Notes
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[1]
Soulignons d’emblée qu’en tant que province dans un cadre fédéral, le Québec bénéficie de prérogatives importantes dans le domaine social. Le gouvernement provincial y est l’interlocuteur central du secteur associatif. Sur l’importance, dans l’analyse comparée, de ce cadrage à l’échelon québécois des politiques sociales, cf. Laforest, 2011.
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[2]
Le secteur associatif français et ce qu’on appelle le secteur communautaire au Québec ne recouvrent pas exactement les mêmes réalités. Nous utiliserons à l’occasion le terme « associatif » par commodité de langage pour un lectorat en France, mais nous parlerons bien d’organismes communautaires dans notre article.
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[3]
En annexe, nous proposons un tableau synthèse permettant de mieux comprendre les caractéristiques de ces « générations » de l’action communautaire.
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[4]
Quatre critères sont entérinés par le gouvernement afin de définir les organismes d’action communautaire : être à but non lucratif ; être enraciné dans la communauté ; entretenir une vie associative et démocratique ; être libre de déterminer sa mission, ses approches, ses pratiques et ses orientations. Pour être qualifié d’autonome, quatre autres caractéristiques s’ajoutent à cette définition : avoir été constitué à l’initiative des membres de la communauté ; poursuivre une mission sociale qui favorise la transformation sociale ; faire preuve de pratiques citoyennes et d’approches axées sur la globalité de la problématique abordée ; être dirigé par un conseil d’administration indépendant du réseau public (SACA, 1996).
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[5]
Cet article s’appuie sur une revue de littérature pour la partie historique et sur des enquêtes en cours depuis trois ans sur les transformations liées à la montée en puissance des fondations philanthropiques au Québec. Ces enquêtes de terrain reposent sur des séries d’entretiens avec des responsables de fondations et d’organismes communautaires, mais aussi des observations ethnographiques, à l’occasion d’une recherche partenariale avec une fondation et d’une mobilisation dont nous traitons en seconde partie.
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[6]
Dans ses derniers états financiers, la FLAC fait état d’un actif de 1,8 milliards de dollars, avec des résultats nets des activités de placements se montant à 122 millions de dollars. Cf. FLAC, États financiers au 31 décembre 2015, http://www.fondationchagnon.org/media/122186/etats_financiers_2015.pdf.
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[7]
Centraide est la branche québécoise des United Way américains, un réseau de fondations publiques, financées à la fois par une collecte de fonds grand public en milieu de travail et par de grands donateurs. Leur action est territorialisée et consiste à sélectionner des organismes donataires, sur la question de la pauvreté. Dans les derrières années, elles mettent en avant le passage d’une posture de grantmaker à celle de changemaker, en prenant une place de plus en plus importante dans l’action collective.
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[8]
C’est d’ailleurs une argumentation clef du rapport « Un Québec fou de ses enfants ! ».
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[9]
Les descriptifs des thématiques sont celles produites par la FLAC. Cf. http://www.fondationchagnon.org/fr/que-faisons-nous/partenariats.aspx et https://www.lappui.org (pages consultées le 10 janvier 2017).
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[10]
Ce partenariat n’est pas soutenu par la FLAC, mais par une société de portefeuille, créée en 2000, appartenant à la famille Chagnon. Ce partenariat a donc un statut spécifique, puisque c’est le seul qui n’est pas centré sur la petite enfance.
-
[11]
Sur la mobilisation du collectif « Pour un Québec sans pauvreté » et la promulgation d’une loi-cadre contre la pauvreté et l’exclusion en 2002, Cf. Dufour, 2004.
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[12]
Il faut souligner qu’à la même période, des critiques fortes sont adressées aux partenariats public-privé plus classiques mis en place par le gouvernement libéral pour la construction de routes, hôpitaux, etc. Les critiques portent principalement sur la « liquidation des services publics », mais aussi sur les coûts excessifs de ces procédures (Breton, 2005). Cette solution, après avoir été un élément central du gouvernement libéral, sera progressivement marginalisée, suite à plusieurs déconvenues financières.
-
[13]
Entrevue avec l’auteur, 19 juin 2013.
-
[14]
Le gouvernement du Parti Libéral, qui avait signé les ententes avec la FLAC, a été défait aux élections provinciales au printemps 2012 par le Parti Québécois. Il est revenu au pouvoir en 2014.
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[15]
Entrevue avec l’auteur, 20 juin 2013.
1 Il est souvent fait référence, dans une perspective comparative, aux spécificités du « modèle québécois ». Outre ses particularités culturelles, ce « modèle » renvoie à l’importance de son État social, par rapport au Canada [1] et aux États-Unis, mais aussi au lien entre cet État et le secteur associatif. Sur le premier élément, le Québec se distingue par un niveau de taxation supérieur et des politiques sociales qui ont permis que le niveau de pauvreté et d’inégalité soient aujourd’hui inférieurs à ses voisins. Autres spécificités : un niveau de don financier plus faible, des organisations religieuses moins puissantes, un syndicalisme plus fort, un réseau de coopératives et de mutuelles nettement plus important (Laforest, 2011). C’est aussi le second élément, le lien entre État et secteur associatif, qui singularise la construction de l’État québécois (Hamel, Jouve, 2006). En effet, on trouve au Québec des associations dynamiques, désignées par le terme d’« organismes communautaires [2] », soutenues par l’État. Cependant, cette relation est loin d’être apaisée. Elle prend plutôt la forme d’une « coopération conflictuelle » (Lamoureux, 1994), qui a pris plusieurs visages dans les dernières décennies.
2 Au tournant des années 1960, s’ouvre une période désignée comme la « Révolution tranquille » au Québec. À la suite de l’échec électoral du gouvernement conservateur de Duplessis, l’administration publique des domaines de la santé, des loisirs et de l’éducation se met en place. Alors que le gouvernement provincial s’active au « rattrapage » de réformes industrielles et sociales inspirées du modèle anglo-saxon, le secteur communautaire connait une forte expansion aux côtés d’associations issues des mouvements d’action catholique, de loisirs (scouts, guides) et d’action culturelle. En s’appuyant sur les synthèses historiques existantes, Mayer, Lamoureux et Panet-Raymond (2008) identifient, à partir de cette période, quatre « générations » d’action communautaire au Québec : celle des comités de citoyens (1960) ; celle des groupes populaires, au cours de la décennie 1970 ; celle du virage partenarial des années 1980 ; et, au cours des 1990, une génération marquée par l’institutionnalisation de la concertation et du partenariat [3]. Influencées par le contexte politique de leur mise en place, chacune de ces générations se distingue par son approche des problèmes sociaux et son rapport à l’État. Sans remplacer la génération d’organisations qui précède, leur « superposition » amène à la fois certains groupes à se transformer, mais crée aussi certaines tensions entre les réseaux communautaires.
3 En 2001, une politique de reconnaissance et de soutien de l’action communautaire est adoptée formellement par le gouvernement [4]. Au départ, l’idée d’une telle politique intéressait une partie importante du milieu communautaire, mais il semble que sa formule finale fit moins consensus (White, 2012). Particulièrement, des acteurs du « vieux mouvement populaire » – caractérisé par la politisation de son analyse des problèmes sociaux –, critiquent un processus perçu comme « facilitant la transition des services publics vers le privé » à moindre coût (Greason, 2001). Suite à l’adoption de cette politique, la part moyenne du financement provincial dans les budgets des organismes communautaires a augmenté d’un peu moins de 20 % (White et al., 2008). Au début de la décennie 2010, le financement provincial constitue toujours la source principale de financement (61 %) du budget moyen des organismes communautaires au Québec (Depelteau et al., 2013).
4Si cette relation s’est longtemps jouée en binôme entre l’État et les organisations communautaires, un troisième acteur est entré en scène, depuis une dizaine d’années : les fondations philanthropiques. Comme dans de nombreux pays, la montée en puissance de ces acteurs est liée à la fois à la hausse des inégalités de revenus (et de capital), à la volonté d’acteurs du secteur marchand de participer à la résolution de problèmes sociaux mais aussi à des mesures incitatives des gouvernements pour faciliter la participation de ces nouveaux acteurs (Lambelet, 2014). Dans le cas du Québec, ces mesures ont pris la forme de partenariats formels, parfois nommés « Partenariats public-privé sociaux », entre le gouvernement et la Fondation Lucie et André Chagnon (FLAC). Chacun de ces partenariats, financé et administré de façon paritaire, sous forme d’agence (cf. Tableau no 1), a déployé un financement de plusieurs centaines de millions de dollars en soutien aux associations engagées dans le domaine des politiques sociales. C’est alors un triangle institutionnel qui s’est mis en place, chaque pôle entretenant avec les deux autres des relations complexes.
5 Notre article vise à analyser ces partenariats entre le secteur public et cette fondation philanthropique comme une mise à l’épreuve du triangle institutionnel État-fondations philanthropiques-milieu associatif. Plutôt que de définir a priori le sens de cette expérimentation (par exemple en l’interprétant comme une simple privatisation des politiques sociales, ou encore une prise de pouvoir unilatérale des fondations philanthropiques), nous porterons une attention particulière aux relations complexes entre les trois pôles de notre triangle, avec des jeux subtils d’influence, de coopération et d’opposition, voire de coalitions momentanées – et réversibles – de deux pôles vis-à-vis d’un troisième. Pour cela, nous reviendrons dans un premier temps sur la genèse de ces partenariats particuliers entre une fondation et les pouvoirs publics, puis dans un second temps sur les oppositions qui voient le jour, notamment celles initiées par certains acteurs associatifs. Enfin, dans un troisième temps, nous analyserons la configuration plus récente, marquée par la fin de ces partenariats et une mobilisation de fondations privées en faveur d’un État social plus fort et plus présent contre les inégalités sociales [5].
Le partenariat entre le secteur public et la flac : la convergence d’une « nébuleuse réformatrice », de la philanthropie stratégique et de la nouvelle gestion publique
6 La FLAC est née en 2000, via une dotation de 1,4 milliard de dollars. Ce capital est lié à la vente de l’entreprise familiale, devenue un groupe majeur au Québec dans le domaine des télécommunications (Vidéotron). Au moment de sa création, la FLAC est la plus riche fondation privée au Québec, mais aussi au Canada. Les placements financiers liés à ce capital lui permettent de générer annuellement plusieurs dizaines de millions de dollars à investir dans des projets [6].
7 La FLAC se rapproche, dans le déploiement de son action et dans son discours – au moins durant sa première décennie d’existence –, d’un modèle initié par de grandes fondations à partir des années 1990, parfois désigné par le terme de « philanthrocapitalisme » (Bishop et Green, 2008). Plus que les connotations, positives ou négatives, que charrie ce terme, ce qui nous intéresse ici est la récurrence de deux traits distinctifs dans ce type d’approches philanthropiques.
8 Premier trait : le philanthrocapitalisme aborde le don comme un investissement, en important les outils managériaux et financiers dans le secteur social (Letts et al., 1997). Plus précisément, il transpose la logique du capitalisme de risque (venture philanthropy), et son focus sur l’effet levier pour maximiser les impacts. Il s’agit d’aller contre des maux identifiés de longue date dans le secteur philanthropique : logique de saupoudrage, projets à court terme, absence de financement à la mission, pas d’augmentation du pouvoir d’agir (capacity-building). A contrario, ce courant s’incarne dans des engagements financiers importants, sur une période de moyen terme (cinq ans) avec une volonté de produire un changement structurel (Porter et Kramer, 1999). Le suivi exigeant des projets financés passe par la construction d’outils de reddition de compte, d’évaluation et de fixation d’objectifs précis. La métaphore de l’investissement signifie donc ici moins d’attendre la réplication d’un projet pilote que de penser directement la généralisation du projet (up-scaling) à travers des architectures institutionnelles précises, voire des systèmes de franchise à gérer par des entrepreneurs sociaux (Frumkin, 2003).
9 Second trait : le philanthrocapitalisme s’appuie sur la promotion du paradigme de l’investissement social. Celui-ci met l’accent sur une action ciblée sur des causes premières (par exemple l’éducation et la petite enfance) afin de prévenir des problèmes futurs, dont on redoute à la fois l’ampleur, la logique auto-reproductive et la dimension structurelle beaucoup plus difficiles à traiter (problèmes de santé, de pauvreté, de violence). Dans ce paradigme d’action publique, aux mesures universelles succèdent donc des ciblages de plus en plus précis et, à l’horizon de l’égalité des conditions, succède l’égalité des chances. Au Canada, c’est à la fin des années 1990 que ce paradigme vient redéfinir la clef de répartition entre l’État, les familles et le marché, et il s’incarne dans le ciblage des interventions de l’État social vers les enfants : « un «bon placement» pour l’avenir, tandis que les populations assistées de quelque façon (dont il n’est pas rare que les parents même de ces enfants fassent partie) représentent plutôt un investissement ‘‘à fonds perdus’’ et sont de plus en plus traitées comme un bassin de main d’œuvre à bon marché à intégrer au marché du travail, souvent par une forme quelconque de workfare » (Jenson, 2000, 15).
10 Au Québec, c’est une véritable « nébuleuse réformatrice » (Topalov, 1999) qui met à l’agenda le développement des tout-petits, regroupant dans des colloques, des expérimentations locales et des circulations internationales de savoir, une série d’acteurs universitaires, associatifs locaux, de donateurs, d’élus, de fonctionnaires et d’administrations publiques, sous l’impulsion d’une fondation philanthropique.
Genèse d’une nébuleuse réformatrice : 1,2,3 Go !
Dans les années 1990, Centraide9 importe à Montréal l’initiative Success by Six, développée par United Way au Minnesota, autour de la promotion d’environnements qui permettraient le développement du « plein potentiel » des enfants, via la mobilisation et la concertation des donateurs et d’acteurs publics et privés. En 1994, Centraide créé un « Conseil des partenaires », regroupant des représentants du secteur public (santé, social, éducation), communautaire, religieux, syndical, mais aussi municipal et privé. Le projet 1,2,3 Go ! est ainsi lancé à Montréal en reprenant les pistes du rapport Bouchard.
Un premier projet pilote de cinq ans (1995-2000) est implanté dans six quartiers de la grande région de Montréal. Il faut souligner qu’un intense travail d’évaluation est mené par une équipe universitaire (dont C. Bouchard), dans une logique « randomisée » et dotée d’indicateurs précis et quantitatifs, afin de mesurer les impacts sur les enfants et leurs familles, mais aussi sur la mobilisation des milieux. In fine, les effets mesurés sont faibles pour la première dimension et plus forte sur la seconde.
En 2000, le Centre 1,2,3 Go ! est créé, autonomisé par rapport à Centraide et produit d’autres initiatives. La création de la FLAC en 2001 est marquée par l’influence des principes d’1,2,3 Go ! ; d’ailleurs l’équipe du Centre 1,2,3 Go ! d’ailleurs, l’équipe du Centre 1,2,3 Go ! rejoint un des partenariats entre la FLAC et le gouvernement: Avenir d’enfants (Brunet, 2014, 25).
11 [7]Sur le fond, la rhétorique de l’investissement social permet à des acteurs ayant des visées très différentes d’avoir un point de convergence, en séduisant à la fois ceux qui pensent que le secteur privé a les clefs pour résoudre les problèmes publics et ceux qui veulent réhabiliter les dépenses sociales, en ne les présentant plus comme un fardeau mais comme un investissement [8]. Sur la forme, elle offre aussi un point de convergence entre cette philanthropie stratégique, qui promeut l’utilisation des instruments managériaux, et l’État, converti aux principes de la « Nouvelle gestion publique ». Au Québec, la « réingénierie de l’État », promue par le gouvernement libéral au début des années 2000, reprend la rhétorique « modernisatrice » du pilotage de l’action publique, via les instruments managériaux : gestion de la performance, de la contractualisation et de la rémunération au rendement, reddition de comptes, étalonnage des performances, logique de projet (Fortier, 2010). Mais ceci s’incarne également par une centralisation des fonctions de décision au sein de quelques agences, ayant une autonomie plus grande que les ministères, et le développement de partenariats public-privé (Rouillard et Hudon, 2007).
12 En complément de la voie tracée par la « nébuleuse réformatrice » décrite auparavant, cette convergence entre la philanthropie stratégique et l’État, sur le fond et la forme, via « l’investissement social », permet de mieux comprendre la forme très particulière qu’a prise l’action de la FLAC au début des années 2000. En effet, si elle définit sa mission par la lutte à la pauvreté, la FLAC lui donne un angle particulier : celui de la prévention de la pauvreté et de la maladie au Québec, avec un ciblage plus précis sur la petite-enfance. Pour définir les meilleures pratiques, une forte expertise scientifique est développée, et les choix sont justifiés, non pas selon un discours d’indignation ou de compassion charitable, mais par l’usage des données probantes (Ducharme et Lesemann, 2011). L’architecture des programmes passe par la mise en place de quatre sociétés de gestion, avec un financement et une gouvernance paritaire entre le gouvernement et la FLAC. La création de ces agences / opérateurs en charge de la mise en œuvre d’un partenariat dédié est promulguée par des lois ad hoc.
13Un dernier élément est commun aux quatre partenariats : l’emphase mise sur la « mobilisation des communautés ». En effet, la FLAC n’agit pas directement, mises à part ses campagnes de sensibilisation : elle finance des organisations communautaires qui agissent sur le terrain et travaillent au côté d’autres acteurs (familles, enseignants, clubs de sport, etc.). Ce mot d’ordre semble a priori consensuel au Québec, d’autant que les organisations communautaires, mais plus largement les acteurs de la société civile (syndicats, réseaux de l’éducation, mouvement des femmes, secteur de l’économie sociale et solidaire) se mobilisent très fortement à la fin des années 1990, sur la question de la pauvreté [11]. Au tournant des années 2000, le thème de la mobilisation des communautés est également utilisé et promu par la Direction de la santé publique. Mais les modalités de mobilisation imposées par la FLAC suscitent de fortes résistances, qui remettent en question la légitimité de ces partenariats (Berthiaume, 2016).
Les résistances des organismes communautaires
14Au Québec, des acteurs divers, à la confluence des secteurs communautaires, syndicaux et universitaires, font entendre des voix discordantes face à ces PPP sociaux [12]. Des analyses sont développées dans les bulletins de ces réseaux communautaires, des tribunes sont envoyées dans les médias, et des mémoires sont déposés à l’occasion des examens parlementaires des lois devant entériner la création des agences en charge de la mise en œuvre des partenariats (Ducharme, 2010).
Regrouper les contestations : la réflexion conduite à l’occasion des journées « Fondations et PPP sociaux – visages de la privatisation »
Dans le but de rallier d’autres acteurs des milieux communautaires et syndicaux, la Coalition Non aux PPP sociaux produit une déclaration d’appui visant à interpeler le gouvernement du Québec sur la question. Quatre demandes principales sont adressées dans cette déclaration :
1) S’engager à ne pas conclure de nouveaux partenariats public-philanthropie (PPP sociaux).
2) Ne pas renouveler les ententes déjà conclues.
3) Mener un débat public sur la responsabilité de l’État québécois quant aux orientations des politiques sociales.
4) Réinvestir les sommes jusque-là investies dans les fonds mixtes, dans les services publics et la mission de base des organismes communautaires.
Même si 364 organisations ont signé cette déclaration, elle n’a toutefois pas eu de réponse positive de la part du gouvernement.
15Les critiques portées à l’encontre de ces PPP sociaux varient selon les organismes qui en sont porteurs. Un responsable du dossier au sein d’une centrale syndicale met en avant le déficit démocratique alors que des fonds publics sont engagés : « Ce qui m’offusque le plus dans toute cette situation c’est que depuis 10 ans, il y a une fondation qui a des activités dans lesquelles on utilise des fonds publics pour moitié, moitié des fonds de la fondation. Ils peuvent bien faire ce qu’ils veulent avec leurs fonds, mais l’autre moitié c’est de l’argent du gouvernement, et il n’y a aucun ministère, aucune consultation publique sur comment on oriente le social au Québec » [13].
16 Premièrement, soulignons que ces partenariats n’ont pas fait l’objet d’un large débat public, que ce soit au moment de la promulgation des lois ou des campagnes électorales, créant un large et rare consensus transpartisan. L’alternance politique entre le Parti Libéral et le Parti Québécois n’a d’ailleurs pas remis en cause les partenariats [14]. Deuxièmement, il faut préciser que cet argument s’articule à un discours sur la privatisation des services sociaux. En effet, les partenariats sont signés dans une séquence politique de coupes dans les budgets sociaux. Aux yeux des organismes communautaires, qui voient leur ministère refuser une hausse de leurs subventions, ce choix d’allocation de fonds publics vers des PPP sociaux est difficile à accepter. Mais, dans le même temps, le recours à ces nouvelles agences de financement est également très difficile à refuser pour les organismes communautaires, faute d’alternative en termes de subvention. Ceci créé une position de contestation très précaire pour les organismes, qui ne peuvent se permettre de s’aliéner à la fois le soutien du bailleur de fonds privé mais aussi public. De manière circulaire, cette position ne facilite pas non plus un débat public serein, puisque les organismes hésitent à assumer en leur nom un discours critique, d’autant qu’ils sont encadrés étroitement au sein de ces partenariats.
17Le second angle critique porte justement sur l’atteinte portée à l’autonomie des organisations communautaires à cause des contraintes imposées par ces agences. En effet, l’obtention des subventions implique une démarche exigeante pour les organisations communautaires, teintée autant par les impératifs de la Nouvelle gestion publique que celle d’une « mobilisation des communautés ». Une organisation communautaire ne peut demander seule une subvention ; pour être éligible, elle doit s’inscrire dans une structuration territoriale en regroupement multisectoriel, préparer un portrait du quartier et une planification stratégique, et produire une reddition de compte chronophage. Plus encore, c’est l’ingérence du bailleur qui est pointée, via la présence obligatoire d’un agent de développement, mais aussi la définition de méthodologies et de cadres d’intervention. Pour des organisations dont la quête de l’autonomie vis-à-vis de l’État est une lutte permanente depuis des décennies, ce problème a une acuité particulière. Selon le même responsable syndical : « C’était sans précédent ! Les bailleurs demandent des comptes, c’est normal […]. Mais on ne s’assoit pas avec le partenaire pour rédiger le plan d’action. On n’exige pas d’être décisionnel sur le plan d’action. On n’a pas de regard quotidien sur la façon dont ça s’opérationnalise. Ça, c’est clairement la Fondation Chagnon qui a amené ça […]. Une des critiques fondamentales, c’est que la philanthropie, c’est une chose, la philanthropie des affaires c’est autre chose. Et ce qu’on appelle le philanthrocapitalisme est le fait de vouloir imprégner le communautaire de méthode efficace, de méthode de gestion et de vouloir transformer les façons de faire, c’est quelque chose qui est totalement différent d’avant » [15].
18Ces critiques ont aussi amené des organismes à refuser de participer à ces programmes ou à ne pas renouveler les ententes, par choix ou par incapacité à remplir les critères exigés. Pour faire entendre leurs voix, des organisations communautaires ont d’ailleurs décidé de documenter leurs expériences de partenariats avec la FLAC, et notamment leur dimension intrusive et chronophage (Bouchard, 2013). Le témoignage cité rend d’ailleurs compte de la circulation de schèmes et de catégories d’analyse (« le philanthrocapitalisme »), qui s’inscrivent dans un contre-discours produit par ces organisations. Ces oppositions de la part des réseaux communautaires ont pesé dans la remise en question qu’a progressivement opéré la FLAC : après avoir assumé un modèle technocratique et top-down, la fondation a reconnu plus explicitement l’expertise propre des groupes communautaires, la spécificité des territoires et des réseaux préexistants (Lesemann, 2011 ; Savard et al., 2015). Ces évolutions tiennent d’ailleurs autant à la résistance des organisations communautaires en place que des apprentissages d’une fondation récemment créée, passant d’une démarche volontariste à une prise en compte plus pragmatique du contexte institutionnel. Mais pour comprendre le repositionnement de la FLAC, le projecteur ne doit pas seulement être tourné vers la relation avec les organisations communautaires, mais aussi avec l’État.
Les fondations face à l’austérité budgétaire : état social recherché ?
19Au début de l’année 2016, la FLAC annonce le non-renouvèlement des trois partenariats menés avec le gouvernement : Québec en forme, Avenir d’enfants et Réunir Réussir. Les motifs de ce non-renouvèlement ne sont pas évoqués dans les communications publiques, que ce soit du côté de la FLAC ou du gouvernement. Mais on peut faire plusieurs hypothèses à ce sujet.
20 Premièrement, des difficultés ont pu apparaître en termes de capacité à concilier des agendas, des stratégies et des cultures organisationnelles distinctes, entre la fondation et les différents ministères impliqués.
21 Deuxièmement, dans le domaine de santé, il faut noter une forte divergence entre l’accent mis par les partenariats et la FLAC sur la prévention, et le « virage curatif, voire médicalo et hospitalo-centriste effectué par le réseau [Santé et services sociaux] depuis la fin des années 1990 » et encore renforcé à la fin des années 2000 (Vaillancourt, 2017). Les approches en termes de santé globale et de développement social sont mises de côté dans les orientations du ministère, qui privilégie une approche individualisée des soins, biomédicale et clinique, avec l’hôpital comme producteur central d’actes médicaux.
22 Troisièmement, un autre motif de divergence tient aux politiques budgétaires d’austérité mises en place par le Parti Libéral, à son retour au pouvoir en 2014. On assiste à des coupes importantes dans les réseaux de l’éducation, de la santé et des politiques sociales, à un affaiblissement des subventions aux organismes communautaires, déjà dans une situation financière précaire depuis une dizaine d’années (Depelteau et al., 2013), mais également à la fin du financement d’organismes intermédiaires qui structuraient le dialogue entre représentants des réseaux communautaires et politiques locaux.
23 Ces politiques d’austérité place la FLAC, à l’image d’autres fondations, dans une situation délicate. Les fondations sont interpellées à la fois par les organismes qu’elles soutiennent, asphyxiés financièrement par ces coupures, et par la conscience de leurs propres limites financières face à des besoins de plus en plus importants. La plupart des fondations veulent financer des initiatives émergentes, avec l’idée que l’État institutionnalisera, par la suite, celles qui auront prouvé leur efficacité et leur légitimité. Dans un contexte où les financements publics n’assurent plus ce soutien aux organisations communautaires, quel est le rôle des fondations ? Ce questionnement suscite une véritable crise d’identité, notamment pour celles, dont la FLAC, qui revendiquent ouvertement leur refus de remplacer l’État. Ce malaise des fondations et la situation de plus en plus précaire des organismes communautaires qu’elles soutiennent les amènent à se mobiliser collectivement, au printemps 2015 (Berthiaume et Lefèvre, 2017). Ceci constitue une première au Québec, et au Canada, pour des acteurs plus habitués à mener leur action de manière discrète, en évitant l’espace public et la politisation des débats. Elles décident donc d’interpeler le gouvernement sur les répercussions en termes de hausse des inégalités, d’une politique d’austérité budgétaire.
« Les risques de la rigueur budgétaire » (extrait de la tribune publiée par une dizaine de fondations privées dans le quotidien Le Devoir, le 11 mars 2015)
Nous sommes préoccupés en particulier par leur effet sur les inégalités sociales, un phénomène en hausse à l’échelle mondiale et qui suscite des appels à la vigilance de la part des organisations économiques les plus crédibles et, de plus en plus, de la part de leaders politiques reconnus […].
Nous souhaitons contribuer de façon constructive au débat en invitant le gouvernement du Québec à tenir compte de ces inquiétudes et à bien mesurer l’effet de ses projets de réforme sur les citoyens et sur les communautés.
Il est évidemment nécessaire de gérer les finances publiques de manière responsable. Il est tout aussi important de veiller à ce que les services publics soient efficaces et atteignent leurs objectifs et c’est pourquoi, périodiquement, ceux-ci font l’objet d’une révision.
Tout en gérant de manière responsable les deniers publics, nous invitons le gouvernement à orienter ses choix politiques en fonction des effets sur les inégalités sociales. Nous proposons qu’il adopte comme l’un des critères pour juger du bien-fondé d’une réforme que celle-ci réduise les inégalités, ou à tout le moins qu’elle ne contribue pas à les aggraver […].
Le Québec est la société la plus égalitaire en Amérique du Nord. Cette situation enviable est le résultat de choix collectifs et constitue un actif notable sur les plans économique et social. Les inégalités nuisent à l’économie, à la société et à la démocratie, les experts du monde entier en ont fait la démonstration. Notre action quotidienne sur le terrain partout au Québec nous permet d’en témoigner […].
Il est sans doute temps, aujourd’hui, de revoir si les moyens que nous nous sommes donnés sont toujours les plus efficaces. Mais il est une chose que les Québécois ne remettent pas en question, c’est l’objectif d’une société qui donne sa chance à tout le monde. Nous croyons utile de rappeler ce grand consensus québécois illustré entre autres par l’adoption à l’unanimité de l’Assemblée nationale, en 2002, de la Loi sur l’élimination de la pauvreté et de l’exclusion sociale ».
24Le modus operandi de cette interpellation est à souligner : ton feutré, position de surplomb et consensuelle, témoignage au nom des populations et milieux concernés. Mais ceci se fait non pas pour parler de la pauvreté, prisme habituel des fondations, mais des inégalités. Les fondations le font en utilisant le cadrage sur le « coût des inégalités », pour l’ensemble de la société, au-delà des plus fragiles (Stiglitz, 2012), mais aussi la défense du « modèle québécois ». Leur interpellation se fait à travers une lettre envoyée au gouvernement et une tribune largement relayée dans les médias. Notons que la FLAC joue un rôle de premier plan dans cette mobilisation, dont la première initiative, en 2015, se déroule en parallèle de la renégociation des partenariats avec le gouvernement, dont on a vu l’issue. Enfin, il faut noter que certains réseaux communautaires, jusqu’ici hostiles au rôle octroyé à ces fondations philanthropiques, se sont réjouis de cette initiative des fondations. On assiste donc peut-être à une nouvelle séquence, dans la dynamique des relations du triangle État-fondations-organisations communautaires.
25 * * *
26L’histoire du secteur associatif québécois a jusqu’à récemment été pensée en fonction de ses liens avec l’État. En trame de fond, la revendication d’autonomie est source d’un paradoxe : d’un côté, les organisations réclament l’autonomie de définir leur mission, leurs revendications et leurs approches, de l’autre, elles sollicitent l’État pour avoir les moyens de cette autonomie. Or, lors de la mise en place de ces ententes de financement entre l’État et les organisations communautaires, plusieurs ont critiqué ce qu’elles percevaient comme une « emprise grandissante » de la bureaucratie étatique (Hamel, 1983). La méfiance qu’on retrouve aujourd’hui envers le secteur philanthropique n’est pas sans rappeler celle dirigée dans les années 1980 contre l’administration gouvernementale. Dans l’intervalle, bien des choses ont changé en termes de politiques de santé et de services sociaux au Québec. L’État social ne semble plus institutionnaliser les initiatives communautaires qui rencontrent des succès ; c’est plutôt le paradigme de « l’investissement social » qui est promu, avec l’aide des fondations, voire d’un « entrepreneuriat social » qui met moins l’accent sur la vie démocratique des organisations mais plutôt sur la mesure d’un « impact social ». Peut-on pour autant parler simplement de désengagement de l’État ou de privatisation des politiques sociales ?
27Les découpages propres et nets (public privé, ancien moderne) sont d’un faible recours pour les chercheurs qui s’intéressent à un dispositif comme les partenariats public-philanthropie que nous avons décrit. D’une part, dans le triangle – État, fondations philanthropiques, secteur associatif – que nous avons analysé, les alliances et oppositions sont plus mouvantes et ambivalentes que ce que des clivages « politiques sociales contre charité privée », ou encore « secteur marchand contre secteur associatif », pouvaient laisser présager. La mobilisation de fondations privées en faveur d’un État social qui lutte contre les inégalités en témoigne. De plus, si nous avons représenté schématiquement la configuration en jeu à travers trois pôles, il serait illusoire d’imaginer que ceux-ci sont homogènes et unifiés. Au contraire, les divisions et divergences concernant ce qui relève du public et du privé, ou encore sur le rôle attendu des fondations, du secteur communautaire ou de l’État, traversent aussi le champ philanthropique, le champ associatif ou le champ de la fonction publique. Une même fondation peut évoluer, entre les premières années marquées par l’impulsion d’acteurs qui ont fait fortune dans le secteur des affaires, et un processus d’institutionnalisation qui conduit à des apprentissages, des liens plus affirmés aux milieux d’intervention ou encore la prise de responsabilité en son sein d’acteurs qui ont une expertise sur la mission défendue, et non une proximité au noyau fondateur. De même, des divergences fortes peuvent apparaître entre organisations communautaires, sur la conception de leur rôle, le rapport à l’État ou au marché, sur le type de savoirs ou d’instruments valorisés.
28 Cependant, ces lignes de fractures ne sont pas rendues visibles au sein de ces espaces et dans le débat public, au profit d’un discours général consensuel et dépolitisé (« on ne peut pas être contre la vertu », « l’État n’a plus les moyens »), comme en témoigne l’absence de débats parmi les élus ou l’usage récurrent de termes aussi englobants que flous (« société civile », « partenariat », « impact social »).
29 Enfin, si on sort du périmètre du cas que nous avons détaillé dans cet article, soulignons qu’à rebours d’une vision qui mettrait l’emphase sur la « modernité » de ces dispositifs, le recul historique amène plutôt à souligner les parentés avec les « laboratoires du nouveau siècle » (Topalov, 1999) de la fin du XIXe. Par-delà les découpages entre État et secteur associatif, entre universitaires, experts, entrepreneurs ou activistes, un champ réformateur peut s’observer, avec d’intenses circulations d’individus multipositionnés, de discours et de dispositifs, qui façonnent un « sens commun » de la réforme. Les fondations constituent à ce titre d’excellents observatoires de ces circulations, puisqu’on peut trouver sur son conseil d’administration aussi bien un ancien ministre qu’un PDG de grande entreprise, et dans son équipe salariée ou à sa direction, des acteurs ayant eu des carrières militantes et professionnelles au sein des organisations communautaires. Le paradoxe tient plutôt à ce que les réformateurs de la fin du XIXe, actifs dans le champ philanthropique, contribuèrent parfois aux prémices de l’État social moderne, que ce soit dans le domaine de la protection et de la sécurité sociale, ou encore du logement, de l’éducation et de la santé, en Europe (Topalov, 1999) comme aux États-Unis (Zunz, 2012). Actuellement, certaines fractions dominantes du champ philanthropique, notamment proches du milieu des affaires, participent activement à un processus inverse, en privilégiant les mécanismes de marché et d’incitations individuelles, au détriment des principes de droits sociaux ou de politiques universelles (McGoey, 2015). Si ces réformateurs d’hier et d’aujourd’hui utilisent un registre d’intervention et de légitimation proches, on peut donc suggérer que les uns détricotent ce que les autres ont contribué à tisser historiquement.
Annexe –Tableau synthèse de quatre « générations » de l’action communautaire au Québec
Annexe –Tableau synthèse de quatre « générations » de l’action communautaire au Québec
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : organisations communautaires, Québec, partenariats public-philanthropie, fondations
Date de mise en ligne : 09/01/2018.
https://doi.org/10.3917/rfap.163.0491Notes
-
[1]
Soulignons d’emblée qu’en tant que province dans un cadre fédéral, le Québec bénéficie de prérogatives importantes dans le domaine social. Le gouvernement provincial y est l’interlocuteur central du secteur associatif. Sur l’importance, dans l’analyse comparée, de ce cadrage à l’échelon québécois des politiques sociales, cf. Laforest, 2011.
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[2]
Le secteur associatif français et ce qu’on appelle le secteur communautaire au Québec ne recouvrent pas exactement les mêmes réalités. Nous utiliserons à l’occasion le terme « associatif » par commodité de langage pour un lectorat en France, mais nous parlerons bien d’organismes communautaires dans notre article.
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[3]
En annexe, nous proposons un tableau synthèse permettant de mieux comprendre les caractéristiques de ces « générations » de l’action communautaire.
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[4]
Quatre critères sont entérinés par le gouvernement afin de définir les organismes d’action communautaire : être à but non lucratif ; être enraciné dans la communauté ; entretenir une vie associative et démocratique ; être libre de déterminer sa mission, ses approches, ses pratiques et ses orientations. Pour être qualifié d’autonome, quatre autres caractéristiques s’ajoutent à cette définition : avoir été constitué à l’initiative des membres de la communauté ; poursuivre une mission sociale qui favorise la transformation sociale ; faire preuve de pratiques citoyennes et d’approches axées sur la globalité de la problématique abordée ; être dirigé par un conseil d’administration indépendant du réseau public (SACA, 1996).
-
[5]
Cet article s’appuie sur une revue de littérature pour la partie historique et sur des enquêtes en cours depuis trois ans sur les transformations liées à la montée en puissance des fondations philanthropiques au Québec. Ces enquêtes de terrain reposent sur des séries d’entretiens avec des responsables de fondations et d’organismes communautaires, mais aussi des observations ethnographiques, à l’occasion d’une recherche partenariale avec une fondation et d’une mobilisation dont nous traitons en seconde partie.
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[6]
Dans ses derniers états financiers, la FLAC fait état d’un actif de 1,8 milliards de dollars, avec des résultats nets des activités de placements se montant à 122 millions de dollars. Cf. FLAC, États financiers au 31 décembre 2015, http://www.fondationchagnon.org/media/122186/etats_financiers_2015.pdf.
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[7]
Centraide est la branche québécoise des United Way américains, un réseau de fondations publiques, financées à la fois par une collecte de fonds grand public en milieu de travail et par de grands donateurs. Leur action est territorialisée et consiste à sélectionner des organismes donataires, sur la question de la pauvreté. Dans les derrières années, elles mettent en avant le passage d’une posture de grantmaker à celle de changemaker, en prenant une place de plus en plus importante dans l’action collective.
-
[8]
C’est d’ailleurs une argumentation clef du rapport « Un Québec fou de ses enfants ! ».
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[9]
Les descriptifs des thématiques sont celles produites par la FLAC. Cf. http://www.fondationchagnon.org/fr/que-faisons-nous/partenariats.aspx et https://www.lappui.org (pages consultées le 10 janvier 2017).
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[10]
Ce partenariat n’est pas soutenu par la FLAC, mais par une société de portefeuille, créée en 2000, appartenant à la famille Chagnon. Ce partenariat a donc un statut spécifique, puisque c’est le seul qui n’est pas centré sur la petite enfance.
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[11]
Sur la mobilisation du collectif « Pour un Québec sans pauvreté » et la promulgation d’une loi-cadre contre la pauvreté et l’exclusion en 2002, Cf. Dufour, 2004.
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[12]
Il faut souligner qu’à la même période, des critiques fortes sont adressées aux partenariats public-privé plus classiques mis en place par le gouvernement libéral pour la construction de routes, hôpitaux, etc. Les critiques portent principalement sur la « liquidation des services publics », mais aussi sur les coûts excessifs de ces procédures (Breton, 2005). Cette solution, après avoir été un élément central du gouvernement libéral, sera progressivement marginalisée, suite à plusieurs déconvenues financières.
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[13]
Entrevue avec l’auteur, 19 juin 2013.
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[14]
Le gouvernement du Parti Libéral, qui avait signé les ententes avec la FLAC, a été défait aux élections provinciales au printemps 2012 par le Parti Québécois. Il est revenu au pouvoir en 2014.
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[15]
Entrevue avec l’auteur, 20 juin 2013.