Notes
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[1]
Sur les travaux antérieurs voir le chapitre « Présentation » dans Bruneau (1995).
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[2]
La revue Diaspora : A Journal of Transnational Studies (University of Toronto Press) créée en 1991, Diasporas, Histoire et Sociétés, université Toulouse le Mirail, créée en 2002, Diaspora Studies, créée en 2009 à la Jawaharlal Nehru University, New Delhi.
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[3]
Concernant la diaspora chinoise le développement de la recherche sur ce thème a donné lieu à la création en 1992 d’une association regroupant plusieurs centaines d’universitaires (International Society for the Studies of Chinese Overseas) et de centres de recherche dans des universités à travers le monde. En 2006 a été lancée une revue à caractère scientifique, Journal of Chinese Overseas publiée par la National University of Singapore et la Hong Kong University, suivie par une autre en 2007, Southern Chinese Diaspora Studies publiée par l’Australia National University à Canberra. Concernant la diaspora africaine on peut signaler l’existence de quatre revues : The African Diaspora Archaeology Newsletter ; African Diaspora Newsletter ; Sankofa : Revista de História da África e de Estudos da Diáspora Africana et même African Diaspora Journal of Mathematics.
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[4]
À titre indicatif, une requête sur Internet à propos du mot diaspora réalisée avec le moteur de recherche Google Scholar donne 15700 occurrences pour l’année 2010 et 19800 pour 2011. Par ailleurs, la revue Relations internationales a consacré en 2010 un numéro spécial aux diasporas. Voir également le no 2 de 2011 de la revue Annales, Histoire et Sciences Sociales.
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[5]
En témoigne l’ouvrage de Stéphane Dufoix (2012). Dans un volumineux ouvrage de 576 pages l’auteur retrace l’histoire du mot diaspora et en analyse les usages ainsi que la façon dont il a proliféré et s’est imposé dans le monde académique mais aussi journalistique et dans les organismes étatiques et internationaux en charge des questions de développement, dans les associations de migrants et chez les migrants eux-mêmes. Ce qui le conduit à s’interroger sur la dispersion elle-même du terme diaspora et ainsi à une réflexion approfondie sur le langage dans la perspective d’une « sociosémantique historique ». Voir également l’ouvrage dirigé par Baubock et Faist (2010) qui aborde les diasporas à partir de la perspective du transnationalisme.
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[6]
Dans les autres cas, l’espace désigne simplement le lieu, ou l’ensemble de lieux, où est localisée la diaspora sans que la relation à l’espace fasse l’objet d’une analyse en tant que telle. Voir par exemple les travaux de Peter Van de Veer (1995) et de Laurence J.C. Ma et Carolyn Cartier (2003), par ailleurs excellents.
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[7]
Cet article reprend des éléments d’une communication : « Les processus de création d’un monde approprié (à la migration) », présentée à l’atelier de recherche « Stratégies des acteurs migrants et projet migratoire » organisé par l’ORMES et Migrinter, Taroudant, 15-17 mai 2011. D’une façon plus générale, il poursuit une réflexion entamée dans mon habilitation à diriger des recherches (Ma Mung, 1999), j’y précise que mes travaux ont été fortement influencés par la pensée de Cornelius Castoriadis, Pierre Clastres, Edgar Morin et Francisco Varela, entre autres, que je considère comme les penseurs importants de l’autonomie.
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[8]
Voir Le Point de vue de l’autonomie dans l’étude des migrations internationales, « penser de l’intérieur » les phénomènes de mobilité (Ma Mung, 2009a) où je précise le positionnement épistémologique et les implications théoriques de ce point de vue.
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[9]
Ce paragraphe sur la formation de la diaspora chinoise est nécessairement court et incomplet. Il vise simplement à souligner les caractères qui me semblent essentiels par rapport à la problématique développée. Les premières recherches sur la diaspora chinoise portent principalement sur sa présence en Asie du Sud-Est : Skinner (1957), Freedman (1957), Purcell (1965), Wickberg (1965), Wang (1992). Pierre Trolliet (1994) est un des premiers en France à avoir développer une approche globale de la diaspora chinoise, son interprétation en terme de « monde chinois » reste d’une grande pertinence : cf. le chapitre sur « La diaspora chinoise » dans Sanjuan, Trolliet, 2010. Pierre Gentelle (2000) quant à lui a contesté l’existence d’une diaspora chinoise. Pour une vision d’ensemble voir également Pan, 1999 ; Wang, 2000 ; Kuhn, 2008 ; ainsi que Roulleau-Berger, 2007, et Thuno, 2007 pour l’Europe.
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[10]
Sur ce point voir notamment Martine Hovanessian (2005) qui montre comment la conscience progressive de la réalité de la dispersion au sein de la diaspora arménienne a permis l’émergence et l’affirmation d’un statut diasporique.
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[11]
Enquêtes personnelles. Les données empiriques ont été récoltées dans le cadre de recherches contractuelles (Commerçants étrangers en France, Direction de la population et des migrations, 1986 ; Réseaux chinois en Île-de-France, Datar, 1994 ; Working on the Fringe, DG 12 Union Européenne, 2002), et au cours d’observations faites au fil du temps dans un milieu dans lequel je suis immergé fréquemment.
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[12]
Voir Li D.L. (1998) sur la littérature produite aux États-Unis, qui joue un rôle semblable, et Lee (2008) sur la littérature diasporique chinoise anglophone contemporaine.
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[13]
Par exemple « International conference on literatures of the Chinese Diaspora » organisée par le département Asian American Studies de The University of California, Berkeley, en novembre 2002.
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[14]
En France, il y a deux quotidiens et de nombreux hebdomadaires et mensuels.
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[15]
Sur la variété des cultures des Chinois de la diaspora et leur indigénisation, voir Suriadynata, 2011.
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[16]
Auto-désignation ironique des personnes qui sont comme elles le soulignent British Born Chinese, American Born Chinese ou Canadian Born Chinese.
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[17]
Sur l’invention d’un imaginaire de l’origine voir Eng, 2011 ; Park 2002 ; Khuah-Pearce, Davidson, 2008.
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[18]
Enquêtes personnelles.
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[19]
Voir le numéro de la revue Anthropology of Food (no7, 2010), « Migrations, pratiques alimentaires et rapports sociaux » ; ainsi que Lu, Fine, 1995.
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[20]
Voir Accone, 2004 à propos de la Chine vue par les Chinois d’outremer nés en Afrique du Sud. Dans le registre littéraire, le roman de Maxine Hong Kingston (1977), montre comment se construit chez les personnages une image de la Chine.
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[21]
Elles sont même exposées dans des musées, par exemple à Singapour au Hua Song Museum et au Chinese Heritage Center.
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[22]
Ces mémoires familiales peuvent prendre une forme littéraire comme dans le roman de M. H. Kingston (1977) ; voir également Tam, 2005.
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[23]
C’est le cas des réfugiés du sud-est asiatique au début des années 1980 ou des sinoindonésiens ayant fui les pogroms antichinois à la fin des années 1990 (Wang, Wong, 2007).
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[24]
Le terme « Chinatown » tend toutefois à remplacer les autres désignations, y compris dans les pays non anglophones, c’est pourquoi elle est reprise ici par commodité de langage.
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[25]
Les Chinatowns ont fait l’objet de nombreuses recherches notamment en Amérique du Nord. Voir Bernard Wong, 1982, sur la Chinatown de New York comme espace permettant l’intégration économique et la formation d’une identité ethnique spécifique. Min Zhou (1992) l’analyse comme enclave économique et institution socio-économique permettant la mobilité sociale et fournissant les moyens d’une identification à un groupe spécifique. Li Wei (1998) étudie la formation de nouvelles Chinatowns en tant que « ethnoburb » caractérisées par la coprésence de plusieurs groupes ethniques où un de ces groupes est prépondérant sans être majoritaire.
Min Zhou (2009) montre dans son ouvrage de synthèse comment elles ont évolué et se sont diversifiées tant sur les plans du rôle de ressourcement symbolique, de la fonction résidentielle et du dispositif économique qu’elles localisent. Concernant Londres, voir les travaux de Chung (2008) qui souligne que celle de Londres est plus un lieu de convergence important pour la communauté chinoise qu’un simple « artifice urbain » à visée touristique et commerciale. En France l’ouvrage de référence reste celui de Michelle Guillon et Isabelle Taboada-Leonetti (1986) bien que la situation depuis ait considérablement évolué : voir également Costa-Lascoux et Live (1995). -
[26]
À l’exception de Paris : plusieurs démarches ont été faites auprès de la Ville de Paris par des associations chinoises en vue d’obtenir l’autorisation pour la construction d’un portail dans le 13e arrondissement mais n’ont pas reçu à ce jour de réponse positive.
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[27]
Sur l’invention de généalogies voir le numéro 5 de la revue Diasporas. Histoire et sociétés, intitulé « Généalogies rêvées » (2008). Il montre que de nombreuses diasporas ont eu recours à la construction généalogique et souligne « l’efficacité que peut avoir le récit généalogique dans la construction du sentiment diasporique » (éditorial).
-
[28]
Enquêtes personnelles.
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[29]
Sur ce point voir Chan (2006) à propos des vietnamiens d’origine chinoise émigrés, Li M. (1998) sur les différentes identifications des descendants de Chinois d’Indonésie établis aux Pays Bas, et Live (2003) à propos des descendants de Chinois à la Réunion.
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[30]
La distinction de Leibniz entre agrégat, unum per accidens et monade, unum per se est opportune ici. Elle permet de souligner que la diaspora est un être-pour-soi organisé pour se conserver et non un ensemble de mécanismes intersubjectifs dont la coordination accidentelle aurait produit ce corps social.
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[31]
Un bon exemple de la puissance de cette création nous est donné par la diaspora (chinoise) puisqu’ici ce monde doit être créé de telle sorte qu’il permette la reproduction de la forme « dispersion », c’est-à-dire tout à la fois maintenir la distance entre les individus et inventer les instruments qui cherchent à la réduire.
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[32]
La reprise des migrations chinoises depuis le milieu des années 1980 a conduit à un quasi doublement de ses effectifs depuis cette époque et produit un mouvement contradictoire : elles renforcent d’un côté la diaspora et de l’autre ses liens avec la Chine. Par ailleurs, la Chine développe une politique nouvelle vis-à-vis de la diaspora (Guerassimoff, 2006 ; Xiang, 2006) dont les effets sur l’autonomie peuvent être eux aussi contradictoires : si d’un côté le gouvernement essaie de reprendre le contrôle des communautés émigrées, de l’autre il reconnaît de facto la diaspora comme entité distincte et autonome (Ma Mung, 2008). Enfin, l’émergence de la Chine comme puissance économique prépondérante modifie l’image qu’en ont les Chinois de la diaspora. Pourtant il ne me semble pas que ces éléments nouveaux éliminent ni même modifient radicalement les processus que j’essaie de porter au jour.
Introduction
1Le développement de la recherche sur les migrations internationales s’est accompagné d’un intérêt de plus en plus marqué pour les diasporas qui a donné lieu à une abondante production sur ce thème depuis le milieu des années 1990 [1]. Plusieurs synthèses et analyses de cette production ont été réalisées (Cohen, 1997 ; Dufoix, 2003 ; Kokot et al., 2003 ; Sheffer, 2003 ; Bruneau, 2004 ; Anteby-Yemini et al., 2005 ; Brubaker, 2005 ; Berthomière, Chivallon, 2006 ; Bordes-Benayoun, Schnapper, 2006). Elles portent, entre autres, sur les orientations et les postures de recherche et les controverses sur l’utilisation du terme diaspora à propos de tel ou tel collectif migrant. Une interrogation récurrente sur l’usage démultiplié du terme « diaspora » les traverse et a conduit à des efforts de théorisation et de conceptualisation du terme et des phénomènes qu’il est censé caractériser. Ces recherches ont permis également d’éclairer des phénomènes qui dépassent largement le seul cas des diasporas et de renouveler les problématiques à propos de thèmes aussi variés que l’État nation, la mondialisation, le transnationalisme, l’identité, la mémoire collective, la citoyenneté, la diversité, les appartenances et les allégeances, les réseaux migratoires, le développement des aires d’origines des migrants, l’intégration dans les sociétés d’établissement... Cette liste loin d’être exhaustive montre que l’objet diaspora s’est avéré être particulièrement heuristique. S’est ainsi formé, comme le soulignent William Berthomière et Christine Chivallon (2006), un champ de recherche avec ses colloques, ateliers, programmes et groupes de recherche. Plusieurs revues généralistes sur les diasporas ont été créées [2] et des sous-champs de cette recherche se sont constitués à propos d’une diaspora particulière : juive, arménienne, africaine, chinoise... [3] Malgré la multiplication des travaux, la recherche est loin d’avoir épuisé les problématiques que pose l’existence des diasporas (Cuche, 2009). Elles continuent d’être l’objet de l’attention de nombreux chercheurs [4] et la recherche, tout en approfondissant ses analyses à leur propos [5], s’est étendue à l’étude d’autres collectifs que les diasporas « labellisées ». Elle concerne maintenant un grand nombre de groupes migrants (diasporas marocaine, portugaise, sénégalaise, ainsi que néo-zélandaise, tchétchène, kazakhe, zapotèque...), mais aussi professionnels (diasporas scientifiques, d’informaticiens...) ou religieux (diasporas zoroastrienne, huguenote, pentecôtiste, musulmane...).
2L’Espace géographique a consacré dès 1994 deux numéros aux phénomènes diasporiques (t. 23, no 1 et 2 et Bruneau, 1995) portant notamment sur la relation des diasporas au territoire. Coordonnés par Michel Bruneau, ils ont été une étape importante de la recherche sur ce thème dans la discipline et ont permis d’enrichir et de complexifier les définitions du territoire en faisant apparaître des formes territoriales inhabituelles (réticulaires, archipélagiques, virtuelles…) et d’approcher différemment les relations entre identité et territoire. Pourtant, malgré leur nombre et la variété de leurs questionnements et de leurs objets, il semble que les recherches sur les diasporas, aussi bien en géographie que dans les autres sciences sociales, accordent assez peu d’attention à la dimension spatiale du phénomène. Elle est abordée, dans les meilleurs des cas, en termes de relation au territoire [6]. Ceci peut sembler surprenant dans la mesure où l’existence des diasporas pose une question éminemment géographique : comment un corps social (spatialement) dispersé peut-il se reproduire en tant que tel ? Comment une société tient-elle malgré la distance ? (Ma Mung, 1994) C’est cette question qui est au départ du présent article. Il s’inscrit dans une enquête au long cours sur la création par des collectifs humains de mondes qui leur sont propres – c’est à dire appropriés à leur existence – et sur la construction de l’espace géographique [7]. Le point de vue que j’y privilégie est celui de l’autonomie qui considère que le sujet, individuel ou collectif, organise un « pour-soi » l’environnement social et spatial pour se conserver [8]. Il se démarque toutefois d’une approche du type « agentivité » (agency) car l’autonomie du sujet n’est pas postulée comme disposition préalable et quasi naturelle, et d’une approche « écologique » en ce que le sujet n’aménage pas un monde qui lui préexisterait et dans lequel il prendrait place. Il le crée dans ses visées, ses actions, ses représentations en se donnant l’extériorité matérielle-sociale comme réceptacle prédisposé à l’accueillir, le socle sur lequel s’élabore son autonomie et comme monde qui lui est propre.
3La question de la reproduction d’un corps social dispersé en implique une autre qui lui est préalable : comment ce corps social dispersé peut-il non pas seulement se reproduire mais d’abord se produire comme tel ? C’est l’objet de la partie suivante où l’on voit que cette production de soi se fait à travers la représentation et la conscience de la dispersion. Elles sont l’expression (en même temps qu’elles en permettent la création) d’une subjectivité collective, d’un « nous » identifiant. Cette conscience de la dispersion introduit la question des origines car elle permet aux membres de la diaspora de penser la dispersion comme distribution réglée à partir d’un point de départ et non comme simple pulvérisation d’atomes séparés. Elle met de l’ordre dans la dispersion en lui donnant un sens au double sens du terme : en lui donnant une direction (de l’origine vers le présent) et une signification (le corps social est le produit d’une histoire).
4La subjectivité ainsi créée a une forme spatiale qui la définit et qui est précisément la dispersion. C’est en reproduisant cette forme qu’elle peut se conserver comme entité singulière, l’argument étant que, pour se reproduire dans la dispersion, il faut reproduire la dispersion. Elle le fait en maintenant ouverte la question des origines, en la déclinant dans différents registres, en créant un imaginaire de l’origine et en transformant les lieux d’établissement en univers répliquant l’origine. Ces établissements servent également à la conservation économique, idéologique et culturelle de la diaspora.
5Ce faisant ces établissements en viennent à être eux-mêmes des lieux d’origine : symboliquement en offrant aux existences individuelles les moyens de se définir comme membres du collectif, et concrètement en devenant pour les générations qui y sont nées le lieu de leur engendrement. La réponse à la question des origines s’en trouve transformée et se décline différemment, ce qui contribue à la création d’un espace et d’un temps diasporiques – d’un monde propre à la subjectivité collective – à travers l’invention d’une continuité généalogique qui permet d’imaginer une contiguïté géographique.
6Comment cela se passe-t-il ? La proposition est la suivante : dans la construction du monde propre à la diaspora intervient un processus que j’appelle « l’approximation des individus » qui permet d’articuler l’espace et le temps. Il consiste à traduire la continuité temporelle entre les individus inventée par la subjectivité collective en contiguïté spatiale entre ces mêmes individus, et à construire ainsi un espace-temps propre à ce collectif.
7La population prise à témoin est la diaspora chinoise. Mon ambition est toutefois de faire apparaître des processus qu’il doit être possible d’identifier au sein d’autres diasporas.
Représentation et conscience de la dispersion
8La diaspora chinoise contemporaine [9] est le produit de processus migratoires historiques (Wang, 1992 ; Pan, 1999 ; Kuhn, 2008). Une migration marchande importante s’établit dès le xvie siècle dans l’ensemble du Nan Yang (mer de la Chine méridionale), vaste espace qui va de l’actuelle Thaïlande aux Philippines, où elle développe des réseaux maritimes commerciaux et migratoires avec la Chine et entre les différentes implantations chinoises. Au xixe siècle, la poussée des empires coloniaux se manifeste en Chine par les deux guerres de l’opium, le traité de Nankin, la révolte des Taiping et une profonde désorganisation sociale, notamment dans les campagnes de la Chine méridionale appauvries par une crise agricole et des disettes. Elle se traduit également par une forte demande de travail dans les nouvelles colonies britanniques, néerlandaises et françaises d’Asie du Sud-Est que la main-d’œuvre locale ne suffit pas à combler, pas plus que le recours à l’importation d’esclaves puisque leur traite est en principe interdite et que l’esclavage lui-même est progressivement aboli. Les puissances coloniales mettent en place une autre traite, celle des coolies ou coolie trade, et vont puiser dans les provinces du sud, parmi les petits propriétaires dépossédés et les ouvriers agricoles sans ouvrage, la force de travail dont elles ont besoin.
9C’est l’amorce d’une migration – celle-ci prolétaire – de masse qui conduit pendant plusieurs décennies des millions d’hommes en Asie du Sud-Est mais aussi dans les plantations insulaires de l’Océan Indien, des Antilles, de Polynésie, en Amérique latine, dans les mines d’Afrique du Sud… là où le recours à l’esclavage n’est plus possible. Les contrats misérables qui les emportent outre-mer garantissent en principe leur retour aux frais de leur employeur. Nombre d’entre eux, souvent bernés par celui-ci, restent sur place, constituent des communautés locales et s’investissent dans des activités indépendantes (commerce, services divers, petite industrie). Parallèlement se développent des migrations de commerçants et de travailleurs libres vers ces nouvelles aires d’implantation ainsi que vers l’Amérique du Nord, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Quelques-uns d’entre eux atteignent même l’Europe occidentale (Angleterre, Pays-Bas, France). Cette géographie de la diaspora commande encore sa répartition actuelle à ceci près que le poids de l’Asie, bien que dominant, a diminué au profit des autres implantations, notamment le monde occidental au sens large. On évalue aujourd’hui (Ma Mung, 2009b) la diaspora chinoise à 35-40 millions de personnes.
10Cette diaspora, prolétaire et marchande, a donné naissance dans chacune des localités où elle est établie à un dispositif économique constitué d’entreprises le plus souvent de petite taille reliées entre elles sur les plans de l’approvisionnement, du financement, de l’information, etc. Le fait que la main-d’œuvre soit le plus souvent d’origine chinoise a un effet important sur les migrations dans la mesure où elles répondent moins à une demande de main-d’œuvre sur le marché général du travail des pays d’installation qu’à celle venant de ces dispositifs. Ces dispositifs locaux qui organisent la vie des communautés sont reliés entre eux à l’échelle internationale constituant ainsi un dispositif économique global. (Ma Mung, 1992)
11Deux traits morphologiques la caractérisent sur le plan spatial : la multipolarité de la migration (sa diffusion dans plusieurs pays) et surtout l’interpolarité des relations c’est-à-dire l’existence de relations entre les différents pôles d’implantation, les communautés locales. Ces relations interpolaires sont de nature économique à travers le développement de réseaux financiers et de produits, affective à travers les réseaux familiaux et amicaux, mais aussi migratoire à travers les mouvements de personnes entre différents pôles d’établissement comme par exemple, en France, l’immigration de personnes d’origine chinoise réfugiées d’Asie du Sud-Est dans les années 1980. Les migrations interpolaires sont d’ailleurs attestées dès la fin du xixe siècle, telles celles des Chinois établis au Mexique vers Cuba (Hu-Dehart, 1999), de la Californie vers l’Australie (Ryan, 1995), ou de Singapour vers l’Afrique du Sud (Harris, 2006) ou la Réunion (Wong Hee Kam, 1996).
La formation d’une subjectivité collective
12Pour que la diaspora se reproduise il faut d’abord qu’elle se produise comme telle. Non seulement en tant que corps social ayant conscience de lui-même mais aussi en tant que corps social dispersé, c’est-à-dire conscient de sa dispersion. Gabriel Sheffer (1986), Safran (1990), Cohen, (1997), Schnapper (2001) insistent sur le fait que les diasporas développent une conscience d’appartenance à une même communauté, un même « peuple » dispersé. C’est la représentation de la dispersion et la volonté de maintenir les liens malgré cette dispersion qui créent la conscience de former un peuple disséminé (Bordes-Benayoun, Schnapper, 2006). Il convient donc d’insister sur le rôle de la conscience non seulement de l’appartenance à un groupe mais de la dispersion elle-même dans la formation d’une subjectivité collective singulière telle que celle d’une diaspora [10].
13L’existence des relations interpolaires que nous avons évoquée, quelle que soit leur nature (migratoires, économiques, informationnelles, affectives), suppose évidemment que les individus qui les pratiquent aient connaissance de la présence d’autres semblables dans d’autres lieux pour pouvoir les établir. Or cette connaissance est déjà représentation de la dispersion par ces individus. Cette représentation s’exprime également dans d’autres registres que celui de la « connaissance pratique » de la dispersion : dans les histoires familiales, les différents média, les productions culturelles, littéraires ou cinématographiques et les travaux portant sur la diaspora chinoise.
14Les enquêtes auprès des familles [11] révèlent qu’elles ont une connaissance précise de leurs proches établis dans d’autres espaces, de leurs activités professionnelles, des événements personnels les concernant (naissances, décès, mariages, ruptures, etc.), de leurs conditions de vie et de résidence ainsi que de leur statut social. Les visites et l’usage des télécommunications (courriels, téléphone, Skype, Facebook etc.) actualisent constamment cette connaissance, laquelle ne se limite pas à la proche famille mais concerne également les parentés plus éloignées et les cercles amicaux (Accone, 2004 ; Poisson 2004, Auguin, 2006). Par ailleurs, le fait d’avoir des parents ou amis installés dans d’autres pays est toujours présenté positivement et fait l’objet d’une fierté, proportionnelle au nombre de ces relations (Beltran Antolin, 1996 ; Kuhn 2008 ; Watson 2004).
15Dans le registre des productions culturelles, le cinéma participe à la représentation d’une même population établie dans différents pays et entre lesquels elle circule. C’est le cas de films policiers produits à Hong Kong ou à Taiwan. L’objet de ces films n’est certes pas de rendre compte de la dispersion (en Asie du Sud-Est en l’occurrence), mais ils la présentent comme toile de fond où se déroule l’action et contribuent ainsi à la banaliser tout en en soulignant la réalité. Un autre exemple est le film réalisé par Wong Kar-Wai en 2000. In the Mood for Love situe son intrigue à Hong Kong dans les années 1960 ainsi qu’à Singapour et au Cambodge. Certains personnages ont par ailleurs vécu au Japon, d’autres évoquent leur famille installée aux Philippines ou aux États-Unis et qu’ils comptent rejoindre. Là aussi la circulation des personnages entre différents espaces, qui se trouvent être des lieux d’implantation de la diaspora, apparaît comme normale et allant de soi.
16La littérature issue des Chinois d’outre-mer joue un rôle semblable. Le titre d’un des articles que Claudine Salmon (1983) lui a consacré est à cet égard révélateur. « Taoke or coolies ? Chinese visions of the chinese diaspora » montre bien qu’il s’agit de la représentation d’elle-même que produit la diaspora. L’auteur souligne que de nombreux auteurs ont produit dès les années 1920 une abondante littérature sous forme de nouvelles et de romans en langue locale, en anglais ou en chinois, décrivant leur propre communauté à Singapour, en Malaisie, en Thaïlande, en Indonésie, au Viêt-nam, aux Philippines, au Cambodge, en Birmanie. Cette littérature populaire principalement orientée vers la diaspora vise également un public plus large. Elle participe depuis plusieurs décennies à la représentation de la dispersion [12]. Aujourd’hui la production littéraire de la diaspora chinoise est importante au point que des colloques lui sont consacrés [13].
17Depuis une vingtaine d’années les recherches universitaires contribuent à la construction de la diaspora chinoise comme réalité en la posant comme objet d’étude et de réflexion. La multiplication des travaux et des publications est remarquable et se traduit par plusieurs milliers de références. Comme la majorité de ces universitaires sont d’origine chinoise et que nombre d’entre eux se revendiquent comme membres de cette diaspora, il y a un phénomène de légitimation intellectuelle de celle-ci auquel s’ajoute un puissant effet performatif produit par leur utilisation presque systématique du terme diaspora.
18D’autres instruments participent à la représentation de la dispersion tels que la presse communautaire (Sun, 2005), abondante dans bon nombre de pays [14] et proposant à côté des nouvelles consacrées aux communautés locales des informations sur les autres groupes à travers le monde ; ou encore les nombreuses associations (Liu, 1998 ; Kuah-Pearce, Hu de Hart 2006 ; Trémon, 2007 ; Li Minghuan, 1999) faisant référence aux groupes établis dans d’autres pays. Le développement de communautés virtuelles via l’Internet amplifie ce mouvement. Certaines se proposent même de réunir ces communautés par le biais de ce média. La constitution d’un cyberespace diasporique (Pollard, 2007) concourt à la création d’un imaginaire transnational (Sun, 2005) qui peut dans certains cas être marqué par un nationalisme déterritorialisé (Chan, 2006) et un chauvinisme ethnique (Ong, 2003).
19La représentation de la dispersion est en même temps conscience de la dispersion. Sur celles-ci s’étaye une culture singulière qui en retour les conforte. Cette culture « transportable » (cf. la notion de traveling cultures dans Clifford, 1994) comme ensemble de mœurs, de façons d’être, de faire et de penser partagées est diasporique parce qu’elle est certes le fait d’une diaspora mais surtout parce qu’elle valorise la forme dispersée. Une culture de diaspora est constituée comme le soulignent Chantal Bordes-Benayoun et Dominique Schnapper (2006) par les valeurs, codes et savoirs accumulés au cours de l’histoire et transmis de génération en génération. Elle contribue à transmettre la conscience des liens qui unissent le corps social malgré sa dissémination et implique que se maintiennent des échanges, réels et symboliques, entre les lieux de la dispersion. Elle est à la fois unificatrice dans le sens où elle travaille à l’unité du corps dispersé et contribue à en maintenir l’idée. Et en même temps pluraliste car marquée par les conditions locales de vie, d’installation et les histoires propres à chacun des établissements de la diaspora [15]. C’est ainsi que dans la diaspora chinoise la culture d’un Baba de Singapour (descendant des Chinois établis depuis plusieurs siècles dans cette île) est différente de celle d’un BBC, d’un ABC ou d’un CBC [16].
La question des origines
20La représentation et la conscience de la dispersion introduisent et appellent la question des origines. Tout se passe comme s’il y avait nécessité de penser et d’inventer l’origine pour se maintenir comme diaspora. Il y a un lien inséparable entre origine et dispersion au point que l’origine apparaît comme le pendant obligé de la dispersion, sa contrepartie nécessaire. La question des origines est l’argument qui permet de penser la dispersion non plus comme pulvérisation sans ordre d’un corps social à travers le monde mais comme distribution réglée à partir d’un point matriciel. Cette question est donc fondamentale, constitutive et pour ainsi dire fondatrice de la diaspora (nous y reviendrons plus loin) car la conscience de la dispersion implique, pour exister comme telle, une mémoire de l’aire d’origine en tant que point de départ, réel ou supposé, de la dispersion : une mémoire de la matrice qui lui a donné naissance.
(Se) reproduire (dans) la dispersion
21La dispersion est certes conscience d’une subjectivité collective, d’un « nous » identifiant : d’une forme sociale. Mais elle est aussi conscience d’une forme spatiale (la dispersion). Il ne s’agit donc pas seulement pour le corps social de se reproduire dans la dispersion mais aussi de reproduire la dispersion. C’est à celle-ci que participe la création d’un imaginaire de l’origine et de lieux rappelant les caractéristiques de l’espace d’origine.
Créer un imaginaire de l’origine
22La question des origines se manifeste dans la création d’un imaginaire [17] particulièrement observable dans les foyers des familles, que ce soit en France, en Espagne ou aux États-Unis par exemple [18]. On y trouve des photos encadrées exposant des archétypes tels que la Grande Muraille ou la Cité interdite, des tableaux dans le style traditionnel représentant des paysages classiques de la peinture chinoise (sommets brumeux, vallées profondes, rivières…). On rencontre aussi des représentations qui introduisent d’autres références tels que les lieux d’établissement, les pays où ont vécu ou sont nés des membres de la famille (Cambodge, Laos ou Viêt-nam par exemple) ou encore San Francisco, lieu mythique pour certains Chinois d’outre-mer, figuré par le Golden Gate Bridge.
23Les commerces alimentaires et les restaurants participent fortement à l’entretien de cet imaginaire de l’origine en permettant le maintien de pratiques alimentaires spécifiques (Sutherland, 2007). Là aussi les références peuvent associer la Chine à d’autres lieux d’établissement (Tan, 2011). Les pratiques culinaires, la décoration des intérieurs familiaux et les célébrations de fêtes traditionnelles concourent comme cela a été abondamment souligné [19] au maintien d’une identité ethnique, que ce soit chez les Chinois d’outre-mer ou dans d’autres groupes diasporiques.
24Les récits que l’on peut recueillir au sein des familles à propos de la Chine [20] évoquent une entité aux contours vagues qui amalgame tout aussi bien le village, le quartier, la région d’où sont venues les personnes interrogées ou leurs prédécesseurs que l’ensemble du pays. L’espace de référence est situé dans le passé, dans un avant de la migration. Les représentations de l’origine familiale tiennent une place prépondérante dans ces récits. Elles peuvent prendre dans certains cas une forme élaborée conduisant à une biographie détaillée retraçant la vie d’un « ancêtre » qui a fondé la lignée hors de Chine. Ainsi de la vie de L. Z. arrivé en France dans les années 1920 à l’âge de 22 ans. Son histoire est consignée dans un ouvrage à diffusion restreinte de plus d’une centaine de pages, relié en cuir, dont des exemplaires circulent au sein de sa famille étendue. Elle est rédigée en chinois et en français et illustrée de photos le représentant à différentes étapes de sa vie. Il s’en dégage l’image d’un personnage héroïque que l’opiniâtreté au travail, l’abnégation et la frugalité ont conduit à la réussite économique. On souligne également son dévouement à la famille et la solidarité qu’il a témoignée envers ses compatriotes en les aidant dans leurs entreprises migratoires et économiques. Est mise aussi en exergue dans cette vie exemplaire hors de Chine une fidélité constante au village et à la région d’origine ainsi qu’à la Chine. D’un autre côté ses qualités personnelles légitiment, par extension pour ainsi dire, la présence du groupe familial en France et son absence de Chine. Cette héroïsation du fondateur de la lignée immigrée rappelle et copie probablement le modèle des biographies de Chinois d’outre-mer célèbres dont les vies « exemplaires » sont analysées dans des ouvrages parfois savants contribuant à créer une légende des Chinois d’outre-mer (Salmon, 1989) et un imaginaire de l’origine [21].
25Tout comme elles permettent une représentation de la dispersion, les productions culturelles et universitaires dont nous avons parlé plus haut contribuent à la fabrication d’une histoire de la diaspora. Le croisement de cette histoire en quelque sorte officialisée et publicisée avec les mémoires individuelles et familiales [22] permet aux individus de refigurer leurs expériences personnelles, qui parfois peuvent être dramatiques [23], et d’articuler les séries discontinues, morcelées, de ces expériences afin de les rendre intelligibles en les inscrivant dans ce qui se présente alors comme un destin collectif. Ces expériences se trouvent de cette manière inscrites dans un cours du temps qui permet de leur donner un sens : une continuité entre un avant et un présent de la dispersion qui eux mêmes permettent une projection dans un futur qui apparaît désormais commun.
26Ces phénomènes participent à la création d’un imaginaire de l’origine dans les espaces d’installation, que ce soit de manière quotidienne dans l’intimité familiale ou de façon plus exceptionnelle au sein de l’espace public. Cet imaginaire organise les rapports aux espaces d’origine mais aussi aux lieux d’établissement, dans la mesure où la présence du groupe s’y manifeste par des références à cette origine. On peut alors interpréter les « Chinatowns » non seulement comme lieux de concentration résidentielle, de services, de distribution et nœuds des réseaux diasporiques où s’échangent et se croisent des flux de toute nature, mais également comme la création, dans la dispersion, de lieux d’origine de substitution : de Chines ultramarines.
Les Chines ultramarines
27Les migrations chinoises ont donné naissance dans la plupart des pays d’installation à des concentrations résidentielles et commerciales souvent qualifiées dans les langues locales de villes ou quartiers chinois [24]. Ces Chinatowns [25] sont les manifestations spatiales les plus visibles de la diaspora et symbolisent aux yeux des sociétés d’installation sa présence en leur sein (Christiansen, 2003). Phénomènes exclusivement urbains, elles présentent à travers le monde une certaine unité à travers l’exhibition de symboles chinois : portails d’entrée richement décorés [26] signalant que l’on pénètre un monde chinois, multiples enseignes lumineuses aux larges idéogrammes des restaurants et des boutiques débordant de produits, densité des activités et de la population donnant l’impression d’un affairement intense… Cet air de famille, cette unité symbolique bien réelle recouvre cependant une grande diversité de situations liée aux conditions locales de leur apparition et de leur existence. Car les Chinatowns sont, selon les cas et à des degrés divers, le résultat de regroupements volontaires ou de phénomènes de ségrégation (Anderson, 1987).
28Ces concentrations commerciales et de services sont d’abord orientées vers la diaspora en fournissant les produits alimentaires, des vêtements spécifiques, des objets décoratifs et des services culturels et des soins de la personne que la clientèle recherche pour elle-même comme marque distinctive de son identité (Wong, 1982 ; Zhou, 1992). Elles s’adressent également à la population autochtone et sont devenues des lieux de consommation exotique et de dépaysement qui figurent en bonne place dans les guides touristiques des villes où elles sont implantées. Les Chinatowns sont des sas d’entrée et des espaces d’accueil ou de transit pour des migrants qui y trouvent emploi et logement, dans des conditions souvent précaires (Zhou, 2009 ; Lin, 1998 ; Kwong, 1996). Elles sont aussi des lieux d’échanges, de rencontres, d’informations et d’investissement (Lin, 1998). Comme espaces de mobilité des personnes et des marchandises, les Chinatowns sont les principaux nœuds du réseau que forme la diaspora : ses hubs migratoires et marchands où transitent et se mélangent des flux de toute nature. Elles jouent ainsi un rôle important de structuration des flux qui circulent entre les différents pôles de la diaspora. Le réseau des Chinatowns est souvent la réplique du réseau mondial des villes (New York, Londres, Tokyo, Paris…), ou son contrepoint lorsque les flux bifurquent et dessinent d’autres hiérarchies d’échanges (Lima, Johannesburg, Bangkok…).
29Elles jouent pour les populations d’origine chinoise un rôle essentiel « d’approvisionnement de la culture » (Raulin, 1988, 2000), constituent des lieux de l’entre-soi, de restauration et de rétablissement identitaires, et sont fréquentées par les personnes qui n’y résident pas pour s’y fournir en marchandises et en biens permettant la reproduction identitaire mais aussi pour s’y imprégner d’une atmosphère, d’une ambiance chinoise propice à un ressourcement symbolique (Guillon, Taboada-Leonetti, 1986). C’est ainsi que les Chinatowns deviennent pour – et sont entretenues par – leurs usagers comme univers de références communes, transportées dans la migration, ensembles localisés de normes, codes et valeurs, entités culturelles et lieux qui les re-confortent dans leur identité singulière. Elles se présentent alors comme des fragments de Chine au delà des frontières : des Chines ultramarines. Ce rôle de Chines de substitution que jouent les Chinatowns mérité d’être souligné, il met en lumière une fois de plus le lien indissociable entre dispersion et origine.
30Ces réplications de mondes chinois sont la création, dans la dispersion, de nouveaux lieux d’origine qui peuvent prendre le pas, pour les générations nées outre-mer, sur la Chine continentale. Ils le deviennent symboliquement en offrant aux existences individuelles les moyens de se définir comme membres du collectif, et concrètement en étant pour les générations qui y sont nées le lieu de leur naissance. La question des origines s’en trouve transformée et se décline différemment car la réponse englobe également ces nouveaux lieux d’origine que constituent les Chines ultramarines.
Continuité généalogique, contiguïté géographique et monde-propre
31La question des origines est en quelque sorte imposée par la forme diasporique car comme on l’a vu elle est constitutive de la diaspora : c’est elle qui permet au collectif de se représenter la dispersion. Par ailleurs, la question des origines définit l’identité des membres du collectif. Avoir une même origine est le critère à partir duquel ils se sentent appartenir à un même groupe et qui explique également à leurs yeux le fait de partager des traits communs, un même art de faire et de penser, des mêmes valeurs, un même type de cuisine et un même phénotype. Cette identité est une identité ethnique au sens où la définit Max Weber (1971, 1922), qui différencie l’identité ethnique des autres identités collectives (professionnelles, religieuses…) par la croyance partagée dans une même origine, réelle ou putative. Cette identité, en focalisant sur l’origine première (la Chine), tend à privilégier une origine unique. Or celle-ci ne correspond pas à ce que vivent et ressentent l’ensemble des membres de la diaspora qui se réfèrent également à des origines « secondes ».
La question des origines et l’invention d’une continuité généalogique [27]
32La question des origines se décline pour les individus selon deux dimensions : spatiale – puisqu’elle interroge le lieu d’origine – et temporelle – puisqu’elle renvoie au passé, à un « avant » de la migration. Elle est aussi toujours à la fois généalogique (de qui provenons-nous ?) et géographique (d’où provenons-nous). Elle crée et fait apparaître une continuité entre le sujet et son origine supposée : il se trouve ainsi relié à celle-ci. Elle fait advenir un espace et un temps configurés par cette origine.
33Mais la réponse à la question des origines ne va pas de soi. Lorsque l’on interroge des personnes d’origine chinoise nées au Cambodge et venues au titre de réfugiés au début des années 1980 [28], et qu’on leur pose la question : « quelle est votre origine ? », on a une réponse typiquement à deux niveaux : « je suis d’origine cambodgienne car c’est le pays où je suis né, mais je suis d’origine chinoise par mes parents (ou grands-parents) ». La réponse se complique lorsque la question est posée à leurs enfants nés en France, car ceux-ci vont introduire souvent un troisième niveau, celui de leur pays de naissance [29].
34Pour les personnes nées hors de Chine, le caractère généalogique qu’induit dans la réponse cette question est renforcé dans la mesure où le lien passe par la ou les générations qui les ont précédées. Par ailleurs, les généalogies se complexifient avec le nombre de générations nées outre-mer. La situation se complique encore lorsque les parents sont nés dans deux établissements différents. Et plus encore lorsque les grands-parents sont eux aussi nés dans des établissements différents et ont migré vers d’autres lieux encore, où sont nés leurs enfants qui eux-mêmes ont migré, etc. Ces situations ne sont pas rares et on les rencontre fréquemment en Asie du Sud-Est (Suryadinata, 1997). On peut aussi les repérer en France. Telle est la situation de M. X né en France (a) d’un père né à la Réunion de parents eux-mêmes nés au Vietnam, et (b) d’une mère née au Cambodge puis immigrée en France, dont le père est né en Chine et la mère en Thaïlande. On voit ici que la question des origines est difficile à démêler. Celles-ci sont multiples, est-ce l’île de la Réunion, le Viêt-nam, le Cambodge, la Thaïlande ? On voit également que l’origine des origines, pour ainsi dire, c’est la Chine. Il y a donc une sorte de hiérarchie : des origines « secondes » et une origine « première » qui permet de les réunir.
Les relations avec les autres « mêmes »
35Dans la vie quotidienne les individus sont fréquemment en présence avec d’autres « mêmes » dont l’identité qu’ils leur supposent avoir avec eux tient dans le fait qu’ils revendiquent une origine chinoise (une origine « première »). Mais ils savent que ces « mêmes » ont des origines « secondes », distinctes des leurs. Autrement dit, à l’échelon individuel, une personne née hors de Chine constate que son lieu d’origine n’est pas le point de départ de la diaspora. Elle rencontre également des semblables qui sont nés et ont vécu dans d’autres établissements de la diaspora. Et surtout elle a conscience de l’existence de ces « mêmes » dans d’autres pays dont l’identité avec elle tient dans une origine « première » qui n’est toutefois véritablement commune qu’à travers une généalogie. Et qui est de ce fait médiatisée par la cohorte des prédécesseurs. De sorte que pour cet individu l’origine « concrète » de la diaspora – l’espace qui donne lieu et origine à ses contemporains – en vient à être non pas le point de départ de la dispersion mais l’espace même de celle-ci, celui où elle se déploie.
De la continuité généalogique à la contiguïté géographique
36La question des origines renvoie au moment et au lieu de l’engendrement du collectif : la matrice du corps social dont le sujet se pense le membre et où le temps et l’espace s’abolissent puisqu’elle en est le commencement. Cette figure matricielle est mobilisée par les sujets pour s’expliquer leur origine et définir leur identité, avec une difficulté à penser une seule et même matrice, car les généalogies ne ramènent pas exclusivement à un même moment et un seul lieu, elles exposent des origines diverses. Cette origine « polytopique » en vient par une sorte de forçage logique, à être non pas un lieu unique (bien que celui-ci demeure comme référence quasi mythique) mais une multitude de lieux. En même temps, cette multiplicité est réunie par le geste généalogique, et c’est la dispersion même, le déploiement spatial du corps social qui devient matrice et s’offre comme espace d’origine.
37Alors la question des origines ne s’envisage plus seulement pour ces individus comme une continuité temporelle reliant les contemporains à un point mythique d’origine, directement ou à travers les prédécesseurs. Elle s’énonce également dans une contiguïté des lieux donnant espace et origine à ces contemporains. La dispersion n’est plus simple « agrégat », réunion accidentelle d’individus, mais un ensemble d’éléments, organisé pour sa conservation, une « monade » topographique [30] où les « ancêtres » seraient partout, qui serait leur séjour et où ils seraient virtuellement présents. De sorte que l’espace de reproduction de la diaspora s’ajuste, par ce travail, à celui de sa dispersion. Autrement dit, la question des origines, par la temporalité propre qu’elle crée, convertit le temps généalogique en un espace proprement diasporique qui n’est plus simple collection synchronique d’individus séparés mais réceptacle des sujets d’un collectif historique.
L’approximation des individus
38Quel est le processus qui permet cette conversion du temps en espace ? La continuité généalogique crée une proximité entre les individus qui juxtapose dans le temps les lieux où vivent ces individus. Se crée alors une proximité entre ces lieux, une contiguïté entre eux et, par là même, une proximité – dans l’espace – des individus qui y vivent. Ces lieux devenus contigus s’articulent alors en un espace qui les englobe, en un espace diasporique.
39On pourrait qualifier ce processus « d’approximation des individus ». Je désigne ainsi l’opération qui consiste à mettre en proximité des individus, à estimer et juger que tels individus sont proches (plutôt que tels autres) et que ce faisant ils forment un ensemble. C’est une opération mentale car c’est l’esprit qui estime que tel objet est proche de tel autre, car il peut dans des conditions différentes estimer qu’ils sont éloignés même s’ils conservent la même distance métrique.
40Ce processus d’approximation des individus s’appuie sur une opération cognitive de base. Pour agir ou penser il faut identifier les choses, les distinguer, les rassembler, former des ensembles, exclure d’autres choses, etc. En les rassemblant on les rend proches, on les relie et on les met en proximité. C’est cela que j’appelle approximation. Certes le terme est ambigu mais c’est aussi son intérêt en raison des sens différents qu’il suggère. En formant des ensembles d’individus il y a une part d’incertitude, d’à peu près. Les limites de l’ensemble ne sont pas absolument nettes (on l’a vu dans les exemples). Il y a toujours un doute sur le fait de l’appartenance d’un objet à cet ensemble, c’est donc approximatif. D’un autre côté approximation signifie « s’approcher de » (de quelque chose, de la solution, de la valeur, etc.) et également, rapprocher les choses entre elles, les mettre en proximité. Toutefois, il ne s’agit pas ici de choses mais d’êtres humains. Et surtout, ils sont mis ensemble dans un ensemble dont on fait soi-même partie (nous parlons à partir du point de vue du sujet diasporique et nous essayons de penser de l’intérieur ces phénomènes, cf. introduction). On crée donc une proximité d’autant plus forte qu’elle est chargée d’affects.
41Cette proximité est imaginaire au sens où elle est à proprement parler imaginée, car les individus peuvent être très éloignés physiquement. Elle se réalise ici le long de la ligne du temps (généalogie). Elle est donc diachronique. Mais comme toutes les choses nous apparaissent selon une dimension diachronique et une dimension synchronique, cette continuité diachronique appelle et impose même une continuité synchronique c’est-à-dire spatiale. L’approximation des individus d’abord diachronique dans notre exemple appelle sa contrepartie synchronique. C’est cette continuité synchronique que j’appelle contiguïté spatiale ou, plus précisément, géographique.
42En faisant cela les individus créent un espace et un temps qui leur sont communs et qui, de ce fait, leur sont propres. Ils créent un espace-temps propre c’est à dire approprié à leur reproduction-conservation. Car il est devenu celui à partir duquel ils peuvent se projeter dans l’avenir. Il est devenu l’espace à partir duquel ils peuvent se projeter dans le temps. Et le temps qui justifie leur présence dans l’espace humain (l’œcoumène) comme membres d’un collectif historique déployé sur la Terre.
43Cet espace et ce temps communs sont alors les dimensions aprioriques qui configurent leur représentations, visées et actions, et à partir desquelles ils se donnent et se présentent l’extériorité matérielle-sociale et la constituent comme monde propre à leur subjectivité collective.
Conclusion
44La réponse à la question de départ – comment un corps social spatialement dispersé peut-il se reproduire ? – peut apparaître comme une évidence puisqu’elle consiste à dire qu’un corps social dispersé peut se reproduire s’il crée un monde approprié à sa reproduction. Pourtant, l’idée de création d’un monde approprié ne va pas de soi si on la considère de façon plus radicale qu’un simple aménagement de l’environnement matériel et social dans lequel le groupe se trouve immergé. Il y a alors création au sens fort dans la mesure où de nouvelles façons de concevoir et d’organiser le monde sont posées et configurent les représentations, les visées et les actions des individus [31].
45L’intérêt de cette étude tient, me semble-t-il, dans les processus mis en lumière dans la création de ce monde (représentation et conscience de la dispersion, introduction de la question des origines, approximation des individus) [32]. Ils demanderaient à être examinés dans le cas d’autres diasporas. Elle permet également de pointer en passant plusieurs présupposés très largement partagés : la nécessité d’une proximité physique/spatiale des membres d’un groupe, pour que celui-ci constitue un corps social et la prégnance du spectre de l’éclatement, comme s’il fallait que pour exister un corps soit spatialement rassemblé, en proximité physique. De même, le rôle joué par la question des origines dans l’invention d’un sujet collectif révèle le caractère matriciel de cette « conception » et son caractère naturalisant (un corps existe parce qu’il sort d’une matrice). Il serait intéressant de voir comment (et si) cette question intervient dans le cas d’autres diasporas. Et sinon, comme semble le suggérer Christine Chivallon (2004) à propos de la « diaspora noire des Amériques », quels autres aspects des diasporas l’absence de cette question éclaire.
46Dans quelle mesure l’utilisation croissante des technologies de communication, notamment de l’Internet, renforce-t-elle (ou non) la diaspora ? Leur utilisation réduit-elle la « distance » ? Augmente-t-elle la proximité ? Participe-t-elle de « l’approximation des individus » ?
47La problématique de la création de mondes-propres demanderait à être élargie à d’autres diasporas et, au delà, aux groupes migrants, à partir de la question de la création de « mondes migratoires » c’est-à-dire prédisposés à accueillir la migration (Ma Mung, 2009a). C’est dans ce sens que vont certains travaux qui portent, entre autres, sur les temporalités et les spatialités migrantes, comme ceux d’Alain Tarrius (1989 ; Tarrius, Missaoui, 1995 ; Tarrius, 2002), et ceux de jeunes chercheurs tels que Tristan Bruslé (2006) à propos de migrants népalais en Inde, Lucine Endelstein (2008) sur les juifs du 19e arrondissement de Paris, Chadia Arab (2007) concernant les migrants marocains, Aurélie Varrel (2008) dans un autre registre, et Anthony Goreau-Ponceaud (2008) sur les Tamoules à Paris.
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Périodiques
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- Anthropology of Food, 2010, no 7 : « Migrations, pratiques alimentaires et rapports sociaux ». http://aof.revues.org/6515
- Diaspora : A Journal of Transnational Studies : http://www.utpjournals.com/diaspora
- Diasporas. Histoire et sociétés : http://w3.framespa.univ-tlse2.fr/revue/articles_liste.php?id=1
- Diaspora Studies : http://www.diasporastudies.in/
- Journal of Chinese Overseas : http://www.brill.com/journal-chinese-overseas
- Relations internationales : http://www.cairn.info/revue-relations-internationales-2010-1.htm
- Southern Chinese Diaspora Studies : http://csds.anu.edu.au/
Filmographie
- Wong K.-W. (2000). In the Mood for Love. Film hongkongais en couleurs. Genre : Drame, romance. Durée : 98 minutes.
Mots-clés éditeurs : continuité temporelle, monde-propre, diaspora, approximation des individus, migration, contiguité spatiale
Mise en ligne 23/01/2013
https://doi.org/10.3917/eg.414.0352Notes
-
[1]
Sur les travaux antérieurs voir le chapitre « Présentation » dans Bruneau (1995).
-
[2]
La revue Diaspora : A Journal of Transnational Studies (University of Toronto Press) créée en 1991, Diasporas, Histoire et Sociétés, université Toulouse le Mirail, créée en 2002, Diaspora Studies, créée en 2009 à la Jawaharlal Nehru University, New Delhi.
-
[3]
Concernant la diaspora chinoise le développement de la recherche sur ce thème a donné lieu à la création en 1992 d’une association regroupant plusieurs centaines d’universitaires (International Society for the Studies of Chinese Overseas) et de centres de recherche dans des universités à travers le monde. En 2006 a été lancée une revue à caractère scientifique, Journal of Chinese Overseas publiée par la National University of Singapore et la Hong Kong University, suivie par une autre en 2007, Southern Chinese Diaspora Studies publiée par l’Australia National University à Canberra. Concernant la diaspora africaine on peut signaler l’existence de quatre revues : The African Diaspora Archaeology Newsletter ; African Diaspora Newsletter ; Sankofa : Revista de História da África e de Estudos da Diáspora Africana et même African Diaspora Journal of Mathematics.
-
[4]
À titre indicatif, une requête sur Internet à propos du mot diaspora réalisée avec le moteur de recherche Google Scholar donne 15700 occurrences pour l’année 2010 et 19800 pour 2011. Par ailleurs, la revue Relations internationales a consacré en 2010 un numéro spécial aux diasporas. Voir également le no 2 de 2011 de la revue Annales, Histoire et Sciences Sociales.
-
[5]
En témoigne l’ouvrage de Stéphane Dufoix (2012). Dans un volumineux ouvrage de 576 pages l’auteur retrace l’histoire du mot diaspora et en analyse les usages ainsi que la façon dont il a proliféré et s’est imposé dans le monde académique mais aussi journalistique et dans les organismes étatiques et internationaux en charge des questions de développement, dans les associations de migrants et chez les migrants eux-mêmes. Ce qui le conduit à s’interroger sur la dispersion elle-même du terme diaspora et ainsi à une réflexion approfondie sur le langage dans la perspective d’une « sociosémantique historique ». Voir également l’ouvrage dirigé par Baubock et Faist (2010) qui aborde les diasporas à partir de la perspective du transnationalisme.
-
[6]
Dans les autres cas, l’espace désigne simplement le lieu, ou l’ensemble de lieux, où est localisée la diaspora sans que la relation à l’espace fasse l’objet d’une analyse en tant que telle. Voir par exemple les travaux de Peter Van de Veer (1995) et de Laurence J.C. Ma et Carolyn Cartier (2003), par ailleurs excellents.
-
[7]
Cet article reprend des éléments d’une communication : « Les processus de création d’un monde approprié (à la migration) », présentée à l’atelier de recherche « Stratégies des acteurs migrants et projet migratoire » organisé par l’ORMES et Migrinter, Taroudant, 15-17 mai 2011. D’une façon plus générale, il poursuit une réflexion entamée dans mon habilitation à diriger des recherches (Ma Mung, 1999), j’y précise que mes travaux ont été fortement influencés par la pensée de Cornelius Castoriadis, Pierre Clastres, Edgar Morin et Francisco Varela, entre autres, que je considère comme les penseurs importants de l’autonomie.
-
[8]
Voir Le Point de vue de l’autonomie dans l’étude des migrations internationales, « penser de l’intérieur » les phénomènes de mobilité (Ma Mung, 2009a) où je précise le positionnement épistémologique et les implications théoriques de ce point de vue.
-
[9]
Ce paragraphe sur la formation de la diaspora chinoise est nécessairement court et incomplet. Il vise simplement à souligner les caractères qui me semblent essentiels par rapport à la problématique développée. Les premières recherches sur la diaspora chinoise portent principalement sur sa présence en Asie du Sud-Est : Skinner (1957), Freedman (1957), Purcell (1965), Wickberg (1965), Wang (1992). Pierre Trolliet (1994) est un des premiers en France à avoir développer une approche globale de la diaspora chinoise, son interprétation en terme de « monde chinois » reste d’une grande pertinence : cf. le chapitre sur « La diaspora chinoise » dans Sanjuan, Trolliet, 2010. Pierre Gentelle (2000) quant à lui a contesté l’existence d’une diaspora chinoise. Pour une vision d’ensemble voir également Pan, 1999 ; Wang, 2000 ; Kuhn, 2008 ; ainsi que Roulleau-Berger, 2007, et Thuno, 2007 pour l’Europe.
-
[10]
Sur ce point voir notamment Martine Hovanessian (2005) qui montre comment la conscience progressive de la réalité de la dispersion au sein de la diaspora arménienne a permis l’émergence et l’affirmation d’un statut diasporique.
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[11]
Enquêtes personnelles. Les données empiriques ont été récoltées dans le cadre de recherches contractuelles (Commerçants étrangers en France, Direction de la population et des migrations, 1986 ; Réseaux chinois en Île-de-France, Datar, 1994 ; Working on the Fringe, DG 12 Union Européenne, 2002), et au cours d’observations faites au fil du temps dans un milieu dans lequel je suis immergé fréquemment.
-
[12]
Voir Li D.L. (1998) sur la littérature produite aux États-Unis, qui joue un rôle semblable, et Lee (2008) sur la littérature diasporique chinoise anglophone contemporaine.
-
[13]
Par exemple « International conference on literatures of the Chinese Diaspora » organisée par le département Asian American Studies de The University of California, Berkeley, en novembre 2002.
-
[14]
En France, il y a deux quotidiens et de nombreux hebdomadaires et mensuels.
-
[15]
Sur la variété des cultures des Chinois de la diaspora et leur indigénisation, voir Suriadynata, 2011.
-
[16]
Auto-désignation ironique des personnes qui sont comme elles le soulignent British Born Chinese, American Born Chinese ou Canadian Born Chinese.
-
[17]
Sur l’invention d’un imaginaire de l’origine voir Eng, 2011 ; Park 2002 ; Khuah-Pearce, Davidson, 2008.
-
[18]
Enquêtes personnelles.
-
[19]
Voir le numéro de la revue Anthropology of Food (no7, 2010), « Migrations, pratiques alimentaires et rapports sociaux » ; ainsi que Lu, Fine, 1995.
-
[20]
Voir Accone, 2004 à propos de la Chine vue par les Chinois d’outremer nés en Afrique du Sud. Dans le registre littéraire, le roman de Maxine Hong Kingston (1977), montre comment se construit chez les personnages une image de la Chine.
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[21]
Elles sont même exposées dans des musées, par exemple à Singapour au Hua Song Museum et au Chinese Heritage Center.
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[22]
Ces mémoires familiales peuvent prendre une forme littéraire comme dans le roman de M. H. Kingston (1977) ; voir également Tam, 2005.
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[23]
C’est le cas des réfugiés du sud-est asiatique au début des années 1980 ou des sinoindonésiens ayant fui les pogroms antichinois à la fin des années 1990 (Wang, Wong, 2007).
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[24]
Le terme « Chinatown » tend toutefois à remplacer les autres désignations, y compris dans les pays non anglophones, c’est pourquoi elle est reprise ici par commodité de langage.
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[25]
Les Chinatowns ont fait l’objet de nombreuses recherches notamment en Amérique du Nord. Voir Bernard Wong, 1982, sur la Chinatown de New York comme espace permettant l’intégration économique et la formation d’une identité ethnique spécifique. Min Zhou (1992) l’analyse comme enclave économique et institution socio-économique permettant la mobilité sociale et fournissant les moyens d’une identification à un groupe spécifique. Li Wei (1998) étudie la formation de nouvelles Chinatowns en tant que « ethnoburb » caractérisées par la coprésence de plusieurs groupes ethniques où un de ces groupes est prépondérant sans être majoritaire.
Min Zhou (2009) montre dans son ouvrage de synthèse comment elles ont évolué et se sont diversifiées tant sur les plans du rôle de ressourcement symbolique, de la fonction résidentielle et du dispositif économique qu’elles localisent. Concernant Londres, voir les travaux de Chung (2008) qui souligne que celle de Londres est plus un lieu de convergence important pour la communauté chinoise qu’un simple « artifice urbain » à visée touristique et commerciale. En France l’ouvrage de référence reste celui de Michelle Guillon et Isabelle Taboada-Leonetti (1986) bien que la situation depuis ait considérablement évolué : voir également Costa-Lascoux et Live (1995). -
[26]
À l’exception de Paris : plusieurs démarches ont été faites auprès de la Ville de Paris par des associations chinoises en vue d’obtenir l’autorisation pour la construction d’un portail dans le 13e arrondissement mais n’ont pas reçu à ce jour de réponse positive.
-
[27]
Sur l’invention de généalogies voir le numéro 5 de la revue Diasporas. Histoire et sociétés, intitulé « Généalogies rêvées » (2008). Il montre que de nombreuses diasporas ont eu recours à la construction généalogique et souligne « l’efficacité que peut avoir le récit généalogique dans la construction du sentiment diasporique » (éditorial).
-
[28]
Enquêtes personnelles.
-
[29]
Sur ce point voir Chan (2006) à propos des vietnamiens d’origine chinoise émigrés, Li M. (1998) sur les différentes identifications des descendants de Chinois d’Indonésie établis aux Pays Bas, et Live (2003) à propos des descendants de Chinois à la Réunion.
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[30]
La distinction de Leibniz entre agrégat, unum per accidens et monade, unum per se est opportune ici. Elle permet de souligner que la diaspora est un être-pour-soi organisé pour se conserver et non un ensemble de mécanismes intersubjectifs dont la coordination accidentelle aurait produit ce corps social.
-
[31]
Un bon exemple de la puissance de cette création nous est donné par la diaspora (chinoise) puisqu’ici ce monde doit être créé de telle sorte qu’il permette la reproduction de la forme « dispersion », c’est-à-dire tout à la fois maintenir la distance entre les individus et inventer les instruments qui cherchent à la réduire.
-
[32]
La reprise des migrations chinoises depuis le milieu des années 1980 a conduit à un quasi doublement de ses effectifs depuis cette époque et produit un mouvement contradictoire : elles renforcent d’un côté la diaspora et de l’autre ses liens avec la Chine. Par ailleurs, la Chine développe une politique nouvelle vis-à-vis de la diaspora (Guerassimoff, 2006 ; Xiang, 2006) dont les effets sur l’autonomie peuvent être eux aussi contradictoires : si d’un côté le gouvernement essaie de reprendre le contrôle des communautés émigrées, de l’autre il reconnaît de facto la diaspora comme entité distincte et autonome (Ma Mung, 2008). Enfin, l’émergence de la Chine comme puissance économique prépondérante modifie l’image qu’en ont les Chinois de la diaspora. Pourtant il ne me semble pas que ces éléments nouveaux éliminent ni même modifient radicalement les processus que j’essaie de porter au jour.