Notes
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[*]
Lauric Henneton est maître de conférences à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (Laboratoire Suds d’Amériques et Espace Atlantique). Il prépare une Histoire religieuse des États-Unis aux éditions Flammarion.
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[1]
David Armitage, Michael J. Braddick, The British Atlantic World, 1500-1800, Basingstoke/New York, Palgrave/Macmillan, 2002, p. 3. Le premier chapitre de cet ouvrage collectif important présente notamment les trois grandes perspectives théoriques qu’offre l’histoire atlantique : l’histoire « circumatlantique », autrement dit, celle de l’espace atlantique dans son ensemble ; l’histoire transatlantique ou comparative ; l’histoire « cis-atlantique » qui s’intéresse à une région spécifique dans son intégration à l’espace atlantique. Le présent article, consacré essentiellement à la Nouvelle-Angleterre coloniale, s’inscrit dans cette dernière perspective.
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[2]
S. D. Smith, « The Atlantic History Paradigm », in The New England Quarterly, vol. 79, n° 1, 2006, p. 123, 124.
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[3]
Timothy H. Breen, « An Empire of Goods : The Anglicization of Colonial America, 1690-1776 », in The Journal of British Studies, vol. 25, n° 4 : « Re-Viewing the Eighteenth Century », 1986, p. 468-473.
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[4]
Cf. ibid. et David Hancock, « Commerce and Conversation in the Eighteenth-Century Atlantic : The Invention of Madeira Wine », in Journal of Interdisciplinary History, vol. 29, n° 2, 1998, p. 197-219 ; D. Hancock, « L’émergence d’une économie de réseau : le vin de Madère (1640-1815) », in Annales ESC, vol. 158 n° 3, 2003, p. 649-672 ; « The British Atlantic World : Co-ordination, Complexity, and the Emergence of an Atlantic Market Economy, 1651-1815 », in Itinerario, vol. 23, n° 2, 1999, p. 107-127. Ces travaux ont donné lieu à un ouvrage magistral : Oceans of Wine : Madeira and the Emergence of American Trade and Taste, New Haven, Yale University Press, 2009. Voir également Citizens of the World : London Merchants and the Integration of the British Atlantic Community (1735-1785), Cambridge, Cambridge University Press, 1995.
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[5]
D. Hancock, « Commerce and Conversation », op. cit., p. 197.
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[6]
Ibid., p. 203.
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[7]
David Cressy, Coming Over : Migration and Communication between England and New England in the Seventeenth Century, Cambridge, Cambridge University Press, 1987, p. viii.
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[8]
T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 473.
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[9]
Ibid., p. 471. Alison Games, « Atlantic History : Definitions, Challenges and Opportunity », in American Historical Review, vol. 111, n° 3, 2006, p. 741, 753. Bernard Bailyn, « The Idea of Atlantic History », in Itinerario, vol. 20, n° 1, 1996, p. 19-44. L’histoire atlantique donne lieu à une importante introspection collective critique par ses praticiens ainsi qu’à de nombreux essais de définition et de circonscription du champ : en plus des articles de Games et Bailyn cités supra, voir notamment « Roundtable Conference : The Nature of Atlantic History », in Itinerario, vol. 23, n° 2, 1999, p. 48-173 et en particulier l’article de Silvia Marzagalli, « The French Atlantic », p. 70-83. Voir aussi Silvia Marzagalli, « Sur les origines de l’Atlantic History. Paradigme interprétatif de l’histoire des espaces atlantiques à l’époque moderne », in Dix-Huitième Siècle n° 33, 2001, p. 17-31 ; Nicholas Canny, « Writing Atlantic History : or, Reconfiguring the History of Colonial British America », in The Journal of American History, vol. 86, n° 3, 1999, p. 1093-1114 ; Bernard Bailyn, Atlantic History : Concept and Contours, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 2005 ; Cécile Vidal, « The Reluctance of the French Historians to Address Atlantic History », in The Southern Quarterly, vol. 43, n° 4, 2006, p. 153-189 ; C. Vidal, « La nouvelle histoire atlantique en France. Ignorance, réticence et reconnaissance tardive », in Nuevo Mundo Mundos Nuevos [en ligne], Coloquios, 2008, mis en ligne le 24 septembre 2008. URL : http://nuevomundo.revues.org/index42513.html.
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[10]
T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 474.
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[11]
Dans le contexte très particulier du puritanisme, il faut ranger l’essentiel des parlementaires dans le pays réel et non dans le pays légal : c’est la distinction entre « court » et « country » qui prévaut ici.
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[12]
Lauric Henneton, Liberté, inégalité, autorité. Politique, société et construction identitaire du Massachusetts au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2009, chapitres 7 (sur les réseaux prémigratoires) et 15 (sur la sociabilité transatlantique).
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[13]
Robert C. Black III, The Younger John Winthrop, New York/Londres, Columbia University Press, 1966 et The Winthrop Papers, Allyn B. Forbes et al., éd., Boston, Massachusetts Historical Society, 6 vol., 1929-1992, passim (désormais WP).
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[14]
R. Black, The Younger John Winthrop, op. cit., p. 187, 188.
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[15]
Larry D. Gragg, « A Puritan in theWest Indies : The Career of Samuel Winthrop », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 50, n° 4, 1993, p. 768-786.
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[16]
WP, vol. 2, p. 338, 345, 356, 361, 369, 379, 382, 404, 405, 414 ; Francis J. Bremer, John Winthrop : America’s Forgotten Founding Father, Oxford/New York, Oxford University Press, 2003, p. 129.
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[17]
WP, vol. 3-5, passim.
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[18]
Babette Levy, « Early Puritanism in the Southern and Island Colonies », in Proceedings of the American Antiquarian Society, vol. 70, partie 1,Worcester, Mass., 1960, p. 69-348 ; Kevin Butterfield, « Puritans and Religious Strife in the Early Chesapeake », The Virginia Magazine of History and Biography, vol. 109, n° 1, 2001, 5-36 ; L. Gragg, « Puritans in Paradise : The New England Migration to Barbados, 1640-1660 », in Journal of Caribbean History, 21.2, 1988, p. 154-167.
-
[19]
Voir la lettre de John Winthrop à son épouse, datée du 15 mai 1629, in WP, vol. 2, p. 91-92, et « Reasons to be considered for justifying the undertakers of the intended Plantation in New England, and for encouraging such whose hearts God shall move to join with them in it », ibid., p. 106-149. Plus généralement, voir L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., chap. 9.
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[20]
Ibid., chap. 12.
-
[21]
Lauric Henneton, « Discours et pratiques de l’exclusivisme américain, 1630-v.1780 », communication au séminaire GRER, Université Paris VII-Denis Diderot, 9 mars 2007.
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[22]
En plus des travaux précédemment cités de B. Levy, K. Butterfield, L. Gragg, voir l’ouvrage de Karen O. Kupperman, Providence Island, 1630-1641 : The Other Puritan Colony, Cambridge, Cambridge University Press, 1993.
-
[23]
F. Bremer, Congregational Communion : Clerical Friendship in the Anglo-American Puritan Community, 1610-1692, Boston, Northeastern University Press, 1994.
-
[24]
Ibid., p. 309 et Bernard Bailyn, The New England Merchants in the Seventeenth Century, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1955, p. 94.
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[25]
D. Hancock, « The British Atlantic World », op. cit., p. 123.
-
[26]
Cf. T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit. ; L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., chap. 16 et « From Commonwealths into Colonies ? New Englishness in a Transatlantic Perspective (1630-1692) », Colloque From Colonies into Republics in an Atlantic World, 8-9 décembre 2006, Paris. URL : http://www.ufr-anglais.univ-paris7.fr/CENTRES_RECHERCHES/CIRNA/CIRNA1/RESSOURCES/AUTRES_PAGES/COLLOQ/contrib/Lauric_Henneton/From_Commonwealth_into_Colonies.php
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[27]
Nathaniel B. Shurtleff, éd., Records of the Governor and Company of the Massachusetts Bay in New England, Boston, Little Brown & Co., 1853-1854, vol. 2, p. 212 ; L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., p. 681-682.
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[28]
Ibid., p. 471, 679-683.
-
[29]
Ibid., p. 628-645.
-
[30]
Ibid., p. 647-648 ; L. Henneton, « Les meilleurs ennemis : Nouvelle-France et Nouvelle-Angleterre au xviie siècle », in Susanne Berthier-Foglar, éd., La France en Amérique. Mémoire d’une conquête, Grenoble, Presses de l’Université de Savoie, 2009, p. 157-174.
-
[31]
K. Kupperman, Providence Island, op. cit., chap. 8 et 10.
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[32]
L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., p. 626-628.
-
[33]
Ibid., p. 754-755.
-
[34]
Pauline Maier, « Popular Uprisings and Civil Authority in Eighteenth-Century America », The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 27, n° 1, 1970, p. 3-35 ; T. H. Breen, Stephen Foster, « The Puritans’ Greatest Achievement :AStudy of Social Cohesion in Seventeenth-Century Massachusetts », in Journal of American History, vol. 60, n° 1, 1973, p. 5-22.
-
[35]
F. Bremer, The Puritan Experiment : New England Society from Bradford to Edwards, New York, St Martin’s Press, 1976, p. 219.
-
[36]
L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., chap. 16.
-
[37]
B. Bailyn, The New England Merchants, op. cit., p. 111, 122.
-
[38]
Michael G. Hall, The Last American Puritan : The Life of Increase Mather 1639-1723, Middletown, Wesleyan University Press, 1988, chap. 7 ; F. Bremer, The Puritan Experiment, op. cit., p. 216.
-
[39]
F. Bremer, ibid., p. 217.
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[40]
Joseph J. Ellis, « Anglicans in Connecticut, 1725-1750 : The Conversion of the Missionaries », in The New England Quarterly, vol. 44, n° 1, 1971, p. 67.
-
[41]
M. Hall, The last American Puritan, op.cit., p. 292, 320.
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[42]
F. Bremer, The Puritan Experiment, op. cit., p. 223, 229 ; Perry Miller, Errand into the Wilderness, New York, Harper & Row, 1956, p. 175-183. Plus récemment, voir Philip F. Gura, Jonathan Edwards : America’s Evangelical, New York, Farrar, Straus and Giroux, 2006.
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[43]
F. Bremer, The Puritan Experiment, op. cit., p. 223-225 ; Bernard Cottret, « Le paradigme perdu : Le Great Awakening entre la faute et l’innocence », Études Théologiques et Religieuses, t. 75, 2000/2, p. 218-219 ; J. Ellis, « Anglicans in Connecticut », op. cit. ; Douglas C. Stenerson, « An Anglican Critique of the Early Phase of the Great Awakening in New England : A Letter by Timothy Cutler », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 30, n° 3, 1973, p. 475-478.
-
[44]
Bertrand Van Ruymbeke, « Une église épiscopale sans évêques : paradoxes et mutations de l’Église d’Angleterre dans les colonies nord-américaines », in Anglophonia : French Journal of English Studies, 17/2005/Protestantisme(s) et autorité, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2005, p. 335-345.
-
[45]
Maurice W. Armstrong, « The Dissenting Deputies and the American Colonies », Church History, vol. 29, n° 3, 1960, p. 308-316 ; Carl Bridenbaugh, Mitre and Sceptre : Transatlantic Faiths, Ideas, Personalities, and Politics, 1689-1775, New York/ Oxford, Oxford University Press, 1962, passim.
-
[46]
C. Bridenbaugh, ibid. ; J. Ellis, « Anglicans in Connecticut », op. cit., p. 73 ; Patricia U. Bonomi, Peter R. Eisenstadt, « Church Adherence in the Eighteenth-Century British American Colonies », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 39, n° 2, 1982, p. 245-286. Voir aussi P. Bonomi, Under the Cope of Heaven : Religion, Society and Politics in Colonial America, Oxford University Press, 20032.
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[47]
Jack P. Greene, Pursuits of Happiness : The Social Development of Early Modern British Colonies and the Formation of American Culture, Chapel Hill, The University Press of North Carolina, 1988, p. 61 et 179 ; J. Ellis, « Anglicans in Connecticut », op. cit., p. 81 ; Bruce E. Steiner, « New England Anglicanism : A Genteel Faith ? », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 27, n°1, 1970, p. 122-123.
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[48]
J. Ellis, « Anglicans in Connecticut », op. cit., p. 73-81.
-
[49]
Frederick B. Tolles, Quakers and the Atlantic Culture, New York, Octagon Books, 1980, p. 13, 16, 17, 29, 30, 31, 33 ; B. Levy, « Early Puritanism », op. cit., passim.
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[50]
F. Bremer, The Puritan Experiment, op. cit., p. 214.
-
[51]
B. Cottret, « Le paradigme perdu », op. cit., p. 216-217. Voir l’excellent ouvrage récent de Thomas S. Kidd, The Great Awakening : The Roots of Evangelical Christianity in Colonial America, New Haven, Conn./Londres, Yale University Press, 2008.
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[52]
John B. Frantz, « The Awakening of Religion among the German Settlers in the Middle Colonies », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 33, n° 2, 1976, p. 279-282. Sur Zinzendorf et les moraves, voir Émile G. Léonard, Histoire générale du protestantisme, Paris, PUF, 1988, t. III, p. 99-109. Voir également Aaron Spencer Fogleman, Jesus is Female : Moravians and Radical Religion in Early America, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 2007.
-
[53]
Elizabeth I. Nybakken, « New Light on the Old Side : Irish Influences on Colonial Presbyterianism », in The Journal of American History, vol. 68, n° 4, 1982, p. 813-832 ; Ned Landsman, « Revivalism and Nativism in the Middle Colonies : The Great Awakening and the Scots community in East New Jersey », in American Quarterly, vol. 34, n° 2, 1982, p. 149-164.
-
[54]
Frank Lambert, « “Pedlar in Divinity” : George Whitefield and the Great Awakening, 1737-1745 », in Journal of American History, vol. 77, n° 3, 1990, p. 814 ; D. Stenerson, « An Anglican Critique », op. cit., p. 480-488 ; C. Bridenbaugh, Mitre and Sceptre, op. cit., p. 183.
-
[55]
C. Bridenbaugh, ibid., p. 84.
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[56]
Voir l’American Weekly Mercury (Philadelphie) du 14 août 1740, par exemple. Dès le siècle précédent, les « Épîtres » de George Fox étaient lues dans l’ensemble des communautés quakers établies autour de l’Atlantique. Cf. F. B. Tolles, Quakers and the Atlantic Culture, op. cit., p. 31.
-
[57]
Sur la relation entre Whitefield et Franklin, voir l’étude de Frank Lambert, « Subscribing for Profits and Piety : The Friendship of Benjamin Franklin and George Whitefield », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 50, n° 3, 1993, p. 529-554, ainsi que les quelques pages célèbres de l’autobiographie de Franklin : The Autobiography and Other Writings, Jesse Lemisch, éd., New York, Signet Classic, 2001, p. 116-120.
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[58]
Jon Butler, « Enthusiasm Described and Decried : The Great Awakening as Interpretative Fiction », in The Journal of American History, vol. 69, n° 2, 1982, p. 305-325.
-
[59]
F. Lambert, « “Pedlar in Divinity” », op. cit. ; Susan O’Brien, « A Transatlantic Community of Saints : The Great Awakening and the First Evangelical Network, 1735-1755 », in The American Historical Review, vol. 91, n° 4, 1986, p. 811-832. Sur la participation des Noirs dans les mouvements de réveil, voir F. Lambert, « “I Saw the Book Talk” : Slave Readings of the First Great Awakening », in The Journal of African American History, vol. 87, 2002, p. 12-25. Les travaux de Lambert ont ensuite donné lieu à Pedlar in Divinity : George Whitefield and the Transatlantic Revival, 1737-1770, Princeton University Press, 1994, rééd. 2002 ; et plus récemment Inventing the « Great Awakening », Princeton University Press, 2001. Voir, par exemple, American Weekly Mercury (Philadelphie), 17 janvier 1738.
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[60]
Cité par D. Hancock, « Commerce and Conversation », op. cit., p. 198.
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[61]
Respectivement, Boston Gazette, 24 novembre 1755, 8 décembre 1755, 12 janvier 1756, 29 décembre 1755. Les sermons en question étaient les suivants : Thomas Prince, An Improvement of the Doctrine of Earthquakes, Being the Works of God and Tokens of his Just Displeasure ; Charles Chauncy, Earthquakes a Token of the righteous Anger of God ; Jonathan Mayhew, A discourse on Rev. XV. 3d, 4th. Occasioned by the earthquakes in November 1755.
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[62]
Voir, par exemple, Boston Gazette, 2 février 1756.
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[63]
Boston Evening Post, 29 décembre 1755, jour où la description factuelle de Lisbonne fut publiée.
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[64]
Boston Evening Post, 8 décembre et 15 décembre 1755 ; T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 489.
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[65]
Ibid., p. 467-468.
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[66]
Voir ibid., p. 479-85 pour les références. Breen oppose principalement l’article de James Henretta, « Families and Farms : Mentalité in Pre-Industrial America », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 35, 1978, p. 3-32 et celui de Carole Shammas, « How Self-Sufficient was Early America », in Journal of Interdisciplinary History, 13, 1982, p. 247-72.
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[67]
T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 468.
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[68]
Ibid., p. 473-478, 488, 496 ; D. Hancock, « Commerce and Conversation », op. cit., p. 203.
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[69]
T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 486-487.
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[70]
Ibid., p. 476-477, 487.
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[71]
D. Hancock, « Commerce and Conversation », op. cit., p. 205, 219.
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[72]
M. Hall, The Last American Puritan, op. cit., p. 326, 329, 332, 337-338 ; C. Bridenbaugh, Cities in the Wilderness : The First Century of Urban Life in America : 1625-1742, New York, Capricorn Books, 1964, 19381, p. 146-171, 292 ; J. Greene, Pursuits of Happiness, op. cit., p. 65.
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[73]
Cité par T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 497.
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[74]
J. Greene, Pursuits of Happiness, op. cit., p. 176.
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[75]
La formule de Sir Lewis Namier est citée par Bernard Cottret, Histoire d’Angleterre : XVIe-XVIIIe siècle, Paris, PUF, coll. « Nouvelle Clio », 2003, p. 188-189.
1L’Amérique n’apparut pas ex nihilo, comme l’ont longtemps laissé penser nombre d’historiens américains. D’immenses progrès ont été faits depuis une génération, grâce à l’historiographie dite « atlantique », omniprésente en dehors de nos frontières, mais qui se développe très doucement en France. Si ce nouveau paradigme a notamment fait la part belle aux influences métropolitaines, les échanges culturels, et notamment religieux, entre la Grande-Bretagne et ses colonies américaines, plutôt que d’être considérés comme des transferts linéaires, directs, exclusifs et unidirectionnels, du centre métropolitain vers la périphérie coloniale, doivent plutôt être envisagés comme une relation circulatoire « atlantique ». Nous proposons ici d’étudier les phénomènes religieux depuis les fondations jusqu’à la veille de la Révolution à travers les prismes de la circulation, de la conversation et de la créolisation, un processus que l’on peut définir comme l’adaptation de formes métropolitaines aux conditions imposées par l’environnement écologique, épidémiologique, social et, plus largement, culturel des colonies. Pour ce faire, nous avons choisi de nous concentrer sur la Nouvelle-Angleterre, région où les questions religieuses revêtirent le plus d’importance sur la longue durée. Nous serons particulièrement attentifs à la relation avec la métropole, qui oscille entre affranchissement et émulation, divergence et convergence, désanglicisation et réanglicisation ; mais nous nous efforcerons également de regarder par delà les frontières nationales, afin de rendre le plus fidèlement possible l’image d’une intégration de phénomènes multiples – notamment économiques et religieux – dans un espace circulatoire complexe et évolutif.
L’histoire atlantique : cadre historiographique et méthodologique
2Si l’on en croit l’historien britannique David Armitage, « nous sommes désormais tous des atlantistes [1] ». Depuis bientôt une génération, en effet, l’historiographie « atlantique » devenue omniprésente nous pousse à parler d’un maillage atlantique à géométrie variable dans le temps et l’espace. Le « paradigme atlantique » entend s’opposer au paradigme « centre/périphérie » [2], typique notamment de l’école « impériale », dont le principal représentant était Charles M. Andrews dans la première moitié du xxe siècle [3], mais il est permis de se demander si l’on peut s’en démarquer totalement. L’histoire atlantique a pour ambition d’être une histoire dépourvue de centre et qui voudrait redonner un rôle de tout premier plan aux périphéries, non pas individuellement mais dans leur ensemble et dans leurs interactions. Loin d’être l’histoire centrifuge du rayonnement culturel et institutionnel de la métropole, il s’agit plutôt d’une histoire de la transversalité.
3L’accent y est mis sur les réseaux, les interactions, les interconnexions, les échanges, la ou les communication(s), la circulation, tant des populations que des marchandises ou des idées, la réciprocité, la conversation [4]. David Hancock, dans son étude magistrale de « l’invention » du vin de Madère au xviiie siècle, explique que le commerce atlantique était un système « discursif » fondé sur l’échange continu et complexe d’informations sur la fabrication, le conditionnement, l’expédition, la distribution, les conditions de stockage, la commercialisation et la consommation des produits, de l’entrepôt du producteur à la main du consommateur en passant par la boutique du marchand sur le marché local [5]. Il explique en outre que la « conversation », ici utilisée dans le champ économique et commercial, voire plus largement culturel, est un système fondé sur la collaboration, c’est-à-dire l’échange d’informations entre au moins deux personnes, et la réciprocité, donc la possibilité pour chaque participant de faire preuve de ses connaissances et de faire valoir ses positions ou ses préférences [6]. En d’autres termes, il s’agit d’un système transactionnel.
4On peut postuler avec l’historien anglais David Cressy, de manière certes un peu provocatrice, que l’histoire coloniale américaine n’est jamais que de l’histoire britannique d’outre-mer, puisqu’il semble impossible de s’affranchir du contexte métropolitain ou plus largement européen : à un degré plus ou moins marqué, à une fréquence plus ou moins grande, on doit toujours composer avec la métropole [7]. De ce point de vue, le prisme atlantique a fait beaucoup pour que les historiens américains se penchent sur le contexte métropolitain, trop souvent négligé auparavant. L’historiographie a été profondément influencée par son sujet puisqu’elle est devenue intégrée, à l’image des économies et des cultures qu’elle décrit.
5Timothy H. Breen a en effet écrit que l’on se situait dans « une histoire intégrée, ni américaine, ni britannique [8] ». L’intégration est un prisme essentiel et les historiens « atlantistes » militent pour une étude transnationale des phénomènes. Assez marquée par un certain multiculturalisme, l’historiographie est autant le reflet de l’internationalisme des uns, avec un espace « sans frontières », que de l’acceptation par les autres de la mondialisation et de la primauté du marché, le tout avec comme principal dénominateur commun l’ambition affichée de ne concevoir l’histoire que comme une histoire totale : le modèle braudélien de la Méditerranée est souvent évoqué, mais son application à l’Atlantique fait l’objet de débats et parfois de réticences. Les études de Pierre Chaunu sur Séville ou de Frédéric Mauro sur le Portugal figurent également dans les références fréquentes, de même que les travaux de Jacques Godechot et Robert Palmer sur les « révolutions atlantiques » [9]. Symbole de cette intégration atlantique, Breen parle d’un « marché en expansion » au xviiie siècle, qui « reliait les hommes de la Frontière aux urbains et les colons vivant à la périphérie de l’empire aux grands négociants de métropole [10]. »
La « Nouvelle » Angleterre : mise en place d’une anglicité complexe (1630-1690)
6Aux yeux des puritains, la relation à l’Angleterre-métropole est double : il faut opposer le « pays légal » – les autorités ecclésiastiques souvent hostiles aux puritains – et le « pays réel », composé de la famille, des amis et des anciens voisins restés en métropole [11], pour qui et avec qui toute une solidarité transatlantique va être entretenue et pratiquée tout au long du siècle, que ce soit à travers l’intercession de la prière, certains rituels comme les jeûnes collectifs ou une pratique assidue de la correspondance. À ce titre, les réseaux de sociabilité prémigratoires vont nécessairement se réduire à leur dimension épistolaire à la faveur de la migration transatlantique, mais à l’étirement des réseaux va s’ajouter une extension, plus qu’un tarissement, à la faveur du déploiement puritain dans l’espace atlantique. Il existait deux grands types de réseaux, du reste nullement exclusifs : les réseaux laïcs et les réseaux ecclésiastiques, déjà très actifs dans l’Angleterre des années 1610-1620, centrés autour des universités, et particulièrement Cambridge, qui alimentaient une circulation des idées (donc du puritanisme) fondée sur le rayonnement et la percolation, phénomène que l’on va retrouver en Nouvelle-Angleterre avec Harvard. Le réseau laïc par excellence est celui tissé (activement ou non) par la famille Winthrop, que l’on peut qualifier de « famille atlantique » [12].
7Le fils aîné du célèbre gouverneur, John Junior, naît dans le Suffolk en 1606, étudie à Trinity College (Dublin) au début des années 1620, fait partie de l’expédition du Duc de Buckingham à l’île de Ré en 1627 et entreprend ensuite un long périple en Italie et jusqu’à Constantinople. Il gère les affaires familiales au début de la Grande migration et rejoint son père dans le Massachusetts. Il fait partie des fondateurs du Connecticut en 1636 et de la Royal Society de Londres en 1662, pendant qu’il négociait une charte pour sa colonie auprès de Charles II. Il correspond avec des savants allemands en latin et avec des gouverneurs néerlandais en français. Un de ses amis les plus proches, Robert Child, médecin diplômé de l’université de Padoue, lui fait part d’un voyage à Bordeaux en 1641, à la recherche de vignerons compétents pour la Nouvelle-Angleterre, et jusqu’à Toulouse, où il voulait rendre visite à un alchimiste célèbre [13]. Son jeune frère, Stephen Winthrop, accompagne son père en Amérique à l’âge de onze ans puis retourne en Angleterre où il fait une brillante carrière dans l’armée cromwellienne avec ses neveux Fitz-John et Wait-Still, fils de John Junior [14]. Samuel, un autre frère cadet, étudie à Harvard avant de suivre Stephen aux Canaries en 1647. Il y travaille pour le compte de marchands anglais qui commercent depuis peu avec la Nouvelle-Angleterre avant de s’installer à la Barbade sur les conseils de son père. Là, il devient un relais commercial entre la Nouvelle-Angleterre et les Canaries, mais la grande peste de 1648 le pousse à partir sur l’île de Saint Christophe puis aux Açores. Il se marie à Rotterdam la même année et s’implante finalement à Antigua, où il est agent pour des marchands de Londres et de Nouvelle-Angleterre. Il est gagné au quakerisme et occupe des fonctions politiques de premier plan, parmi lesquelles celle de lieutenant-gouverneur de l’île de 1668 à 1671 [15].Un autre fils Winthrop, Henry, avait été l’un des tout premiers colons de la Barbade en 1627 [16]. L’abondante correspondance de leur père contient des lettres venues de tout le tour du bassin atlantique, d’Angleterre et de toutes les colonies de Nouvelle-Angleterre évidemment, mais aussi d’Irlande, de Virginie, du « Fort Amsterdam », de l’embouchure du Delaware, de Québec, d’Acadie, de Terre-Neuve, de la Barbade, des Bermudes, de Malaga et de Tenerife, directement ou via la Barbade [17].Une grande partie de cette correspondance reflète la diversité des lieux d’implantation et de réimplantation de puritains, qu’il s’agisse d’individus isolés ou de communautés [18].
8Dans les colonies de Nouvelle-Angleterre, le puritanisme est plus qu’une conception parmi d’autres de l’Église et de la discipline ecclésiastique : c’est en effet un authentique projet de société fondé sur la réforme et la reformation des Églises et de la société sur des bases purifiées. Cette réforme s’opère dans un cadre explicitement transatlantique : la Nouvelle-Angleterre n’est d’abord envisagée que comme un refuge dans une optique catastrophiste [19]. Pour les pasteurs persécutés comme pour les fidèles entravés par les autorités ecclésiastiques dans leurs pratiques purifiées, il s’agissait d’aller fonder des Églises dans ce que l’on peut considérer comme le « laboratoire » américain, conçu comme un « espace du possible » [20] rendu envisageable par l’homogénéité de la population, ce qui fait du projet puritain un projet authentiquement exclusiviste [21]. C’est d’ailleurs le paramètre déterminant de l’homogénéité religieuse qui différencie les colonies de Nouvelle-Angleterre des autres lieux d’implantation puritaine, comme la Virginie et le Maryland, les Bermudes et les Bahamas ou encore la Barbade et l’île de Providence, au large du Nicaragua [22]. La mise en place d’Églises dûment réformées avait pour ambition d’influencer en retour la métropole et d’inciter à sa « purification ». Dans les années 1640, le New England Way fut l’objet d’une intense controverse transatlantique avec les presbytériens, à coup de pamphlets et de réponses auxquelles succédaient des réponses à la réponse, et ainsi de suite. Les grands pasteurs de Nouvelle-Angleterre furent invités à participer aux travaux de la Westminster Assembly : certains déclinèrent l’invitation et restèrent dans le Massachusetts, d’autres rentrèrent en Angleterre, dans le mouvement de « rémigration » des années 1640, quand la « grande migration » de la décennie précédente (15 à 20 000 immigrants) s’arrêta brusquement, ce qui entraîna la première grande crise économique de la région [23].
9Les rémigrations des années 1640 rendirent possible l’accession d’un certain nombre d’anciens colons puritains à des postes importants auprès du Parlement comme dans le régime de Cromwell, ce qui conférait des avantages économiques et commerciaux indéniables aux colonies [24]. La crise économique causée par l’arrêt de la migration en 1640 força toute l’économie régionale à s’ouvrir au commerce au long cours – ce qui se révéla un facteur capital d’intégration à un espace atlantique plus large que l’axe Boston-Londres – et dans des schémas commerciaux non pas triangulaires mais polygonaux et variables, dans un système « complexe, non linéaire, dynamique et pragmatique [25] ». Les sommets de ce polygone étaient aussi bien Terre-Neuve que les Antilles (essentiellement la Barbade) ou bien encore les îles de l’Atlantique (Madère, Açores, Canaries et Cap-Vert), et jusqu’à certains ports français (La Rochelle, Nantes et Bordeaux) et espagnols (Bilbao, Malaga). Le pôle métropolitain était indispensable dans les réseaux et dans la possibilité de crédit qu’il permettait. Cependant, les marchands de Nouvelle-Angleterre se trouvèrent rapidement en concurrence (déloyale) avec les marchands basés en métropole, notamment par leur violation des droits de douane fixés dans les diverses lois de navigation des années 1650 et 1660. Toutefois, cette concurrence ne se faisait pas tant au détriment calculé de la métropole que dans l’intérêt de la région et de ses marchands, tant dans les ports que dans l’arrière-pays, dont la production se trouvait intégrée dans l’économie atlantique [26].
10La migration ne doit pas être considérée comme une forme de séparatisme identitaire, et on ne peut qu’être frappé par la revendication continue de l’anglicité comme forme identitaire dominante, même si l’on assiste à des formes de créolisation, tant à cause du paramètre américain que du paramètre puritain, et peut-être même d’ailleurs plus à cause du second que du premier. Cette revendication de l’anglicité, indissociable d’un protestantisme militant, transparaît dans la correspondance, dans le souci de se tenir informé de la situation politique en métropole, mais aussi au niveau juridique : certes la migration est l’occasion de se défaire de certaines pratiques jugées désuètes ou injustes comme la primogéniture, ou impies comme les tribunaux ecclésiastiques, mais ces réformes ne doivent pas faire oublier qu’en 1647, la General Court du Massachusetts commanda un certain nombre d’ouvrages de référence en matière de droit coutumier anglais, comme les grands textes jurisprudentiels d’Edward Coke ou encore le Country Justice de Michael Dalton [27]. Malgré la scripturalisation originale de l’appareil législatif et institutionnel (citoyenneté fondée sur l’appartenance à une Église congrégationaliste locale, interdiction aux pasteurs de détenir une fonction politique, absence de conséquences civiques d’une excommunication, fondation biblique de tous les crimes capitaux), il n’en demeurait pas moins une volonté indéniable de se placer dans le cadre du droit coutumier anglais auquel un certain nombre de magistrats avaient d’ailleurs été formés avant d’émigrer. De plus, au primitivisme religieux s’ajoutait une certaine forme de primitivisme politique et juridique puisque l’on n’hésitait pas à s’appuyer sur des statuts d’Henri VIII, mais aussi d’Édouard III, ou encore d’invoquer la Magna Carta comme texte de référence de la protection des droits [28].
11Sur le plan diplomatique, enfin, plutôt que de parler de « transfert », il semble préférable de parler d’une extension des conflits européens, à commencer par un antipapisme structurant dans le contexte de la guerre de Trente ans, conflit qui prit parfois une dimension de combat eschatologique entre catholiques et protestants, dont on suivait attentivement les développements à Boston, au rythme de l’arrivée des navires d’Europe, et qui trouvait parfois des échos américains dans la relation complexe avec la Nouvelle-France voisine [29]. Parfois (mais rarement) certains acteurs témoignent d’une volonté de s’affranchir de conflits européens comme Louis d’Ailleboust, gouverneur de Québec, qui propose aux autorités du Massachusetts un traité de libre-échange et une alliance franco-novanglaise contre les Iroquois en 1650, ou encore comme Peter Stuyvesant, gouverneur de Nouvelle-Néerlande, en 1653 [30]. L’incidence de la situation géopolitique (guerre ou paix) sur le commerce est une préoccupation constante des colons, ce qui les rend d’autant plus attentifs à la situation européenne.
12À la faveur de la colonisation européenne des Amériques, les conflits entre métropoles s’étendent à l’ensemble de l’espace atlantique. Ainsi, l’île de Providence, au large du Nicaragua, est colonisée en 1630 en partie pour servir de base contre les Espagnols, mais ceux-ci s’emparent de l’île en 1641 et en chassent les Anglais, alors que les troupes de Cromwell prennent successivement l’Acadie à la France en 1654 et la Jamaïque à l’Espagne en 1655 [31]. Les guerres anglo-néerlandaises de la deuxième moitié du siècle s’étendent de la Manche à l’Atlantique, quand elles ne trouvent pas leur origine en Amérique, comme avec la prise de la Nouvelle-Amsterdam par les Anglais en 1664. Cette fois, cependant, les conflits n’ont plus la dimension religieuse qu’ils avaient eue avec la France ou l’Espagne puisque l’on se bat entre puissances protestantes. Toutefois, la pérennité de la dimension atlantique globale de l’opposition entre catholiques et protestants reste intacte pendant toute la période coloniale, de John Winthrop qui veut fonder le Massachusetts pour ériger un rempart contre les jésuites « antichrétiens » en 1629 au massacre de Deerfield en 1704 par des Français et des Indiens, en passant par les nombreuses supputations sur le rôle réel ou supposé des jésuites auprès des Indiens, notamment pendant la guerre du Roi Philippe (1675-1676) [32]. La génération des dernières années du règne de Louis XIV connaît une succession quasi ininterrompue de guerres en Europe comme en Amérique, et les conflits vont se poursuivre jusqu’à la guerre de Sept ans, qui privera définitivement la France de ses possessions américaines en 1763. Dans les perceptions locales, toute guerre contre les Français était une guerre contre les jésuites, les « papistes » et l’absolutisme.
13Le xviie siècle est donc le théâtre de la mise en place d’une forme originale d’anglicité créolisée, que l’on peut qualifier d’« alter-anglicité », ou de novanglicité. Celle-ci n’en reste pas moins toujours une forme d’anglicité et en aucun cas une forme d’américanité distincte, qui n’a pas lieu d’être avant la deuxième moitié du siècle suivant.
Bouleversements et redéfinitions, de la Restauration au grand réveil
14En Nouvelle-Angleterre, les années 1660 constituent un premier tournant décisif et un point de non-retour : la Restauration des Stuart marque en effet la fin de l’homogénéité avec l’imposition d’une certaine forme de tolérance religieuse, même restreinte au protestantisme. Cette tolérance, incompatible avec le projet de société exclusiviste des puritains, sera confirmée au fur et à mesure avec la tolérance de fait des quakers en 1671, des baptistes en 1680, l’implantation (symbolique) de l’Église d’Angleterre à Boston après la révocation de la Charte royale en 1686 et la liberté de conscience imposée par la nouvelle charte en 1691. Celle-ci constitue un deuxième tournant, plus définitif, dans la mesure où une partie du pouvoir est reprise en main par la métropole. Le roi nomme le gouverneur du Massachusetts et les Lords of Trade and Plantations, créés en 1696, leur envoient des instructions. L’opposition constante et structurelle entre un gouverneur aux ordres d’une métropole sourde aux intérêts locaux (« pays légal ») et une assemblée représentative élue mais dont les lois sont soumises à l’approbation par le roi, contribuent à une externalisation de l’autorité qui se manifeste à travers une polarisation accrue entre un court party (le gouverneur et ses clients, anglicans) et un country party (la chambre des représentants, congrégationalistes) [33]. Selon certains historiens, c’est cette externalisation de l’autorité vers la métropole et ses représentants qui expliquerait l’apparition des mouvements de foule (mobs) inédits dans une région où la cohésion sociale était jusque-là remarquable [34]. Cependant, Elisha Cooke, chef de file du country party (« pays réel »), réussit à faire tomber le gouverneur Dudley en 1714 grâce à des appuis en Angleterre [35]. Par ailleurs, l’anglicisation revendiquée transparaît dans la rhétorique whig utilisée au moment de la Glorieuse Révolution pour dénoncer la « tyrannie » du gouverneur Andros nommé par Jacques II [36].
15La Restauration s’accompagne de la migration d’un certain nombre de cadres du régime cromwellien, des puritains militants qui viennent renforcer les rangs des élites politiques et ecclésiastiques, comme John Leverett et Francis Willoughby, qui deviendront rapidement gouverneur et vice-gouverneur du Massachusetts, ou encore les régicides Whalley, Goffe et Dixwell, qui furent accueillis chaleureusement et protégés dans le Connecticut à New Haven en dépit des instructions royales, mais qui ne participeront jamais à la vie politique des colonies.
16La Restauration est également le moment où un certain nombre de marchands à la fois royalistes et anglicans, et n’ayant que faire du puritanisme, font leur apparition à Boston pour participer eux aussi au juteux commerce atlantique. Même s’ils restent peu nombreux et concentrés à Boston et dans certains autres ports, ils introduisent une hétérogénéité insupportable aux yeux de la population puritaine, qui met en péril le projet de société originel [37].
17Dans le camp orthodoxe, précisément, l’interaction avec la métropole n’était pas inexistante. Increase Mather, un des premiers pasteurs nés en Amérique, commença sa carrière en Angleterre puis à Guernesey pendant le Protectorat avant de rentrer à Boston. Il fut ensuite envoyé comme agent de la colonie à Londres pour négocier une nouvelle charte après la révocation de la première en 1684. Il y passa quatre ans (1688-1692), au cours desquels il rencontra de nombreux dissenters et gravita au plus près des cercles de pouvoir, puisqu’il rencontra les souverains successifs, des parlementaires et les membres des commissions gouvernementales compétentes dans le cadre de sa mission. Il fut convié à œuvrer pour la réconciliation des indépendants et des presbytériens en prenant part à la rédaction des Heads of Agreement en 1691. Toutes ces activités et les nombreux temps morts de sa mission lui permirent de cultiver ses réseaux, initiés lors de son premier séjour et entretenus ensuite par une importante activité épistolaire [38]. Son fils Cotton, lui aussi pasteur, possédait également un réseau de correspondants européens, notamment à travers ses contributions à la Royal Society. Dans les années 1710-1720, le piétisme œcuménique qu’il se mit à professer à Boston était marqué par une évidente influence non pas seulement anglaise mais européenne, notamment sa correspondance avec August Hermann Francke à partir de 1709 [39].
18L’œuvre anglaise d’Increase Mather devait trouver un prolongement dans le Connecticut du début du xviiie siècle. En effet, en 1708, les pasteurs de cette colonie assemblés à Saybrook rédigèrent un texte de compromis entre le congrégationalisme et le presbytérianisme, fondée sur les Heads of Agreement de 1691 ainsi que sur la Savoy Confession de 1658, dernier texte fondateur du congrégationalisme anglais. La même année, l’assemblée de la colonie vota une loi de tolérance calquée sur son précédent anglais de 1689 mais dans laquelle, ironiquement, les anglicans étaient considérés comme des dissidents : si l’inspiration était bien celle de métropole, la situation était parfaitement inversée [40].
19Dans les années 1690, le latitudinarisme anglais devait influencer un certain nombre de pasteurs dits « libéraux » essentiellement à Boston et Cambridge. À Harvard, les libéraux remportèrent une victoire symbolique importante avec l’élection en 1707 de John Leverett à la présidence, loin devant le père et le fils Mather. À Boston, les latitudinaires fondèrent l’Église de Brattle Street en 1698 qui, si elle reconnaissait comme fondation la très calviniste Confession de Foi de Westminster (1646), n’en demeurait pas moins très « arminienne » – et donc crypto-papiste aux yeux de ses détracteurs puisque le pasteur y lisait la Bible sans la commenter, pratique anathème chez les puritains, de même que l’utilisation de prières établies ainsi que l’ouverture totale de la Sainte Cène et de l’administration de l’Église à tous les membres, sans que ceux-ci fussent cooptés par un filtrage exclusiviste, même s’il est vrai que cette dernière pratique n’était pas arminienne. La figure de proue de cette Église était le pasteur Benjamin Colman, diplômé de Harvard en 1695, qui partit ensuite poursuivre ses études en Angleterre, où il sympathisa avec de nombreuses figures éminentes du dissent. Il fut ensuite nommé à Bath, où il côtoya la gentry, avant d’être invité par les fondateurs de l’Église de Brattle Street, alors tout juste formée de l’autre côté de l’Atlantique. Par mesure de précaution, il décida de se faire ordonner par les autorités presbytériennes avant de s’embarquer pour Boston, ce qui ne se faisait jamais en Nouvelle-Angleterre [41].
20Les Lumières naissantes eurent une certaine influence dans l’évolution du paysage religieux en Nouvelle-Angleterre et plus largement en Amérique, avec l’accent mis sur l’Homme et non le dogme ainsi que sur l’idée de la possibilité de contrôler sa destinée et donc d’œuvrer pour son salut, ce qui était particulièrement compatible avec l’arminianisme et par conséquent l’anglicanisme. Cela dit, l’anglicanisme ne prit jamais des proportions impressionnantes dans les colonies dites « puritaines » et une figure de l’orthodoxie calviniste comme Jonathan Edwards fut lui aussi fortement influencé par la philosophie des Lumières, notamment Newton, Locke et Berkeley [42].
21Le libéralisme théologique de Harvard était déjà palpable plusieurs années avant l’élection de Leverett, à tel point qu’une nouvelle université fut fondée dans le Connecticut en 1701 – Yale – pour servir de contrepoids au latitudinarisme de Harvard et pour former des pasteurs fidèles à l’orthodoxie puritaine. Cependant, la plupart des donations de livres étaient le fait d’anglicans de métropole, ce qui contribua à introduire des lectures peu orthodoxes dans la bibliothèque. De même, en 1722, le recteur Timothy Cutler et le tutor Samuel Johnson causèrent un scandale en annonçant publiquement leur ralliement à l’anglicanisme. Ils partirent se faire ordonner en bonne et due forme par un évêque de métropole avant de retourner en Nouvelle-Angleterre, Cutler en charge d’une paroisse de Boston et Johnson à Stratford dans le Connecticut. Ils étaient en outre tous deux missionnaires pour la SPG, ou Society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts, mise sur pied en 1701 en réaction au très faible taux de pénétration de l’Église d’Angleterre dans les colonies américaines [43].
22La situation de l’Église d’Angleterre en Amérique est aussi diverse que particulière : Église établie dans les colonies du Sud, elle n’était paradoxalement représentée par aucun évêque sur le sol américain [44]. Les missionnaires de la SPG militèrent continuellement pour la création d’au moins un évêché américain, en vain en raison du travail de sape des Dissenting Deputies alertés par les milieux dissidents (essentiellement congrégationalistes) de Nouvelle-Angleterre [45]. L’importante correspondance entre les missionnaires et les instances de la SPG à Londres est essentiellement centripète – également centrifuge mais dans une moindre mesure, – peu ou pas transversale et relativement peu efficace [46]. En 1686, une première Église anglicane fut fondée à Boston : elle accueillait essentiellement le gouverneur, sa famille, ses clients, et un certain nombre de marchands non puritains. En 1722, la région ne comptait toujours qu’une seule Église ; en 1742, seulement sept, pour 2 000 membres. À la veille de la Révolution, on dénombrait 74 Églises pour 25 000 membres, sur environ 460 000 habitants, ce qui est globalement faible [47]. L’absence d’évêque, un comble pour une Église épiscopalienne, constituait un vide propice à la créolisation, une adaptation sous forme d’emprunts aux traditions locales congrégationalistes, sous l’impulsion de Samuel Johnson, cheville ouvrière de l’anglicanisme du Connecticut. Les adaptations qu’il mit en place, parfois contre l’avis de ses collègues partisans d’un anglicanisme intact, étaient des réunions de prêtres, l’intervention de prêcheurs laïcs (qui ne devaient pourtant pas administrer les sacrements) et un poids plus important accordé aux conseils paroissiaux ou vestries [48].
Le « Great Awakening », archétype de la circulation atlantique
23Les quakers, qui commencèrent à émigrer en Amérique dans les années 1650, formaient une véritable communauté transatlantique, avec un important relais dans les Antilles, pièce centrale dans la géographie quaker. Dans les années 1660, George Fox mit en place un réseau d’assemblées mensuelles en Angleterre qu’il étendit aux communautés américaines lors de son voyage de 1672. À son retour, il chargea les quakers de Bristol d’entretenir une correspondance régulière avec les communautés d’Amérique, avec en tête le précédent des Églises chrétiennes des premiers siècles autour du bassin méditerranéen. À la fin du xviie siècle, un réseau assez dense liait les communautés quakers établies autour du bassin atlantique, de la Nouvelle-Angleterre aux Antilles, en passant par les Carolines et la Pennsylvanie bien entendu. Cette correspondance systématique entre les diverses assemblées mensuelles et annuelles eut pour conséquence d’uniformiser la conscience et le discours des quakers ainsi que de renforcer leur sentiment d’identification à une seule et même communauté jusqu’au stéréotype. Si le phénomène quaker est d’origine anglaise, et s’est étendu à l’ensemble de l’espace atlantique, les diverses communautés s’influençaient mutuellement, pas uniquement dans un sens centre-périphérie [49].
24Les réveils des années 1730-1750, dans lesquels l’expérience de la conversion ou « nouvelle naissance » est bien plus importante que la doctrine ou l’ecclésiologie, constituent un autre phénomène religieux d’ampleur atlantique où les réseaux occupèrent une place centrale. On les fait généralement commencer à Northampton en 1734-1735, sous la houlette de Jonathan Edwards, mais son grand-père Solomon Stoddard, pasteur au même endroit, avait déjà été à l’origine d’un certain nombre de réveils entre les années 1680 et 1720 [50]. Après Northampton, les réveils se propagèrent, en partie grâce aux réseaux de correspondance et par émulation, aux villages voisins et de proche en proche à toute la Nouvelle-Angleterre. Sous l’impulsion d’autres pasteurs, comme les presbytériens Gilbert Tennent et Samuel Davies ou Théodore Jacob Frelinghuysen, pasteur allemand auprès des communautés néerlandaises piétistes, le phénomène de réveil gagna les colonies médianes (New Jersey, Pennsylvanie) [51].
25Les piétistes allemands de Pennsylvanie avaient connu des phénomènes similaires dès les années 1720. Chez les immigrés allemands justement le succès des missionnaires moraves, envoyés par le comte Zinzendorf dans les années 1730 poussa les luthériens comme les réformés à demander un effort plus soutenu en hommes et en moyens de la part des Églises allemandes « métropolitaines ». Ce double mouvement, profondément conservateur, importa un dogme, une culture (notamment une langue) et des rites qui ne furent pas modifiés par la traversée de l’océan. Dans ce cas précis, il est possible de parler de transfert de culture, mais celui-ci s’effectua en dehors du cadre anglais et en réaction à un stimulus américain : le succès des missionnaires moraves, eux-mêmes envoyés des états allemands [52].Au-delà des Allemands et des Anglais, les phénomènes de réveil touchèrent les Écossais et les Nord-Irlandais presbytériens [53].
26La réaction des luthériens et des réformés aux succès des moraves eut un écho en Nouvelle-Angleterre, puisque Cutler, pour tenter d’enrayer le réveil en 1740, demanda à la SPG d’expédier plus de livres anglicans pour contribuer à une meilleure diffusion de l’anglicanisme [54]. En effet, Cutler ne s’opposait pas tant à un regain du congrégationalisme ou du presbytérianisme en soi qu’à l’enthousiasme soulevé par la « tournée » de l’évangélisateur George Whitefield, ancien compagnon de Wesley et lui-même anglican, mais dans un style moins académique et moins feutré. D’ailleurs, toutes les Églises anglicanes de Nouvelle-Angleterre fermèrent leurs portes à Whitefield [55]. Pour Frank Lambert, le succès des réveils s’explique par la méthode employée, l’intégration du phénomène et sa dimension atlantique, ainsi que par le travail de communication des acteurs à partir des pôles qu’étaient Londres, Glasgow, Boston et Philadelphie. Cette communication s’effectuait au sein d’un réseau épistolaire d’une incroyable densité, centré autour de Whitefield (même si des noyaux secondaires existaient, voire préexistaient), des lettres qui étaient de plus en plus destinées à être lues en public puis à être publiées dans des magazines évangéliques et diffusées de manière systématique, ou même en première page de certains journaux non évangéliques [56].Ainsi, les écrits de Whitefield et les nouvelles du réveil dans sa dimension atlantique connaissaient une diffusion insoupçonnée. À ce titre, s’il faut souligner le rôle central de Whitefield, l’activisme d’éditeurs comme le Londonien Lewis ou Benjamin Franklin ne doit pas être oublié. En effet, le déiste Franklin n’était pas touché personnellement par le phénomène du réveil, mais il contribuait à le diffuser car il était pour lui particulièrement lucratif. La collaboration entre Whitefield et Franklin était donc à l’avantage des deux. Whitefield excellait dans la mise à profit des techniques de promotion et de ce que nous appellerions le marketing. C’est cette interpénétration du religieux et du commercial qui valut à Whitefield le sobriquet de « pedlar in divinity » (camelot en théologie) par un commentateur hostile [57].
27Certains, comme Jon Butler dans un article iconoclaste, ont appelé à nuancer l’étendue du phénomène et la centralité de Whitefield, que Butler considère comme des créations historiographiques [58]. Il faut pourtant reconnaître, à la lumière des travaux remarquablement stimulants de Frank Lambert sur les techniques de diffusion du réveil et de Susan O’Brien sur les réseaux épistolaires et éditoriaux, que Whitefield occupait bel et bien le centre d’un réseau de correspondance d’un volume considérable et qu’il occupa un rôle indéniable par son activisme éditorial, ses nombreux voyages (sept en Amérique, quatorze en Écosse) et son ubiquité grâce à une presse qu’il savait utiliser mieux que personne. On peut ajouter son souci d’une diffusion de son message aux classes les moins aisées grâce à un effort novateur de réduction des coûts, par l’utilisation de papier bon marché, de formats réduits (presque de poche) et de sérialisation de certaines publications, ce qui contribuait à créer une attente, une anticipation auprès des lecteurs, et des coûts moindres pour l’éditeur, doublés de profits plus élevés grâce à une meilleure fidélisation. Whitefield était donc loin d’être un inconnu quand il posa le pied en Amérique pour la première fois en 1740. Dès 1738, en effet, les journaux de Boston et de Philadelphie, entre autres, publiaient (à la demande de ses proches collaborateurs) des comptes rendus flatteurs sur ses succès missionnaires dans l’ouest de l’Angleterre, notamment le fait qu’il pouvait prêcher devant 20 000 personnes et qu’il suscitait une générosité sans précédent dans le cadre de ses collectes de fonds pour l’orphelinat qu’il avait créé en Géorgie [59].
Mouvements circulatoires et intégration des marges
28Les « transferts » religieux du xviiie siècle faisaient partie de mouvements circulatoires plus larges, à l’échelle atlantique, qui englobaient non seulement l’Angleterre mais aussi la Grande-Bretagne et plus largement l’Europe, l’Afrique d’une certaine manière, les Antilles et l’Amérique du Nord dans sa diversité géographique et culturelle. Ces mouvements circulatoires correspondaient en réalité à ceux des navires et à ce qu’ils transportaient : des hommes et des marchandises, des livres et des idées, des rumeurs et des informations, notamment par le biais d’une presse en pleine expansion. Au xviiie siècle, les journaux des villes côtières d’Amérique du Nord était composés presque exclusivement de nouvelles d’Europe : on y savait avec un temps de retard ce qui se passait non pas seulement à Londres mais partout en Europe, dans les cours et au-delà. Ainsi, l’Atlantique n’était nullement un abîme entre deux mondes distincts mais plutôt une « voie navigable », pour reprendre les termes de Ian Steele [60].
29La Boston Gazette du 14 avril 1755 fournit à ses lecteurs des informations en provenance de Lisbonne via Madrid, de Francfort, Bruxelles, Copenhague, Ratisbonne, et de Waterford via Dublin. Via Londres parviennent des nouvelles de Voltaire, une histoire de mœurs à Lyon, d’autres nouvelles de Cork, du Kent, sur les relations entre l’Allemagne et la Pologne et sur le tremblement de terre de Constantinople. Une lettre d’Amsterdam évoque les questions dynastiques espagnoles, la natalité de la Prusse grâce à une autre lettre de Königsberg et résume celle d’un correspondant parisien. Côté américain, une lettre de Charleston (Caroline du Sud) sur George Whitefield s’ajoute à des informations en provenance de Long Island et des Antilles via Salem.
30Dans le numéro du même jour, les « publicités » de la dernière page montrent que parmi les marchandises « européennes » (et donc pas seulement anglaises) vendues par Benjamin Church, on trouvait de la soie de premier choix : ce n’était plus du tissu en vrac ni des tissus fonctionnels mais de la soie, et pas n’importe laquelle puisque celle-ci était d’une qualité vantée comme supérieure ; ce qui atteste d’une grande diversification de l’offre, donc de la culture des consommateurs, mais montre également qu’il existait un marché pour ces biens. De même, ce n’était pas simplement du charbon dont on annonçait l’arrivée mais du charbon en provenance de Newcastle, gage de qualité comparable à nos AOC, et de premier choix, ce qui constitue un double marquage à la fois qualitatif et promotionnel. On y annonce également la parution d’un pamphlet intitulé A Scheme to drive the French out of the Continent of America, dont il est précisé qu’il a reçu un très bon accueil lors de sa parution en Angleterre – caution par excellence – et qu’il est conseillé à « tous les amis de la liberté », ce qui flatte le lecteur (qui ne se revendiquerait pas ami de la liberté ?), autant d’arguments que l’on peut considérer comme clairement publicitaires.
31Le Boston Evening Post du 11 août 1755 publie une lettre de Ballymenaugh (sic) en Irlande du Nord qui fait état d’un tremblement terre à Mytilène, dans les îles grecques, en se fondant sur des témoignages de Smyrne (Izmir) obtenus via Venise. Dans le Boston Evening Post du 15 septembre de la même année, un correspondant parisien écrit qu’il a appris par des lettres en provenance des Pays-Bas qu’un grand tremblement terre a touché les Indes Orientales (Indonésie actuelle). Le même numéro propose au lecteur un extrait du Spectator et des passages de lettres ou des informations de Paris, Bordeaux, Nantes, Vienne, La Haye, Hanovre, Rome, Madrid, Alger, Amsterdam et Londres.
32Les tremblements de terre très rapprochés de Boston (18 novembre 1755) et de Lisbonne (1er novembre, mais annoncé dans les journaux américains de fin décembre seulement) firent l’objet de la même « couverture ». Celui de Boston fut suivi de l’annonce de la publication d’un certain nombre de sermons les interprétant comme des signes de la colère de Dieu, s’appuyant parfois sur l’Apocalypse et appelant à la repentance, alors que la nouvelle du terrible tremblement de terre de Lisbonne fut accompagnée d’une présentation entièrement factuelle de la ville, afin de contextualiser l’information [61]. La Boston News Letter du 9 janvier 1756 faisait la promotion d’une publication sur un tremblement de terre survenu à Lima en 1746, dont l’annonce était intercalée entre celles de deux sermons. Quand la nouvelle du tremblement de terre de Lisbonne eut traversé l’Atlantique, les pasteurs l’inclurent dans une nouvelle série de sermons publiés presque immédiatement [62]. Des lettres de négociants anglais établis à Lisbonne et transmises par un capitaine de navire s’inquiétaient de l’insolvabilité des débiteurs décédés ou ruinés par le séisme, ce qui, dans un même journal, met bien en évidence l’intégration du commerce, de la publicité, de l’information et de la religion, tant de la part des responsables du journal que dans l’esprit des lecteurs [63]. À côté des annonces de publication de nouveaux sermons, se trouvaient des publicités pour des biens vendus, par exemple, par des marchands d’origine huguenote anglicisés et anglicans, les frères Deblois, et d’autres dont la provenance londonienne sert d’argument publicitaire. On peut noter aussi la variété et la qualité des biens, qui ne sont plus, et de loin, des marchandises de première nécessité, comme en témoigne l’utilisation des superlatifs et d’un vocabulaire descriptif de plus en plus détaillé et diversifié [64].
33Au-delà des villes côtières, l’arrière-pays était lui aussi intégré économiquement dans l’espace Atlantique. Quand les marchandises importées d’Europe arrivaient à Boston, par exemple, des marchands ambulants partaient les vendre dans des villages aussi reculés que Berwick dans le Maine, pour reprendre un exemple de 1721 [65]. T. H. Breen, Carole Shammas et un certain nombre d’auteurs ont tordu le cou de façon parfaitement convaincante au mythe d’une Amérique coloniale autosuffisante et coupée des villes et du marché atlantique [66]. Ainsi, Breen explique que l’explosion du commerce atlantique, de la production autant que de la consommation – de l’offre comme de la demande – touchait aussi bien les côtes que l’arrière-pays et qu’elle n’était pas limitée aux plus aisés [67]. Une autre facette de l’intégration atlantique est l’implication de certains achats : ainsi, la consommation de thé nécessitait l’achat de tasses, sous-tasses, théières et sucriers adéquats, de sucre (des Antilles) pour mettre dans le sucrier, de petites cuillers issues de la sidérurgie et de l’orfèvrerie anglaises. Les services en porcelaine du Staffordshire, les seuls à pouvoir contenir de l’eau bouillante, étaient tellement répandus que T. H. Breen les considère comme rien moins que le « Coca-Cola du xviiie siècle [68]. » Grâce au développement de la publicité et du crédit, dû à l’insuffisance chronique de numéraire, c’est dans les années 1740 que l’on situe l’explosion commerciale à tous les niveaux, ce qui coïncide avec les premières tournées américaines de George Whitefield [69].
34Jack Greene défend de manière convaincante la thèse d’une convergence des différentes régions de l’Amérique coloniale et d’une (ré)anglicisation qui passait par l’émulation des goûts en vogue en Angleterre, que ce soit au niveau architectural, matériel (le mobilier, les biens de consommation), ou des idées (la pratique de la charité civique). Si Greene estime que cette tendance se limite aux élites urbaines, Breen montre que ces dernières copiaient les élites métropolitaines, mais étaient elles-mêmes copiées par les autres colons moins aisés, ce qui explique par exemple la vogue quasi universelle du thé. Il s’agissait d’une percolation lente des goûts à travers les couches de la société, mais elle n’en était pas moins efficace [70].
35Le vin de Madère fournit à la fois un exemple et un contre-exemple de l’intégration des marges américaines dans l’espace atlantique. L’adoption dans certains milieux de la consommation de madère comme code social, avec sa dimension exclusive, était commune aux deux rives de l’Atlantique. Cette consommation d’un produit élaboré tout au long du xviiie siècle sur le mode de la « conversation » entre producteurs, distributeurs et consommateurs, magistralement mis en lumière par D. Hancock, contribua à créer un « espace commercial, culturel et identitaire commun autour de l’ensemble du bassin atlantique ». Cependant, dans cet espace culturel commun, certains goûts régionaux distincts se développèrent : ainsi les Américains avaient une préférence pour des vins plus secs, les Anglais pour des vins plus doux [71].
36Boston est un autre exemple de cette anglicisation de l’Amérique. La ville subit l’influence des guerres quasi continues entre 1689 et 1713, puisque sa proximité de la Nouvelle-France en fit la base de la marine anglaise. La présence de milliers de soldats, entre autres, fit passer le nombre de tavernes de 32 en 1691 à 81 en 1710, la prostitution devint plus courante, la petite criminalité augmenta considérablement, de même qu’une certaine ostentation jusque-là inédite. Boston en tant que capitale puritaine appartenait au passé, même si la dilution de l’esprit puritain n’implique pas pour autant sa disparition pure et simple. La modernité accompagnait l’urbanisation : le premier égout souterrain, financé par les usagers, fut construit en 1704, de plus en plus de rues étaient pavées et de plus en plus de maisons étaient construites en briques, pour limiter la propagation des incendies. En 1719, un visiteur anglais admiratif estima à un tiers la proportion des maisons en briques et en marchant de la North End vers le centre de la ville, il passa devant pas moins de cinq boutiques d’imprimeurs et dix-neuf de libraires. Si les goûts et les habitudes de consommation dépassaient le cadre des villes côtières, les innovations urbanistiques et les problèmes inhérents aux villes épargnèrent les villages de l’intérieur [72]. La Nouvelle-Angleterre gardait une physionomie très spécifique, mais certaines évolutions, notamment démographiques et sociologiques, entraînaient une convergence entre elle et les autres régions, ainsi que son intégration croissante à une économie d’ampleur atlantique. Breen estime que « le chemin de l’américanisation passait par l’anglicisation », alors que l’anthropologue James Deetz – qui préfère utiliser le concept de « réanglicisation » – remarque qu’à la veille de la Révolution, « les Américains étaient plus anglais qu’ils ne l’avaient été depuis les premières années de colonisation [73] ». Jack Greene, enfin, tempère en expliquant qu’à la veille de la Révolution, chaque région était à la fois plus créolisée et plus anglicisée [74].
37*
38L’étude de l’« histoire religieuse » des colonies américaines et des futurs États-Unis, aspire sinon aux grands espaces, au moins au grand large. Elle invite à une reconsidération du cadre spatial, à un élargissement de l’horizon, loin d’une perspective uniquement (nord-)américaine ou encore trop étroitement anglo-américaine. Elle doit être envisagée dans la globalité, la complexité, la fluidité de son intégration atlantique.
39Dans le cas de l’Amérique coloniale – et de rares exceptions finalement assez anecdotiques – les phénomènes religieux n’existaient pas indépendamment du monde, et leur circulation à travers et autour du bassin atlantique était parfaitement intégrée dans des mouvements plus larges. Ainsi, au contraire de transferts culturels linéaires et invariablement centrifuges, la circulation atlantique s’inscrit dans une sorte de géométrie « non euclidienne » au caractère insaisissable [75]. Les interactions entre les phénomènes religieux et l’ensemble des activités commerciales sont également frappantes, sinon surprenantes.
40Si George Whitefield semble incarner cette interpénétration de la religion et du commerce, celle-ci ne se limite pas à son exemple ni à ses réseaux, puisque la presse de l’époque témoigne de la quotidienneté de l’imbrication des phénomènes. Dans le cas du Réveil, le succès évangélique passait par une marchandisation réussie de la parole. En conséquence, l’histoire des phénomènes religieux ne doit pas être traitée en tant que telle, isolément, coupée du monde et de l’environnement (bassement) matériel dans lequel ils étaient pleinement intégrés.
Notes
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[*]
Lauric Henneton est maître de conférences à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (Laboratoire Suds d’Amériques et Espace Atlantique). Il prépare une Histoire religieuse des États-Unis aux éditions Flammarion.
-
[1]
David Armitage, Michael J. Braddick, The British Atlantic World, 1500-1800, Basingstoke/New York, Palgrave/Macmillan, 2002, p. 3. Le premier chapitre de cet ouvrage collectif important présente notamment les trois grandes perspectives théoriques qu’offre l’histoire atlantique : l’histoire « circumatlantique », autrement dit, celle de l’espace atlantique dans son ensemble ; l’histoire transatlantique ou comparative ; l’histoire « cis-atlantique » qui s’intéresse à une région spécifique dans son intégration à l’espace atlantique. Le présent article, consacré essentiellement à la Nouvelle-Angleterre coloniale, s’inscrit dans cette dernière perspective.
-
[2]
S. D. Smith, « The Atlantic History Paradigm », in The New England Quarterly, vol. 79, n° 1, 2006, p. 123, 124.
-
[3]
Timothy H. Breen, « An Empire of Goods : The Anglicization of Colonial America, 1690-1776 », in The Journal of British Studies, vol. 25, n° 4 : « Re-Viewing the Eighteenth Century », 1986, p. 468-473.
-
[4]
Cf. ibid. et David Hancock, « Commerce and Conversation in the Eighteenth-Century Atlantic : The Invention of Madeira Wine », in Journal of Interdisciplinary History, vol. 29, n° 2, 1998, p. 197-219 ; D. Hancock, « L’émergence d’une économie de réseau : le vin de Madère (1640-1815) », in Annales ESC, vol. 158 n° 3, 2003, p. 649-672 ; « The British Atlantic World : Co-ordination, Complexity, and the Emergence of an Atlantic Market Economy, 1651-1815 », in Itinerario, vol. 23, n° 2, 1999, p. 107-127. Ces travaux ont donné lieu à un ouvrage magistral : Oceans of Wine : Madeira and the Emergence of American Trade and Taste, New Haven, Yale University Press, 2009. Voir également Citizens of the World : London Merchants and the Integration of the British Atlantic Community (1735-1785), Cambridge, Cambridge University Press, 1995.
-
[5]
D. Hancock, « Commerce and Conversation », op. cit., p. 197.
-
[6]
Ibid., p. 203.
-
[7]
David Cressy, Coming Over : Migration and Communication between England and New England in the Seventeenth Century, Cambridge, Cambridge University Press, 1987, p. viii.
-
[8]
T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 473.
-
[9]
Ibid., p. 471. Alison Games, « Atlantic History : Definitions, Challenges and Opportunity », in American Historical Review, vol. 111, n° 3, 2006, p. 741, 753. Bernard Bailyn, « The Idea of Atlantic History », in Itinerario, vol. 20, n° 1, 1996, p. 19-44. L’histoire atlantique donne lieu à une importante introspection collective critique par ses praticiens ainsi qu’à de nombreux essais de définition et de circonscription du champ : en plus des articles de Games et Bailyn cités supra, voir notamment « Roundtable Conference : The Nature of Atlantic History », in Itinerario, vol. 23, n° 2, 1999, p. 48-173 et en particulier l’article de Silvia Marzagalli, « The French Atlantic », p. 70-83. Voir aussi Silvia Marzagalli, « Sur les origines de l’Atlantic History. Paradigme interprétatif de l’histoire des espaces atlantiques à l’époque moderne », in Dix-Huitième Siècle n° 33, 2001, p. 17-31 ; Nicholas Canny, « Writing Atlantic History : or, Reconfiguring the History of Colonial British America », in The Journal of American History, vol. 86, n° 3, 1999, p. 1093-1114 ; Bernard Bailyn, Atlantic History : Concept and Contours, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 2005 ; Cécile Vidal, « The Reluctance of the French Historians to Address Atlantic History », in The Southern Quarterly, vol. 43, n° 4, 2006, p. 153-189 ; C. Vidal, « La nouvelle histoire atlantique en France. Ignorance, réticence et reconnaissance tardive », in Nuevo Mundo Mundos Nuevos [en ligne], Coloquios, 2008, mis en ligne le 24 septembre 2008. URL : http://nuevomundo.revues.org/index42513.html.
-
[10]
T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 474.
-
[11]
Dans le contexte très particulier du puritanisme, il faut ranger l’essentiel des parlementaires dans le pays réel et non dans le pays légal : c’est la distinction entre « court » et « country » qui prévaut ici.
-
[12]
Lauric Henneton, Liberté, inégalité, autorité. Politique, société et construction identitaire du Massachusetts au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2009, chapitres 7 (sur les réseaux prémigratoires) et 15 (sur la sociabilité transatlantique).
-
[13]
Robert C. Black III, The Younger John Winthrop, New York/Londres, Columbia University Press, 1966 et The Winthrop Papers, Allyn B. Forbes et al., éd., Boston, Massachusetts Historical Society, 6 vol., 1929-1992, passim (désormais WP).
-
[14]
R. Black, The Younger John Winthrop, op. cit., p. 187, 188.
-
[15]
Larry D. Gragg, « A Puritan in theWest Indies : The Career of Samuel Winthrop », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 50, n° 4, 1993, p. 768-786.
-
[16]
WP, vol. 2, p. 338, 345, 356, 361, 369, 379, 382, 404, 405, 414 ; Francis J. Bremer, John Winthrop : America’s Forgotten Founding Father, Oxford/New York, Oxford University Press, 2003, p. 129.
-
[17]
WP, vol. 3-5, passim.
-
[18]
Babette Levy, « Early Puritanism in the Southern and Island Colonies », in Proceedings of the American Antiquarian Society, vol. 70, partie 1,Worcester, Mass., 1960, p. 69-348 ; Kevin Butterfield, « Puritans and Religious Strife in the Early Chesapeake », The Virginia Magazine of History and Biography, vol. 109, n° 1, 2001, 5-36 ; L. Gragg, « Puritans in Paradise : The New England Migration to Barbados, 1640-1660 », in Journal of Caribbean History, 21.2, 1988, p. 154-167.
-
[19]
Voir la lettre de John Winthrop à son épouse, datée du 15 mai 1629, in WP, vol. 2, p. 91-92, et « Reasons to be considered for justifying the undertakers of the intended Plantation in New England, and for encouraging such whose hearts God shall move to join with them in it », ibid., p. 106-149. Plus généralement, voir L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., chap. 9.
-
[20]
Ibid., chap. 12.
-
[21]
Lauric Henneton, « Discours et pratiques de l’exclusivisme américain, 1630-v.1780 », communication au séminaire GRER, Université Paris VII-Denis Diderot, 9 mars 2007.
-
[22]
En plus des travaux précédemment cités de B. Levy, K. Butterfield, L. Gragg, voir l’ouvrage de Karen O. Kupperman, Providence Island, 1630-1641 : The Other Puritan Colony, Cambridge, Cambridge University Press, 1993.
-
[23]
F. Bremer, Congregational Communion : Clerical Friendship in the Anglo-American Puritan Community, 1610-1692, Boston, Northeastern University Press, 1994.
-
[24]
Ibid., p. 309 et Bernard Bailyn, The New England Merchants in the Seventeenth Century, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1955, p. 94.
-
[25]
D. Hancock, « The British Atlantic World », op. cit., p. 123.
-
[26]
Cf. T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit. ; L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., chap. 16 et « From Commonwealths into Colonies ? New Englishness in a Transatlantic Perspective (1630-1692) », Colloque From Colonies into Republics in an Atlantic World, 8-9 décembre 2006, Paris. URL : http://www.ufr-anglais.univ-paris7.fr/CENTRES_RECHERCHES/CIRNA/CIRNA1/RESSOURCES/AUTRES_PAGES/COLLOQ/contrib/Lauric_Henneton/From_Commonwealth_into_Colonies.php
-
[27]
Nathaniel B. Shurtleff, éd., Records of the Governor and Company of the Massachusetts Bay in New England, Boston, Little Brown & Co., 1853-1854, vol. 2, p. 212 ; L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., p. 681-682.
-
[28]
Ibid., p. 471, 679-683.
-
[29]
Ibid., p. 628-645.
-
[30]
Ibid., p. 647-648 ; L. Henneton, « Les meilleurs ennemis : Nouvelle-France et Nouvelle-Angleterre au xviie siècle », in Susanne Berthier-Foglar, éd., La France en Amérique. Mémoire d’une conquête, Grenoble, Presses de l’Université de Savoie, 2009, p. 157-174.
-
[31]
K. Kupperman, Providence Island, op. cit., chap. 8 et 10.
-
[32]
L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., p. 626-628.
-
[33]
Ibid., p. 754-755.
-
[34]
Pauline Maier, « Popular Uprisings and Civil Authority in Eighteenth-Century America », The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 27, n° 1, 1970, p. 3-35 ; T. H. Breen, Stephen Foster, « The Puritans’ Greatest Achievement :AStudy of Social Cohesion in Seventeenth-Century Massachusetts », in Journal of American History, vol. 60, n° 1, 1973, p. 5-22.
-
[35]
F. Bremer, The Puritan Experiment : New England Society from Bradford to Edwards, New York, St Martin’s Press, 1976, p. 219.
-
[36]
L. Henneton, Liberté, inégalité, autorité, op. cit., chap. 16.
-
[37]
B. Bailyn, The New England Merchants, op. cit., p. 111, 122.
-
[38]
Michael G. Hall, The Last American Puritan : The Life of Increase Mather 1639-1723, Middletown, Wesleyan University Press, 1988, chap. 7 ; F. Bremer, The Puritan Experiment, op. cit., p. 216.
-
[39]
F. Bremer, ibid., p. 217.
-
[40]
Joseph J. Ellis, « Anglicans in Connecticut, 1725-1750 : The Conversion of the Missionaries », in The New England Quarterly, vol. 44, n° 1, 1971, p. 67.
-
[41]
M. Hall, The last American Puritan, op.cit., p. 292, 320.
-
[42]
F. Bremer, The Puritan Experiment, op. cit., p. 223, 229 ; Perry Miller, Errand into the Wilderness, New York, Harper & Row, 1956, p. 175-183. Plus récemment, voir Philip F. Gura, Jonathan Edwards : America’s Evangelical, New York, Farrar, Straus and Giroux, 2006.
-
[43]
F. Bremer, The Puritan Experiment, op. cit., p. 223-225 ; Bernard Cottret, « Le paradigme perdu : Le Great Awakening entre la faute et l’innocence », Études Théologiques et Religieuses, t. 75, 2000/2, p. 218-219 ; J. Ellis, « Anglicans in Connecticut », op. cit. ; Douglas C. Stenerson, « An Anglican Critique of the Early Phase of the Great Awakening in New England : A Letter by Timothy Cutler », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 30, n° 3, 1973, p. 475-478.
-
[44]
Bertrand Van Ruymbeke, « Une église épiscopale sans évêques : paradoxes et mutations de l’Église d’Angleterre dans les colonies nord-américaines », in Anglophonia : French Journal of English Studies, 17/2005/Protestantisme(s) et autorité, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2005, p. 335-345.
-
[45]
Maurice W. Armstrong, « The Dissenting Deputies and the American Colonies », Church History, vol. 29, n° 3, 1960, p. 308-316 ; Carl Bridenbaugh, Mitre and Sceptre : Transatlantic Faiths, Ideas, Personalities, and Politics, 1689-1775, New York/ Oxford, Oxford University Press, 1962, passim.
-
[46]
C. Bridenbaugh, ibid. ; J. Ellis, « Anglicans in Connecticut », op. cit., p. 73 ; Patricia U. Bonomi, Peter R. Eisenstadt, « Church Adherence in the Eighteenth-Century British American Colonies », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 39, n° 2, 1982, p. 245-286. Voir aussi P. Bonomi, Under the Cope of Heaven : Religion, Society and Politics in Colonial America, Oxford University Press, 20032.
-
[47]
Jack P. Greene, Pursuits of Happiness : The Social Development of Early Modern British Colonies and the Formation of American Culture, Chapel Hill, The University Press of North Carolina, 1988, p. 61 et 179 ; J. Ellis, « Anglicans in Connecticut », op. cit., p. 81 ; Bruce E. Steiner, « New England Anglicanism : A Genteel Faith ? », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 27, n°1, 1970, p. 122-123.
-
[48]
J. Ellis, « Anglicans in Connecticut », op. cit., p. 73-81.
-
[49]
Frederick B. Tolles, Quakers and the Atlantic Culture, New York, Octagon Books, 1980, p. 13, 16, 17, 29, 30, 31, 33 ; B. Levy, « Early Puritanism », op. cit., passim.
-
[50]
F. Bremer, The Puritan Experiment, op. cit., p. 214.
-
[51]
B. Cottret, « Le paradigme perdu », op. cit., p. 216-217. Voir l’excellent ouvrage récent de Thomas S. Kidd, The Great Awakening : The Roots of Evangelical Christianity in Colonial America, New Haven, Conn./Londres, Yale University Press, 2008.
-
[52]
John B. Frantz, « The Awakening of Religion among the German Settlers in the Middle Colonies », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 33, n° 2, 1976, p. 279-282. Sur Zinzendorf et les moraves, voir Émile G. Léonard, Histoire générale du protestantisme, Paris, PUF, 1988, t. III, p. 99-109. Voir également Aaron Spencer Fogleman, Jesus is Female : Moravians and Radical Religion in Early America, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 2007.
-
[53]
Elizabeth I. Nybakken, « New Light on the Old Side : Irish Influences on Colonial Presbyterianism », in The Journal of American History, vol. 68, n° 4, 1982, p. 813-832 ; Ned Landsman, « Revivalism and Nativism in the Middle Colonies : The Great Awakening and the Scots community in East New Jersey », in American Quarterly, vol. 34, n° 2, 1982, p. 149-164.
-
[54]
Frank Lambert, « “Pedlar in Divinity” : George Whitefield and the Great Awakening, 1737-1745 », in Journal of American History, vol. 77, n° 3, 1990, p. 814 ; D. Stenerson, « An Anglican Critique », op. cit., p. 480-488 ; C. Bridenbaugh, Mitre and Sceptre, op. cit., p. 183.
-
[55]
C. Bridenbaugh, ibid., p. 84.
-
[56]
Voir l’American Weekly Mercury (Philadelphie) du 14 août 1740, par exemple. Dès le siècle précédent, les « Épîtres » de George Fox étaient lues dans l’ensemble des communautés quakers établies autour de l’Atlantique. Cf. F. B. Tolles, Quakers and the Atlantic Culture, op. cit., p. 31.
-
[57]
Sur la relation entre Whitefield et Franklin, voir l’étude de Frank Lambert, « Subscribing for Profits and Piety : The Friendship of Benjamin Franklin and George Whitefield », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 50, n° 3, 1993, p. 529-554, ainsi que les quelques pages célèbres de l’autobiographie de Franklin : The Autobiography and Other Writings, Jesse Lemisch, éd., New York, Signet Classic, 2001, p. 116-120.
-
[58]
Jon Butler, « Enthusiasm Described and Decried : The Great Awakening as Interpretative Fiction », in The Journal of American History, vol. 69, n° 2, 1982, p. 305-325.
-
[59]
F. Lambert, « “Pedlar in Divinity” », op. cit. ; Susan O’Brien, « A Transatlantic Community of Saints : The Great Awakening and the First Evangelical Network, 1735-1755 », in The American Historical Review, vol. 91, n° 4, 1986, p. 811-832. Sur la participation des Noirs dans les mouvements de réveil, voir F. Lambert, « “I Saw the Book Talk” : Slave Readings of the First Great Awakening », in The Journal of African American History, vol. 87, 2002, p. 12-25. Les travaux de Lambert ont ensuite donné lieu à Pedlar in Divinity : George Whitefield and the Transatlantic Revival, 1737-1770, Princeton University Press, 1994, rééd. 2002 ; et plus récemment Inventing the « Great Awakening », Princeton University Press, 2001. Voir, par exemple, American Weekly Mercury (Philadelphie), 17 janvier 1738.
-
[60]
Cité par D. Hancock, « Commerce and Conversation », op. cit., p. 198.
-
[61]
Respectivement, Boston Gazette, 24 novembre 1755, 8 décembre 1755, 12 janvier 1756, 29 décembre 1755. Les sermons en question étaient les suivants : Thomas Prince, An Improvement of the Doctrine of Earthquakes, Being the Works of God and Tokens of his Just Displeasure ; Charles Chauncy, Earthquakes a Token of the righteous Anger of God ; Jonathan Mayhew, A discourse on Rev. XV. 3d, 4th. Occasioned by the earthquakes in November 1755.
-
[62]
Voir, par exemple, Boston Gazette, 2 février 1756.
-
[63]
Boston Evening Post, 29 décembre 1755, jour où la description factuelle de Lisbonne fut publiée.
-
[64]
Boston Evening Post, 8 décembre et 15 décembre 1755 ; T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 489.
-
[65]
Ibid., p. 467-468.
-
[66]
Voir ibid., p. 479-85 pour les références. Breen oppose principalement l’article de James Henretta, « Families and Farms : Mentalité in Pre-Industrial America », in The William and Mary Quarterly, 3e série, vol. 35, 1978, p. 3-32 et celui de Carole Shammas, « How Self-Sufficient was Early America », in Journal of Interdisciplinary History, 13, 1982, p. 247-72.
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[67]
T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 468.
-
[68]
Ibid., p. 473-478, 488, 496 ; D. Hancock, « Commerce and Conversation », op. cit., p. 203.
-
[69]
T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 486-487.
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[70]
Ibid., p. 476-477, 487.
-
[71]
D. Hancock, « Commerce and Conversation », op. cit., p. 205, 219.
-
[72]
M. Hall, The Last American Puritan, op. cit., p. 326, 329, 332, 337-338 ; C. Bridenbaugh, Cities in the Wilderness : The First Century of Urban Life in America : 1625-1742, New York, Capricorn Books, 1964, 19381, p. 146-171, 292 ; J. Greene, Pursuits of Happiness, op. cit., p. 65.
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[73]
Cité par T. H. Breen, « An Empire of Goods », op. cit., p. 497.
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[74]
J. Greene, Pursuits of Happiness, op. cit., p. 176.
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[75]
La formule de Sir Lewis Namier est citée par Bernard Cottret, Histoire d’Angleterre : XVIe-XVIIIe siècle, Paris, PUF, coll. « Nouvelle Clio », 2003, p. 188-189.