Notes
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[1]
Analysant le marché à la criée du matif, Jean-Pierre Hassoun [2000] montre que l’histoire d’un marché n’est jamais linéaire et comment des événements externes et internes au marché ont changé la qualité des relations.
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[2]
L’ambiguïté du statut du Salon (destiné aux amateurs ou aux professionnels) était encore présente pour certains prescripteurs en 1997. En témoigne la présentation qu’en fait Hugh Johnson [1997] dans son ouvrage destiné au tourisme intitulé Vins de Loire. Le Salon est cité parmi les foires et les dégustations. Florence Weber [2000] attire l’attention sur l’importance des techniques rituelles assurant la rupture entre le monde de la transaction marchande et le monde des transactions personnelles. Ici, la technique rituelle assure la rupture entre les transactions au détail et en gros.
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[3]
Le terme liger désigne la Loire en latin.
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[4]
Terme utilisé par les professionnels du vin pour désigner les propriétés gustatives et visuelles du vin.
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[5]
Dans d’autres régions comme la Bourgogne, c’est le folklore qui constitue un élément essentiel dans la construction de l’image de la qualité des vins [Laferté, 2002].
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[6]
On remarquera ici la similitude entre le salon des vins et la présentation des collections dans la haute couture. Pierre Bourdieu y note par exemple « la présence de cent journalistes en quête d’informations quotidiennes, les revues spécialisées qui en présenteront la synthèse photographique un mois après, enfin les acheteurs professionnels dont les dollars, les livres ou les francs permettront de concrétiser pour les femmes ces idées jugées parfois téméraires ou au contraire trop timorées » [Bourdieu et Delsant, 1975 : 24].
1Depuis 1985 se déroule tous les ans, fin janvier, à Angers, le Salon des vins de Loire, événement qui a lieu sur trois jours et mobilise viticulteurs des appellations situées entre Nantes et Sancerre, de part et d’autre de la Loire, négociants et professionnels du vin, restaurateurs, cavistes, sommeliers, importateurs, chefs de rayons de centrales d’achats. Dans une navette mise à la disposition des visiteurs pour rejoindre le parc des expositions, je découvre, avant même d’y pénétrer, l’intérêt des professionnels du vin de France et d’ailleurs pour ce salon : attachés-cases des uns, serviettes gonflées de documents des autres suggèrent qu’il s’agit d’importateurs, de négociants ou de chefs de rayons de chaînes de grande distribution. La plupart s’adressent au chauffeur en anglais ou avec un accent étranger. À l’entrée du Salon, une hôtesse me demande de décliner ma condition professionnelle, me donne un badge bleu mentionnant mon appartenance institutionnelle et ma qualité de « visiteur français ». Mes compagnons de voyage anglophones reçoivent, eux, un badge rouge « visiteur étranger » et se voient attribuer un espace pour y déposer leurs bagages. La vocation professionnelle et internationale du Salon est affirmée des deux côtés de l’allée qui mène au hall d’exposition, où se trouvent les stands des institutions qui réglementent la production viticole (l’Institut national des appellations d’origine, l’onivins), assistent les producteurs dans leurs activités exportatrices, notamment le Comité français du commerce extérieur, et vendent des produits complémentaires à l’activité viticole : étiquettes, revues et ouvrages spécialisés, etc.
2En entrant dans le hall d’exposition proprement dit, je suis déroutée par le spectacle mouvant de passants, de gens qui dégustent, hommes pour la plupart, à l’entrée des stands sur un petit comptoir ou assis autour de petites tables où sont posés tarifs, verres et crachoir. Les conversations et les attitudes des partenaires, parfois crayon et calculette en main, suggèrent que le moment de l’entretien n’en est plus à découvrir les qualités gustatives des produits, mais à négocier. D’autres sont animées, ponctuées d’accolades, interactions indicatives d’un certain degré d’interconnaissance : l’intérêt pour les affaires et pour le plaisir du palais ne sont pas les seuls enjeux. Le tout se passe sur un fond haut en couleur, agrémenté de fleurs et de feuillage, dans le brouhaha des conversations.
3La disposition des stands s’avère également surprenante : certains sont parfois occupés par des producteurs d’appellations différentes et il n’y a pas de répartition claire par appellation. Enfin la diversité des agencements et de la taille des stands est frappante, mêlant les couleurs et les styles : reconstitution d’intérieur rustique, table de jardin, colonnes grecques bleu roi, ou compositions réalisées par des décorateurs à l’aide de paravents, voûtes de bois ou de matériaux synthétiques formant de petits salons. L’animation varie selon le jour, l’heure, la programmation et le type d’exposant. Une dégustation organisée par l’association des sommeliers du Val de Loire alliant vins de Loire et charcuteries allemandes, l’année où l’Allemagne est l’invitée d’honneur, draine une partie des visiteurs. À un autre moment, c’est le concours du meilleur jeune sommelier du Val de Loire et sa remise de prix qui retiennent l’attention.
4Le premier jour est réservé aux restaurateurs et aux cavistes. L’affluence est nombreuse. La fréquentation du deuxième jour est telle qu’il m’est impossible de solliciter des entretiens en dehors des personnes déjà rencontrées avant le Salon et avec qui je partage des impressions sur son déroulement. Les propos échangés insistent sur le caractère de convivialité. Ainsi une viticultrice me raconte le récent passage d’un importateur américain, qui ne tarissait pas d’éloges sur le Salon où il se sentait mieux qu’à Vinexpo (Salon mondial du vin et des spiritueux qui a lieu à Bordeaux), moins perdu, disait-il.
5Cette convivialité affichée n’empêche pas le caractère extrêmement professionnel du Salon. Ainsi, son commissaire général, rencontré quelques jours avant son déroulement, a souligné les mesures successives qui ont été prises pour réduire et finalement supprimer le temps réservé au grand public. Il affirme qu’à Angers, la première question que l’on vous pose quand vous arrivez est « Qu’est-ce que vous voulez déguster ? » et non pas « Qui êtes-vous ? ». La dégustation et l’aspect convivial de l’événement sont soulignés aussi bien par les exposants que par le représentant du Comité français du commerce extérieur au Salon : « Vous savez ici c’est vraiment convivial, à Vinexpo, c’est du business, ici, vous serez toujours bien accueilli, vous n’avez pas besoin de rendez-vous. » La femme d’un œnologue qui m’a accompagnée a souligné cet accueil désintéressé après chaque stand que nous visitions. Pourquoi le caractère professionnel du Salon va-t-il de pair avec une certaine dénégation de son aspect commercial ?
6Pour comprendre l’importance du Salon pour ses participants, la place qu’il occupe dans le travail de valorisation des vins et comment il s’est institué, il faut le replacer dans l’univers viticole, voir comment celui-ci est structuré et quelles sont les transformations auxquelles il est confronté face à la chute de la consommation des vins dans les pays traditionnellement producteurs ainsi qu’à la hausse de la consommation dans le reste du monde. Les stratégies des producteurs varient selon qu’ils appartiennent ou non à une aoc (appellation d’origine contrôlée), dont la notoriété dépend en partie de la région où celle-ci est située. La valorisation des vins relève à la fois des soins apportés par le producteur à sa propre production et à la gestion de son exploitation, et du travail des constellations constituées par les appellations et les régions, valorisation dans laquelle sont impliqués les autres producteurs, les professionnels du vin, les représentations des organisations professionnelles et les autorités locales ou régionales [Bartoli et Boulet, 1990 ; Boyer, 1990]. La compétition se joue, entre autres, à travers l’imposition et l’institutionnalisation des différentes formes de vente (vente aux enchères, négoce, vente directe, foires, grande distribution…) qui sont, elles aussi, des supports de légitimité conférant aux produits des profits symboliques et économiques. Il en est du vin comme des produits artistiques ou littéraires qui sont autant l’œuvre des producteurs que des commerçants, des éditeurs, des critiques ou des prescripteurs. Le commerçant d’art, comme le négociant en vins, n’est pas seulement celui qui procure à l’œuvre ou à la bouteille de vin une valeur commerciale en les mettant en rapport avec un certain marché, il est celui qui peut proclamer la valeur de l’auteur ou du producteur qu’il défend [Bourdieu, 1977].
7La valorisation des vins les plus prestigieux est liée, entre autres, à la présence de négociants puissants et d’événements mondialement connus dans les milieux œnophiles, comme la vente aux enchères des Hospices de Beaune ou les enchères de Christie’s. Celle des vins du Val de Loire, qui occupent traditionnellement une place beaucoup plus modeste dans la hiérarchie des vins, n’a pas obéi à la même logique. Elle n’a pas mis en jeu l’intervention de négociants : originaires pour la plupart de la région nantaise où les appellations sont moins valorisées, ils ne disposent pas d’un capital symbolique à la mesure des producteurs des autres appellations du Val de Loire. La commercialisation la plus valorisante résulte le plus souvent de la pratique de la vente directe, à la propriété, sur les foires locales ou les salons destinés au grand public qui regroupent une clientèle en fonction de critères externes au champ œnologique (« Salon des caves particulières », « Salon d’agriculture biologique ») et de la construction de réseaux souvent caractérisés par une dénégation de l’aspect commercial. C’est le cas dans l’appellation Chinon où une confrérie se révèle un élément clé pour la création de réseaux commerciaux sur le plan national, voire international. L’ensemble de ces pratiques n’est pas en mesure d’assurer aux producteurs des vins de Loire une présence significative sur le marché mondial des vins de qualité, à un moment où la concurrence internationale est exacerbée par la stagnation de la consommation des pays traditionnellement producteurs, par la montée en puissance de la production des pays du « Nouveau Monde » [Montaigne, Martin, 2002] et l’émergence dans l’espace viticole français des vins de région du Languedoc-e autres, par une recomposition sociale des producteurs [Chiffoleau, 2001 ; Garcia-Parpet, 2001 ; Touzard, 1993].
8La création du Salon des vins de Loire résulte des intérêts convergents de viticulteurs à la recherche de nouveaux débouchés et des responsables politiques d’une ville cherchant à en dynamiser les activités commerciales. La ville d’Angers ayant investi dans la construction d’un parc des expositions, les responsables politiques de la dynamisation économique ont proposé la création du Salon des vins, qui devait faire partie d’un vaste programme de manifestations diverses, comportant entre autres un Salon international des chrysanthèmes, une exposition canine. Place marchande destinée aux « professionnels » des vins visant à la fois les professions viticoles, arboricoles et maraîchères, ne faisant pas la différence entre salon de dégustation et salon d’échanges entre professionnels, le travail des promoteurs a consisté en une consolidation d’un salon régional à vocation internationale par une succession de redéfinitions du Salon.
Une évolution progressive
9Cette innovation a donc pris corps dans les ajustements successifs, au fil des ans, et non par un projet ou acte inaugural qui aurait fixé les règles, dessiné les pratiques et déterminé la place de cet espace marchand dans le champ de la commercialisation des vins. À Angers, les différents participants ont procédé par tâtonnements pour se distinguer des salons ou foires locales destinées au grand public et pour se constituer en espace marchand capable d’entrer en compétition avec la foire internationale de Bordeaux, Vinexpo, le Salon des vins de Londres et Vini-Sud, foire régionale à vocation internationale récemment créée.
10Le Salon a été fréquenté, lors de ses premières années, par un certain nombre de producteurs de proximité (provenant principalement des appellations du Maine-et-Loire) qui voulaient y voir, malgré sa vocation annoncée, des opportunités de vente que procure un tel lieu destiné à une clientèle locale d’amateurs. En trois ans, le nombre d’exposants a triplé, passant de soixante en 1985 à cent quatre-vingts en 1988. Les viticulteurs de Touraine y étaient peu nombreux, de même que les Nantais, et selon le Courrier de l’Ouest du Maine-et-Loire (1er février 1988), les organisations professionnelles regrettaient que les Sancerrois ne jouent pas la « carte Val de Loire ». Actuellement, le Salon est l’espace de rencontre de producteurs qui se définissent en tant que « professionnels » originaires d’appellations plus éloignées (comme celles de Sancerre, Pouilly) et d’appellations du pays nantais, deux cent quatre-vingt-dix en 1989, actuellement cinq cents. Selon la revue Drinks International, les visiteurs étaient évalués à neuf mille en l’an 2000, dont 10 % d’étrangers [Drinks International, 2000].
11Les négociants, qui se sont sentis menacés par cette initiative, et les organisations professionnelles, qui n’ont pas cru d’emblée à l’efficacité d’une telle institution, se sont progressivement investis dans l’opération. C’est l’affluence d’exposants qui a provoqué la séparation du Salon des vins de celui des produits horticoles et arboricoles auquel ses promoteurs l’avaient initialement jumelé. Cette séparation a permis la constitution d’un espace plus attrayant pour les producteurs les plus performants et les plus exigeants dans la construction de l’image de leur produit [1]. En 1997, le Salon des produits d’origine et de tradition est venu mettre sur le même plan des appellations d’origine, des produits labellisés comme le jambon. La volonté de construire un espace où puissent s’épanouir pleinement les professionnels du vin et l’affluence de nouveaux viticulteurs a redonné le monopole au Salon des vins, lorsque celui des produits d’origine et de tradition a été disjoint du premier, en 1999, deux ans après sa création.
12Si la présence de « professionnels », entendus ici comme producteurs ou négociants ayant une structure d’exploitation destinée à des transactions d’envergure, est acquise, actuellement, le souci d’une prise de distance avec le Salon tel qu’il a été conçu les premières années, pendant lesquelles une journée était destinée au grand public, demeure très présent. Une séparation nette avec les pratiques des foires locales est recherchée : contrôle strict des ventes de billets d’entrée, invitations en faveur des professionnels, organisation plus sophistiquée de la distribution des verres, qui permet une dégustation plus fine (un verre pour chaque dégustation). Les fréquents commentaires des exposants sur le fait que la gestuelle de la dégustation est bien celle de « professionnels » (les vins dégustés sont recrachés et non bus) et la satisfaction que cette remarque leur procure sont indicatifs du souci constant qu’ont les participants de s’assurer de la transmutation qu’ils tentent d’imprimer à cet espace marchand [2].
13Ce processus de construction d’un nouveau marché, plus vaste que le marché local, s’est fait progressivement, à travers la régularité même de cette manifestation. Au fil des années s’est constitué et affirmé un groupe de producteurs performants qui imposaient une nouvelle définition de leurs produits et de la profession, des pratiques légitimes et créaient ainsi une nouvelle image rehaussant la leur dans l’espace viticole. Tout se passe comme si, en excluant peu à peu les viticulteurs visant plutôt un marché local, et en affinant l’image des vins de la Loire, les exposants avaient contribué à produire une forme de segmentation de l’offre en s’appuyant sur un travail de mise en scène (messages explicites formulés pour l’événement, notamment affiches et slogans, jusqu’au discours d’accompagnement sur les qualités spécifiques des produits) et en faisant jouer la compétition qu’une telle structure suscite entre les producteurs.
14Au-delà d’une simple confrontation de l’offre et de la demande, la réalisation annuelle du Salon produit une image de ce qu’il y a de plus performant (par exemple, seuls 10 % des producteurs de Chinon y participent). Elle joue un rôle actif dans cette construction, dans les pratiques des producteurs et dans le jeu des classements au sein de l’espace viticole. Fréquenté et parcouru par les agents qui dominent le marché du vin, le Salon a un rôle significatif dans les représentations et dans l’institutionnalisation du marché avec ses nouveautés, ses traditions et ses pratiques légitimes. C’est donc la description de tous ces éléments qui permet de comprendre le Salon ou le marché dont parlent les économistes [La Pradelle, 1996].
Un salon « incontournable pour les professionnels »
15La participation au Salon est un élément constitutif d’une carrière viticole. Les représentants des organisations professionnelles et les producteurs sont unanimes à dire qu’il est « incontournable pour les viticulteurs professionnels », notion qui recouvre à la fois des compétences œnologiques et commerciales et qui suppose un certain volume de production. Chaque année, les exposants découvrent de nouveaux interlocuteurs, partenaires, acheteurs, professionnels du vin ou prescripteurs, et acquièrent de nouvelles dispositions économiques. « Au Salon, on ne réalise pas les affaires tout de suite, c’est plutôt pour le contact, j’ai mis longtemps à comprendre ça », nous affirme la femme d’un producteur, présente en permanence sur le stand et qui avait l’habitude de ne fréquenter que les salons destinés au grand public, où la plupart des transactions se concrétisent tout de suite.
16Contrairement aux foires aux vins ou au Salon des caves particulières destiné aux consommateurs, où les producteurs adoptent une présentation uniformisée (superficies et comptoirs), les stands du Salon d’Angers, comme ceux de Vinexpo, sont l’objet de stratégies de présentation élaborées. Les exposants racontent volontiers leurs débuts maladroits et leurs acquisitions progressives dans la manière de monter les stands, de choisir les meilleurs emplacements, et dans l’expression de leur sociabilité avec les clients. Les producteurs ayant une position plus modeste, plus d’avant-garde dans l’appellation et un capital économique plus faible réalisent eux-mêmes la composition de leur stand, apportant des meubles de leurs maisons familiales ou réalisant des ensembles style bistrot, qu’ils structurent de manière à inviter les passants, ou du moins à les laisser interagir, sans rendez-vous préalable.
17La majorité des stands couvre une superficie de 9 m2, unité standard minimale déterminée par les organisateurs. Les exposants disposent de petits comptoirs, où les visiteurs peuvent déguster debout, de vitrines ou d’étagères pour présenter un échantillon des bouteilles composant leur gamme, alliant différents millésimes et cuvées, de tables où l’on peut déguster assis et conclure des affaires plus confortablement. Sur les parois séparant les stands, les exposants mentionnent à leur guise leur nom, celui du domaine, de l’appellation, éventuellement leur logo et des photos ou un croquis de leur vignoble, de leur château si c’est le cas, les prix obtenus lors de concours, les guides de consommateurs où est mentionné le produit exposé. Le style de cette présentation et l’ajout d’éléments de décoration (compositions florales, rideaux, ustensiles utilisés jadis pour la culture de la vigne ou la vinification) sont autant d’éléments destinés à les identifier en un clin d’œil : notoriété de la production, envergure de l’exploitation ou de la maison de négoce, moyens financiers, entrée récente dans le champ viticole, implication dans les organisations professionnelles, clientèle « cible ». L’affichage d’une date de création de l’exploitation ou du négoce suffit à attirer l’attention sur une tradition familiale. Cette mise en scène des stands par les producteurs va de pair avec leur propre présentation : les hommes ont préféré un costume sombre ou un blazer bleu marine à la chemise en madras ou au pull à col roulé, et les femmes ont remplacé leur jean par un tailleur. La situation du stand dans le hall d’exposition est significative de la position du producteur ou du négociant dans le champ viticole. Dans le « carré d’or » (expression retenue par les familiers pour désigner l’espace recouvrant la moitié du hall d’exposition situé à l’entrée et disputé vivement) s’installent des exposants qui témoignent d’une certaine notoriété œnologique, d’une tradition familiale, d’une présence régulière au Salon, d’un rôle significatif dans les organisations professionnelles.
18Les maisons de négoce se situent pour la plupart dans le « carré d’or » et se distinguent par des stands divisés en petits salons destinés à la dégustation et aux négociations. Celles qui offrent des vins plus bas de gamme ont recours à des décorations osées, telle cette reproduction stylisée d’un château en contreplaqué beige, flanquée d’une étagère en fer forgé où sont exposées des bouteilles multicolores, le grand nombre de vins rosés étant en soi un indice de la qualité des vins (les vins de garde les plus valorisés se concentrent plutôt parmi les rouges, et la tradition du Val de Loire honore plutôt les vins blancs comme le Sancerre). Les étiquettes aux formes et couleurs peu conventionnelles indiquent plutôt une clientèle jeune, peu familière des classiques de la tradition œnologique. Passant devant le stand, je m’arrête pour regarder cet ensemble imposant lorsqu’une hôtesse en tailleur bleu pervenche m’interpelle. Après lui avoir décliné mon identité professionnelle, elle me conduit à son patron, qui m’entretient des transformations que connaît le commerce du vin et de sa satisfaction d’avoir vu défiler à son stand tous les représentants des grandes surfaces. Les maisons traditionnelles, qui concentrent les vins les plus prestigieux de la région et ont une clientèle bien établie, sont aménagées pour que l’on ne se sente autorisé à y pénétrer que si l’on a déjà un rendez-vous ou une carte de visite qu’un homme d’affaires puisse prendre au sérieux. Couleur claire des murs, sobriété des panneaux déclinant le nom de l’exploitant et de son appellation, bois nobles prédominants dans l’agencement des claustras entre les petits salons, vitrines où sont exposés les échantillons. Les comptoirs qui bordent communément l’allée des visiteurs, plus propices aux dégustations a priori moins ciblées sur un achat, en sont absents ou plus retirés à l’intérieur du stand.
19Toute l’organisation tend à valoriser la qualité des produits et de leurs producteurs. Son affirmation dans une vocation internationale est l’objet d’un travail permanent de la part de ses promoteurs (direction du parc des exposition, organisations interprofessionnelles, institutions d’État pour la valorisation des vins). Chaque année, un ou plusieurs pays étrangers font l’objet d’une attention particulière : importateurs et journalistes sont invités, pendant le déroulement du Salon, à prendre part à la soirée de gala réunissant les autorités politiques viticoles. Japon, Royaume-Uni, Pologne, Hollande et pays scandinaves en ont ainsi été, ces dernières années, les invités d’honneur. Les institutions officielles d’aide à l’exportation, notamment le Centre français du commerce extérieur, jouent un rôle important dans le financement de ces opérations, dans l’information des modalités techniques d’exportation et sur l’état des marchés dans les différents pays étrangers. Les compétences pour la conquête des marchés étrangers sont stimulées par la réalisation d’un concours annuel par l’onivins qui récompense la constitution des meilleurs dossiers pour la vente à l’exportation (étude de marché, présentation de l’exploitation faisant ressortir les qualités du produit et l’envergure de sa structure économique) et la composition du meilleur stand.
• Le concours ligérien et l’orthodoxie des pratiques œnologiques et économiques
20La création du prix du « Liger d’or » [3], destiné à promouvoir les vins des appellations de la région et à construire leur identité, le choix des critères imposés aux participants (être exposant ou disposer d’une production minimale pour se présenter au concours) témoignent de la même volonté d’attirer les importateurs et les représentants des centrales d’achats, et ont pour effet de légitimer des modèles de production. Comme pour les biennales dans le marché de l’art [Moulin, 2000 : 36] le Salon a une fonction de qualification des producteurs et des négociants et joue le rôle d’une académie : l’organisation du concours des vins de Loire, qui fait corps avec l’organisation du Salon, réaffirme la hiérarchie historiquement construite entre vins d’aoc et vins de table ou vins de pays : seuls les premiers peuvent concourir. Cette sélection contribue à réaffirmer l’orthodoxie des valeurs œnologiques locales ou régionales, et par là réaffirme une segmentation de l’offre. Composé dans sa grande majorité d’œnologues, de producteurs et de professionnels du vin de la région du Val de Loire, le jury veille à faire respecter la typicité [4] des vins, en censurant les vins trop boisés (évoquant les bordeaux), les rosés trop colorés (rappelant ceux de Provence) et les rouges trop aromatiques (trop proches des vins du Languedoc-Roussillon). Jusqu’en 2000, année où les résultats du Liger d’or ont été publiés sur Internet le soir même du concours (soit la veille du premier jour du Salon), l’annonce faite durant la tenue du Salon était jusque-là un temps fort. Les différents exposants commentaient les performances des uns et des autres, protestaient lorsque le jury n’attribuait aucune médaille d’or pour une appellation ou bien lorsqu’ils estimaient le nombre total de médailles trop faible (selon le règlement, le nombre de médailles peut aller jusqu’à 30 % du nombre des concurrents).
21Réalisé conjointement avec le concours du Liger d’or consacrant les meilleures performances œnologiques, le « Trophée Liger » consacre les performances de présentation des produits, en récompensant l’un des lauréats du premier concours. Sont prises en compte la composition des étiquettes (dessin et mode de fixation sur la bouteille), la configuration des bouteilles (couleur, forme et texture du verre), le tout en conformité avec la législation des appellations d’origine selon une optique de marketing. En effet, la présence dans le jury d’un représentant de la répression des fraudes garantit que les innovations en matière d’étiquetage respectent le règlement émanant de l’inao concernant l’information du consommateur et la prédominance du nom de l’appellation par rapport à celui du producteur. Des représentants des consommateurs, de la restauration et de la grande distribution expriment le point de vue commercial.
L’identité « Val de Loire »
22Regroupant physiquement les producteurs dans un même lieu, utilisant les mêmes symboles (le logo des vins de Loire avec une fleur de lys pour évoquer la vallée des Rois, et la Loire stylisée), le Salon vient renforcer une unité identitaire fortement désirée depuis quelques années par les organisations professionnelles de la région qui considèrent qu’il est urgent de créer une interprofession comme il en existe en Bourgogne ou dans le Bordelais. En l’an 2000 par exemple, l’entrée du Salon était constituée par un vaste tunnel formé de tentures noires, d’où se détachaient des photos de vignobles de la région et l’affichage du classement de la Loire comme patrimoine mondial de l’unesco pour ses paysages et sa culture.
23Le Salon fournit aussi l’occasion, pour les représentants d’une interprofession en voie de constitution, d’émettre des messages explicites formulés pour l’événement, repris par la presse régionale, notamment autour de la question de l’identité des vins de Loire [5]. Les viticulteurs du Val de Loire avaient créé, en 1982, une fédération, la fival (Fédération interprofessionnelle des vins du Val de Loire), à la différence du Bordelais ou de la Bourgogne qui disposent d’un bureau interprofessionnel régional. Celle-ci regroupait le civas (Comité interprofessionnel des vins d’Anjou-Saumur) et ses homologues des vins de Nantes, de Touraine et du Centre qui deviendront des bureaux régionaux de la « Grande Maison Loire » avec la création de l’« Interloire ». Le président de cette toute récente interprofession régionale nous a fait remarquer, lors d’un entretien, qu’on parle de vins de Bordeaux, de vins des Côtes-du-Rhône, mais qu’« il n’y a pas de vins de Loire, il y a des vins issus de Loire » et a souligné l’intérêt d’une « marque ombrelle ». Il faut, nous a-t-il dit, « donner une âme à cette Loire » et c’est dans un contexte de concurrence internationale qu’il affirme la nécessité de renforcer l’identité « Val de Loire » : « On s’est dit qu’il faut présenter nos vins en mouvement, c’est une manière d’être fédérateur, il y a le côté sud, il y a le côté ouest… Ce qui fait notre différence ce sont nos terroirs. Il y a une saga de la Loire qui revendique toutes les appellations, leur indépendance, c’est vrai qu’elles sont différentes. Et c’est à ce moment-là qu’il faut se mettre ensemble pour qu’elles aient un rôle majeur. Le rôle du terroir c’est le chef d’orchestre qui va donner à chacun sa partition, mais tout cela, il faut que cela fonctionne bien, pour que cela ait une histoire à raconter : le vin c’est 13 % d’alcool, 37 % de composants bons pour la santé et 50 % de culture. C’est important dans le contexte international. Jusque dans les années quatre-vingt-dix, la France était dominante… Il y a plusieurs systèmes de production et aujourd’hui le système français est devenu vieillissant. Le système anglo-saxon, nouveau monde, est un système plus accessible et plus jeune, plus adapté aux attentes de la consommation, il y a un conflit aujourd’hui. L’enjeu, c’est de retrouver une légitimité en étant moins ringard, moins ennuyeux… Le terroir c’est un écosystème qui va beaucoup plus loin qu’une indication géographique. »
Un événement pour la presse
24L’orientation internationale des efforts, l’investissement économique des participants du Salon, l’innovation même du label « Salon des vins de Loire », censé concentrer les propriétés les plus distinctives des produits proposés, coïncident avec un changement structurel de la demande de vin sur le marché mondial et des manières de boire, qui va de pair avec la montée en puissance des prescripteurs, notamment de l’importance de la littérature spécialisée et des rubriques œnologiques de la presse [Garcia-Parpet, 2003]. Toute l’organisation du Salon (réunissant environ cinq cents producteurs des plus performants), dont celle d’un concours instituant un palmarès des meilleurs viticulteurs, vise à créer un « événement » qui doit permettre d’attirer plus d’une centaine de journalistes du monde entier. Leur accueil, voire leur prise en charge financière, sont l’objet d’efforts constants et suscitent la parution de reportages et de palmarès dans les revues nationales et internationales, voire de numéros spéciaux [6]. Une revue française prestigieuse, la Revue des vins de France (mai 1998), a notamment publié un article intitulé « Le réveil d’un géant », faisant l’éloge de l’événement tout au long de l’article : « Uniquement destiné aux professionnels, l’admirable Salon des vins de Loire, qui se tient tous les ans à Angers au début de février, est une idée de génie. Il offre une incomparable vitrine de la région, où les acheteurs font leurs emplettes en connaissance de cause, en comparant les vins dans d’excellentes conditions… La Loire est le seul dénominateur commun à la région. » La revue Drinks International dans son article « The wines of the Loire Show » relatait, en janvier 2000, l’intérêt des vins rouges de Loire (cette région est plus traditionnellement connue pour ses vins blancs). La presse spécialisée y alimente ses propos et sa clientèle pour les abonnements et les pavés publicitaires : la revue anglaise Decanter et la revue française Vins magazine y ont leur stand.
« Une logique complémentaire »
25La position de producteur dominé dans un espace viticole plus vaste a contraint même les plus performants de cette catégorie à exposer en partenariat avec des producteurs ayant une position homologue dans d’autres appellations de la région, composant ainsi une gamme complémentaire de produits. Cette coopération s’est révélée un atout dans la compétition nationale et internationale, en favorisant la multiplication et le renforcement des réseaux. La présentation commune, en associant des vins d’appellations différentes, a permis à ces producteurs d’aborder des marchés qui seraient inaccessibles pour chacun d’eux pris individuellement. Elle est la clé d’une efficacité sur le plan à la fois économique et symbolique. Un exposant, producteur de vin d’Anjou, interrogé sur les raisons du partage de son stand, met en évidence l’intérêt de cette association : « C’est une logique complémentaire. On a un client à la recherche d’un nouveau Sancerre, un Anjou, c’est une appellation qui monte, on a la même structure pour l’exportation, pour l’Asie, pour les États-Unis, il [producteur de Sancerre] donne des contacts, on s’appuie. Pour faire de la mondialisation, il ne faut pas se battre tout seul, c’est la solution d’avenir. Il faut que le client étranger voie le Val de Loire comme une entité. Sancerre, Chinon, ce sont des appellations trop petites, il ne faut pas être seul, il faut penser Val de Loire. » Les producteurs trop petits pour se lancer seuls dans la compétition internationale, occupant une position homologue dans chaque appellation, se regroupent, maintiennent leur partenariat d’une année sur l’autre. Ainsi, quatre producteurs de chinon, sancerre, muscadet et saumur, reconnus pour leurs produits haut de gamme par les prescripteurs et la grande restauration, exposent ensemble depuis plusieurs années : ils ont des exploitations importantes, peuvent tous revendiquer au moins trois générations de tradition viticole, et jouent un rôle de leader dans leur appellation respective. Le stand, situé juste à l’entrée du hall à des croisements d’allées, est visible sur les quatre côtés.
26Les nouveaux entrants, qui n’ont pas trouvé de partenaires, ou ceux dont la position ne permet aucun affichage en commun, ont des stands individuels : il en est ainsi d’un producteur de chinon, provenant d’une grande famille de producteurs de champagne, qui, tout en se soumettant aux règles de l’appellation, exploite le prestige de la famille dont il est issu, reprenant le type de bouteille utilisé par sa famille depuis plus d’un siècle, et pratiquant uniquement des cuvées de vin de garde. Plus bombées, d’un verre plus épais et plus foncé que celles utilisées dans le Val de Loire, elles sont posées en pyramide sur des plaques de verre, offrant l’uniformité de couleur des flacons, des étiquettes aux lettres sobrement tracées, où domine le blanc. Aucun comptoir, aucune séparation n’entravent l’entrée du stand ni ne retiennent le visiteur d’entrer dans cet espace aménagé à la manière d’un salon, avec au centre une table Louis XVI, et quelques fauteuils, si ce n’est le sentiment de ne pas appartenir à cet univers aristocratique.
Faire de nécessité vertu : un salon « convivial »
27Si l’on compare les récits des producteurs et les commentaires de la presse sur les premières années d’existence du Salon, il est clair que les échanges impulsés par sa réalisation ont gagné en envergure internationale, tant du point de vue des volumes échangés et des pays concernés que de la position qu’ils occupent dans le large éventail de la qualité des produits. Il n’en reste pas moins que les producteurs ou professionnels du vin qui ont eu l’occasion, par leur position dans le champ viticole, de côtoyer des entreprises et des lieux de transaction plus importants, voient le Salon des vins de Loire comme une petite structure qui attire de petits négociants et importateurs. L’un d’entre eux exprime bien la position du Salon parmi les espaces concurrents : « Le Salon d’Angers a lieu depuis une quinzaine d’années, et comme on a des vins tous les ans, les gens viennent présenter leurs vins tout de suite après la récolte pour des raisons commerciales et c’est devenu une tradition. C’est plutôt un salon de présentation, c’est un peu le village qui regroupe les gens éparpillés, quelquefois en guerre comme dans la république italienne ces gens se regroupent sur l’agora pour présenter le marché, c’est un peu le marché… On est tout petit, le salon de Londres c’est la vitrine du monde, c’est un salon de business, c’est un salon très anglo-saxon de ce point de vue-là. Vinexpo c’est le salon plus standing où l’on se doit de recevoir, mais c’est aussi très business, cela n’a rien à voir avec le Salon des vins de Loire qui est un salon convivial, c’est le village où les gens apportent leurs vins pour présenter. C’est la nouvelle collection, puisque tous les ans on a des collections. Je crois qu’on présente le produit pour après, c’est un peu comme la grande couture, la mode, il faut des salons de présentation. »
28Par rapport aux grands salons de business, le Salon d’Angers ne peut figurer que comme un « petit salon », mais il n’est pas assimilé aux salons destinés aux consommateurs. Il ne peut prendre véritablement son sens que par référence à un réseau plus vaste. Le Salon ne suppose pas seulement la construction d’un rapport d’une certaine façon antagonique entre producteurs et acheteurs, il permet des alliances entre des agents et des produits, créant une niche commerciale : plus que la valorisation de chaque appellation, il permet la consécration du patrimoine commun : le « Val de Loire ». La place de marché contribue ainsi à une restructuration du marché au sens des économistes. ?
Bibliographie
Références bibliographiques
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- Weber Florence, 2000, « Transactions marchandes, échanges rituels, relations personnelles », Genèses, 41 : 85-107.
Notes
-
[1]
Analysant le marché à la criée du matif, Jean-Pierre Hassoun [2000] montre que l’histoire d’un marché n’est jamais linéaire et comment des événements externes et internes au marché ont changé la qualité des relations.
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[2]
L’ambiguïté du statut du Salon (destiné aux amateurs ou aux professionnels) était encore présente pour certains prescripteurs en 1997. En témoigne la présentation qu’en fait Hugh Johnson [1997] dans son ouvrage destiné au tourisme intitulé Vins de Loire. Le Salon est cité parmi les foires et les dégustations. Florence Weber [2000] attire l’attention sur l’importance des techniques rituelles assurant la rupture entre le monde de la transaction marchande et le monde des transactions personnelles. Ici, la technique rituelle assure la rupture entre les transactions au détail et en gros.
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[3]
Le terme liger désigne la Loire en latin.
-
[4]
Terme utilisé par les professionnels du vin pour désigner les propriétés gustatives et visuelles du vin.
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[5]
Dans d’autres régions comme la Bourgogne, c’est le folklore qui constitue un élément essentiel dans la construction de l’image de la qualité des vins [Laferté, 2002].
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[6]
On remarquera ici la similitude entre le salon des vins et la présentation des collections dans la haute couture. Pierre Bourdieu y note par exemple « la présence de cent journalistes en quête d’informations quotidiennes, les revues spécialisées qui en présenteront la synthèse photographique un mois après, enfin les acheteurs professionnels dont les dollars, les livres ou les francs permettront de concrétiser pour les femmes ces idées jugées parfois téméraires ou au contraire trop timorées » [Bourdieu et Delsant, 1975 : 24].