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Article de revue

Postface

Carrières des salariés non qualifiés : de la variété des blocages à la recherche de marges de manœuvre

Pages 233 à 240

Notes

  • [1]
    L’idée de préférence adaptative renvoie au processus psychologique par lequel une personne, constatant que certains de ses souhaits sont hors d’atteinte, en vient non seulement à y renoncer, mais aussi à les inverser : dans l’impossibilité d’atteindre les raisins suspendus trop en hauteur, le renard de la fable de Jean de La Fontaine déclare qu’« ils sont verts et bons pour les goujats ».
English version

1 Les huit contributions rassemblées dans ce dossier sont pour quatre d’entre elles issues du programme de travail SQUAPIN (Salariés en emploi peu qualifié : quelles perspectives face à l’injonction de devenir acteur de leur parcours professionnel ?). Les quatre autres sont en dialogue avec lui. Elles interrogent, à partir de données quantitatives et qualitatives originales, le sens et l’efficacité des efforts de formation continue à l’intention des travailleurs à basse qualification, dans l’espoir d’améliorer leur situation, leur accès à l’emploi et leur carrière.

2 Cinq contributions exploitent les apports de deux enquêtes quantitatives majeures produites par le Céreq : l’enquête DEFIS (Dispositif d’enquêtes sur les formations et itinéraires des salariés) et les enquêtes Génération. Une sixième combine l’exploitation de l’Enquête Emploi produite par l’INSEE et celle d’entretiens qualitatifs. Deux autres contributions enfin sont exclusivement qualitatives et fondées sur des entretiens.

3 Un large spectre de situations et de trajectoires est couvert, qui va des salariés en reconversion aux jeunes en insertion, en passant par les aides à domicile et les agents d’entretien, ces derniers étant observés et analysés en France, mais aussi au Cameroun dans le contexte particulier des organisations internationales humanitaires, quand une étude se focalise sur les attentes et stratégies de recrutement de responsables d’entreprises opérant dans des secteurs d’activité très divers.

4 Les ressources théoriques principales utilisées sont triples : d’une part, l’approche par les « capacités » d’Amartya Sen et la théorie de la segmentation du marché du travail sont mobilisées sur l’aspect quantitatif et, d’autre part, l’approche par les « conventions » de Boltanski et Thévenot inspire les contributions qualitatives. D’un côté, la mise en évidence d’(in)capacités socialement construites et reconduites, voire redoublées dans les entreprises, et de l’autre, l’identification de l’usage par les employeurs de « conventions » (« cité » domestique ou inspirée) visant à naturaliser des situations de non-reconnaissance et de faible rémunération des tâches.

1 Des apports multiples entre contraintes, blocages et complexités

5 Parmi les apports de cette riche moisson empirique et interprétative, on note une série de blocages, de complexités et de contraintes, parfois paradoxales, qui viennent souvent empêcher ou neutraliser les efforts en faveur de la formation et plus encore de la promotion des non-qualifiés.

6 La mise en évidence et l’exploration de la longueur et de la complexité de la séquence logique qui va de la faible qualification à la formation, puis à la progression de carrière constituent un apport majeur de ce dossier : Stephanus et Vero distinguent quatre temps : 1. Vision élargie et critique des aspirations en situation d’emploi non qualifié (possibilités de « préférences adaptatives » [1] et d’injonctions paternalistes, importance de la liberté de se projeter) ; 2. Prise en compte d’un espace et d'un temps nécessaires de délibération ; 3. Prise en compte des « opportunités réelles » à la disposition du travailleur non qualifié : des facteurs de conversion et d’obstruction ; et 4. Réalisations plurielles de la formation, qui ne doivent pas être réduites à des démarches purement professionnelles (compétences, promotions, reconversions), mais être élargies à la réalisation de valeurs, la formation devant faire sens pour le travailleur. Il y a ainsi un ensemble de processus, temporel et interactif, à restituer, dont chaque étape peut se révéler bloquante.

7 Cet apport est repris et exploité en tout ou partie par les contributions de Béduwé, El Akremi et Stephanus, et Di Paola, Joutard et Moullet qui adoptent l’approche des « capabilités ».

8 Un autre point important est la discussion, reprise dans la plupart des contributions, des multiples termes censés décrire la disposition des personnes à s’engager dans une démarche de formation : « aspirations », « appétence », « motivation », « attentes professionnelles » : le souci principal est d’éviter la naturalisation de ces dispositions trop souvent réduites à des constats psychologiques. Une application-clé de cette démarche est la mise en évidence de « préférences adaptatives » jouant à l’encontre de la formation, les travailleurs peu ou pas qualifiés, souvent sortis de la formation initiale par l’échec et sans diplôme, nourrissant des anticipations négatives à son endroit. Il s’agit en fait d’un chantier empirique complexe, comme en témoigne l’article de Béduwé, El Akremi et Stephanus qui montre que les non-qualifiés « aspirent » paradoxalement plus à la formation que les qualifiés, et que les préférences adaptatives concernent les ouvriers non qualifiés et pas les employés non qualifiés. Un autre aspect important est la mise en évidence statistique de l’émergence progressive des aspirations par Di Paola, Joutard et Moullet, la réalisation étant observée des années après, avec le constat que les travailleurs non qualifiés sur des postes qualifiés sont ceux pour qui la progression est la plus substantielle.

9 S’intéressant aux trajectoires d’insertion des jeunes durant la crise sanitaire, le travail de Robert et Sawadogo confronte segmentation et récession et met en évidence le très fort effet amortisseur des politiques publiques, tant pour les non-qualifiés que pour les qualifiés. Les auteurs constatent, au-delà des fortes mobilités externes caractéristiques des emplois « secondaires » instables, des mouvements ascendants des salariés non qualifiés, qu’ils soient diplômés ou non.

10 Un apport original du dossier est de reprendre le travail de définition et de repérage statistique du concept, largement conventionnel et pluriel, de non-qualification des emplois et des personnes, en exploitant la confrontation directe, dans les emplois salariés, des bas niveaux de qualification des personnes et de la basse qualification/classification des tâches et des emplois. Lambert et Mario-Vernoux révèlent les multiples facettes de la faible qualification dans une démarche qui évoque les travaux sur la multidimensionnalité de la pauvreté (pauvreté monétaire, subjective, des conditions de vie). Elles mettent alors en évidence le paradoxe de l’existence de travailleurs qualifiés sur des postes non qualifiés, des « non-qualifiés cachés ou masqués » qui sont bloqués dans la pseudo-sécurité de cette situation, ce qui vient enrichir le débat d’une complexité supplémentaire.

11 L’ensemble des contributions converge largement vers les limites des politiques publiques d’activation et de développement de l’employabilité individuelle, et les contributions qualitatives rejoignent les contributions quantitatives. On ne voit pas « pourquoi former » des non-qualifiés, la priorité étant d’agir sur leurs conditions de travail et d’emploi (Burie, Devetter et Valentin). En miroir, les attitudes des employeurs et recruteurs à l’égard des travailleurs non qualifiés sont ici analysées dans leurs stratégies de rationalisation et de légitimation, rabattant les difficultés sur les limites des qualités personnelles des travailleurs, plus encore s’il s’agit de pourvoir des « emplois en tension », au lieu de s’interroger sur leur déficit d’attractivité (Albandéa, David, Roupnel-Fuentes et Bernard). Sont alors isolés une série d’équilibres bas dans plusieurs secteurs, fondés sur différentes « conventions », les faibles qualifications imputées aux travailleurs ou candidats travailleurs venant rencontrer des emplois de faible qualité, précaires et peu rémunérateurs. Le cas des agents d’entretien au Cameroun offre ainsi un contraste saisissant et provocateur entre des organisations humanitaires censées agir en faveur de meilleurs emplois pour tous et toutes, et gérant de manière externalisée l’invisibilisation et la précarisation des services de nettoyage en leur sein (Mba, Keuya et Beaulieu).

12 L’entreprise se voit ici affranchie de ses responsabilités, tout comme les pouvoirs publics cherchant simultanément à se défausser de leurs échecs sur des supposées insuffisances individuelles et à faire accepter des conditions d’emploi et de travail dégradées au motif de combattre le chômage et les difficultés de recrutement.

13 Dans le dossier apparaît alors, en contrepoint, la dimension collective de la construction de la qualification et de la non-qualification via des actions de formation, notamment dans l’entreprise, « organisation capacitante » (Béduwé, El Akremi et Stephanus). On en retrouve la trace dans le constat de l’accès à des qualifications plus élevées grâce à la mise en mouvement des salariés peu qualifiés bénéficiant déjà de postes relativement qualifiés (Di Paola, Joutard et Moullet). On pourrait symétriquement parler d’organisations « incapacitantes », par exemple en reprenant l’idée de « compétences invisibles » qui est au centre de l’apport de Burie, Devetter et Valentin, l’invisibilisation étant socialement construite dans l’organisation même du travail, et/ou en reprenant le recours aux « conventions », notamment domestiques, pour minimiser le travail relevant de la sphère du « care ».

2 Limites et prolongements : élargir la focale, exploiter la complexité en dynamique

14 La démarche et les résultats du projet SQUAPIN constituent une étape riche et critique sur un chemin plus long et moins linéaire qu’on aurait pu le penser. Deux limites peuvent être marquées.

15 Limites de la focale empirique résultant de son centrage sur les déterminants de la décision de se former des salariés et ses conséquences : de la formation, on n’a examiné ici que l’appétence ou l’accès. Rien n’est dit sur la variété concrète des formations concernées : de court ou long terme, professionnalisantes ou non, et peu finalement sur les contextes collectifs ou individuels dans lesquels elles peuvent prendre place et être (ou non) valorisées. C’est un constat assez banal toutefois que la formation ne peut s’apprécier dans sa pertinence et dans ses effets qu’en prenant en compte ses modalités concrètes et l’ensemble des mesures de sécurisation des revenus, de mises en contact et de création d’expériences qui l’accompagnent.

16 Limite de la posture critique puisque du dossier émerge une cible unifiante à l’encontre du discours dominant : l’employabilité comme objectif affiché par les politiques publiques visant à susciter les initiatives et projets individuels de formation, objectif présenté comme une injonction non seulement inefficace, mais aussi oppressante, voire humiliante, les pouvoirs publics se faisant les complices des attitudes déqualifiantes de certaines entreprises. Cette cible demanderait à être contextualisée et complétée. Elle peut par exemple être rapprochée d’autres constats moins pessimistes en ce qui concerne les politiques d’emploi et de formation professionnelle qui ont fait le choix, en France, de s’appuyer sur les aspirations et initiatives individuelles. Elles ne débouchent pas seulement sur des échecs, mais aussi sur des prises d’initiative, y compris de la part de travailleuses et travailleurs faiblement qualifié·es, par exemple à partir du Compte Personnel de Formation : en 2022, la part des personnes de niveau inférieur ou égal au CAP/BEP dans le CPF était de 42 % alors qu’elles représentent 34 % de la population active (Dares, 2023). Et le dossier a aussi et d’abord mis en évidence des complexités, des paradoxes, même s’il n’a identifié que quelques rares facteurs de succès. Il est donc possible de partir de celles-ci pour approfondir les leviers et les actions possibles face aux contraintes et aux blocages.

17 Aller plus loin en élargissant la focale suppose d’abord d’effectuer un détour théorique sur les rapports peu explorés entre l’approche par les capacités et les décisions et interactions sur le marché du travail, notamment en termes de segmentation et de mobilités subies ou forcées. On pourra ensuite revenir sur un sujet encore largement inexploré : les liens entre formation, transitions et positions professionnelles, et émancipation.

18 On le sait, l’approche par les capabilités de Sen et Nussbaum s’est construite sur des « fonctionnements » finaux, c’est-à-dire correspondant à des états ou des agirs considérés pour eux-mêmes : être libre de ses choix, être adéquatement nourri, logé et soigné, participer aux décisions du groupe auquel on appartient, maîtriser sa fécondité, être capable de s’exprimer… la liste n’est pas limitative et n’est pas toujours spécifiée en détail, mais les « capabilités » ne prennent leur sens qu’au regard des buts de vie bonne que tout un chacun peut formuler pour soi-même. Elles ne sont donc pas, par définition, intermédiaires. Si l’on considère l’idée (certes critiquée plus haut) d’employabilité, celle-ci apparaît au contraire conduire à poser et examiner une capacité intermédiaire, une « méta-capacité » si l’on veut : la capacité de s’orienter sur le marché du travail et d’en tirer des positions et des ressources permettant de développer les capabilités énumérées ci-dessus.

19 Cette capacité est devenue très importante dans les sociétés développées, sans doute moins dans les sociétés en voie de développement qu’a principalement en vue A. Sen : sociétés marquées par une forte paysannerie indépendante et une forte économie informelle. Au reste, si l’on explore l’entrée « marché du travail » dans l’ouvrage majeur de Sen sur la justice (Sen, 2010), on constate qu’elle correspond à des occurrences peu nombreuses, alors que le marché du travail et le salariat sont les deux institutions centrales des pays développés, conditionnant le mode de vie de la majorité de leur population. De plus, le regard de Sen est souvent critique à l’égard des institutions et organisations qui l’encadrent. Par exemple, il souligne que les syndicats fonctionnent comme des entraves à la concurrence sur le marché du travail, bénéficiant à des « insiders » au détriment des « outsiders » dont il défend la cause et dénonce l’existence précaire et injuste.

20 Il n’y a pas lieu ici d’ouvrir une discussion sur les syndicats, dont la double nature d’institutions régulatrices participant au rééquilibrage du marché du travail dans son ensemble et de lobbys en faveur de groupes protégés est reconnue depuis longtemps. Mais il est utile, croyons-nous, d’insister sur le rôle stratégique joué par l’aptitude de tout un chacun à s’orienter sur le marché du travail et à évoluer en conséquence compte tenu de ses projets tout au long de sa vie professionnelle, qu’on la nomme employabilité ou de tout autre nom.

21 Ce qui frappe alors, c’est la forte dimension collective de cette « méta-capabilité » : outre les processus déjà identifiés au sein des entreprises « capacitantes » ou « incapacitantes », on doit citer le rôle joué par l’ensemble des institutions du marché du travail et des organisations qui agissent sur lui, produisant des contraintes, des opportunités et des leviers dont il est possible (pas toujours) de se saisir.

22 Cette dimension collective est aussi puissamment structurée et inégalitaire, comme on le voit en reprenant, dans une perspective de plus long terme, la conceptualisation de base en termes de segmentation du marché du travail mobilisée par Robert et Sawadogo. En effet, rappelons que l’idée de segmentation, formulée depuis le début des années 1970 et au centre de nombreux travaux, désigne le fait que l’espace de circulation et d’affectation des travailleurs n’est pas homogène, mais est découpé en plusieurs blocs, les uns protégés, qu’il est très difficile et coûteux de rejoindre si on n’en est pas issu d’emblée, les autres non protégés et instables, dans lesquels on peut rester relégué durablement. L’idée de « chaînes de mobilité » illustre ces contraintes, qui ne sont pas analysées comme de simples barrières à la concurrence que l’on pourrait tenter de démanteler, mais comme des logiques de fonctionnement et de mises au travail différentes. Celles-ci partent de l’opposition entre un « marché primaire », qualifié et sécurisé, et un « marché secondaire », peu ou pas qualifié et peu ou pas sécurisé. Elles peuvent évoluer dans le temps, mais ne se réduisent pas à cette opposition, comme en témoigne l’importance des stratégies d’externalisation et de développement de la sous-traitance, générant un sous-segment secondaire particulièrement enfermant et pénalisant pour les travailleurs et les travailleuses le plus souvent peu ou pas qualifié·es.

23 Dans ce cadre, la formation continue des salariés en place relève d’abord de politiques d’entreprises et des tris des salariés qui s’effectuent en leur sein, qu’il s’agisse de formations d’adaptation, de formations préparant, accompagnant ou suivant une promotion, ou encore de formations-récompense. Elle s’articule aux politiques salariales et organisationnelles. La construction sociale de l’employabilité collective et symétriquement de l’inemployabilité collective au sein même des entreprises devient alors un objet central d’étude, comme en témoignent les travaux de Gazier (2021a et 2021b), de Noël et Schmidt (2021) et de Zimmermann (2021).

24 Il est alors possible d’ouvrir la focale tant en amont qu’en aval des quatre séquences examinées par Stephanus et Vero, en insistant, par-delà l’invisibilisation symétrique des tâches et des compétences et la pseudo-naturalisation de l’appétence, sur les conditions organisationnelles des parcours, souvent les anti-carrières, des salariés peu ou pas qualifiés, et en gardant en tête l’évolution de leur pouvoir de négociation, certes faible, mais pas inexistant.

25 Un premier prolongement empirique possible est de replacer les séquences de positions-transitions-formations dans la variété des types d’entreprises et d’organisations employeuses et formatrices (entreprises marchandes, mais aussi non marchandes, on peut penser aux emplois publics et parapublics, mais aussi au secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE)).

26 Une seconde perspective d’enrichissement porte sur la dimension de genre : beaucoup des emplois précaires et non qualifiés sont occupés par les femmes. Au croisement des préférences adaptatives et des « conventions » de travail domestique, une analyse plus fine pourrait rechercher les conditions de visibilisation et d’invisibilisation des tâches et des compétences, payées ou au contraire non payées, et la manière dont les travailleuses concernées les acceptent, les aménagent ou les refusent.

27 Une troisième voie pourrait être de prendre acte des carrières qui juxtaposent ou font se succéder salariat et travail indépendant, pour étudier les contraintes subies dans le cadre du travail indépendant peu ou pas qualifié, notamment dans le cas des plateformes, et les ressources susceptibles d’être mobilisées dans des itinéraires de (re)qualification et/ou de réorientation professionnelle.

28 Un quatrième prolongement, plus normatif, porterait sur les perspectives qui s’ouvrent à l’action syndicale et à l’action publique, dans un contexte marqué à la fois par les suites de la crise sanitaire, la baisse du chômage qui semble avoir atteint un palier en 2023-2024, et les pénuries d’emploi notamment peu ou pas qualifié. On doit y ajouter les mutations du marché du travail qui découlent de la diffusion des outils de l’intelligence artificielle, s’agissant aussi bien des tâches que de la surveillance et des recrutements. Selon les études disponibles (Ernst et al., 2019 ; Simioni et Steiner, 2024), il en résulte des perspectives de développement et des pressions incertaines sur les emplois de différents niveaux de qualification, et des marges de manœuvre pour certains collectifs et/ou certains types d’entreprises.

29 Un objet normatif de politique économique et sociale et de négociation collective apparaît alors. Il généralise l’approche par séquences délibératives, élaborée par Stephanus et Vero, en l’ouvrant sur les étapes de carrière, l’aménagement des transitions personnelles et professionnelles et la lutte contre les irréversibilités au-delà des choix éventuels de formation, liant ceux-ci à la recherche de trajectoires d’émancipation. La création et l’animation de ces zones collectivement négociées et aménagées de respiration, de re-création, pourraient s’associer aux efforts de revalorisation sur le lieu de travail. Elles pourraient infléchir et rendre à la fois plus justes et plus efficaces les efforts des politiques publiques de stimulation individuelle en faveur de la formation, de l’accès à l’emploi et à la qualification. Ces processus séquentiels aménagés dessinent une des voies par lesquelles il serait possible de créer du pouvoir de négociation pour les moins qualifiés.

Bibliographie

    • Dares (2023), « Le compte personnel de formation en 2022. Un léger repli des entrées en formation après le pic de 2021 », Dares Résultats, n° 53, 29 septembre.
    • Ernst E., Merola R., Samaan D. (2019), “The economics of artificial intelligence : Implications for the future of work”, IZA Journal of Labor Policy, vol. 9, n° 1.
    • Gazier B. (2021a), « Introduction Partie 1 : Vers une théorie générale de l’employabilité », in Noël F. et Schmid G. (dir) 2021, Employabilité et mutations industrielles, entre trajectoires individuelles et projet organisationnel, ISTE Editions, pp. 15-22.
    • Gazier B. (2021b), « Employabilité et politiques publiques : un apprentissage centenaire et inachevé », in Noël F. et Schmid G. (dir), Employabilité et mutations industrielles, entre trajectoires individuelles et projet organisationnel, ISTE Editions, pp. 23-34.
    • Noel F. et Schmidt G. (2021), « L’employabilité comme objectif managérial », in Noël F. et Schmid G. (dir) 2021, Employabilité et mutations industrielles, entre trajectoires individuelles et projet organisationnel, ISTE Editions, pp. 35-48.
    • Sen A. (2010), L’idée de justice, Paris, Flammarion.
    • Simioni M. et Steiner Ph. (2024), La société du matching, Paris, Les Presses de Sciences Po, coll. « Essai ».
    • Zimmermann B. (2021), « L’employabilité fondée en capacité : un fait organisationnel total », in Noël F. et Schmid G. (dir) 2021, Employabilité et mutations industrielles, entre trajectoires individuelles et projet organisationnel, ISTE Editions, pp. 51-65.

Notes

  • [1]
    L’idée de préférence adaptative renvoie au processus psychologique par lequel une personne, constatant que certains de ses souhaits sont hors d’atteinte, en vient non seulement à y renoncer, mais aussi à les inverser : dans l’impossibilité d’atteindre les raisins suspendus trop en hauteur, le renard de la fable de Jean de La Fontaine déclare qu’« ils sont verts et bons pour les goujats ».
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