1 Cet ouvrage est une étude qui se base principalement sur une thèse en théologie catholique soutenue en 2017. La thèse est disponible en ligne (Cheminer à deux dans l’amour électif : quelle spiritualité pour le couple après Vatican II ?, Université de Strasbourg, 2017) et dans une version publiée (La voie de l’amour électif : une interpellation spirituelle pour notre temps, Münster, LIT-Verlag, 2018). Cette dernière a fait l’objet d’une recension (Élisabeth Parmentier, « Sylvie Barth, La voie de l’amour électif », Revue des sciences religieuses 92 [2018], p. 430-431).
2 L’ouvrage propose un parcours historique concernant l’évolution de l’union, du couple et de l’amour à travers les âges, et particulièrement à travers les traditions de l’Église catholique romaine. S’y trouvent également une compilation d’études bibliques sur des passages de l’Ancien et du Nouveau Testaments et des commentaires des textes de Vatican II, notamment Gaudium et Spes et Amoris laetitia.
3 Dans les grandes lignes, S. Barth reprend un néologisme créé durant l’écriture de sa thèse : le projet coélectif, contraction des mots couple et électif. Un moyen de définir le couple sans se restreindre au mariage (sacramentel ou institutionnel) ni entrer dans la catégorie de la liaison ou du concubinage. Le couple coélectif n’est pas un modèle ou un exemple mais il est plutôt compris comme un paradigme sociologique. Deux conditions sont nécessaires à ce type d’élection : la promesse et l’alliance. L’auteur dénombre sept caractéristiques principales : le couple électif se choisit librement par amour et pour l’amour ; le choix de cheminer ensemble doit se reconduire concrètement ; il engage à son rythme une communauté de toit, de table et de lit ; il gère à sa guise son projet d’enfant (combien et quand) ; il décide souverainement de la forme de son union ; il se donne le droit de s’arrêter selon des appréciations ou des valeurs qui lui sont propres ; s’il s’arrête, une recomposition est possible.
4 Cette union n’est pas sans risque ni fragilité puisqu’il est impossible de contraindre l’un des deux partenaires. Le consentement et l’effort doivent venir des deux côtés. Le couple est donc une construction, dont les briques observées par l’auteur sont un mythe fondateur partagé et investi, la délimitation d’une frontière entre le duo et le reste du monde, une autonomisation du couple rendue publique et le partage du quotidien (mélanger son linge sale dans la même machine). S. Barth observe également quatre phases dans la construction du projet coélectif : la phase de fusion (apparentée à la lune de miel), la chute des idéaux, la lutte pour le pouvoir et enfin le partage de pouvoir. En plus des crises et des périodes de transition dans la vie, l’auteur liste quelques impasses possibles comme les maladies, les illusions, les malentendus et les fausses croyances. Mais le projet coélectif promet des bénéfices puisque la vie à deux aide à devenir pleinement soi-même, à trouver une vérité de soi et de l’autre, et à construire un équilibre de vie. La spiritualité est une thématique importante et transversale de ce travail.
5 Cet ouvrage est une bonne somme sur la thématique du couple électif dans la tradition chrétienne et donne beaucoup de références historiques, bibliques, exégétiques, sociologiques, et l’auteure ponctue ces études de considérations basées sur son expérience personnelle (notamment son engagement dans le mouvement Fondacio : Chrétiens pour le monde). En revanche, S. Barth fait preuve de très peu d’audace et ne sort pas des sentiers battus par la théologie catholique romaine. À tel point que des notions primordiales de son étude ne sont jamais définies, cadrées, explicitées (en dehors de la spiritualité dont l’auteure donne sa propre définition). C’est le cas par exemple du couple qui est dans cet ouvrage tacitement hétérosexuel et qui va de pair avec le désir et l’accomplissement de la parentalité. Une économie qui nous semble dommageable, au vu des études de genre et de la multiplication des modèles d’amour et de parentalité documentés aujourd’hui.
6 Par ailleurs, ne pas expliciter certains termes rend la lecture difficile pour les non-initiés à la dogmatique catholique, qui se retrouvent à prendre pour argent comptant tout un système de pensée complexe avec sa cohérence interne, sans disposer de clés de lecture. Cet ouvrage est donc bien plus dogmatique que pratique. Les exemples concrets sont rares, les difficultés rencontrées par le couple sont passées en revue superficiellement (la seule entrave à la parentalité mentionnée par l’auteure est l’infertilité) et les outils proposés peu nombreux. Contrairement à son souhait, ils sont rarement complètement étrangers au domaine chrétien. À l’instar de l’auteure, nous proposerions aux personnes qui souhaitent avoir accès à des chiffres, des sondages et des enquêtes de lire plutôt sa thèse publiée en 2017.