Flux 2023/2 N° 132

Couverture de FLUX1_132

Article de revue

Les déchets post-catastrophes en milieu insulaire : une gestion contrainte par les proximités

Pages 82 à 97

Notes

  • [1]
    Jean-Noël de Grâce (Météo-France Antilles) dans Thalassa « Face aux colères de la mer », mars 2019.
  • [2]
    Météo France, communiqué de presse, septembre 2017.
  • [3]
    Copernicus est un programme développant « des services d’information européens basés sur l’observation de la Terre par satellite, et de données in situ (non spatiales) » (Source : MRN « Le cyclone IRMA – Typologie des bâtiments, sévérités des dommages et dispositif de prévention », 2018).
  • [4]
    Entretien, Préfecture de Saint-Martin, mai 2019.
  • [5]
    Entretien, Préfecture de Saint-Martin, mai 2019.
  • [6]
    Entretien avec le co – gérant de la société Verde, mai 2019.
  • [7]
    Entretien, Préfecture de Saint-Martin, mai 2019.
  • [8]
    Entretien, Association Les Fruits de mer, mai 2019.
  • [9]
    Relative à la gestion des déchets.
  • [10]
    Installation Classée pour la Protection de l’Environnement.
  • [11]
    Entretien avec le Président de l’association Sandy Ground on The Move Insertion, avril 2019.
  • [12]
    Entretien avec le directeur entreprise Terre Mer Transport Terrassement (TMTT), mai 2019.
  • [13]
    Entretien le Secrétaire Général, Sous-préfecture de Saint-Martin et Chef d’unité de la DEAL, mai 2019.
  • [14]
    Entretien avec le Président de l’association Sandy Ground on The Move Insertion, avril 2019.
  • [15]
    Entretien avec le Président de l’association d’insertion AIDS-M, mai 2019.
  • [16]
    Les auteurs s’appuient ici sur des entretiens réalisés auprès de gestionnaires de déchets suite aux inondations de 2002 dans le Gard, de 2018 dans l’Aude, suite au passage de la tempête Xynthia en 2010, sur des entretiens réalisés avec des acteurs nationaux en charge d’intégrer la gestion des déchets post-catastrophes dans leurs actions (ministère, régions, éco-organismes) et sur la lecture de retours d’expériences (Robin des Bois, 2010 ; Robin des Bois, 2018).
  • [17]
    Cette obligation a été inscrite progressivement depuis les années 2010 dans les cahiers des charges de la plupart des éco-organismes lors de leur renouvellement. Elle est traduite comme suit « dès lors que ceux-ci ont été préalablement extraits et triés, et qu’ils ne font pas l’objet d’une contamination chimique ou radioactive » (Extrait du cahier des charges de la filière REP Déchets des éléments d’ameublement).

1 En 2017, l’île de Saint-Martin fut durement affectée par l’ouragan Irma, qualifié de « monstre sans précédent [1] ». Il est venu toucher fortement l’arc antillais le 5 et 6 septembre 2017, avec au cœur de son œil les Petites Antilles. Les impacts de cet ouragan ont été conséquents du fait de fortes pluies (300 mm de précipitations en 48h), de vagues de 8 à 10 m de haut et de rafales enregistrées à plus de 280 km/h. À Saint-Martin, l’intensité moyenne des vents enregistrés a été de 295 km/h, avec des pics atteignant les 360 km/h ; des vents dépassant la plus haute catégorie de l’échelle de Saffir/Simpson [2], la catégorie 5 – correspondant à une vitesse de vents supérieure à 251 km/h. L’ouragan Irma a été qualifié de phénomène majeur. Son passage a conduit à une détérioration des bâtiments et des biens se trouvant à l’intérieur, des infrastructures, du mobilier public, et du milieu naturel. Le programme Copernicus [3] a estimé que 98 % des bâtiments étaient sinistrés, dont 20 % des bâtiments ont été « très endommagés » suite au passage de l’ouragan.

2 Cette crise a révélé des dysfonctionnements importants du réseau de gestion des déchets. Ces dysfonctionnements ne sont pas étonnants puisque la littérature montre que le réseau de gestion des déchets est confronté à des difficultés en période de crise (Brown, Milke, Seville, 2011 ; Zhang et alii, 2019). Les conséquences d’une catastrophe naturelle sur le réseau de gestion des déchets et son fonctionnement sont importantes et diverses (production nouvelle de déchets à gérer, réorganisation du réseau, retard dans le redémarrage du territoire) comme cela a par exemple été montré par Hasset et Handley (2006) après l’ouragan Katrina aux États-Unis ou par Durand, Popescu et D’Ercole (2015) après le séisme de 2010 en Haïti. La gestion des déchets post-catastrophes nécessite souvent le recours à des moyens techniques, humains et spatiaux extérieurs aux territoires impactés. Ces dynamiques de solidarités territoriales, infrastructurelles et d’acteurs sont particulièrement fréquentes entre territoires touchés et territoires épargnés (Beraud, 2013). Les espaces insulaires, de par leur isolement géographique et les difficultés liées au transport qui ne peut être que maritime ou aérien, présentent la particularité d’être moins connectés aux infrastructures de traitement des déchets localisées sur d’autres territoires (Camilleri-Fenech et alii, 2018 ; Eckelman et alii, 2014). La capacité à faire face à une désorganisation importante de leur réseau de gestion des déchets peut donc être questionnée.

3 Cet article se propose de comprendre les logiques de fonctionnement d’un réseau de gestion des déchets suite à une catastrophe climatique : l’ouragan Irma sur l’île de Saint-Martin en 2017. L’insularité et l’isolement de ce territoire viennent exacerber la situation, rendant plus claires les logiques à l’œuvre. Celles-ci relèvent essentiellement d’enjeux territoriaux, organisationnels et sociaux permettant d’analyser les flux, les infrastructures et les acteurs de la gestion des déchets post-catastrophes. Ces enjeux sont par ailleurs mis en avant par la grille des registres de la proximité développée pour la gestion des déchets en situation normale (Bahers, Durand, Beraud, 2017). Nous utiliserons donc cette grille afin de caractériser la gestion des déchets post-catastrophes. Puisque cette gestion est très dépendante de la solidarité territoriale, la méthodologie mise en œuvre ici vise à comprendre, ordonner et hiérarchiser les registres de proximité privilégiés en situation d’urgence dans un milieu insulaire.

4 L’hypothèse est faite que les registres de la proximité guidant la circulation des déchets suite à Irma sont très liés au contexte socio-territorial saint-martinois de la gestion des déchets. Nous montrerons ainsi dans une première partie que l’insularité apparaît comme une contrainte à la gestion des déchets, avant de s’intéresser au fait que la crise est un facteur de modification des registres de proximité. Enfin, nous discuterons la spécificité des registres mobilisés à Saint-Martin au regard d’autres situations post-catastrophes.

5 Le travail de terrain qui nourrit cet article a été réalisé dans le cadre du projet DéPOs (Déchets Post-Ouragans) financé par l’ANR (Agence Nationale de la Recherche). Trois missions de terrain ont été réalisées dans ce cadre : deux missions à Saint-Martin en 2018 (Robin des Bois, 2018) et 2019 (Perez, Popescu, 2020), puis une mission à Marie Galante (Guadeloupe) en 2021 (Ngue Nonga, Poisson-Quinton, 2021). Lors des deux missions à Saint-Martin en 2018 et 2019, 59 entretiens ont été réalisés avec des acteurs institutionnels de Saint-Martin, de la Guadeloupe et de Sint-Marteen (partie néerlandaise de l’île), des acteurs économiques (acteurs de la collecte / du traitement des déchets, acteurs de la construction, du transport de matériaux) et des acteurs de la société civile (associations de protection de l’environnement). Ces entretiens ont été complétés lors de la mission de 2019 par une enquête auprès de 64 habitants qui ont été interrogés sur leur gestion des déchets après le passage de l’ouragan Irma.

L’insularité comme une contrainte à la gestion des déchets

L’organisation de la gestion des déchets à Saint-Martin

6 L’île de Saint-Martin est située dans le nord de l’arc antillais, à 260 km au nord de la Guadeloupe. Elle a la particularité territoriale d’être divisée en deux entités administratives : une partie française « Saint-Martin » et une partie néerlandaise « Sint Maarten » au sud, avec une superficie totale de l’île de 87 km2. La partie française de l’île bénéficie d’une autonomie administrative récente et les institutions locales sont encore en cours de consolidation. La loi du 21 février 2007 donne accès à Saint-Martin, initialement simple commune de la région Guadeloupe, au nouveau statut de Collectivité d’outre-mer (COM). L’île devient officiellement plus autonome et cumule les compétences d’une commune, d’un département et d’une région. Elle a ainsi une marge de manœuvre très grande sur la fiscalité, les transports, le port maritime, le tourisme, l’environnement, l’urbanisme, l’énergie, les services publics ou encore la gestion de crise. C’est cependant toujours le code de l’environnement national qui s’applique à Saint-Martin (contrairement à l’île voisine de Saint-Barthélemy qui dispose de son propre Code de l’environnement). La Collectivité de Saint-Martin est dirigée par un Président et un conseil territorial composé de 23 membres, élus pour cinq ans. Au moment de l’ouragan, en 2017, elle est encore en train de constituer ses équipes d’agents territoriaux [4]. Le poste de directeur/directrice de l’environnement est alors vacant.

7 Un Préfet délégué représente par ailleurs l’État français pour les îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy afin de coordonner les actions au niveau local. La présence de l’État français, en retrait du fait de l’autonomie de l’île entre 2007 et 2017, a été à nouveau renforcée après le passage de l’ouragan Irma.

8 Avant même la catastrophe, la gestion des déchets était incomplète à Saint-Martin. La Direction de l’environnement et du cadre de vie de la Collectivité est en charge de la gestion des déchets ménagers, sous financement direct du budget général de la Collectivité (alors qu’il devrait théoriquement exister une taxe ou une redevance spécifique à la gestion des déchets) [5]. Les déchets des activités économiques doivent quant à eux être gérés et financés directement par les entreprises qui les produisent (tout comme sur le reste du territoire français). Douze opérateurs privés sont en charge de la collecte des déchets pour le compte de la collectivité (cf. figure 1), soit un nombre très important pour un si petit territoire. Cette division des tâches par quartiers correspond à une logique relationnelle entre acteurs du territoire et non à une exigence technique. Il s’agit de permettre à plusieurs entrepreneurs de l’île de bénéficier d’une petite part de ce marché public pour maintenir un équilibre entre eux, sans forcément qu’ils ne soient spécialistes de la gestion des déchets. Cette organisation pose de vraies questions en termes de coordination entre acteurs avec un risque de divergence des modalités de travail de chacun et un manque de moyens techniques et humains spécialisés de chacune de ces entreprises (ne pouvant jouer des économies d’échelle).

Figure 1

Infrastructures de gestion et secteurs de collecte des déchets ménagers en temps normal

Figure 1

Infrastructures de gestion et secteurs de collecte des déchets ménagers en temps normal

Source : Perez, Popescu, 2020. Réalisation : R. Popescu à partir d’un fond de carte BD Topo et de données collectées sur le terrain lors des missions 2018 et 2019 – ANR DéPOs).

9 Au-delà de cette sectorisation, il existe quatre collectes distinctes, toutes en point d’apports volontaires, pour : les ordures ménagères résiduelles (non recyclables), les emballages recyclables, les encombrants et les déchets verts. L’ensemble de ces déchets est évacué vers l’éco-site de Grande-Cayes situé au nord-est de l’île de Saint-Martin, géré au moment de l’ouragan par l’entreprise locale Verde. Ce site est à la fois un centre de regroupement et de transfert des déchets recyclables, un espace de tri en plein air et une installation de stockage des déchets (un centre d’enfouissement). Quelques tonnages de déchets recyclés sont envoyés vers la Guadeloupe, puis souvent vers la métropole pour être valorisés. Une déchetterie existe depuis 2010 au centre de l’espace urbain, avec des difficultés d’accès pour une population assez peu motorisée.

10 Concernant le gisement de déchets, les données recueillies font état de 17 000 tonnes d’ordures ménagères résiduelles produites par an à Saint-Martin [6] et de 35 000 à 38 000 tonnes de déchets accueillies annuellement (hors période de catastrophe) sur le site de Grande-Cayes (incluant donc, au-delà des ordures ménagères résiduelles, les déchets ménagers recyclables et les déchets des entreprises). Tous les acteurs interrogés confirment un taux de recyclage très faible et la persistance de décharges et de dépôts sauvages. Une difficulté majeure existe alors pour savoir à qui revient l’obligation de nettoyer ces dépôts sauvages (responsabilité de la collectivité), nombreux sur l’île, puisqu’ils sont souvent situés dans des zones naturelles (responsabilité de l’État) dont les terrains sont parfois privés (responsabilité des propriétaires).

11 Saint-Martin vit également un fort multiculturalisme (plus de 250 nationalités représentées sur l’île pour seulement 32 000 habitants) [7], complexifiant le rapport aux institutions. Par exemple, concernant les déchets, les communautés haïtiennes et dominicaines auront tendance à réutiliser et à réparer les déchets ; les communautés européennes à trier les recyclables ; les communautés locales saint-martinoises à revendre et acheter des pièces automobiles de seconde main [8]. L’ouragan est donc venu secouer l’ensemble des relations sociales déjà préalablement complexes.

Une organisation de la gestion des déchets spécifiques aux milieux insulaires ?

12 La gestion des déchets dans les petites îles des départements, régions et territoires d’outre-mer français est fortement dépendante de leur insularité et des relations entretenues avec la métropole (Manglou, Rocher, Bahers, 2022). Ces espaces insulaires présentent la particularité d’avoir une économie fortement dépendante des importations et des exportations (Rocher et alii, 2021), s’exprimant de façon exacerbée après une catastrophe naturelle. Ce fonctionnement, hérité de la période coloniale et maintenu par le système économique mondial, les rend fortement dépendants des flux internationaux, ce qui n’est pas sans conséquence pour la gestion des déchets. La région des Caraïbes, dans laquelle se situe notre terrain d’étude, est par ailleurs la région du monde la plus dépendante du tourisme (Singh, Fischer-Kowalski, Chertow, 2020), or cette économie produit elle-même une quantité importante de déchets (Eckelman et alii, 2014 ; Mohee et alii, 2015). Les modes de traitement des déchets favorisés sont leur stockage (mise en décharge) local ou leur exportation vers la France métropolitaine (pour les matières recyclables) (Manglou, Rocher, Bahers, 2022).

13 Au-delà des caractéristiques structurelles de l’organisation économique de ces territoires, Eckelman et alii (2014) analysent les principales difficultés rencontrées par les territoires insulaires dans la gestion de leurs déchets. Ces territoires sont marqués par des contraintes fortes liées au manque de disponibilités foncières, notamment sur les espaces les plus petits, renforcées par des oppositions des populations à l’installation de nouvelles infrastructures de gestion des déchets, afin de préserver les paysages dans un but touristique. Le réseau de gestion des déchets est théoriquement caractérisé par une diversité de points de collecte et de modes de traitement, permettant un traitement le plus approprié selon la nature de chaque déchet. Or, pour que les installations de traitement soient rentables, il faut atteindre une certaine massification des déchets. C’est d’autant plus le cas que l’on rentre finement dans la valorisation de typologies de matières différenciées, dépendant de l’existence d’un marché de reprise (Eckelman et alii, 2014 ; Rocher et alii, 2021). Dans cette économie fortement dépendante des flux internationaux de matières, les coûts de transport restent importants, ce qui entraîne une augmentation du coût du recyclage. Les matières trouvent ainsi rarement des débouchés locaux. L’isolement géographique des îles d’outre-mer est accentué par le lien administratif fortement maintenu avec le système métropolitain de gestion des déchets. Les filières REP (Responsabilité élargie du Producteur), qui structurent la rentabilité économique du recyclage au niveau national, orientent ainsi systématiquement les flux de matériaux recyclables vers la métropole et non vers l’environnement géographique proche (qui serait les Amériques dans le cas des Antilles).

14 L’analyse de la gestion des déchets post-catastrophes dans les territoires français d’outre-mer éloignés de la métropole met donc d’autant plus en avant le rapport ambigu à la notion de proximité sous ses différentes modalités. Cette entrée sera appliquée pour la suite de cet article.

Les registres de proximité de la gestion des déchets contraints par l’insularité

15 La question de la proximité dans la gestion des déchets peut être appréhendée de plusieurs manières. Depuis les années 1990, le principe de proximité est fixé dans la réglementation comme devant être mis en œuvre par les politiques de gestion des déchets, au nom du rapprochement entre le territoire de production et le territoire de traitement (Bahers, Durand, Beraud, 2017). Cette proximité s’est notamment matérialisée dans les échelles de planification de la gestion des déchets (les départements en 1992, puis les régions à partir de 2015 – Loi NOTRE) : c’est la proximité institutionnelle ou politico-administrative.

16 Cette proximité peut également être appréhendée selon la perception des acteurs d’un territoire, souvent mobilisée dans les discours politiques ou revendicatifs autour des déchets. Cirelli, Maccaglia et Melé (2017) définissent ainsi quatre registres de mobilisation de la proximité que nous pourrions ici qualifier de registres cognitifs de la proximité : la proximité institutionnelle (correspondant à la définition précédente) ; la proximité fonctionnelle c’est-à-dire celle de la circulation effective des déchets ; la proximité contestée qui est mobilisée lorsque des riverains s’opposent à l’arrivée d’une nouvelle installation ; et enfin, la proximité militante qui correspond à des actions menées par les habitants pour agir sur leur production de déchets. Ces registres constituent une pluralité de manières de penser et de mobiliser la proximité qui cohabitent et se combinent au sein des territoires.

17 Au-delà de ces registres cognitifs de la proximité, il est possible de faire une analyse plus fine de la proximité fonctionnelle (décrite précédemment) relative à la circulation des flux de déchets. Ainsi, Bahers, Durand et Beraud (2017) ont adapté, pour les déchets, la typologie des proximités établie par l’école française de la proximité (Gilly, Torre, 2000 par exemple). Il s’agit de décrire, à travers ces registres, les mécanismes expliquant la circulation des flux de déchets sur un territoire, que nous pourrons ici qualifier de registres métaboliques de la proximité. La circulation de ces flux est ainsi influencée par plusieurs critères, à la fois physiques, géographiques, mais aussi relationnels ou de jeux d’acteurs… Ainsi 6 registres de proximité sont mobilisés dans ces travaux, dont 5 peuvent correspondre à des subdivisions de la proximité fonctionnelle établie précédemment (cf. Tableau n° 1).

Tableau 1

Les registres métaboliques de la proximité

Registres métaboliques de la proximitéDescription des registres métaboliques de la proximitéLien avec les registres cognitifs de la proximité
Proximité spatialeDistance physique entre lieux de production du déchet et lieux de leur traitement finalProximité fonctionnelle
Proximité relationnelleAppartenance à un réseau d’interconnaissances professionnelles ou personnelles d’acteurs en charge de la gestion des déchets.
Proximité industrielleEffet de filières industrielles ou de groupement d’entreprises.
Proximité environnementaleMise en avant d’une réduction de l’empreinte environnementale dans le traitement des déchets, nécessitant parfois de parcourir de longues distances de façon contre-intuitive.
Proximité socio-économiquePriorité donnée aux acteurs locaux dans un but de développement socio-économique.
Proximité politico-administrativeObjectif de rester dans le cadre territorial administratif des institutions ayant la compétence de gestion des déchets.Proximité institutionnelle

Les registres métaboliques de la proximité

Source : auteurs, d’après Bahers, Durand, Beraud, 2017

18 En dehors des situations de crise, la gestion des déchets à Saint-Martin est ainsi régie par plusieurs proximités divergentes. Les proximités politico-administratives et relationnelles sont ainsi fortement mobilisées. La première puisque la dépendance institutionnelle à la France dirige toujours de nombreux flux de déchets vers la Guadeloupe ou la métropole. La deuxième puisque sur le terrain, les déchets sont collectés par 12 entreprises différentes, profitant des relations interpersonnelles entre les acteurs locaux. Cette modalité de gestion peut toutefois également s’apparenter à une proximité socio-économique, visant, à travers les marchés de gestion des déchets, à accompagner le développement économique des entreprises déjà en place sur l’île plutôt que de faire venir une véritable entreprise spécialiste de la gestion des déchets de l’extérieur.

19 À l’inverse, les proximités spatiales et environnementales ont très peu lieu d’être. L’absence presque totale de connexion rudologique [9] entre Saint-Martin et la partie néerlandaise de l’île (exception faite des Véhicules hors d’usages) ainsi qu’avec l’ensemble des territoires proches des Caraïbes et des Amériques annihile toute possibilité de proximité spatiale. La proximité environnementale n’est également que très peu négociée au vu de la très faible valorisation des déchets. L’analyse des registres de proximité de la gestion des déchets à Saint-Martin permet de révéler et d’anticiper les modalités qui seront mises en œuvre pour une gestion dégradée suite à l’ouragan Irma en 2017.

La crise comme facteur de modification des registres de proximité

Adaptabilité du réseau – la proximité spatiale comme solution d’urgence

20 L’ouragan Irma est venu bouleverser totalement la gestion des déchets de l’île. Ce fut d’abord le cas d’un point de vue quantitatif. 99 000 tonnes de déchets ont ainsi été acheminées vers l’éco-site de l’entreprise Verde sur les 10 mois qui ont suivi la catastrophe (État français, 2018), multipliant par deux la production annuelle de déchets du territoire. Le tableau n° 2 présente l’évolution des tonnages de déchets traités sur le site de Grande-Cayes entre 2015 et 2018.

Tableau 2

Évolution des déchets traités par l’éco-site de Grandes Cayes

Tableau 2
Description

Année 2015 2016 2017 2018 Quantités de déchets traités par l’éco-site de Grande-Cayes 34 155 tonnes (Source : IREP) 42 311 tonnes (Source : IREP) 83 760 tonnes (Source : IREP) 67 184 tonnes (Source : Verde)

Évolution des déchets traités par l’éco-site de Grandes Cayes

Source : auteurs

21 Ces déchets contenaient notamment des tôles, des déchets verts, des gravats ou des encombrants, mais aussi des déchets électroniques, des véhicules hors d’usages, des déchets d’ameublement ou encore des bateaux de plaisance endommagés. Notre enquête de terrain a permis de montrer que 66 % des habitants interrogés ont évacué les déchets et débris de leur logement en moins de 14 jours, puisqu’ils avaient rapidement besoin de revivre dans cet espace. C’est à ce moment que l’essentiel des déchets a été évacué sur la voie publique. Il est à noter cependant que la majorité des habitants interrogés sont issus de quartiers populaires et habitent toute l’année à Saint-Martin (quartiers de Sandy Ground, Grand Case et Orléans). Des dynamiques très différentes auraient pu être observées dans des quartiers plus aisés où la présence de résidences secondaires est plus importante (quartiers de Baie Orientale et Terres Basses). Une deuxième vague de production de déchets s’est déroulée dans les deux ans qui ont suivi la catastrophe. Elle était liée soit au nettoyage tardif de certains logements en raison de l’absence des propriétaires pour lesquels il ne s’agit que d’une résidence secondaire, ou de soucis d’assurance ; soit à la phase de reconstruction. Au-delà de la production de déchets post-ouragans, le gisement de déchets ménagers et assimilés a, à l’inverse, évolué à la baisse pendant plusieurs mois suite au passage de l’ouragan Irma : départ d’habitants, baisse de la fréquentation touristique (Popescu, Beraud, Barroca, 2021 ; Vinet et alii, 2020).

22 La circulation des déchets sur le territoire saint-martinois a également évolué. L’ouragan a fortement affecté le réseau à travers la détérioration des moyens de collecte (points d’apports volontaires), des moyens de traitement (broyeur, presse à ferraille, presse à balle) et l’indisponibilité de la route menant au site de Grande-Cayes (Robin des bois, 2018). Le réseau de gestion des déchets a donc dû se réorganiser.

23 Les déchets produits par la catastrophe ont dans un premier temps été gérés spontanément par les acteurs du territoire. Les entreprises du BTP ont, du fait des moyens matériels dont elles disposaient (camions, engins de chantier), commencé à déblayer les routes le jour même de la catastrophe. Leur action immédiate, sans attendre de consignes des autorités, a été possible grâce à la mémoire de la gestion des déchets de l’ouragan Luis en 1995. Elle reflète la culture du risque qui peut perdurer chez ces acteurs. La solidarité et l’entraide ont dans un premier temps été les moteurs pour intervenir.

24 Une fois l’urgence des premiers jours passée et les routes déblayées, les acteurs en présence ont commencé à planifier l’évacuation des déchets rassemblés dans des aires de dépose au bord des routes. Créées d’abord de manière spontanée par la population du fait du besoin de trouver un espace proche de leur habitation pour déposer les déchets, ces centaines d’aires de dépose ont été ensuite intégrées dans le système de collecte. Les déchets ont ainsi été transférés des aires de dépose vers les 11 sites de transit par les militaires ou par les entreprises du territoire. Ces sites de transit correspondaient à des structures avalisées et utilisées par les acteurs publics, quoique mises en œuvre spontanément, sans prise en compte des règles sanitaires de type ICPE [10]. S’appuyer sur de tels sites en situation de crise est recommandé par le seul guide de gestion des déchets post-catastrophes existant en France (Cerema, 2019) afin de procéder par étape face à l’urgence. Depuis ces sites, les déchets collectés ont ensuite été envoyés vers l’installation de stockage des déchets de Grande-Cayes, doublant sa superficie en quelques mois.

25 Sur les aires de dépose, les déchets ont eu le temps de se dégrader (pour les véhicules par exemple) amenant davantage de complications en termes de dépollution et de traitement postérieur. Par ailleurs, le nettoyage de certaines aires de dépose fut compliqué du fait du manque d’accessibilité ; ces espaces ont eu tendance à se pérenniser et à devenir des décharges sauvages, comme le Santal Hôtel sur la rue Lady Fish à Sandy Ground [11]. Au fur et à mesure de la résorption progressive des dépôts sauvages de déchets post-catastrophes, créés par les habitants ou les entreprises de l’île, d’autres apparaissaient, pas toujours au même endroit, alimentés par le processus de reconstruction (cf. figure 2).

Figure 2

Espaces de stockage de déchets post Irma pendant les mois d’octobre, novembre et décembre 2017

Figure 2

Espaces de stockage de déchets post Irma pendant les mois d’octobre, novembre et décembre 2017

Source : Perez, Popescu, 2020. Réalisation : R. Popescu à partir d’un fond de carte BD Topo et de données collectées sur le terrain lors des missions 2018 et 2019 ANR – DéPOs

26 Comme spécifié précédemment, dans les premières semaines après le passage de l’ouragan Irma, le réseau de gestion des déchets saint-martinois a fait face à une indisponibilité de certains de ses moyens techniques, à une impraticabilité de certaines routes et à une évolution du gisement de déchets. Ces évolutions ont nécessité une réorganisation du fonctionnement du réseau et de la circulation des flux des déchets. L’un des exemples les plus significatifs de cette dynamique est la création d’aires de dépose à proximité des lieux de production des déchets post-ouragans, puis de sites de transit comme deuxième niveau de stockage temporaire. Ces différentes zones de stockage plus ou moins spontanées, contrôlées et organisées jouent le rôle central d’espaces tampons entre les lieux endommagés (habitations, commerces, espaces publics, etc.) qui doivent être nettoyés d’une part, et l’infrastructure de traitement qui se retrouve saturée d’autre part. Dans l’urgence, la réorganisation de la circulation des flux de déchets s’est faite selon une logique de proximité spatiale.

27 La proximité spatiale a également joué un rôle dans l’évacuation de certains flux de déchets. Les filières formelles de recyclage étant logistiquement difficilement accessibles de l’île de Saint-Martin, puisque dépendantes des filières REP de France métropolitaine, la proximité industrielle n’a pas réellement joué suite à l’ouragan Irma (malgré l’obligation légale théorique des filières REP, et des éco-organismes qui les pilotent, d’intervenir également sur ces territoires). Certaines filières de recyclage, pour des matériaux dont la valorisation revêt une valeur économique en soi, se sont alors mises en place de façon informelle. La mise en place de filières informelles correspond à une réorganisation guidée par la proximité spatiale, au détriment d’une proximité industrielle ici trop complexe et coûteuse à établir. C’est le cas des matériaux de construction (tôle et bois notamment), spontanément récupérés par les communautés haïtiennes et dominicaines pour être envoyés vers leurs pays, qui avaient déjà cette habitude avant même le passage de l’ouragan Irma. Nos entretiens montrent qu’après Irma, le nombre de conteneurs expédiés vers ces pays a fortement augmenté, indiquant donc l’existence de filières informelles. Les Véhicules Hors d’Usages endommagés par Irma ont également largement transité depuis Saint-Barthélemy (également affecté par l’ouragan) afin d’alimenter Saint-Martin en pièces détachées, ou à destination de la partie néerlandaise de l’île pour alimenter les filières informelles de recyclage.

Réorganisation des acteurs : quand la proximité relationnelle précède la proximité politico-administrative

28 Afin de coordonner le nettoiement de l’île, la collectivité, vite submergée, a fait appel à un ancien responsable local ayant géré la crise précédente de 1995 : M. Fisher. Dirigeant d’entreprises immobilières à Saint-Martin et en Guadeloupe au moment d’Irma, il était, en 1995, directeur de la SEMSAMAR, Société d’Économie Mixte en charge de l’aménagement et du logement à Saint-Martin. Cet acteur clef, quoique non officiellement compétent pour gérer la crise en 2017, est revenu dans le jeu d’acteur par manque de pilote sur place afin de coordonner les actions en cours (figure 3). C’est d’ailleurs la SEMSAMAR qui a opéré la gestion des 5 premiers millions d’euros dédiés à la gestion de crise, à compter du 8 septembre 2017, pour le compte de la collectivité de Saint-Martin. La SEMSAMAR était en effet la structure la plus à même de gérer un tel budget de par ses moyens humains et l’habitude qu’elle a de disposer de budgets publics conséquents.

Figure 3

Organisation des acteurs de la gestion des déchets suite à l’ouragan Irma en 2017 à Saint-Martin

Figure 3

Organisation des acteurs de la gestion des déchets suite à l’ouragan Irma en 2017 à Saint-Martin

Source : réalisation J. Perez à partir de données collectées sur le terrain en 2019 – ANR DéPOs

29 La SEMSAMAR, soutenue par l’arrivée progressive des services de l’État, a ainsi rapidement coordonné les actions des entreprises du BTP, afin qu’elles se répartissent le territoire d’interventions pour le déblaiement et la collecte des déchets. Chaque entreprise a alors défini un site de transit (figure 2), lui permettant de stocker les déchets collectés avant que ceux-ci ne soient évacués. Le choix de ces sites a par la suite été avalisé par la collectivité et par la préfecture. Si l’intervention forte d’acteurs privés (entreprises du BTP) est classique dans la gestion des déchets post-catastrophes, leur coordination par un acteur tel que la SEMSAMAR est plus spécifique au territoire de Saint-Martin.

30 Le directeur de l’entreprise locale de travaux publics TMTT (Terre, Mer, Transport, Terrassement) s’est par exemple dans un premier temps rendu au siège de son entreprise situé dans le quartier de Sandy Ground, où il avait déjà préparé en amont son véhicule avec des machettes, des tronçonneuses, des EPI (Équipements Personnels de Protection : gants, casques, chaussures de sécurité…) et de l’eau. Il a constaté les dégâts sur son parc de machines, a regroupé ses employés et a commencé l’ouverture des axes routiers : le pont de Sandy Ground, le bord de mer de Marigot jusqu’aux institutions publiques de Marigot et l’hôpital de Concordia. Il a eu besoin de 3 jours pour déblayer son secteur, avec la difficulté d’un afflux permanent de déchets sur les voies publiques, lié au nettoyage effectué par les habitants, ce qui lui demandait de repasser sans cesse sur le même secteur afin d’empêcher un nouveau blocage des routes [12].

31 Ce n’est que dans un deuxième temps, quelques jours après la catastrophe, qu’une cellule de crise, pilotée par les autorités publiques, a été opérationnelle sur le terrain, pour répondre techniquement et humainement à la catastrophe et rétablir au plus vite le fonctionnement « normal » du territoire. Le plan ORSEC (Organisation de la sécurité civile) a été déclenché, s’appuyant sur le Centre Opérationnel Zonal (COZ) et l’État-Major Interministériel de la Zone Antilles (E.M.I.Z.A.), sous la responsabilité du Préfet de la zone de défense Antilles-Guyane basé en Martinique. Des moyens militaires et de sécurité civile ont ainsi convergé vers l’île dans les jours qui ont suivi la catastrophe. L’un des objectifs était de diriger et de suivre les actions de nettoyage des déchets sur le territoire, pour déblayer efficacement les axes routiers, rendre praticable l’accès des secours vers les sinistrés, puis assurer un traitement (dépollution, stockage voire recyclage) approprié de ces matériaux. La responsabilité de la gestion des déchets post-ouragans fut ainsi partagée entre la collectivité et la préfecture. Si la collectivité a la responsabilité du nettoyage et de la propreté de l’île, le corps préfectoral est chargé de coordonner et de définir les priorités post-crise [13]. La collectivité de Saint-Martin étant jugée comme insuffisamment outillée pour faire face aux crises majeures, la préfecture a établi la nécessité de déblayer les principaux axes de circulation afin de permettre l’acheminement des secours comme l’une des priorités. Une fois les routes dégagées, c’est à la collectivité de prendre en charge le nettoyage de l’île.

32 Pour effectuer ces différents déplacements de déchets, la préfecture a réquisitionné les véhicules et les engins lourds des entreprises saint-martinoises, mis à la disposition de l’armée, pour le déblayage des principales routes. Certaines entreprises ont refusé que les militaires conduisent leurs véhicules et ont mobilisé leurs propres employés afin de limiter le risque d’endommagement et d’usure de leurs engins. Cette réquisition a créé beaucoup de mécontentement au sein des entreprises puisqu’elles estimaient avoir déjà commencé le travail sans l’aide de l’armée. La Préfecture a également rapidement imposé une sectorisation commune à tous les services de secours pour qu’ils aient la même appréhension du territoire et que les acteurs de terrains puissent communiquer plus facilement à l’échelle d’un territoire donné, allant parfois à l’encontre des découpages déjà opérés entre les entreprises elles-mêmes.

33 La place prise spontanément par les entreprises du BTP pour déblayer les routes a donné lieu à des tensions plus vives une fois que les militaires venus de métropole ont commencé à prendre le relais pour assurer un travail similaire. Une négociation âpre a ainsi eu lieu entre les services de l’État, la collectivité et les entreprises, pour savoir qui assurerait le service de collecte et selon quelles conditions financières. Les entreprises ont été jusqu’à boycotter toute activité de collecte des déchets pendant deux semaines fin 2017, afin de faire pression pour obtenir des tarifs qu’elles jugeaient correspondre à leurs frais réels et à leur implication pour le collectif. La négociation a eu lieu plusieurs semaines après que les entreprises aient commencé le travail, une fois qu’elles s’étaient déjà partagées le territoire et les sites de transit. La marge de négociation des acteurs publics était alors très limitée. L’armée et les entreprises extérieures à Saint-Martin ne furent plus les bienvenues puisqu’accusées de récupérer une activité essentielle aux entreprises locales. Les acteurs locaux souhaitaient en effet faire de l’enlèvement des déchets et de la reconstruction, un vecteur de redémarrage économique. Le manque de planification et de préparation de la gestion des déchets post-ouragans par les acteurs institutionnels a laissé place à une position monopolistique des entreprises locales du BTP pour gérer les déchets à des conditions qui leur étaient favorables. Le prix de la prestation, ayant été au final fixé en fonction du nombre de rotations (et non au tonnage comme c’est traditionnellement le cas dans la gestion des déchets), a ainsi engendré quelques effets pervers telle la circulation de camions non totalement remplis. Ces négociations s’apparentent à comprendre « les ressorts informels du gouvernement local », mécanismes régulièrement observés dans la gestion des déchets (Maccaglia, 2015).

34 À Saint-Martin, les habitants, via les associations de quartiers, ont également été mobilisés par la collectivité pour participer aux opérations de nettoyage. Par exemple l’association Sandy Ground on the Move est allée nettoyer le quartier de Marigot alors qu’elle est implantée à Sandy Ground [14]. D’autres associations ont pu choisir leurs secteurs, tel que Aids qui, avec une équipe de 10 personnes, a participé au nettoyage de Concordia, Sandy Ground et Hope Estate [15].

35 Le fonctionnement de l’ensemble de ces dispositifs techniques, territoriaux et de jeux d’acteurs met en évidence le rôle important joué par deux registres de proximités : la proximité relationnelle et la proximité politico-administrative. L’appartenance de l’île de Saint-Martin à la France a ainsi contribué à la mise en place de mécanismes de solidarité (mise à disposition de moyens techniques, humains et financiers) avec la Guadeloupe et la métropole, alors même que la distance spatiale est très importante. À l’inverse, les collaborations avec la partie néerlandaise de l’île de Saint-Martin (Sint Maarten) ont été quasiment absentes sur les déchets, alors que les deux parties de l’île bénéficient d’infrastructures de gestion des déchets autonomes (Robin des bois, 2018 ; Perez, Popescu, 2020). Force est de constater que les différences de statuts légaux des deux parties de l’île et leur dépendance à une administration extérieure ont limité cette collaboration.

36 Au-delà de cette proximité politico-administrative dont les effets sur la réorganisation sont contrastés, les enquêtes de terrain montrent que la proximité relationnelle, c’est-à-dire les relations d’interconnaissance entre les acteurs publics et privés de différents secteurs, a très fortement influencé la réorganisation du service de gestion des déchets en période post Irma. C’est cette proximité relationnelle qui a joué dans un premier temps, dans la réponse immédiate à la crise. La mobilisation des agriculteurs, des entrepreneurs du BTP, des habitants épargnés pour les opérations de nettoyage et de collecte des déchets est une situation régulièrement observée à travers le monde (Durand, Popescu, D’Ercole, 2015). Dans le contexte saint-martinois, cette implication d’acteurs extérieurs va au-delà : la SEMSAMAR et des acteurs privés (entreprises du BTP) intervenants en dehors du secteur des déchets n’ont pas seulement agi comme prestataires pour la collectivité, ils ont réellement planifié et coordonné les actions de gestion des déchets post-catastrophes (localisation des sites de transit, découpage et attribution territoriale, etc.), venant ainsi se substituer aux acteurs publics légalement en charge de la gestion des déchets et à la faiblesse de la proximité politico-administrative. Les 12 entreprises assurant la gestion des déchets avant la catastrophe n’ont toutefois pas totalement disparu du paysage institutionnel, puisque leurs salariés ont prêté main-forte aux entreprises du BTP durant les premières semaines de la crise. Le service normal de collecte des déchets ménagers a repris un mois après le passage d’Irma.

Importance des registres de proximité préexistants pour la gestion des déchets post-catastrophes à Saint-Martin

Une évolution des registres de proximité sur une double temporalité

37 Le passage de l’ouragan Irma sur l’île de Saint-Martin fait basculer le territoire dans une phase de crise, c’est-à-dire une période marquée par une désorganisation « plus ou moins longue, plus ou moins brutale, qui traduit la rupture d’un équilibre, stable ou instable » (Reghezza-Zitt, 2019, p. 7). Cette période de crise est caractérisée par différentes phases en fonction de l’évolution des perturbations du territoire, de la progression du relèvement, de l’arrivée de nouvelles perturbations. Moatty, Gaillard et Vinet montrent ainsi que les différentes phases ne se succèdent pas les unes aux autres, mais se chevauchent, qu’il n’y a pas de ruptures franches entre chacune d’elles (Moatty, Gaillard, Vinet, 2017). Dans le cadre de cet article, nous nous appuierons sur la catégorisation opérée par Brown, Milke et Seville (2011) spécifique aux opérations de gestion des déchets post-catastrophes : une première phase d’urgence (déblaiement des routes, rétablissement des infrastructures vitales, nettoyage des maisons pour retour des habitants), une phase de récupération (mise en place des filières de gestion des déchets issus du nettoyage et de la démolition) et une phase de reconstruction (gestion des déchets issus de la reconstruction).

38 Dans le travail de terrain que nous avons opéré, nous avons observé les dynamiques de recompositions du service de gestion des déchets principalement lors des deux premières phases (urgence et récupération). Les réorganisations opérées se font selon des registres de proximités différents suivant ces deux phases (cf. Tableau 3).

Tableau 3

Évolution des registres de proximité guidant la reconfiguration du réseau post-crise de gestion des déchets

Gestion de l’urgenceRécupération
Saint-Martin suite à l’ouragan Irma 2017Proximité spatiale
Proximité relationnelle
Proximité spatiale
Proximité relationnelle
Proximité socio-économique
(Proximité politico-administrative)
Autres territoires métropolitains[16]Proximité spatiale
Proximité relationnelle
Proximité industrielle
Proximité environnementale
Proximité politico-administrative

Évolution des registres de proximité guidant la reconfiguration du réseau post-crise de gestion des déchets

Source : auteurs

39 Dans une première phase de réorganisation, dans l’urgence, ce sont les proximités spatiales et relationnelles qui prennent le pas sur toutes les autres. Une solidarité locale se met en œuvre se basant sur les relations interpersonnelles préexistantes à la crise. C’est ainsi que les acteurs locaux en capacité matérielle d’agir (les entreprises du BTP notamment) se chargent des premières opérations. Cette proximité relationnelle est doublée, dans cette première étape, d’une proximité spatiale où chaque entreprise se charge de nettoyer un périmètre situé proche de chez elle, puis d’identifier des aires de dépose à proximité.

40 Cette dynamique de réorganisation suivant des logiques de proximités spatiales et relationnelles s’observe également sur d’autres territoires sinistrés. Dans l’urgence, les premières actions se concentrent autour du nettoyage. Des points de regroupement des déchets sont mis en place à proximité des logements. Les retours d’expérience montrent les dynamiques nombreuses de solidarité de la part de la population, d’agriculteurs, d’entrepreneurs. Cette capacité de réorganisation du réseau a également été observée dans d’autres situations de changements économiques, sociaux, techniques plus ou moins rapides qu’il s’agisse de crises environnementales ou économiques (Desvaux, 2019). Le réseau de gestion des déchets a en effet une capacité forte à se réorganiser en fonction d’un changement de nature des déchets, d’une indisponibilité de certaines infrastructures de collecte ou de traitement, ou de modification dans les pratiques des producteurs ou des gestionnaires de déchets. Il est considéré comme un « réseau mou » (Debout, 2012). Le réseau de gestion des déchets, à la différence d’autres réseaux socio-techniques, n’est pas structuré par une infrastructure linéaire fixe (à l’exception des réseaux de collecte enterrés, très rares) (Prost, Le Gauffre, 1997). Il s’organise autour de points de pré-collecte, de collecte, de zones de regroupement (centre de transferts, déchetteries), de sites de traitement disséminés sur le territoire et d’acteurs parfois nombreux en charge de leur gestion. La diffusion de ces points sur le territoire permet une certaine flexibilité à la circulation des flux.

41 Dans un second temps, c’est la proximité politico-administrative qui devrait prendre le pas afin d’organiser la gestion des déchets à une échelle de solidarité plus large. Beraud (2013) montre ainsi le rôle joué par les dynamiques de solidarité territoriale entre territoire sinistré et territoire épargné avec des échanges de déchets pour absorber les quantités produites. Au-delà, en France, la collecte et le traitement des déchets recyclage en situation de catastrophe naturelle est obligatoire pour la plupart des éco-organismes en charge de la mise en œuvre des filières REP [17]. Or, cette proximité politico-administrative peine à se mettre en place en 2017 à Saint-Martin, du fait du processus d’autonomie territoriale en cours et de la phase alors à l’œuvre de distanciation des acteurs étatiques. La proximité industrielle qui devrait également prendre le dessus sur la proximité spatiale dans le choix des exutoires pour les déchets (remplacer le fait de simplement déposer les déchets au plus proche par le fait de les envoyer dans des infrastructures plus lointaines afin de les dépolluer et/ou de les valoriser) ne se met pas non plus réellement en œuvre à Saint-Martin, faute de relations logistiques et institutionnelles établies avant la crise avec les filières REP. Quoiqu’il y ait eu des tentatives d’avancer vers cette deuxième étape du régime de proximité post-catastrophe insulaire en 2017 à Saint-Martin (reprise en main par l’État de certaines activités), celle-ci n’a pas complètement abouti par manque d’antériorité des processus de gestion et de valorisation des déchets. L’absence de proximité environnementale relève des mêmes ressorts de difficulté d’accès aux filières (métropolitaines comme antillaises) de recyclage.

42 Les difficultés rencontrées par le territoire saint-martinois sont toutefois également liées aux caractéristiques d’une gestion des déchets en milieu insulaire présentées précédemment (paragraphe 1.2) : éloignement des installations de valorisation des déchets recyclables et des déchets dangereux, coupure administrative avec les territoires les plus proches de la Caraïbe au profit de la métropole ou de la Guadeloupe, petite taille de l’île et donc du bassin de valorisation des matières, dépendance au tourisme et aux activités d’importation et d’exportation empêchant le développement d’une économie locale de recyclage. L’éco-site de Grande-Cayes a par exemple dû attendre 18 mois pour recevoir une nouvelle presse à ferraille, machine indispensable aux opérations de traitement. Au-delà, l’île de Saint-Martin, malgré son autonomie renforcée depuis 2007, était encore fortement liée à la Guadeloupe en 2017, la mettant dans une situation de double insularité : insularité physique de par son statut d’île, mais également dépendance administrative et technique à une autre île, située à près de 6h de bateau.

Intégrer les incertitudes pour anticiper les difficultés de gestion ?

43 La description des difficultés à agir sur le terrain permet de s‘interroger sur la place que le réseau de gestion des déchets peut avoir au sein des « infrastructures critiques » du territoire (Galland, 2010), ou du moins de le considérer comme une « ressource de la gestion de crise » (Metzger et alii, 2013) à part entière. Le réseau de gestion n’est pas considéré comme une infrastructure vitale ou critique à la différence d’autres réseaux sociotechniques, comme l’adduction d’eau potable, l’assainissement ou l’approvisionnement en électricité. De fait, les gestionnaires de déchets échappent à certaines obligations de productions de plan de continuité d’activité et les déchets sont souvent absents de l’imaginaire des acteurs de la gestion de crise.

44 Des travaux antérieurs (Barroca, Serre, 2013) ont montré que, dans une situation post-catastrophe, cette capacité d’adaptation du réseau dépend de différents facteurs : sa capacité à identifier en amont le gisement potentiel de déchets produits par la catastrophe, sa capacité à faire face en mobilisant des ressources internes, sa capacité à réduire ses missions, sa capacité à mobiliser des ressources extérieures. Parmi ces quatre leviers, pour le réseau déchets, la littérature scientifique, les retours d’expériences et les guides de gestion mettent en évidence l’importance de la connaissance du gisement des déchets pour pouvoir anticiper au maximum ces dysfonctionnements (EPA, 2008 ; Brown, Milke, Seville, 2011 ; Gabrielli et alii, 2018 ; CEREMA, 2019). Or, cette capacité à estimer le gisement potentiel des déchets post-catastrophes (en amont ou très rapidement après la catastrophe) reste l’une des difficultés à lever (Zhang et alii, 2019, Marchesini, Beraud, Barroca, 2021). Elle peut être considérée comme « un inconnu connu » (Reghezza-Zitt, 2019). L’autrice montre ainsi que plusieurs types d’incertitudes sont susceptibles de perturber la prise de décision et l’anticipation lors de crises. L’inconnu connu en est une : cette catégorie renvoie à ce « qu’on ignore par manque de données ou d’outils pour récolter et/ou traiter ces données. L’inconnu peut résulter soit d’un déficit de connaissances, soit d’une surabondance de connaissances » (Reghezza-Zitt, 2019, p. 14). Or, la quantité de déchets qui sera produite à la suite d’un ouragan ne peut pas être anticipée de manière précise. Les méthodes permettant d’estimer les gisements potentiels de déchets post-ouragans avant la crise sont peu précises, ne permettent pas ou mal de déterminer les types de déchets produits (Marchesini, Beraud, Barroca, 2021). Les caractéristiques intrinsèques de l’aléa, l’imprédictibilité de l’évolution de son intensité, l’incertitude de sa trajectoire et donc des dommages potentiels renforcent les difficultés à anticiper les dimensions socio-économiques des territoires impactés (November et alii, 2020).

45 À l’inverse du gisement de déchets, inconnu connu des gestionnaires de crise, les défaillances matérielles et humaines du réseau constituent des « imprévus-connus » (Reghezza-Zitt, 2019). La gestion de crise consiste à anticiper ces défaillances. Elles sont donc plus facilement intégrables à une planification de la gestion de crise qui permettrait de répondre à certaines difficultés rencontrées (désorganisation de la collecte des déchets, encombrement de l’éco-site de Grande-Cayes, dépôts sauvages non résorbés…). La collectivité de Saint-Martin s’attache par exemple à répondre aux exigences réglementaires qui l’oblige à réaliser un Plan régional de prévention et de gestion des déchets. Un tel plan doit intégrer un volet « déchets issus de situations exceptionnelles » qui, nous pouvons l’imaginer, s’appuiera sur les expériences de l’ouragan Irma. Ces plans doivent notamment identifier des zones de stockage temporaire pour les déchets issus de situations exceptionnelles.

46 Cependant, au-delà de la planification, ce que montre la crise Irma est que les réorganisations sont en partie dépendantes des conditions préexistantes du réseau de gestion des déchets : un éloignement physique des installations de traitement des déchets recyclables, une faible présence des filières REP. Cette situation en période « normale » est similaire à plusieurs autres territoires des outre-mer comme le montre le rapport d’information publié mi-décembre 2022 (Jourda, Mallet, 2022). Pour y faire face, le développement d’une circulation des flux de déchets s’appuyant sur des proximités industrielles, environnementales et spatiales est prôné, soit en déployant massivement les filières REP sur ces territoires et en adaptant leur fonctionnement, soit en s’articulant aux filières régionales (partie néerlandaise de l’île, Caraïbes ou Amériques pour Saint-Martin) de traitement des déchets s’extrayant du cadre métropolitain.

Conclusion

47 La gestion des déchets a longtemps semblé être un élément secondaire de la réaction face aux crises puisque ne présentant pas un risque immédiat pour les vies humaines. Ce constat est remis en cause depuis plusieurs années, montrant qu’ils ont un impact notable dans le retard que peuvent prendre les secours (obstruant les voies de communication), mais surtout une forte incidence sur le redémarrage du territoire. La question des déchets post-catastrophes fait donc l’objet de préoccupations scientifiques et opérationnelles aujourd’hui plus marquées. C’est ainsi que les opérateurs de la gestion des déchets (collectivités locales et organisateurs des filières de Responsabilité élargie du Producteur) et ceux de la planification des déchets (les régions) se sont vu confier un rôle officiel en cas de catastrophes. Pour autant, les acteurs intervenant réellement sur le terrain sont bien différents. Il s’agit toujours majoritairement des acteurs de la gestion de crise (services de l’État) et d’acteurs privés (entreprise du BTP) possédant les moyens d’action. Ce constat est d’autant plus vrai dans un contexte d’isolement insulaire où les moyens des gestionnaires de déchets sont d’autant plus limités.

48 Cette intervention se fait alors au regard des registres de la proximité par ailleurs établis dans la gestion des déchets. C’est ainsi la proximité spatiale qui prime, permettant de gérer les déchets au plus proche, ainsi que la proximité relationnelle mobilisant les acteurs directement concernés par la catastrophe. Cette situation d’urgence, dans l’immédiate après-crise, devrait toutefois évoluer rapidement après la catastrophe afin de laisser place à une situation de récupération du territoire, dans laquelle la proximité est davantage politico-administrative (organisation d’une solidarité territoriale plus large par des institutions supra-territoriales) et industrielle (mobilisant des filières d’élimination des déchets extérieures au territoire). C’est cette deuxième étape qui ne s’est pas enclenchée à Saint-Martin suite à l’ouragan de 2017 faisant perdurer le territoire dans une situation de gestion locale s’appuyant sur les acteurs essentiellement insulaires.

49 La non évolution du régime de proximité post-catastrophe de gestion des déchets est liée au caractère insulaire du territoire (difficulté logistique d’accès) mais également à la distanciation institutionnelle entre la collectivité de Saint-Martin et l’ensemble des institutions françaises (de la région de Guadeloupe à l’État, en passant par les éco-organismes en charge d’appliquer les filières REP). Les registres de proximité fonctionnent donc selon des modalités spécifiques en situation à la fois post-catastrophe et insulaire. Il semble alors nécessaire d’intégrer pleinement la dimension temporelle dans les registres de proximité de gestion des déchets post-catastrophes et de continuer à fouiller cette dimension. Une approche tridimensionnelle (temps, espaces, acteurs) des registres métaboliques de la proximité, positionnant le tout dans les réflexions relatives à la vulnérabilité métabolique insulaire (Bahers, Perez, Durand, 2019), permettra à l’avenir de prolonger la compréhension de la gestion des déchets en situation de crise, anticipant ainsi sur un anthropocène où ces situations vont probablement devenir plus fréquentes.

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Mots-clés éditeurs : déchets post-catastrophes, proximité, espace insulaire, période post-catastrophe

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Date de mise en ligne : 24/08/2023

https://doi.org/10.3917/flux1.132.0082

Notes

  • [1]
    Jean-Noël de Grâce (Météo-France Antilles) dans Thalassa « Face aux colères de la mer », mars 2019.
  • [2]
    Météo France, communiqué de presse, septembre 2017.
  • [3]
    Copernicus est un programme développant « des services d’information européens basés sur l’observation de la Terre par satellite, et de données in situ (non spatiales) » (Source : MRN « Le cyclone IRMA – Typologie des bâtiments, sévérités des dommages et dispositif de prévention », 2018).
  • [4]
    Entretien, Préfecture de Saint-Martin, mai 2019.
  • [5]
    Entretien, Préfecture de Saint-Martin, mai 2019.
  • [6]
    Entretien avec le co – gérant de la société Verde, mai 2019.
  • [7]
    Entretien, Préfecture de Saint-Martin, mai 2019.
  • [8]
    Entretien, Association Les Fruits de mer, mai 2019.
  • [9]
    Relative à la gestion des déchets.
  • [10]
    Installation Classée pour la Protection de l’Environnement.
  • [11]
    Entretien avec le Président de l’association Sandy Ground on The Move Insertion, avril 2019.
  • [12]
    Entretien avec le directeur entreprise Terre Mer Transport Terrassement (TMTT), mai 2019.
  • [13]
    Entretien le Secrétaire Général, Sous-préfecture de Saint-Martin et Chef d’unité de la DEAL, mai 2019.
  • [14]
    Entretien avec le Président de l’association Sandy Ground on The Move Insertion, avril 2019.
  • [15]
    Entretien avec le Président de l’association d’insertion AIDS-M, mai 2019.
  • [16]
    Les auteurs s’appuient ici sur des entretiens réalisés auprès de gestionnaires de déchets suite aux inondations de 2002 dans le Gard, de 2018 dans l’Aude, suite au passage de la tempête Xynthia en 2010, sur des entretiens réalisés avec des acteurs nationaux en charge d’intégrer la gestion des déchets post-catastrophes dans leurs actions (ministère, régions, éco-organismes) et sur la lecture de retours d’expériences (Robin des Bois, 2010 ; Robin des Bois, 2018).
  • [17]
    Cette obligation a été inscrite progressivement depuis les années 2010 dans les cahiers des charges de la plupart des éco-organismes lors de leur renouvellement. Elle est traduite comme suit « dès lors que ceux-ci ont été préalablement extraits et triés, et qu’ils ne font pas l’objet d’une contamination chimique ou radioactive » (Extrait du cahier des charges de la filière REP Déchets des éléments d’ameublement).

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