Notes
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[1]
« The definition of territoriality that I have been in the habit of giving is growing outmoded, but before going any further, I should recall it : territoriality is the ensemble of relations that humans maintain with exteriority and alterity, with the assistance of mediators, for the satisfaction of their needs, towards the end of attaining the greatest possible autonomy – that is, the capacity to have aleatory relations with their physical and social environment – taking into account the resources of the system. This definition is in part outmoded, because it is no longer contemporaneous with the situation in which we evolve. The mediators are no longer really chosen, but are a function of money, of the money available for such and such an individual, for such and such a collectivity. The pyramid of needs is broken, and many no longer even know that such a thing existed. It is enough to say that autonomy no longer has the same full sense and that it only continues to exist for a privileged minority and that there are no more aleatory relations for the worst off amongst us. » (Raffestin, 2012, p. 139).
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[2]
Figure déjà reprise par Jacques Lévy, mais pour l’opposer à celle du territoire (Lévy, Lussault, 2003).
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[3]
« Le fait même que la région ne soit plus qu’un discours démontre assez que l’on est passé à une territorialité temporisée, c’est-à-dire à un système de relations qui dépend de la variation et de la quantité d’information dans un territoire donné » (Raffestin, 1986, p. 184).
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[4]
Essayant de théoriser la polymorphie des relations sociospatiales, ils suggèrent que : « territories (T), places (P), scales (S), and networks (N) must be viewed as mutually constitutive and relationally intertwined dimensions of sociospatial relations », puis ils proposent une grille d’analyse pertinente en reprenant le quadriptyque TPSN. Ce faisant, leur définition du territoire apparaît restrictive en reprenant les seuls attributs de la modernité territoriale : « Bordering, bounding, parcelization, enclosure ; Construction of inside/outside divides ; constitutive role of the `outside”. » (Jessop et al., 2008).
Préambule
1Ce texte est né d’une sollicitation de Geneviève Cortes pour introduire un séminaire sur l’expression « territoire multisitué », ses usages potentiels et son éventuelle utilité heuristique. La proposition sonnait comme la réponse possible à un besoin conceptuel : le besoin de fonder un concept croisant les acquis de réflexions sur la territorialité comme rapport politique à l’espace et la nécessité de raisonner en termes de relations plus qu’en termes de continuité et d’unicité. On pourrait reprendre ici le récent aveu de désarroi de Claude Raffestin qui estime que sa définition pourtant souple et complexe de la territorialité est remise en cause par le pouvoir déterritorialisant de l’argent, ce qui appellerait non pas un abandon de la réflexion sur la territorialité collective, mais une conception plus sélective et différenciée selon les acteurs et leur position (autonomie) dans le système [1]. Pour ma part, ce besoin vient de l’étude des ingénieries territoriales sud-africaines successives et des rapports à l’espace qu’elles ont façonnés. Elles m’ont porté à la perplexité vis-à-vis des approches fixistes. Approches qui prennent pour territoire ce qui ne sont que de simples lieux d’assignation ou zones de reproduction, passant à côté des territorialités complexes qui assemblent ces lieux et ces zones pour former des systèmes spatiaux de gouvernementalité. Ces systèmes de gouvernementalité pouvant servir des projets d’oppression, d’émancipation ou plus simplement de gouvernement, explicite ou non.
2Ce texte est donc le premier développement d’un ensemble de réflexions livrées à chaud. Il a pour but d’évaluer l’utilité de l’expression parmi certaines explorations contemporaines sur le territoire et la territorialité, explorations d’après la modernité triomphante et masquante. Il entend évaluer son utilité relativement à d’autres expressions disponibles et ouvrir des pistes en aidant à l’identification et à la formulation de réalités spatiales complexes qui se définissent par leur caractère à la fois relationnel, évolutif et trans (translocal, transrégional, transnational et/ou transscalaire). Il pourra paraître souvent allusif par sa volonté d’embrasser largement différents cas et différents aspects de la problématique. Il ne s’agit pas d’une synthèse aboutie mais avant tout d’un texte de discussion, contribution à un débat d’ordre théorique, sémantique et prospectif.
Introduction
3Comprendre les mutations contemporaines des territorialités individuelles et collectives nécessite d’avoir recours à différents concepts. En effet, les caractéristiques et les formes de ces mutations affectent à la fois le « puzzle territorial » (Grataloup, Margolin, 1987), celui des territoires politiques et culturels, et les réseaux de lieux qui forment les spatialités sociales et économiques définies par une grande variété de rapports à l’étendue et à la durée (Debarbieux, 2006). Elles sont ainsi créatrices et révélatrices de complexité territoriale.
4L’incompatibilité des dimensions aréolaire et réticulaire pour envisager les territorialités semble être réfutée (Offner, Pumain, 1996 ; Vodoz et al., 2004 ; Macleod, Jones, 2007 ; Painter, 2007 ; Allen, 2009 ; Vanier, 2009 ; Harrison, 2010). Autrement dit, la vision antagoniste des réalités topographiques et topologiques qui assignerait le territoire comme expression exclusive de l’aréolaire et du topographique est dépassée. Dès lors, la création d’une expression qui puisse faire concept pour inclure les notions de territoire-réseau et de territoire discontinu serait la bienvenue. Nous examinons ici l’intérêt et le positionnement relatif de la notion de « territoire multisitué » proposée en géographie par Geneviève Cortes et Denis Pesche, après avoir été utilisée en anthropologie.
5Envisageons d’abord le positionnement de cette notion par rapport à l’analyse du dépassement de la modernité territoriale et par rapport à celle de la complexité territoriale. Les ingénieries territoriales sud-africaines nous offriront ensuite un bon terrain pour tester l’intérêt de l’usage des ces expressions pour qualifier les différents aspects de territorialités multiformes, hétérogènes et dynamiques. Le cas sud-africain est de portée heuristique en géographie politique et particulièrement sur les questions de territorialité. En effet de par son exacerbation et sa profusion en matière de gouvernementalité territoriale, il permet de poser des questions de portée générale et de tester des concepts destinés à rendre compte de pratiques et de réalités territoriales complexes. Pour finir, nous tenterons de voir quels sont les apports et les limites de l’usage de l’expression si on l’envisage du point de vue d’une géographie politique.
Le dépassement de la modernité territoriale
6La modernité territoriale s’est nourrie de principes rationalisateurs et de fonctionnements univoques (Anderson, 1996 ; Penrose, 2002 ; Antheaume, Giraut, 2005 ; Retaillé, 2005). Elle s’est ainsi dotée de technologies d’encadrement répondant à quelques principes simples : exhaustivité, exclusivité, connexité. Ceci pour formater d’une part les territoires bornés et emboîtés de l’État-nation et du gouvernement local et, d’autre part, les bassins de vie de l’économie fordiste associant centre et périphérie (tabl. 1). Elle a accessoirement accouché d’un « territorialisme méthodologique » (Scholte, 2000) qui survalorise en sciences sociales les effets de « conteneurs » politico-administratifs (Agnew, 1999, 2010 ; Werlen, 1993). Par cette référence au conteneur associée au « piège territorial », largement reprise par la suite, Benno Werlen, John Agnew et Jan Aart Scholte, faisaient allusion au biais en géographie et en relations internationales qui consiste à prendre pour objet et à considérer comme des sujets majeurs des entités qui sont en fait des cadres d’analyse obligés en tant que cadres de production de l’information. Stuart Elden (2010a et b) pour sa part assimile le territoire à une combinaison de contrôle économique (land) et stratégique (terrain) selon des techniques liées au contexte historique, et dont la raison cartographique et statistique moderne a été une des modalités parmi d’autres, mais très active dans nos représentations et pratiques contemporaines.
Postmodernité territoriale : mutations contemporaines des principes d’organisation, de fonctionnement et d’appréhension territoriaux
Postmodernité territoriale : mutations contemporaines des principes d’organisation, de fonctionnement et d’appréhension territoriaux
7L’avènement de la géométrie variable et de la réticularité est au cœur de la grande mutation des rapports à l’espace et de la fabrication des territoires. Cette mutation est affaire de changements multiples qui affectent des pratiques mobiles individuelles et collectives dans des contextes technico-économiques qui font exploser les stricts emboîtements d’échelles. Parallèlement, les idéologies qui fondent et légitiment des communautés et des collectivités régissent leurs relations à l’espace sur des bases complexes et paradoxales, articulant local et global sur fond de repositionnements d’acteurs majeurs tels que l’État et la grande entreprise industrielle.
8L’appréhension des mutations territoriales est aussi affaire d’outils d’analyse. Les concepts dont on se dote pour percevoir et interpréter ces réalités permettent d’en saisir certaines dimensions et l’application à certains objets (Paasi, 2002 ; Macleod, Jones, 2007 ; Jessop et al., 2008 ; Painter, 2008). En ce sens, on peut aussi estimer que les préoccupations contemporaines centrées sur la mobilité et la complexité ont un effet configurant.
9Les propositions de « territoire-réseau » (Bakis in Dupuy, 1991 ; Offner, Pumain, 1996) et de « territoire en archipel » (Viard, 1994 ; Veltz, 1996). ainsi que la réactivation par Joe Painter (2007) de la figure du « rhizome [2] » chère à Gilles Deleuze (1980) ont permis de considérer des formes émergentes ou de reconsidérer des formes négligées. Elles sont fondées sur l’analyse de la territorialité des réseaux techniques ou de celle de lieux en interaction économique et sociale. Elles sont cependant restées au stade de la notion descriptive ou de l’analogie. Denise Pumain (2012) envisage aujourd’hui explicitement le concept de territoire comme « une aire géographique continue et bornée par des limites (ou un ensemble de lieux plus fortement connectés : ‘‘territoire en réseau’’) » et pouvant recouvrir « des formes de délimitation allant de l’inclusion dans des frontières (représentation somme toute récente) à des ensembles éclatés en plusieurs morceaux (territoires des diasporas par exemple) ou restreints à des réseaux (entreprises multinationales, territoires individuels…) » (p. 61).
10La nouvelle proposition qui nous est faite avec l’expression « territoires multisitués » vient compléter la gamme des expressions francophones qui permettent de décrire, d’interpréter et de conceptualiser les mutations et les innovations contemporaines qui affectent les territorialités. On pense particulièrement aux expressions de « complexité territoriale » (Giraut, Vanier, 1999 ; Moine, 2006) et de « territorialité postmoderne » (Anderson, 1996 ; Newman, 1999 ; Antheaume, Giraut, 2005).
11La complexité territoriale met l’accent sur le déploiement simultané de différentes territorialités qui ressortissent à des rapports à l’espace correspondant à différentes logiques et à différentes pratiques, elles-même déjà démultipliées scalairement. On pense notamment aux territorialités politiques (au sens de policy et polity, qui dépassent les aspects strictement politiciens du politics) qui appellent une délimitation exclusive et une certaine fixité dans le temps et dans l’espace pour définir le champ de l’exercice du pouvoir au sens du contrôle et/ou de la représentation politique (Lévy, 1994). On pense, par ailleurs, aux territorialités socio-économiques individuelles et collectives qui s’affranchissent davantage des contraintes du conteneur (continuité, fixité, bornage) en jouant sur un ensemble d’espaces complémentaires, ceux de la reproduction ou de la dépendance, et ceux de l’opportunité ou de l’engagement (Cox, 1997).
12La « postmodernité territoriale » a à voir avec la mutation des conceptions. Nous la proposons non pas comme posture qui consisterait à adopter une approche centrée sur les différences, les écarts à la norme et la promotion de conceptions subalternes ou dominées, mais comme objet, portant sur des principes émergents et renouvelés de rapports sociaux et politiques à l’espace.
13Avec ces trois expressions, on pourrait disposer d’un ensemble de notions qui permettent de saisir : 1) la mutation des principes (la postmodernité territoriale), 2) la mutation des formes (les territoires multisitués) et 3) les dispositifs complexes qui s’établissent en vertu, d’une part, de la production territoriale issue de la mutation des principes et des formes, et d’autre part, de la conservation d’artefacts territoriaux qui reposent sur les principes de la modernité (la complexité territoriale).
14L’intérêt de ces propositions est d’abord de tenter d’adapter et de préciser le concept fondamental de territoire, sans le laisser au seul contexte « moderne » de son appropriation par la géographie, mais en envisageant sa capacité à saisir des formes de spatialités émergentes ou immergées. La démarche s’inscrit dans une approche « raffestinienne » du territoire qui s’intéresse aux processus de déterritorialisation-reterritorialisation en envisageant la territorialité de manière dynamique [3] (Raffestin, 1980, 1986).
15Ces expressions nous permettent également de revisiter la modernité spatiale et territoriale, pas seulement sous la forme d’une parenthèse rationalisatrice mais d’une rationalité fondamentalement hybride. Le tableau opposant les principes et les formes n’étant qu’une commodité pour différencier ce qui relève plutôt des différents paradigmes, paradigmes tour à tour dominants mais jamais exclusifs.
Les trois expressions comme mode d’appréhension des réalités spatiales de l’Afrique du Sud post-apartheid
16De nombreux travaux ont montré comment l’Afrique du Sud, avec ses vagues successives de colonies de peuplement puis ses différentes politiques d’apartheid, a été marquée par des projets politiques et économiques radicaux qui ont mis en place des ingénieries territoriales ségrégatives efficaces sur la longue durée (Christopher, 1994, 2002 ; Antheaume, 1999 ; Ramutsindela, 2001 ; Giraut, Vacchiani 2009, 2012 ; MacCarthy, Bernstein, 1998). Il en résulte des structures et des pratiques spatiales originales à différentes échelles qui s’affranchissent très largement des principes de la territorialité moderne.
17En fait, ces ingénieries territoriales ont mis en place des zonages résidentiels ségrégatifs et des zonages d’exploitation des ressources avec un jeu d’assignation, de statuts différenciés et d’organisation de la mobilité. L’une des caractéristiques des ingénieries spatiales d’apartheid est la systématisation des zones tampons (buffer zones) à différentes échelles (fig. 1). À l’échelle des agglomérations (Davies, 1981), on les trouve entre les townships réservés aux populations subalternes d’origine non européenne et la partie de ville constituée du Central Business District (CBD) et des banlieues (suburbs) privilégiées et dotées d’institutions de gouvernement local. À l’échelle régionale, elles isolent des concentrations de population situées au-delà des frontières des ex-bantoustans.
Le dispositif complexe des aires urbaines sudafricaines et la succession des arrangements dédiés à leur gouvernement
Le dispositif complexe des aires urbaines sudafricaines et la succession des arrangements dédiés à leur gouvernement
La zone tampon peut avoir une largeur de plusieurs centaines de mètres à plusieurs kilomètres selon la taille de l’agglomération, et les fragments urbains qui se sont développés au-delà de la limite des anciens bantoustans peuvent être éloignés de plusieurs dizaines de kilomètres de l’agglomération principale. En pointillé vert, les limites de municipalités et en pointillé rouge les limites des anciens bantoustans ou homelands.18La politique des homelands ou bantoustans était conçue et présentée comme une politique de décolonisation interne avec création de nouveaux États pseudo-indépendants pour les populations d’origine africaine dans lesquels celles-ci auraient exercé leurs droits politiques. Les déplacements forcés et les restrictions à la mobilité résidentielle avaient pour but de fixer les familles dans les homelands et de limiter leur implantation dans les villes sud-africaines. C’est de cette politique radicale que sont nés des fragments urbains projetés au-delà des frontières des anciennes réserves devenues homelands d’assignation tout en restant au plus près des villes sud-africaines. Ces concentrations humaines bordières se trouvent à plusieurs dizaines de kilomètres des villes mais sont fonctionnellement dépendantes de celles-ci ou de zones industrielles installées à proximité des bantoustans pour en exploiter la main-d’œuvre.
19Ces structures spatiales héritées ont bien sûr une forte inertie dans un contexte post-apartheid de société très inégalitaire. Au sortir de l’apartheid, l’action publique de redistribution a d’abord servi à rendre justice aux périphéries en termes d’accès aux services de base (Giraut, Maharaj, 2002). L’ordre sociospatial résidentiel et économique n’a cependant pas été bouleversé, la priorité ayant été donnée à l’appui à la croissance via la valorisation des sites, des secteurs et des classes d’entrepreneurs susceptibles d’attirer les investissements directs étrangers.
20Dans ce contexte, les villes sud-africaines restent des espaces très fragmentés au sein desquels les individus et les groupes adoptent des pratiques spatiales qui reposent sur la fréquentation de lieux discontinus, physiquement séparés et largement exclusifs. Si le système du pass a disparu avec la fin de l’apartheid, la progression des dispositifs d’enfermements sécuritaires individuels et collectifs réactualise en permanence la fragmentation extrême de territoires de vie fondés sur des lieux plus ou moins clos mais reliés fonctionnellement et socialement en des réseaux largement étanches. Pour qualifier ces territoires de vie, l’expression « territoire multisitué » est très bienvenue dans la mesure où elle permet d’appréhender des dispositifs spatiaux très cohérents dont les entités sont dispersées mais fonctionnellement reliées dans un espace produit politiquement et historiquement de manière différenciée pour les différents segments de la société. Une publicité déjà ancienne, mais annonciatrice d’un nouvel ordre ségrégatif autoproduit, illustre bien la nature de ces territoires citadins multisitués (photo 1).
« Vous devriez être là et vous êtes ici. Avec NOGo Zones, si vous n’avez rien à faire là, nous le saurons »
« Vous devriez être là et vous êtes ici. Avec NOGo Zones, si vous n’avez rien à faire là, nous le saurons »
Publicité parue dans la presse sud-africaine en 2002 pour un produit sud-africain innovant. NoGo Zones est un appareil embarqué de programmation de zones d’exclusion. En cas d’incursion de votre véhicule dans des aires interdites prédéfinies, le central est prévenu avec possibilité de localisation précise et d’envoi de secours. Pour les besoins de la démonstration de l’utilité du produit, l’espace métropolitain est mis en scène et vous y êtes projeté en situation de risque fantasmé. C’est, en fait, un beau modèle centre-périphérie que propose cette représentation. Vous êtes supposé être à proximité du Central Business District (arrière-plan) reconnaissable par la skyline. Dans la réalité, les populations auxquelles s’adresse cette publicité résident dans les suburbs cossus et fréquentent davantage les nouveaux quartiers de bureaux et les shopping malls qui en sont proches. Vous avez été enlevé(e) et vous vous retrouvez à l’autre bout de l’agglomération, après même les townships (deuxième plan) reconnaissables aux interminables alignements de matchboxes. Le quartier d’habitat informel dans lequel vous avez été emmené avec ses shacks et ses voies non goudronnées fréquentées par des piétons et des vélos est apparemment paisible et même sympathique. Il y règne une ambiance villageoise ou rurale, et c’est bien là le problème ! Vous êtes dans un autre monde, celui des bantous, c’est-à-dire des ex-réserves puis des bantoustans, qu’aujourd’hui plus aucune frontière policière ne délimite. Mais heureusement NoGo Zones pallie virtuellement* ce manque, c’est un substitut qui vous permet de vous auto-enfermer par la programmation de zones interdites !* Il s’agit là d’une création virtuelle non pas au sens de « futur probable ou potentiel », mais de réalité opérationnelle immatérielle.
21On voit dans le dispositif spatial proposé ici les différentes aires résidentielles parfaitement étrangères les unes aux autres. Elles sont associées à différents espaces de production pour constituer des territoires différenciés et exclusifs constitués d’ensembles de lieux. Le Central Business District est ici assimilé à la centralité fréquentée par les possédants et donc associé aux aires résidentielles des automobilistes cossus. Il l’est effectivement dans sa dimension verticale : parking souterrain et tours de bureaux associées communiquent. Mais ce Central Business District est également fréquenté horizontalement. Tout un petit monde – celui des townships et des migrants des quartiers centraux – y anime les espaces publics de surface entre activités informelles et marchandes populaires. Une autre territorialité cohabite ainsi dans une même position centrale que celle du monde des affaires, mais en association avec d’autres lieux.
22Les espaces fonctionnels d’activités sont socialement spécialisés à l’extrême : tours des Central Business District, parcs d’entreprises de service, zones industrielles ou minières, rues du centre ville, les croisements entre classes socioprofessionnelles y sont réduits à certains lieux et à certains moments. C’est ailleurs que l’on trouve les rares espaces d’intersection entre les différents réseaux sociospatiaux : les shopping malls dédiés à la consommation de masse (Houssay-Holzschuch, Vacchiani-Marcuzzo, 2009).
23Dans le modèle de la postmétropolis élaboré par Edward Soja à partir de Los Angeles, cette dimension de l’organisation urbaine qui privilégie les liens relationnels à distance sur la proximité et les coupures entre entités homogènes sur les gradients est celle de la « ville fractale ». Les liens entre morceaux ou fragments s’établissent par affinité sociale dans le cadre d’une division métropolitaine du travail. La dimension relationnelle s’affranchit donc totalement de la contiguïté des quartiers urbains séparés les uns des autres par un dispositif matériel.
24En fait, dans un tel contexte, l’expression « territoire multisitué » peut s’appliquer soit aux espaces discontinus des différents groupes sociaux qui s’enchevêtrent dans l’agglomération et au-delà, soit à l’agglomération elle-même en tant que territoire éminemment politique qui associe des fragments de ville contrastés et distants où le défi de l’intégration urbaine et de la redistribution est majeur.
25Dans le premier cas, c’est une définition du territoire par les pratiques et l’appropriation. Dans le second cas, c’est une définition par l’exercice d’un pouvoir ou par la vocation politique de l’espace considéré en tant qu’espace associant des ensembles sociaux différents et appelant à ce titre un gouvernement (ou une gouvernance) particulier. En effet, les principales agglomérations sud-africaines sont aujourd’hui dotées d’institutions de gestion intégrée de type gouvernement métropolitain tout en étant particulièrement fragmentées. Elles sont ainsi de véritables territoires politiques constitués de parties qui doivent être systématiquement resituées dans les différents zonages hérités qui sont autant de contextes sociaux contrastés et renvoient à l’extrême division sociospatiale de l’espace métropolitain.
26On retrouve donc la dichotomie des approches de géographie sociale vis-à-vis du territoire (socioculturel vs sociopolitique) sur laquelle nous reviendrons en troisième partie pour nous positionner, mais l’adjectif multisitué rend compte dans les deux cas de territorialités complexes qui reposent sur des réseaux ou des associations de lieux et de zones complémentaires. Les lourds héritages du passé colonial et de l’apartheid alliés aux fonctionnements contemporains de l’ordre, de l’enfermement et de l’entretien des territoires multisitués contribuent alors à la complexité territoriale contemporaine que nous avons décrite par ailleurs (Antheaume, Giraut, 2005).
27La nouvelle complexité territoriale sud-africaine vient aussi de l’imposition d’un double système : un système rationnel de gouvernement provincial, métropolitain et local et un système de la valorisation des sites ressources traités dans une logique d’ancrage dans la mondialisation indépendamment de leur inscription locale et régionale.
28Dans un tel contexte, les arrangements territoriaux sont aussi un terrain fertile d’innovations postmodernes telles que les communes transprovinciales, les parcs transnationaux, les corridors de développement, les aires métropolitaines intégrées ou encore les districts a-municipaux, les toponymies plurielles… Ces formules sont expérimentées pour tenter de relever les défis politiques du gouvernement local et du développement d’une telle société (Antheaume, Giraut, 2002 ; Sutcliffe, 2002 ; Giraut, 2005 ; Giraut et al., 2005, 2008).
29L’Afrique du Sud apparaît donc bien comme organisée par des territoires multisitués qui empruntent aux différents zonages hérités et qui alimentent une complexité territoriale chronique associée à une division très inégalitaire et ségrégée du travail, des ressources et de l’espace. Des formules qui relèvent de la postmodernité territoriale y sont mobilisées pour tenter d’adapter l’ordre politico-administratif à ces réalités sociospatiales. Dans le cas de l’Afrique du Sud, on dispose ainsi de trois expressions pour un ensemble de réalités qui mettent les territoires modernes au défi :
- complexité territoriale : enchevêtrements d’échelles et de configurations ;
- postmodernité territoriale : dépassement des souverainetés exclusives et des frontières fixes ;
- territoire multisitué : ensemble de lieux contrastés et distants qui relèvent de différents zonages et forment des espaces fonctionnels, politiques et vécus.
Questions de géographie politique sur l’usage de l’expression « territoire multisitué »
30Si l’intérêt de l’expression « territoire multisitué » semble évident dans le cas de l’Afrique du Sud et de son espace configuré par le système d’apartheid, des questions restent en suspens quant à son usage comme catégorie générique en géographie et quant aux contradictions dont elle serait porteuse.
Faut-il tenter de rattraper les spatialités en archipel par la territorialité ??
31Autrement dit, faut-il recycler la notion de territoire, longtemps associée exclusivement aux réalités de souveraineté bornée, pour qualifier des espaces discontinus et à géométrie variable ?
32Parmi les auteurs qui s’aventurent sur le terrain de la théorisation en géographie, nombreux sont ceux qui préfèrent cantonner le territoire au registre initial des fonctionnements spatiaux aréolaires marqués par les principes de la modernité spatiale et opposés à la réticularité : fixité dans le temps et dans l’espace, souveraineté exclusive, emboîtement strict, délimitation linéaire de type frontière. L’argument étant que tout concept spatial doit être défini à partir de propriétés spatiales. Il en est ainsi de Jacques Lévy et Michel Lussault (2003, 2007) mais aussi, chez les anglophones, de Bob Jessop, Neil Brenner et Martin Jones [4] (2008) et de John Allen (2009), tous investis dans des propositions théoriques remarquables par leur cohérence, mais qui s’appuient sur une définition pauvre du concept de territoire. Or, si l’on admet que le territoire est avant tout de l’espace informé et investi par une forme de pouvoir (Raffestin, 1980) ou qu’il s’agit d’un espace intrinsèquement politique de par une composition sociale et économique composite qui appelle une forme de gouvernement (Giraut, 2005), cela ne le cantonne pas, alors, à une configuration aréolaire, continue et fixe.
33Cette réflexion ne justifie pas l’expression « territoire multisitué » mais légitime la potentielle association de la territorialité (ici politique) à des formes de discontinuité, voire de multisituation.
34Cependant, si une conception politique du territoire, et donc du territoire multisitué, n’exclut pas une éventuelle configuration réticulaire, elle exclut en revanche son extension aux spatialités non politiques tel l’habitat polytopique (Stock, 2006) constitué d’un ensemble de lieux de vie reliés par des flux d’êtres vivants, qui les investissent culturellement et socialement par leur expérience de la mobilité.
L’adjectif multisitué associé au territoire est il ambivalent ?
35L’ambiguïté ou plutôt la double signification du qualificatif multisitué qui, à la différence de multilocalisé, évoque à la fois la pluralité des localisations et la pluralité des espaces ou des contextes de référence, n’est-elle pas un facteur d’affaiblissement de la portée de l’expression par imprécision ?
36L’adjectif multilocalisé indique clairement une configuration discontinue par extension d’une réalité sur plusieurs lieux disjoints. L’adjectif multisitué intègre également une réalité localisée, mais qui doit être située relativement à différents environnements ou à différentes échelles ou dimensions.
37L’adjectif va donc plus loin que multilocalisé car il renvoie à des situations multiples, autrement dit à un positionnement relatif simultanément à plusieurs dimensions sociospatiales. Le territoire multisitué intègre donc l’interterritorial (Vanier, 2008) et le transterritorial et pas seulement le réticulaire, c’est-à-dire un ensemble de figures territoriales qui relèvent d’arrangements complexes et qui ne reposent pas sur les principes de la modernité territoriale mais qui font territoire. Plus concrètement, les assemblages territoriaux nés des coopérations entre territoires institutionnels (voisins ou non) ou parties de territoires institutionnels (voisins ou non), peuvent être considérés comme des territoires multisitués. Il s’agit là des assemblages envisagés dans la littérature anglophone comme « non standard regional spaces » qui participent de la réorganisation territoriale de l’État (Deas, Lord, 2006).
38La combinaison des deux précédentes réponses, qui sont aussi des éléments de positionnement théorique, amène à préciser et limiter l’usage que l’on peut faire de l’expression dans le contexte sud-africain. Une conception extensive nous a permis dans un premier temps d’intégrer les spatialités sociales et individuelles liées à l’existence d’espaces de vie discontinus et ségrégés, par exemple ceux qui seront programmés comme ensembles des espaces fréquentables pour une certaine bourgeoisie blanche sud-africaine, ciblée par la publicité pour NoGo Zones. Si ces espaces de vie sont effectivement multisitués, ils ne sont politiques que dans la mesure où ils sont le fruit de politiques héritées de division du travail et de l’espace et participe de rapports sociospatiaux actifs particulièrement inégalitaires. Mais ils ne disposent pas d’autonomie politique et ne font pas territoire dans la mesure où ils sont fondamentalement et génétiquement un élément d’un système sociospatial de gouvernementalité qui les englobe (Dean, 1999). Les tentatives contemporaines d’instauration de gouvernements local et provincial tentent d’associer les espaces complémentaires socialement en regroupant des aires privilégiées et des aires dominées et reléguées pour organiser une redistribution et créer les conditions du dépassement de l’ordre ségrégé. C’est ainsi que l’expression « territoire multisitué » s’applique parfaitement à la ville issue de l’apartheid. Elle est à la fois discontinue avec ses zones tampons et faite de fragments qui doivent être situés par rapport à des espaces de vie et de pratiques assignés aux différents segments de la société dans des réseaux de plus grandes dimensions, enfin elle constitue un espace de gouvernementalité au sein duquel un projet politique peut s’appliquer en jouant sur un ensemble différencié de ressources et de populations aux multi-appartenances.
Le territoire multisitué est-il par définition ingouvernable ?
39On sait que l’exercice de la démocratie représentative appelle une territorialité politique à limites fixes dans le temps et dans l’espace pour stabiliser la citoyenneté et son exercice ainsi que celui du mandat politique (Lévy, 1994). La reconnaissance et la promotion de territoires multisitués seraient donc antinomiques de celles des territoires de la démocratie par définition de nature moderne et obéissant donc aux principes de la modernité territoriale avec sa fixité, son bornage et sa souveraineté exclusive. De plus, les territoires multisitués participent de la fragmentation des territoires classiques (la ville, l’État) et promeuvent les formes d’extraterritorialité. Mais la crise de la démocratie représentative et de l’exercice du gouvernement local dans les sociétés métropolisées offre des ouvertures avec la dénonciation de la « démocratie du sommeil » (Viard, 2006) ou celle du non exercice d’une citoyenneté du travailleur navetteur ou frontalier ou plus encore du résidant étranger sur la définition du projet de territoire dans lequel ils s’investissent.
40Pour dépasser cette contradiction, plusieurs pistes sont à l’œuvre. Tout d’abord celle de la fragmentation avec le public choice (Estèbe, 2008) qui postule les bienfaits de la concurrence entre gouvernements locaux de base au sein même des agglomérations, les habitants usagers de services publics « votant avec leurs pieds » (autrement dit, déménageant leur résidence ou leur activité) en rejoignant le compromis taxes-services qui leur convient le mieux. Ensuite, celle de l’interterritorialité ou coopération à géométrie variable entre les territoires politiques de base (Vanier, 2008) qui permet des arrangements souples et adaptés à chaque problématique de gestion spatiale. Enfin, celle de la démocratie participative recomposable qui fonctionne sur la mobilisation de collectifs et de cadres de consultation en lien avec les questions politiques de la gestion spatiale. C’est bien l’avènement de ces interterritorialités et de la démocratie participative qui permet de s’affranchir davantage des conceptions fixistes du territoire politique en introduisant une réflexion potentiellement innovante sur les rapports entre démocratie et géographie (Joliveau, Amzert, 2001 ; Barnett, Low, 2004 ; Bussi, 2006).
41À une autre échelle, c’est aussi dans ce sens que les différentes formules et expériences impériales sont revisitées de manière comparative dans le temps et dans l’espace (Sassen, 2006 ; Cooper, Burbank, 2011). Ces auteurs, en s’intéressant aux technologies juridiques et spatiales déployées dans le cadre des différents empires sur la très longue durée, soulignent le caractère souvent souple et innovant de la gestion, la reconnaissance et l’exploitation des différences culturelles et sociales. Ceci dans des arrangements complexes et singuliers qui jouent sur la pluralité des statuts selon les situations. L’empire peut être ainsi considéré comme un forme de territoire multisitué.
42Le territoire multisitué serait ainsi potentiellement une figure de référence tant comme catégorie d’analyse de territorialités politiques contemporaines que comme cadre du gouvernement local ou régional renouvelé sous une forme translocale ou plus simplement multisituée.
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Mots-clés éditeurs : territoire multisitué, discontinuité, Afrique du Sud, complexité territoriale, situation, postmodernité, réseau
Mise en ligne 06/01/2014
https://doi.org/10.3917/eg.424.0293Notes
-
[1]
« The definition of territoriality that I have been in the habit of giving is growing outmoded, but before going any further, I should recall it : territoriality is the ensemble of relations that humans maintain with exteriority and alterity, with the assistance of mediators, for the satisfaction of their needs, towards the end of attaining the greatest possible autonomy – that is, the capacity to have aleatory relations with their physical and social environment – taking into account the resources of the system. This definition is in part outmoded, because it is no longer contemporaneous with the situation in which we evolve. The mediators are no longer really chosen, but are a function of money, of the money available for such and such an individual, for such and such a collectivity. The pyramid of needs is broken, and many no longer even know that such a thing existed. It is enough to say that autonomy no longer has the same full sense and that it only continues to exist for a privileged minority and that there are no more aleatory relations for the worst off amongst us. » (Raffestin, 2012, p. 139).
-
[2]
Figure déjà reprise par Jacques Lévy, mais pour l’opposer à celle du territoire (Lévy, Lussault, 2003).
-
[3]
« Le fait même que la région ne soit plus qu’un discours démontre assez que l’on est passé à une territorialité temporisée, c’est-à-dire à un système de relations qui dépend de la variation et de la quantité d’information dans un territoire donné » (Raffestin, 1986, p. 184).
-
[4]
Essayant de théoriser la polymorphie des relations sociospatiales, ils suggèrent que : « territories (T), places (P), scales (S), and networks (N) must be viewed as mutually constitutive and relationally intertwined dimensions of sociospatial relations », puis ils proposent une grille d’analyse pertinente en reprenant le quadriptyque TPSN. Ce faisant, leur définition du territoire apparaît restrictive en reprenant les seuls attributs de la modernité territoriale : « Bordering, bounding, parcelization, enclosure ; Construction of inside/outside divides ; constitutive role of the `outside”. » (Jessop et al., 2008).