Notes
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[1]
L’essentiel du matériau reproduit dans ce texte a été présenté dans le cadre des travaux du Groupe de recherche sur les parlements et les parlementaires (GRPP) de l’Association française de science politique coordonné par Éric Kerrouche et Olivier Rozenberg à qui j’adresse mes remerciements ainsi qu’à Yves Surel et Cécile Vigour qui en ont discuté, successivement, la teneur.
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[2]
François (Bastien), La Constitution Sarkozy, Paris, Odile Jacob, 2009 ; Dord (Olivier), « Vers un rééquilibrage des pouvoirs publics en faveur du Parlement », Revue française de droit constitutionnel, no 77, janvier 2009, p. 89-128 ; Gicquel (Jean), « La reparlementarisation : une perspective d’évolution », Pouvoirs (la Cinquième République), no 126, septembre 2008, p. 55-89.
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[3]
François (Bastien), Le régime politique de la Ve République, Paris, La découverte (coll. « Repères »), 1re éd. 1998.
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[4]
Manin (Bernard), « Volonté générale ou délibération : esquisse d’une théorie de la délibération politique », Le Débat, 33, 1985, p. 72-94.
-
[5]
Roussellier (Nicolas), Le Parlement de l’éloquence. La souveraineté de la délibération au lendemain de la Grande Guerre, Paris, Presses de Science Po, 1997.
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[6]
Ainsi les ouvrages relatifs aux comportements politiques délaissent-ils le « comportement parlementaire » et méconnaissent-ils la littérature sur le sujet.
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[7]
A contrario, hormis les études francophones sur le Parlement européen, voir le dossier « Retour au Parlement », RFSP, juin 2009.
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[8]
En ce sens Kerrouche (Éric), « The French Assemblée nationale : The Case of a Weak Legislature ? », Journal of Legislative Studies, Vol. 12, no 3-4, décembre 2006, p. 336-365 ; Beaussier (Anne-Laure), « Le parlement français, acteur renouvelé des politiques d’assurance maladie ? », Pôle Sud, 2008, 1, no 28, p. 35-53.
-
[9]
Costa (Olivier), Kerrouche (Éric), Qui sont les députés français ? Enquête sur des élites inconnues, Paris, Presses de Science-Po, 2007.
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[10]
On préfère recourir à ce terme qui insiste sur la nature du suivi de la fabrique législative, plutôt qu’à celui de « séquentiel » qui fait référence uniquement aux étapes chronologiques.
-
[11]
Cf. dossier « La démocratie majoritaire », Pouvoirs, no 85.
-
[12]
Nay (Olivier), « Le travail politique à l’Assemblée nationale. Note sur un champ de recherches trop longtemps déserté », Sociologie du travail, oct-déc 2003, p. 537-554.
-
[13]
Courty (Guillaume) sld., Le travail de collaboration avec les élus, Paris, Michel Oudiard, 2006 ; Le Lidec (Patrick), « Les députés, leurs assistants et les usages du crédit collaborateurs. Une sociologie du travail politique », Sociologie du travail, avril-juin 2008, p. 147-168.
-
[14]
Huber (John D.), Shipan (Charles R.), Deliberate Discretion ? The institutional Foundations of Bureaucratic Autonomy, Cambridge, Cambridge University Press, 2002.
-
[15]
Mossuz-Lavau (Janine), Les lois de l’amour. Les politiques de la sexualité (1950-2002), Paris, Petite Bibliothèque Payot, 2002.
-
[16]
Commaille (Jacques), L’esprit sociologique des lois. Essai de sociologie politique du droit, Paris, PUF, 1994.
-
[17]
Enguéléguélé (Stéphane), Les politiques pénales, 1958-1995, Paris, L’Harmattan (coll. « Logiques politiques »), 1998.
-
[18]
Commaille (Jacques), L’esprit sociologique des lois, op. cit., p. 125-238.
-
[19]
Sur la loi Lang : voir Surel (Yves), L’État et le Livre. Les politiques publiques du livre en France (1957-1993), Paris, L’Harmattan, 1997, p. 204.
-
[20]
L’enjeu de la fabrique de la loi n’est pas traité au sein des divers manuels en langue française se référant à la sociologie de l’action publique ou aux politiques publiques.
-
[21]
Baumgartner (Frank R.), Jones (Brian. D.), Agendas and Instability in American Politics, Chicago, Berkley, University of California Press, 2009 (1re ed. 1977).
-
[22]
Dossier « Les approches cognitives des politiques publiques », RFSP, avril 200.
-
[23]
On notera toutefois les nombreuses remarques judicieuses sur le mythe du législateur unique, ou la réalité du bricolage législatif, mais qui demeurent des vues générales, voir Braibant (Guy), « Qui fait la loi ? », Pouvoirs, Le Parlement, no 64, p. 43-46.
-
[24]
Clinton (Joshua D.), Jackman (Simon), Rivers (Doug), « The most Liberal Senator ? Analysing and interpreting Congressional roll calls », Political Science & Politics, octobre 2004, p. 805-811.
-
[25]
Voir pour un aperçu Costa (Olivier), Rozenberg (Olivier), « Parlementaires », in Belot (Céline), Magnette (Paul), Saurugger (Sabine) sld., Science politique de l’Union européenne, Paris, Économica (coll. « Études politiques »), 2008, p. 249-270.
-
[26]
Adonis (Andrew), Parliament today, 2nd ed., Manchester University Press, 1993, p. 153-154.
-
[27]
Sur tous ces points, voir Mauguin-Helgeson (Murielle), L’élaboration parlementaire de la loi : étude comparative : Allemagne, France, Royaume-Uni, Paris, Dalloz, 2006, p. 206-207.
-
[28]
Cahoua (Paul), « Les commissions, lieu du travail législatif », Pouvoirs, (l’Assemblée), no 34, 1985, p. 37-50.
-
[29]
28 amendements commission, 89 amendements du gouvernement, 14 émanant des élus furent adoptés pour le budget de 1988, Cf. tableau Huber (John. D.), Rationalizing parliament. Legislative institutions and party politics in France, Cambridge, Cambridge university Press, 1996, p. 149.
-
[30]
Costa (Olivier), Kerrouche (Éric), op. cit., annexe 3, p. 204.
-
[31]
Duguit (Léon), Études de droit public. Tome 1 L’État, le droit objectif et la loi positive, réédition Dalloz, 2003 (1re ed. 1901).
-
[32]
L’expression est empruntée à Hugues Portelli.
-
[33]
Sur le tandem de rôles différenciés en circonscription et à l’Assemblée, Costa (Olivier), Kerrouche (Éric), op. cit., p. 185 et suiv.
-
[34]
Abelès (Marc), Un ethnologue à l’Assemblée, Paris, Odile Jacob, 2000. On notera aussi l’analyse sociologique des conditions de l’organisation d’assemblée : Heurtin (Jean-Philippe), L’espace public parlementaire. Essai sur les raisons du législateur, Paris, PUF, 1999 ; ainsi que « Architectures morales de l’Assemblée nationale », in Détienne (M.) dir., S’assembler, Paris, Le Seuil, 2003, p . 49-81.
-
[35]
Fenno (Richard F.), Watching politicians. Essays on participant observation, Berkeley, University of California at Berkeley, Institut of governmental studies, 1990.
-
[36]
Voir récemment Pourcher (Yves), Votez tous pour moi ! Les campagnes électorales de Jacques Blanc en Languedoc-Roussillon (1986-2004), Presses de Science Po, 2007.
-
[37]
Voir pour un historique des recherches sur le comportement électoral aux États-Unis, le chapitre introductif du livre hommage à Richard Fenno in Fiorina (Morris P.), Rohde (D.) ed., Home Style and Washington work, studies of congressional politics, Ann Arbor, The University of Michigan press, 1989.
-
[38]
Fenno (Richard), Watching politicians, op. cit., p. 57-58.
-
[39]
Lefebvre (Rémy), « Le temps d’une campagne », in Dolez (Bernard), Laurent (Annie), Wallon-Leduc (Christian-Marie), sld., La revanche de la gauche. Les élections législatives de 1997 dans la région Nord/Pas de Calais, Presses universitaires du Septentrion, 1998, p. 37-56. Voir aussi Lefebvre (Rémy), « S’ouvrir les portes de la ville. Une approche ethnographique des porte-à-porte de Martine Aubry à Lille », in Lagroye (Jacques), Lehingue (Patrick), Sawicki (Frédéric) dir., La mobilisation électorale municipale, Paris, PUF-CURAPP, 2005.
-
[40]
Mayhew (David R.), Congress. The electoral connection, New Haven and London, Yale university press, 1974.
-
[41]
L’élu pour lequel je travaillais connaissait mon double statut de collaborateur et de jeune enseignant chercheur, chargé de cours à l’université et publiant des travaux, dont il avait lu certains.
-
[42]
Loi no 2003-590 du 2 juillet 2003.
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[43]
Créé par l’AFNOR à la demande en 2001 de la Direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction (DGUHC). Dès 1993 la Fédération des ascensoristes avait attiré l’attention des pouvoirs publics sur la dangerosité de certains appareils.
-
[44]
La CGT compte alors avec les professionnels ascensoristes au nombre des principaux « tireurs d’alarmes » sur la question de la sécurité des ascenseurs.
-
[45]
Pour une rare étude sur le travail au concret des administrateurs, Szij (Éric), « La technique de la loi dans les travaux préparatoires aux débats parlementaires », Parlement(s), no 11, 2009, p. 81-92.
-
[46]
On a pu constater que certaines propositions relatives à des dispositifs techniques en matière de droit de l’urbanisme émanant de la circonscription, n’ayant pas convaincu le rapporteur, ce dernier ne les a pas appuyées auprès des administrateurs qui les jugeaient irréalisables... avant que l’option proposée originairement irréalisable soit reprise et votée au Sénat.
-
[47]
Costa (Olivier), Kerrouche (Éric), op. cit., p. 18-22.
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[48]
En l’espèce, l’administrateur apparaissait incliner plutôt du côté des associations HLM et de propriétaires que des ascensoristes.
-
[49]
Il est alors présidé par Xavier Emmanuelli, ancien secrétaire d’État à l’action humanitaire d’urgence sous le gouvernement d’Alain Juppé, assisté de Bernard Lacharme secrétaire général, et par ailleurs proche des mouvements de la gauche associative.
-
[50]
Zittoun (Philippe), « Partis politiques et politiques du logement. Échanges de ressources entre dons et dettes politiques », RFSP, vol 51 (5), oct. 2002, p. 683-705.
-
[51]
Dont Gérard Larcher président UMP de la commission des affaires économiques et du plan, Michel Mercier, devenu par la suite président du groupe Union centriste.
-
[52]
Après une intervention gouvernementale via le cabinet, il est ?nalement simplement précisé que les coûts d’investissement impartissent aux propriétaires, les coûts de fonctionnement portent sur les parties au contrat, propriétaires et ascensoristes.
-
[53]
Telles que l’autorisation de restaurer des ruines, la possibilité de restaurer les bâtiments d’estive sous conditions, l’extension aux bâtiments d’estive des dispositions concernant les chalets d’alpage
-
[54]
Le suivi des courriels échangés entre le cabinet et les administrateurs, transmis pour information au rapporteur témoignent de la dépendance technique sur des dispositifs complexes qui demandent une extrême spécialisation en droit de la responsabilité et en droit de l’urbanisme notamment.
-
[55]
Bachrach (Peter), Baratz (Morton S.), « Decisions and Non-Decisions : An Analytical Framework », American Political Science Review, 57, 1963, p. 632-647.
-
[56]
Des sénateurs vont déposer un amendement, avant de le retirer sous la pression gouvernementale.
-
[57]
Sur l’importance du critère de publicité dans l’adoption des politiques publiques voir, Guiraudon (Virginie), « Jeux d’ombre et de lumière : les politiques envers les étrangers en Europe », RFSP, no 6, décembre 1999, p. 755-782.
-
[58]
Lascoumes (Pierre), « Les compromis parlementaires, combinaisons de surpolitisation et de sous-politisation. L’adoption des lois de réforme du code pénal (décembre 1992) et de création du Pacs (novembre 1999), RFSP, no 3, juin 2009, p. 455-478.
-
[59]
Tels la réforme des « pays », l’amendement conférant dérogation aux règles d’urbanisme pour le Sénat ; la validation du POS de la ville de Lyon, etc.
-
[60]
Duhamel (Olivier), Les démocraties, Paris, Seuil, 1993.
-
[61]
Sur ce texte voir Sij (Éric), « La loi relative à la régulation des activités postales », Regards sur l’actualité, no 315, novembre 2005, p. 99-109.
-
[62]
Milet (Marc), « La banque (postale) « pas comme les autres » : entre identité postale et rhétorique de marché », RFAP, no 119, 2006, p. 427-438.
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[63]
Voir également comme autre cas illustratif, l’amendement sur la publicité du vin dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux. Les élus ont reculé face aux pressions gouvernementales : l’impératif de programme politique gouvernemental (la santé publique) l’a emporté.
-
[64]
Seules des analyses quantitatives offrent ainsi notamment la possibilité d’études nationales comparées.
1 Cette étude [1] se propose de revenir sur le constat d’un Parlement « faible » perçu sous la Cinquième République comme une simple chambre d’enregistrement qui attribue à ses membres élus un rôle subalterne dans l’élaboration de la loi. Même si cette appréciation pourrait être prochainement réévaluée au regard des effets de la récente révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 [2], la Cinquième République repose encore, dans une perspective de long terme, sur de nombreux éléments concordants bien connus qui ont tous concouru jusqu’à ce jour à l’affaiblissement de la fonction décisionnelle du Parlement et dont les approches juridiques et politistes [3] s’accordent à y déceler les effets d’un « parlementarisme rationalisé ». Ce constat du faible rôle des parlementaires dans la confection de la loi est lié aux modalités et niveaux de l’analyse. Ni les cadres conceptuels de la science politique américaine relatifs à la formation de la loi dans le cadre d’une délibération comprise comme un agrégat compromissoire d’intérêts antagonistes, ni la dé?nition de la loi comme résultat de l’argumentation délibérative [4] de type habermasien, telle que la France a pu en connaître par le passé [5], ne se révèlent transposables au régime actuel de la Cinquième République. Fortes sans doute de ce constat, les Legislatives studies issues d’une longue tradition et qui ont acquis un statut autonome au sein des sciences sociales anglo-saxonnes sont demeurées largement ignorées en France [6] jusqu’à une période récente [7].
2 Or, la marge de manœuvre réduite des parlementaires français, considérée en terme de « capacité législative », ne fut toutefois pas totalement inexistante durant ces dernières années, comme le relèvent désormais un certain nombre d’études concordantes [8]. Si le Parlement sous la Cinquième République a largement perdu son pouvoir d’impulsion et d’initiative, il a conservé, sur le long terme, un pouvoir de contribution à la confection législative. La modi?cation d’un projet de loi est bien la règle, l’entérinement l’exception [9].
3 De manière encore plus symptomatique, la capacité législative n’est ni équivalente, ni homogène, mais varie au gré des législatures et des différents types de textes. Il existe bien, par voie de conséquence, un intérêt, spéci?que, à ouvrir la « boîte noire » du temps législatif de la décision a?n d’interroger expressément les conditions de l’ouverture d’opportunités parlementaires dans un système décisionnel fermé.
4 L’hypothèse avancée pose que la marge de manœuvre des parlementaires se révèle plus étendue sur des textes portant sur des questions techniques qui sans être « a-politique » ou compromissoires recèlent des potentialités de conflictualité moindre, et sont dès lors moins en vue au sein de l’espace public, et/ou moins tenus par l’exécutif. Une telle approche qui établit la divergence de la capacité législative par l’objet bien plus que par la con?guration politique nécessite d’opérer une rupture avec les classi?cations juridiques de la loi (lois de ?nances, lois d’habilitation, lois autorisant la rati?cation des traités internationaux, lois de validation...) en privilégiant une redé?nition de la loi centrée autour de deux catégories : les lois à potentialité d’ouverture et les lois fermées.
5 La difficulté n’en demeure pas moins dans les outils méthodologiques disponibles a?n de mesurer de manière empirique et non impressionniste la contribution des parlementaires à la rédaction du texte ?nal. La piste méthodologique esquissée en l’espèce, susceptible de valoir au-delà même de la seule étude de la marge de manœuvre parlementaire et dé?nie comme une approche processuelle de la confection législative par analogie avec celle proposée en sociologie de l’action collective [10], consiste dès lors à procéder à une observation participante centrée sur des études de cas. Celle-ci offre la possibilité de suivre, pas à pas, le processus séquentiel intégral du « passage » parlementaire d’un projet de loi, en l’espèce « à potentialité d’ouverture », et de confronter par comparaison les résultats obtenus aux lois « fermées ». Deux lois ont ainsi pu être plus spéci?quement suivies durant la douzième législature (2002-2008), la loi urbanisme et habitat de juillet 2003, qui rentre pleinement dans la démarche, et qui servira de « ?l rouge » à la présentation, et la loi relative à la régulation des activités postales de mai 2005, plus hybride au regard des critères ainsi dé?nis, mais qui offre des points de confrontation/comparaison utiles.
6 La comparaison des apports et des limites des principaux outils méthodologiques disponibles à l’étude de la fabrique de la loi permettra de présenter les premiers résultats obtenus à partir de cette étude de cas.
L’ÉVALUATION DES MÉTHODES QUALITATIVES ET QUANTITATIVES D’APPREHENSION DE LA FABRIQUE DE LA LOI
7 Si l’on s’en tient aux démocraties majoritaires européennes [11], le « comportement parlementaire » est relégué au rang d’accessoire, d’agrégat indirect, seulement utile pour une compréhension d’autres enjeux et interrogations.
La « boîte noire » parlementaire de l’action publique et des comportements politiques
8 L’étude des pratiques d’assemblée n’est appréhendée par la sociologie politique française qu’en tant qu’apport à une meilleure connaissance de la profession politique, observée sous l’angle de la socialisation, des apprentissages, et des ressources des élus [12]. Sont également mises à jour les mutations des métiers du politique via, notamment, la professionnalisation des collaborateurs parlementaires [13]. La sociologie anglo-saxonne pour sa part se focalise sur la marge de manœuvre administrative fondée sur le degré de précision des normes produites. Elle relègue de ce fait les arènes parlementaires, considérées sous l’angle restreint d’un encadrement législatif des politiques publiques, au statut de variable indépendante qui pèse pour l’essentiel sur le degré de liberté laissé à l’administration en terme d’application des normes [14].
9 Dès lors, l’étude de la fabrique de la loi en tant que telle menée jusqu’alors s’est principalement faite sous la Cinquième République de manière globale et synchronique en terme d’évolution des politiques législatives : qu’il s’agisse notamment des travaux sur les « lois de l’amour » [15], les politiques familiales [16], ou pénales [17], la dimension législative ou parlementaire n’y est traitée que de manière incidente et secondaire puisque l’essentiel de l’analyse réside dans la présentation de l’évolution des normes juridiques impulsée par le politique, même si le poids des acteurs parlementaires n’y est pas négligé. Jacques Commaille a pu notamment préciser le rôle clef joué par Jean Foyer, ancien garde des sceaux, en tant que rapporteur du projet de loi sur la ?liation en 1971 alors que le ministère de la justice se présente encore pour un temps, à cette date, en véritable « ministère de la loi » [18]. On notera ainsi la faiblesse des analyses de sociologie de l’action publique en terme de processus de décision appliqué au temps législatif. Même s’il existe de nombreuses études de cas centrées sur des politiques sectorielles, les étapes de la procédure législative sont néanmoins toujours vues comme « ne posant pas de problèmes insurmontables » [19]. Le fondement de ce désintérêt, mesurable aussi dans l’ignorance mutuelle entre legislatives studies et public policies studies [20], résulte largement dans l’importance (réelle il est vrai) conférée à l’impulsion de l’action publique ; ce qui a conduit à privilégier l’étude de la phase de problématisation [21] et la présentation du rôle joué par les « médiateurs » [22]. La prise en compte de la nécessité d’une association des acteurs privés au processus décisionnel incline de même à privilégier l’interaction entre le processus de décision et la mise en œuvre. Étrangement, les ruptures du sens commun décisionnel ne sont dès lors guère appliquées au temps législatif [23], comme si ce qui valait pour la « décision publique » en général n’était pas ou plus valable pour le processus législatif. Ni l’incrémentalisme, ni la rationalité limitée, pas plus que l’introuvable décision, ne sont questionnés : le gouvernement projette, fait discuter et voter, puis promulgue. La domination exécutive apparaît sans partage et sans histoire.
10 L’objectif assigné d’évaluer la marge de manœuvre parlementaire conduit cependant à délaisser les approches macro-sociologiques quantitativistes et formalistes qui se révèlent prédominantes en matière de sociologie législative. Celles-ci concentrent en effet des écueils et un certain nombre de limites si l’on se réfère au cas français.
Apports et limites des approches (macro-sociologiques) statistiques et formalistes des « legislatives studies »
11 Le recours à une approche quantitative caractérisée notamment par un décompte nominatif des votes est sans doute l’une des méthodes les plus utilisées dans les systèmes politiques à majorités fluctuantes, notamment aux États-Unis (les Études des Congressional roll calls) [24]. La mesure du sens des votes est alors rapportée aux territoires de l’élection ou aux propriétés sociales de l’élu. Mais loin d’être l’apanage des enquêtes scienti?ques, ces mesures servent aussi à certains groupes d’intérêt à orienter leurs aides ?nancières pour les campagnes électorales. Les European studies ont dès lors largement repris ce mode d’analyse [25] en le réadaptant au contexte européen.
12 Une telle approche d’un relevé comptable des votes demeure valide dans les systèmes gouvernementalistes européens essentiellement a?n d’évaluer le poids des con?gurations institutionnelles. L’ensemble des études s’accorde pour considérer que la marge de manœuvre parlementaire, évaluée à partir des amendements votés, dépend largement de l’assise majoritaire du gouvernement.
13 Un tel constat vaut à la fois pour les gouvernements mono-partisans, tel que l’a longtemps illustré le cas du Royaume Uni, ou pour des régimes au gouvernement à potentiel de coalition multiple, tel qu’en connaît l’Allemagne. Dans son étude sur la loi britannique sur l’électricité (Electricity bill), l’un des projets majeurs de la session 1988-1989, Andrew Adonis rapporte que sur 114 amendements apportés au texte 113 furent formulés par des ministres, 1 seul par la majorité parlementaire, et 227 rejetées [26], tandis qu’à l’inverse, dans le cadre d’une grande coalition allemande, la majorité pléthorique conduit à ce que les compromis politiques se réalisent au sein des commissions parlementaires [27]. Paul Cahoua, s’intéressant au cas français, a lié il y a maintenant plus d’une vingtaine d’années, l’influence des commissions parlementaires à la cohésion des majorités [28]. Plus récemment, soucieux de rompre avec une analyse de type néo-institutionnaliste et fondée sur une seule variable, John D. Huber a alors préconisé le recours à un Electoral Politics model a?n de mettre à jour la pluralité des contraintes qui agissent sur l’espace d’opportunité parlementaire. S’intéressant à la marge de manœuvre parlementaire sous le gouvernement Rocard, Huber montre ainsi à travers une comparaison du vote du budget en 1988 et 1989, que l’espace d’ouverture constaté lors du premier budget a résulté d’une con?guration spéci?que tributaire à la fois des enjeux du contrôle de la coalition gouvernementale par le chef de gouvernement, de considérations électorales propres aux logiques de différenciations entre partis représentés à l’Assemblée, et des effets des programmes et des alliances électorales passées.
14 Le tableau proposé par l’auteur des différents amendements adoptés précise numériquement cette marge de manœuvre [29]. Reste que la mise en perspective sur le temps long de la contribution des parlementaires à la confection de la loi relativise le poids de la con?guration politique dans la marge de manœuvre parlementaire, d’autant que l’expérience Rocard dé?nit sous la Cinquième République, hormis la première législature, un cas unique d’un gouvernement disposant d’une majorité relative devant l’Assemblée. De fait, le rapport établi entre l’adoption d’amendements gouvernementaux et parlementaires a relativement faiblement varié depuis une trentaine d’années [30]. Le poids numérique des apports du passage parlementaire aux textes (lequel mériterait indéniablement d’être approfondi s’agissant des pics historiques) ne renseigne cependant guère sur la nature même de ces apports. Si le modèle posé par Huber rompt bien avec une étroite approche néo-institutionnaliste, il n’en privilégie pourtant pas moins le recours au décompte des votes.
15 Or, indépendamment même du cadre du système politique, à dominante présidentialiste ou parlementaire, l’évaluation des amendements en terme statistique demeure toujours largement arti?cielle car fondée sur un ensemble de présupposés discutables.
16 La comptabilisation indifférenciée des amendements pose en premier lieu l’équivalence implicite des diverses modi?cations portées au projet à la proposition de loi initiale alors même qu’elles recouvrent des degrés et des objets extrêmement variés. Les modi?cations de forme et d’encadrement législatif – ce que le théoricien du droit de la IIIe république, Léon Duguit, nommait les « parties constructives » de la loi, par opposition aux « parties normatives » (l’essence de la règle posée, reflet d’une loi de but, politique) [31] – sont ainsi souvent l’apanage des amendements de commission et non du gouvernement. Le degré d’implication politique des amendements est lui-même extrêmement variable. De surcroît, généralement, le chiffrage retenu délaisse le rapport entre le nombre d’amendements déposés et adoptés. Il conduit surtout à une objectivation des conditions de leur production puisqu’aucune information sur les tractations, les pressions subies, les ententes établies n’est disponible alors même que la classi?cation juridique retenue pour le chiffrage (distinguant amendement gouvernemental, de commission ou parlementaire) se révèle, dans une assez large mesure, factice. En ce sens, la distinction entre amendements gouvernementaux et de la majorité contrevient à l’existence d’une catégorie « d’amendements de sous-traitance » [32] concédés à un parlementaire par le gouvernement. Le degré d’investissement du député offre une autre clef de lecture signi?cative de la teneur des amendements défendus, ceux-ci relevant de la catégorie des amendements qui donnent à voir, tels les amendements relais (par reprise d’une demande des groupes d’intérêt), ou des amendements investis en fonction du rôle parlementaire tenu et joué par le député à l’Assemblée et dans sa circonscription [33].
17 Plus généralement, les recherches statistiques relatives à la confection de la loi sont fondées en priorité sur les sources écrites qui relèvent pour l’essentiel de la documentation grise (compte rendu des débats, des commissions). Or, ces sources ne rendent que très partiellement compte de ce qui se joue réellement. On notera que les compte-rendus des commissions n’indiquent pas le nombre d’élus présents, que les discussions peuvent laisser croire à la forte implication d’un élu ainsi qu’à sa grande connaissance d’un dossier alors même que la prise de connaissance des courriers parlementaires (ceux émanant des groupes d’intérêt notamment) peut amener à relever dans quelle mesure l’investissement parlementaire se résume à une reprise in extenso d’argumentaires qui lui ont été communiqués par voie postale. Surtout, est posé de manière cruciale le problème des « sites invisibles » et des lieux informels de décision.
18 Appliquée à l’étude de la marge de manœuvre parlementaire, la démarche anthropologique ou d’ethnologie politique qui pourrait être opposée à ce type d’approche ne surmonte pas totalement ces écueils, car elle se présente sous la forme d’une observation très partielle des séquences d’informations. Le seul ouvrage existant à notre connaissance qui rende compte d’une immixtion au sein du parlement [34] prend certes la mesure des rites parlementaires (le cérémonial, les discussions à la « buvette »...) et offre l’opportunité d’un accès à des lieux généralement interdits au chercheur (avec accès aux commissions permanentes et aux réunions de groupe parlementaire, tout du moins de ceux composants la majorité). Il met l’accent sur le rôle de la controverse politique : le temps parlementaire, comme l’avait originairement noté Walter Bagehot, est aussi fondamentalement celui de la délibération, de l’échange politique avant que d’être celui de la production d’un texte. Mais l’observation est entrecoupée de nombreux « angles morts ». En l’espèce, le suivi de l’élaboration d’une loi, celle sur le « Pacs », ignore toutes les tractations au sein de la majorité, les types d’opposition, d’où la nécessité de recourir à l’observation participante.
L’apport de l’observation processuelle
19 Le recours à l’observation participante au sein du milieu parlementaire n’est pas nouveau ; il s’inscrit dans une longue tradition des legislative studies anglo-saxonnes qu’il s’agirait d’adapter à la con?guration institutionnelle et politique française ainsi qu’à l’objectif imparti. Le politiste américain Richard Fenno, précurseur en ce domaine, fut l’un des tous premiers à suivre des élus dans leur activité ordinaire et à théoriser la méthode d’observation appliquée au milieu parlementaire. Son étude Home style, paru en 1978, comprend en appendice une longue note méthodologique, republiée au début des années 1990 au sein d’un ouvrage bilan reprenant une série de conférences consacrées à une théorisation de l’étude empirique des comportements des élus [35]. En réalité, « l’observation participante » menée dans cette étude pionnière a consisté à suivre une vingtaine de membres du Congrès dans leur activité de circonscription a?n d’analyser le poids des perceptions de l’électorat sur les attitudes, les votes des élus. Cette tradition d’ethnologie électorale s’est depuis lors développée, axée sur les campagnes électorales, et s’avère maintenant bien établie en France [36].
20 Pour leur part, les premiers travaux américains non juridiques de comportement parlementaire portant sur le travail d’élaboration législative en tant que tel, entamés au milieu des années 1950 et au début des années 1960 [37], sont tous uniquement fondés sur des séries d’entretiens directifs et semi-directifs menés dans les locaux du Congrès au Capitole et non pas, sur le suivi, par observation, du processus législatif. Richard Fenno insiste sur la nécessité de réaliser une enquête immergée, contextualisée, et insiste sur la profonde différence entre une interview menée au sein du Capitole et sur le terrain de la circonscription [38]. « L’observation participante » dont il est question auprès des élus correspond d’ailleurs bien plutôt à une observation directe distanciée : Fenno ne participe pas à l’ensemble de la campagne mais est simplement invité, sur des périodes courtes (d’environ trois jours), à se joindre à l’activité de l’élu. Même s’il s’agit bien d’une enquête de terrain qui lui permet de s’imprégner de la perception de la situation par l’élu (voir ce qu’il voit au moment où il le voit), comme il le note lui-même, ce statut d’observateur privilégié l’expose à être écarté de certaines discussions ou d’actions auxquelles il ne peut prendre part (on lui demande de sortir de la pièce). Depuis lors, de véritables observations participantes par des politistes, partis prenants à la campagne, ont pu être menées ; en France, on pense notamment à l’analyse de la campagne électorale de Bernard Roman dans la première circonscription du nord lors des élections législatives de 1997 [39].
21 L’approche processuelle, outre qu’elle ne concerne pas le même site, puisqu’elle se fonde sur l’arène parlementaire et non électorale, privilégie bien plutôt ce que Buford Junker nomme « l’observation totale ». A?n d’échapper aux zones d’ombre de la fabrique législative, elle nécessite de se doter d’un statut et d’une position privilégiés par rapport à l’élaboration de la loi étudiée que seule procure l’occupation de la fonction de collaborateur parlementaire d’un rapporteur de textes. Une telle position d’observation est idéale car, rappelons-le, en France, le rapporteur est chargé de préparer au nom de la Commission en charge de l’examen du texte, le passage du projet en séance plénière. Le degré de con?ance établi avec l’élu et le travail effectué auprès de lui peuvent permettre d’être au plus près de l’action parlementaire, de suivre les échanges de courriers électroniques, oraux, avec les administrateurs de l’Assemblée et les membres des cabinets ministériels, mais encore d’assister aux rencontres avec les groupes d’intérêt et surtout aux réunions organisées entre le rapporteur, le cabinet ministériel, et éventuellement le ministre, ainsi qu’aux réunions plus politiques notamment en présence du président de la Commission devant laquelle est présenté le texte.
22 L’observation totale s’apparente à une « participation observante ». La dissimulation de l’activité d’observateur auprès des observés permet d’éviter les principaux écueils de l’enquête en milieu parlementaire jadis relevés par Fenno, tels le problème de l’accès aux élus ou la contrainte du suivi discontinu de son activité. Parmi les atouts d’une telle démarche, la contamination de la situation et des personnes observées par l’observateur disparaît puisque le statut d’observateur n’existe pas en tant que tel. En?n, la question de l’empathie pour la cause (going native), posée dans le cadre d’une campagne électorale n’est pas cruciale dans le cadre de l’objectif assigné : comprendre le processus parlementaire. La situation est mutatis mutandis assez proche de celle des enquêteurs en milieu extrême, le seul critère déontologique posé est de ne pas nuire aux personnes suivies. À notre connaissance, l’un des premiers travaux d’observation totale en milieu parlementaire a été réalisé aux États-Unis par David Mayhew qui accéda à l’équipe d’un député et d’un sénateur alors qu’il réalisait sa thèse ?nancée par une bourse du congrès de l’Association américaine de science politique (APSA) [40] ; encore que les résultats établis à partir de ses recherches ne s’appliquent pas au suivi des textes en tant que tel. L’apport de la « participation observante » est aussi cruciale au regard du statut des hypothèses, puisqu’elles ne sont pas véri?ées, comme dans la démarche de l’enquête statistique, mais bien élaborées à partir des observations.
23 Une telle approche n’est cependant pas sans limite : cette démarche est surtout possible pour de jeunes chercheurs (pour un ?nancement de thèse ou pour un docteur en attente de poste) [41] ; de même que certains « angles morts » d’observation persistent. Certains lieux demeurent inaccessibles (tels les réunions des commissions permanentes, la réunion du groupe politique) ; des moments échappent à l’observation (des rencontres informelles de l’élu à la buvette, dans les travées de l’hémicycle, etc), et le suivi dans l’autre chambre n’est qu’indirect. Une telle démarche écarte également la possibilité des « entretiens en situation » au risque de quitter son rang d’acteur engagé pour celui d’un intrus indésirable bien que ceux-là demeurent toujours possibles a posteriori.
ÉVALUER L’OUVERTURE D’UNE OPPORTUNITÉ LÉGISLATIVE AU PRISME D’UNE LOI TECHNIQUE
24 L’examen d’un cas, au travers de la confection de la loi « urbanisme et habitat » de juillet 2003 [42], offre ainsi la possibilité de tester cette méthode en posant les jalons d’une évaluation de la marge de manœuvre des députés relative à des lois techniques. Le fondement initial du projet de loi « urbanisme et habitat » portait sur la nécessité d’apporter une réponse aux nouvelles exigences de sécurité et à la vétusté d’un parc d’ascenseurs parmi les plus anciens d’Europe. L’un des volets du texte consiste à imposer de nouvelles normes conduisant à d’importants travaux de rénovation du parc d’ascenseurs. Son inscription rapide à l’ordre du jour a procédé de la rencontre de deux courants constitutifs de l’action publique, l’un de problématisation-résolution (policies), l’autre de nature politique directement lié au cycle électoral (politics).
25 Loin d’être issu d’un projet original émanant de la nouvelle majorité gouvernementale issue des élections présidentielles et législatives de 2002, les dispositifs ont résulté pour l’essentiel des mesures préconisées antérieurement par un groupe de travail composé des principaux experts et acteurs concernés [43]. Le ministère dispose donc pour l’essentiel quasiment d’un projet clé en main. La liberté de décision se résume à la sélection des priorités et dans le choix de mettre en œuvre la réforme. Inscrite dans une continuité, elle se révèle limitée quant aux modalités en raison d’une dépendance du sentier qui résulte en premier lieu de la nature très technique des questions soulevées et a priori de leur faible enjeu politique du fait d’un accord unanime sur les principaux objectifs [44].
26 Pour autant, ce « projet ascenseur » participe pleinement du référentiel global sécuritaire dominant durant la campagne présidentielle précédente. Sous cet angle, le projet ascenseur est une déclinaison sectorielle, relative aux installations urbaines, d’une perception des attentes des citoyens que le gouvernement entend traduire rapidement dans les faits. Dans sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée, le Premier ministre qui a annoncé la modi?cation prochaine des lois Voynet (aménagement du territoire), Chevènement (intercommunalité) et Gayssot (solidarité et de renouvellement urbain – SRU) fait du retour à la sécurité un nécessaire préalable aux réformes. Le projet se greffe ainsi sur une série de textes rapidement votés ou mis en chantier (projets de loi sur la sécurité intérieure, sur la sécurité routière, sur la sécurité ?nancière et en?n proposition de loi sénatoriale relative à la sécurité des piscines privées, alors promue par Matignon). Deux accidents dramatiques impliquant des ascenseurs à Strasbourg et à Amiens en pleine période électorale, en mai et juin 2002, viennent conforter ces deux logiques. L’élargissement du projet à deux volets distincts, urbanistique et d’habitat, résulte à la fois de l’évaluation de difficultés techniques rencontrées par bon nombre d’élus locaux du fait de la mise en œuvre de la loi « solidarité et de renouvellement urbain » (SRU) du 13 décembre 2000, et d’une volonté plus politique de permettre d’assouplir les limitations d’urbanisation dans le cadre d’une politique de lutte contre la crise du logement.
27 Pourtant, au terme du processus législatif, le texte, déposé devant l’Assemblée, s’est extrêmement enrichi (à tel point qu’un « titre » a dû être ajouté au texte qui passe de 15 à... 98 articles). Dans un même temps, apparaît la faible visibilité publique du texte qui n’a quasiment pas été relayé par les grands médias nationaux, ni la presse locale, tant les données techniques sont complexes. Seule la question de l’éventuelle modi?cation des cadres contraignants d’incitation à la mixité sociale a donné lieu à un intérêt soutenu de la presse écrite nationale.
Dynamiques de capacité législative
28 Le suivi du processus renseigne sur les dynamiques de capacité législative qui ont prévalu. L’essentiel de la capacité législative est largement tributaire des liens établis entre, d’une part, les acteurs extérieurs (gouvernement, groupes d’intérêt, citoyens) et la majorité parlementaire et, d’autre part, le nœud décisionnel parlementaire composé des rapporteurs des textes, des présidents de commission et des administrateurs de l’Assemblée [45], qui fondent une véritable con?guration d’acteurs en interaction durant toute la phase d’examen législatif. Le porte-parole du groupe UMP chargé de rendre visible la position de la majorité, de même que le président de groupe, en l’espèce, n’interviennent que très peu dans la confection législative, relégués au rang d’acteurs secondaires.
29 Le rapporteur, choisi comme un spécialiste des thèmes traités par le projet de loi et/ou du fait d’une grande connaissance de l’arène parlementaire est celui vers qui s’adresse l’ensemble des doléances. L’un des moments déterminants du processus de fabrication de la loi réside dans les réunions avant l’examen en commission du texte, lors desquelles la position du rapporteur sur les amendements est dé?nie. La délibération est sous contrainte puisque ces rencontres réunissent les membres du cabinet ministériel, un ou deux hauts fonctionnaires de la direction administrative impliquée, le ou les administrateurs de la chambre qui assistent le rapporteur, et son ou ses collaborateur(s). De l’implication du rapporteur dépend une grande part des espaces d’ouverture parlementaire ; il est libre, dans le cadre étroit des règles du jeu politique, de choisir de s’opposer à la position du gouvernement, de soutenir ou non une proposition extérieure [46]. Intercesseur, le rapporteur sollicité par des élus de la majorité est aussi distributeur d’amendements : il peut proposer ou répondre aux sollicitations a?n de donner, clef en main, aux élus des amendements qui sont certains d’être adoptés car validés avant même le débat, par le gouvernement. Le fondement des sollicitations varie au gré des relations « principal/agent » [47] : qu’il s’agisse d’une modi?cation du texte guidée par un intérêt de la circonscription, un intérêt proprement objectif à placer sous son nom un amendement quel qu’il soit, ou par un intérêt d’un groupe social soutenu. Les administrateurs pour leur part ne sont pas des acteurs passifs mais bien des contributeurs à la décision. Le « prisme bureaucratique » joue en premier lieu comme un ?ltre entre le faisable et l’irréalisable (« techniquement ce n’est pas possible » entend-on dire à l’égard d’une solution proposée par un lobby). En réalité, ce rôle se double d’une certaine marge d’implication dans les choix. Implicitement les administrateurs peuvent orienter le rapporteur dans son rôle d’intercesseur entre les options opposées proposées par les groupes d’intérêt en conflit [48]. D’autant que ceux-ci cherchent à établir avec eux des contacts directs, en choisissant notamment de leur adresser directement les propositions d’amendements : le politique tranche mais la neutralité respectée incombant à la fonction ne s’effectue pas sans orientation ni suggestion, comme en témoigne cette appréciation lâchée par le rapporteur à l’égard d’un groupe d’intérêt : « ils ont déjà beaucoup obtenu ».
30 Le président de commission apparaît comme un véritable médiateur politique entre le gouvernement, le rapporteur et la majorité parlementaire. Son rôle consiste à relayer la marge de manœuvre octroyée par le gouvernement. Pour autant, là encore, de sa capacité à négocier et de son implication personnelle dépendent largement les espaces d’ouverture provoqués. En l’espèce, l’un des principaux enjeux politiques posés par le texte suivi consistait en l’opportunité ou non pour la majorité parlementaire de revenir sur le dispositif de la loi SRU votée par la gauche en 2001 instaurant l’obligation d’un quota de 20 % de logements « sociaux » pour les communes d’au moins 3 500 habitants. Le projet de loi ne contenait pas un tel dispositif, car le Président de la République y est alors extrêmement défavorable ne souhaitant pas apparaître, selon les termes mêmes d’un des principaux protagonistes, fort de l’expérience de l’après élection de 1995, comme un « ringard social ». Les règles politiques imposées par la présidence sont simples : le ministre et les parlementaires peuvent revenir sur l’article 55 de la loi SRU mais à condition que le nouveau dispositif reçoive l’aval du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées [49]. La consultation fait concrètement office de veto : ne pas tenir compte de l’avis rendu signi?erait le choix improbable pour la majorité parlementaire d’une velléité de bras de fer avec le chef de l’État nouvellement élu et dont elle tire pour une part sa légitimité, ainsi que l’annonce inéluctable d’une campagne politique et médiatique. Dès lors, s’en suit un double jeu politique parallèle qui poursuit un objectif identique : l’obtention d’un dispositif suffisamment compromissoire acceptable par tous. Pour le cabinet du ministre, le travail, stratégique, consiste – véritable jeu de dupe – à maintenir le lien entre le Parlement et le Haut comité, en présentant à chaque interlocuteur la faiblesse de sa marge de manœuvre et l’avancée supposée du dispositif issu d’un effort commun. Pour les instances parlementaires en charge du dossier, il s’agit de prendre réellement en compte les aspirations de sa majorité, tout en contenant la fronde des ultras.
31 Le rôle d’interface du président de la commission des affaires économiques se révèle en l’espèce crucial : il fait notamment circuler des versions différentes d’un amendement auprès des élus de la majorité. Le paradoxe, apparent, provient du fait que ceux qui souhaitent la remise en question du dispositif contraignant se refusent ?nalement à devoir mettre en œuvre une réforme dont les dispositifs contractuels envisagés leur apparaissent, une fois les comptes faits, ?nalement bien moins favorables que le dispositif existant. L’engagement de ces deux acteurs, rapporteur et président de la commission, dans les diverses discussions et sollicitations émanant du premier (cabinet ministériel) et du second cercle (groupes d’intérêt), est largement tributaire de leur propre vécu personnel, de leur parcours professionnel politique et de leur situation électorale. Le rapporteur, en l’espèce élu rural, est très impliqué dans la gestion des services publics locaux de l’énergie, ce qui implique une vision spéci?que des problèmes de mise en réseaux. Le président de la commission va, quant à lui, opter pour faire passer une réforme des « pays » qu’il avait contribué à créer et que la loi Voynet avait largement modi?és. De même, l’insertion de nombreuses mesures relatives à la montagne au sein du texte, est directement tributaire de l’intérêt porté à ces enjeux par un rapporteur, élu de moyenne montagne, et un président lui-même ancien élu d’une circonscription de montagne, ce qui va permettre l’agrégation d’une majorité recomposée sur ces questions. À l’inverse, les très fortes réticences du président à l’égard des méfaits paysagers de l’éolien ont largement contribué à orienter la réception des propositions de mesures relatives à leur développement.
32 Acteurs clefs de la capacité législative, ces « nœuds de réseaux » sont soumis à une double dynamique. Une première dynamique majoritaire/électorale a contribué à impulser des propositions d’insertion au texte. Même pour des textes moins en vue, la campagne électorale s’apparente à une logique de dette [50] et d’obligation vis-à-vis des militants et des électeurs. Mais en l’espèce, la dette en politique urbaine et de l’habitat est « médiatisée » car elle concerne aussi une clientèle spéci?que, celle des élus locaux, qui sont à la fois les détenteurs directs des prérogatives et les relais indirects des sollicitations de leurs administrés dans ces domaines.
33 À cette dynamique électorale s’adjoint une dynamique de distinction. L’approche juridique qui fait prévaloir l’inégalité du bicamérisme ne prend pas suffisamment en compte la capacité d’imposition de thèmes au sein de l’agenda institutionnel dont dispose le Sénat : l’inégalité décisionnelle libère aussi une opportunité de propositions, signi?cative dans le cadre d’une concordance de majorités des deux assemblées. S’agissant du projet de loi « urbanisme et habitat », l’agenda institutionnel précède en quelque sorte l’agenda systématique puisque dès novembre 2002 est débattue la proposition de loi portant modi?cation de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains déposée par Dominique Braye, sénateur des Yvelines, et cosignée par les principaux ténors de la droite sénatoriale [51]. Il s’agit de prendre de vitesse l’Assemblée nationale qui entame l’examen du texte. Les sénateurs cherchent également à démontrer l’apport de leurs travaux pour la production des lois. La loi « Montagne » qui visait initialement à préserver le patrimoine paysager et environnemental apparaît près de vingt ans plus tard comme inadaptée à la réalité démographique et économique de ces territoires ainsi qu’à la diversité des situations. Une mission d’information sénatoriale avait donc été chargée de dresser un bilan de la politique de la montagne et notamment de l’application de la loi dérogatoire au droit commun de janvier 1985. Plusieurs dispositions préconisées par le rapport sénatorial sont ainsi insérées en première lecture dans le texte urbanisme et habitat à l’initiative du rapporteur pour avis de la commission des lois, Pierre Jarlier, sénateur du Cantal et président de l’Association nationale des élus de la montagne. Dès lors, cette immixtion des questions urbanistiques de montagne va obliger les députés à investir ce champ. La dynamique de distinction institutionnelle est confortée par l’intérêt des élus de la moyenne montagne à faire passer sans attendre des dispositifs utiles pour leurs territoires au risque que les dispositifs relatifs à la montagne, inscrits dans la future loi sur le développement des territoires emmenée par le ministre de l’agriculture Hervé Gaymard, ancien député de Haute-Savoie, ne privilégient des problématiques propres à la haute montagne. De même, le Sénat va prendre en compte le problème de l’accessibilité des personnes handicapées ou à mobilité réduite, sans attendre le projet de loi en préparation par le gouvernement, ce qui va conduire l’Assemblée à se déjuger en acceptant des amendements sur le sujet qui avaient été rejetés lors du passage en première lecture.
34 Comment appréhender cependant le degré exact d’amplitude de la capacité décisionnelle ? La domination de l’exécutif au regard du contrôle de l’apport parlementaire ne s’évalue pas tant en terme de rapport entre amendements gouvernementaux et parlementaires acceptés, telle que la dé?nirait une stricte approche quantitative, mais à l’aune des amendements votés ou infléchis à l’encontre de la volonté du gouvernement. La capacité législative ou parlementaire se comprend en terme de capacité à faire plier le gouvernement.
35 Or, on constate que l’examen d’un texte peu visible, technique, offre effectivement de nombreux cas de bras de fer entre la majorité parlementaire et le gouvernement.
Modalités d’inflexion gouvernementale
36 On notera, au préalable, que tout texte de loi comporte des concessions factices. Le gouvernement procède quasi systématiquement par auto-limitation, quelle que soit la nature du texte : est ainsi présenté un projet volontairement inachevé, qui laisse à la représentation nationale la primauté d’intégrer au texte des dispositifs envisagés par le gouvernement. En l’espèce, le dispositif le plus symptomatique de cette réalité est l’élargissement des dérogations à la « règle dite des quinze kilomètres » qui restreint les possibilités d’urbanisation aux alentours des agglomérations. Le seuil des agglomérations à partir desquelles l’ouverture du stock de zones urbanisables est rendu possible, passe sous impulsion parlementaire en commission de 15 000 à 50 000 habitants... mais en réalité c’est bien le cabinet ministériel qui a fourni le tableau des villes susceptibles d’être favorisées par un tel dispositif et qui a largement impulsé la modi?cation.
37 En revanche, le suivi des amendements montre un certain nombre d’opportunités de bras de fer : en première lecture au Sénat, 145 amendements ont été adoptés sur 237 dont 6 du gouvernement, mais parmi ces modi?cations, 10 l’ont été avec la neutralité du gouvernement (la « sagesse » exprimée) et deux contre la volonté expresse du gouvernement (l’avis défavorable) ; de même qu’en seconde lecture 2 amendements sur 34 l’ont été avec la « sagesse » du gouvernement. Les oppositions ont porté pour l’essentiel sur les propositions relatives aux modi?cations de la loi « montagne » autour de deux conceptions opposées des territoires : la préservation des paysages prônée par le gouvernement faisant face à la nécessité de maintenir une activité économique et sociale dans des zones en risque de déserti?cation, défendue par les élus. À l’Assemblée, deux dispositifs litigieux ont donné lieu à une opposition ferme du gouvernement : vis-à-vis de l’assouplissement des règles d’urbanisme applicables aux alentours immédiats des aéroports préconisé par les députés du Val d’Oise proche de l’aéroport de Roissy et à l’encontre d’un assouplissement des règles relatives à l’urbanisation en continuité dans les zones de montagne, amendement co-signé par le rapporteur. S’agissant du second dispositif, le gouvernement, a?n de faire plier les parlementaires, leur a lui-même fourni un sous-amendement de compromis, laissant formellement aux élus la primauté de la réforme. En fait, lors de la discussion du texte, le député de la Lozère, en accord avec le rapporteur qui soutient pleinement sa démarche, décide de ne pas le présenter et de s’en tenir à son texte initial. Le bras de fer se conclue (provisoirement) en faveur des élus de la montagne qui emportent le vote, contre l’avis du gouvernement. La phrase laconique exprimée par le ministre manifeste alors toute l’incongruité de la situation sous un régime de parlementarisme rationalisé : « c’est la loi de la démocratie » !
38 Les élus disposent dès lors effectivement d’une aptitude à faire fléchir le gouvernement. Sur le volet relatif à la mise en sécurité des ascenseurs, la seule réelle divergence entre majorité parlementaire et gouvernement porte sur l’interprétation de la portée du nouveau texte au regard du régime existant de la responsabilité : les propriétaires évoquent le risque d’un déplacement de la responsabilité des ascensoristes vers les co-propriétaires auxquels il incombe de respecter les normes imposées par la loi. Un équilibre est alors trouvé entre ces intérêts contradictoires lorsque, sous l’impulsion du rapporteur, les députés en commission choisissent d’apporter des modi?cations radicales, ce qui a conduit à un compromis orchestré sous l’égide du gouvernement lors de la seconde lecture du texte [52]. Dans le cas des différents litiges évoqués plus haut une solution compromissoire a de la même manière été trouvée, que cela soit au terme du processus parlementaire en commission mixte paritaire (cas de l’amendement sur le mitage), ou qu’elle ait conduit les parlementaires à accepter de proposer un dispositif qui soit acceptable pour le gouvernement (cas de l’amendement sur les zones d’aéroport). De nombreuses modi?cations et nouvelles dispositions ont ainsi été adoptées [53] .
39 Pour autant, il reste que le suivi du processus d’élaboration du texte consacre quoi qu’il en soit la domination de l’exécutif sur le pré-carré politique. La domination s’exprime d’une part dans la capacité technique : les élus, dont le rapporteur et le président, ne peuvent s’appuyer que sur deux ou trois fonctionnaires de haut niveau, mais recrutés sur un concours généraliste et qui dès lors sont eux-mêmes tributaires des informations techniques fournies par le cabinet ministériel [54]. Comme Bachrach et Baratz l’ont depuis longtemps présenté [55], le pouvoir politique s’évalue aussi en terme de non-décision : le volet relatif à la mixité sociale démontre la capacité de l’exécutif à empêcher les parlementaires de se saisir d’un enjeu puisqu’ils vont décider in fine de s’auto-restreindre et de ne pas s’opposer à la volonté présidentielle [56]. On notera ainsi, et d’autre part, que ce sont bien les enjeux politiques à forte visibilité médiatique qui contraignent le plus les élus [57]. La marge de manœuvre, réelle, est donc également relative. En ce sens, la dé?nition de la catégorie des lois à potentialité d’ouverture parlementaire nécessite de prendre en compte les effets de politisation. En d’autres termes, la nature du projet de loi ne peut jamais déterminer, a priori, et à l’avance, le degré de politisation de la fabrique de la loi, tributaire d’une multitude d’investissements émanant d’acteurs divers (groupes d’intérêt, partis politiques, médias) intéressés et susceptibles d’ouvrir une controverse et de refermer ainsi l’espace d’ouverture. Comme l’a montré Pierre Lascoumes, des moments de « sur-politisation » marqués par une forte conflictualité ou de « sous-politisation » (le registre pragmatique l’emporte) peuvent intervenir dans le cadre de l’élaboration d’un texte de loi, ce qui contribue aussi dès lors à modi?er fortement l’espace de manœuvre de la majorité gouvernementale et parlementaire [58]. Le volet social de la loi « urbanisme et habitat » illustre ce cas de ?gure. Il n’en reste pas moins que la restriction décisionnelle induite par la politisation demeure cantonnée au champ de la controverse ainsi soulevée et maintient, sur le reste des dispositifs, l’espace d’opportunité parlementaire conféré par la nature technique du texte aux députés de la majorité.
La loi comme « bricolage »
40 Au prisme du processus législatif, le texte ?nal des lois techniques paraît se présenter comme un conglomérat hétérodoxe de dispositifs issus d’impératifs extrêmement diversi?és (tributaires d’enjeux locaux, d’un strict apport symbolique) à l’encontre d’une vision « juridiste » formelle d’une loi, de nature impersonnelle et de portée générale guidée par l’impulsion de l’exécutif. En témoigne la nature très éclectique des amendements parlementaires adoptés [59].
41 La loi « urbanisme et habitat » consacre la rationalité limitée du décideur gouvernemental qui doit agir sous contrainte (on rappelle la reprise d’un texte élaboré par les services techniques sous le gouvernement précédent de la gauche plurielle) : le gouvernement n’a pas « choisi » de s’atteler à certaines questions auxquelles il a dû néanmoins apporter « sa réponse » au gré des sollicitations parlementaires. Au ?nal, l’observation du processus législatif a permis de voir en quoi sur ce type de texte, à très forts enjeux locaux, les logiques de coalitions ponctuelles, telles qu’elles se présentent dans des « systèmes parlementaristes » [60], existent bel et bien, fondées pour l’essentiel sur des impératifs de circonscription.
42 La loi urbanisme et habitat, ici présentée, correspond à ces « lois techniques » dont la dimension politique, réelle, est arti?ciellement amoindrie du fait de la haute complexité des dispositions et de la faible visibilité de ces enjeux dans l’espace public. La marge de manœuvre des parlementaires est dès lors étendue. Le rôle des acteurs de la con?guration législative décisionnelle (rapporteur, président, administrateur) se révèle crucial. La césure relative à la marge de manœuvre parlementaire ne saurait se résumer à une seule distinction entre texte de régulation sociale d’une part, et textes sectoriels d’autre part. Car des textes sectoriels – le cas de la régulation postale le prouve – se dé?nissent bien comme des projets à enjeu politique fort et à capacité législative limitée. De même, l’affaiblissement des contraintes partisanes sur certains textes sectoriels (cf. la loi sur la chasse, sur la bioéthique) conduit à des prises de parole déviantes par rapport à la ligne de conduite dé?nie par le gouvernement et le(s) parti(s) de la majorité sur le texte, mais il faut bien noter qu’elle ne se traduit pas par un élargissement de la capacité de modi?cation des textes : en dé?nitive, les élus ont simplement « fait entendre leur voix », en rapport avec les impératifs de circonscription notamment.
43 Pour autant, l’intérêt d’une approche processuelle ne s’évalue qu’à l’aune de la comparaison entre catégories de textes distincts a?n de prendre la mesure de la différence de marge de manœuvre parlementaire selon les types de lois. Cela nécessite donc, par delà le suivi d’une étude de cas en observation participante, de suivre l’essentiel de la procédure législative d’un autre type de texte, jugé a contrario « fermé ». Le second texte dont on a pu suivre, de l’intérieur, la confection, porte sur la régulation des activités postales. Il ne correspond qu’imparfaitement aux critères de la mise en visibilité car il ne s’agissait pas en soi d’un texte programmatique et l’intérêt médiatique est aussi inversement proportionnel à la technicité des textes (contrainte due au fait que l’objet de l’observation n’a pas été « choisi » mais est tributaire des textes proposés à l’élu pour être rapporteur). Mais il demeure cependant un texte à fort enjeu politique.
44 Le projet de loi transpose les deux directives de 1997 et de 2002 qui établissent les conditions de l’ouverture progressive des marchés postaux à la concurrence. L’essentiel des dispositifs porte, d’une part, sur l’organisation du marché (la délimitation du service universel postal et le périmètre du domaine réservé demeurant alors sous monopole) et, d’autre part, sur les modalités de mise en œuvre de la régulation rendue nécessaire par l’ouverture du marché, lesquelles ont trait notamment au champ de compétence de la nouvelle autorité de régulation ainsi créée, distincte de l’autorité de tutelle et surtout commune désormais aux services de télécommunications et postaux [61]. Le choix d’un dépôt du texte en première lecture devant le Sénat témoigne de la volonté gouvernementale d’afficher la prise en compte des intérêts territoriaux face à l’inquiétude exprimée de la fermeture des bureaux de postes, notamment en milieu rural.
45 Pour autant, la forte teneur politique du projet contrevient à l’ouverture d’un espace d’opportunité parlementaire. L’un des dispositifs phares du projet de loi est la création d’une banque de plein exercice (« La banque postale ») dont la conception est apparue, avant même son traitement au sein du parlement, comme une affaire réglée [62]. Alors même que certains syndicats s’opposent aux choix stratégiques (création d’une banque de plein exercice), le projet gouvernemental est apparu comme non susceptible de modi?cation.
46 Les groupes d’intérêt durant la phase d’examen du texte avaient largement intériorisé le fait que la décision était désormais prise. Les rencontres entre les parlementaires et les organisations professionnelles représentatives de banques organisées dans le cadre des consultations de préparation du rapport font office de baroud d’honneur. Elles donnent plus à voir l’action entreprise auprès des adhérents qu’elles ne sont la manifestation de la volonté des représentants des milieux bancaires de tenter de convertir les élus de la majorité à leur cause et à leurs intérêts. Lorsque le texte arrive en discussion au parlement, la Fédération française des banques (FFB) ne croit déjà plus à la possibilité d’empêcher la création d’une banque postale de plein exercice, nouvel entrant sur le marché bancaire, et déplace alors ses modes d’action sur le registre juridique en multipliant les recours contentieux au niveau national et supra-national (au niveau européen). Elle exerce une sorte de « lobbying de papier » puisque son opposition est alors savamment reprise par la presse nationale. Les auditions organisées par le rapporteur témoignent alors d’un tel climat.
47 De manière signi?cative, il est par conséquent notable que sur l’ensemble du texte, a contrario des bras de fer établis sur la loi urbanisme et habitat, aucune opposition entre les majorités parlementaires et gouvernementale n’a pu être relevée. En d’autres termes, le moment parlementaire n’offre pas de cas de propositions de vote contradictoire sur les amendements entre le rapporteur de la loi pour la commission et le ministre proposant le texte au nom du gouvernement. Ce constat ne signi?e pas que des tensions n’existent pas dans des textes plus politiques mais la différence fondamentale avec le cas des lois « à potentialité d’ouverture », tel qu’a pu le présenter la loi « urbanisme et habitat », réside dans le fait que s’agissant de lois « politiques », au terme de la procédure parlementaire, on assiste in fine à la validation de la position gouvernementale et au recul des parlementaires comme en rend compte a contrario la loi relative à la régulation des activités postales [63].
48 En se référant à la distinction duguiste, on formule ainsi l’hypothèse que, non sans quelque paradoxe, les lois politiques ou programmatiques confèrent au parlementaire une capacité de confection de règles « constructives », somme toute limitée, là où les lois techniques ouvrent sur une opportunité d’action « normative », parfois très étendue. Naturellement, une telle piste de réflexion, établie à partir d’un cas limité, mériterait d’être corroborée par des études plus systématiques. Car, comme on l’aura noté, ce qu’elle gagne en intelligibilité des processus, l’observation processuelle le perd en montée en généralité. Mais, même si la méthode d’observation ne saurait dé?nir une démarche exclusive et mérite de s’accompagner des données quantitatives établies par ailleurs [64], celle-ci n’en offre pas moins un cadre d’observation privilégié des transformations en cours. L’entrée en vigueur en mars 2009 de la loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Cinquième République du 23 juillet 2008, en modi?ant notamment les règles de présentation des textes en séances (le débat portant sur le texte révisé en Commission et non plus sur le projet gouvernemental initial) pourrait bien, à terme, modi?er l’espace d’opportunité décisionnelle des parlementaires. Pour le moins, le cadrage méthodologique ainsi proposé offre l’occasion de rompre avec un certain formalisme propre aux analyses quantitativistes dominantes au sein des legislatives studies et de parer la méconnaissance du temps parlementaire au sein du processus décisionnel mesuré au prisme de la sociologie de l’action publique.
Mots-clés éditeurs : loi et action publique, Parlement, observation participante, Legislative studies, loi « Urbanisme et habitat »
Date de mise en ligne : 25/01/2011
https://doi.org/10.3917/rfap.135.0601Notes
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[1]
L’essentiel du matériau reproduit dans ce texte a été présenté dans le cadre des travaux du Groupe de recherche sur les parlements et les parlementaires (GRPP) de l’Association française de science politique coordonné par Éric Kerrouche et Olivier Rozenberg à qui j’adresse mes remerciements ainsi qu’à Yves Surel et Cécile Vigour qui en ont discuté, successivement, la teneur.
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[2]
François (Bastien), La Constitution Sarkozy, Paris, Odile Jacob, 2009 ; Dord (Olivier), « Vers un rééquilibrage des pouvoirs publics en faveur du Parlement », Revue française de droit constitutionnel, no 77, janvier 2009, p. 89-128 ; Gicquel (Jean), « La reparlementarisation : une perspective d’évolution », Pouvoirs (la Cinquième République), no 126, septembre 2008, p. 55-89.
-
[3]
François (Bastien), Le régime politique de la Ve République, Paris, La découverte (coll. « Repères »), 1re éd. 1998.
-
[4]
Manin (Bernard), « Volonté générale ou délibération : esquisse d’une théorie de la délibération politique », Le Débat, 33, 1985, p. 72-94.
-
[5]
Roussellier (Nicolas), Le Parlement de l’éloquence. La souveraineté de la délibération au lendemain de la Grande Guerre, Paris, Presses de Science Po, 1997.
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[6]
Ainsi les ouvrages relatifs aux comportements politiques délaissent-ils le « comportement parlementaire » et méconnaissent-ils la littérature sur le sujet.
-
[7]
A contrario, hormis les études francophones sur le Parlement européen, voir le dossier « Retour au Parlement », RFSP, juin 2009.
-
[8]
En ce sens Kerrouche (Éric), « The French Assemblée nationale : The Case of a Weak Legislature ? », Journal of Legislative Studies, Vol. 12, no 3-4, décembre 2006, p. 336-365 ; Beaussier (Anne-Laure), « Le parlement français, acteur renouvelé des politiques d’assurance maladie ? », Pôle Sud, 2008, 1, no 28, p. 35-53.
-
[9]
Costa (Olivier), Kerrouche (Éric), Qui sont les députés français ? Enquête sur des élites inconnues, Paris, Presses de Science-Po, 2007.
-
[10]
On préfère recourir à ce terme qui insiste sur la nature du suivi de la fabrique législative, plutôt qu’à celui de « séquentiel » qui fait référence uniquement aux étapes chronologiques.
-
[11]
Cf. dossier « La démocratie majoritaire », Pouvoirs, no 85.
-
[12]
Nay (Olivier), « Le travail politique à l’Assemblée nationale. Note sur un champ de recherches trop longtemps déserté », Sociologie du travail, oct-déc 2003, p. 537-554.
-
[13]
Courty (Guillaume) sld., Le travail de collaboration avec les élus, Paris, Michel Oudiard, 2006 ; Le Lidec (Patrick), « Les députés, leurs assistants et les usages du crédit collaborateurs. Une sociologie du travail politique », Sociologie du travail, avril-juin 2008, p. 147-168.
-
[14]
Huber (John D.), Shipan (Charles R.), Deliberate Discretion ? The institutional Foundations of Bureaucratic Autonomy, Cambridge, Cambridge University Press, 2002.
-
[15]
Mossuz-Lavau (Janine), Les lois de l’amour. Les politiques de la sexualité (1950-2002), Paris, Petite Bibliothèque Payot, 2002.
-
[16]
Commaille (Jacques), L’esprit sociologique des lois. Essai de sociologie politique du droit, Paris, PUF, 1994.
-
[17]
Enguéléguélé (Stéphane), Les politiques pénales, 1958-1995, Paris, L’Harmattan (coll. « Logiques politiques »), 1998.
-
[18]
Commaille (Jacques), L’esprit sociologique des lois, op. cit., p. 125-238.
-
[19]
Sur la loi Lang : voir Surel (Yves), L’État et le Livre. Les politiques publiques du livre en France (1957-1993), Paris, L’Harmattan, 1997, p. 204.
-
[20]
L’enjeu de la fabrique de la loi n’est pas traité au sein des divers manuels en langue française se référant à la sociologie de l’action publique ou aux politiques publiques.
-
[21]
Baumgartner (Frank R.), Jones (Brian. D.), Agendas and Instability in American Politics, Chicago, Berkley, University of California Press, 2009 (1re ed. 1977).
-
[22]
Dossier « Les approches cognitives des politiques publiques », RFSP, avril 200.
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[23]
On notera toutefois les nombreuses remarques judicieuses sur le mythe du législateur unique, ou la réalité du bricolage législatif, mais qui demeurent des vues générales, voir Braibant (Guy), « Qui fait la loi ? », Pouvoirs, Le Parlement, no 64, p. 43-46.
-
[24]
Clinton (Joshua D.), Jackman (Simon), Rivers (Doug), « The most Liberal Senator ? Analysing and interpreting Congressional roll calls », Political Science & Politics, octobre 2004, p. 805-811.
-
[25]
Voir pour un aperçu Costa (Olivier), Rozenberg (Olivier), « Parlementaires », in Belot (Céline), Magnette (Paul), Saurugger (Sabine) sld., Science politique de l’Union européenne, Paris, Économica (coll. « Études politiques »), 2008, p. 249-270.
-
[26]
Adonis (Andrew), Parliament today, 2nd ed., Manchester University Press, 1993, p. 153-154.
-
[27]
Sur tous ces points, voir Mauguin-Helgeson (Murielle), L’élaboration parlementaire de la loi : étude comparative : Allemagne, France, Royaume-Uni, Paris, Dalloz, 2006, p. 206-207.
-
[28]
Cahoua (Paul), « Les commissions, lieu du travail législatif », Pouvoirs, (l’Assemblée), no 34, 1985, p. 37-50.
-
[29]
28 amendements commission, 89 amendements du gouvernement, 14 émanant des élus furent adoptés pour le budget de 1988, Cf. tableau Huber (John. D.), Rationalizing parliament. Legislative institutions and party politics in France, Cambridge, Cambridge university Press, 1996, p. 149.
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[30]
Costa (Olivier), Kerrouche (Éric), op. cit., annexe 3, p. 204.
-
[31]
Duguit (Léon), Études de droit public. Tome 1 L’État, le droit objectif et la loi positive, réédition Dalloz, 2003 (1re ed. 1901).
-
[32]
L’expression est empruntée à Hugues Portelli.
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[33]
Sur le tandem de rôles différenciés en circonscription et à l’Assemblée, Costa (Olivier), Kerrouche (Éric), op. cit., p. 185 et suiv.
-
[34]
Abelès (Marc), Un ethnologue à l’Assemblée, Paris, Odile Jacob, 2000. On notera aussi l’analyse sociologique des conditions de l’organisation d’assemblée : Heurtin (Jean-Philippe), L’espace public parlementaire. Essai sur les raisons du législateur, Paris, PUF, 1999 ; ainsi que « Architectures morales de l’Assemblée nationale », in Détienne (M.) dir., S’assembler, Paris, Le Seuil, 2003, p . 49-81.
-
[35]
Fenno (Richard F.), Watching politicians. Essays on participant observation, Berkeley, University of California at Berkeley, Institut of governmental studies, 1990.
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[36]
Voir récemment Pourcher (Yves), Votez tous pour moi ! Les campagnes électorales de Jacques Blanc en Languedoc-Roussillon (1986-2004), Presses de Science Po, 2007.
-
[37]
Voir pour un historique des recherches sur le comportement électoral aux États-Unis, le chapitre introductif du livre hommage à Richard Fenno in Fiorina (Morris P.), Rohde (D.) ed., Home Style and Washington work, studies of congressional politics, Ann Arbor, The University of Michigan press, 1989.
-
[38]
Fenno (Richard), Watching politicians, op. cit., p. 57-58.
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[39]
Lefebvre (Rémy), « Le temps d’une campagne », in Dolez (Bernard), Laurent (Annie), Wallon-Leduc (Christian-Marie), sld., La revanche de la gauche. Les élections législatives de 1997 dans la région Nord/Pas de Calais, Presses universitaires du Septentrion, 1998, p. 37-56. Voir aussi Lefebvre (Rémy), « S’ouvrir les portes de la ville. Une approche ethnographique des porte-à-porte de Martine Aubry à Lille », in Lagroye (Jacques), Lehingue (Patrick), Sawicki (Frédéric) dir., La mobilisation électorale municipale, Paris, PUF-CURAPP, 2005.
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[40]
Mayhew (David R.), Congress. The electoral connection, New Haven and London, Yale university press, 1974.
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[41]
L’élu pour lequel je travaillais connaissait mon double statut de collaborateur et de jeune enseignant chercheur, chargé de cours à l’université et publiant des travaux, dont il avait lu certains.
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[42]
Loi no 2003-590 du 2 juillet 2003.
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[43]
Créé par l’AFNOR à la demande en 2001 de la Direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction (DGUHC). Dès 1993 la Fédération des ascensoristes avait attiré l’attention des pouvoirs publics sur la dangerosité de certains appareils.
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[44]
La CGT compte alors avec les professionnels ascensoristes au nombre des principaux « tireurs d’alarmes » sur la question de la sécurité des ascenseurs.
-
[45]
Pour une rare étude sur le travail au concret des administrateurs, Szij (Éric), « La technique de la loi dans les travaux préparatoires aux débats parlementaires », Parlement(s), no 11, 2009, p. 81-92.
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[46]
On a pu constater que certaines propositions relatives à des dispositifs techniques en matière de droit de l’urbanisme émanant de la circonscription, n’ayant pas convaincu le rapporteur, ce dernier ne les a pas appuyées auprès des administrateurs qui les jugeaient irréalisables... avant que l’option proposée originairement irréalisable soit reprise et votée au Sénat.
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[47]
Costa (Olivier), Kerrouche (Éric), op. cit., p. 18-22.
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[48]
En l’espèce, l’administrateur apparaissait incliner plutôt du côté des associations HLM et de propriétaires que des ascensoristes.
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[49]
Il est alors présidé par Xavier Emmanuelli, ancien secrétaire d’État à l’action humanitaire d’urgence sous le gouvernement d’Alain Juppé, assisté de Bernard Lacharme secrétaire général, et par ailleurs proche des mouvements de la gauche associative.
-
[50]
Zittoun (Philippe), « Partis politiques et politiques du logement. Échanges de ressources entre dons et dettes politiques », RFSP, vol 51 (5), oct. 2002, p. 683-705.
-
[51]
Dont Gérard Larcher président UMP de la commission des affaires économiques et du plan, Michel Mercier, devenu par la suite président du groupe Union centriste.
-
[52]
Après une intervention gouvernementale via le cabinet, il est ?nalement simplement précisé que les coûts d’investissement impartissent aux propriétaires, les coûts de fonctionnement portent sur les parties au contrat, propriétaires et ascensoristes.
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[53]
Telles que l’autorisation de restaurer des ruines, la possibilité de restaurer les bâtiments d’estive sous conditions, l’extension aux bâtiments d’estive des dispositions concernant les chalets d’alpage
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[54]
Le suivi des courriels échangés entre le cabinet et les administrateurs, transmis pour information au rapporteur témoignent de la dépendance technique sur des dispositifs complexes qui demandent une extrême spécialisation en droit de la responsabilité et en droit de l’urbanisme notamment.
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[55]
Bachrach (Peter), Baratz (Morton S.), « Decisions and Non-Decisions : An Analytical Framework », American Political Science Review, 57, 1963, p. 632-647.
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[56]
Des sénateurs vont déposer un amendement, avant de le retirer sous la pression gouvernementale.
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[57]
Sur l’importance du critère de publicité dans l’adoption des politiques publiques voir, Guiraudon (Virginie), « Jeux d’ombre et de lumière : les politiques envers les étrangers en Europe », RFSP, no 6, décembre 1999, p. 755-782.
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[58]
Lascoumes (Pierre), « Les compromis parlementaires, combinaisons de surpolitisation et de sous-politisation. L’adoption des lois de réforme du code pénal (décembre 1992) et de création du Pacs (novembre 1999), RFSP, no 3, juin 2009, p. 455-478.
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[59]
Tels la réforme des « pays », l’amendement conférant dérogation aux règles d’urbanisme pour le Sénat ; la validation du POS de la ville de Lyon, etc.
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[60]
Duhamel (Olivier), Les démocraties, Paris, Seuil, 1993.
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[61]
Sur ce texte voir Sij (Éric), « La loi relative à la régulation des activités postales », Regards sur l’actualité, no 315, novembre 2005, p. 99-109.
-
[62]
Milet (Marc), « La banque (postale) « pas comme les autres » : entre identité postale et rhétorique de marché », RFAP, no 119, 2006, p. 427-438.
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[63]
Voir également comme autre cas illustratif, l’amendement sur la publicité du vin dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux. Les élus ont reculé face aux pressions gouvernementales : l’impératif de programme politique gouvernemental (la santé publique) l’a emporté.
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[64]
Seules des analyses quantitatives offrent ainsi notamment la possibilité d’études nationales comparées.