1Une conception moderne de l’étude du développement émotionnel de l’humain consiste à décrire l’émotion en termes de régulateur du comportement et de circonscrire l’activité émotionnelle à une action de régulation susceptible d’être modifiée avec l’âge (Campos, Campos, & Caplovitz-Barrett, 1989 ; Thompson, 1994). Cette idée de régulation émotionnelle soulève la question de la relation du sujet émotionnel avec son environnement social, et pose également le problème de la nature des interactions des processus émotionnels avec les systèmes cognitifs et neurophysiologiques (Dodge & Garber, 1991). Les enjeux théoriques sous-jacents sont tels qu’aucun modèle intégratif du développement de la régulation émotionnelle n’est disponible. Bien au contraire, la littérature se construit sur la base de deux conceptualisations diamétralement opposées : une première position, principalement interpersonnelle, fréquemment rencontrée dans le champ de la psychologie du développement qui assimile l’émotion à un ensemble de phénomènes régulateurs indispensable au sujet pour l’établissement de relations sociales adaptées (Aitken & Trevarthen, 2003 ; Campos, Frankel, & Camras, 2004) et une seconde position, cognitive et notamment intrapersonnelle, qui envisage les phénomènes émotionnels comme devant faire l’objet d’une régulation par l’activité cognitive (Dodge, 1991 ; Gross & Thompson, 2007). Cet article se propose de présenter ces différentes perspectives et de montrer l’intérêt de ces deux approches qui permettent à la fois d’éclairer autrement l’ontogenèse de l’activité émotionnelle humaine, mais également de dynamiser la recherche concernant les propositions d’interventions psychothérapeutiques adaptées à des publics troublés dans leur développement émotionnel.
La vision cognitive de la régulation émotionnelle : l’idée d’autorégulation des émotions
2La question de la régulation émotionnelle dans sa dimension cognitive a essentiellement été posée en termes d’autorégulation émotionnelle. L’idée d’autorégulation des émotions trouve ses racines dans l’étude chez l’adulte du traitement de l’information émotionnelle, et en particulier l’étude des processus d’évaluation émotionnelle et de tendance à l’action (Leventhal, 1979 ; Scherer, 1984). Dans cette conception, l’activité émotionnelle est le produit d’une double activité cognitive : il y a émotion lorsqu’un sujet attribue à une situation sociale une valeur émotionnelle, et lorsqu’il sélectionne ensuite une stratégie pour réagir de façon adaptée à ce contexte précis. Par exemple, Gross (2007) a récemment proposé l’idée d’une régulation émotionnelle dans laquelle l’évaluation cognitive d’un contexte émotionnel détermine l’ensemble des processus émotionnels à venir et constitutifs de l’activité régulatoire. Pour cet auteur, la manifestation d’une réponse émotionnelle n’est pas strictement en lien avec l’exposition à des stimuli émotionnels (un visage de joie par exemple), la venue d’une émotion est consécutive à l’activation d’un certain nombre de traitements cognitifs au cours desquels le sujet accorde une signification émotionnelle au stimulus. Gross estime que le phénomène de régulation émotionnelle est avant tout un phénomène de régulation des émotions et cette régulation émotionnelle s’effectue alors en deux temps. Elle est tout d’abord composée d’un premier ensemble de processus centré sur les antécédents émotionnels (antecedent-focused emotion regulation) qui assure une évaluation émotionnelle et qui organise le choix de la réponse à donner. Ce premier ensemble de processus comprend quatre stratégies cognitives. Une première stratégie dite de sélection de la situation (situation selection) permet d’éviter ou d’approcher un contexte à valence émotionnelle. Par exemple, un adulte qui visionne un reportage TV à valence négative (un documentaire sur la violence faite aux enfants par exemple) peut éviter le contexte en quittant la pièce. Une seconde stratégie dite de modification de la situation (situation modulation) permet de faire varier l’impact émotionnel du contexte. Face à un jeu de ballon initié par un pair d’âge, l’adolescent dyspraxique mettra tout en œuvre pour se retrouver dans le rôle de l’arbitre. La troisième stratégie est appelée stratégie de déploiement attentionnel (attentional deployment). Elle autorise la centration du sujet sur un aspect particulier, voire restreint, d’un contexte émotionnel. Un jeune employé qui se fait réprimander peut éviter la réaction émotionnelle de son employeur en détournant son regard en se focalisant sur un objet extérieur à la situation.
3Enfin une quatrième stratégie favorisant des changements cognitifs (cognitive change) autorise l’activation de réinterprétations, de réévaluations du contexte émotionnel. À l’aide de cette stratégie, le sujet peut réussir à choisir ou modifier la signification attachée à une situation de nature émotionnelle. Ainsi, le lycéen peut réajuster son propos en fonction de la valence émotionnelle présentée par le visage d’un professeur mécontent. Ces quatre stratégies sont complétées d’une cinquième que Gross appelle la « modulation de réponse » et qui s’applique cette fois aux réponses émotionnelles (response-focused emotion regulation). Cette stratégie de modulation de réponse marque le second temps dans la régulation des émotions et permet d’interrompre, de maintenir, d’intensifier ou de réduire des réponses émotionnelles sur des niveaux physiologiques, comportementaux, et représentationnels. Par exemple, un jeune adolescent avec déficience intellectuelle qui, à l’entrée d’un magasin, manifeste une certaine frayeur face à des personnes inconnues peut réussir à contrôler son inquiétude si une explication quant au risque de rencontrer plusieurs personnes non familières est formulée par un accompagnateur. Ici, il s’agit de considérer qu’une partie des ressources cognitives est principalement utilisée par le sujet pour supprimer la valeur négative (ou positive) d’un contexte émotionnel.
4Comme une validation du modèle, les travaux empiriques de Gross (2007, 2008) ont porté essentiellement sur l’étude chez l’adulte de deux stratégies régulatoires : la stratégie de réévaluation cognitive (appartenant au processus de changement cognitif) et celle de suppression (stratégie de modulation de réponse). Gross et ses collaborateurs observent que l’usage de stratégie de réévaluation cognitive, lorsqu’il s’agit de faire face à des contextes émotionnels stressants, permet au sujet d’adopter des attitudes optimistes et positives. L’usage de cette stratégie de réinterprétation du contexte émotionnel est fréquemment associé à un meilleur fonctionnement social interpersonnel. En revanche, les sujets utilisant préférentiellement une stratégie de suppression face aux contextes émotionnels stressants montrent davantage de difficultés pour réguler leurs émotions. Ces personnes manifestent plus de difficultés pour partager leurs expériences émotionnelles négatives et positives. Récemment, Samson, Huber, et Gross (2012) ont testé l’existence de ces deux stratégies régulatoires chez des sujets porteurs de Troubles du spectre autistique (TSA), c’est-à-dire chez des sujets décrits en difficulté dans le traitement émotionnel. Les auteurs ont comparé les capacités de régulation de l’émotion de 27 adultes avec TSA à celles d’adultes typiques. Le fonctionnement émotionnel des sujets a été évalué à l’aide d’épreuves et de questionnaires mesurant la perception des sujets sur leurs propres expériences émotionnelles et sur leurs propres moyens de régulation des émotions. Les auteurs ont cherché en particulier à évaluer l’usage ou non de stratégies régulatoires : une stratégie de réévaluation cognitive de l’état émotionnel (par exemple : « je contrôle mes émotions en modifiant ma façon de penser le contexte dans lequel je suis impliqué »), et une stratégie de suppression de l’état émotionnel (« je contrôle mes émotions en ne les exprimant pas »). Les résultats montrent que les personnes avec TSA rapportent faire d’avantage l’expérience d’émotions négatives comparativement aux personnes ordinaires. En revanche, les deux groupes estiment de façon similaire faire fréquemment l’expérience de situations émotionnelles positives. Concernant la régulation des émotions, les individus avec TSA disent réévaluer leurs émotions moins fréquemment que les individus ordinaires, préférant les stratégies de suppression des contextes émotionnels pour faire face aux situations sociales stressantes. Selon Samson et al. (2012), ce pattern de réponse suggère l’existence d’un profil d’autorégulation émotionnelle plus inadapté chez la personne avec TSA que chez l’adulte ordinaire. Il reste bien évidemment à vérifier un tel résultat. Il reste aussi à s’interroger sur la qualité des profils d’autorégulation émotionnelle chez l’enfant. En effet, la transposition de ces premiers résultats pour décrire le comportement d’enfants avec TSA est à effectuer avec précaution au regard 1. de l’usage d’un outil pensé pour l’examen de la régulation émotionnelle chez l’adulte, 2. des variabilités de profils cognitifs et diagnostiques pouvant exister dans la population avec TSA, et 3. des diversités de modes de prise en charge et de niches de développement dans lesquelles évoluent les personnes autistes. Toutefois, il convient de reconnaître que les premières perspectives évoquées par Samson et al. (2012) sont intéressantes pour organiser l’étude de l’autorégulation émotionnelle chez l’enfant. Il reste à penser les outils d’évaluations applicables à cette population.
5 En définitive, la théorie de Gross (2007) est un modèle qui décrit essentiellement la régulation intra-individuelle de l’activité émotionnelle du sujet, en particulier du sujet adulte. Cette théorie met surtout l’accent sur la dimension réflexive de la régulation des émotions. Comme le souligne Philippot (2007), cette théorie ne constitue en rien une conception dans laquelle la question de la régulation par les émotions trouve sa place. L’image de l’humain émotionnel décrite par Gross (2008) est l’image d’un humain qui exerce, plus ou moins efficacement, des contrôles cognitifs sur des phénomènes émotionnels qui apparaissent souvent comme « potentiellement parasites » et assez peu adaptatifs. Dodge (1991) inscrit lui aussi les phénomènes émotionnels dans un ensemble de traitements de l’information à l’intérieur duquel les contrôles cognitifs opèrent.
6Si cette position cognitive est intéressante, elle n’explique pas pour autant l’existence des formes précoces de régulation émotionnelle qui trouvent leur origine dans la relation interpersonnelle. Or, il est admis aujourd’hui (Tremblay, Brun, & Nadel, 2005) que l’échange avec autrui constitue le contexte dans lequel enfant et adulte co-construisent des états internes (physiologiques et mentaux) qui supposent « en parallèle » le développement de procédures inter- puis intra-personnelles permettant de réguler ces nouvelles activités psycho-biologiques. Dans cette perspective, l’émotion apparaîtrait comme un ensemble de stratégies régulatrices que l’humain développe précocement afin d’initier, de maintenir ou d’interrompre ses conduites inter- et intra- personnelles. En d’autres termes, nous pensons comme Roskam (2012) que bien antérieurement aux potentialités d’autorégulation émotionnelle dont parle Gross (Gross & Thompson, 2007) et qui supposent l’avènement de capacités méta-émotionnelles (Harris & Pons, 2003), c’est-à-dire bien avant que ne se pose la question de la régulation des émotions, se développeraient des formes précoces de régulation par l’émotion.
La conception développementale de la régulation émotionnelle
7Depuis une trentaine d’années, les recherches développementales montrent que les premières formes de régulation émotionnelle chez l’enfant apparaissent très tôt au cours du développement (Calkins & Hill, 2007 ; Izard & Kobak, 1991 ; Thompson & Meyer, 2007). Si quelques travaux réalisés auprès du nouveau-né suggèrent l’existence d’une interaction entre autorégulation comportementale et réactivité émotionnelle (Eisenberg, Hofer, & Vaughan, 2007 ; Kopp, 1989 ; Soussignan & Schaal, 2005), la majorité des études met l’accent sur la précocité des compétences de régulation émotionnelle interpersonnelle (Diener & Mangelsdorf, 1999 ; Lowe, MacLean, Duncan, Aragón, Schrader, Caprihan, & Phillips, 2012 ; Roskam, 2012 ; Saarni, 1999). Campos et Barrett (1984) par exemple conçoivent le rôle des émotions en termes de régulateurs du comportement social interpersonnel indispensables au bon développement du sujet. Plus récemment, Campos, Frankel et Camras (2004), précisent que les processus émotionnels régulatoires interagissent en permanence afin d’initier, de maintenir ou d’interrompre la résolution des problèmes que rencontre le jeune enfant dans son environnement social. Cole, Martin et Dennis (2004) envisagent elles aussi la régulation émotionnelle comme un ensemble de processus qui correspondent aux changements comportementaux associés à des émotions ressenties et manifestées entre différents partenaires sociaux. Pour ces auteurs, la régulation émotionnelle renvoie à des modifications de l’émotion elle-même (sur le plan de l’intensité et de la durée) mais également à des modifications au niveau des compétences d’interactions sociales de chaque partenaire. Cicchetti, Ganiban et Barnett (1991) considèrent la régulation émotionnelle comme un ensemble de facteurs internes et externes à l’organisme responsables de l’élaboration, du contrôle, de la modulation et de la modification des émotions afin de permettre à un enfant d’agir et de réagir de manière adaptée dans des contextes socio-émotionnels. Pour ces auteurs, les émotions sont très précocement au cœur du système d’interrelations entre Soi et Autrui. Elles assurent la double mission de fournir des informations concernant les états internes du Soi et d’Autrui mais également de médiatiser les interactions Soi/Autrui. Tremblay, Brun et Nadel (2005) envisagent, quant à eux, l’activité émotionnelle précoce du bébé comme l’élément d’une matrice intersubjective, une base de ressources à partir de laquelle le nourrisson expérimente ses premiers moyens de régulation et de communication. Ainsi, les premières apparitions de la régulation émotionnelle sont déclenchées par des évaluations qu’effectue le bébé sur son état interne. Autrui, par sa manifestation émotionnelle, fait alors figure de composante indispensable, tout d’abord fortuite puis rapidement intégrée, dans la régulation du comportement du bébé. L’émotion peut alors être considérée comme le fruit d’une activité co-construite entre le bébé et son partenaire et cette matrice intersubjective va servir de tremplin à l’élaboration d’une connaissance émotionnelle progressivement explicite concernant soi et autrui. Au gré des rencontres avec l’entourage humain, le bébé détecte, évalue, distingue, expérimente l’engagement émotionnel d’autrui ainsi que ses propres capacités d’expressivité et de compréhension émotionnelle.
8Dans cette perspective de régulation interpersonnelle par l’émotion, les travaux sont fort nombreux. Qu’il s’agisse, par exemple, de la question de la référenciation sociale (Feinman, 1982), un consensus existe pour défendre l’idée que l’enfant de 12 mois est capable de moduler et d’adapter ses comportements émotionnels lorsqu’il doit faire face à des objets ou des personnes non familières. Qu’il s’agisse également de l’étude des conversations émotionnelles entre la mère et l’enfant d’âge préscolaire (Calkins & Hill, 2007 ; Le Sourn-Bissaoui & Deleau, 2001), les auteurs rappellent que la mise en place d’une régulation émotionnelle efficace est liée à la qualité de l’étayage émotionnel offert par les parents. Pour Denham (1998), le langage émotionnel exprimé au sein d’une dyade joue un rôle important dans l’élaboration conjointe de la régulation des émotions au sein de cette même dyade. Qu’il s’agisse enfin d’observer les capacités de dissimulation émotionnelle chez l’enfant d’âge scolaire (Saarni, 1999), les études s’accordent pour retenir l’idée que la capacité de l’enfant à manifester une émotion autre que celle réellement ressentie apparaît très progressivement au cours de la période scolaire, qu’elle s’exprime différemment entre filles et garçons et qu’elle se révèle sensible au statut et au degré de familiarité du partenaire social.
9Ces quelques exemples montrent que l’émotion se modifie avec l’âge et que l’humain apprend à réguler son comportement par l’activité émotionnelle pour progressivement réguler ses comportements émotionnels. Ainsi, concevoir l’émotion comme un régulateur du comportement implique de concevoir le régulateur comme une entité dynamique, évolutive et intégrative qui se modifie pour s’adapter aux transformations physiologiques, mentales et comportementales que le sujet opère. Par exemple, l’installation du langage verbal chez l’enfant admet la maîtrise progressive de formes linguistiques émotionnelles participant à l’organisation et à la régulation des activités syntaxiques, lexicales, sémantiques et pragmatiques (Brun, 2008). En d’autres termes, lorsque l’activité cognitive se transforme, qu’elle s’enrichisse ou bien qu’elle se réduise, l’activité émotionnelle quant à elle se diffuse et opère de façon nouvelle. Cette position a conduit à la formulation d’une séquence développementale de la régulation émotionnelle qui comprend les dimensions de la régulation interpersonnelle en situation sociale réelle, la régulation interindividuelle en situation fictive (« hors contexte ») et l’autorégulation ou régulation intrapersonnelle (Brun & Mellier, 2004). La première étape serait caractérisée par l’établissement de moyens de régulation émotionnelle opérée in situ entre l’enfant et son entourage. Ces premières manifestations d’émotion seraient progressivement intériorisées, puis décontextualisées pour devenir des éléments de régulation émotionnelle interpersonnelle pouvant s’exprimer lors de situations fictives (un travail sur table autour de la reconnaissance de visages émotionnels par exemple). Enfin, cette seconde étape favoriserait l’avènement d’une régulation émotionnelle réflexive, une troisième étape définie par l’installation de procédure d’autorégulation de représentations d’émotions. Cette séquence reste à préciser dans ces multiples articulations développementales.
La régulation émotionnelle dans l’action thérapeutique
10Considérer les émotions comme étant des éléments régulateurs et/ou régulés du système d’échanges entre Soi et Autrui constitue un socle commun de connaissances du développement émotionnel ordinaire (Brun, 2001 ; Campos, Campos, & Caplovitz-Barrett, 1989 ; Harris & Pons, 2003 ; Thompson, 1994). Cet argument intéresse également la psychopathologie cognitive (Gorenstein, Tager, Shapiro, Monk, & Sloan, 2007 ; Macklem, 2010 ; Thwaites & Bennett-Levy, 2007) ainsi que la psychopathologie développementale (Adrian, Zeman, & Veits, 2011 ; Baurain & Nader-Grosbois, 2011 ; Cicchetti, Ackerman, & Izard, 1995). Dans cette perspective psychopathologique, la majorité des travaux interrogent la qualité des stratégies de régulation émotionnelle chez l’adulte troublé. Greenberg (2002, 2008) par exemple, propose une approche dite centrée sur l’émotion (EFT – Emotion-Focused Therapy). Ce modèle EFT prévoit l’élaboration d’un cadre thérapeutique au sein duquel la question de la régulation émotionnelle est posée en termes de régulation des émotions. Selon Greenberg (2008), l’humain développe habituellement des compétences émotionnelles, des émotions primaires. Ces émotions primaires correspondent à des réactions émotionnelles qui résultent d’une évaluation cognitive en lien direct avec un contexte explicite (c’est-à-dire, être heureux lorsque l’on gagne à un jeu). Les émotions primaires ou plus exactement les états émotionnels primaires constituent des ressources pour le sujet, des ressources qui favorisent l’élaboration de prise de décision et de schémas d’action. Toutefois, au hasard des contextes sociaux, l’humain développe également des émotions primaires inadaptées c’est-à-dire des états émotionnels élaborés cette fois à partir d’évaluations ne correspondant pas aux contextes (c’est-à-dire, avoir le sentiment d’être détesté par tout le monde). Ces états émotionnels inadaptés sont le fruit d’apprentissages émotionnels antérieurs ayant une valeur traumatique pour le patient. Ce sont des peurs, des colères (parfois immotivées), des états de détresse, ou encore des phobies vis-à-vis de l’environnement social. Lorsque les émotions primaires inadaptées sont trop envahissantes, le sujet développe alors ce que Greenberg appelle des émotions secondaires c’est-à-dire des états mentaux émotionnels qui constituent des réponses régulatoires qui servent d’écrans aux émotions primaires inadaptées (c’est-à-dire, se sentir impuissant dans une situation où l’on a essayé de supprimer sa colère).
11L’émotion secondaire permet alors de faire face aux conflits mentaux intrapersonnels. Elle s’apparente à un mécanisme de protection du fonctionnement cognitif du sujet. Pour modifier le dysfonctionnement émotionnel rencontré par le patient, Greenberg propose un cadre thérapeutique qui repose sur cinq principes généraux : 1. l’amélioration de la prise de conscience de l’état émotionnel, 2. l’expressivité émotionnelle, 3. l’amélioration de la régulation des émotions, 4. l’analyse des états émotionnels et 5. la transformation des émotions mal adaptées du patient.
12Concernant précisément la dimension de régulation des émotions, Greenberg suggère l’établissement d’un environnement empathique entre la personne et le thérapeute. Il s’agit ici de valoriser l’estime de soi de la personne, encourager l’expressivité émotionnelle positive de cette dernière, réduire sa vulnérabilité vis-à-vis d’états émotionnels négatifs et encourager l’usage de technique d’auto-apaisement (technique de relaxation et de respiration par exemple). Ce cadre thérapeutique doit favoriser la transformation des états émotionnels secondaires et inadaptés en émotions supportables par le sujet. Cette modification de l’émotion primaire inadaptée par une émotion adaptée au contexte du sujet et supportable par ce dernier représente le point central du modèle EFT (Greenberg, 2002).
13Chez l’enfant, avec le modèle intitulé Developmental, Individual Difference, Relationship- Based Model (DIR), Greenspan et Wieder (2006) ont proposé une intervention thérapeutique qui a pour objectif de développer chez le jeune enfant des capacités d’engagement interactif, de communication intentionnelle, et de compréhension émotionnelle. Selon Greenspan, le programme DIR, communément appelé floortime (en référence à sa stratégie d’application), permet tout d’abord d’étudier la qualité du système interactif entre l’enfant troublé et sa famille pour ensuite pouvoir offrir des interventions socio-émotionnelles adaptées au niveau de l’enfant. Concrètement, le floortime se caractérise par des séances de jeux sous-tendus par un protocole qui prévoit quatre niveaux d’intervention adressés à l’enfant. Dans un premier temps, le thérapeute observe et décrit précisément les comportements de l’enfant afin d’établir un profil de développement. Dans un second temps, et selon le profil de développement obtenu, il s’agit d’ouvrir un cercle de communication qui correspond à la mise en place de situations de communication. Via le jeu, l’enfant et le thérapeute co-construisent des activités conjointes. Dans son troisième temps, le floortime suppose que le thérapeute suive la conversation initiée par l’enfant. Cette conversation doit être progressivement et habilement élargie par le thérapeute de sorte que l’enfant puisse apprendre à généraliser ces compétences émotionnelles au sein du cercle de communication. Dans le dernier temps, Greenspan insiste sur l’importance de rendre explicite la clôture de la conversation entre l’enfant et le thérapeute.
14Le floortime a fait l’objet d’une étude de validation dans laquelle une comparaison des performances émotionnelles, sociales et cognitives a été effectuée auprès de 14 enfants avec TSA recevant une prise en charge classique, 20 enfants avec TSA bénéficiant du floortime, et de 14 enfants ordinaires (Greenspan & Wieder, 1997). Cette recherche met notamment en évidence la dimension stimulante du floortime pour le développement de compétences émotionnelles adaptées. L’étude montre par exemple que les enfants ont développé des compétences manifestes d’engagement social avec les pairs d’âge, qu’une très grande majorité d’entre eux a progressé dans la lecture et la réponse face aux signaux socio-émotionnels, et qu’une partie significative de la population a construit des capacités d’empathie aisément observables. Il faut préciser que l’approche de Greenspan et Wieder ne se réduit pas à une remédiation émotionnelle impliquant uniquement l’enfant et le thérapeute. Le floortime repose également sur la mise en place de supervisions de séances de jeu entre parents et enfants, supervisions dirigées en temps direct par le thérapeute. Ainsi, lorsque le parent et l’enfant sont engagés dans la co-construction d’activités conjointes ludiques, le thérapeute est présent auprès d’eux pour commenter leurs activités de jeu.
15Par exemple, le thérapeute peut alors interpeller le parent, demander à ce dernier de justifier sa façon d’interagir avec son enfant, corriger l’action du parent, etc. Cette supervision doit permettre aux familles de pouvoir d’une part analyser leur pratique de floortime et d’autre part comprendre les comportements de leur enfant. En d’autres termes, le floortime est pensé comme favorisant le reformatage des activités de communication émotionnelle entre parents et enfants dans le but d’apprendre des comportements transposables dans un environnement social plus large (domicile, institution, etc.).
16S’inspirant de ce modèle, une intervention thérapeutique émotionnelle a été proposée par Brun (2003, 2011) à de jeunes adolescents avec TSA. Cette intervention repose sur le triple principe thérapeutique 1. de proposer à l’enfant un espace de parole susceptible d’améliorer sa compréhension de scénarios émotionnels, 2. de développer ses capacités méta-émotionnelles c’est-à-dire ses capacités de représentation des procédures émotionnelles (par exemple, devenir capable de se représenter pouvoir se mettre en colère pour aller mieux ensuite), et 3. de développer des savoirs et des savoir-faire de régulation émotionnelle. L’idée majeure dans cette approche est d’offrir la possibilité aux enfants de construire les compétences leur permettant de comprendre à quoi servent les émotions (par exemple, apprendre que sourire permet d’être accepté dans un groupe social). Chaque séance correspond à la conduite d’un entretien semi-structuré ayant une durée qui varie entre 20 et 45 minutes au cours duquel des conversations libres sont encouragées. Les sujets sont vus individuellement tous les quinze jours. Le thérapeute quant à lui interagit de façon empathique avec l’attention, la congruence et la concordance émotionnelle qui s’imposent. Non seulement, il s’agit de créer un climat relationnel favorisant chez le sujet l’évocation verbale et non verbale des contextes émotionnels, mais il est également important que ce temps relationnel entre l’enfant et le thérapeute constitue en lui-même un temps d’expérience sociale permettant l’expérimentation de situations émotionnelles. Le cadre de l’entretien doit alors offrir l’opportunité à l’enfant avec TSA de prendre conscience, d’expliciter, de réguler et d’accepter ses expériences émotionnelles. À l’aide de techniques de décomposition de scénarios d’émotions, d’explicitation in vivo et d’exposition, le thérapeute permet à l’enfant avec TSA de transformer ses états émotionnels inadaptés en états émotionnels socialement attendus. Chaque séance se déroule en deux temps selon un ordre strict : 1. une phase d’évocation idiosyncrasique au cours de laquelle l’enfant doit évoquer des thèmes de conversation qui vont être exploités dans leur dimension émotionnelle puis 2. une phase de généralisation des évocations au cours de laquelle d’autres contextes émotionnels proches de ceux proposés par l’enfant sont exprimés et explicités. Des résultats obtenus sur plus de 18 mois de suivi (Brun, 2011) ont permis d’observer 1. une augmentation significative à la fois du nombre de phase de généralisation émotionnelle mais également de l’utilisation spontanée de mots émotionnels et de termes volitionnels en lien avec la manifestation d’états émotionnels, 2. une réduction de la fréquence des épisodes de colère enregistrée par l’entourage, et 3. une augmentation de la qualité des comportements d’intégration sociale rapportée par l’entourage de l’enfant avec TSA.
Conclusions
17L’émotion est un phénomène humain complexe. Il s’agit non seulement d’une interface observable entre l’intégration physiologique de signaux corporels et l’élaboration d’états mentaux, mais également d’un phénomène dynamique qui crée des liens interpersonnels favorisant à la fois l’ouverture de l’individu sur le monde mais aussi son exclusion et sa mise à distance du groupe.
18Avec l’émotion, l’humain réalise des compromis entre l’intime et le social et cela dans l’unique but d’adapter ses conduites aux sollicitations de son environnement. Cette vie émotionnelle qui réduit l’immaturité humaine et propulse l’enfant dans le monde adulte est le produit d’un ensemble de réalisations mentales corrélées à des changements d’états physiologiques et mentaux dont l’objectif est la régulation du comportement. Ces manifestations émotionnelles peuvent résulter ou bien être à l’origine de ces changements d’états physiologiques ou mentaux. Comme nous l’avons vu, différentes approches cognitives et développementales rendent compte de la dimension régulatoire des émotions (régulation des émotions versus régulation par l’émotion) sans toutefois proposer de modèle intégratif du développement de la régulation émotionnelle intra- et interpersonnelle. De futures recherches, et notamment psychopathologiques, sont nécessaires pour combler cette lacune et mieux comprendre comment s’opèrent ces mouvements de translation de l’activité de régulation par l’émotion vers l’activité de régulation des émotions.
Déclaration d’intérêt
19 L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
Bibliographie
Références
- Adrian M. , Zeman J. , & Veits G. (2011). Methodological implications of the affect revolution: A 35-year review of emotion regulation assessment in children. Journal of Experimental Child Psychology, 110, 171-197.
- Aitken K. J. , & Trevarthen C. (2003). L’organisation soi/autrui dans le développement psychologique de l’humain. La psychiatrie de l’enfant, 46(2), 471-520.
- Baurain C. , & Nader-Grosbois N. (2011). Élaboration et validation d’un dispositif méthodologique pour l’observation de la régulation socioémotionnelle chez l’enfant. Enfance, 2, 179-211.
- Brun Ph. (2001). Psychopathologie des émotions chez l’enfant : l’importance des données développementales typiques. Enfance, 3, 281-291.
- Brun Ph. (2003). L’évocation des émotions chez le jeune enfant atteint d’autisme, Communication présentée lors du congrès de l’International Association of Autism Europe, “Dreams Guide Life”, Lisbonne.
- Brun Ph. (2008). Nommer et comprendre les états d’esprit émotionnels : une lente évolution des compétences chez l’enfant. In D. Mellier, Ph. Brun, & H. Tremblay (Eds.). Le langage émotionnel, le comprendre et le parler (pp. 37-54). Rouen : Publications de l’Université de Rouen.
- Brun Ph. (2011). Le développement de compétences émotionnelles chez l’enfant atteint de troubles du spectre autistique (TSA) : un exemple d’intervention thérapeutique. In G. Chasseigne, & L. Bensalah (Eds.) Apprentissages et interactions sociales. (pp. 41-65). Reims : Éditions Publisbook Université.
- Brun Ph. , & Mellier D. (2004). Régulation émotionnelle et retard mental : étude chez l’enfant trisomique 21, Handicap, revue de sciences humaines et sociales, 101–102, 19-31.
- Calkins S. D. , & Fox N. A. (2002). Self-regulatory processes in early personnality development : A multi-level approach to the study of childhood social withdrawal and aggression. Development and Psychopathology, 14, 477-498.
- Calkins S. D. , & Hill A. (2007). Caregiver influences on emerging emotion regulation: Biological and environmental transactions in early development. In J. J. Gross (Ed.), Handbook of emotion regulation (pp. 229-248). New York : Guilford Press.
- Campos J. J. , & Barrett K. (1984). Toward a new understanding of emotions and their development. In C. E. Izard, J. Kagan, & R. B. Zajonc (Eds), Emotions, cognition, and behavior (pp. 229-263). Cambridge, UK : Cambridge University Press.
- Campos J. J. , Campos R. G. , & Caplovitz-Barrett K. (1989). Emergent themes in the study of emotional development and emotional regulation. Developmental Psychology, 25(3), 394-402.
- Campos J. J. , Frankel C. B. , & Camras L. (2004). On the nature of emotion regulation, Child Development, 75(2), 377-394.
- Cicchetti D. , Ganiban J. , & Barnett D. (1991). Contributions from the study of high-risk populations to understanding the development of emotion regulation. In J. Garber & Dodge K.A. (Eds), The development of emotion regulation and dysregulation (pp 15-42). Cambridge, UK: Cambridge University Press.
- Cicchetti D. , Ackerman B. P. , & Izard C. E. (1995). Emotions and emotion regulation in developmental psychopathology, Development and Psychopathology, 7, 1-10.
- Cole P. M. , Martin S. E. , & Dennis T. A. (2004). Emotion regulation as a scientific construct: Methodological challenges and directions for child development research, Child Development, 75(2), 317-333
- Denham S. A. (1998). Emotional development in young children. New York, NY: Guilford Press.
- Diener M. L. , & Mangelsdorf S. C. (1999). Behavioral strategies for emotion regulation in toddlers : Associations with maternal involvement and emotional expressions. Infant Behavior and Development, 22(4), 569-583.
- Dodge K. A. (1991). Emotion and social information processing. In J. Garber & K. A. Dodge (Eds.), The Development of Emotion Regulation and Dysregulation (pp. 159-181). Cambridge, UK: Cambridge University Press.
- Dodge K. A. , & Garber J. (1991). Domains of emotion regulation. In J. Garber & K. A. Dodge (Eds.), The Development of Emotion Regulation and Dysregulation (pp. 3-11). Cambridge, UK: Cambridge University Press.
- Feinman S. (1982). Social referencing in Infancy. Merrill-Palmer Quarterly, 28(4), 445-470.
- Eisenberg N. , Hofer C. , & Vaughan J. (2007). Effortful control and its socioemotional consequences. in J. J. Gross (Ed.). Handbook of emotion regulation (pp. 287-306). New York: Guilford Press.
- Gorenstein E. E. , Tager F. A. , Shapiro P. A. , Monk C. , & Sloan R. P. (2007). Cognitive-behavior therapy for reduction of persistent anger. Cognitive and Behavioral Practice, 14(2), 168-184.
- Greenberg L. S. (2002). Emotion-focused therapy : Coaching clients to work through their feelings. Washington, DC: American Psychological Association.
- Greenberg L. S. (2008). The clinical application of emotion in psychotherapy. In M. Lewis, J. M. Haviland-Jones, & L. Feldman Barrett (Eds.). Handbook of emotions (pp. 88-101). New York: Guilford Press.
- Greenspan S. I. , & Wieder S. (1997). Developmental patterns and outcomes in infants and children with disorders in relating and communicating: A chart review of 200 cases of children with autistic spectrum diagnoses. Journal of Developmental and Learning Disorders, 1, 87-141.
- Greenspan S. I. , & Wieder S. (2006). Infant and early childhood mental health : A comprehensive developmental approach to assessment and intervention, American Psychiatric Press Inc.
- Gross J. J. (1998). Antecedent- and response-focused emotion regulation : Divergent consequences for experience, expression, and physiology. Journal of Personality and Social Psychology, 74(1), 224-237.
- Gross J. J. , & John O. P. (2003). Individual differences in two emotion regulation processes: Implications for affect, relationships, and well- being. Journal of Personality and Social Psychology, 85, 348-362.
- Gross J. J. (2007). Handbook of emotion regulation. New York: Guilford Press.
- Gross J. J. , & Thompson R. A. (2007). Emotion regulation : Conceptual foundations. In J. J. Gross (Ed.). Handbook of emotion regulation (pp. 3-24). New York: Guilford Press.
- Gross J. J. (2008). Emotion regulation. In M. Lewis, J. M. Haviland-Jones, & L. Feldman Barrett (Eds.). Handbook of emotions (pp. 497-512). New York: Guilford Press.
- Harris P. L. , & Pons F. (2003). Perspectives actuelles sur le développement de la compréhension des émotions chez l’enfant. In J.-M. Colletta & A. Tcherkassof (Eds.), Les émotions : cognition, langage et développement (pp. 209-228). Liège : Pierre Mardaga éditeur.
- Izard C. E. , & Kobak R. R. (1991). Emotions system functioning and emotion regulation. In J. Garber & K. A. Dodge (Eds.), The Development of Emotion Regulation and Dysregulation (pp. 303-321). Cambridge, UK: Cambridge University Press.
- Kopp C. B. (1989). Regulation of distress and negative emotions: A developmental view. Developmental Psychology, 25, 343-354.
- Le Sourn-Bissaoui S. , & Deleau M. (2001). Discours maternel et compréhension des états mentaux émotionnels et cognitifs à 3 ans, Enfance, 4, 329-348.
- Leventhal H. (1979). A perceptual-motor processing model of emotion. In P. Pilner, K. Blankenstein, & L. M. Spigel (Eds.), Perception of emotion in self and others, Vol. 5, (pp. 1-46). New York: Plenum Press.
- Lowe J. R. , MacLean P. C. , Duncan A. F. , Aragón C. , Schrader R. M. , Caprihan A. , & Phillips J. P. (2012). Association of maternal interaction with emotional regulation in 4- and 9-month infants during the Still Face Paradigm, Infant Behavior & Development, 35, 295-302.
- Macklem G. L. (2010). Practitioner’s guide to emotion regulation in school-aged children. Manchester: Springer.
- Philippot P. (2007). Émotion et psychothérapie, Wavre : Mardaga.
- Roskam I. (2012). La régulation des émotions chez l’enfant : une perspective développementale. In M. Mikolajczak & M. Desseilles (Eds.), Traité de régulation des émotions (pp. 443-457). Bruxelles : De Boeck.
- Saarni C. (1999). The development of emotional competence. New York, NY: Guilford Press.
- Samson A. C. , Huber O. , & Gross J. J. (2012). Emotion regulation in Asperger’s syndrome and high functioning autisme. Emotion, 12(4), 659-665.
- Scherer K. R. (1984). Les émotions: fonctions et composantes. Cahiers de psychologie cognitive, 4(1), 9-39.
- Soussignan R. & Schaal B. (2005). Emotional processes in human newborns : A functionalist perspective. In J. Nadel & D. Muir (Eds.), Emotional Development: Recent research advances (pp. 127-159). Oxford: Oxford University Press.
- Thompson R. A. (1994). Emotion regulation : A theme in search of definition. In N. Fox (Ed.), The Development of Emotion Regulation : Biological and Behavioral Considerations. Monographs of the Society for Research in Child Development, 59(2/3), 25-52.
- Thompson R. A. & Meyer S. (2007). The socialization of emotion regulation in the family. In J. Gross (Ed.), Handbook of Emotion Regulation (pp.249-268). New York: Guilford Press.
- Tremblay H. , Brun Ph. , & Nadel J. (2005). Emotion sharing and emotion knowledge: Typical and impaired development, In J. Nadel & Muir D. (Eds.), Emotional Development: Recent research advances (pp. 341-363). Oxford: Oxford University Press.
- Trevarthen C. , & Aitken K. J. (2001). Infant intersubjectivity : Research, theory, and clinical applications. Journal of Child Psychology and Psychiatry, 42(1), 3-48.
Mots-clés éditeurs : trouble émotionnel, développement, régulation émotionnelle, enfant
Mise en ligne 01/11/2017
https://doi.org/10.3917/enf1.152.0165