Avec une contraction de 9,8% de son PIB en 2020, la France a fait moins bien que la plupart des pays membres de l’Union Européenne (Allemagne : - 6 %, Belgique : - 8,3 %, Pays-Bas : -5,4 %, Pologne : - 3,6 % ou Suède : - 4,7 % par exemple), à l’exception des pays latins (Portugal : - 10 %, Italie : - 10,6 %, Espagne : - 9,8 %). Son économie est donc fragile, mais cette fragilité puise ses racines dans un passé profond. C’est ce que montrent bien Michel Hau et Félix Torres, dans un livre stimulant, Le virage manqué 1974-1984, paru en 2020. De fait un tournant majeur s’est produit en 1974 (introduction, p. 9-12) : marquée par le quadruplement du prix du pétrole, l’année 1974 a partout été un virage fondamental : essoufflement de la croissance occidentale, soudain endettement du monde soviétique, retour de Deng Xiaoping au pouvoir, ouverture du Tokyo Round. La France est alors l’un des pays le plus durablement frappée par le ralentissement économique. Non seulement elle s’adapte moins bien que l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas ou la Suisse, mais encore par deux fois, en 1975 et 1981, elle aggrave ses handicaps avant d’opérer, à partir de 1983, un véritable décrochage.
« 1974, une crise sans reprise » titre le chapitre 1 (p. 15-32), si 1974 ouvre la voie à une forte baisse de la production industrielle, les contemporains croient d’abord à une récession profonde, d’où le choix, en France, d’une politique de relance. Mais le fléchissement de la croissance apparaît durable : le PIB français a augmenté de + 5,2 % en moyenne de 1960 à 1974, mais de + 2,3 % de 1974 à 1982 et de + 2,2 % de 1982 à 1992. La décélération économique attein…