Couverture de RFAP_163

Article de revue

De l’économie sociale « historique » à « l’économie sociale et solidaire » : une nouvelle configuration des relations entre monde associatif et collectivités publiques

Pages 543 à 556

Notes

  • [1]
    Laboratoire Printemps (UMR CNRS 8085), 47 Boulevard Vauban, 78047 Guyancourt. L’auteur remercie Claire Vivès (IDHES, CNRS) pour sa relecture et ses remarques.
  • [2]
    « Comment et pourquoi favoriser des investissements à impact social ? Innover financièrement pour innover socialement ». Rapport du Comité français sur l’investissement, 2014. http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/RapportSIIFce_vdef_28082014.pdf.
  • [3]
    Mme Carole Delga, secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire, Séance de questions au gouvernement, Assemblée nationale, 26 mai 2015.
  • [4]
    Communiqué de presse du 11 mars 2016, n°1251, ministère de l’économie, de l’industrie et du numérique. On notera également que cet appel à projets a obtenu le soutien (moyennant quelques réserves mineures) du Haut Conseil à la vie associative qui déclare dans son avis du 2 mars 2016 que « le Haut Conseil partage la volonté d’innover dans le cadre du financement d’actions utiles à tous et particulièrement aux populations les plus défavorisées. Il demande expressément néanmoins que les risques repérés, particulièrement par l’OCDE, soient bien pris en compte dans la décision finale ».
  • [5]
    Association créée par la loi du 31 juillet 2014 et qui comprend parmi ses membres fondateurs : le Centre français des fonds et fondations, pour les fondations ; le CNCRES, pour les CRESS ; Coop FR, pour les coopératives ; la FNMF, pour les mutuelles relevant du code de la mutualité ; le GEMA, pour les mutuelles relevant du code des assurances ; le Mouvement associatif, pour les associations ; le MOUVES, pour les entrepreneurs sociaux et les sociétés commerciales visées au 20 du II de l’article 1 de la loi relative à l’économie sociale et solidaire (statuts du 14 octobre 2014).
  • [6]
    Dont l’article 15 de la loi de 2014 donne la définition suivante : « 1° Soit répondre à des besoins sociaux non ou mal satisfaits, que ce soit dans les conditions actuelles du marché ou dans le cadre des politiques publiques ; 2° Soit répondre à des besoins sociaux par une forme innovante d’entreprise, par un processus innovant de production de biens ou de services ou encore par un mode innovant d’organisation du travail »
  • [7]
    Sont dissoutes par décret du 13 février 1936 : la Ligue d’action française, la Fédération nationale des camelots du roi et commissaires d’Action française et la Fédération nationale des étudiants, lycéens et collégiens d’Action française.
  • [8]
    L’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire a apporté son soutien à l’adoption de la loi El Khomri en dépit de la forte contestation syndicale exprimée au printemps 2016.
  • [9]
    Tout comme la thèse contestée de la « fin du travail » portée par Jéméry Rifkin a eu des échos importants dans l’ESS au milieu des années 1990 (Simonet, 2010).
  • [10]
    « Le « désir de gain » ou la « recherche du profit », n’ont en eux-mêmes rien à voir avec le capitalisme. Cette recherche animait et anime toujours les garçons de café, les médecins, les cochers, les artistes, les cocottes, les fonctionnaires vénaux, les soldats, les brigands, les croisés, les piliers de tripot, les mendiants : on peut dire qu’on la retrouve chez all sorts and conditions of men, à toutes les époques et en tous lieux, partout où existe ou a existé, d’une manière ou d’une autre, la possibilité objective d’une telle recherche […] l’avidité d’un gain sans aucune limite n’équivaut en rien au capitalisme, encore moins à son « esprit ». Le capitalisme peut s’identifier directement avec la maîtrise, ou du moins avec la modération rationnelle de cette pulsion irrationnelle » (Weber, 2006, 493).
  • [11]
    Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014.
  • [12]
    Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014.
  • [13]
    L’augmentation constante du nombre de salariés (en particulier dans le monde associatif) est un indicateur parmi d’autres de ce processus. (Cf. Chessel et Nicourd, 2009).
  • [14]
    Notons à cet égard que dans les trois éditions successives de cet ouvrage, le traitement de la question du salariat, dans le chapitre concernant l’indépendance, évolue : « L’abolition du salariat en 1905 devient en 1911 la transformation du salariat à travers l’ouvrier entrepreneur et actionnaire, puis en 1920 l’émancipation du salariat pour les travailleurs urbains et ruraux » (Rivet, 2012).
  • [15]
    Les premières occurrences de cette notion ont été identifiées au début du XIXe siècle.
  • [16]
    Selon le quotidien Le Monde, « elle est une vraie femme de gauche, qui a travaillé avec Michel Crépeau et Martine Aubry, mais également dirigé les ressources humaines du groupe PPR, propriété du milliardaire François Pinault », in « Emmanuel Macron nomme ses «ambassadeurs» », Le Monde, 26 octobre 2016.
  • [17]
    Communiqué du 30 mai 2016, consultable sur ce site : http://www.udes.fr/actualites/communique-de-presse-commun.
  • [18]
    Bézès, 2009
  • [19]
    « Le Fonds ESS interviendra à 90 % en fonds propres et quasi fonds propres sur tout le périmètre de la loi ESS du 31 juillet 2014 (associations, coopératives, mutuelles, fondations et sociétés commerciales avec une couverture sectorielle prédominante sur le social, le médico-social, transition énergétique). Il ciblera prioritairement les associations et entreprises sociales porteuses de projets de grande envergure (investissements compris entre 1 million d’euros et 5 millions d’euros). Il interviendra également pour faire émerger des projets innovants à forte valeur ajoutée, futures « pépites », et des projets en phase d’accélération (investissements compris entre 100 000 euros et 500 000 euros) », site internet de la Caisse des dépôts et consignations, consulté en décembre 2016.
  • [20]
    En partenariat avec le Centre français des fonds et des fondations, le Comptoir de l’innovation, le Crédit coopératif, Finansol, et le Mouvement des entrepreneurs sociaux. Cf. communiqué de presse du 13 juin 2016 sur le site internet de la Caisse des dépôts.
  • [21]
    Le Chapitre IV composé d’un seul article définit l’innovation sociale et annonce la mise en œuvre d’outils financiers spécifiques pour les entreprises de l’ESS.
  • [22]
    Au sein de la Chaire d’entrepreneuriat social, fondée en 2003 par Thierry Sibieude.
  • [23]
    Unions régionales interfédérales des œuvres et organismes privés non lucratifs, sanitaires et sociaux.
  • [24]
    Circulaire du 25 mai 1988 relative à la méthode de travail du Gouvernement. En préambule, Michel Rocard prend soin de préciser que la publication de cette circulaire au Journal Officiel se justifie parce qu’elle pose les règles d’une « bonne administration » selon sa formule.
  • [25]
    « J’avais évoqué la finance dans un discours célèbre. Aujourd’hui, c’est la finance solidaire que nous célébrons », discours du Président de la République François Hollande à la conférence « Impact social », 25 novembre 2016.

1

« Madame la députée, vous faites référence à un rapport remis par Hugues Sibille [2] et qui mentionne en effet les impacts des social bonds. Je tiens à vous indiquer qu’aucune suite ne lui a été donnée. Bien au contraire, je voudrais vous rappeler les apports de la loi sur l’économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014, qui a mis en place de nouveaux financements, en particulier pour les associations » [3].

2Interpellée par la députée communiste en mai 2015, Jacqueline Fraysse, à l’occasion d’une séance parlementaire de questions au gouvernement, Mme Carole Delga, alors en charge de la politique de l’État en matière « d’économie sociale et solidaire » (ESS) dans le cadre de sa fonction de secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire, se défendait de toute volonté politique de mettre en place un appel à projets instaurant les premiers « contrats à impact social » (traduction française des social impact bonds) comme le préconisait le rapport du comité national sur l’investissement à impact social, commandé à l’origine en 2013 par le ministre délégué à l’économie sociale et solidaire, et rassemblant différents experts rassemblés sous l’égide d’Hugues Sibille (Sibille, 2014). Moins d’un an plus tard, Martine Pinville, qui succède à Carole Delga, annonce le lancement d’un appel à projets promouvant les « contrats à impact social » [4]. Enfin, en mars 2017, la Chambre française de l’économie sociale et solidaire (ESS) [5] approuve, en dépit de quelques réserves exprimées en amont de sa proposition n° 25, le principe de ce financement présenté comme une innovation sociale : « adopter, pour les contrats à impact social, une charte éthique garantissant que les projets financés n’auront ni pour objet ni pour effet de se substituer aux financements existants dans le domaine de l’action sociale et qu’ils concerneront par priorité la prévention de l’exclusion sociale » (Chambre française de l’économie sociale et solidaire, 2007). Cette mise en place des « contrats à impact social » avait pourtant suscité des critiques émanant d’une fraction du monde associatif, fédérée au sein du « Collectif des associations citoyennes ». Ces derniers considèrent en effet que ces contrats « posent des problèmes graves, qui remettent en question les missions de l’État, la nature du travail social et le rôle des associations » (Collectif des associations citoyennes, 2016). La faible prise en compte de ces critiques par les institutions de l’ESS révèle, selon nous, la différenciation qui s’est accomplie entre les structures historiques de l’économie sociale et le rôle nouveau « d’opérateurs de politiques publiques » qui leur est assigné par l’État néolibéral (Desrosières, 2008). Au fond, la loi de 2014 prend acte de la dissociation de l’économie sociale historique (Dreyfus, 2017) et de « l’économie sociale et solidaire », telle qu’elle est définie juridiquement, c’est-à-dire comme l’acteur principal de « l’innovation sociale » [6] (Sibille, 2016).

3 En effet, cet épisode illustre une ambivalence fondamentale au cœur du projet de « l’économie sociale et solidaire » : d’une part, l’ESS s’appuie sur des valeurs historiques de démocratie et de solidarité et sur le projet d’introduire ces principes dans l’espace économique. En cela, elle converge avec le projet émancipateur du mouvement ouvrier et syndical dont les sociétés de secours mutuels et les entreprises coopératives ont été des réalisations. D’autre part, l’ESS, en raison de sa diversité idéologique intrinsèque, peut aussi rejoindre les préoccupations patronales d’une pacification des rapports sociaux par l’union du capital et du travail dans l’utopie de la « collaboration de classes » que le régime de Vichy a tenté de promouvoir par la « Charte du travail » de 1941. C’est aussi l’ambition de la doctrine du patronage prônée par Frédéric Le Play dans le cadre de la Société d’économie sociale qu’il a fondée en 1856 (Savoye, 2007). Certains ont vu dans cette doctrine les prémisses du paternalisme développé à partir de la seconde révolution industrielle dans l’objectif de fixer la main d’œuvre à proximité des unités de production (Lamanthe, 2011). Autrement dit, l’ambivalence historique de la « troisième voie » à laquelle renvoie l’ESS réside dans son indétermination qui peut, tout à la fois, la conduire à tracer des voies d’émancipation collective et à participer au maintien des structures sociales de domination. Nous proposons, dans le cadre de cet article, de décrire cette tension irréductible en la recontextualisant dans la configuration contemporaine des pratiques associatives à partir de trois dimensions : l’usage politique auquel donne lieu la référence à l’économie sociale telle qu’elle a pu exister des années 1970 à la loi de 2014 ; le développement d’une « avant-garde » au sein de l’ESS transgressant le tabou de la référence à la culture entrepreneuriale ; et enfin le rôle de l’ESS dans le processus qu’il est d’usage de qualifier de « modernisation de l’État ».

« L’économie sociale et solidaire » : une forme dépolitisée d’économie sociale

4En dépit de son projet historique de promouvoir une « autre économie », l’ESS, telle qu’elle a été instituée à partir des années 1980, n’a pourtant pas l’ambition d’incarner une alternative au capitalisme. Sur ce point, Michel Rocard est parfaitement clair lorsqu’il écrit, dans la préface de La Fin du travail, ouvrage du prospectiviste américain, Jérémy Rifkin qui est traduit en France en 1997, que « […] nul ne peut concevoir l’espoir chimérique de voir les entreprises d’économie sociale s’affranchir du marché : elles ont été créées pour en humaniser les lois, non pour en sortir » (Rifkin et Rocard, 1997). Évidemment, on pourra objecter que l’économie sociale, et la tradition historique qui la fonde, concentrent une diversité de doctrines idéologiques (Gueslin, 1992 ; Dreyfus, 2013) et que, parmi celles-ci, figurent de multiples exemples qui témoignent, au contraire, de projets politiques plus radicaux parmi les multiples expériences ayant cherché à s’affranchir du cadre normatif et idéologique de l’entreprise capitaliste. On peut ainsi évoquer « l’autogestion » des années 1970 et la lutte des salariés de LIP en 1973 (Georgi, 2003) ; les divisions internes au monde de la coopération entre mouvements de consommateurs et partisans des coopératives de production (Leroy, 1913) ; ou enfin le mouvement initié par l’Agence de Liaison pour le développement d’une économie alternative dans les années 1980 (Duverger, 2016). De cette ambivalence qui la traverse, l’économie sociale en retire à la fois des forces et des faiblesses. D’une part, cette ambivalence lui permet de rassembler une diversité de mouvements dont les valeurs sont hétérogènes. Le ralliement des catholiques à la IIIe République s’est en effet largement opéré par leur engagement dans le monde mutualiste et coopératif sous l’influence de l’encyclique Rerum Novarum, qui les exhortaient d’afficher leur solidarité avec les sociétés de secours mutuels issues du mouvement ouvrier. En ce sens, l’économie sociale est constitutive du sentiment d’appartenance à la République et transcende les clivages politiques partisans. Il s’agit là, incontestablement, d’un facteur majeur de la pérennité historique de l’économie sociale et de sa capacité à structurer les initiatives citoyennes (ou non) de la « société civile ». À ce titre, la dissolution des ligues d’extrême-droite en février 1936 [7] est constitutive de la naissance d’un « espace public républicain » où la liberté démocratique de s’associer avec d’autres citoyens est conditionnée au respect de valeurs supérieures garantissant un ordre public pacifié. D’autre part, l’absence d’unité politique autour d’un projet d’émancipation, posant l’économie sociale comme « alternative au capitalisme » (Jeantet, 2008), expose ses entreprises aux affres de « l’isomorphisme » (DiMaggio et Powell, 1983 ; Hwang et Powell, 2009). L’ESS, en tant que nouvelle conception de l’économie sociale, est donc à la fois la preuve en actes que l’économie de marché ne peut être réduite aux grandes entreprises capitalistes mondialisées, et conteste, en cela, l’aphorisme Tatcherien du there is no alternative, tout en confirmant la puissance de l’esprit du capitalisme à s’emparer des critiques qui lui sont adressées pour mieux les intégrer et ainsi persévérer dans son être (Boltanski et Chiapello, 1999). Il est, à cet égard, frappant d’observer la rapidité et l’efficacité avec lesquelles les pratiques de consommation équitable ont été adoptées par les groupes de la grande distribution (Gateau, 2008).

5Force est toutefois de constater que cette ambivalence majeure comporte le risque que l’ESS accompagne le double processus de « privatisation du public » et de « publicisation du privé » (Hély et Moulévrier, 2013) et conforte en cela la légitimité du nouvel ordre néolibéral (Denord, 2007 ; Dardot et Laval, 2016). L’absence de volonté affichée, de la part des institutions de l’ESS [8], de réinventer les fondements du rapport salarial affaiblit ainsi la portée de l’idée selon laquelle on travaille « autrement » dans les entreprises de l’ESS. Cette absence n’a pas seulement pour effet d’atténuer la croyance dans la possibilité d’une « autre économie », elle favorise également l’adhésion des entreprises de l’ESS aux différentes rhétoriques managériales en vogue qui vont de la thèse de la « fin du salariat » [9] portée par des firmes multinationales comme Uber (et donc une assimilation de l’ESS à l’économie dite « collaborative ») à la thèse de « l’entreprise libérée » développée dans les écoles de commerce (Carney, Getz et Demange, 2016). Dans ces débats, seules les élites ont la capacité de s’approprier les subtiles distinctions entre ces différents mondes qui demeurent essentiellement ancrées dans le ciel des idées. Or, la puissance du capitalisme, c’est précisément de s’être incarné dans des pratiques quotidiennes comme l’a montré l’histoire économique. Mutatis mutandis, l’ESS se trouve ainsi en porte-à-faux. Elle participe à légitimer malgré elle des pratiques dont elle cherche à se différencier. Car contrairement au lieu commun qui consisterait à opposer le monde vertueux et désintéressé des associations à celui des eaux glacées du calcul, la cupidité et de l’avidité ne constituent pas les dimensions fondamentales de l’éthique de l’entrepreneur, comme l’avait déjà mis en évidence Max Weber dans son étude historique sur l’influence des religions mondiales dans le développement de l’esprit du capitalisme [10].

6 À la différence de pratiques de l’économie sociale animées par un projet d’émancipation radicale (comme par exemple le mutuellisme prôné par Proudhon, 1989), les réformateurs de la « deuxième gauche » (Hamon et Rotman, 2002), comme Michel Rocard ou Jacques Delors, ont toujours précisé que, pour eux, si les entreprises de l’économie sociale étaient inscrites dans le cadre de l’économie de marché et n’avaient pas le projet d’en sortir, elles pouvaient être la cheville ouvrière d’un nouveau compromis entre la démocratie et le capitalisme. Les promoteurs de cette doctrine se réclament, en effet, d’un socialisme résolument « moderne », c’est-à-dire ayant rompu avec le marxisme, bien qu’il n’ait pas fait explicitement son Bad Godesberg à la différence du parti social-démocrate allemand (Fertikh, 2014). Le Parti socialiste s’inscrit dans le cadre du néolibéralisme triomphant des années 1980 et son ambition première était de devenir « respectable » auprès du patronat et de la noblesse d’État comme l’a bien mis en évidence Mathieu Fulla (Fulla, 2016). Le socialisme gestionnaire gagne donc ses lettres de noblesse en prenant acte de la « crise de l’État-providence » (Rosanvallon, 1981). Et c’est dans ce contexte idéologique, que Michel Rocard, alors secrétaire national chargé du secteur public, proclamait que l’économie sociale « ne représente pas un plan de réforme de l’entreprise » mais la « recherche d’une autre entreprise non capitaliste, d’une véritable entreprise socialisée ». Il ajoutait également que « la construction du socialisme n’exige pas seulement la conquête de l’appareil d’État, la transformation des mécanismes financiers qui dominent notre société, la mise en œuvre d’une autre organisation du pouvoir, elle exige aussi que l’on sache par quoi remplacer le salariat, comment produire démocratiquement. Faute de quoi la référence à la rupture ne serait qu’un mot vide de sens » (Rocard, 1979, 25). Oubliée depuis les nationalisations et la planification économique du gouvernement du Front populaire, l’économie sociale était ainsi de nouveau considérée comme un laboratoire d’expériences et de pratiques dans lequel le socialisme réformateur est susceptible de puiser. Célébrée comme une « autre économie », par certains experts à l’origine d’une formule qui tient davantage de la prophétie auto-réalisatrice que du travail scientifique, les attentes politiques vis-à-vis de l’économie sociale finiront par s’incarner dans la loi adoptée en 2014 [11]. Ce cadre normatif formalise par le droit un certain nombre de caractéristiques historiques comme la lucrativité limitée, la gouvernance démocratique ou la recherche d’une utilité sociale comme des attributs propres à ce qui est désormais désignée comme « l’entreprise de l’économie sociale et solidaire ». En ouvrant la possibilité à des sociétés commerciales d’être reconnues comme telles, sous réserve de se conformer à certaines règles formelles, la loi ne résout cependant pas le problème de la porosité des frontières entre économie sociale et économie de marché. Porosité qui est consubstantielle à l’ESS dans la mesure où elle a longtemps coexisté avec des « sociétés commerciales » sans que les statuts juridiques ne permettent de séparer nettement les deux mondes. C’est la raison laquelle Jean Baptiste André Godin, le fondateur du familistère de Guise (Lallement, 2009), n’a pas revendiqué, de son vivant, l’appartenance de son œuvre à l’économie sociale mais fait rétrospectivement l’objet d’une réappropriation à des fins de constitution d’un patrimoine idéologique de l’ESS.

L’entreprenariat social comme utopie réaliste

7Il ressort de tout cela que les entreprises de l’ESS incarnent, d’un point de vue historique, un ensemble hétérogène de pratiques qui ne s’inscrivent pas dans le cadre formel de l’économie de marché tel qu’établi par les économistes néoclassiques et qui reposent sur deux hypothèses majeures : d’une part, l’agent économique est égoïste et rationnel et poursuit son intérêt qu’il entend maximiser (objectivé par la fonction d’utilité). D’autre part, ce sont les prix de marché (déterminés par la concurrence) qui coordonnent les actions économiques (Eymard-Duvernay, 2004). La socialisation des ressources réalisée par les mutuelles (par la péréquation des risques et le mode de calcul des cotisations), la constitution de réserves impartageables dans les entreprises coopératives ou encore l’absence de but lucratif poursuivi par les associations constituent autant d’éléments qui caractérisent, comme le dit la loi : « un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé » [12]. À ce titre, l’existence des entreprises de l’ESS conforte la thèse selon laquelle le capitalisme est un phénomène profondément historique et suppose la « complicité active de la société » comme l’a très bien vu Fernand Braudel (Braudel, 1985). Néanmoins, le champ de l’ESS ne se résume pas uniquement à des pratiques, elle s’appuie, pour affirmer sa différence avec les institutions dominantes de l’économie de marché, sur des récits qui la mettent en avant sous la forme de l’utopie d’une « alternative au capitalisme » (Duverger, 2016). Dans le contexte des années 1990, marqué par l’effondrement du « socialisme réel » et l’affaiblissement des fondements de l’État social, l’ESS s’est ainsi imposée comme une « utopie économique » réaliste (Hély et Lefèvre, 2014). « Réaliste », c’est-à-dire qui s’écarte, tout à la fois, de la voie « étatiste » de l’économie administrée que les socialistes ont abandonnée à partir des années 1970 (Fulla, 2016), sans pour autant se conformer aux dogmes de la corporate governance de l’entreprise néolibérale (Coutrot, 1998). L’objectivation du processus « d’isomorphisme » des entreprises de l’ESS, c’est-à-dire de leur tendance à reproduire les modes d’organisation des administrations publiques ou des sociétés commerciales, est alors le principal écueil qui les guette (Hwang et Powell, 2009). Si ce processus constitue une menace en soi pour les entreprises de l’ESS, celle-ci, bien que ne reposant pas sur les principes de l’économie de marché « pure », organise la « rationalisation » [13] de ses organisations conformément au « rapport salarial » tel qu’il s’est construit historiquement, et ce, sans véritablement en questionner les fondements (Didry, 2016). Faute d’une critique raisonnée du rapport salarial, dont on voit mal comment il pourrait s’accommoder d’une incantatoire « gouvernance démocratique » dans la mesure où ce dernier implique la subordination et aménage l’exercice du pouvoir patronal, les syndicats employeurs, qui entendent représenter politiquement l’ESS, peinent ainsi à marquer leurs différences vis-à-vis de leurs homologues du secteur marchand. Autrement dit, si l’ESS constitue une alternative en actes à l’économie de marché, elle n’en n’est pas pour autant une alternative au capitalisme. Car c’est bien le rapport salarial, comme l’avait vu Marx, qui constitue la dimension centrale du capitalisme. Or, le guide définissant les conditions d’amélioration continue des bonnes pratiques des entreprises de l’économie sociale et solidaire, établi par le Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire et dont l’élaboration résulte de la loi de 2014, se contente de recommander la conformité aux normes de la négociation collective et du dialogue social telles qu’elles ont été établies par les « partenaires sociaux » (Conseil supérieur de l’ESS, 2016). Autrement dit, les institutions politiques de l’ESS n’ont aucunement l’ambition d’œuvrer activement à « l’abolition du salariat » comme l’avait proclamé Charles Gide en 1905 lors de la première publication de son ouvrage Les institutions du progrès social (Gide, 1905) [14]. Qu’il s’agisse là d’une victoire d’une certaine conception de l’ESS, telle qu’elle a notamment été portée par le courant politique de la « deuxième gauche », est indéniable. Néanmoins, il faut souligner, d’une part, que cette conception dominante ne subsume pas l’ensemble des pratiques dont la diversité idéologique est une caractéristique maintes fois rappelée. D’autre part, l’approche historique de longue durée fait apparaître combien cette conception est inscrite dans une configuration globale qui structure les usages multiples de ce qui a été rassemblé sous la catégorie « d’économie sociale » [15]. Autrement dit, si une certaine conception de « l’économie sociale » a pu s’imposer à partir de la fin des années 1970, c’est en grande partie la conséquence de transformations macrosociologiques qui se situent bien au-delà du monde de l’ESS (Hély, 2015).

8Cette diversité interne aux « entreprises de l’ESS » est palpable dans le développement du mouvement des « entrepreneurs sociaux », fort bien décrit dans les travaux de Clément Gérôme (Gérome, 2014). L’une des organisations les plus idiosyncratiques, le groupe SOS, revendique 12 000 salariés, travaillant dans 350 établissements en France métropolitaine et ultramarine en 2014 selon les données de son rapport annuel. Il est dirigé par un directoire composé de trois organismes, SOS-Drogues, SOS-Habitat et soins et SOS-Insertion, et il intervient à la fois dans les domaines de la toxicomanie, des soins palliatifs, de l’aide aux personnes dépendantes, de la protection de l’enfance, de la garde de jeunes enfants, de l’insertion par l’activité économique, du développement durable, et dispose aussi d’un groupe de presse. Cette diversification l’autorise à mutualiser les fonctions de support (conseil juridique, management, gestion, comptabilité, etc.) entre les établissements du groupe dans le cadre d’un groupement d’intérêt économique. Cette stratégie permet ainsi au Groupe SOS de recruter de jeunes diplômés formés dans les grandes écoles (HEC, Sciences-Po, etc.) en leur proposant des rémunérations, certes plus faibles que dans le secteur marchand, mais néanmoins importantes par rapport aux pratiques historiques des entreprises de l’économie sociale en la matière. Ce type de structure apparaît particulièrement bien ajustée aux nouvelles formes de coopération avec les collectivités publiques qui considèrent désormais les associations comme de véritables « opérateurs privés de politiques publiques » (Hély, 2012a).

9Pour autant, si le groupe SOS peut apparaître comme une figure de proue, il n’est pas isolé. Ainsi, l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE), fondée par Maria Nowak en 1988 et reconnue d’utilité publique en 2005, a joué un rôle clef dans la diffusion des pratiques du micro-crédit et a participé à mettre sur agenda la loi de modernisation de l’économie instaurant le statut « d’auto-entrepreneur » en 2009 (Abdelnour, 2013). Par ailleurs, l’ADIE est également l’une des premières entreprises de l’ESS lauréates du programme des « contrats à impact social » en juillet 2016. En outre, l’ADIE a émis des « titres associatifs », dispositif mis en place par la loi ESS de 2014, pour développer ses fonds propres (Riochet, 2016). Ces deux exemples révèlent le rapport décomplexé qu’entretient une fraction des entreprises de l’ESS à l’égard de la culture managériale et des outils de gestion. Que Jean Marc Borello (fondateur du Groupe SOS et à l’initiative du Mouves) ou Catherine Barbaroux (présidente de l’ADIE est membre du Conseil économique, social et environnemental – CESE – comme personnalité associée), aient figuré parmi les relais politiques d’Emmanuel Macron dans le cadre de son parti « En marche » [16] à l’approche des élections présidentielles de 2017, ne fait qu’objectiver le pragmatisme idéologique de ces aventuriers de la « troisième voie ». Le problème étant que l’identité de l’ESS comme « autre économie » se heurte à des positionnements de plus en plus alignés sur les intérêts dominants, comme en témoigne par exemple la signature de l’Union des employeurs de l’ESS d’un communiqué, commun avec les principales confédérations patronales, désapprouvant les troubles occasionnés par le mouvement syndical protestant contre la loi El-Khomri [17]. En outre, lorsque l’on interroge empiriquement les dirigeants sur leur sentiment d’identification à l’ESS, seuls un tiers d’entre eux répondent que ce syntagme fait sens pour eux (Hély, Rétif et Simonet, 2015). Tous ces éléments conduisent ainsi à souligner le paradoxe d’une loi qui, loin de consacrer symboliquement la reconnaissance d’un mouvement historique qui n’a cessé de revendiquer sa singularité vis-à-vis de l’État et du marché, favorise au fond ses interdépendances avec le secteur marchand.

Le rôle de l’économie sociale et solidaire dans la « réinvention de l’état » [18]

10Avec le lancement simultané, en juin 2016, du fond d’investissement NovESS [19] et la création du « Social Impact Lab » [20], l’État (par l’intermédiaire de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) prescrit lui-même, aux entreprises de l’ESS, le « bon » usage des outils de gestion et des indicateurs de performance dont la finalité consiste à mesurer « l’impact social ». On sait combien la Caisse des dépôts et consignations est une institution qui, par nature, se situe dans une position intermédiaire puisque ses membres doivent obéissance à l’État tout en faisant preuve de déférence à l’égard des créanciers privés (Verheyde, 2006). Depuis les années 1970, elle joue un rôle décisif dans la structuration des pratiques de l’ESS avec notamment le rôle d’un homme clef comme Hugues Sibille qui prend l’initiative de créer l’agence de valorisation des initiatives socioéconomiques en 2002 et qui pilote aujourd’hui le dispositif local d’accompagnement (DLA) dont Simon Cottin-Marx a montré l’importance dans la dynamique de rationalisation du monde associatif et l’affirmation de son statut d’employeur (Cottin-Marx, 2016). Hugues Sibille est également l’un des principaux artisans du référentiel de « l’innovation sociale », désormais inscrit dans la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire [21]. Il est ainsi un personnage clef dans les transformations de l’ESS (cf. encadré ci-dessous).

Adhérent au PSU en 1973 et diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, Hugues Sibillle débute sa carrière au Syndex, cabinet d’expertise et comptable de la CFDT, alors dirigée par Edmond Maire. Il collabore ensuite avec Claude Neuschwander qui avait été mandaté par le Ministère du Travail pour relancer l’entreprise LIP lors du célèbre conflit de l’été 1973. Il participe ensuite avec Bertrand Schwartz au développement des premières politiques d’insertion par l’activité économique et à la création des Missions locales (Cottin-Marx, 2016). PDG du groupe de conseil « Ten », il conseille Martine Aubry lors de la mise en œuvre du programme « nouveaux emplois, nouveaux services » (plus connu sous le terme des « emplois jeunes ») en 1997. Il est ensuite nommé délégué interministériel à l’économie sociale en 1998. Il assure cette fonction jusqu’en 2001, puisque cette délégation est remplacée par un secrétariat d’État dirigé par Guy Hascoët. Il devient alors directeur des Partenariats de la Caisse des Dépôts en charge de la création des petites entreprises et de l’économie sociale. C’est pour préparer la fin du programme des « emplois jeunes » qu’Hugues Sibille met en place le dispositif local d’accompagnement (DLA) (Cottin-Marx, 2016) pour assurer l’accompagnement technique des associations y ayant participé. Il crée l’Agence de Valorisation des Initiatives Socio-économiques (AVISE), avec le soutien financier de la Caisse des dépôts et consignations. Il rejoint ensuite le Crédit coopératif en 2005, comme Directeur général délégué et devient Vice-président en 2010. Membre du « Mouvement des entrepreneurs sociaux » (Mouves) depuis sa création, Hugues Sibille est l’auteur d’un rapport, au titre du Comité national consultatif sur l’investissement à impact, publié en 2014, dans lequel il est préconisé la création d’un statut de « société à objet social étendu » (Segrestin et al., 2015).

11Promoteur de la notion « d’innovation sociale », Hugues Sibille s’inscrit dans l’inspiration rocardienne de mettre l’ESS au service d’une économie de marché « à visage humain ». Partant du constat que « l’économie administrée a échoué » et que sa génération « en a payé le prix fort » (Sibille, 2011), Hugues Sibille considère que « l’État providence et les politiques redistributives sont en panne » et qu’il convient, pour y parvenir, de « favoriser l’innovation sociale » (Sibille, 2011). Il participe activement à la transformation des organisations de l’ESS en « opérateurs privés de politiques publiques » par la promotion d’outils d’évaluation des « impacts sociaux » que des « experts », diplômés de grandes écoles comme l’ESSEC [22], vont s’empresser de normaliser à travers des protocoles standardisés (Stievenart et Pache, 2014). Bien sûr, cette « voie de l’innovation sociale », pour reprendre le titre de l’ouvrage éponyme consacré au parcours de Sibille (Sibille, 2011), n’est pas sans affinité avec certaines croyances du New Public Management dont l’externalisation des services publics à des petites structures opérationnelles constitue l’un des piliers et est censé garantir plus d’efficacité et d’efficience que l’organisation bureaucratique de l’État social. Sur ce plan, Sibille appartient à une génération de la noblesse d’État, convertie à la nouvelle gestion publique telle que la décrit Philippe Bezès (Bezès, 2012), à la différence d’un François Bloch-Lainé qui incarne, au contraire, la grandeur de l’État et revendique, avec fierté, l’appartenance à la fonction publique (Bloch-Lainé, Carrière, 1976). Hugues Sibille est un fervent partisan du développement de « l’accompagnement » des associations dans leurs pratiques de gestion. Cette activité d’accompagnement a commencé à apparaître au début des années 1990 avec le développement des politiques et l’usage du monde associatif comme laboratoire d’expérimentation des contrats d’insertion (Hély, 2012b). Ainsi après les « travaux d’utilité collective » (TUC) mis en place en 1984, sont apparus les « contrats emplois solidarité » (CES) pour lesquels le monde associatif a été un employeur important. La concomitance de la multiplication des mesures d’insertion et des pratiques d’accompagnement des associations va donner naissance à de nombreux organismes spécialisés et à une diversité de domaines d’intervention. Pour résumer de façon synthétique, on peut distinguer les réseaux de soutien à la vie associative coordonnés par l’État et les collectivités locales, les réseaux formés à partir des services de grandes fédérations du monde associatif (comme les conseillers techniques des URIOPSS [23]) et enfin les réseaux dont l’accompagnement constitue le cœur de métier. Il faudrait également ajouter que le monde associatif représente, en outre, un marché pris très au sérieux par les cabinets privés de conseil en organisation (comme Deloitte qui édite une revue spécialisée destinée aux associations) mais aussi les consultants indépendants.

12 Si le référentiel de l’innovation sociale s’impose aussi facilement, c’est qu’il s’appuie sur une critique implicite de l’État bureaucratique. Thème que l’on retrouve également dans les appels à la mobilisation de la société civile. Déjà dans la circulaire relative à la « méthode de travail du gouvernement » qu’il a adressée à son gouvernement en 1988 en qualité de Premier ministre, Michel Rocard appelait à « dissiper l’illusion qui voit dans l’intervention de l’État la solution de tous les maux » [24]. Le gouvernement, et au-delà l’administration, sont ainsi appelés à faire preuve de « respect » à l’égard de la « société civile ». Les représentants de l’État doivent s’efforcer de « tirer parti […] des bonnes volontés et des idées dont est riche la société civile. Au fur et à mesure que les acteurs sociaux, économiques et culturels se révèlent aptes à se saisir de tâches d’intérêt général, l’action de l’État doit passer de la gestion directe au « faire faire », du « faire faire » à l’incitation et de l’incitation à la définition des règles du jeu ». Cet appel à la prise en compte des initiatives de la société civile, qui fait écho au contexte d’élaboration de la loi instaurant le « revenu minimum d’insertion » (RMI), préfigurera la mise sur agenda quelques années plus tard de la loi relative à la lutte contre les exclusions qui verra le monde associatif y jouer un rôle de premier plan (Cheynis, 2013). Mais plus généralement, Michel Rocard pose les bases d’un nouveau partenariat entre l’État et la société civile, dont les germes avaient été posés avec la loi de juin 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales, ce nouveau partenariat trouve son complément dans la rhétorique du management public laquelle fonde désormais la légitimité des services publics sur leur efficacité et leur efficience. C’est pourquoi, on ne peut dissocier la circulaire de 1988 de celle de 1989 sur le « renouveau du service public » qui pose comme « devoir » la nécessité de développer les pratiques « d’évaluation des politiques publiques ». Autrement dit, partenariat des collectivités avec la société civile et promotion du management public constituent les deux piliers d’une réforme de l’État cohérente et ambitieuse.

13 Le cadre de cet article ne permet pas de développer davantage la contribution des entreprises de l’ESS à la transformation des formes de l’action publique, mais il est indéniable que les pratiques rassemblées sous l’étiquette de l’innovation sociale, telles que celle des « contrats à impact social » que le think tank libéral de l’Institut de l’entreprise avait contribué à mettre sur agenda (Le Pendeven, Nico et Gachet, 2015), participent d’un processus plus général de pénétration des normes marchandes au cœur de l’action publique (Eyraud, 2013).

14 * * *

15L’ESS est une catégorie politico-administrative qui regroupe un ensemble hétérogène de pratiques unifiées par des statuts juridiques et structurées par l’appartenance, plus ou moins consciente, à une matrice commune autour des héritages historiques de l’associationnisme, du mutualisme et du mouvement coopératif. Ce qui signifie que le degré de politisation de ces pratiques est très variable selon que l’on s’intéresse au commerce équitable ou aux services à la personne. La volonté d’incarner une « alternative au capitalisme », qui est parfois attribuée à ces pratiques, est loin d’être revendiquée par tous les mouvements qui composent les organisations de l’ESS. De fait avec la reconnaissance juridique de l’ESS, notamment depuis 2014, coexistent bel et bien un espace structuré par l’État et les collectivités (Conseil supérieur de l’ESS, AVISE, CRESS, etc.) et des pratiques locales de la société civile. Cette tension issue de la volonté de contrôle de l’État sur l’expression des libertés dans l’espace public est une caractéristique de la modernité politique née de l’abolition de la monarchie absolue. S’il a fallu attendre la fin du XIXe siècle pour que l’État cesse de considérer cette expression comme une menace à l’ordre public et finisse par admettre l’existence d’une société civile mobilisée (Tilly, 1986), cela ne signifie pas pour autant que cette tension n’existe plus. L’ESS existe donc à la fois comme une utopie, c’est-à-dire un « non-lieu » relevant de l’imaginaire politique, et dans des pratiques dont la particularité contemporaine est marquée le dynamisme des activités économiques qui y sont développées. Cependant, lorsque l’ESS est invoquée par le politique pour justifier son impuissance à contrôler les puissances dévastatrices de la finance [25], l’utopie perd une part significative de son pouvoir d’enchantement.

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Mots-clés éditeurs : État néolibéral, contrats à impact social, entrepreneuriat social, monde associatif, Loi relative à l’économie sociale et solidaire

Date de mise en ligne : 09/01/2018

https://doi.org/10.3917/rfap.163.0543

Notes

  • [1]
    Laboratoire Printemps (UMR CNRS 8085), 47 Boulevard Vauban, 78047 Guyancourt. L’auteur remercie Claire Vivès (IDHES, CNRS) pour sa relecture et ses remarques.
  • [2]
    « Comment et pourquoi favoriser des investissements à impact social ? Innover financièrement pour innover socialement ». Rapport du Comité français sur l’investissement, 2014. http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/RapportSIIFce_vdef_28082014.pdf.
  • [3]
    Mme Carole Delga, secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire, Séance de questions au gouvernement, Assemblée nationale, 26 mai 2015.
  • [4]
    Communiqué de presse du 11 mars 2016, n°1251, ministère de l’économie, de l’industrie et du numérique. On notera également que cet appel à projets a obtenu le soutien (moyennant quelques réserves mineures) du Haut Conseil à la vie associative qui déclare dans son avis du 2 mars 2016 que « le Haut Conseil partage la volonté d’innover dans le cadre du financement d’actions utiles à tous et particulièrement aux populations les plus défavorisées. Il demande expressément néanmoins que les risques repérés, particulièrement par l’OCDE, soient bien pris en compte dans la décision finale ».
  • [5]
    Association créée par la loi du 31 juillet 2014 et qui comprend parmi ses membres fondateurs : le Centre français des fonds et fondations, pour les fondations ; le CNCRES, pour les CRESS ; Coop FR, pour les coopératives ; la FNMF, pour les mutuelles relevant du code de la mutualité ; le GEMA, pour les mutuelles relevant du code des assurances ; le Mouvement associatif, pour les associations ; le MOUVES, pour les entrepreneurs sociaux et les sociétés commerciales visées au 20 du II de l’article 1 de la loi relative à l’économie sociale et solidaire (statuts du 14 octobre 2014).
  • [6]
    Dont l’article 15 de la loi de 2014 donne la définition suivante : « 1° Soit répondre à des besoins sociaux non ou mal satisfaits, que ce soit dans les conditions actuelles du marché ou dans le cadre des politiques publiques ; 2° Soit répondre à des besoins sociaux par une forme innovante d’entreprise, par un processus innovant de production de biens ou de services ou encore par un mode innovant d’organisation du travail »
  • [7]
    Sont dissoutes par décret du 13 février 1936 : la Ligue d’action française, la Fédération nationale des camelots du roi et commissaires d’Action française et la Fédération nationale des étudiants, lycéens et collégiens d’Action française.
  • [8]
    L’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire a apporté son soutien à l’adoption de la loi El Khomri en dépit de la forte contestation syndicale exprimée au printemps 2016.
  • [9]
    Tout comme la thèse contestée de la « fin du travail » portée par Jéméry Rifkin a eu des échos importants dans l’ESS au milieu des années 1990 (Simonet, 2010).
  • [10]
    « Le « désir de gain » ou la « recherche du profit », n’ont en eux-mêmes rien à voir avec le capitalisme. Cette recherche animait et anime toujours les garçons de café, les médecins, les cochers, les artistes, les cocottes, les fonctionnaires vénaux, les soldats, les brigands, les croisés, les piliers de tripot, les mendiants : on peut dire qu’on la retrouve chez all sorts and conditions of men, à toutes les époques et en tous lieux, partout où existe ou a existé, d’une manière ou d’une autre, la possibilité objective d’une telle recherche […] l’avidité d’un gain sans aucune limite n’équivaut en rien au capitalisme, encore moins à son « esprit ». Le capitalisme peut s’identifier directement avec la maîtrise, ou du moins avec la modération rationnelle de cette pulsion irrationnelle » (Weber, 2006, 493).
  • [11]
    Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014.
  • [12]
    Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014.
  • [13]
    L’augmentation constante du nombre de salariés (en particulier dans le monde associatif) est un indicateur parmi d’autres de ce processus. (Cf. Chessel et Nicourd, 2009).
  • [14]
    Notons à cet égard que dans les trois éditions successives de cet ouvrage, le traitement de la question du salariat, dans le chapitre concernant l’indépendance, évolue : « L’abolition du salariat en 1905 devient en 1911 la transformation du salariat à travers l’ouvrier entrepreneur et actionnaire, puis en 1920 l’émancipation du salariat pour les travailleurs urbains et ruraux » (Rivet, 2012).
  • [15]
    Les premières occurrences de cette notion ont été identifiées au début du XIXe siècle.
  • [16]
    Selon le quotidien Le Monde, « elle est une vraie femme de gauche, qui a travaillé avec Michel Crépeau et Martine Aubry, mais également dirigé les ressources humaines du groupe PPR, propriété du milliardaire François Pinault », in « Emmanuel Macron nomme ses «ambassadeurs» », Le Monde, 26 octobre 2016.
  • [17]
    Communiqué du 30 mai 2016, consultable sur ce site : http://www.udes.fr/actualites/communique-de-presse-commun.
  • [18]
    Bézès, 2009
  • [19]
    « Le Fonds ESS interviendra à 90 % en fonds propres et quasi fonds propres sur tout le périmètre de la loi ESS du 31 juillet 2014 (associations, coopératives, mutuelles, fondations et sociétés commerciales avec une couverture sectorielle prédominante sur le social, le médico-social, transition énergétique). Il ciblera prioritairement les associations et entreprises sociales porteuses de projets de grande envergure (investissements compris entre 1 million d’euros et 5 millions d’euros). Il interviendra également pour faire émerger des projets innovants à forte valeur ajoutée, futures « pépites », et des projets en phase d’accélération (investissements compris entre 100 000 euros et 500 000 euros) », site internet de la Caisse des dépôts et consignations, consulté en décembre 2016.
  • [20]
    En partenariat avec le Centre français des fonds et des fondations, le Comptoir de l’innovation, le Crédit coopératif, Finansol, et le Mouvement des entrepreneurs sociaux. Cf. communiqué de presse du 13 juin 2016 sur le site internet de la Caisse des dépôts.
  • [21]
    Le Chapitre IV composé d’un seul article définit l’innovation sociale et annonce la mise en œuvre d’outils financiers spécifiques pour les entreprises de l’ESS.
  • [22]
    Au sein de la Chaire d’entrepreneuriat social, fondée en 2003 par Thierry Sibieude.
  • [23]
    Unions régionales interfédérales des œuvres et organismes privés non lucratifs, sanitaires et sociaux.
  • [24]
    Circulaire du 25 mai 1988 relative à la méthode de travail du Gouvernement. En préambule, Michel Rocard prend soin de préciser que la publication de cette circulaire au Journal Officiel se justifie parce qu’elle pose les règles d’une « bonne administration » selon sa formule.
  • [25]
    « J’avais évoqué la finance dans un discours célèbre. Aujourd’hui, c’est la finance solidaire que nous célébrons », discours du Président de la République François Hollande à la conférence « Impact social », 25 novembre 2016.

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