, JORF du 6 août 2011, p. 13476.
  • [82]
    CC, décis. no 79?107 DC, 12 juillet 1979, Ponts à péages, Rec. p. 31. Cette décision donna la première occasion au Conseil de formuler le considérant de principe selon lequel : « Si le principe d’égalité devant la loi implique qu’à situations semblables il soit fait application de solutions semblables, il n’en résulte pas que des situations différentes ne puissent faire l’objet de solutions différentes ». Le Conseil constitutionnel, au sujet du principe d’égalité s’est, en effet, rapidement retrouvé dans une situation délicate, puisqu’il a vocation à apprécier les conditions dans lesquelles le législateur met en œuvre un principe constitutionnel énoncé en termes laconiques. La formulation d’un tel considérant permit ainsi d’assouplir la rigidité formelle du principe d’égalité à la française pour permettre une interpretation plus moderne des garanties qu’il contient.
  • [83]
    Voir à ce propos, l’arrêt, CE, Ass., 28 mars 1997, Sté Baxter, où le Conseil d’État indique que l’administration n’a pas l’obligation de traiter différemment les situations différentes.
  • [84]
    Voir, notamment, CC, décis. no 2010-24 QPC du 6 août 2010, Association nationale des sociétés d’exercice libéral et autres, cons. 5 et 6.
  • [85]
    J.?R. Binet, « Conformité de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe à la Constitution », Dr. fam., no 7, juill. 2013, comm. 98.
  • [86]
    CC, décis. no 2011?155 QPC du 29 juillet 2011, Mme Laurence L. (Pension de réversion et couples non mariés), JORF du 30 juillet 2011, p. 13048.
  • [87]
    F. Dekeuwer?Défossez « Le mariage et l’adoption par les couples homosexuels : la question juridique », Études 11/2012 (Tome 417), p. 465.
  • [88]
    C. Neirinck, « Ce qui change », Dr. Famille, juin 2013, repère no 6.
  • [89]
    Voir sur ce sujet, « Mariage pour tous : égalité des droits sociaux », relatif au projet de Loi no 344, 7 nov. 2012, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, in Les Cahiers sociaux, no 252, Chron., 31 mai 2013, p. 149.
  • [90]
    À l’exception toutefois des règles relatives à la filiation biologique.
  • [91]
    Voir à ce propos, L. Brunet, « Le Conseil constitutionnel face à la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe : coup d’arrêt ou coup d’essai de la reconfiguration du droit de la famille ? », RDSS 2013. 908.
  • [92]
    G. Raoul?Cormeil, « La consécration de la vie familiale homosexuelle par la loi du 17 mai 2013 », Gazette du Palais, 24 août 2013 no 236, pp. 10?11.
  • [93]
    M. Leroyer, « La loi du 17 mai 2013… Au passé, présent et futur », chron., D., 2013, p. 1698.
  • [94]
    G. Champenois, « L’adoption et la loi du 17 mai 2013. Quelques observations sur l’ouverture de l’adoption aux couples de personnes de même sexe », Defrénois, no 13?14 du 15 juillet 2013, p. 731.
  • [95]
    L’article 8 de la loi du 17 mai 2013 ajoute un troisième alinéa à l’article 360 du Code civil, aux termes duquel « L’enfant précédemment adopté par une seule personne, en la forme simple ou plénière, peut l’être une seconde fois, par le conjoint de cette dernière, en la forme simple ».
  • [96]
    CEDH, 24 juin 2010, arrêt no 30141/04, Schalk et Kopf c/ Autriche.
  • [97]
    Un dernier statut qui fut pourtant refusé quelques temps auparavant dans une décision no 2010?39 QPC, 6 octobre 2010, JORF du 7 octobre 2010, p. 18154.
  • [98]
    CC, décis. no 2013?669 DC, Loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, considérant no 42. À noter que si un tel constat est exprimé dans le considérant no 42 de la décision présentement commentée, le raisonnement le fondant est initié, pour sa part, dès le considérant no 36.
  • [99]
    L’article 16?7 dispose que : « Toute convention portant sur la gestation pour le compte d’autrui est nulle ».
  • [100]
    CC, décis. no 2013?669 DC, Loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, considérant no 44.
  • [101]
    CC, décis. no « Ponts à péages » no 79?107 DC, op. cit.
  • [102]
    J.?M. Larralde, « Le mariage pour tous est conforme à la Constitution (Quelques considérations d’un publiciste sur la décision du Conseil constitutionnel no 2013?669 DC du 17 mai 2013) », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 5.
  • [103]
    Voir à ce sujet, A. Levade, « Discrimination positive et Principe d’Égalité en Droit Français », Pouvoirs no 111, Seuil, Paris, 2004.
  • [104]
    Notamment, au travers de l’instauration de règles nouvelles en matière de présomption de paternité par la loi du 16 novembre 1912 et via la réforme du régime d’adoption des mineurs par la loi du 19 juin 1923.
  • [105]
    V. Legrand, « Les implications de la loi autorisant le mariage pour tous en droit international privé », Petites affiches, no 167, 21 août 2013, p. 6.
  • [106]
    En d’autres termes, cet alinéa permet, en France, la célébration du mariage entre personnes de même sexe, dès lors que l’un des deux ou les deux conjoints sont de nationalité étrangère, nonobstant la prohibition de ce mariage par sa ou leur loi personnelle.
  • [107]
    A. Gosselin?Gorand, « La loi du 17 mai 2013 ou la promotion internationale du mariage des couples de personnes de même sexe », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 24.
  • [108]
    Idem, p. 25.
  • [109]
    L’article L. 331?7 nouveau disposant désormais que : « La période d’indemnisation prévue au présent article peut faire l’objet d’une répartition entre les parents adoptifs lorsque l’un et l’autre ont vocation à bénéficier d’une indemnisation ou d’un maintien du traitement en cas de cessation de leur travail ou de leur activité dans le cadre d’une adoption ».
  • [110]
    6. CSS, art. L. 722?8 et s.
  • [111]
    Voir sur ce sujet, P. Coursier, « De quelques effets en matière de protection sociale de la loi portant “mariage pour tous” », op. cit., p. 29.
  • [112]
    G. Drago, « La loi et l’étendue du contrôle du Conseil constitutionnel », op. cit., p. 937.
  • [113]
    Dans les deux premiers, ces règles sont formellement issues de la loi de finances pour 2008 (L. 24 déc. 2007, n° 2007?1822, art. 9, I) qui n’a pas toutefois modifié matériellement le droit antérieur (CGI, art. 1685 et 1685 bis, anciens) – du moins à la lumière de l’éclairage rétrospectif qu’en a donné le Conseil d’État (CE, 17 mai 2013, n° 348892, Fernandez?Hevia : Dr. fisc. 2013, n° 39, comm. 449, concl. A. Bonnet, jugeant, dans le silence de l’art. 1685, 2, ancien du CGI, que la solidarité établie en matière d’IR ne concerne que la période d’imposition commune). Dans le dernier cas, ces règles sont celles posées dès l’origine, sous réserve de leur adaptation lors de l’introduction du PACS (L. 15 nov. 1999, n° 99?944, art. 6, III).
  • [114]
    En outre, comme tous les litiges nés de l’exercice de la « juridiction gracieuse » de l’administration fiscale, les contestations dirigées contre un refus de décharge de solidarité relevaient, non pas du juge « de l’impôt » mais du juge de l’excès de pouvoir –plus précisément du tribunal administratif statuant en premier et dernier ressort (CJA, art. R. 811?1, al. 2. – V. confirmant cette solution CE, 1er déc. 2008, n° 299200, Amiel : RJF 02/2009, n° 164 ; BDCF 02/2009, n° 25, concl. Cl. Legras) la décision pouvant d’ailleurs être rendue par un juge unique (CJA, art. R. 222?13, 8°, et, à compter du 1er janv. 2014, 7°).
  • [115]
    V. sur ce point Commission des finances de l’Ass. nat., Rapport gén. présenté par M. G. Carrez sur le projet de loi de finances pour 2008, n° 276, tome II, p. 38.
  • [116]
    À l’inverse, la décharge ne peut être accordée lorsque le demandeur et son conjoint lato sensu se sont frauduleusement soustraits (ou ont tenté de le faire) au paiement des impositions considérées, notamment en organisant leur insolvabilité (CGI, art. 1691 bis, II?3).
  • [117]
    Une telle imprécision textuelle est plutôt rare. La notion de « disproportion marquée » se retrouve ainsi à l’article 168 du CGI (détermination d’un revenu minimal forfaitaire en fonction de certains signes extérieurs où elle fait l’objet d’une définition légale précise.
  • [118]
    La même position a été adoptée précédemment à propos des règles prévues par la loi du 31 déc. 1968 relativement à la suspension de la prescription quadriennale des créances détenues sur les personnes publiques, CC, décis. n° 2012?256 QPC, 18 juin 2012). Cela ne devrait pas conduire, toutefois, à considérer qu’une disposition législative qui a pour seul objet d’organiser le recouvrement d’une créance fiscale ne peut, en aucun cas, se heurter au principe de l’égalité devant les charges publiques.
  • [119]
    Cet objectif est le suivant : concilier la garantie du recouvrement des créances fiscales résultant de la solidarité des conjoints avec la prise en compte des difficultés financières et des conséquences patrimoniales pouvant naître, pour l’un ou l’autre des conjoints divorcés ou séparés, de cette solidarité de paiement pour la période antérieure au divorce ou à la séparation.
  • [120]
    CC, décis. n° 96?385 DC, 30 déc. 1996, Loi de finances pour 1997, à propos d’un mécanisme de plafonnement des effets du quotient familial plus favorable aux veufs ayant élevé au moins un enfant qu’aux contribuables célibataires ou divorcés répondant à cette même condition, § 4 à 7).
  • [121]
    CE, QPC, 29 avr. 2013, n° 364240, Bosc : Dr. fisc. 2013, n° 25, comm. 350.
  • [122]
    On peut penser que les décisions concernant la décharge de plein droit relèvent de la « juridiction contentieuse » de l’administration fiscale. Dans leur phase juridictionnelle, ces litiges ressortissent à la compétence du juge fiscal (et, en première instance du TA statuant collégialement et à charge d’appel, sauf pour les litiges se rapportant exclusivement une décharge de solidarité concernant le paiement de la TH).
  • [123]
    Plus précisément, le président de la section du contentieux du Conseil d’État statuant par ordonnance.
  • [124]
    CE, 24 juin 2013, n° 365253, Gohier, Dr. fisc. 2013, n° 36, comm. 402, concl. C. Legras.
  • [125]
    Dans leur rédaction issue de la loi du 30 déc. 2000 de finances rectificative pour 2000.
  • [126]
    CC, décis. n° 2013?340 QPC, 20 sept. 2013, Gohier, JO du 22 sept. 2013, p. 15823 ; note Ch. de la Mardière Dr. fisc. 2013, n° 43 comm. 493.
  • [127]
    Cass. soc., 6 mars 2001, Lagarrigue c/ Graber, RJS 5/2001 n° 576.
  • [128]
    L’article L. 1235?3 du nouveau code du travail fait référence au « juge ».
  • [129]
    Voir CE, 20 juin 2012, n° 345120, Lavanant, Dr. fisc. 2012, n° 30, comm. 391 (a contrario) et les termes mêmes de la décision de renvoi.
  • [130]
    Application de CC, décis. n° 2013?331 QPC, 5 juill. 2013 ; CC, décis. n° 2010?9 QPC, 2 juill. 2010.
  • [131]
    CC, décis. n° 99?424 DC, 29 déc. 1999, cons. 17?23.
  • [132]
    Par ex. : CE, 6 janv. 1984, n° 32528, Banque de l’Union Européenne, RJF 3/1984, n° 287 ; CE, 27 oct. 2010, n° 3150527, Scherrer, Dr. fisc. 2010, n° 50, comm. 591.
  • [133]
    Il est vrai qu’aucune décision antérieure à la décision de renvoi n’a explicitement tranché la question. Cependant, le caractère constant de la jurisprudence peut être déduit des seuls termes de la décision de renvoi. En ce sens CC, décis. n° 2011?185 QPC, 21 oct. 2011.
  • [134]
    Solution implicite.
  • [135]
    En ce sens Ch. de la Mardière, op. cit.
  • [136]
    CC, décis. n° 2013?672 DC du 13 juin 2013.
  • [137]
    CC, décis. n° 85?187 DC du 25 janvier 1985, État d’urgence en Nouvelle?Calédonie, cons. 10 ; n° 89?256 DC du 25 juillet 1989.
  • [138]
    CC, décis. n° 99?410 DC du 15 mars 1999, Loi organique relative à la Nouvelle?Calédonie ; LPA, 21 septembre 1999, n° 188, p. 8 et JCP éd. G, 2000, I, p. 201, note B. Mathieu et M. Verpeaux ; RFDC, 1999, p. 328, note J. Pini, et p. 334, note J.?Ch. Car ; AJDA, 1999, p. 324, comm. J.?E. Schoettl ; J.?P. Camby, « Une loi promulguée frappée d’inconstitutionnalité ? », RDP, 1999, p. 657 ; J.?H. Robert, « Inconstitutionnalité de l’inéligibilité attachée à la faillite personnelle », JCP éd. G., 1999, I, 151, p. 1290 ; du même auteur, « Le Conseil constitutionnel au tribunal de commerce. Dorénavant, les faillis ne sont plus déchus du droit d’exercer des fonctions électives », Droit pénal, 1999, n° 68, p. 14 ; A.?M. Le Bos?Le Pourhiet, « Nouvelle?Calédonie : la nouvelle mésaventure du positivisme », RDP, 1999, p. 1005.
  • [139]
    CC, décis. n° 99?414 DC du 8 juillet 1999, cons. 2 ; n° 99?416 DC du 23 juillet 1999, cons. 37.
  • [140]
    Voir not. W. Jeng Seng, « Le contrôle de la loi promulguée dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel : un mystère en voie de dissipation ? », RFDC, 2005, n° 61, p. 35 ; comp. pour une tentative de dévoiler sur ce point une « architecture de motivations demeurée jusque?là implicite », V. Goesel?Le Bihan, « Le non?contrôle par le Conseil constitutionnel de certaines dispositions confirmatives : entre logique imposée et logiques choisies », RFDC, 2008, n° 73, p. 3.
  • [141]
    CC, décis. n° 2012?659 DC du 13 décembre 2012, n° 2012?662 DC du 29 décembre 2012.
  • [142]
    J. Ferstenbert, « Le contrôle, par le Conseil constitutionnel, de la régularité constitutionnelle des lois promulguées » RDP, 1991, p. 339, spéc. p. 370.
  • [143]
    CC, décis. n° 2013?672 DC du 13 juin 2013.
  • [144]
    CC, décis. n° 2012?654 DC du 9 août 2012, cons. 83, n° 2012?656 DC du 24 octobre 2012, cons. 19, n° 2012?659 DC du 13 déc. 2012, cons. 14 et 15, n° 2012?662 DC du 29 déc. 2012, cons. 20 à 22 ; RFDA, 2013, p. 1, note B. Genevois.
  • [145]
    CE, 25 juillet 2013, n° 366345, Tables.
  • [146]
    Rappelons qu’une QPC doit, pour pouvoir être renvoyée au Conseil constitutionnel, concerner une disposition qui « n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances » : article 23?2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 (nous soulignons).
  • [147]
    Sur ces aspects, v. M. Disant, Droit de la question prioritaire de constitutionnalité, Lamy, Axe Droit, 2011, pp. 226 et s.
  • [148]
    « La QPC posée sur un texte déjà déclaré inconstitutionnel. Peut?on tuer un mort ? », Libre propos in JCP éd. G., n° 41, 7 octobre 2013, n° 1036.
  • [149]
    Communiqué des services du Conseil constitutionnel en forme de note juridique intitulé « Effets du contrôle exercé par le Conseil constitutionnel sur la loi promulguée » ; rappr. J.?E. Schoettl, « Mise en œuvre de l’accord de Nouméa », AJDA, 1999, p. 324, spéc. pp. 332?333.
  • [150]
    Une telle position fût notamment défendue par MM. Genevois, Favoreu, et Ferstenbert ; v. spéc., du dernier nommé, « Le contrôle par le Conseil constitutionnel de la régularité constitutionnelle des lois promulguées », RDP, 1991, p. 339.
  • [151]
    Sur le sujet, M. Disant, L’autorité de la chose interprétée par le Conseil constitutionnel, LGDJ, tome 135, 2010.
  • [152]
    CE, Sect., 22 juin 2007, M. Lesourd, Leb. p. 253 ; RFDA, 2007, p. 1077, concl. Olson.
  • [153]
    Voir M. Disant, « L’identification d’une disposition n’ayant pas déjà été déclarée conforme à la Constitution », Constitutions, Dalloz, 2010, n° 4, p. 541.
  • [154]
    CC, décis. n° 2013?672 DC du 13 juin 2013, cons. 14.
  • [155]
    Sur le sujet, M. Disant, « Les effets dans le temps des décisions QPC. Le Conseil constitutionnel, ‘‘maître du temps’’ ? Le législateur, bouche du Conseil constitutionnel ? », Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2013, n° 40, p. 63.
  • [156]
    Cass., civ. 1, 15 décembre 2011, Marzec, n° 10?27.473, bull.
  • [157]
    CC, décis. n° 2012?284 QPC du 23 novembre 2012, cons. 5.
  • [158]
    CC, décis. n° 2012?284 R QPC du 27 décembre 2012.
  • [159]
    Cass. crim. 23 avril 2013, n° 13?90.003.
  • [160]
    Selon ce texte, « le fait de percevoir frauduleusement ou de tenter de percevoir frauduleusement des prestations au titre de l’aide sociale est puni des peines prévues par les articles 313?1, 313?7 et 313?8 du code pénal ».
  • [161]
    Sur l’avenir des QPC incorrectement formulées, v. C. Ambroise?Casrérot, « La QPC et le droit pénal de fond » in La QPC et la matière pénale, C. Courtin (dir.), Bruylant, 2013, p. 42.
  • [162]
    CC, décis. n° 2013?328 QPC, 28 juin 2013, cons. n° 2.
  • [163]
    Sur cette question v. G. Drago, Contentieux constitutionnel français, Puf, 2011, n° 519, p. 479 ; X. Magnon (dir.), La Question Prioritaire de Constitutionnalité. Principe généraux, pratique et droit du contentieux, Lexis Nexis, 2e éd., 2013, n° 336, p. 273 et s.
  • [164]
    Cons. n° 6.
  • [165]
    CC, décis. n° 2012?240 QPC, 4 mai 2012, M. Gérard D., JORF du 4 mai 2012, p. 8015 ; D., 2012, p. 1372, note S. Détraz ; RPDP, 2012, p. 389, note V. Malabat ; RSC, 2012, p. 367, note X. Pin ; idem, p. 380, note Y. Mayaud ; AJ Pénal, 2012, p. 482, obs. J.?B. Perrier ; RFDC, 2013, p. 209, note S. Anane.
  • [166]
    CC, décis. n° 2011?163 QPC, 16 septembre 2011, M. Claude N., JORF du 17 septembre 2011, p. 15600 ; AJ Pénal, 2011, p. 588, obs. C Porteron ; RSC, 2012, p. 221, note B. de Lamy ; RFDC, 2012, p. 421, obs. O. Baldès.
    CC, 17 février 2012, 2011?222 QPC, M. Bruno L., JORF du 18 février 2012, p. 2846 ; RSC, 2012, p. 146, obs. Y. Mayaud.
  • [167]
    V. Peltier, « De la résolution constitutionnelle des concours de qualifications », Dr. pén., 2013, comm. 149.
  • [168]
    CEDH, 4e sect., 22 janvier 2013, Camilleri c/ Malte, req. n° 42931/10 ; v. Dalloz actualités, 13 février 2013, obs. O. Bachelet.
  • [169]
    CC, décis. n° 2010?15/23 QPC, 23 juillet 2010, Région Languedoc?Roussillon et autres, JORF du 24 juillet 2010, p. 13727 ; D., 2010, p. 2686, note C. Lacroix ; Gaz. Pal., 12 août 2010, p. 10, note M. Touillier ; RFDC, 2011, p. 111, note Ph. Bonfils.
  • [170]
    CC, décis. n° 2010? 81 QPC, 17 décembre 2010, M. Boubakar B., JORF du 19 décembre 2010, p. 22375 ; AJ Pénal, 2011, p. 140, obs. L. Ascenci ; RFDC, 2011, p. 595, obs. S. Anane.
  • [171]
    CC, décis. n° 2011?160 QPC, 9 septembre 2011, M. Hovanes A., JORF du 10 septembre 2011, p. 15273 ; AJ Pénal, 2012, p. 46, obs. J.?B. Perrier ; RFDC, 2012, p. 426, obs. S. Anane.
  • [172]
    S. Détraz, « Inconstitutionnalité des incriminations doublons faisant l’objet d’une répression disparate », Gaz. Pal., 4?5 septembre 2013, n° s 247 à 248, p. 15.
  • [173]
    ARCEP.
  • [174]
    CE, 29 avril 2013, décis. n° 356976.
  • [175]
    V. encore récemment, CC, décis. n° 2012?280 QPC, 12 octobre 2012, JORF du 13 octobre 2012, p. 16031, s’agissant de l’Autorité de la concurrence.
  • [176]
    CEDH, Engel et a. c/ Pays?Bas, 8 juin 1976, req. n° 5100/71 et a.
  • [177]
    L’impartialité a un double sens : l’impartialité objective qui renvoie à des caractères organique et fonctionnel et l’impartialité subjective qui renvoie au for intérieur du juge. Aussi, certains préfèrent parler « d’impartialité fonctionnelle » et « d’impartialité personnelle », R. Koering?Joulin, « Le juge impartial », Justice, n° 10, avril/juin 1998, p. 2 ; F. Tulkens et H.D Bosly, « La notion de tribunal indépendant et impartial. La situation en Belgique », RSC, 1990 p.677. La référence à ces deux notions est aussi présente dans certaines décisions de la Cour EDH, voir notamment CEDH, 26 octobre 1984, De Cubber c/?Belgique, req. n° 9186/80, § 25 et 26 ; CEDH, 23 juin 1981, Le Compte, Van Leuven et De Meyer c/?Belgique, req. n° 6878/75 ; 7238/75, § 58.
  • [178]
    O. Le Bot, « Pouvoir de sanction des AAI : première censure pour violation des principes d’indépendance et d’impartialité », Constitutions, 2013, p. 437.
  • [179]
    F. Kuty, L’impartialité du juge en procédure pénale, Larcier, 2005, p. 256 et s.
  • [180]
    CC, décis. n° 95?630 DC, 2 février 1995, JORF du 7 février 1995, p. 2097.
  • [181]
    « La procédure doit garantir la séparation des autorités chargées de l’action publique et des autorités de jugement ».
  • [182]
    F. Kuty, op. cit., p. 378.
  • [183]
    CEDH, 24 mai 1989, Hauschildt c/ Danemark, req. n° 10486/83.
  • [184]
    CEDH, 11 septembre 2009, Dubus SA c/ France, req. n° 5242/04.
  • [185]
    CC, 8 juillet 2011, 2011?147 QPC, JORF du 9 juillet 2011, p. 11979, RSC, 2011, p. 728, note Ch. Lazerges ; AJ Pénal, 2011, p. 596, obs. J.?B. Perrier ; RTD Civ., 2011, p. 756, obs. J. Hauser ; RFDC, 2012, p. 168, obs. Ph. Bonfils.
  • [186]
    Ces notions d’apparence d’impartialité ou d’impartialité apparente sont utilisées par différents auteurs de la doctrine, voir notamment : S. Josserand, L’impartialité du magistrat en procédure pénale, LGDJ, Bibliothèque des sciences criminelles tome 33, 1998, notamment p. 10 § 15, p. 237 § 58, p. 290 § 80, pp. 417?418, pp. 592?593 § 12?13 ; F. Kuty, op. cit., pp. 255?267, pp. 313?315 ; M.?A. Frison?Roche, « L’impartialité du juge », D. 1999, p. 53, § 16 ; V. Magnier, « La notion de justice impartiale », JCP G, 6 septembre 2000, n° 36, p. 1595 ; C. Goyet, « Remarques sur l’impartialité du tribunal », D. 2001, p. 328 et s. ; G. Capashen, « Petites histoires à propos de la juste distance pour juger… », D. 2004, p. 2939.
  • [187]
    Selon l’article 1349 « les présomptions sont des conséquences que la loi ou le magistrat tire d’un fait connu à un fait inconnu ». Il s’agit d’opérer un déplacement de l’objet de la preuve. Ainsi, lorsque la preuve du fait litigieux est très difficile voire impossible à apporter, l’objet de la preuve va être déplacé vers d’autres faits, ceux?ci sont prouvés plus aisément car ils présentent généralement un caractère apparent. De ce factum probans, ce fait connu, le juge ou le législateur va induire le factum probandum, le fait inconnu.
  • [188]
    Pour des exemples récents, CC, décis. n° 2012?211 QPC, 27 janvier 2012, JORF du 28 janvier 2012, p. 1674, concernant la discipline des notaires, RFDC 2012, p. 891, obs. C. Tzutzuiano ; CC, décis. n° 2012?273 QPC, 21 septembre 2012, JORF du 22 septembre 2012, p. 15025 ; CC, décis. n° 2012?280 QPC, 12 octobre 2012, JORF du 13 octobre 2012, p. 16031, concernant l’Autorité de la concurrence, Constitutions 2013, p. 95, obs. O. Le Bot ; CC, décis. n° 2012?289 QPC, 17 janvier 2013, JORF du 18 janvier 2013, p. 1293, concernant la discipline des médecins, RFDC 2013, p. 715, obs. J.?B. Perrier.
  • [189]
    CE, 29 avril 2013, n° 365705.
  • [190]
    L’article L. 3452?1 du Code des transports permet à l’autorité administrative de prononcer le retrait, à titre temporaire ou définitif, de la licence de transport intérieur ou de transport communautaire aux entreprises exerçant dans ce secteur d’activité, en cas de constat d’infraction aux règlementations des transports, du travail, de l’hygiène ou de la sécurité, constituant au moins une contravention de la cinquième classe, voire seulement de la troisième classe en cas d’infractions répétées ; en cas d’infractions délictuelles, l’article L. 3452?2 permet de prononcer au surplus l’immobilisation d’un ou de plusieurs véhicules, pour une durée de trois mois au plus. Ces sanctions sont prononcées par le préfet, après avis d’une commission des sanctions administratives.
  • [191]
    CC, décis. n° 2010?6/7 QPC, 11 juin 2010, JORF du 12 juin 2010, p. 10849 ; AJDA 2010, p. 1831, note B. Malignier ; Constitutions 2010, p. 454, obs. R. Ghevontian ; AJ Pénal 2010, p. 392, obs. J.?B. Perrier ; RFDC 2010, p. 830, obs. W. Benessiano.
  • [192]
    CC, décis. n° 2013?329 QPC, 28 juin 2013, cons. n° 3.
  • [193]
    Idem.
  • [194]
    Ibid. cons. n° 5.
  • [195]
    L’on observera cependant que pour la première fois, le Conseil applique ces exigences à une sanction prononcée par l’autorité administrative.
  • [196]
    CC, décis. n° 2010?41 QPC, 29 septembre 2010, JORF du 30 septembre 2010, p. 17783, cons. n° 5 ; JCP G 2010, note A. Lepage et H. Mastopoulou ; RFDC 2011, n° 85, p. 151, obs. M. Giacopelli. Le Conseil observe ici que si « le juge qui prononce une condamnation pour le délit de publicité mensongère est tenu d’ordonner la publication du jugement de condamnation (…) il lui appartient de fixer, en application de l’article 131?35 du Code pénal, les modalités de cette publication ». Le Conseil observe alors que le juge « peut ainsi en faire varier l’importance et la durée ». Dès lors, selon le Conseil, « le juge n’est pas privé du pouvoir d’individualiser la peine ».
  • [197]
    CC, décis. n° 2010?72/65/82 QPC, 10 décembre 2010, JORF du 11 décembre 2010, p. 21710, cons. n° 5 ; D. 2011, p. 929, obs. B. Bouloc ; AJ Pénal 2011, p. 76, obs. J.?B. Perrier ; RFDC 2011, n° 87, p. 576, obs. M. Giacopelli. Le Conseil observe, de nouveau, que le juge qui prononce une condamnation pour le délit de fraude fiscale est tenu d’ordonner « l’affichage du jugement », mais, à la différence de l’hypothèse prévue par l’article L. 121?4 du Code de la consommation, il « ne peut faire varier la durée de cet affichage fixée à trois mois par la disposition contestée » et « il ne peut davantage modifier les modalités de cet affichage prévu ». En l’absence de pouvoir de modulation, la peine est donc contraire à l’article 8 de la Déclaration de 1789.
  • [198]
    Les modalités de la publication de la sanction administrative sont fixées par l’article 44?1 du décret n° 85?891 du 16 août 1985 relatif aux transports urbains de personnes et aux transports routiers non urbains de personnes et par l’article 18 du décret n° 99?752 du 30 août 1999 relatif aux transports routiers de marchandises. Ces deux textes précisent que « la décision du préfet est publiée dans deux journaux régionaux et est affichée dans les locaux de l’entreprise pour une durée qui ne peut excéder la durée du retrait ou de l’immobilisation. Les frais de publication sont à la charge de l’entreprise ».

1 I – COMMENTAIRES DES DÉCISIONS

2 – Décision n° 2013?674 DC du 1er août 2013, Loi tendant à modifier la loi n° 2011?814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l’embryon et les cellules?souches embryonnaires

3 LA CONSTITUTIONNALITÉ DE LA RECHERCHE EMBRYONNAIRE

4 « La recherche sur l’embryon fut une des questions des plus âprement discutées lors de l’examen de la loi de bioéthique de juillet 2011 [1] », commence par rappeler Mme Dominique Orliac dans le rapport qu’elle a établi sur la proposition de loi tendant à modifier la loi bioéthique du 7 juillet 2011. On peut ajouter que, depuis les années 80, la recherche sur les embryons nourrit le débat éthique français. Toutefois, le Conseil constitutionnel n’a été que peu sollicité sur les lois de bioéthique, il n’a pas été saisi a priori sur la révision de 2011, par exemple [2]. Si la question prioritaire de constitutionnalité permet d’obtenir plus d’éléments d’analyse constitutionnelle, aucune décision, a posteriori ou a priori n’avait encore été rendue sur la recherche embryonnaire. Sans qu’elle soit révolutionnaire, sur le fond ou sur la forme, cette décision a le mérite de donner, pour la première fois, une position du Conseil sur cette recherche particulière qui conduit à la destruction de son objet. Recherche particulière surtout car, l’objet en question, certes après 36 semaines de gestation, devient potentiellement, une fois né vivant et viable, une personne humaine. Le statut de l’embryon se cache donc, perceptiblement, derrière le régime législatif de la recherche.

5 En 1994, lors des premières lois de bioéthique [3], le législateur a choisi, au nom du respect de la dignité de cet être porteur de vie humaine, de poser l’interdiction absolue d’en faire un objet de recherche. Cette position a été arrêtée lors du débat parlementaire : les sénateurs n’ont pas suivi les députés et ont introduit une interdiction totale [4]. Ils se sont opposés, de la sorte, à la production d’embryons en vue de la recherche, mais ils ont laissé aux couples, sous réserve de leur accord écrit, la possibilité d’autoriser des études à titre exceptionnel sur les embryons conçus in vitro. La finalité de ces études devait être strictement médicale et ne devait pas porter atteinte à l’intégrité de l’embryon [5]. Ces études étaient, alors, soumises au contrôle de la Commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction et du diagnostic prénatal [6]. Or, enfermée dans un moratoire de 5 ans, cette prise de position nationale a été très décriée, dès l’entrée en vigueur de la loi, et combattue vertement par les scientifiques qui y voyaient de l’hypocrisie [7].

6 Dès 1997, s’axant sur les « importantes perspectives dans les recherches thérapeutiques [8] », le Comité consultatif national d’éthique avait proposé d’aménager la loi pour que les embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental puissent faire l’objet d’une recherche, tout en interdisant la création d’embryons de novo à des fins de recherche. Cette proposition de changement avait, par suite, été réitérée dans le cadre de la préparation de la révision de la loi de 1994 [9]. Cette nécessité de revoir la loi avait également été relayée par l’Académie de médecine et l’ordre des médecins ainsi que par le Conseil d’État qui avait proposé une solution similaire [10]. Le projet de loi gouvernemental ayant été adopté en première lecture devant l’Assemblée nationale, le ministre de la recherche, Roger?Gérard Schwartzenberg, avait, en mai 2002, fait droit aux pressions des chercheurs en autorisant, sur le fondement du décret du 23 février 2000, l’importation de cellules?souches embryonnaires [11].

7 Depuis cette date, les pressions n’ont cessé pour que la législation française assouplisse les conditions d’encadrement de la recherche embryonnaire. Il faut cependant attendre 2013 et le texte soumis à l’examen a priori du Conseil constitutionnel pour que le Parlement franchise l’étape de l’autorisation de la recherche embryonnaire. Il aura donc fallu trente ans de débat éthique pour que les toutes premières divisions cellulaires du commencement de la vie humaine soient considérées comme pouvant être l’objet d’une recherche. Ce débat s’est construit lentement, orchestré par le Comité consultatif d’éthique et les états généraux qu’il a, à présent, à charge d’organiser. Pourtant, les premiers griefs soulevés par les auteurs de la saisine portent sur le fait que cette révolution attendue de 2013 n’a pas été soumise à un processus de consultation attendu (B). Si la recherche du consensus éthique s’est formalisée depuis trente ans, ce qui semble constant c’est la définition de l’objet confié aux chercheurs : l’embryon issu de l’assistance médicale à la procréation qui ne fait plus l’objet d’un projet parental. Cette dichotomie entre les embryons en attente d’implantation in utero et les autres est le socle du statut de l’embryon précisé par le texte de 2013 par le législateur (A).

8 A – Le projet parental au cœur du statut de l’embryon

9 La loi du 6 août 2004 a apporté une avancée tiède qui ne satisfaisait personne : l’interdiction est maintenue [12] mais assortie d’exceptions qui permettent la recherche embryonnaire sous conditions et avec le contrôle de l’Agence de la biomédecine nouvellement créée à cet effet. Le matériel expérimental est limité aux « embryons conçus in vitro dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation qui ne font plus l’objet d’un projet parental [13] ». C’est la première fois que le législateur français fait de l’embryon un support de recherche s’il n’est plus objet d’un projet parental [14]. Le Conseil constitutionnel n’est pas interrogé sur cette disposition puisque, saisi sur la constitutionnalité du projet de loi, il ne l’est que sur les dispositions portant sur la brevetabilité du corps humain [15].

10 Il serait inexact d’en déduire que le législateur qualifie l’embryon d’objet, il est évident qu’« objet d’un projet parental » fait référence à la finalité de l’usage de l’embryon cryoconservé, non à son statut. Pourtant, le statut de l’embryon est, dès lors, lié au projet parental d’un couple. Objet d’un projet parental, il sera implanté et deviendra personne humaine potentielle. Si ce projet a disparu pour le couple géniteur, la chance d’être implanté subsiste avec le don à un couple stérile. Le don d’embryon est alors la transmission du projet parental d’un couple à un autre. La finalité reste la même, satisfaire un projet parental, seuls les parents sont différents. Le couple peut aussi choisir de le détruire ou de le donner à la science, ce qui signifiera sa destruction, mais après avoir servi l’intérêt général… Ce devenir s’apparente peu à celui d’une personne, fut?elle potentielle, mais bien plus à celui d’une chose sur laquelle les parents exercent leur propriété, c’est?à?dire la possibilité de le céder, le détruire, le faire « fructifier » par une implantation in utero pour avoir une chance de devenir une personne. C’est donc bien la volonté du couple géniteur qui oriente l’embryon vers le statut de chose ou celui de personne.

11 Depuis la loi de 2004, l’origine des embryons, objet de recherche, n’a pas changé, elle a été réaffirmée en termes identiques dans la loi de 2011, comme dans celle de 2013 [16]. Seule la finalité de la recherche change, pour s’élargir : « finalité thérapeutique majeure » en 2004, « progrès médicaux majeurs » en 2011, « la recherche, fondamentale ou appliquée, s’inscrit dans une finalité médicale » dans la version de 2013. Saisi, le Conseil constitutionnel doit alors se prononcer sur le renversement du principe d’interdiction de la recherche comme sur l’élargissement de sa finalité dans un contexte de protection du commencement de la vie. Il est intéressant de souligner que les auteurs de la saisine ne remettent pas en cause la recherche sur l’embryon au nom de la protection de ce dernier mais les conditions de cette recherche jugée attentatoire au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine. Sans étonnement, le Conseil reprend, dans les considérants 14 [17] et 15 [18], les mêmes fondements que dans la décision 94/343/344 DC. Listant les conditions d’encadrement de la recherche, notamment la finalité médicale, la Haute instance retient que le législateur a encadré les recherches sur l’embryon d’un régime d’autorisations doté de garanties effectives qui ne « méconnaissent pas le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine ».

12 Lorsque le Conseil constitutionnel a utilisé le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine en 1994, il était interrogé sur la constitutionnalité des conditions législatives de l’assistance médicale à la procréation et du statut du corps humain. Il a alors considéré qu’il était nourri des principes législatifs énoncés dans la loi : « la primauté de la personne humaine, le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie, l’inviolabilité, l’intégrité et l’absence de caractère patrimonial du corps humain ainsi que l’intégrité de l’espèce humaine », sans que ces derniers n’aient directement valeur constitutionnelle. À qui s’applique alors ce principe utilisé comme borne de la recherche embryonnaire ? Il faut nécessairement en déduire que la recherche, telle qu’elle est à présent autorisée en France, se fait dans le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie et dans le respect de la primauté de la personne humaine. La dignité de la personne humaine qui en est le garant n’est pas celle de l’embryon, qui n’est pas une personne. S’il est protégé « ce n’est que comme l’avant?garde génétique de l’humanité [19] ».

13 L’embryon humain est porteur de la dignité de son espèce. Dans le cadre d’un processus où il est voué à la destruction, c’est la finalité de son usage qui assure le respect de la dignité dont il est porteur. Utilisée dans le cadre d’un protocole qui garantit une finalité médicale, la personne potentielle, qu’il aurait pu être, s’efface pour faire de cet être un objet de recherche au service de l’humanité souffrante et/ou en quête de compréhension du processus de sa conception.

14 Cette perception confirme que le respect de la dignité s’apparente tout autant à un droit qu’à un devoir. Ce devoir est celui de tout homme [20], comme celui du législateur, de respecter l’humanité. La préservation qui est visée par la loi est bien celle de l’espèce [21]. En élargissant les finalités de la recherche embryonnaire, le législateur n’accroît pas la fragilité de l’embryon puisque seuls ceux qui sont orphelins de projets parentaux restent sacrifiés, ceux pour lesquels aucun projet de vie n’est possible. À défaut de possibilité d’implantation in utero ils ne seront pas des personnes potentielles, leur vocation est, alors, de servir l’humanité par le biais de la recherche. Le projet parental sous ce prisme de la dignité humaine s’apparente à un aiguillage : servir l’humanité en devenant une personne humaine ou la servir en collaborant à la recherche. Les parents orientent, de la sorte, entre l’implantation qui conduit à la personnalité et la destruction qui génère la réification. Il apparaît alors clairement que le statut de l’embryon est lié au projet parental. Si le législateur répugne à donner un statut explicite à l’embryon, la validation de la loi de 2013 (et du processus amorcé avant en 2004 et 2011) lui en donne clairement un qui dépend du souhait des géniteurs.

15 Finalement, ce qui est révolutionnaire ici, ce n’est pas la position du législateur puisqu’elle est constante, mais sa validation constitutionnelle par le Conseil constitutionnel. Toutefois, on peut s’étonner, comme les auteurs de la saisine, qu’une loi qui fait disparaître le principe d’interdiction de la recherche embryonnaire ne soit pas soumise à une consultation populaire, surtout si la loi antérieure le prévoit.

16 B – La démocratisation des choix éthiques

17 Le Conseil constitutionnel n’est pas seulement interrogé sur les choix éthiques du législateur mais également sur la matière utilisée pour trancher la problématique. Par l’article L. 1412?1?1 du code de la santé publique le législateur s’était, semble?t?il, contraint à soumettre au préalable « tout projet de réforme sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé » à un débat public sous forme d’états généraux. Relevons que les seuls états généraux organisés sont ceux de 2009 [22]. L’ampleur de cette consultation avait conduit le Professeur Bergoignan?Esper, à écrire que « la réflexion bioéthique vient de connaître un tournant qui la modifie pour l’avenir » et « la possibilité d’installer la réflexion bioéthique dans l’opinion » [23]. Ils ont permis d’avoir une tonalité du positionnement de la population française sur la protection de l’embryon et l’intérêt de le soumettre à la recherche. Le rapporteur retranscrit que les avis des citoyens font bien ressortir une différence entre un régime d’autorisation sous conditions pour la recherche sur les cellules?souches et l’embryon qui ne ferait plus l’objet d’un projet parental et un régime d’interdiction portant sur « toute recherche sur l’embryon dans le cadre d’un projet parental » [24]. Il précise également que « les citoyens n’ont pas souhaité emboîter le pas du Conseil d’État qui, dans son rapport d’avril 2009 en vue de la révision des lois de bioéthique préconise le passage à un seul régime : celui de l’autorisation encadrée [25] ».

18 La loi du 7 juillet 2011 correspond parfaitement à ces éclairages citoyens. Fixés par la loi, les principes éthiques contenus dans le texte ont toutefois été affichés dans une pérennité réduite, comme c’est le cas depuis 1994, à sept ans [26]. Deux ans plus tard, ils ont été balayés par une proposition de loi, inscrite dans une procédure d’urgence avec vote bloqué, sans consultation préalable du CCNE. Au?delà des contestations dans l’hémicycle, on comprendra que ce choix procédural ait été ciblé par les auteurs de la saisine. Or, le Conseil se contente de rappeler que l’article 39 de la Constitution partage l’initiative législative entre le Gouvernement et le Parlement, aucune obligation d’initiative gouvernementale n’est établie pour la bioéthique. L’article L. 1412?1?1 imposant la consultation populaire est de nature législative, le législateur n’enfreint pas la Constitution en se désavouant d’une législature à l’autre, particulièrement en cas de changement de majorité. On rejoindra alors le Professeur Bioy pour soulever que seule une disposition constitutionnelle pourrait contraindre les évolutions bioéthiques à la soumission de la consultation populaire [27].

19 Sortant du cadre du contrôle de constitutionnalité, la légitimité de l’évolution législative ne se trouve pas dans la Constitution mais dans les engagements internationaux de la France. L’article 1er de la loi de 2011 a autorisé la ratification de la Convention des droits de l’homme et de la biomédecine [28] qui permet la recherche embryonnaire. Par l’adhésion [29] à ce texte, la France enracine ses choix éthiques dans les valeurs européennes. Elle admet que l’embryon puisse faire l’objet de recherche à partir du moment où il n’a pas été créé à cet effet [30]. La conventionalité de la loi de 2013 est assurée, elle correspond pour la première fois, mais pas la dernière, au choix retenu en 2008 de ne pas compléter la Constitution par des dispositions relatives à la bioéthique [31] mais de privilégier l’engagement international. Comme l’abolition de la peine de mort en son temps, la levée de l’interdiction de la recherche embryonnaire inscrit la France dans une universalité européenne [32].

20 Guylène Nicolas

21 – Décision no 2013?669 DC du 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe

22 « Il est un acte politique d’ôter à la différence entre les êtres son caractère d’éternité [33] ». Cette citation héritée de la Grèce antique ne pouvait trouver résonance plus actuelle à l’heure où le Conseil constitutionnel, saisi d’un recours a priori en date du 23 avril 2013, avalise l’option égalitaire choisie par le législateur qui entraîne la métamorphose de l’institution fondatrice et pluriséculaire du « mariage à la française [34] ». Il est également très intéressant de relever que l’essentiel de l’opposition juridique que connut en France le « mariage pour tous » s’est cristallisé autour de l’argument constitutionnel [35] dont la décision no 2013?669 DC [36] représente le dernier acte.

23 Par ailleurs, si les « pesanteurs historiques », les notions d’origines et de traditions nationales sont communément admises comme des facteurs précurseurs de la dynamique politique [37], il est aux suites de cette décision du Conseil accrédité un autre constat. Celui de la particulière porosité des ordres juridiques à l’air du temps et aux revendications issues de la modernité. Et ce, y compris pour l’institution du mariage pourtant qualifié de « plus vieille coutume de l’humanité » [38].

24 À ce titre, la décision no 2013?669 DC rendue par le Conseil constitutionnel, en date du 17 mai 2013, validant l’intégralité de la loi portant « mariage pour tous » confirme, avant tout, la haute perméabilité du constitutionnalisme contemporain face aux concepts d’individualisme et de pluralisme des droits. Par cette décision, en effet, celui?ci confirme l’idée que le mariage, mode fondamental d’insertion du couple dans la société [39], est un concept ouvert susceptible de diverses options politiques, sociales ou éthiques, modulable en fonction des conceptions idéologiques dominantes du moment. Ainsi, en ne soulevant aucune objection de constitutionnalité d’office et en ne formulant qu’une seule réserve d’interprétation, dans une décision s’étirant sur plus de 90 considérants, la Haute juridiction accompagne le processus législatif de valorisation d’autres structures familiales en lien avec le pluralisme des modes de conjugalité. Et si depuis quelques années, s’observe un processus typique visant à abolir les genres en matière civile [40], le Conseil constitutionnel, à l’image de certains de ces homologues européens, en prend acte et accompagne ce qui fut qualifié de « métamorphose civilisationnelle » aux allures contentieuses [41] en permettant l’indifférence du mariage quant au genre et à l’appartenance sexuelle des conjoints.

25 En permettant ainsi l’alignement du régime juridique du mariage des couples homosexuels sur celui des couples hétérosexuels le Conseil autorise, par ailleurs, une refonte inédite du droit civil, qui put être à de nombreuses reprises qualifiée d’« évolution?révolution » par la doctrine, étant acquis que la configuration juridique du statut du mariage irradie l’ensemble du droit des personnes et du droit de la famille. L’effet mécanique qui résulte de la déclaration de constitutionnalité du statut du mariage homosexuel impactant logiquement très largement les institutions de la filiation et de l’adoption qui sont désormais accessibles aux personnes de même sexe. Au?delà des conséquences législatives directes précitées en matière civile, de nombreux effets indirects s’observent, par ailleurs, dans un ensemble relativement étendu de domaines juridiques, à l’image du droit social, du droit de la sécurité sociale ou encore du droit international privé. Des effets indirects qui se prolongent, enfin, dans la décision no 2013?353 QPC [42] du 18 octobre 2013 qui dénie le bénéfice aux officiers d’état civil d’une clause de conscience leur permettant de ne pas célébrer un mariage homosexuel dans le but d’assurer l’effectivité du nouveau statut ainsi proclamé.

26 S’agissant du fond de la réforme stricto sensu, il convient de remarquer que le législateur s’est nettement inscrit dans une logique de législation par à?coups et a minima. Partant, celui?ci n’a pas pris le parti de formuler de nouvelle définition générale au sujet du mariage ni, par ailleurs, celui de faire évoluer les conditions de fond de cette institution [43]. Sur le plan technique, il consacre simplement l’égalité des couples hétérosexuels et homosexuels devant le mariage et harmonise l’ensemble des effets entre toutes les catégories de conjoints. À l’issue de ce texte, les couples de même sexe disposent de choix plus étendus qu’en matière de Pacs et de concubinage pour organiser les effets de leur union sur leur patrimoine et peuvent, désormais, se consentir des avantages matrimoniaux. À l’identique des couples hétérosexuels, ils pourront donc bénéficier du versant patrimonial relatif aux libéralités ainsi qu’au droit des successions qui leur étaient jusque?là fermés [44]. En outre, le législateur a simplement émis quelques règles en matière de cérémonie selon lesquelles, le premier alinéa de l’article 75 du Code civil ne fait plus mention de la lecture de l’article 220 du Code civil tandis que dans son dernier alinéa à la mention « mari et femme » est substitué le terme d’« époux ». Par ailleurs, il agrémente l’esprit et la lettre de l’article 165 de l’idée de « cérémonie républicaine » et rénove ainsi le formalisme cérémonial du mariage en l’intégrant, de manière officielle, dans la symbolique de l’ensemble républicain. Un appel fait à l’esprit historique de la République qui accentue en réalité la dynamique laïque de l’institution en la déconnectant définitivement du cadre du mariage religieux.

27 La procédure d’adoption de la loi du 17 mai 2013 impliquait, quant à elle, tant des règles d’ordre temporel que constitutionnel dont le Conseil a pu estimer la pleine adéquation avec la Constitution. Le cadre d’adoption de la loi du 17 mai 2013 permet aussi de mettre en évidence la première utilisation sous la XIVe législature de l’outil procédural du temps législatif programmé.

28 Sur la forme, le Conseil constitutionnel consacrant ainsi 13 considérants en réponse à l’argumentaire des requérants confirme, sans surprise, l’existence d’un contrôle minimal en matière de procédure d’adoption des lois en général. Il lui revient, en effet, de censurer la seule erreur manifeste dans l’élaboration du travail législatif comme dans la conduite des débats parlementaires. Ce confinement spécifique du contrôle du juge constitutionnel en la matière semble du reste d’application constante en matière de saisine a priori[45]. Dès lors, les arguments développés par la Haute juridiction se résument à des considérations d’ordre strictement technique celle?ci réduisant son contrôle au minimum constitutionnel admissible en matière de travail parlementaire.

29 Par ailleurs, si la décision no 2013?669 DC se révèle, en bien des aspects, être une décision?confirmation d’un dénouement constitutionnel attendu, celle?ci semble nettement innover en matière de régime juridique des Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République comme dans l’entendement spécifique que le juge constitutionnel fait du principe d’égalité. Articulée autour de l’examen de la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel et de ses effets en matière d’établissement de la famille, la décision du Conseil se veut donc marquée tant par la volonté de consolider certaines tendances jurisprudentielles que par celle d’innover dans le cadre de l’interprétation de certains principes ou d’une certaine catégorie de principes constitutionnels.

30 Ainsi, dans sa décision no 669 DC, le Conseil constitutionnel reconnaît, d’une part, la constitutionnalité du statut législatif inhérent au mariage homosexuel tel que consacré par la loi du 17 mai 2013, portant « mariage pour tous » (A). D’autre part, il confirme la constitutionnalité de ses effets dans l’ensemble des domaines juridiques concernés, en validant notamment, en matière civile, l’alignement du régime juridique de la filiation et de l’adoption sur le régime dont bénéficient déjà les couples hétérosexuels (B).

31 A – La confirmation de la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel

32 Dans la première partie de sa décision, des considérants no 17 à 31, la Haute juridiction confirme la constitutionnalité de la procédure d’adoption de la loi du 17 mai 2013 et consacre la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel (1). Par ailleurs, elle refuse l’édification, au rang de Principe Fondamental reconnu par les lois de la République, du principe d’altérité sexuelle anciennement contenu dans le régime juridique du mariage et profite de sa décision pour formuler l’existence d’une nouvelle condition de fond concernant le processus de cristallisation des PFRLR (2). Enfin, dans le cadre de son raisonnement, le Conseil, systématise la logique d’une égalité différenciée entre couples de même sexe et semble standardiser un entendement singulier du principe d’égalité (3).

33 1 – La réaffirmation de la compétence du législateur concernant l’évolution du statut du mariage

34 Dans le cadre de leur saisine a priori, les requérants multipliaient les griefs d’inconstitutionnalité tant à l’égard du statut du mariage homosexuel qu’à l’égard de ses effets en matière d’adoption et de filiation. Ils contestaient, par ailleurs, la constitutionnalité des effets indirects de la loi du 17 mai 2013 en matière de droit social, de droit de la sécurité sociale et de droit international privé.

35 À titre liminaire, dans ses considérants no 14 à 16, le Conseil commence par présenter les normes constitutionnelles applicables à l’espèce et, donc, le faisceau des normes de références fondant la substance de son raisonnement. Sont, en premier lieu, cités, l’article 34 de la Constitution, selon lequel « la loi fixe les règles concernant : […] l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités », et l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, aux termes duquel « la loi […] doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Enfin, est également cité, le droit à mener une vie familiale normale qui résulte du dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 qui dispose que : « La nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». D’entrée, le Conseil constitutionnel entend donc restreindre le rayonnement de la problématique du statut du mariage homosexuel à cet ensemble limité de normes constitutionnelles, ce qui réduit par effet automatique la portée de son propre contrôle sur cette question. Une amplitude doublement diminuée du fait que la Haute juridiction énonce dans son considérant no 92, qu’il n’y a lieu : « de soulever d’office aucune autre question de constitutionnalité [46] ».

36 Dans un premier temps, l’argumentaire des requérants se concentre sur la question particulière de la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel, indépendamment de ses conséquences en matière d’adoption et de filiation. C’est donc, ici, l’article 1 de la loi du 17 mai 2013, portant « mariage pour tous », relatif à l’article 143 nouveau du Code civil [47] qui est déféré à l’appréciation du Conseil. D’un point de vue formel, les requérants contestent la régularité du recours à la procédure législative visant à réformer l’institution du mariage, initiée sur le fondement de l’article 34, au détriment de la compétence du pouvoir constituant consacré à l’article 89 de la Constitution. Dans ce cadre, ces derniers soutiennent qu’en supprimant la condition inhérente à l’altérité sexuelle entre les époux, composante fondamentale du mariage républicain à la française, ledit article entraîne une telle métamorphose de l’institution maritale que l’acte excède la seule compétence du pouvoir législatif. Ce grief tiré de l’incompétence du législateur se base, entre autres, sur l’absence au sein de l’article 34 de la Constitution, de toute mention visant expressément l’institution du mariage, ledit article ne comportant de dispositions qu’à l’égard des régimes matrimoniaux. Les requérants entendent donc, ici, distinguer entre le statut de l’institution du mariage et ses effets. En conséquence, ils en déduisent le confinement de la compétence matérielle du législateur à la réglementation exclusive des effets juridiques du mariage et en réfèrent à la supposée compétence du pouvoir constituant vis?à?vis de l’encadrement des évolutions propres au statut de l’institution elle?même.

37 Sur ce premier point, le Conseil constitutionnel, dans son considérant no 20, évacue brièvement l’argumentaire des requérants en se contentant de relever que : « les règles relatives au mariage relèvent de l’état des personnes ; que, par suite, le grief tiré de ce que l’article 34 de la Constitution ne conférait pas au législateur la compétence pour fixer les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage doit être écarté ». Sans plus de motivation, la Haute juridiction fait donc de la référence indirecte au mariage contenue dans l’article 34 de la Constitution [48], le fondement de la compétence exclusive du législateur concernant les conditions d’évolution du statut juridique du mariage. Elle consacre ainsi la constitutionnalité de la procédure législative permettant l’ouverture de l’institution maritale aux personnes de même sexe. Sans surprise, le Conseil prit donc le parti de réaffirmer, dans cette décision, la compétence législative du Parlement en la matière qu’il avait déjà indirectement consacré dans sa décision no 2010?92 QPC du 28 janvier 2011 [49].

38 Dans un second temps, au?delà des aspects procéduraux inhérents à l’évolution de l’institution du mariage, c’est le principe même de la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel qui était mis en cause par les requérants.

39 Au fond, les requérants contestaient la constitutionnalité de la disparition de la condition de l’altérité sexuelle des époux comme un préalable juridique indispensable dans l’accès à l’institution maritale. En réponse à cet argument, le Conseil relève dans son considérant no 22 qu’en : « ouvrant l’accès aux couples de personnes de même sexe le législateur a estimé que la différence entre les couples formés d’un homme et d’une femme et les couples de personnes de même sexe ne justifiait plus que ces derniers ne puissent accéder au statut et à la protection juridique attachés au mariage ; qu’il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en matière de mariage, de cette différence de situation ». Partant, il reconnaît la constitutionnalité de l’extension du mariage aux couples homosexuels et confine ainsi, a minima, son contrôle en se retranchant entièrement derrière la volonté du législateur. C’est donc, ici, le principe de la neutralité sexuelle du mariage qui est consacré par le Conseil constitutionnel [50] et dont découle l’identité des droits pour les couples homosexuels et hétérosexuels. Dès lors, le Conseil, accepte dans cette décision, la constitutionnalité d’une conception juridique réduite du mariage en ce qu’il ne se constitue désormais plus que du seul couple, indépendamment du critère du genre de la personne [51]. De même, cette institution devenue indifférente au genre de la personne, c’est, ici, la valeur juridique et le rôle social de l’appartenance sexuée dans le mariage civil qui font logiquement l’objet d’un affaiblissement, cette notion se voyant désormais relayée au rang de composante facultative du mariage alors qu’elle constituait, hier, une véritable condition de fond. Une affirmation qui aura, en soi, nous le verrons dans la deuxième partie de cette étude, d’importantes conséquences sur les autres branches du droit, en entraînant la neutralisation par ricochet de nombreuses règles juridiques prenant en compte le genre des individus, notamment en matière de sécurité sociale.

40 Par ailleurs, le Conseil choisit, dans cette décision, de conforter l’établissement d’une conception juridique ouverte du mariage. Cette institution pluriséculaire et remarquablement statique, sur le plan juridique, devient susceptible de plusieurs options politiques et se présente désormais comme un concept sensible à l’écoulement du temps et perméable à l’évolution des mœurs. Enfin, il est utile de remarquer que le Conseil accompagne également à l’échelle constitutionnelle, le renversement du sens même de l’union matrimoniale. Désormais fondée sur le principe de l’égalité juridique et l’identité de valeur sociale des diverses formes de mariages, ladite institution se déleste du même coup de son caractère historique d’engagement reconnu d’utilité publique visant à la perpétuation et au renouvellement des générations [52].

41 L’ensemble des considérants examinant la question de la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel se veut marqué par un fort retrait du Conseil constitutionnel qui en réfère au statu quo législatif et renvoie de manière systématique à l’appréciation souveraine du législateur en matière de choix de société. Une attitude qui renforce également l’idée qu’il existe bien un « champ de non?contrôle implicite [53] » en matière de droit des personnes. Il revient, en effet, au seul législateur de se saisir des mutations sociales au sein de l’ordre juridique, de prendre acte des revendications des modèles sociaux dominants et de légiférer en conséquence. En ce sens, la doctrine relève qu’en matière de droit des personnes et de droit de la famille la démarcation des compétences entre le Parlement et le Conseil constitutionnel semble plus nette qu’en toute autre matière, le Conseil s’interdisant tout contrôle des choix discrétionnaires faits par le législateur [54]. Un effet d’autolimitation assumé par le juge, qui semble démarquer en la matière, très strictement, la zone du respect des principes constitutionnels de l’appréciation d’opportunité politique [55]. La décision no 669 DC confirme ainsi très nettement la déférence traditionnelle que la Haute juridiction reconnaît au Parlement spécifiquement quand celui?ci légifère en matière civile.

42 Cette décision permet de plus de mettre en exergue les liens complexes parfois fuyants que constitutionnalisme et droit civil entretiennent dans notre pays. Dans ce cadre, la doctrine relève qu’en matière de famille et de mariage, il existerait, d’un côté, une tradition constitutionnelle faible et une tradition civiliste forte de l’autre [56]. En effet, le mariage fait, tout particulièrement en France [57], l’objet d’une certaine « désaffection » constitutionnelle puisqu’il n’est invoqué qu’indirectement dans l’article 34 [58] de la Constitution de 1958 et dans l’alinéa 10 du Préambule de 1946 [59].

43 Dès lors, le juge confirme logiquement dans sa décision, qu’en la matière, après avoir fait preuve d’attentisme et de neutralité en amont du travail législatif comme le démontre sa décision QPC no 2010?92 QPC [60], premier acte du débat constitutionnel autour du mariage homosexuel, celui?ci, en aval, enregistre quasi mécaniquement l’option choisie par le législateur en faisant preuve d’un self?restraint évident.

44 À ce stade de notre étude, il convient d’examiner l’autre grief d’inconstitutionnalité opposé par les requérants au statut du mariage homosexuel, tiré de la supposée existence d’un PFRLR relatif à l’altérité sexuelle de l’institution maritale. Un argumentaire qui donna notamment l’occasion au Conseil constitutionnel, selon une logique plus procédurale que matérielle, de formuler l’existence d’une nouvelle condition de fond concernant l’édification des PFRLR qui emporte pour cette catégorie spécifique de normes constitutionnelles d’importantes conséquences sur son devenir.

45 2 – Le refus d’ériger un PFRLR inhérent à l’altérité sexuelle du mariage et la création d’une nouvelle condition dans l’édification des PFRLR

46 D’un point de vue substantiel, les requérants invoquent, ici, la violation par le nouveau libellé de l’article 143 du Code civil du principe fondamental reconnu par les lois de la République selon lequel le « mariage est l’union d’un homme et d’une femme ». Une argumentation de nature juridique à laquelle viennent se greffer des considérations d’ordre « justnaturalistes » qui se basent sur la supposée existence d’un principe de droit naturel irriguant les droits de l’homme et fondant le « contrat social de la République » ainsi que « la Constitution sociale de la France » [61]. Dans cette optique particulière, la doctrine remarque que la majeure partie des oppositions doctrinales faites à la constitutionnalité de la loi portant « mariage pour tous » se fonde sur une instrumentalisation des ressources constitutionnelles dans le but d’en faire « l’expression positive d’une sorte de droit naturel qui surplomberait les lois » [62]. Quoi qu’il en soit, ce type d’argumentation fondée ou non en droit revêt un caractère inédit dans le cadre de la motivation d’une saisine du Conseil constitutionnel et il est intéressant d’analyser la réponse ou plutôt l’absence de réponse directe aux arguments de cet ordre qui y est faite par la Haute juridiction.

47 En effet, dans son considérant no 21, le Conseil constitutionnel, sans s’attarder sur le caractère justnaturaliste de l’argumentaire des requérants, réaffirme que : « la tradition républicaine ne saurait être utilement invoquée pour soutenir qu’un texte législatif qui la contredit serait contraire à la Constitution qu’autant que cette tradition aurait donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois de la République au sens du premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ; que, si la législation républicaine antérieure à 1946 et les lois postérieures ont, jusqu’à la loi déférée, regardé le mariage comme l’union d’un homme et d’une femme, cette règle qui n’intéresse ni les droits et libertés fondamentaux, ni la souveraineté nationale, ni l’organisation des pouvoirs publics, ne peut constituer un principe fondamental reconnu par les lois de la République au sens du premier alinéa du Préambule de 1946 ». De même, dans son considérant no 25, le Conseil constitutionnel confirme que la suppression de la condition du genre comme condition de validité du mariage ne contredit aucun texte ni principe de valeur constitutionnelle.

48 En conséquence, la Haute juridiction énonce clairement, qu’en l’état actuel du droit, le mariage hétérosexuel n’est pas un principe d’ordre constitutionnel [63] pas plus que la condition de genre relative à l’altérité sexuelle ne s’intègre dans un ensemble juridique latent permettant son édification au statut de PFRLR. Ce faisant, et malgré l’apparente banalité de la motivation du considérant, ici étudié, le Conseil constitutionnel dit en réalité bien plus qu’il n’y paraît sur la notion de Principe fondamental reconnu par les lois de la République, son contenu mais également sur ses tendances à venir.

49 Premièrement, le Conseil indique expressément que désormais seuls les trois domaines juridiques spécifiques que sont les droits et libertés fondamentaux, la souveraineté nationale et enfin l’organisation des pouvoirs publics permettront d’invoquer la technique des PFRLR. Ce faisant, ce dernier semble opéré une nouvelle délimitation de nature tripartite, voir un rétrécissement du champ matériel des PFRLR. En effet, jusqu’alors, seules trois conditions cumulatives avaient expressément été dégagées par le Conseil constitutionnel et faisaient l’objet d’une réaffirmation constante. La première exige que tout PFRLR puise son origine dans une loi adoptée dans le cadre d’un régime républicain antérieur à 1946 [64] tandis que la seconde requiert la proclamation de ce principe sans interruption ni exception. Elle interdit également qu’une loi y ait dérogé sous les régimes antérieurs à l’entrée en vigueur de la Constitution de 1946 [65]. Enfin, la troisième condition commande que le principe en question revête, tout à la fois, un degré de généralité et une importance suffisante pour pouvoir prétendre au statut de PFRLR [66].

50 Au sujet de cette dernière condition, notons par ailleurs, que le Commentaire aux Cahiers du Conseil constitutionnel de la décision no 2013?669 DC du 17 mai 2013 [67] présente celle?ci directement en lien avec l’exigence : « d’intéresser les domaines essentiels pour la vie de la Nation, comme les droits et libertés fondamentaux, la souveraineté nationale ou l’organisation des pouvoirs publics ». Une exigence censée avoir été consacrée dans le considérant no 9 de la décision no 98?407 DC du 14 janvier 1999, alors qu’au sein dudit considérant le Conseil se contente de remarquer que : « la règle invoquée ne revêt pas une importance telle qu’elle puisse être regardée comme figurant au nombre des “principes fondamentaux reconnus par les lois de la République” mentionnés par le premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ; que, par suite, le grief doit être rejeté ».

51 L’évolution sémantique du libellé de cette condition dans la décision no 2013?669 DC est pourtant de taille, comme le sont ses implications matérielles. En effet, le lien exprès qui est ici fait par la Haute juridiction entre le champ matériel des PFRLR et cette nouvelle précision jurisprudentielle emporte de nombreuses conséquences. En premier lieu, le mode d’interprétation du premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 se voit constitutionnellement optimisé en ce qu’il s’enrichit d’un paramètre de référence décisif s’agissant de la définition générale des Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. Ensuite, le concept même de PFRLR se trouve précisé, car le caractère fondamental d’un principe donné dépendra désormais nécessairement du domaine matériel d’intervention spécifique de ce dernier.

52 En effet, l’examen du degré d’importance d’une règle législative dans l’œuvre interprétative du juge constitutionnel ne se fait plus selon les mêmes critères ni la même latitude d’action selon que le concept de « l’importance suffisante » d’une disposition est rattaché (ou non) à des domaines spécifiques d’interventions de la loi. Le processus même de détermination de l’importance suffisante d’une loi en matière de PFRLR se trouve modifié dans le même temps qu’il entraîne son cantonnement automatique aux domaines de la vie de la Nation, de l’organisation des pouvoirs publics et des droits fondamentaux. Aux suites de la décision du Conseil, l’interprétation constitutionnelle de la condition de l’importance suffisante d’une loi républicaine en vue de son édification en PFRLR se confondra désormais avec l’examen de son champ d’application matériel.

53 Dans la décision no 2013?669 DC, le Conseil constitutionnel consacre ainsi l’ajout d’une nouvelle condition pour admettre l’existence d’un PFRLR qui porte sur le domaine de la règle législative invoquée et permet, dès lors une acceptation restrictive du champ d’action des PFRLR qui ne seront, pour l’avenir, dégagés que dans ces trois domaines particuliers.

54 Par ailleurs, notons qu’il est tout de même rapidement évacué par le Conseil la question de la connexité entre la notion de mariage et celle de droits fondamentaux puisque l’on pourrait aisément soutenir qu’une telle institution s’intègre tant dans les problématiques de droit interne via le principe constitutionnel de la liberté du mariage [68] que celles européennes de droit au respect de la vie privée et familiale et de l’interdiction des discriminations respectivement prévus dans les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme [69]. Sur ce point précis, le Commentaire aux cahiers de la décision no 2013?669 DC relève que puisque l’extension du mariage aux couples homosexuels ne restreint en aucun cas les droits et libertés des couples hétérosexuels, la thématique des droits fondamentaux ne serait, dès lors, pas concernée par cette question.

55 Si en effet, le critère matériel relatif aux domaines d’intervention des PFRLR n’était pas pertinent en l’espèce, il convient de relever que le critère temporel, était pourtant, quant à lui, bien respecté par l’expression : « le mariage est l’union d’un homme et d’une femme ». Présente depuis plus de deux siècles dans nos législations, ce principe n’a, en effet, jamais connu de remise en cause ni de rupture dans sa proclamation. D’un point de vue formel enfin, il n’y a nul doute à considérer que le caractère républicain des dispositions du Code civil fait débat. L’on garde, cependant, en mémoire, la particulière réactivité dont avait fait preuve le Conseil, dans une décision du 22 juillet 1980 [70], en inférant du principe de séparation des pouvoirs, un PFRLR relatif à l’indépendance des juridictions administratives en établissant un raisonnement contextualisé de la norme constitutionnelle, largement fondé sur le passé national et la symbolique historique de cette pratique en France [71] et ce en dépit de législation proprement républicaine.

56 Dans ce contexte, comme le relève la doctrine, la logique suivie en l’espèce par le Conseil est, en tout état de cause, plus procédurale que matérielle [72] et quand bien même le contenu du principe selon lequel : « le mariage représente l’union d’un homme et d’une femme » aurait vocation à être érigé en PFRLR, l’application stricte des conditions du régime de cette catégorie comme l’émission d’une nouvelle condition pour leur reconnaissance ne pouvaient conduire qu’au rejet de cet argument. En outre, la Haute juridiction confirme ici implicitement que le concept de PFRLR est un concept vide, insusceptible de faire l’objet de définition de son contenu matériel a priori. Seule cette dernière dispose du pouvoir de reconnaître les diverses composantes de cet ensemble spécifique de normes constitutionnelles dans le cadre de son travail d’interprétation. Notons, en ce sens, qu’une lecture croisée des deux décisions relatives au mariage homosexuel, à savoir la décision du 28 janvier 2011 QPC, Mme Corinne C. et autres[73], et la présente décision commentée, révèle que si un tel principe avait existé, le Conseil aurait probablement saisi l’occasion de l’officialiser en reconnaissant la constitutionnalité du principe de l’altérité sexuelle en matière de mariage en réponse aux divers moyens allégués par les requérantes [74].

57 Enfin, deux autres tendances jurisprudentielles se trouvent ici confirmées par la Haute juridiction. D’une part, la confirmation de la tendance traditionnelle de celle?ci à se refuser à conférer « une portée extensive aux normes de constitutionnalité qui intéressent le plus directement le droit de la famille [75] ». En effet, sur ce dernier point, la doctrine s’accorde à considérer que l’ensemble des saisines visant à constitutionnaliser des principes issus du droit civil se sont toutes soldées par des échecs [76]. Cette singulière résistance du Conseil se justifierait par le fort rayonnement symbolique et historique du Code civil en la matière et l’excessive politisation des recours initiés en droit de la famille et des personnes [77]. Elle se fonderait également sur l’idée que le Conseil n’a de toute façon jamais consenti à ériger un PFRLR en matière de sujets de société [78]. Définitivement, en ce domaine donc comme le relève la doctrine : « Le Code civil demeure ainsi la source substantielle et le droit constitutionnel n’a pas pour vocation de traduire les choix du moment, mais bien plutôt d’assurer le cadre comme la possibilité de ces choix [79] ». D’autre part, s’observe dans cette décision, une tendance plus contemporaine du Conseil constitutionnel ayant pour effet de cesser d’agrémenter la catégorie même des PFRLR. Il est en effet, indéniable qu’entre la constitutionnalisation du principe de liberté d’association, premier PFRLR proclamé par le Conseil [80] et le dernier relatif au droit local alsacien?mosellan [81], le rythme de consécration des PFRLR semble s’être ralenti.

58 Ainsi, dans le cadre de l’examen de la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel, les deux temps forts de la décision 669 DC résident dans la réaffirmation de l’exclusivité de la compétence parlementaire vis?à?vis des facultés d’évolutions de l’institution maritale et dans le refus du Conseil d’ériger un nouveau PFRLR via notamment l’approfondissement sur le plan technique du régime de cette dernière catégorie de principes constitutionnels.

59 Le dernier temps fort de la présente décision en matière de statut du mariage homosexuel réside, quant à lui, indéniablement dans l’entendement constitutionnel particulier qui y est fait du principe d’égalité. En effet, la mobilisation quasi?systématique du principe d’une égalité différenciée voire inversée au sein du raisonnement du juge pour en déduire la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel est assez rare dans le cadre d’une décision constitutionnelle pour être soulignée. Cette forme d’interprétation se distingue largement de la tendance jurisprudentielle dominante jusqu’ici suivie par le Conseil qui, en tant que garant de la lettre et de l’esprit du principe de l’égalité formelle et abstraite à la française, fait généralement de ce type d’entendement l’exception, dans tous les cas, rarement une constante dans son interprétation.

60 3 – Le recours à l’égalité constitutionnelle différenciée, paramètre dominant du contrôle du juge en matière de mariage homosexuel

61 Dans sa décision no 669 DC, le Conseil semble, en effet, développer un véritable effort de conceptualisation pour que les exigences constitutionnelles induites par le principe fondateur d’égalité à la française n’entrent pas en contradiction avec la loi portant « mariage pour tous ». La Haute juridiction semble ainsi pousser à l’extrême la logique d’une égalité constitutionnelle différenciée en limitant son contrôle aux différences de traitements constitutionnellement admissibles entre les couples de même sexe et les couples de sexe différent.

62 Ce potentiel de variation des applications du principe d’égalité est, en effet, particulièrement évident dans la motivation de la décision du Conseil. Alors qu’en règle générale, la tendance jurisprudentielle de celui?ci est à la réitération de l’affirmation de principe contenue dans l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen selon lequel : « la loi […] doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse », dans la décision no 2013?669 DC, celui?ci s’en écarte en privilégiant le versant de la différenciation légitime également contenu dans le principe d’égalité. À première vue, rien de nouveau dans la démarche jurisprudentielle du juge qui se fonde classiquement sur sa propre jurisprudence Ponts à Péages[82]. Toutefois, la prise en compte quasi?exclusive en matière de mariage homosexuel des nécessités d’une application différenciée du principe d’égalité en matière constitutionnelle interpelle par sa constance en ce qu’elle devient l’unique clef de lecture du juge aux fins d’attester de la constitutionnalité du nouveau statut du mariage mais surtout de ses effets en matière d’adoption et de filiation. Elle renforce, ensuite, la modernisation des modes d’interprétation de ce principe tandis qu’elle permet de préciser les implications constitutionnelles de cet entendement spécifique du principe d’égalité. La très forte mobilisation du principe d’un traitement différent pour toutes les situations différentes semble par ailleurs accréditer l’idée que le principe d’égalité ne peut trouver qu’une application constitutionnelle réduite, en la matière, tellement les caractéristiques propres aux couples de même sexes et de sexes différents s’avèrent inconciliables sur le plan législatif. Le juge constitutionnel propose donc ici une acceptation très moderne du principe d’égalité qui ne vise plus à préserver l’uniformité et l’homogénéité des régimes juridiques entre individus mais bel et bien à justifier la légitimité de leurs disparités. Une démarche pragmatique paradoxalement nécessaire pour assurer, sur le plan formel, leur égalité de traitement devant la loi.

63 Par ailleurs dans sa décision, le juge constitutionnel se réfère à un entendement constitutionnel singulier du principe d’égalité qui atteste de toute la complexité de l’interprétation des implications du principe d’égalité en matière de mariage homosexuel. Il indique que : « si, en règle générale, ce principe impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n’en résulte pas pour autant qu’il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes ». Bien que déjà formulé par le Conseil d’État dans un arrêt Société Baxter de 1997 [83] ce n’est que très récemment que la Conseil eut besoin de recourir à cette forme spécifique d’argumentation au sujet du principe d’égalité et que ce principe fit l’objet d’une formulation expresse par le Conseil [84].

64 Il y aurait, dès lors, non plus deux mais trois entendements constitutionnels propres au principe d’égalité. Le premier ordonnerait traditionnellement au législateur de traiter de manière identique toutes les situations identiques. Le second, lui concéderait la faculté de traiter de manière différente les situations différentes sous réserve du respect des exigences constitutionnelles, notamment l’interdiction des discriminations. Le troisième enfin, lui permettrait de choisir sur le plan législatif l’entre?deux juridique de ces deux principes en lui permettant de ne pas traiter forcément de manière différente les personnes se trouvant dans des situations différentes. On voit bien là tout de même l’effort de conceptualisation qui est, ici, opéré par le Conseil autour du principe d’égalité pour que la loi portant « mariage pour tous » réponde aux exigences constitutionnelles induites par ce dernier. Dans ce cadre, la doctrine relève que : « le traitement différent de situations identiques est contraire au principe d’égalité, mais pas le traitement identique de situations différentes » [85]. Par ailleurs, il est intéressant de relever le paradoxe de l’application récurrente du principe d’égalité différenciée aux dispositions de la loi relative au mariage homosexuel dès lors que l’on sait que l’objectif prioritaire de celle?ci concernait l’introduction du principe d’égalité de traitements entre couples hétérosexuels et couples homosexuels.

65 Après avoir analysé le raisonnement du juge constitutionnel visant à consacrer la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel, il convient désormais d’étudier le traitement constitutionnel que ce dernier réserve aux effets du mariage, et ce, spécifiquement en matière d’établissement de la famille. En effet, l’institution du mariage, au?delà de ses multiples effets entre les époux, a pour vocation ultime d’assurer la fondation de la famille comme de pourvoir à sa protection. En ce sens, le Conseil dans sa décision no 2011?155 QPC du 29 juillet 2011, relève de manière expresse le lien fondamental qui existe entre le mariage et l’établissement de la vie familiale en considérant que : « le régime du mariage a pour objet non seulement d’organiser les obligations personnelles, matérielles et patrimoniales des époux pendant la durée de leur union, mais également d’assurer la protection de la famille » [86]. Et si la vocation ultime du mariage intéresse l’institutionnalisation de la famille, sa fonction principale est donc également celle d’organiser la filiation [87]. Le débat constitutionnel relatif à l’accès au mariage des couples de même sexe a donc logiquement très largement mobilisé le thème juridique de l’adoption et de la filiation. Ces deux institutions de droit privé naguère fermées à la communauté homosexuelle se voient, en effet, très largement impactées par le constat de la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel. Et dans leur sillage, c’est, en réalité, une certaine conception nationale de la famille qui fut portée devant le prétoire du juge constitutionnel.

66 B – La Reconnaissance de la constitutionnalité des effets du mariage homosexuel

67 De la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel découle nécessairement la reconnaissance constitutionnelle de ses effets en matière de droit de la famille (1), mais également, leur intégration dans un ensemble juridique plus vaste intéressant tant le droit patrimonial, le droit du travail que le droit international privé et enfin le droit de la Sécurité sociale (2).

68 1 – La consécration juridique de la « vie familiale homosexuelle » et ses conséquences en matière de droit de la famille

69 Prenant acte, en matière de droit de la famille, des conséquences automatiques de l’ouverture de l’institution du mariage aux couples de même sexe, le Conseil constitutionnel valide par ricochet la constitutionnalité du principe de l’adoption et de la filiation au bénéfice des conjoints de même sexe. La décision 669 DC reconnaît ainsi l’existence juridique de la vie familiale homosexuelle. Effet mécanique de la loi du 17 mai 2013, la reconnaissance d’un tel statut entraîne l’édiction de nouvelles règles législatives qui viennent agrémenter le régime juridique de ces deux institutions privatistes vieilles de deux siècles. Dans sa décision, le Conseil constitutionnel avalise donc la démarche analogique du législateur qui transpose, à quelques exceptions près, l’ensemble du régime des droits patrimoniaux des couples hétérosexuels aux couples homosexuels. À ce titre, la doctrine relève que les couples de même sexe accèdent désormais à une forme de parenté entièrement désexualisée [88].

70 La décision no 2013?669 DC du Conseil constitutionnel étend, en conséquence, certains éléments du régime juridique des droits sociaux [89] dont bénéficiaient les couples hétérosexuels aux couples de même sexe en assurant l’égalité de leurs droits en matière d’adoption et de filiation [90]. Un alignement législatif validé intégralement par le Conseil constitutionnel qui permet l’assimilation juridique de tous les conjoints entre eux concernant l’accès à ces institutions quelle que soit leur préférence sexuelle.

71 À ce titre, le nouvel article 6?1 du Code civil dispose que : « le mariage et la filiation adoptive emportent les mêmes effets, droits et obligations reconnus par les lois à l’exclusion de ceux prévus au titre VII du livre Ier du présent code, que les époux ou les parents soient de sexe différent ou de même sexe ». Qualifié, par certains, de dispositif balai [91], ce nouveau libellé généraliste permet surtout au législateur de faire l’économie d’une réforme fastidieuse en le dispensant de se saisir, point après point, de l’ensemble des modifications législatives induites par ce nouveau texte.

72 Occupant une place de choix au sein du Titre préliminaire du Code civil, ces dispositions chercheraient également à faire rayonner ce principe général sur le droit des personnes autant que sur le droit des libéralités et des successions [92]. Dans tous les cas, le placement stratégique d’un libellé de nature égalitaire coïncide avec la vocation générale du Préambule du Code civil à fixer le cadre idéologique des orientations législatives et en dit long sur la portée de la réforme ainsi entreprise par le législateur. L’appel exprès fait à l’égalité des droits en ce domaine contribue, en premier lieu, à affirmer l’effet harmonisateur de la loi du 17 mai 2013 vis?à?vis du régime juridique des conjoints de sexe différent ou de même sexe. En outre, cette référence permet de donner le ton de la réforme relative au mariage homosexuel. De nature plus philosophique que technique [93], l’article 6?1 porte ainsi l’exigence d’égalité entre l’ensemble des couples mariés et interdit l’établissement des discriminations ou de tout régime juridique amoindri au détriment des conjoints homosexuels. Cette vocation juridique généraliste de l’article 6?1 expliquerait donc le choix du législateur de ne légiférer qu’a minima concernant l’évolution substantielle de ces institutions pluriséculaires [94].

73 Dans ce cadre, le régime juridique de l’adoption en forme simple ou plénière se trouve modifié via l’aménagement extensif de deux prérogatives principales au bénéfice des couples homosexuels. Premièrement, la loi du 17 avril 2013 offre aux couples de personnes de même sexe la faculté de devenir, ensemble et simultanément, les parents d’un même enfant, par une demande conjointe. Elle permet, ensuite, l’adjonction d’un cas dérogatoire d’adoption en permettant aux époux homosexuels d’adopter l’enfant du conjoint. Par ailleurs, l’article 8 de la loi du 17 mai 2013 envisage les effets du divorce et du remariage des parents à l’égard de l’enfant biologique ou adoptif [95]. Cette évolution se veut également conforme au droit européen. En effet, dans une décision du 24 juin 2010, Schalk et Kopf c/ Autriche[96], la Cour indique que, d’après une lecture croisée de la Convention avec la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, le principe du mariage homosexuel fait partie du droit européen. L’extension de la possibilité d’adoption aux époux de même sexe s’imposait donc désormais au regard de la Convention européenne des droits de l’Homme.

74 Des considérants no 32 à 63, la constitutionnalité du concept de filiation mono?sexuée est admise par le Conseil constitutionnel et entraîne pour conséquence directe la reconnaissance juridique du statut de l’homoparentalité [97]. En matière de filiation et d’adoption, les griefs des requérants se concentrent formellement sur des arguments d’ordre terminologique qui porteraient atteinte au principe d’accessibilité et d’intelligibilité tant au regard de la forme de certaines dispositions de la loi du 17 mai 2013 que de leur cohérence vis?à?vis des dispositions déjà prévues par le Code civil. Selon eux, les bouleversements sémantiques induits par la loi du 17 mai 2013 pourraient, in fine, nuire à la stabilité et à la cohérence du Code civil dans son ensemble ainsi qu’au principe de sécurité juridique. À ce titre, ces derniers invoquent le manque d’intelligibilité et de clarté des articles 7, 8 et 13 de la loi du 17 avril 2013 en fonction des dispositions déjà existantes du Code civil.

75 En réponse à l’argumentation des requérants, le Conseil constitutionnel confirme la constitutionnalité des libellés des articles 7, 8 et 13 en rejetant le moyen au motif que les évolutions sémantiques induites par la loi du 17 mai 2013 préservent le sens général des dispositions du Code civil et laissent intacte leur cohérence d’ensemble [98].

76 Dans le prolongement de cette idée, les requérants contestaient également l’article 6?1 nouveau du Code civil en ce que le législateur aurait fait preuve d’incompétence négative en ne légiférant pas sur le sujet spécifique de la présomption de paternité comme sur le sujet de la procréation médicalement assistée. De manière pédagogique, le Conseil constitutionnel prend, ici, le parti de nettement distinguer le champ d’application de la loi ainsi déférée vis?à?vis des différents modes de filiation. À ce titre, il relève que seul le régime juridique de la filiation adoptive des couples de même sexe est concerné par la loi du 17 mai 2013 en ce qu’il fait l’objet d’une transposition législative sur celui des couples hétérosexuels. Il isole ainsi le régime de la filiation non adoptive des effets mécaniques de la loi portant « mariage pour tous », et semble prévenir implicitement le législateur que ce dernier régime devra nécessairement faire l’objet d’un traitement législatif distinct.

77 Dans son considérant no 40, le Conseil constitutionnel reconnaît donc logiquement que la présomption de paternité entérinée à l’article 312 du Code civil ne saurait s’appliquer aux enfants des personnes de même sexe de la même manière qu’elle s’applique chez les personnes hétérosexuelles. Une inégalité juridique indéniable qui s’explique par la connexité de l’objet de ces règles avec la condition de mixité des genres anciennement conçue comme un préalable indispensable du mariage. Toutefois, la Haute juridiction conclut qu’en raison du fait que l’essentiel « des règles relatives au mariage restent sans incidence sur les autres modes de filiation prévus par le titre VII du livre I du Code civil », le moyen doit être rejeté. Sur la procréation médicale assistée, c’est le même raisonnement qui prévaut au sujet de l’absence de mention de cette notion dans le nouvel article 6?1. Le Conseil constitutionnel notifiant, ici, qu’aucune des dispositions contestées n’ayant pour effet de modifier le sens de l’article 16?7 relatif à la PMA [99], le législateur a bien épuisé sa compétence même s’il ne s’est pas expressément exprimé sur cette question [100]. Le Conseil semble, ici, considérer que puisque de toute façon de telles situations en matière d’accès à la famille sont systématiquement considérées comme objectivement différentes par le législateur, si législation future il y a, elles seront, par nature, traitées différemment par ce dernier. Dès lors, l’absence de mention qui est faite de ces deux notions, aujourd’hui, ne suffit pas à caractériser l’incompétence négative du législateur au motif qu’elle sera certainement rectifiée demain sous réserve que dans l’entre?deux le sens actuel des dispositions en vigueur soit préservé.

78 Sur le fond, les requérants prétextaient, paradoxalement, que ces variations d’applications législatives aux couples mariés consommaient une atteinte au principe d’égalité en créant des inégalités juridiques au détriment des couples homosexuels dans le domaine de la procréation.

79 En se référant, au considérant de principe décidément très sollicité de la décision « Ponts à péages [101] », le Conseil constitutionnel réaffirme alors qu’il relève du seul pouvoir du législateur le choix d’adapter la norme législative à la diversité des réalités sociales du couple et que : « le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes dès lors que la différence de traitement qui en résulte est en lien direct avec l’objet de la loi qui l’établit ». Ainsi, tout en se retranchant, une nouvelle fois, derrière le statu quo législatif, le Conseil permet, en réalité, une articulation juridique différenciée des règles propres à l’adoption et à la procréation médicalement assistée, pourtant deux composantes d’une même catégorie : la filiation élective. Ce faisant, il autorise ainsi, sur le plan constitutionnel, l’existence d’une nette distinction entre leurs bénéficiaires en raison de leur genre, en jugeant qu’un modèle, celui de l’adoption peut s’émanciper du cadre procréatif et être accessible aux couples homosexuels et qu’un autre, celui de la procréation médicale, ne le peut pas et doit s’astreindre à imiter le cadre de la procréation naturelle.

80 De même, et de manière plus générale, les requérants se basant ici sur une interprétation inversée du principe d’égalité [102], insistaient sur la dimension concurrentielle de l’égalité des droits proclamés entre les couples hétérosexuels et homosexuels ainsi qu’envers les enfants nés de ces différentes unions. Ce genre d’argumentation est suffisamment rare pour être notée. Si le principe d’égalité est, en effet, de tous les principes constitutionnels, celui qui est le plus souvent invoqué devant le Conseil constitutionnel [103], ce dernier l’est rarement en ce sens. Dans ce cadre, celui?ci reconnaît que : « d’une part, en permettant l’adoption par deux personnes de même sexe ou au sein d’un couple de personnes de même sexe, le législateur, compétent pour fixer les règles relatives à l’état et à la capacité des personnes en application de l’article 34 de la Constitution, a estimé que l’identité de sexe des adoptants ne constituait pas, en elle?même, un obstacle à l’établissement d’un lien de filiation adoptive ». L’on remarque là encore toute la vigueur de l’autolimitation du contrôle du juge constitutionnel sur les questions propres au droit de la famille. Ce confinement de l’examen constitutionnel paraît presque s’assimiler à une sorte de blanc?seing visant à préserver toute l’étendue du pouvoir parlementaire en la matière.

81 Dans son considérant no 51, le Conseil affine son raisonnement en indiquant : « qu’aucune exigence constitutionnelle n’impose que les liens de parenté établis par la filiation adoptive imitent ceux de la filiation biologique » et qu’en conséquence le principe d’égalité est respecté. En d’autres termes, le concept de la filiation hétérosexuelle n’est pas un principe d’ordre constitutionnel et la concurrence législative qui résulte de la dualité du régime juridique de ces deux modes de filiation ne suffit pas à caractériser une atteinte au principe d’égalité.

82 Une affirmation qui émet une réponse catégorique à l’argumentaire des requérants qui en plus de la supposée violation du PFRLR relatif à l’altérité sexuelle des époux, invoquaient, en matière de droit de la famille, la violation d’un PFRLR inhérent à la « filiation bilinéaire » des couples hétérosexuels. De même, ces derniers en référaient à l’existence d’un droit constitutionnel de l’enfant à voir sa filiation établie à l’égard d’un couple constitué de genres sexuels distincts sur les fondements respectifs du droit de mener une vie familiale normale et du principe de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant.

83 Sur la question de l’existence d’un PFRLR spécifique en matière d’établissement de la filiation de l’enfant, le Conseil répond par la négative en se contentant de remarquer la succession d’évolutions législatives subie par ce régime [104] lui déniant ainsi le bénéfice de la condition de stabilité temporelle requise pour son édification en principe fondamental reconnu par les lois de la république. Le Conseil dans le considérant no 56, appliquera le même raisonnement restrictif à propos du droit constitutionnel de l’enfant à se voir consacré une filiation bilinéaire.

84 Sur la question de la constitutionnalité de l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe, le Conseil en réponse à la systématisation des griefs tirés de l’atteinte au principe d’égalité, réitéra sans surprise le principe d’un traitement législatif différent pour les situations différentes. Au?delà du principe d’égalité, en guise de motif d’inconstitutionnalité était également invoqué le droit au respect de la vie privée, consacré à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, en ce que ces nouvelles dispositions obligeraient dans le cas de l’adoption plénière entre personne de même sexe à divulguer l’orientation sexuelle des adoptants ainsi qu’à révéler le caractère adoptif de la filiation. Sur cette question spécifique, le Conseil prit le parti d’aménager la portée du principe de secret de l’adoption en établissant : « qu’aucune règle ou exigence constitutionnelle n’impose que le caractère adoptif soit dissimulé ».

85 En guise de synthèse, il considéra, qu’en conséquence, « l’ouverture de l’adoption par des couples de personnes de même sexe et au sein de ces couples n’est pas contraire aux exigences constitutionnelles précitées ; que les dispositions des articles 1er et 13 de la loi déférée, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution ».

86 Au?delà du droit de la famille, de nombreux bouleversements d’ordre législatif s’observent également dans les différentes branches du droit qui connaissent d’importantes évolutions en lien direct avec le nouveau statut du maraige homosexuel ou la consécration de la vie familiale homosexuelle.

87 2 – Les conséquences de la constitutionnalité du statut du mariage homosexuel sur les différentes branches du droit

88 Le droit de la famille n’est pas le seul secteur, en partie, refondu par la loi du 17 mai 2013. Ladite loi emporte, en effet, de multiples conséquences juridiques sur les autres branches du droit notamment en matière de droit du travail, de droit international privé et de droit de la Sécurité sociale.

89 Coté droit social, l’article 19 de celle?ci insère au sein du Code de droit du travail l’article L. 1132?3?2 qui dispose désormais qu’« aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire mentionnée à l’article L. 1132?1 pour avoir refusé en raison de son orientation sexuelle une mutation géographique dans un État incriminant l’homosexualité ». Un prolongement législatif activement protecteur des effets du principe d’égalité qui entraîne des conséquences importantes vis?à?vis du statut du salarié homosexuel que celui?ci soit marié ou non.

90 Les effets indirects de la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe résident, en matière de droit du travail, dans l’octroi au salarié homosexuel d’un régime de droits sociaux variant sensiblement de celui des salariés hétérosexuels, ici envisagé indépendamment de sa qualité de conjoint. L’article en question entérine donc l’établissement d’un nouveau principe législatif désolidarisé de la question du mariage homosexuel ciblant le thème juridique autonome de la protection des droits de l’individu homosexuel. À cet effet, les requérants en référaient formellement à l’absence de lien d’une telle disposition avec l’objet même de la loi déférée, moyen également rejeté par le Conseil.

91 Premièrement, ce nouvel article leur permet de ne pas se voir appliquer le jeu contractuel de la clause de mobilité géographique concernant les mutations professionnelles à destination de l’ensemble des pays pénalisant l’homosexualité. Il ressort donc de l’article 19 de la loi du 17 mai 2013, que les travailleurs homosexuels détiennent une garantie nationale et internationale contre la discrimination en matière professionnelle, à titre personnel mais également en tant que droits sociaux collectifs. Dans le but d’étendre la protection en droit interne et externe du salarié homosexuel, le législateur n’hésite pas à encadrer de manière particulière un groupe d’individus en raison de leur appartenance sexuelle. L’ajout de cette dérogation aux règles régissant les clauses de mobilités géographiques, notion courante dans certains types de contrats professionnels, implique par ailleurs que l’employeur soit personnellement informé de l’orientation sexuelle de son salarié.

92 Au fond, les requérants affirment, d’une part, que les deux dispositions portent atteinte au principe d’égalité car elles créent une inégalité juridique entre les salariés en général en établissant la concurrence des droits entre travailleurs hétérosexuels et homosexuels. D’autre part, ils relèvent que ces dernières confèrent aux clauses contractuelles un champ d’action à géométrie variable selon l’orientation sexuelle des travailleurs sujets à la clause de mobilité. Enfin, les requérants mobilisent de nouveau l’exigence constitutionnelle du droit au respect de la vie privée en contestant l’obligation nouvelle supposée par ledit texte de dévoiler à son employeur la nature de son orientation sexuelle.

93 S’agissant de la différence de traitements entre ces deux catégories de salariés, le Conseil indique que : « les dispositions contestées n’ont ni pour objet ni pour effet de traiter différemment des personnes placées dans la même situation ; que, par suite, le grief tiré de l’atteinte au principe d’égalité doit être écarté ». La formule est légèrement différente mais l’esprit de la remarque reste le même. Le principe d’égalité, norme de référence du contrôle exercé par le juge ne s’envisage dans cette espèce que sous l’angle de la détermination de l’admissibilité ou non sur le plan constitutionnel des différences de traitements initiés par le législateur. La traditionnelle dimension abstraite du principe d’égalité qui prescrit : « l’égalité de tous devant la loi », semblant dans cette décision céder le pas à une approche contentieuse et plus concrète qui permet une forte contextualisation de ce principe.

94 Par ailleurs, en matière de droit international privé, la loi du 17 mai 2013 emporte également de nombreux effets dont la constitutionnalité fut directement admise par le Conseil constitutionnel et modifie largement l’esprit comme la lettre des textes relatifs au mariage à la française. Est ainsi inséré dans le Code civil, un chapitre IV bis intitulé : « Des règles de conflit de lois » au sein du titre V du livre Ier, qui fait du mariage homosexuel un principe d’ordre public international [105]. L’article 202?1, alinéa 1er du Code civil dispose désormais que « les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont régies, pour chacun des époux, par sa loi personnelle ».

95 L’alinéa 2 ajoute cependant que « la loi personnelle d’un époux est écartée, sous réserve des engagements internationaux de la France, en tant qu’elle fait obstacle au mariage de deux personnes de même sexe, lorsque la loi de l’État sur le territoire duquel est célébré le mariage le permet [106] ». L’article 202?2 du Code civil, quant à lui, prévoit que « le mariage est valablement célébré s’il l’a été conformément aux formalités prévues par la loi de l’État sur le territoire duquel la célébration a eu lieu ».

96 L’ajustement du cadrage législatif ainsi réalisé par l’institution parlementaire a pour effet d’édicter de nouvelles règles en matière de conflits de lois ainsi que de nouvelles méthodes de détermination de la loi applicable à la validité du mariage de personnes de même sexe. Selon une lecture croisée de ces trois articles, la doctrine relève qu’une politique de promotion internationale des mariages homosexuels a été retenue par le législateur français ce qui aboutit à inverser la tendance législative française jusque?là suivie sur la scène internationale [107]. Par ailleurs, la volonté parlementaire de légiférer en droit international privé à l’occasion de l’édiction d’un régime spécifique de droit interne ne s’observe qu’en de rares hypothèses, et il est intéressant de relever la symbolique d’un tel parti prix législatif. En outre si comme nous l’avons vu plus haut, les conséquences juridiques de la loi du 17 mai 2013 sont profondément complexes et diversifiées, la présence d’un élément d’extranéité suscite des questionnements encore plus ardus.

97 Il est ainsi intéressant de noter que les griefs d’inconstitutionnalité opposés par les requérants à l’introduction de règles nouvelles en matière de conflit des lois étaient essentiellement dirigés vers l’alinéa 2 de l’article 202?1 en ce qu’il fait état d’une clause dérogatoire permettant de faire obstacle à l’application d’une loi nationale étrangère dans le but de reconnaître en France le plein effet de la célébration du mariage homosexuel. En effet, par le jeu de cet alinéa tout ressortissant français est désormais libre de s’unir à une personne de même sexe et de se voir reconnaître les effets de cette union sur le territoire français, même si le pays d’origine de celle?ci incrimine l’homosexualité. C’est donc ici le principe de l’éviction de la loi personnelle étrangère préjudiciable au mariage homosexuel qui se voit consacré, la doctrine relevant à ce titre, que de fait, la loi du lieu de célébration du mariage revêt désormais une vocation subsidiaire [108].

98 Aux termes de l’article 202 du Code civil, l’ensemble des unions homosexuelles dont au moins l’un des conjoints possède la nationalité, le domicile ou enfin la résidence au sein d’un État qui admet le mariage homosexuel seront valablement célébrées en France. L’État français semble ainsi se positionner en véritable territoire d’accueil des unions homosexuelles.

99 En réponse à l’argumentaire des requérants, le Conseil considère que le choix du législateur de fixer des règles de conflit de lois différentes de celles qui prévalent pour les mariages des personnes de sexes différents ne porte atteinte ni au principe d’égalité ni au principe de sécurité juridique en affirmant qu’« il était loisible au législateur de permettre à deux personnes de même sexe de nationalité étrangère, dont la loi personnelle prohibe le mariage entre personnes de même sexe, de se marier en France dès lors que les autres conditions du mariage et notamment la condition de résidence sont remplies ; que le législateur, qui n’était pas tenu de retenir les mêmes règles pour les mariages contractés entre personnes de sexe différent, n’a pas traité différemment des personnes se trouvant dans des situations semblables ».

100 Les dispositions contenues dans la loi du 17 avril 2013, notamment ses articles 18 et 19 emportent, enfin, des conséquences immédiates en matière de droit de la Sécurité sociale au travers de l’extension du régime juridique de certaines garanties à caractère socio?économiques aux couples de même sexe. C’est notamment le seul domaine juridique parmi les nombreux concernés par la lettre de saisine des requérants qui donna lieu à la formulation d’une réserve d’interprétation, concernant la procédure d’agrémentation des adoptants, par le Conseil constitutionnel dans le considérant no 53 de sa décision. Ainsi, celui?ci indique : « que les dispositions relatives à l’agrément du ou des adoptants, qu’ils soient de sexe différent ou de même sexe, ne sauraient conduire à ce que cet agrément soit délivré sans que l’autorité administrative ait vérifié, dans chaque cas, le respect de l’exigence de conformité de l’adoption à l’intérêt de l’enfant qu’implique le dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ; que, sous cette réserve, les dispositions des articles L. 225?2 et L. 225?17 du code de l’action sociale et des familles ne méconnaissent pas les exigences du dixième alinéa du Préambule de 1946 ».

101 Pour le reste, l’intégration des effets juridiques du « mariage pour tous » passe par la méthode de l’élargissement législatif des concepts déjà existants à la communauté homosexuelle. En aucun cas, en effet, le législateur ne prend le parti de créer de nouvelles catégories de prérogatives ou d’établir un régime juridique particulier à destination de la communauté homosexuelle. Il raisonne ici par à?coups : mise en concordance législative du droit de la sécurité sociale et alignement de ses effets à la diversité des couples mariés.

102 D’un point de vue sémantique, la loi réécrit les termes de l’article L. 331?7 du Code de la Sécurité sociale, en substituant aux mots « père » et « mère » celui de « parents adoptifs » et poursuit ainsi l’œuvre de neutralisation juridique de toute mention faite au genre de la personne de l’adoptant ou de l’adoptante [109]. Le Code de la Sécurité sociale bénéficiant, lui aussi, de ce processus d’indifférenciation des normes en fonction du sexe de la personne et devient ainsi « aveugle » à cette considération.

103 À titre plus substantiel, le Code de Sécurité sociale, dans son art. L. 613?19 et s., prévoit désormais que soit généralisé le bénéfice du congé d’adoption aux assurés sociaux ressortissants du régime social des indépendants ou du régime spécial applicable aux praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés [110]. Toutefois, la conséquence la plus générale de l’introduction du mariage entre personnes de même sexe réside dans l’élargissement du bénéfice de la pension de réversion à toutes les catégories de conjoint survivant, et ce même si la loi n’est pas venue expressément modifier les articles se rapportant à cette question, comme celui de l’article L. 353?1 du Code de la sécurité sociale pour le régime général [111].

104 Ce dernier exemple confirme l’ampleur particulièrement variable de l’étendue du contrôle du Conseil constitutionnel et accrédite ainsi l’idée qu’il existe en France plusieurs formes de contrôle de la conformité des lois en fonction des éléments juridiques sollicités [112]. Un contrôle restreint d’un côté, fondé sur le strict respect de la compétence du législateur en matière de statut du mariage homosexuel qui se présente comme la conséquence contentieuse du pouvoir discrétionnaire d’appréciation dont dispose ce dernier. Un contrôle étendu de l’autre, relatif aux effets du mariage homosexuel fondé sur la mise en œuvre des effets de la loi en matière de droit de la Sécurité sociale qui aboutit à la formulation d’une directive d’interprétation très nettement contextualisée. Ce dernier exemple résume bien toute l’ambivalence de l’amplitude du contrôle de constitutionnalité exercé par le juge français en fonction des moyens soulevés par le recours, de la matière sollicitée mais aussi du contenu de la prétention qu’il porte et, enfin peut?être, en fonction de la nature du recours lui?même. Quoi qu’il en soit, c’est un cap juridique et idéologique de taille qui est ici franchi par notre ordre juridique. Il permet en effet, sous l’égide du Conseil constitutionnel, le rayonnement juridique du principe d’égalité bien au?delà de ce que le poids de la configuration traditionnelle historique du mariage à la française, laissant il y a encore quelques mois à peine, espérer. En cela, la décision no 669 DC représente d’abord un acquis historique indéniable en matière de droits fondamentaux de l’individu.

105 Tamara Lajoinie

106 – Décision n° 2013?330 QPC du 28 juin 2013, Mme Nicole B., Décharge de plein droit de l’obligation de paiement solidaire de certains impôts

107 Saisi par le Conseil d’État d’une QPC portant sur le mécanisme de décharge de plein droit de l’obligation de paiement solidaire pesant sur les époux et partenaires civils relativement à certains impôts (CGI, art. 1691 bis, II), le Conseil constitutionnel a déclaré ce dispositif conforme aux droits et libertés que la Constitution garantit.

108 L’intérêt de cette affaire tient, à titre principal, aux motifs de la décision du Conseil constitutionnel et, dans une moindre mesure, au règlement des difficultés procédurales pouvant découler, en matière de QPC, de la répartition des compétences au sein de l’ordre juridictionnel administratif. L’examen de ces deux points (B) sera précédé d’un bref rappel concernant l’évolution récente des règles relatives à la solidarité fiscale des époux et partenaires civils et des procédures de décharge de l’obligation de paiement solidaire en résultant (A).

109 A – Évolution des règles relatives à la décharge de solidarité des époux et partenaires civils

110 Les époux et partenaires civils sont tenus solidairement au paiement :

  • de l’impôt sur le revenu (IR) lorsqu’ils font l’objet d’une imposition commune (CGI, art. 1691 bis, I?1°) ;
  • de la taxe d’habitation (TH) lorsqu’ils vivent sous le même toit (CGI, art. 1691 bis, I?2°) ;
  • de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), sans condition légale particulière (CGI, art. 1723 ter?00 B) [113].

111 L’application de ces règles ne suscite aucune difficulté tant que le couple demeure uni. Il en va différemment, évidemment, dans le cas où le couple se distend ou, plus encore, se sépare – l’hypothèse ordinaire étant celle d’un contribuable refusant, après le prononcé de son divorce, de supporter les cotisations d’IR (initiales ou supplémentaires) établies au titre d’une année antérieure à ce prononcé, dans la mesure où elles correspondent aux revenus personnels de son ancien conjoint.

112 Les conditions dans lesquelles chacun des époux peut demander dans ce cas ou dans certaines situations similaires à être déchargé de son obligation solidaire ont été aménagées par la loi de finances pour 2008.

113 Avant la loi de finances pour 2008, la décharge de solidarité (dont l’application en matière d’ISF n’était d’ailleurs pas expressément prévue par la loi) relevait de la « juridiction gracieuse » de l’administration (LPF, art. L. 247). On appliquait plus précisément en la matière les dispositions générales selon lesquelles « l’administration peut […] décharger de leur responsabilité les personnes tenues au paiement d’impositions dues par un tiers » (LPF, art. L. 247, al. 7). Les décisions prises à ce titre par l’autorité administrative (qui ne faisaient directement l’objet d’aucun encadrement législatif) relevaient d’un contrôle restreint du juge administratif – celui?ci reconnaissant à l’administration un pouvoir d’appréciation étendu [114].

114 Dénoncé comme inéquitable par le Médiateur de la République dans son rapport pour 2004, ce dispositif a été modifié par le législateur quelques années plus tard [115].

115 Soucieuse d’assurer un traitement plus objectif des demandes de décharge, la loi de finances pour 2008 (L. 24 déc. 2007, n° 2007?1822, art. 9, I) a subsisté au mécanisme de décharge « gracieuse » un mécanisme de décharge de plein droit (CGI, art. 1691 bis, II). Même si la loi n’est pas ici exempte de toute ambiguïté, celui?ci relève très probablement de la juridiction « contentieuse » de l’administration :

116 a) la loi quantifie très précisément le droit à décharge de l’ancien conjoint. Schématiquement (c’est?à?dire abstraction faite des éléments d’assiette attachés, le cas échéant, aux personnes à charge), l’ancien conjoint ne peut en matière d’IR qu’être tenu au paiement d’un impôt correspondant à la part de ses revenus personnels et la moitié des revenus communs du couple. Ces règles s’appliquent mutatis mutandis en matière d’ISF et, selon des modalités plus simples, en matière de TH. Des règles spéciales sont enfin prévues en matière de sanctions fiscales et intérêts de retard : les pénalités suivent en principe le sort des droits auxquels elles sont attachées ; le demandeur en est toutefois intégralement déchargé lorsqu’elles ont été appliquées lors de la rectification d’un bénéfice ou d’un revenu qui était propre à l’ancien conjoint ;

117 b) la condition de fond tenant au comportement du contribuable ne suscite pas a priori de difficultés majeures : l’obtention de la décharge suppose que le demandeur ait régulièrement satisfait à ses obligations déclaratives depuis la rupture de la vie commune [116].

118 c) il en va différemment de la condition – au statut un peu incertain – selon laquelle la décharge de l’obligation de paiement suppose la « disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur » (CGI, art. 1691 bis, II?2). Cette disproportion n’est aucunement prise en compte pour mesurer le quantum de la décharge (qui est exclusivement fondé, on l’a vu, sur la part respective de l’assiette fiscale susceptible d’être rattachée à chacun des conjoints). Elle constitue néanmoins une des conditions préalables de l’application du dispositif. Le contraste est d’ailleurs saisissant entre la précision mathématique avec laquelle sont déterminés le montant de la décharge et l’incertitude [117] entourant son principe même : selon les travaux préparatoires, il a été jugé « préférable de ne pas définir de façon trop précise les critères permettant de qualifier cette condition, afin de laisser à l’administration une certaine souplesse d’appréciation, lui permettant de tenir compte des circonstances propres à chaque situation particulière » (Rapport gén. précité, p. 41). Comme l’on pouvait s’y attendre, c’est par la voie d’une instruction que cette question a été réglée (BOI?CTX?DRS, 12 sept. 2012). En substance, selon la doctrine administrative énoncée « à titre de règle pratique », il n’y a pas en principe de disproportion marquée lorsque :

  • la dette fiscale n’excède pas la valeur nette du patrimoine (hors résidence principale) du demandeur ;
  • dans le cas inverse, son revenu « extrapatrimonial disponible » (ie son revenu annuel total, abstraction faite des revenus procurés par les biens dont la valeur est déjà comprise dans le patrimoine net, et après déduction de toutes ses charges « normales ») lui permet de procéder à un règlement de la dette fiscale – nette de la valeur du patrimoine – sur une période n’excédant pas 10 ans (BOI précité, n° 200).

119 Comment ne pas souligner le flou extrême que dissimule mal la rigueur logique apparemment implacable de la doctrine. Le Conseil constitutionnel ne s’est toutefois pas arrêté à cette lacune du dispositif légal qui lui était soumis.

120 B – Le double apport des décisions juridictionnelles intervenues dans l’affaire Bosc

121 Le demandeur à la QPC soutenait que le législateur, en réservant le droit d’obtenir la décharge de la solidarité aux personnes séparées et divorcées et en excluant du bénéfice de ce droit à décharge les personnes veuves, avait méconnu le principe d’égalité devant la loi (DDHC, art. 6, et C. 1958, art. 1er) et le principe d’égalité devant les charges publiques (DDHC, art. 13).

122 Le Conseil constitutionnel statue exclusivement sur le terrain de l’égalité devant la loi. Cette solution apparaît justifiée, dans la mesure où il s’agissait de comparer le traitement réservé par la loi fiscale à deux catégories de contribuables [118].

123 Il réaffirme la formule classique selon laquelle « le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ».

124 Appliquant cette grille d’analyse traditionnelle au cas considéré, le Conseil constitutionnel retient que le conjoint survivant ne se trouve pas, en raison de sa situation financière et patrimoniale, dans une situation identique à celle des personnes divorcées ou séparées et que, par suite, le respect du principe d’égalité n’imposait pas au législateur d’accorder au premier un droit à décharge équivalent à celui accordé aux secondes. Cette analyse un peu péremptoire appelle les observations suivantes.

125 Selon le Conseil constitutionnel, au regard de l’objectif poursuivi par le législateur [119], cette solution est exclusivement justifiée par la qualité d’héritier du défunt reconnue par la loi au conjoint survivant – et qui est évidemment refusée (sauf dispositions testamentaires contraires) au conjoint divorcé ou séparé (C. civil, art. 732).

126 Cette affirmation synthétique du Conseil constitutionnel appelle plusieurs interrogations. Le conjoint divorcé peut avoir droit à une prestation compensatoire qui est normalement allouée en capital par son ancien conjoint (C civil, art. 270). Ceci ne conduit?il pas à gommer la différence de situation entre les deux cas distingués par le Conseil ? Le conjoint survivant n’a pas nécessairement la qualité d’héritier réservataire (C. civil, art. 914?1) et peut donc être parfois intégralement déshérité ; il peut également refuser la succession du défunt. N’est?il pas alors, dans ces deux cas, dans la même situation qu’un conjoint séparé ou divorcé ? Dans l’hypothèse la plus simple (et probablement la plus fréquente), les droits du conjoint survivant résident dans l’usufruit viager de la totalité des biens du défunt (C. civil, art. 757 et art. 758?4). Le caractère particulièrement « illiquide » de ces droits ne méritait?il pas d’être pris en compte ? Ne convenait?il pas d’examiner le sort particulier réservé au droit à décharge des pénalités fiscales (et singulièrement des sanctions fiscales) qui ne correspond peut?être pas à l’objectif général poursuivi ici par le législateur ? La condition préalable tenant à la « disproportion marquée » entre la dette fiscale et la situation du demandeur ne méritait?elle pas un bref détour ?

127 Nombreuses, ces questions restent toutes sans réponse et – même si sa décision apparaît au fond justifiée – on peut regretter que le Conseil constitutionnel n’ait pas adopté une motivation plus fouillée – d’autant qu’une de ses précédentes décisions avait invalidé une différence de traitement posée cette fois?là au profit des veufs [120].

128 Assez exceptionnellement, la décision par laquelle le Conseil d’État a transmis au Conseil constitutionnel la QPC considérée sera mentionnée aux tables du Recueil Lebon [121]. Même si elle ne le fait qu’implicitement, cette décision tranche en effet une question procédurale importante.

129 Ayant en vain demandé la décharge de sa responsabilité solidaire devant le tribunal administratif, la requérante avait fait appel du jugement devant la CAA, en assortissant ses conclusions d’appel d’une QPC. Le président de la CAA avait transmis au Conseil d’État cette demande, au motif (peut?on penser), que le recours en appel devait s’analyser comme un pourvoi en cassation dirigé contre le jugement du TA ayant, selon lui, statué en premier et dernier ressort (CJA, art. R. 351?2).

130 Le Conseil d’État ne se prononce pas sur le bien?fondé de cette analyse probablement erronée [122]. Alors que c’est probablement la CAA qui était bien compétente au cas considéré, le Conseil d’État ne renvoie pas l’affaire à cette juridiction. Il retient une solution d’une grande souplesse qui tient en deux points :

  • saisi d’une QPC soulevée à l’occasion d’un litige qui relève de la compétence d’une autre juridiction administrative, le Conseil d’État [123] peut, dans le délai de trois mois, renvoyer le dossier avec la QPC à la juridiction compétente. Cette voie est évidemment la plus orthodoxe ;
  • il peut aussi se prononcer lui?même sur la QPC et renvoyer ultérieurement l’affaire à la juridiction compétente, procédé qui est de nature, le cas échéant, à anticiper la saisine du juge constitutionnel. C’est ce qu’il a fait dans la présente affaire en transmettant la QPC au Conseil constitutionnel.

131 Olivier Négrin

132 – Décision n° 2013?340 QPC du 20 septembre 2013, M. Alain G., Assujettissement à l’impôt sur le revenu des indemnités de licenciement ou de mise à la retraite

133 LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL MET FIN À LA DISCRIMINATION FISCALE DES INDEMNITÉS TRANSACTIONNELLES DE RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

134 Saisie d’une question prioritaire de constitutionnalité par le Conseil d’État, [124] le Conseil Constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution les dispositions du 1 de l’article 80 duodecies du Code général des impôts (CGI), [125] portant sur le régime d’imposition à l’impôt sur le revenu des indemnités de rupture du contrat de travail. [126] Les Sages ont cependant assorti cette déclaration d’une importante réserve d’interprétation concernant les indemnités issues d’une transaction.

135 L’article 80 duodecies du CGI, issu de l’article 3 de la loi du 30 décembre 1999 de finances pour 2000, pose le principe de l’imposition de toute indemnité versée à l’occasion de la rupture du contrat de travail ou de la révocation de dirigeants et mandataires sociaux, immédiatement nuancé par un catalogue, assez byzantin, d’exceptions. Ainsi, plusieurs catégories d’indemnités sont exonérées tantôt intégralement, tantôt sous plafonds, eux?mêmes variables d’un chef de l’exonération à l’autre. La liste recouvre notamment les indemnités de licenciement ou de mise à la retraite à l’initiative de l’employeur, donnant lieu à une exonération plafonnée dans les deux cas. Elle vise aussi les indemnités versées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi ou en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit à une exonération totale.

136 Le litige à l’origine de la QPC concerne ce dernier chef. Un employeur a unilatéralement modifié les conditions de travail d’un VRP, lequel, après s’y être vainement opposé, a « pris acte » de la rupture du contrat de travail par son employeur. Il a ensuite saisi la juridiction prud’homale pour faire prononcer la condamnation de son employeur au paiement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cependant, les parties ont conclu une transaction avant le prononcé du jugement. L’employeur a ensuite versé une somme de 105 000 € que le salarié estimait exonérée de l’impôt sur le revenu.

137 Cette lecture était loin d’être absurde au regard de la jurisprudence sociale pour laquelle une prise d’acte par le salarié de la rupture par l’employeur du contrat de travail s’analyse soit en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits allégués le justifient, soit en une démission. [127]

138 Cependant, le contribuable s’est heurté à une interprétation stricte, par l’administration fiscale et le juge de l’impôt, d’un dispositif d’exonération qu’est l’article 80 duodecies du CGI. En effet, s’agissant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ce texte renvoyait à l’article L. 122?14?4 du Code du travail ancien, lequel disposait qu’une telle indemnité est allouée par un « tribunal [128] », ce qui n’est pas le cas d’une transaction (à tout le moins d’une transaction non homologuée). [129]

139 En substance, si le contribuable avait attendu le jugement, l’intégralité de l’indemnité aurait été exonérée, mais puisqu’il a transigé, il devait être imposé sur la totalité. Dans ces conditions, alléguant d’une différence de traitement méconnaissant le principe d’égalité devant l’impôt et les charges publiques, le requérant a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité.

140 La question soulevée ressortait ainsi à un problème classique de non?discrimination au regard d’un texte fiscal. Sans surprise, pour trancher, le Conseil constitutionnel s’est appuyé sur l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ensemble avec l’article 34 de la Constitution, en réitérant sa formulation classique selon laquelle « (…) en vertu de l’article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées les facultés contributives ; qu’en particulier, pour assurer le respect du principe d’égalité, il doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu’il se propose ; que cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ».

141 Cependant, une difficulté subsistait sur le plan de la recevabilité, car, contrairement à ce qu’a énoncé le Conseil d’État dans sa décision de renvoi, le Conseil constitutionnel a déjà déclaré l’article 80 duodecies du CGI conforme à la Constitution, non dans le dispositif mais dans les motifs [130] de sa décision du 29 décembre 1999, rendue dans le cadre du contrôle préalable de la loi de finances pour 2000. [131]

142 Dans cette décision, les Sages ont validé le principe général de l’imposition des indemnités visées à l’article 80 duodecies. Or, dans l’état du droit antérieur, la règle prétorienne exigeait une recherche sur la nature de l’indemnité selon qu’elle compensait une perte de salaires (imposition) ou réparait un préjudice d’une autre nature (exonération). En effet, le régime ancien n’était qu’une simple projection sur le terrain salarial du raisonnement plus général déployé par le juge de l’impôt en matière indemnitaire.

143 Ainsi, il ressort de la décision du 29 décembre 1999 que, d’une part, aucun principe constitutionnel n’interdit l’imposition des sommes revêtant la nature de dommages?intérêts et que, d’autre part, une distinction opérée entre les différents types d’indemnités ne constitue pas une rupture de l’égalité devant les charges publiques dès lors que le législateur prend en compte les facultés contributives des bénéficiaires. Or, pour les indemnités de rupture du contrat de travail, la technique de l’exonération plafonnée a permis, aux yeux des Sages, une telle prise en compte. De même, le Conseil constitutionnel n’a pas censuré de multiples distinctions qui existent, comme il a été évoqué ci?dessus, à l’intérieur du dispositif de l’article 80 duodecies.

144 Il en résulte que le législateur de 1999 a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction d’une finalité qui était double : d’une part, par détermination des catégories d’indemnités de rupture assorties, le cas échéant, des plafonds chiffrés, garantir aux bénéficiaires une plus grande sécurité juridique en les dispensant du périlleux travail d’identification de la fraction de l’indemnité compensant une perte de salaires ; d’autre part, par l’application des mêmes plafonds, soumettre à l’impôt les « parachutes dorés » perçus par les dirigeants sortants de grandes entreprises.

145 Dans la décision sous commentaire, le Conseil constitutionnel a estimé que l’économie générale de l’article 80 duodecies n’a pas été modifiée par les interventions législatives successives de nature à changer l’appréciation qu’il a portée sur ce texte dans sa décision du 29 décembre 1999. Il a cependant considéré que la jurisprudence restrictive, en rupture avec les positions antérieures, [132] que le Conseil d’État a développée sur le terrain des indemnités transactionnelles après l’entrée en vigueur de la loi de finances pour 2000, était constante, [133] ce qui constituait un changement de circonstances depuis la décision du 29 décembre 1999. [134]

146 Ainsi, tout en validant l’article 80 duodecies par le refus de revenir sur les termes de la décision du 29 décembre 1999, le Conseil constitutionnel a assorti sa déclaration de conformité d’une réserve d’interprétation : le législateur ne saurait « (…) sans instituer une différence de traitement sans rapport avec l’objet de la loi, conduire à ce que le bénéfice de ces exonérations varie selon que l’indemnité a été allouée en vertu d’un jugement, d’une sentence arbitrale ou d’une transaction ; qu’en particulier, en cas de transaction, il appartient à l’administration et, lorsqu’il est saisi, au juge de l’impôt de rechercher la qualification à donner aux sommes objet de la transaction ».

147 La portée de cette réserve n’est pas parfaitement claire. Doit?on considérer que s’agissant des indemnités transactionnelles, la « qualification » à rechercher est celle portant sur la nature de l’indemnité selon qu’elle compense une perte de salaire ou répare un préjudice d’une autre nature [135] ? Cette lecture s’avère très constructive en ce qu’elle conduirait à revenir pour les seules indemnités transactionnelles à l’état du droit d’avant la loi de finances pour 2000 au risque de méconnaître la compétence du législateur.

148 À notre avis, ce n’est pas le sens de cette décision. Le Conseil constitutionnel a validé l’architecture de l’article 80 duodecies, en dehors, vis?à?vis d’autres types d’indemnités et, en dedans, en ce que le législateur a procédé à la délimitation des catégories pertinentes pour l’application des régimes exonératoires (indemnités de licenciement versées dans le cadre ou hors plan social, de mise à la retraite, compensant un licenciement sans cause réelle et sérieuse…). C’est à l’intérieur de ces dernières catégories, déterminées par le législateur et qui se substituent aux anciennes catégories prétoriennes, qu’il est interdit au Parlement de sous?distinguer selon que l’indemnité trouve sa source en un versement spontané par l’employeur, un jugement, une sentence arbitrale ou une transaction.

149 D’ailleurs, l’application de cette solution ne sera pas toujours simple, puisque le juge de l’impôt devra se muer en un juge du contrat de travail et déterminer, comme en l’espèce, si les faits à l’origine de l’indemnité caractérisent un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou une démission.

150 Enfin, même si la réserve d’interprétation est finalement étroite, la décision commentée revêt une grande importance pratique en permettant de conforter sur le plan fiscal le mécanisme de la transaction en tant qu’outil majeur de résolution des différends en droit du travail. Elle complète à cet égard la plus récente modification de l’article 80 duodecies du CGI, issue de l’article 21 de la loi n° 2013?504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, qui a pour effet d’exonérer, sous conditions, les indemnités versées dans le cadre d’une conciliation préalable obligatoire avant l’intervention du juge prud’homal.

151 Lukasz Stankiewicz

152 – Décision n° 2013?349 QPC du 18 octobre 2013, Société Allianz IARD et autre

153 LES EFFETS EN QPC D’UNE DÉCLARATION D’INCONSTITUTIONNALITÉ « NÉO?CALÉDONIENNE ». LE DÉJÀ JUGÉ ET LE MAL COMPRIS.

154 Par sa décision n° 2013?672 DC du 13 juin 2013 sur la loi relative à la sécurisation de l’emploi, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution l’article L. 912?1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de l’ordonnance no 2006?344 du 23 mars 2006 relative aux retraites professionnelles supplémentaires [136]. Sur le fond, se trouve ainsi remis en cause, notamment au nom de la liberté d’entreprendre, le mécanisme dit des « clauses de désignation » qui permet aux accords de branche comportant une mutualisation des risques d’imposer aux entreprises d’adhérer à un ou plusieurs organismes de protection sociale complémentaire.

155 Cette déclaration d’inconstitutionnalité résulte d’une application de la jurisprudence « État d’urgence en Nouvelle?Calédonie », par l’intermédiaire de laquelle le Conseil s’autorise, depuis une époque où la QPC n’était encore qu’un projet assez lointain, à examiner, lors de son contrôle a priori, une disposition législative en vigueur.

156 L’institution du contrôle a posteriori n’a nullement provoqué le déclin ou la désuétude de cette jurisprudence, ni l’absorption de ce contentieux d’origine prétorienne dans le giron de la QPC. Tout au contraire, son objet et son champ d’application n’ont cessé de s’étendre et sa mise en œuvre s’est accélérée au cours des deux années écoulées. La portée du contrôle ayant même été accrue de façon parfois novatrice et audacieuse. L’utilité contentieuse de ce contrôle n’a jamais été aussi éclatante, dans le contexte d’une régulation nouvelle du système de contrôle de constitutionnalité.

157 D’une part, le Conseil constitutionnel retient une conception extensive des conditions de recours à cette jurisprudence. L’hypothèse inaugurée en 1985 consiste à examiner la loi promulguée à l’occasion de l’examen des dispositions d’une loi qui la « modifient, la complètent ou affectent son domaine [137] ». Après avoir été mise en application [138], elle a été formellement étendue au cas de dispositions législatives qui la modifient même sans en changer la portée [139]. En substance, le Conseil constitutionnel ne fait pas mystère de son interprétation large et évolutive d’une telle condition [140]. En particulier, l’application de la jurisprudence néo?calédonienne a été récemment étendue par le Conseil constitutionnel, censures à la clé, à des dispositions législatives nouvelles qui affectent de manière indirecte « le domaine d’application » de dispositions législatives existantes [141]. La tendance de la jurisprudence est aujourd’hui à enclencher le contrôle sur la base d’un simple « rapport de solidarité » entre la loi déférée et la loi promulguée [142].

158 D’autre part, on soulignera que le Conseil constitutionnel s’est reconnu compétent pour moduler dans le temps les effets d’une censure néo?calédonienne [143], et a même transposé cette technique pour l’interprétation neutralisante émise au travers de l’application de cette jurisprudence [144]. Et on ne cachera pas longtemps que la décision commentée est à sa manière de nature à entretenir le regain d’intérêt que suscite la jurisprudence néo?calédonienne, en parallèle voire au soutien de la QPC, dans une relation quasi-synergique.

159 Il ne fait donc guère de doute que le Conseil constitutionnel souhaite conserver une pleine efficacité à son intervention sur la loi promulguée dans le cadre du contrôle a priori. D’autant plus que, dans ses plus récentes décisions, le Conseil constitutionnel a pris explicitement soin de fixer les effets de la déclaration d’inconstitutionnalité d’une loi promulguée dans le dispositif de ses décisions. Toutefois, la question de ces effets a été durablement discutée et plus récemment sujette à interrogation, particulièrement dans son articulation avec la mise en œuvre du contrôle a posteriori : une disposition législative frappée d’inconstitutionnalité mais toujours en vigueur peut?elle faire l’objet d’une QPC afin d’en obtenir formellement l’abrogation ?

160 Le Conseil d’État, dans sa décision de renvoi [145], avait répondu positivement en estimant non seulement que la loi déclarée inconstitutionnelle était malgré tout applicable au litige (car n’ayant pas disparu de l’ordre juridique) et que le caractère sérieux de la QPC, loin d’avoir perdu de sa pertinence du fait de l’inconstitutionnalité ainsi prononcée, se trouvait « nécessairement » caractérisé. Le préalable d’une telle construction était une lecture littérale et a contrario de l’article 23?2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 qui énonce la règle extinctive du non bis in idem constitutionnel : si le Conseil constitutionnel s’est déjà prononcé sur la conformité à la Constitution de cette disposition, relève le Conseil d’État, celui?ci « l’a déclarée non pas conforme mais contraire à la Constitution [146] ».

161 L’arrêt de renvoi est d’autant plus insolite que le Conseil d’État ajoute, pour renforcer cette motivation peu assurée, qu’« au surplus, la circonstance que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée porte sur une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61 de la Constitution après sa promulgation confère à celle?ci un caractère nouveau ». C’est là, en vérité, que résidait la situation réelle de cette question, dont le caractère inédit voire original plaçait opportunément le débat dans le giron de la notion fonctionnelle qu’est la question nouvelle [147]. Si l’affirmation du sérieux d’une question de constitutionnalité d’un texte déjà jugé inconstitutionnel confine à l’absurde ou à la tautologie, la démarche de transmettre au juge authentique une question de principe portant sur les effets d’une censure néo?calédonienne, et plus largement sur l’agencement des contrôles de constitutionnalité, n’était certainement pas sans justification, en droit comme en fait, au moins dans l’esprit du mécanisme de sollicitation offert par la QPC.

162 Quelle que soit l’opportunité de cette démarche volontariste qui entoure la saisine, c’est avec une rédaction sèche et un ton sommaire qui sied au prononcé d’une décision de non?lieu à statuer que le Conseil constitutionnel a estimé, au contraire, que l’autorité de ses décisions fait obstacle à ce qu’il soit de nouveau saisi afin d’examiner la conformité de telles dispositions.

163 Ce faisant, la solution commentée fait œuvre de décision de principe, tantôt salutaire, tantôt décourageante. On peut se réjouir que les pleins effets normatifs d’une censure prononcée dans le cadre de la jurisprudence néo?calédonienne soient, pour la première fois, solennellement reconnus (A). On peut observer, de façon plus indirecte, que le Conseil constitutionnel paraît résolu de refréner toute tentative consistant à placer la QPC comme un recours en interprétation de ses propres décisions (B). On ne pourrait donc ni refaire, ni faire commenter le match constitutionnel.

164 A ? On ne refait pas le match constitutionnel

165 L’autorité des décisions du Conseil constitutionnel fait obstacle à ce que le Conseil constitutionnel soit de nouveau saisi d’une disposition législative qu’il a déjà examinée, et ce compris une disposition déjà déclarée contraire à la Constitution. Même le Conseil constitutionnel ne peut « tuer un mort » pour reprendre l’image ironique de Nicolas Molfessis [148]. Que le Conseil constitutionnel refuse de rejuger une question qu’il a déjà tranchée n’est en soi guère surprenant, mais mérite ici quelques éclaircissements.

166 Dans un système juridique complexe, la décision no 2013?349 QPC présente l’insigne mérite de la simplicité que remettrait ici inutilement en cause une distinction trop subtilement poussée, quoique formellement fondée, entre inconstitutionnalité et abrogation. La position du Conseil d’État, pour qui les effets qui pourraient résulter d’une QPC n’étaient pas entièrement atteints puisque la disposition inconstitutionnelle est toujours en vigueur, se trouve infirmée. La loi jugée inconstitutionnelle non abrogée n’est quoi qu’il en soit plus applicable, et ce de façon absolue. Du point de vue du débat de constitutionnalité qui la concerne, aucune distinction n’est à faire avec la loi expressément abrogée : un texte déclaré inconstitutionnel n’est, d’une façon ou d’une autre, plus toléré dans notre ordre juridique. Le recours constitutionnel contre une disposition déjà déclarée inconstitutionnelle est tout simplement sans objet car les effets du contentieux constitutionnel se trouvent épuisés, y compris dans la modulation dans le temps des effets de la censure depuis que le Conseil fait un usage équivalent de ce pouvoir en a priori et en a posteriori.

167 L’argumentation du Conseil constitutionnel n’emprunte ni n’évoque pour autant le terrain du critère de l’applicabilité au litige, qui est rappelons?le une condition de recevabilité de la QPC. Cet enjambement se justifie à différents égards tant il est vrai que cette dernière condition s’entend « au sens » de l’ordonnance de 1958, et qu’en tout état de cause le Conseil constitutionnel refuse avec constance d’opérer son contrôle sur l’appréciation portée sur cette condition par le juge du renvoi. Notons surtout que le jeu du report dans le temps de la déclaration d’inconstitutionnalité peut avoir pour effet de laisser une disposition inconstitutionnelle formellement applicable à un litige.

168 La position retenue dans la décision n° 2013?349 QPC se veut plus forte et plus élémentaire, elle trouve son fondement direct dans l’article 62 alinéa 3 de la Constitution aux termes duquel les décisions qu’il prononce ne sont susceptibles d’aucun recours et s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. Le message est d’autant plus net : cet article s’oppose à toute application par un juge (ou par une autorité administrative) d’une disposition déclarée inconstitutionnelle quelque qu’en soit les modalités d’énonciation. La solution vaut parfaitement en cas de report dans le temps des effets de la déclaration d’inconstitutionnalité : la question est et demeure jugée, y compris en ce qu’elle procède à cet aménagement.

169 Le Conseil constitutionnel renonce à une orientation constructive quoiqu’assez séduisante qui aurait consisté à faire bénéficier la jurisprudence néo?calédonienne de la portée abrogative que l’article 62 alinéa 2 de la Constitution confère aux (seules) décisions QPC. Une telle option aurait conduit à affirmer que toute disposition déjà promulguée déclarée contraire à la Constitution est purement et simplement abrogée. On ne peut nier l’intérêt didactique de l’opération, qui aurait abouti à une alternative simple entre interdiction de la promulgation et abrogation.

170 Il faut voir dans la proclamation de la thèse de l’inapplicabilité absolue le souci d’une certaine continuité de doctrine. En effet, la décision n° 2013?349 QPC tranche définitivement une difficulté qui était jusqu’alors péremptoirement résolue par simple voie de communiqué, particulièrement explicite et directif, diffusé en 1999 [149]. La disposition déclarée inconstitutionnelle n’est certes pas formellement abrogée (le Parlement doit s’y atteler) mais elle est pleinement neutralisée : elle demeure dans le corpus des lois promulguées tout en étant privée de toute force normative. Déjà dans sa note de 1999, les services du Conseil constitutionnel soulignaient que le raisonnement selon lequel une telle décision n’aurait d’incidence directe que sur la loi non promulguée soumise à l’examen du Conseil constitutionnel, à défaut d’affecter les dispositions déjà promulguées [150], était « difficile à concilier avec l’autorité conférée aux décisions du Conseil constitutionnel par l’article 62 de la Constitution ».

171 Les choses sont claires. La déclaration d’inconstitutionnalité néo?calédonienne produit des effets juridiques par elle?même, c’est?à?dire sans attendre une quelconque confirmation dans le cadre de l’article 61?1 de la Constitution, et des effets juridiques propres, c’est?à?dire extérieurs à l’examen de la loi déférée. On notera incidemment que l’article 62 alinéa 3 de la Constitution se trouve ainsi explicitement mobilisée pour fonder une autorité juridique erga omnes dépassant le cadre strict de la loi déférée. Sa charge normative ne se limite donc pas à la chose jugée dans un litige que la loi querellée aurait préalablement définie, elle s’attache nécessairement à la déclaration?interprétation énoncée pour droit par le Conseil constitutionnel [151].

172 Tout porte à croire que la solution vaut pour l’autorité d’une déclaration d’inopérance qui correspond à une décision de conformité sous réserve qui affecte par translation une disposition promulguée, voire à faire justice aux conclusions de M. Olson tendant à reconnaître une pleine autorité aux réserves « par ricochet » sur le fondement de l’article 62 de la Constitution [152].

173 En l’état, la décision n° 2013?349 QPC s’inscrit dans une ligne jurisprudentielle consistant à installer le plus solidement possible l’équilibre des dispositifs de contrôle de constitutionnalité sur le fondement de l’autorité des décisions du Conseil constitutionnel [153]. Le Conseil constitutionnel reste ainsi fidèle à la décision no 2009?595 DC du 2 décembre 2009, par laquelle il a relevé que la condition qui figure au 2° de l’article 23?2 de l’ordonnance de 1958 doit être regardée comme résultant de l’article 62 de la Constitution.

174 L’articulation des contrôles de constitutionnalité a priori et a posteriori et, à travers elle, l’autorité des décisions constitutionnelles, en ressortent mieux ajustées. Le contentieux QPC n’a aucunement affaibli le contrôle de constitutionnalité des lois avant leur promulgation, lequel conserve plus que jamais tout son intérêt. Si l’instance QPC ne peut ainsi constituer un match retour du contrôle a priori, reste la question pratique de savoir si elle offre au Conseil constitutionnel la possibilité d’en être non seulement le commentateur autorisé mais l’interprète officialisé.

175 B ? On ne commente pas le match constitutionnel

176 Dans sa décision n° 2013?672 DC du 13 juin 2013, le Conseil a reporté dans le temps les effets de sa censure en jugeant que « la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article L. 912?1 du code de la sécurité sociale prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu’elle n’est toutefois pas applicable aux contrats pris sur ce fondement, en cours lors de cette publication, et liant les entreprises à celles qui sont régies par le code des assurances, aux institutions relevant du titre III du code de la sécurité sociale et aux mutuelles relevant du code de la mutualité [154] ».

177 L’objet réel de la QPC tendait à solliciter le Conseil constitutionnel afin que celui?ci apporte des précisions, supplémentaires ou clarificatrices, sur la portée de ce considérant, en particulier sur la définition des contrats en cours.

178 La stratégie première du requérant consistait à plaider une interprétation mutilante du dispositif de la décision de juin afin d’obtenir l’extension du bénéfice de l’inconstitutionnalité à tout requérant qui aurait engagé un recours contentieux. La démarche est, en tout état de cause, vouée à l’échec. Il n’y a aucun droit subjectif, notamment pas dérivé du droit au recours, qui protégerait le bénéfice d’une inconstitutionnalité, pas plus en QPC que dans le contrôle a priori de la loi promulguée. Au demeurant, si, en effet, le Conseil constitutionnel juge au nom de l’effet utile que l’auteur de la QPC doit en principe bénéficier de l’inconstitutionnalité prononcée, la levée de tout effet ex tunc conduit assez régulièrement le Conseil à refuser de faire bénéficier l’instance principale de la QPC [155].

179 Mais peut?on solliciter le Conseil constitutionnel afin, non pas qu’il revienne partiellement sur ce qu’il a jugé, mais qu’il en éclaircisse le contenu ? La question est loin d’être saugrenue tant l’appréciation par le juge ordinaire des effets décidés par le Conseil peut parfois être, plus ou moins objectivement, sujette à controverse (comme d’ailleurs la portée de certaines réserves d’interprétation).

180 Elle s’est déjà posée s’agissant des modalités d’application dans le temps de l’abrogation prononcée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010?2 QPC du 11 juin 2010 concernant le dispositif transitoire « anti?perruche ». Une ambiguïté demeurait, faute d’indication plus directive notamment dans le dispositif, pour déterminer si le considérant 23 de cette décision remettait ou non en cause l’application rétroactive de ce texte « aux instances à venir relatives aux situations juridiques nées antérieurement au 7 mars 2002 ». Tout en se revendiquant dans des termes fondamentalement identiques de l’application de la décision du Conseil constitutionnel, Conseil d’État et Cour de cassation ont pu adopter une lecture opposée (l’application rétroactive pour l’un, l’abrogation intégrale pour l’autre) [156].

181 Une difficulté comparable a été soulevée dans la suite de la décision n° 2012?284 QPC du 23 novembre 2012 s’agissant du droit des parties non assistées par un avocat en matière d’expertise pénale, le Conseil ayant censuré avec effet immédiat mais précisé, en vue de priver sa décision de tout effet rétroactif, que la déclaration d’inconstitutionnalité « est applicable à toutes les décisions ordonnant une expertise prononcées postérieurement à la publication de la présente décision [157] ». L’interprétation de ce considérant a été à l’origine d’un recours en rectification d’erreur matérielle formé à l’égard de la décision n° 2012?284 QPC. Une telle démarche, qui n’a toutefois pas abouti, tendait en réalité à ce que le Conseil, selon les termes de la saisine, « complète sa décision par une précision propre à en assurer l’effet utile [158] ».

182 Au cas présent, quelle est la portée exacte de la mention, au sein de la décision de juin, selon laquelle la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article L. 912?1 du code de la sécurité sociale régissant les clauses de désignation « n’est toutefois pas applicable aux contrats pris sur le fondement de [cet] article, en cours à la date de cette publication, et liant les entreprises à celles qui sont régies par le code des assurances, aux institutions et aux mutuelles » ? Le commentaire officiel accompagnant la décision indiquait que « les conventions déjà conclues continueront de produire leurs effets jusqu’à leur terme normal ». Il n’en reste pas moins que la référence aux « conventions » a pu donner lieu à deux lectures selon que l’on considère que se trouvent visés uniquement les contrats d’assurance des organismes désignés ou, plus largement, les accords de branche organisant la désignation. Une lecture restrictive a concrètement pour effet de maintenir le seul contrat et permet aux entreprises adhérentes aux organismes désignés de considérer qu’elles peuvent résilier leur adhésion dès l’année en cours. Sans répondre directement à la difficulté d’interprétation, la décision n° 2013?349 QPC livre une clarification itérative s’agissant de la notion de « contrats en cours » : il s’agit bien des contrats liant les entreprises aux sociétés d’assurance, institutions de prévoyance et mutuelles.

183 En définitive, la question fondamentale des modalités d’application des effets dans le temps décidés par le Conseil trouve, dans la décision de non?lieu à statuer n° 2013?349 QPC, une résonance palpable. Le cadre procédural de la QPC se prête partiellement à cet office. Mais le Conseil constitutionnel refuse d’envisager son rôle en tant que juge de droit commun susceptible d’interpréter ses propres décisions, mission qui se trouve donc, en l’état du droit positif, confiée en dernier lieu au Conseil d’État et à la Cour de cassation en qualité de juges de l’application des décisions constitutionnelles. On mesure la portée fondamentale du débat : le Conseil constitutionnel n’est?il tourné que vers le Parlement ? Sa place n’est?elle pas aussi, sans nécessairement tomber dans le contrôle concret, celle d’un juge supérieur ? Quelle marge de manœuvre pour le juge ordinaire ? La reconnaissance formelle d’un recours en interprétation de décisions constitutionnelles, à l’instar de ce qui existe par exemple devant la Cour constitutionnelle belge, voire sous la forme d’une « réclamation constitutionnelle », aurait l’insigne mérite de canaliser une demande pratique irrésistible qui conduit les acteurs à faire preuve aujourd’hui d’ingéniosité ou de contorsions pour solliciter le Conseil constitutionnel afin de générer de l’interprétation, voire l’exécution, d’une précédente décision.

184 Mathieu Disant

185 II – CHRONIQUE DE JURISPRUDENCE QPC EN MATIÈRE PÉNALE

186 28 juin 2013 – 5 juillet 2013 sous la responsabilité de Jean?Baptiste Perrier

187 Si le nombre de questions prioritaires de constitutionnalité diminue sensiblement, particulièrement dans la matière pénale, la QPC continue d’innerver l’ensemble de la matière. Trois décisions sont (seulement) commentées, et deux sont des décisions d’abrogation, preuve de l’opportunité des moyens soulevés par les requérants, ou par le Conseil. Par ces décisions, le Conseil constitutionnel continue son œuvre correctrice, tant s’agissant des incriminations, au regard notamment du principe d’égalité (A), que de la procédure, à l’aune du principe d’impartialité (B), que s’agissant des sanctions, sous l’angle de l’exigence d’individualisation (C).

188 A ? L’égalité et la loi pénale

189 – Décision n° 2013?328 QPC du 28 juin 2013, Association Emmaüs Forbach

190 FRAUDE AUX PRESTATIONS SOCIALES : SPECIALIA GENERALIBUS (NON) DEROGANT ?

191 Le 23 avril 2013, le Conseil constitutionnel a été saisi par la chambre criminelle de la Cour de cassation [159] d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles incriminant le délit de perception frauduleuse des prestations versées au titre de l’aide sociale [160]. Requérante à la QPC, l’association Emmaüs Forbach était poursuivie devant le tribunal correctionnel de Sarreguemines de l’infraction prévue et réprimée par ce texte.

192 Devant cette juridiction elle soulevait l’argument que la disposition contestée violait le principe de légalité criminelle garanti par l’article 34 de la Constitution ainsi que par les articles 5, 7 et 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Transmise à la chambre criminelle par le tribunal, cette question devait apparaître comme sérieuse aux yeux des magistrats du Quai de l’Horloge qui apporteront eux?mêmes les détails de la possible inconstitutionnalité du texte en précisant dans leur arrêt que « la définition de la perception frauduleuse pourrait être considérée comme insuffisamment claire et précise, dès lors que le législateur s’est abstenu de définir la nature des agissements entachés de fraude ». L’on peut d’ores et déjà s’étonner de l’absence de réelle argumentation par l’auteur de la QPC. En effet, sans l’attendu de la chambre criminelle, rien ne permettait de savoir précisément ce qui était entaché d’inconstitutionnalité dans la disposition contestée [161]. L’on relèvera donc ici un exemple édifiant de la façon dont la Haute juridiction « marque son territoire » sur le terrain de la formulation des QPC.

193 L’association Emmaüs reprochait, semble?t?il, à l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles, une absence de définition des agissements frauduleux incriminés par le texte et qui exposaient l’auteur aux peines prévues pour le délit d’escroquerie, c’est?à?dire, cinq ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende. Cette absence de définition jette en effet un doute supplémentaire sur la cohérence de l’arsenal répressif de la fraude aux prestations sociales. Ainsi, il n’échappera pas au lecteur que l’article L. 114?13 du code de la sécurité sociale, qui incrimine le fait de se rendre coupable de fraude ou de fausse déclaration pour obtenir le revenu de solidarité active, l’aide personnalisée au logement ou l’allocation aux adultes handicapés est puni d’une amende de 5 000 euros.

194 Nous sommes donc bien en présence de deux comportements qualifiés identiquement par le législateur, mais dont la répression expose à des peines radicalement différentes quant à leur nature et leur quantum : peine privative de liberté, pour l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles, simple amende pour les agissements de l’article L. 114?13 du code de la sécurité sociale.

195 Cette différence entre la sanction de ces infractions, pourtant toutes deux qualifiées de fraude par le législateur, n’échappe pas aux Sages. Cela les amène à soulever d’office le grief tiré de l’atteinte au principe d’égalité devant la loi pénale [162] comme le leur permet l’article 7 du règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité [163]. En déplaçant le curseur de la légalité vers l’égalité, le Conseil constitutionnel a pu examiner la disposition contestée à travers un nouveau prisme, qui l’a logiquement amené à déclarer l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles contraire à la Constitution en raison de la différence existant entre les peines prévues par le législateur pour des comportements identiques, mais également de la différence de traitement procédural instituée par la suite [164]. L’abrogation du texte prend effet à compter de la publication de la décision commentée.

196 Cette décision d’abrogation ne présente pas a priori d’originalité. Pourtant, à y regarder de plus près, l’on ne manquera pas de relever qu’il s’agit de la première décision rendue sur ce fondement en droit pénal de fond (1) au moyen d’une méthode habituellement utilisée lorsque le Conseil examine des dispositions de procédure pénale (2).

197 1 – Le principe d’égalité devant la loi pénale, fondement d’abrogation inédit en droit pénal de fond

198 Dans la décision commentée, les Sages relèvent d’office le grief relatif au principe d’égalité des citoyens devant la loi pénale, écartant ainsi le moyen d’inconstitutionnalité fondé sur la violation de la légalité criminelle. Pourtant, l’un ne va pas sans l’autre. En effet, c’est l’absence de définition claire de la fraude incriminée à la fois par l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles et l’article L. 114?13 du code de la sécurité sociale et la grande différence de répression entre les deux infractions qui amènent à se poser la question de l’égalité des individus devant la loi pénale. En ne répondant qu’à la deuxième question, le Conseil ne donne qu’une réponse partielle quant à la qualité du délit ; l’on ne sait donc pas si le texte abrogé était rédigé en des termes suffisamment clairs et précis.

199 Certes, sa disparition nous incite à répondre par la négative, il aurait toutefois été intéressant de donner quelques éléments de réponse sur ce point, tant les incriminations pénales pèchent souvent par leur manque de précision. L’on se souvient de l’abrogation du délit de harcèlement sexuel qui pêchait par son absence de définition [165], mais il ne faut pas oublier de mentionner la double suppression des infractions incestueuses, qui n’avaient pas leur place dans le code pénal tant leur rédaction était maladroite et leur utilité était quasi?nulle [166]. Ces quelques exemples éloquents en droit pénal de fond nous avaient habitués à un examen des lois pénales par le prisme de leur clarté, leur précision et donc leur respect de la légalité criminelle. C’est dans cette veine que l’association requérante à la QPC avait voulu inscrire sa requête en invoquant comme fondements textuels l’article 34 de la Constitution et les articles 5, 7 et 8 de la DDHC.

200 Pour autant, c’est un autre fondement de censure que les Sages retiennent contre la disposition soumise à leur examen. Ils déduisent de cette absence de définition de la « fraude aux prestations sociales », une différence de répression et une différence de traitement procédural injustifiées. C’est donc de ce point de vue qu’ils vont interroger la disposition en cause. Car, s’il y a bien une situation identique entre les individus qui se rendraient coupables de perception frauduleuse de prestations sociales au sens de l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles, et ceux qui enfreindraient la disposition spéciale de l’article L. 114?14 du code de la sécurité sociale qui incrimine la perception frauduleuse de certaines aides sociales, cette identité est amoindrie par une répression différenciée et un traitement procédural également différent, notamment en matière de possible privation de liberté lors de l’enquête ou de l’instruction. En effet, dans le premier cas, les peines applicables étant de cinq ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende, les auteurs peuvent être placés en garde à vue et éventuellement sous contrôle judiciaire et en détention provisoire. Ce risque n’est pas encouru par les auteurs du délit de l’article L. 114?13 du code de la sécurité sociale, qui ne se verront infliger qu’une peine d’amende de 5 000 euros et pour lesquels une privation de liberté durant l’enquête n’est pas envisageable. Pour des faits identiques à l’origine, les peines ainsi que les modalités procédurales auxquelles sont exposés les auteurs sont radicalement différentes.

201 Si l’on franchit un pas de plus dans l’analyse, l’on peut relever le problème de fond qui semblait se poser en l’espèce : celui des concours de qualifications. Deux qualifications possibles se présentaient aux autorités de poursuites : la qualification générale de fraude aux prestations sociales de l’article L. 135?1 du code des affaires sociales et de la famille, punie des peines du délit d’escroquerie, et les diverses qualifications spéciales de l’article L. 114?13 du code de la sécurité sociale qui concernent l’obtention frauduleuse du revenu de solidarité active, de l’aide personnalisée au logement ou de l’allocation aux adultes handicapés. En réalité, la présence de ce conflit de qualifications est contestable. La doctrine n’aura pas manqué de noter qu’en vertu du principe selon lequel les lois spéciales dérogent aux lois générales (specialia generalibus derogant), « les juges du fond, saisis sur le fondement du texte général (article L. 135?1), d’une perception frauduleuse de l’aide personnalisé au logement, auraient l’obligation de poursuivre sur le fondement de l’article L. 114?13 du code de la sécurité sociale, après avoir mis le prévenu en mesure de se défendre contre cette nouvelle qualification [167] ». Il n’y avait donc, semble?t?il, aucun véritable concours de qualifications et, partant, aucune atteinte à l’égalité devant la loi pénale. C’est donc au mépris de certains principes qui empêchent plusieurs textes pénaux de s’appliquer à un même comportement, ainsi qu’au mépris du pouvoir des juridictions du fond de choisir la qualification la plus adaptée à une situation, que le Conseil constitutionnel décide d’abroger la disposition générale de l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles. Seule demeure la disposition spéciale, certes punie plus faiblement, mais qui n’a pas vocation à s’appliquer aux cas de fraude aux prestations sociales hors de ceux que le texte énumère.

202 L’on peut toutefois se poser la question de l’idonéité du fondement soulevé par le requérant à la QPC. En effet, n’aurait?il pas été plus opportun de maintenir un examen de la disposition sur le fondement de la légalité criminelle ? Un rapide regard vers la jurisprudence strasbourgeoise semble le confirmer. La Cour européenne des droits de l’homme, dans un arrêt rendu contre Malte le 22 janvier 2013 a jugé qu’est contraire au principe de légalité criminelle garanti par l’article 7 de la Convention, l’existence de deux incriminations, qui se saisissent des mêmes faits (en l’espèce, détention de stupéfiants) mais avec des peines différentes et qui laissent au ministère public le libre choix du fondement des poursuites [168]. Dans cet arrêt, c’est la différence dans la répression qui a emporté la violation du principe de la légalité criminelle. C’est bien autour de cette même question que tourne la décision commentée. Pourtant, le Conseil occulte le fondement invoqué et le remplace par celui d’égalité dans sa décision de censure.

203 En procédant à l’abrogation du texte examiné sans en appeler au législateur, le Conseil constitutionnel a fait le choix de rétablir lui?même l’égalité entre prévenus, procédé couramment employé lorsque les dispositions portées à sa connaissance relèvent de la procédure pénale.

204 2 – Le rétablissement de l’égalité sans recours au législateur, méthode fréquente en procédure pénale

205 En prenant la décision d’abroger l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles sans pour autant renvoyer le législateur à sa copie, les Sages de la rue Montpensier affichent clairement leur volonté de remédier immédiatement au déséquilibre existant.

206 Il est pourtant rare de voir le Conseil constitutionnel jouer ce rôle lorsqu’il est question de normes de droit pénal de fond. La notion d’égalité semble plutôt innerver la procédure pénale, à travers notamment le principe d’égalité des armes. Les Sages avaient d’ailleurs très tôt ouvert la voie avec la décision d’abrogation de l’article 575 du code de procédure pénale qui limitait la possibilité, pour une partie civile, de former un pourvoi en cassation contre les arrêts de la chambre de l’instruction [169]. En abrogeant l’article 575 du code de procédure pénale sans recourir au législateur, ils venaient rétablir un équilibre que la loi n’avait su préserver.

207 La méthode est la même lorsque, dans une décision rendue en matière de détention provisoire [170], le Conseil abroge une partie de l’article 207 alinéa 1er du code de procédure pénale et met fin ainsi à la réserve de compétence de la chambre de l’instruction et qui privait le mis en examen des garanties de mise en liberté offertes par la loi. En fonction de la décision de la chambre de l’instruction de s’estimer seule compétente ou non relativement au contentieux de la privation de liberté, un individu pouvait en effet perdre ses chances de demander sa mise en liberté durant l’instruction. L’absence d’égalité entre deux mis en examen est donc censurée par les Sages. C’est encore l’égalité qui a conduit le juge constitutionnel dans sa décision d’abroger la partie de l’article 175 du code de procédure pénale qui prévoyait que la copie des réquisitions définitives du procureur de la République n’était adressée qu’aux avocats des parties [171]. Là encore, le Conseil a abrogé sans recours au législateur pour rétablir l’égalité entre les parties au procès.

208 Ces exemples non exhaustifs illustrant la méthode du Conseil constitutionnel en matière d’égalité dans le procès pénal peuvent être rapprochés de la décision commentée. En abrogeant l’article L. 135?1 du code de l’action sociale et des familles, les Sages ont souhaité remettre tous les auteurs de fraudes aux prestations sociales sur un pied d’égalité en ne leur faisant encourir que l’amende de 5 000 euros prévue par l’article L. 114?13 du code de la sécurité sociale. Pourtant, il semblerait que le remède soit pire que le mal. En effet, la disparité de répression n’a pas corrigé l’incohérence de l’arsenal législatif originel, elle n’a fait que brouiller les pistes en n’expliquant pas pour quelles raisons l’article L. 135?1 a dû disparaître [172]. La conséquence est simple : les tribunaux seront désormais contraints de poursuivre sur le fondement direct de l’escroquerie (articles 313?1 et suivants du code pénal) les faits de fraudes aux prestations sociales non prévus par le texte de l’article L. 114?13.

209 Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a cru bon d’utiliser une méthode fréquente en matière de procédure pénale sans prendre garde de vérifier qu’elle était adaptable à la situation examinée. Si l’on ne peut que louer la volonté des Sages de rétablir l’égalité entre justiciables, l’on ne peut ignorer qu’en l’espèce une prise en compte de certains principes existants (au premier chef, specialia generalibus derogant) aurait pu permettre d’éviter la déconvenue qui fait suite à cette abrogation. Une simple demande de réécriture des textes auprès du législateur, afin de clarifier les comportements incriminés, eût été préférable aussi bien du point de vue de la légalité ? ignorée ici ? que de l’égalité, peut?être trop mise en avant.

210 Sofian Anane

211 B – L’impartialité et la procédure pénale

212 – Décision n° 2013?331 QPC du 5 juillet 2013, Société Numéricâble SAS et Autre

213 IMPARTIALITÉ DE L’AUTORITÉ DE RÉGULATION DES POSTES ET DES COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES[173]

214 Saisi par le Conseil d’État [174], le Conseil constitutionnel était invité à se prononcer sur le respect par l’ARCEP du principe d’impartialité ; l’on ne peut être surpris d’un tel examen, tant l’on sait que, selon le Conseil [175], une autorité administrative indépendante (AAI) qui prononce des sanctions doit se conformer au principe d’impartialité. Cette interprétation est d’ailleurs en accord avec la position constante de Cour EDH selon laquelle l’« accusation en matière pénale » de l’article 63 de la Convention EDH peut s’appliquer à une autorité administrative non juridictionnelle dès lors que les « critères Engel [176] » sont remplis.

215 Le problème soulevé réside dans la conformité de la procédure de sanction mise en œuvre par l’ARCEP avec le principe d’impartialité. Procédure « régie » par l’article L. 36?11 du code des postes dans lequel la séparation des fonctions n’est pas prévue.

216 Les requérants, ayant fait l’objet d’une sanction par l’ARCEP, estiment que l’absence de garantie quant à la séparation des pouvoirs de poursuite et d’instruction et des pouvoirs de sanction rendrait la disposition contestée inconstitutionnelle ; cette absence porterait, selon eux, atteinte au principe d’indépendance et d’impartialité qui découle de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

217 Sans surprise, le Conseil constitutionnel accueille favorablement le grief tiré de l’atteinte au principe de la séparation des fonctions, principe nécessaire pour garantir l’impartialité de l’autorité qui prend des sanctions.

218 Il est en effet évident que le respect de l’impartialité fonctionnelle ou objective [177], implique inévitablement la séparation des fonctions de poursuite, d’instruction et de jugement ; l’on peut douter de l’impartialité d’une autorité dans laquelle le même « organe », à savoir le directeur général dépendant du président de l’autorité, déclenche les poursuites, fait d’éventuelles investigations en dirigeant les services chargés de l’instruction et assiste aux délibérations [178].

219 Cette décision est à rapprocher du principe séparatiste appliqué au procès pénal dont l’un des buts est de préserver l’impartialité fonctionnelle des juges. Il n’est pas inutile de rappeler que l’impartialité fonctionnelle est impersonnelle, au contraire de l’impartialité subjective. Il s’agit de vérifier si les circonstances organiques et/ou fonctionnelles ne sont pas constitutives d’un doute quant à l’impartialité du juge. L’impartialité fonctionnelle est axée sur des considérations tenant à la fonction de magistrat et ce, indépendamment de sa personne, de ses opinions, de son attitude. Il s’agit surtout de vérifier si l’exercice de ses fonctions, passées ou actuelles, n’est pas constitutif d’un risque d’atteinte ou d’une atteinte à son impartialité, pour juger ou connaître la cause qui lui est soumise [179].

220 Le principe séparatiste peut toutefois connaître différents degrés d’application, ce qui est notamment le cas pour le procès pénal.

221 Le principe est d’application stricte lorsqu’est concernée la fonction de poursuite, c’est?à?dire la fonction dévolue au ministère public. La séparation des fonctions de poursuite et de jugement a d’ailleurs été consacrée explicitement par le Conseil constitutionnel en 1995 [180] et par l’article préliminaire du code de procédure pénale [181]. Dès lors, le magistrat qui a déclenché les poursuites ne peut ni instruire ni juger car, en plus de ne pas être indépendant vis?à?vis du pouvoir politique, le ministère public n’est pas impartial du fait de son rôle qui est de déclencher l’action publique, c’est?à?dire qu’« il met tout en œuvre pour traduire l’inculpé en jugement [182] » et ce au nom de la société. Il est une partie au procès et non un juge. Or, ce rôle est tout à fait comparable à celui qu’occupait le directeur général de l’ARCEP, qui déclenchait les poursuites et participait au délibéré. Il est une partie, il lui est donc impossible d’être à la fois juge et partie. Le principe séparatiste entre les fonctions de poursuite et d’instruction d’une part, de poursuite et de jugement d’autre part ne souffre d’aucune entorse.

222 Le principe est à relativiser en ce qui concerne les fonctions d’instruction et de jugement. Selon la jurisprudence adoptée par la Cour EDH depuis 1989 [183] un juge peut instruire et juger sans pour autant méconnaître le principe d’impartialité. Il faudra regarder s’il a fait un large usage de ses pouvoirs d’instruction qui l’aurait amené à avoir un préjugement irréversible de la cause. Cette jurisprudence permet donc de nommer cette « impartialité de réalité », c’est?à?dire qu’elle consiste en une analyse in concreto du cumul des fonctions. Avec cette interprétation, il serait donc possible de considérer que le directeur général de l’ARCEP puisse instruire et juger sans porter atteinte au principe d’impartialité. Cette hypothèse a été réaffirmée par la Cour EDH dans sa décision Dubus c/ France concernant le cumul des fonctions d’instruction et de jugement au sein de la commission bancaire. À cette occasion elle rappelle que « le cumul des fonctions d’instruction et de jugement peut être compatible avec le respect de l’impartialité garanti par l’article 6 § 1 de la Convention [184] ».

223 Cependant, dans la présente décision, le Conseil Constitutionnel ne donne pas de détail quant à cette possibilité. L’on peut raisonnablement penser que dans la lignée de sa décision relative à l’impartialité du juge des enfants [185], il continuera à appliquer un principe séparatiste rigoureux, sans égard pour l’ampleur concrète du cumul des fonctions d’instruction et de jugement. Le Conseil constitutionnel poursuit donc le retour de « l’apparence [186] » dans l’appréciation de l’impartialité, le retour d’une conception in abstracto de l’impartialité fonctionnelle. On peut parler d’apparence de partialité fonctionnelle ou de présomption [187] de partialité, c’est?à?dire que d’un fait connu, le cumul des fonctions d’instruction et de jugement, on va induire un fait inconnu, la partialité. Les futures décisions du Conseil constitutionnel permettront de savoir s’il maintiendra sa jurisprudence ou s’il se contentera de réserves d’interprétation qui pourraient permettre, dans une certaine mesure, le cumul entre les fonctions d’instruction et de jugement.

224 Audrey Oudoul

225 C – L’automaticité et les sanctions pénales

226 – Décision n° 2013?329 QPC du 28 juin 2013, Société Garage Dupasquier

227 CONFORMITÉ DES SANCTIONS AUTOMATIQUES : UN RAPPEL VIRTUEL DES EXIGENCES CONSTITUTIONNELLES

228 Prenant la pleine mesure de son rôle de protecteur des droits et libertés fondamentaux, le Conseil constitutionnel a recours à des critères finalistes pour appliquer les principes d’individualisation et de nécessité des peines aux sanctions ayant le caractère d’une punition, catégorie plus large que celles des mesures punitives formellement qualifiées de peines. Cette large application le conduit régulièrement à appliquer les principes relevant de la matière pénale à des sanctions prononcées par des autorités non judiciaires [188], la décision 2013?329 du 28 juin 2013 n’en est qu’une nouvelle illustration.

229 Saisi par le Conseil d’État par une décision du 29 avril 2013 [189], le Conseil constitutionnel devait ainsi se prononcer sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution d’une sanction administrative, en l’occurrence la sanction de publication et d’affichage d’une sanction administrative, mesure prévue par l’article L. 3452?4 du Code des transports.

230 Ce texte prévoit qu’« une publication de la sanction administrative prévue par les articles L. 3452?1 et L. 3452?2 est effectuée dans les locaux de l’entreprise sanctionnée et par voie de presse [190] ». Selon la société requérante, cette publication constitue une sanction revêtant un caractère obligatoire, et serait donc contraire au principe de nécessité et d’individualisation des peines garanti par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Ce principe prohibe en effet toute sanction automatique, conduisant à l’abrogation de toute sanction qui s’appliquerait sans avoir à être prononcée par le juge, comme le Conseil l’a rappelé en abrogeant l’article L. 7 du Code électoral, lors de la première décision rendue en matière pénale suite à une question prioritaire de constitutionnalité [191].

231 Face à cette apparente contrariété, le Conseil indique dans cette décision du 28 juin 2013 que le principe d’individualisation des peines implique que la sanction administrative ne peut être appliquée « que si l’administration, sous le contrôle du juge, l’a expressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce » [192]. Cela étant, le juge constitutionnel ajoute immédiatement qu’un tel principe ne saurait « interdire au législateur de fixer les règles assurant une répression effective des infractions [193] ».

232 D’une contrariété, le Conseil constitutionnel en vient donc à une tentative de conciliation. Il observe alors que, « en instituant une peine obligatoire de publication et d’affichage des sanctions de retrait des copies conformes de licence ou d’immobilisation des véhicules d’une entreprise de transport routier en cas d’infraction aux réglementations des transports, du travail, de l’hygiène ou de la sécurité, les dispositions contestées visent à renforcer la répression de ces infractions en assurant à ces sanctions une publicité tant à l’égard du public qu’à celui du personnel de l’entreprise [194] ».

233 Dès lors, sur le principe, le Conseil considère ? ou plutôt rappelle ? que l’article 8 de la Déclaration de 1789 ne s’oppose pas à ce que la sanction revête un caractère automatique, visant sans doute plus à prévenir qu’à réprimer, malgré les objectifs proposés par les Sages [195]. Toutefois, si la peine peut revêtir un caractère automatique, ce n’est qu’à la condition que le juge puisse en faire varier la durée ou l’intensité ; le respect de cette exigence avait conduit le Conseil constitutionnel à valider la peine de publication prévue par l’article L. 121?4 du Code de la consommation [196], son non?respect avait conduit à l’abrogation de l’article 1741 du Code général des impôts prévoyant une telle sanction en matière fiscale, sans possibilité de modulation [197].

234 Voilà donc l’exigence que devait respecter le Code des transports s’agissant du prononcé de cette sanction, cette possibilité de modulation, et le Conseil observe que les dispositions contestées ne font pas obstacle au respect du principe. Toutefois, le Conseil ne pousse pas plus loin son contrôle, compte tenu du fait que les modalités de la publication de la sanction sont fixées par décret en Conseil d’État [198]. Si le pouvoir règlementaire est tenu de respecter les exigences d’individualisation ou de nécessité des peines, il n’appartient pas au Conseil constitutionnel d’apprécier le respect de ces exigences.

235 Le Conseil constitutionnel ne procède donc qu’à un rappel virtuel des exigences en la matière, puisqu’il ne peut que vérifier que la loi ne pose pas d’obstacle au respect des exigences par les dispositions règlementaires ; il revient donc au juge administratif le soin d’assurer la réalité du contrôle.

236 Jean?Baptiste Perrier


Date de mise en ligne : 31/03/2014

https://doi.org/10.3917/rfdc.097.0121

Notes

  • [*]
    Guylène Nicolas, Maître de conférences de droit public HDR, UMR 7268 ADES, Aix?Marseille Université, EFS CNRS ; Tamara Lajoinie, Doctorante contractuelle à l’ILF?GERJC, CNRS UMR 7318, Aix?Marseille Université ; Olivier Négrin, Professeur, Aix?Marseille Université ; Lukasz Stankiewicz, Maître de conférences de droit public, Université Lyon 3 ; Mathieu Disant, Maître de conférences HDR à l’École de droit de la Sorbonne, Université Paris I ; Sofian Anane, Doctorant, Aix?Marseille Université ; Audrey Oudoul, ATER à l’Université d’Auvergne ; Jean?Baptiste Perrier, Maître de conférences à l’Université d’Auvergne.
  • [1]
    D. Orliac, Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi, 20 mars 2013.
  • [2]
    Cette loi a toutefois fait l’objet d’une QPC : CC, décis. n° 2012?249 QPC du 16 mai 2012, Société Cryo?Save France.
  • [3]
    Loi n° 94?654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, JO, 30 juillet 1994, p. 11060.
  • [4]
    Ancien article L. 152?8 du Code de la santé publique.
  • [5]
    Ancien art. L. 152?8.
  • [6]
    Ancien art. L. 152?8.
  • [7]
    Celle de priver les scientifiques français d’objet d’expérimentation inestimable alors que seraient exploitées en France les découvertes faites à l’étranger si des thérapeutiques innovantes en découlaient, Ch. Thibault, « De la nécessité de l’expérimentation sur l’embryon humain et de son contrôle », in B. Le Mintier (dir.), Les lois “bioéthiques” à l’épreuve des faits : réalités et perspectives », Puf, collection Droit et Justice, 1999.
  • [8]
    CCNE, Avis n° 53 sur la constitution de collections de cellules embryonnaires humaines et leur utilisation à des fins thérapeutiques ou scientifiques, 11 mars 1997.
  • [9]
    CCNE, Avis n° 60 sur le réexamen des lois de bioéthique, 25 juin 1998.
  • [10]
    Conseil d’Etat, « Les lois de bioéthique : cinq ans après », Paris, La Documentation française, Collection « Les études du Conseil d’État », 1999.
  • [11]
    L’arrêté avait fait l’objet d’un référé, le 13 novembre 2002, le Conseil d’Etat avait décidé de suspendre pour quatre mois l’exécution de la décision du ministre jugeant que l’on pouvait émettre « un doute sérieux sur la légalité de la décision ministérielle » et rappelant l’interdiction législative de recherche embryonnaire. Toutefois, le 17 janvier 2003, le tribunal administratif de Paris a rendu un avis contraire à celui du Conseil d’État considérant que « les cellules souches pluripotentes humaines d’origine embryonnaire ne sont pas des embryons », que la décision du ministre n’avait donc « ni pour objet, ni pour effet de permettre une expérimentation sur l’embryon ». C’est rappeler à quel point l’interprétation des normes législatives encadrant l’usage de l’embryon et de ces cellules était sujet à controverse.
  • [12]
    Le Sénat a inversé le principe posé dans le projet gouvernemental et imposé l’article L. 2151?5 al. 1 csp « la recherche sur l’embryon est interdite ».
  • [13]
    L. 2151?5 al. 4 csp.
  • [14]
    La recherche apporte ainsi une solution au sort des embryons cryoconservés, 176 500 dans l’azote liquide au 31 décembre 2006, avec une augmentation de 25 % par rapport à 2005 selon le rapport annuel de l’Agence de la Biomédecine de 2007. Après l’autorisation d’une soixantaine de protocole de recherche, l’Agence estime à 171 417 le nombre d’embryons cryoconservés au 31 décembre 2010 dont 3,9% sans projet parental, voir le site de l’agence.
  • [15]
    CC, décis. n° 2004?498 DC du 29 juillet 2004, loi relative à la bioéthique, JO, 7 août 2004, p. 14077 voir notamment J.?C. Galloux, « L’article 17 de la loi bioéthique relatif à la question de la brevetabilité du corps humain n’est pas contraire à la Constitution », JCP, 2004 (44?45), pp. 1979?1982.
  • [16]
    Actuel Art. L. 2151?5.?II.
  • [17]
    Le préambule de la Constitution de 1946 d’où découle depuis, traditionnellement, le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
  • [18]
    Al. 10 et 11 du préambule de 1946.
  • [19]
    X. Bioy, « À la recherche de l’embryon… », note sous CC, décis. n° 2013?674 DC, 1er août 2013, Constitutions, 2013, p. 443.
  • [20]
    La jurisprudence du Conseil d’État sur le lancer de nain en reste la célèbre illustration fondatrice : CE, 27 octobre 1995, Commune de Morsang?sur?Orge, Rec. Lebon p. 372
  • [21]
    Rappelons que le Conseil constitutionnel a dénié toute valeur constitutionnelle à la protection du patrimoine génétique de l’humanité, considérant 11 de la décision n° 94?343/344 DC.
  • [22]
    Cette consultation citoyenne était constituée en triptyque : un site internet accessible à tous (70 000 visites), 226 événements sous l’égide des espaces éthiques en santé mais aussi des communautés religieuses et des groupes de réflexion spirituelle et, enfin, trois forums régionaux.
  • [23]
    C. Bergoignan?Esper, « Les états généraux de la bioéthique, un tournant dans la réflexion », D., 2009, p. 1837.
  • [24]
    A. Graf, « États généraux de la bioéthique », Rapport final, 1er juillet 2009, p. 36, consultable sur : http://www.etatsgenerauxdelabioethique.fr/uploads/rapport_final.pdf.
  • [25]
    Ibid.
  • [26]
    Article 47 de la loi de 2011.
  • [27]
    X. Bioy, « À la recherche de l’embryon… », op. cit.
  • [28]
    Convention pour la protection des Droits de l’Homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine signée à Oviedo, le 4 avril 1997.
  • [29]
    Ratification le 13 décembre 2011, avec une entrée en vigueur le 1er avril 2012, alors que la France l’avait signé en 1997.
  • [30]
    Article 18 §1 et §2 de la Convention.
  • [31]
    En 2008 a été constitué, à la demande du Président de la République, un comité dirigé par Mme Simone Veil afin d’étudier la nécessité de compléter le préambule de la Constitution de 1958 par des normes de bioéthique.
  • [32]
    Pour plus de développement voir G. Nicolas, « De l’universalité de la bioéthique : réflexions sur la transposition des valeurs de la Convention d’Oviedo dans le Pacifique », in Mélanges en l’Honneur du Professeur Mémeteau, B. Py et F. Vialla (sous la dir.), Bordeaux, LEH, à paraître.
  • [33]
    Plutarque, Vie de Solon, XXI.
  • [34]
    Voir à ce propos, P. Malaurie, « Le mariage à la française », Petites affiches, 29 juin 2009 no 128.
  • [35]
    F. Chénedé, « Le constitutionnalisme est un justnaturalisme : brèves réflexions sur un débat doctrinal relatif au mariage entre personnes de même sexe », Petites affiches, no 37, 20 février 2013, p. 6.
  • [36]
    CC, décis. no 2013?669 DC, 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, considérant no 92, JORF du 18 mai 2013 p. 8281.
  • [37]
    M. Aligisakis et S. Dascalopoulos, Multiculturalismes et Identités en Europe, Édition L’Harmattan/ Academia, Publications de l’Institut Européen de l’Université de Genève (10), p. 33.
  • [38]
    J. Carbonnier, Droit civil, t. 1, Introduction, Les personnes, la famille, l’enfant, le couple, Puf, coll. Quadrige manuels, 2004, no 522, p. 1139.
  • [39]
    P. Malaurie, « Le mariage à la française », op. cit., p. 6.
  • [40]
    Sur ces tendances contraires, v. G. Raoul?Cormeil, « La question du genre dans le Code civil », RRJ, 2009, pp. 183?208.
  • [41]
    L. Burgorgue?Larsen, « La jurisprudence des Cours constitutionnelles européennes en droit des personnes et droit de la famille », in Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, Dalloz, no 39, 2013/2, p. 227.
  • [42]
    CC, décis. no 2013?353 QPC, 18 octobre 2013, M. Franck M. et autres [Célébration du mariage – Absence de « clause de conscience » de l’officier de l’état civil], JORF du 20 octobre 2013 page 17279.
  • [43]
    Le régime des empêchements reste majoritairement inchangé comme le champ des interdits sociaux qui se voient réaffirmés par le législateur à l’image du maintien de la prohibition de la polygamie proscrite depuis plus de deux siècles, dans les mêmes termes, à l’article 147 du Code civil. L’article 162 relatif à la prohibition de l’inceste, mis à part quelques modifications sensibles, conserve les mêmes termes. En ce sens, il convient de relever que l’intitulé « mariage pour tous » n’est pas la formule législative la plus appropriée pour qualifier le mariage à la française, certes caractérisé par le principe de liberté, voir en ce sens, P. Malaurie, « Le mariage à la française », Petites affiches, op. cit., p. 6?7, mais aussi l’exclusion constante de certaines catégories de « prétendants » au mariage.
  • [44]
    Concernant le droit des succession, voir le statut du conjoint survivant tel qu’il résulte de la loi no 2001?1135 du 3 décembre 2001, ainsi que les modalités nouvelles de versement de la pension de réversion dont bénéficient aujourd’hui les conjoints de même sexe.
  • [45]
    Voir à cet effet les récentes décisions rendues en la matière par le juge constitutionnel. CC, no 2011?631 DC, 9 juin 2011, Loi relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, JORF du 17 juin 2011, p. 10306 CC, no 2013?667 DC, 16 mai 2013, Loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, JORF du 18 mai 2013 p. 8258.
  • [46]
    CC, décis. no 2013?669 DC, 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, considérant no 92, op. cit. Voir en ce sens, G. Drago, « La loi et l’étendue du contrôle du Conseil constitutionnel », RFDA 2013 p. 936, à propos de la restriction du champ du contrôle du juge constitutionnel en l’espèce.
  • [47]
    Dans sa nouvelle formulation, l’article 143 du Code civil dispose désormais que : « le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe ».
  • [48]
    Lequel dispose que : « l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités » relèvent du domaine de la loi.
  • [49]
    CC, décis. no 2010?92 QPC, 28 janvier 2011, Mmes Corinne. C et autre, JORF du 29 janvier 2011, p. 1894.
  • [50]
    T. Douville, « Brèves réflexions sur la suppression de la condition d’altérité sexuelle des époux », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 20.
  • [51]
    Idem, p. 21.
  • [52]
    Voir en ce sens, G. Raoul?Cormeil, « Le rayonnement de l’alliance après la loi no 2013?404 du 17 mai 2013 », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 59.
  • [53]
    V. Goesel?Le Bihan, « Le contrôle de proportionnalité exercé par le Conseil constitutionnel, technique de protection des libertés publiques ? », Jus politicum, no 7, mars 2012.
  • [54]
    F. Chénedé, et P. Deumier, « L’œuvre du Parlement, la part du Conseil constitutionnel en droit des personnes et droit de la famille », in les nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, no 39, 2013, pp. 7?8.
  • [55]
    Ibidem.
  • [56]
    P. Murat, « La Constitution et le mariage : regard d’un privatiste », Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, Dalloz, 2013/2 no 39, p. 21.
  • [57]
    Idem, p. 20?21.
  • [58]
    Voir à ce propos l’article 34 de la Constitution qui fait une allusion très indirecte à l’institution matrimoniale en incluant dans le domaine de la loi l’édition des règles concernant les régimes matrimoniaux.
  • [59]
    « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ».
  • [60]
    CC, décis. no 2010?92 QPC, Mmes Corinne. C et autre, op. cit.
  • [61]
    Lettre de saisine des 60 députés (Site du Conseil constitutionnel).
  • [62]
    Voir à cet effet, l’article de X. Dupré de Boulois, « Le mariage homosexuel, la Constitution et l’agrégée des facultés de droit », RDLF, chronique no 23, p. 2012.
  • [63]
    D. Rousseau, « Le « mariage pour tous » relève bien de la compétence du législateur ordinaire », Gazette du Palais, no 348, 13 décembre 2012, p. 5.
  • [64]
    CC, décis. no 86?224 DC, 23 janvier 1987, Conseil de la concurrence, considérant no 15, JORF du 25 janvier 1987, p. 924.
  • [65]
    CC, décis. no 88?244 DC, 20 juillet 1988, Loi portant amnistie, considérant no 12, JORF du 21 juillet 1988, p. 9448.
  • [66]
    CC, décis. no 98?407 DC, 14 janvier 1999, Loi relative au mode d’élection des conseillers régionaux et des conseillers à l’Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux, considérant no 9, JORF du 20 janvier 1999, p. 1028.
  • [67]
    Commentaire de la décision no 2013?669 DC, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, Les cahiers du Conseil constitutionnel, p. 15.
  • [68]
    CC, décis. no 2006?542 DC, 9 novembre 2006, Loi relative au contrôle de la validité des mariages, JORF du 15 novembre 2006, p. 17115. Un principe qu’il consacre sur le fondement de la liberté personnelle rattachée à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme.
  • [69]
    J.?M. Larralde, « Le mariage pour tous est conforme à la Constitution (Quelques considérations d’un publiciste sur la décision du Conseil constitutionnel no 2013?669 DC du 17 mai 2013) », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 7.
  • [70]
    CC, décis. no 80?119 DC, 22 juillet 1980, JORF du 24 juillet 1980, p. 1868.
  • [71]
    Ainsi au considérant no 15 de la décision précitée, le Conseil remarque que : « conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs, figure au nombre des “principes fondamentaux reconnus par les lois de la République” celui selon lequel, à l’exception des matières réservées par nature à l’autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l’annulation ou la réformation des décisions prises, dans l’exercice des prérogatives de puissance publique ».
  • [72]
    Voir en ce sens, E. Millard, « Le droit constitutionnel de la famille », in Code civil et Constitution, M. Verpeaux, (Ed.) (2005), p. 65?81.
  • [73]
    CC, décis. no 2010?92 QPC, 28 janvier 2011, Mmes Corinne. C et autre, op. cit.
  • [74]
    À savoir la violation du principe de liberté individuelle, de la liberté de mariage, du droit de mener une vie familiale normale et enfin, du principe d’égalité.
  • [75]
    J.?F. de Montgolfier, « La QPC et le droit de la famille au Conseil constitutionnel », AJ fam., 2012, p. 578.
  • [76]
    Voir en ce sens, CC, décis. no 93?321 DC, 20 juillet 1993, Loi réformant le code de la nationalité, JORF du 23 juillet 1993, p. 10391, et décis. no 89?254 DC, 4 juillet 1989, Loi modifiant la loi no 86?912 du 6 août 1986 relative aux modalités d’application des privatisations, JORF du 5 juillet 1989, p. 8382.
  • [77]
    J. Hauser, « Le Conseil constitutionnel et le droit de la famille », in Dossier : le Conseil constitutionnel et les diverses branches du droit, Cahier du Conseil constitutionnel no 16, 2004, p. 1.
  • [78]
    N. Merley « La non?consécration par le Conseil constitutionnel de principes fondamentaux reconnus par les lois de la République », RFDA mai?juin 2005, p. 621 sq.
  • [79]
    E. Millard, « Le droit constitutionnel de la famille », in Code civil et Constitution, op. cit.
  • [80]
    CC, décis. no 71?44 DC, 16 juillet 1971, JORF du 18 juillet 1971, p. 7114.
  • [81]
    CC, Décis. no 2011?157 QPC du 5 août 2011, JORF du 6 août 2011, p. 13476.
  • [82]
    CC, décis. no 79?107 DC, 12 juillet 1979, Ponts à péages, Rec. p. 31. Cette décision donna la première occasion au Conseil de formuler le considérant de principe selon lequel : « Si le principe d’égalité devant la loi implique qu’à situations semblables il soit fait application de solutions semblables, il n’en résulte pas que des situations différentes ne puissent faire l’objet de solutions différentes ». Le Conseil constitutionnel, au sujet du principe d’égalité s’est, en effet, rapidement retrouvé dans une situation délicate, puisqu’il a vocation à apprécier les conditions dans lesquelles le législateur met en œuvre un principe constitutionnel énoncé en termes laconiques. La formulation d’un tel considérant permit ainsi d’assouplir la rigidité formelle du principe d’égalité à la française pour permettre une interpretation plus moderne des garanties qu’il contient.
  • [83]
    Voir à ce propos, l’arrêt, CE, Ass., 28 mars 1997, Sté Baxter, où le Conseil d’État indique que l’administration n’a pas l’obligation de traiter différemment les situations différentes.
  • [84]
    Voir, notamment, CC, décis. no 2010-24 QPC du 6 août 2010, Association nationale des sociétés d’exercice libéral et autres, cons. 5 et 6.
  • [85]
    J.?R. Binet, « Conformité de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe à la Constitution », Dr. fam., no 7, juill. 2013, comm. 98.
  • [86]
    CC, décis. no 2011?155 QPC du 29 juillet 2011, Mme Laurence L. (Pension de réversion et couples non mariés), JORF du 30 juillet 2011, p. 13048.
  • [87]
    F. Dekeuwer?Défossez « Le mariage et l’adoption par les couples homosexuels : la question juridique », Études 11/2012 (Tome 417), p. 465.
  • [88]
    C. Neirinck, « Ce qui change », Dr. Famille, juin 2013, repère no 6.
  • [89]
    Voir sur ce sujet, « Mariage pour tous : égalité des droits sociaux », relatif au projet de Loi no 344, 7 nov. 2012, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, in Les Cahiers sociaux, no 252, Chron., 31 mai 2013, p. 149.
  • [90]
    À l’exception toutefois des règles relatives à la filiation biologique.
  • [91]
    Voir à ce propos, L. Brunet, « Le Conseil constitutionnel face à la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe : coup d’arrêt ou coup d’essai de la reconfiguration du droit de la famille ? », RDSS 2013. 908.
  • [92]
    G. Raoul?Cormeil, « La consécration de la vie familiale homosexuelle par la loi du 17 mai 2013 », Gazette du Palais, 24 août 2013 no 236, pp. 10?11.
  • [93]
    M. Leroyer, « La loi du 17 mai 2013… Au passé, présent et futur », chron., D., 2013, p. 1698.
  • [94]
    G. Champenois, « L’adoption et la loi du 17 mai 2013. Quelques observations sur l’ouverture de l’adoption aux couples de personnes de même sexe », Defrénois, no 13?14 du 15 juillet 2013, p. 731.
  • [95]
    L’article 8 de la loi du 17 mai 2013 ajoute un troisième alinéa à l’article 360 du Code civil, aux termes duquel « L’enfant précédemment adopté par une seule personne, en la forme simple ou plénière, peut l’être une seconde fois, par le conjoint de cette dernière, en la forme simple ».
  • [96]
    CEDH, 24 juin 2010, arrêt no 30141/04, Schalk et Kopf c/ Autriche.
  • [97]
    Un dernier statut qui fut pourtant refusé quelques temps auparavant dans une décision no 2010?39 QPC, 6 octobre 2010, JORF du 7 octobre 2010, p. 18154.
  • [98]
    CC, décis. no 2013?669 DC, Loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, considérant no 42. À noter que si un tel constat est exprimé dans le considérant no 42 de la décision présentement commentée, le raisonnement le fondant est initié, pour sa part, dès le considérant no 36.
  • [99]
    L’article 16?7 dispose que : « Toute convention portant sur la gestation pour le compte d’autrui est nulle ».
  • [100]
    CC, décis. no 2013?669 DC, Loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, considérant no 44.
  • [101]
    CC, décis. no « Ponts à péages » no 79?107 DC, op. cit.
  • [102]
    J.?M. Larralde, « Le mariage pour tous est conforme à la Constitution (Quelques considérations d’un publiciste sur la décision du Conseil constitutionnel no 2013?669 DC du 17 mai 2013) », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 5.
  • [103]
    Voir à ce sujet, A. Levade, « Discrimination positive et Principe d’Égalité en Droit Français », Pouvoirs no 111, Seuil, Paris, 2004.
  • [104]
    Notamment, au travers de l’instauration de règles nouvelles en matière de présomption de paternité par la loi du 16 novembre 1912 et via la réforme du régime d’adoption des mineurs par la loi du 19 juin 1923.
  • [105]
    V. Legrand, « Les implications de la loi autorisant le mariage pour tous en droit international privé », Petites affiches, no 167, 21 août 2013, p. 6.
  • [106]
    En d’autres termes, cet alinéa permet, en France, la célébration du mariage entre personnes de même sexe, dès lors que l’un des deux ou les deux conjoints sont de nationalité étrangère, nonobstant la prohibition de ce mariage par sa ou leur loi personnelle.
  • [107]
    A. Gosselin?Gorand, « La loi du 17 mai 2013 ou la promotion internationale du mariage des couples de personnes de même sexe », Petites affiches, no 133, 4 juillet 2013, p. 24.
  • [108]
    Idem, p. 25.
  • [109]
    L’article L. 331?7 nouveau disposant désormais que : « La période d’indemnisation prévue au présent article peut faire l’objet d’une répartition entre les parents adoptifs lorsque l’un et l’autre ont vocation à bénéficier d’une indemnisation ou d’un maintien du traitement en cas de cessation de leur travail ou de leur activité dans le cadre d’une adoption ».
  • [110]
    6. CSS, art. L. 722?8 et s.
  • [111]
    Voir sur ce sujet, P. Coursier, « De quelques effets en matière de protection sociale de la loi portant “mariage pour tous” », op. cit., p. 29.
  • [112]
    G. Drago, « La loi et l’étendue du contrôle du Conseil constitutionnel », op. cit., p. 937.
  • [113]
    Dans les deux premiers, ces règles sont formellement issues de la loi de finances pour 2008 (L. 24 déc. 2007, n° 2007?1822, art. 9, I) qui n’a pas toutefois modifié matériellement le droit antérieur (CGI, art. 1685 et 1685 bis, anciens) – du moins à la lumière de l’éclairage rétrospectif qu’en a donné le Conseil d’État (CE, 17 mai 2013, n° 348892, Fernandez?Hevia : Dr. fisc. 2013, n° 39, comm. 449, concl. A. Bonnet, jugeant, dans le silence de l’art. 1685, 2, ancien du CGI, que la solidarité établie en matière d’IR ne concerne que la période d’imposition commune). Dans le dernier cas, ces règles sont celles posées dès l’origine, sous réserve de leur adaptation lors de l’introduction du PACS (L. 15 nov. 1999, n° 99?944, art. 6, III).
  • [114]
    En outre, comme tous les litiges nés de l’exercice de la « juridiction gracieuse » de l’administration fiscale, les contestations dirigées contre un refus de décharge de solidarité relevaient, non pas du juge « de l’impôt » mais du juge de l’excès de pouvoir –plus précisément du tribunal administratif statuant en premier et dernier ressort (CJA, art. R. 811?1, al. 2. – V. confirmant cette solution CE, 1er déc. 2008, n° 299200, Amiel : RJF 02/2009, n° 164 ; BDCF 02/2009, n° 25, concl. Cl. Legras) la décision pouvant d’ailleurs être rendue par un juge unique (CJA, art. R. 222?13, 8°, et, à compter du 1er janv. 2014, 7°).
  • [115]
    V. sur ce point Commission des finances de l’Ass. nat., Rapport gén. présenté par M. G. Carrez sur le projet de loi de finances pour 2008, n° 276, tome II, p. 38.
  • [116]
    À l’inverse, la décharge ne peut être accordée lorsque le demandeur et son conjoint lato sensu se sont frauduleusement soustraits (ou ont tenté de le faire) au paiement des impositions considérées, notamment en organisant leur insolvabilité (CGI, art. 1691 bis, II?3).
  • [117]
    Une telle imprécision textuelle est plutôt rare. La notion de « disproportion marquée » se retrouve ainsi à l’article 168 du CGI (détermination d’un revenu minimal forfaitaire en fonction de certains signes extérieurs où elle fait l’objet d’une définition légale précise.
  • [118]
    La même position a été adoptée précédemment à propos des règles prévues par la loi du 31 déc. 1968 relativement à la suspension de la prescription quadriennale des créances détenues sur les personnes publiques, CC, décis. n° 2012?256 QPC, 18 juin 2012). Cela ne devrait pas conduire, toutefois, à considérer qu’une disposition législative qui a pour seul objet d’organiser le recouvrement d’une créance fiscale ne peut, en aucun cas, se heurter au principe de l’égalité devant les charges publiques.
  • [119]
    Cet objectif est le suivant : concilier la garantie du recouvrement des créances fiscales résultant de la solidarité des conjoints avec la prise en compte des difficultés financières et des conséquences patrimoniales pouvant naître, pour l’un ou l’autre des conjoints divorcés ou séparés, de cette solidarité de paiement pour la période antérieure au divorce ou à la séparation.
  • [120]
    CC, décis. n° 96?385 DC, 30 déc. 1996, Loi de finances pour 1997, à propos d’un mécanisme de plafonnement des effets du quotient familial plus favorable aux veufs ayant élevé au moins un enfant qu’aux contribuables célibataires ou divorcés répondant à cette même condition, § 4 à 7).
  • [121]
    CE, QPC, 29 avr. 2013, n° 364240, Bosc : Dr. fisc. 2013, n° 25, comm. 350.
  • [122]
    On peut penser que les décisions concernant la décharge de plein droit relèvent de la « juridiction contentieuse » de l’administration fiscale. Dans leur phase juridictionnelle, ces litiges ressortissent à la compétence du juge fiscal (et, en première instance du TA statuant collégialement et à charge d’appel, sauf pour les litiges se rapportant exclusivement une décharge de solidarité concernant le paiement de la TH).
  • [123]
    Plus précisément, le président de la section du contentieux du Conseil d’État statuant par ordonnance.
  • [124]
    CE, 24 juin 2013, n° 365253, Gohier, Dr. fisc. 2013, n° 36, comm. 402, concl. C. Legras.
  • [125]
    Dans leur rédaction issue de la loi du 30 déc. 2000 de finances rectificative pour 2000.
  • [126]
    CC, décis. n° 2013?340 QPC, 20 sept. 2013, Gohier, JO du 22 sept. 2013, p. 15823 ; note Ch. de la Mardière Dr. fisc. 2013, n° 43 comm. 493.
  • [127]
    Cass. soc., 6 mars 2001, Lagarrigue c/ Graber, RJS 5/2001 n° 576.
  • [128]
    L’article L. 1235?3 du nouveau code du travail fait référence au « juge ».
  • [129]
    Voir CE, 20 juin 2012, n° 345120, Lavanant, Dr. fisc. 2012, n° 30, comm. 391 (a contrario) et les termes mêmes de la décision de renvoi.
  • [130]
    Application de CC, décis. n° 2013?331 QPC, 5 juill. 2013 ; CC, décis. n° 2010?9 QPC, 2 juill. 2010.
  • [131]
    CC, décis. n° 99?424 DC, 29 déc. 1999, cons. 17?23.
  • [132]
    Par ex. : CE, 6 janv. 1984, n° 32528, Banque de l’Union Européenne, RJF 3/1984, n° 287 ; CE, 27 oct. 2010, n° 3150527, Scherrer, Dr. fisc. 2010, n° 50, comm. 591.
  • [133]
    Il est vrai qu’aucune décision antérieure à la décision de renvoi n’a explicitement tranché la question. Cependant, le caractère constant de la jurisprudence peut être déduit des seuls termes de la décision de renvoi. En ce sens CC, décis. n° 2011?185 QPC, 21 oct. 2011.
  • [134]
    Solution implicite.
  • [135]
    En ce sens Ch. de la Mardière, op. cit.
  • [136]
    CC, décis. n° 2013?672 DC du 13 juin 2013.
  • [137]
    CC, décis. n° 85?187 DC du 25 janvier 1985, État d’urgence en Nouvelle?Calédonie, cons. 10 ; n° 89?256 DC du 25 juillet 1989.
  • [138]
    CC, décis. n° 99?410 DC du 15 mars 1999, Loi organique relative à la Nouvelle?Calédonie ; LPA, 21 septembre 1999, n° 188, p. 8 et JCP éd. G, 2000, I, p. 201, note B. Mathieu et M. Verpeaux ; RFDC, 1999, p. 328, note J. Pini, et p. 334, note J.?Ch. Car ; AJDA, 1999, p. 324, comm. J.?E. Schoettl ; J.?P. Camby, « Une loi promulguée frappée d’inconstitutionnalité ? », RDP, 1999, p. 657 ; J.?H. Robert, « Inconstitutionnalité de l’inéligibilité attachée à la faillite personnelle », JCP éd. G., 1999, I, 151, p. 1290 ; du même auteur, « Le Conseil constitutionnel au tribunal de commerce. Dorénavant, les faillis ne sont plus déchus du droit d’exercer des fonctions électives », Droit pénal, 1999, n° 68, p. 14 ; A.?M. Le Bos?Le Pourhiet, « Nouvelle?Calédonie : la nouvelle mésaventure du positivisme », RDP, 1999, p. 1005.
  • [139]
    CC, décis. n° 99?414 DC du 8 juillet 1999, cons. 2 ; n° 99?416 DC du 23 juillet 1999, cons. 37.
  • [140]
    Voir not. W. Jeng Seng, « Le contrôle de la loi promulguée dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel : un mystère en voie de dissipation ? », RFDC, 2005, n° 61, p. 35 ; comp. pour une tentative de dévoiler sur ce point une « architecture de motivations demeurée jusque?là implicite », V. Goesel?Le Bihan, « Le non?contrôle par le Conseil constitutionnel de certaines dispositions confirmatives : entre logique imposée et logiques choisies », RFDC, 2008, n° 73, p. 3.
  • [141]
    CC, décis. n° 2012?659 DC du 13 décembre 2012, n° 2012?662 DC du 29 décembre 2012.
  • [142]
    J. Ferstenbert, « Le contrôle, par le Conseil constitutionnel, de la régularité constitutionnelle des lois promulguées » RDP, 1991, p. 339, spéc. p. 370.
  • [143]
    CC, décis. n° 2013?672 DC du 13 juin 2013.
  • [144]
    CC, décis. n° 2012?654 DC du 9 août 2012, cons. 83, n° 2012?656 DC du 24 octobre 2012, cons. 19, n° 2012?659 DC du 13 déc. 2012, cons. 14 et 15, n° 2012?662 DC du 29 déc. 2012, cons. 20 à 22 ; RFDA, 2013, p. 1, note B. Genevois.
  • [145]
    CE, 25 juillet 2013, n° 366345, Tables.
  • [146]
    Rappelons qu’une QPC doit, pour pouvoir être renvoyée au Conseil constitutionnel, concerner une disposition qui « n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances » : article 23?2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 (nous soulignons).
  • [147]
    Sur ces aspects, v. M. Disant, Droit de la question prioritaire de constitutionnalité, Lamy, Axe Droit, 2011, pp. 226 et s.
  • [148]
    « La QPC posée sur un texte déjà déclaré inconstitutionnel. Peut?on tuer un mort ? », Libre propos in JCP éd. G., n° 41, 7 octobre 2013, n° 1036.
  • [149]
    Communiqué des services du Conseil constitutionnel en forme de note juridique intitulé « Effets du contrôle exercé par le Conseil constitutionnel sur la loi promulguée » ; rappr. J.?E. Schoettl, « Mise en œuvre de l’accord de Nouméa », AJDA, 1999, p. 324, spéc. pp. 332?333.
  • [150]
    Une telle position fût notamment défendue par MM. Genevois, Favoreu, et Ferstenbert ; v. spéc., du dernier nommé, « Le contrôle par le Conseil constitutionnel de la régularité constitutionnelle des lois promulguées », RDP, 1991, p. 339.
  • [151]
    Sur le sujet, M. Disant, L’autorité de la chose interprétée par le Conseil constitutionnel, LGDJ, tome 135, 2010.
  • [152]
    CE, Sect., 22 juin 2007, M. Lesourd, Leb. p. 253 ; RFDA, 2007, p. 1077, concl. Olson.
  • [153]
    Voir M. Disant, « L’identification d’une disposition n’ayant pas déjà été déclarée conforme à la Constitution », Constitutions, Dalloz, 2010, n° 4, p. 541.
  • [154]
    CC, décis. n° 2013?672 DC du 13 juin 2013, cons. 14.
  • [155]
    Sur le sujet, M. Disant, « Les effets dans le temps des décisions QPC. Le Conseil constitutionnel, ‘‘maître du temps’’ ? Le législateur, bouche du Conseil constitutionnel ? », Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2013, n° 40, p. 63.
  • [156]
    Cass., civ. 1, 15 décembre 2011, Marzec, n° 10?27.473, bull.
  • [157]
    CC, décis. n° 2012?284 QPC du 23 novembre 2012, cons. 5.
  • [158]
    CC, décis. n° 2012?284 R QPC du 27 décembre 2012.
  • [159]
    Cass. crim. 23 avril 2013, n° 13?90.003.
  • [160]
    Selon ce texte, « le fait de percevoir frauduleusement ou de tenter de percevoir frauduleusement des prestations au titre de l’aide sociale est puni des peines prévues par les articles 313?1, 313?7 et 313?8 du code pénal ».
  • [161]
    Sur l’avenir des QPC incorrectement formulées, v. C. Ambroise?Casrérot, « La QPC et le droit pénal de fond » in La QPC et la matière pénale, C. Courtin (dir.), Bruylant, 2013, p. 42.
  • [162]
    CC, décis. n° 2013?328 QPC, 28 juin 2013, cons. n° 2.
  • [163]
    Sur cette question v. G. Drago, Contentieux constitutionnel français, Puf, 2011, n° 519, p. 479 ; X. Magnon (dir.), La Question Prioritaire de Constitutionnalité. Principe généraux, pratique et droit du contentieux, Lexis Nexis, 2e éd., 2013, n° 336, p. 273 et s.
  • [164]
    Cons. n° 6.
  • [165]
    CC, décis. n° 2012?240 QPC, 4 mai 2012, M. Gérard D., JORF du 4 mai 2012, p. 8015 ; D., 2012, p. 1372, note S. Détraz ; RPDP, 2012, p. 389, note V. Malabat ; RSC, 2012, p. 367, note X. Pin ; idem, p. 380, note Y. Mayaud ; AJ Pénal, 2012, p. 482, obs. J.?B. Perrier ; RFDC, 2013, p. 209, note S. Anane.
  • [166]
    CC, décis. n° 2011?163 QPC, 16 septembre 2011, M. Claude N., JORF du 17 septembre 2011, p. 15600 ; AJ Pénal, 2011, p. 588, obs. C Porteron ; RSC, 2012, p. 221, note B. de Lamy ; RFDC, 2012, p. 421, obs. O. Baldès.
    CC, 17 février 2012, 2011?222 QPC, M. Bruno L., JORF du 18 février 2012, p. 2846 ; RSC, 2012, p. 146, obs. Y. Mayaud.
  • [167]
    V. Peltier, « De la résolution constitutionnelle des concours de qualifications », Dr. pén., 2013, comm. 149.
  • [168]
    CEDH, 4e sect., 22 janvier 2013, Camilleri c/ Malte, req. n° 42931/10 ; v. Dalloz actualités, 13 février 2013, obs. O. Bachelet.
  • [169]
    CC, décis. n° 2010?15/23 QPC, 23 juillet 2010, Région Languedoc?Roussillon et autres, JORF du 24 juillet 2010, p. 13727 ; D., 2010, p. 2686, note C. Lacroix ; Gaz. Pal., 12 août 2010, p. 10, note M. Touillier ; RFDC, 2011, p. 111, note Ph. Bonfils.
  • [170]
    CC, décis. n° 2010? 81 QPC, 17 décembre 2010, M. Boubakar B., JORF du 19 décembre 2010, p. 22375 ; AJ Pénal, 2011, p. 140, obs. L. Ascenci ; RFDC, 2011, p. 595, obs. S. Anane.
  • [171]
    CC, décis. n° 2011?160 QPC, 9 septembre 2011, M. Hovanes A., JORF du 10 septembre 2011, p. 15273 ; AJ Pénal, 2012, p. 46, obs. J.?B. Perrier ; RFDC, 2012, p. 426, obs. S. Anane.
  • [172]
    S. Détraz, « Inconstitutionnalité des incriminations doublons faisant l’objet d’une répression disparate », Gaz. Pal., 4?5 septembre 2013, n° s 247 à 248, p. 15.
  • [173]
    ARCEP.
  • [174]
    CE, 29 avril 2013, décis. n° 356976.
  • [175]
    V. encore récemment, CC, décis. n° 2012?280 QPC, 12 octobre 2012, JORF du 13 octobre 2012, p. 16031, s’agissant de l’Autorité de la concurrence.
  • [176]
    CEDH, Engel et a. c/ Pays?Bas, 8 juin 1976, req. n° 5100/71 et a.
  • [177]
    L’impartialité a un double sens : l’impartialité objective qui renvoie à des caractères organique et fonctionnel et l’impartialité subjective qui renvoie au for intérieur du juge. Aussi, certains préfèrent parler « d’impartialité fonctionnelle » et « d’impartialité personnelle », R. Koering?Joulin, « Le juge impartial », Justice, n° 10, avril/juin 1998, p. 2 ; F. Tulkens et H.D Bosly, « La notion de tribunal indépendant et impartial. La situation en Belgique », RSC, 1990 p.677. La référence à ces deux notions est aussi présente dans certaines décisions de la Cour EDH, voir notamment CEDH, 26 octobre 1984, De Cubber c/?Belgique, req. n° 9186/80, § 25 et 26 ; CEDH, 23 juin 1981, Le Compte, Van Leuven et De Meyer c/?Belgique, req. n° 6878/75 ; 7238/75, § 58.
  • [178]
    O. Le Bot, « Pouvoir de sanction des AAI : première censure pour violation des principes d’indépendance et d’impartialité », Constitutions, 2013, p. 437.
  • [179]
    F. Kuty, L’impartialité du juge en procédure pénale, Larcier, 2005, p. 256 et s.
  • [180]
    CC, décis. n° 95?630 DC, 2 février 1995, JORF du 7 février 1995, p. 2097.
  • [181]
    « La procédure doit garantir la séparation des autorités chargées de l’action publique et des autorités de jugement ».
  • [182]
    F. Kuty, op. cit., p. 378.
  • [183]
    CEDH, 24 mai 1989, Hauschildt c/ Danemark, req. n° 10486/83.
  • [184]
    CEDH, 11 septembre 2009, Dubus SA c/ France, req. n° 5242/04.
  • [185]
    CC, 8 juillet 2011, 2011?147 QPC, JORF du 9 juillet 2011, p. 11979, RSC, 2011, p. 728, note Ch. Lazerges ; AJ Pénal, 2011, p. 596, obs. J.?B. Perrier ; RTD Civ., 2011, p. 756, obs. J. Hauser ; RFDC, 2012, p. 168, obs. Ph. Bonfils.
  • [186]
    Ces notions d’apparence d’impartialité ou d’impartialité apparente sont utilisées par différents auteurs de la doctrine, voir notamment : S. Josserand, L’impartialité du magistrat en procédure pénale, LGDJ, Bibliothèque des sciences criminelles tome 33, 1998, notamment p. 10 § 15, p. 237 § 58, p. 290 § 80, pp. 417?418, pp. 592?593 § 12?13 ; F. Kuty, op. cit., pp. 255?267, pp. 313?315 ; M.?A. Frison?Roche, « L’impartialité du juge », D. 1999, p. 53, § 16 ; V. Magnier, « La notion de justice impartiale », JCP G, 6 septembre 2000, n° 36, p. 1595 ; C. Goyet, « Remarques sur l’impartialité du tribunal », D. 2001, p. 328 et s. ; G. Capashen, « Petites histoires à propos de la juste distance pour juger… », D. 2004, p. 2939.
  • [187]
    Selon l’article 1349 « les présomptions sont des conséquences que la loi ou le magistrat tire d’un fait connu à un fait inconnu ». Il s’agit d’opérer un déplacement de l’objet de la preuve. Ainsi, lorsque la preuve du fait litigieux est très difficile voire impossible à apporter, l’objet de la preuve va être déplacé vers d’autres faits, ceux?ci sont prouvés plus aisément car ils présentent généralement un caractère apparent. De ce factum probans, ce fait connu, le juge ou le législateur va induire le factum probandum, le fait inconnu.
  • [188]
    Pour des exemples récents, CC, décis. n° 2012?211 QPC, 27 janvier 2012, JORF du 28 janvier 2012, p. 1674, concernant la discipline des notaires, RFDC 2012, p. 891, obs. C. Tzutzuiano ; CC, décis. n° 2012?273 QPC, 21 septembre 2012, JORF du 22 septembre 2012, p. 15025 ; CC, décis. n° 2012?280 QPC, 12 octobre 2012, JORF du 13 octobre 2012, p. 16031, concernant l’Autorité de la concurrence, Constitutions 2013, p. 95, obs. O. Le Bot ; CC, décis. n° 2012?289 QPC, 17 janvier 2013, JORF du 18 janvier 2013, p. 1293, concernant la discipline des médecins, RFDC 2013, p. 715, obs. J.?B. Perrier.
  • [189]
    CE, 29 avril 2013, n° 365705.
  • [190]
    L’article L. 3452?1 du Code des transports permet à l’autorité administrative de prononcer le retrait, à titre temporaire ou définitif, de la licence de transport intérieur ou de transport communautaire aux entreprises exerçant dans ce secteur d’activité, en cas de constat d’infraction aux règlementations des transports, du travail, de l’hygiène ou de la sécurité, constituant au moins une contravention de la cinquième classe, voire seulement de la troisième classe en cas d’infractions répétées ; en cas d’infractions délictuelles, l’article L. 3452?2 permet de prononcer au surplus l’immobilisation d’un ou de plusieurs véhicules, pour une durée de trois mois au plus. Ces sanctions sont prononcées par le préfet, après avis d’une commission des sanctions administratives.
  • [191]
    CC, décis. n° 2010?6/7 QPC, 11 juin 2010, JORF du 12 juin 2010, p. 10849 ; AJDA 2010, p. 1831, note B. Malignier ; Constitutions 2010, p. 454, obs. R. Ghevontian ; AJ Pénal 2010, p. 392, obs. J.?B. Perrier ; RFDC 2010, p. 830, obs. W. Benessiano.
  • [192]
    CC, décis. n° 2013?329 QPC, 28 juin 2013, cons. n° 3.
  • [193]
    Idem.
  • [194]
    Ibid. cons. n° 5.
  • [195]
    L’on observera cependant que pour la première fois, le Conseil applique ces exigences à une sanction prononcée par l’autorité administrative.
  • [196]
    CC, décis. n° 2010?41 QPC, 29 septembre 2010, JORF du 30 septembre 2010, p. 17783, cons. n° 5 ; JCP G 2010, note A. Lepage et H. Mastopoulou ; RFDC 2011, n° 85, p. 151, obs. M. Giacopelli. Le Conseil observe ici que si « le juge qui prononce une condamnation pour le délit de publicité mensongère est tenu d’ordonner la publication du jugement de condamnation (…) il lui appartient de fixer, en application de l’article 131?35 du Code pénal, les modalités de cette publication ». Le Conseil observe alors que le juge « peut ainsi en faire varier l’importance et la durée ». Dès lors, selon le Conseil, « le juge n’est pas privé du pouvoir d’individualiser la peine ».
  • [197]
    CC, décis. n° 2010?72/65/82 QPC, 10 décembre 2010, JORF du 11 décembre 2010, p. 21710, cons. n° 5 ; D. 2011, p. 929, obs. B. Bouloc ; AJ Pénal 2011, p. 76, obs. J.?B. Perrier ; RFDC 2011, n° 87, p. 576, obs. M. Giacopelli. Le Conseil observe, de nouveau, que le juge qui prononce une condamnation pour le délit de fraude fiscale est tenu d’ordonner « l’affichage du jugement », mais, à la différence de l’hypothèse prévue par l’article L. 121?4 du Code de la consommation, il « ne peut faire varier la durée de cet affichage fixée à trois mois par la disposition contestée » et « il ne peut davantage modifier les modalités de cet affichage prévu ». En l’absence de pouvoir de modulation, la peine est donc contraire à l’article 8 de la Déclaration de 1789.
  • [198]
    Les modalités de la publication de la sanction administrative sont fixées par l’article 44?1 du décret n° 85?891 du 16 août 1985 relatif aux transports urbains de personnes et aux transports routiers non urbains de personnes et par l’article 18 du décret n° 99?752 du 30 août 1999 relatif aux transports routiers de marchandises. Ces deux textes précisent que « la décision du préfet est publiée dans deux journaux régionaux et est affichée dans les locaux de l’entreprise pour une durée qui ne peut excéder la durée du retrait ou de l’immobilisation. Les frais de publication sont à la charge de l’entreprise ».

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