Notes
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Cet article est une adaptation d’un article publié par les auteures en 2008 dans la revue Trends in Cognitive Sciences. Traduction francaise : Danielle Verrier
1Les enfants vivent dans un monde dynamique où les événements et les processus sont définis en fonction des relations qui s’établissent entre objets et actions. Lorsqu’un enfant entend, par exemple, « Ne monte pas là », le verbe monte concerne la relation entre un agent (l’enfant en cause) et quelque chose sur lequel il s’apprête à monter (une bibliothèque, par exemple). L’enfant devra donc déterminer la signification du mot monter en analysant le contexte auquel il s’applique. La compréhension du processus d’apprentissage des verbes constitue un volet essentiel de toute théorie globale d’acquisition du langage. Malgré tout, force est de constater que la recherche sur le processus d’apprentissage des verbes en bas âge n’en est qu’à ses débuts (Hirsh-Pasek et Golinkoff, 2006).
2 Les verbes peuvent être définis d’un point de vue syntaxique ou d’un point de vue sémantique. D’un point de vue syntaxique, les verbes s’appliquent à des sujets ou à des objets, ou aux deux, comme dans la phrase « Jean (sujet) a heurté Marie (objet) ». Sur le plan sémantique, les verbes « […] relatent des événements. Ce sont des termes qui décrivent des états ou des conditions de vie… des processus ou des déroulements… des actions ou des méthodes » (Frawley, 1992, p. 14). Les verbes définissent donc des événements visibles (comme courir) ou des processus invisibles (comme croire) et sont de nature essentiellement relationnelle puisqu’un agent doit accomplir ou subir quelque chose.
Les verbes sont difficiles à apprendre
3L’acquisition des termes relationnels – comme les verbes, les prépositions et les adjectifs – accuse un retard sur celle des noms. Les recherches par observation révèlent que dans de nombreuses langues, le vocabulaire primitif des enfants contient plus de noms que de verbes (par exemple, Gentner, 2006 ; Bornstein et al., 2004). La compréhension des verbes, lorsqu’ils apparaissent dans le langage de l’enfant, peut être limitée. Une étude a notamment révélé que les enfants ne parvenaient pas à distinguer les différentes formes d’un verbe (par exemple, go/went : « je vais »/« nous sommes allés ») (Theakston, Lieven, Pine et Rowland, 2002). Les expériences menées en laboratoire montrent aussi que comparativement aux noms, les enfants ont du mal à apprendre les verbes et à étendre leur signification à des situations nouvelles (par exemple, Golinkoff, Jacquet, Hirsh-Pasek et Nandakumar, 1996 ; Imai et al., 2006) (voir encadré 1).
4 Les théoriciens ont tenté d’expliquer l’écart constaté dans l’apprentissage des noms et des verbes en faisant appel à deux hypothèses concurrentes, soit l’hypothèse des prérequis conceptuels (par exemple, Smiley et Huttenlocher, 1995 ; Gopnik et Meltzoff, 1997) et l’hypothèse de la mise en correspondance (par exemple, Gleitman, Cassidy, Papafragou, Nappa et Trueswell, 2005 ; Maguire, Hirsh-Pasek et Golinkoff, 2006 ; Gentner et Boroditsky, 2001 ; Fisher, 2002 ; Naigles, 2002).
Hypothèse des prérequis conceptuels
5Cette hypothèse suppose que l’enfant a du mal à apprendre les verbes parce qu’il n’arrive pas à isoler les concepts événementiels encodés par les verbes. La nature différente des référents liés aux noms et aux verbes permet de mieux apprécier les défis auxquels l’enfant peut être confronté. Il y a d’abord le fait que les premiers noms appris par l’enfant tendent à désigner des réalités stables, tandis que certains verbes décrivant des événements ou des processus peuvent durer – littéralement – le temps d’un clin d’œil (comme, cligner des yeux ; Gentner et Boroditsky, 2001). Ensuite, une action comme courir est accomplie différemment chaque fois qu’une même personne se lance dans une course et de façon très différente d’une personne à l’autre (Golinkoff et al., 2002), ce qui oblige l’enfant à ne pas lier l’action de courir à un contexte précis, mais plutôt à former des catégories d’actions dynamiques regroupant les événements décrits par les verbes.
6 Finalement, tandis que les noms peuvent désigner un objet complet ou une partie d’objet, les verbes désignent les différents sous-événements d’un événement unique (Talmy, 1985). Pour apprendre les verbes, l’enfant doit séparer les différentes composantes d’un événement. Ainsi, une scène représentant une femme qui sort d’une maison en courant comprendra un sujet (la dame), un parcours (la trajectoire empruntée par celle-ci), un objet de référence (la maison) et une manière d’agir (soit la façon dont l’action est accomplie, c’est-à-dire à la course).
L’hypothèse de la mise en correspondance
7La quantité considérable de données comprises dans un événement rend son interprétation difficile pour un jeune enfant dans la mesure où les verbes ne sont pas des « séquences verbales filmées d’événements » (Slobin, 2003, p. 159). Les enfants doivent déterminer quelles composantes de l’événement sont comprises dans les verbes utilisés dans leur langue. L’espagnol et l’anglais, par exemple, décrivent différemment la sortie d’un lieu. Un locuteur hispanophone dirait probablement une phrase comme celle-ci : Una mujer salió de la casa (corriendo) (Une femme est sortie de la maison, [sous entendu : en courant]), en utilisant un verbe de trajectoire. Un locuteur anglophone dirait plutôt : A woman ran out of the house (Une femme a couru hors de la maison), en utilisant un verbe de manière (elle a couru) complété par une locution prépositionnelle précisant d’où cette femme venait (out of the house [hors de la maison]). L’espagnol et l’anglais disent « où » et « comment » se déroulent les événements, mais pour ce faire, l’anglais utilise beaucoup plus de verbes de manière que l’espagnol.
8 Mais il ne suffit pas pour l’enfant d’apprendre la façon dont sa langue codifie la signification des verbes. Les énoncés auxquels l’enfant est exposé posent en effet d’autres problèmes en ce qui concerne la mise en correspondance des verbes. Précisons d’abord que les langues diffèrent selon que les arguments (sujets, compléments d’objet, etc.) qui accompagnent les verbes doivent ou non être exprimés. En anglais, les arguments doivent être exprimés (comme le sujet dans l’exemple It’s raining [il pleut]), tandis que le chinois permet de les omettre, ce qui oblige l’enfant à déduire la signification du verbe à partir du contexte extralinguistique. En second lieu, l’information fournie à l’enfant par les verbes est plus variable que l’information rattachée aux noms. Les parents des enfants anglais ou chinois ont tendance à donner le même nom à des objets solides de même forme, ce qui permet aux enfants de développer une méthode heuristique pour se représenter les noms. Par contre, quand ils utilisent des verbes, ces mêmes parents codifient une grande variété de relations conceptuelles comportant différents arguments de verbe dans différentes circonstances (Sandhofer, Smith et Luo, 2000).
9 Certains théoriciens ont avancé l’idée que la mise en correspondance des verbes peut constituer le principal obstacle que rencontrent les enfants dans l’apprentissage d’une langue, puisque contrairement aux noms, les verbes sont essentiellement relationnels.
Ce que révèlent les recherches : l’hypothèse des prérequis conceptuels
10 Est-ce que les enfants en bas âge perçoivent et catégorisent les événements non linguistiques d’une manière qui concorde avec les composantes véhiculées par les verbes ?
Différenciation et catégorisation des notions de contenance, de support et d’ajustement
11La notion de contenance, correspondant à la préposition in en anglais, s’applique à un objet qui est situé « dans un espace partiellement ou totalement clos » (Mandler, 2004, p. 78, 22). La préposition « sur » (on en anglais) décrit une relation spatiale où une figure repose sur la surface externe d’un objet de référence, ou est fixée à lui ou l’encercle. L’idée véhiculée par les prépositions « dans » et « sur » s’exprime par un verbe dans la langue coréenne (Choi, 2006), comme le degré d’ajustement (degree-of-fit), une notion qui n’est pas lexicalisée en anglais. Le degré d’ajustement décrit la relation entre des surfaces qui s’emboîtent (par exemple, le capuchon d’un stylo est ajusté serré, tandis qu’une pomme posée dans un bol à fruits se trouve insérée dans un espace relativement vaste.).
12 Pour les enfants éduqués en anglais, ces notions sont comprises vers l’âge de 2,5 mois. À 6 mois, les enfants peuvent classer ces relations en catégories (Casasola, Cohen, Chiarello, 2003 ; Casasola, 2008 ; fig. 2).
13 Trajectoire et manière. La notion de trajectoire apparaît tôt dans l’expression des verbes. Dès l’âge de 7 mois, les enfants éduqués en espagnol et en anglais peuvent différencier des événements selon la trajectoire suivie et la manière d’agir des acteurs (Pulverman, Hirsh-Pasek, Golinkoff, Pruden et Salkind, 2006 ; Pulverman, Golinkoff, Hirsh-Pasek et Buresh, 2008) (fig. 3). À 9 mois, les enfants classent en catégories des trajectoires accomplies de la même façon, mais de manière différente (par exemple, au-dessus ou en dessous d’un objet de référence) ; à 13 mois, ils créent des catégories de manières (par exemple, plier ou tordre) (Pruden, 2007 ; Pruden Hirsh-Pasek, Golinkoff et Hennon, 2006).
14 Trajectoires d’origine et de destination. Les trajectoires évoquées ci-dessus n’impliquent pas l’atteinte d’un but, mais sont plutôt des voies de passage (VIA), la figure observée par le sujet se déplaçant au-delà d’un objet de référence. Dans les trajectoires d’origine, la figure se déplace à partir d’un objet de référence qui est sa source ; les trajectoires de destination, par contre, sont orientées vers un objectif, ce qui implique un déplacement vers une destination quelconque. Comme les trajectoires de destination sont plus souvent évoquées dans le discours que les trajectoires d’origine, les tout-petits de 12 mois s’intéressent davantage aux parcours de destination qu’aux parcours d’origine lors d’événements dynamiques non linguistiques (Lakusta et Landau, 2005 ; Wagner et Carey, 2005 ; Lakusta, Wagner, O’Hearn et Landau, 2007).
15 Les recherches n’ont porté que sur un sous-ensemble d’éléments sémantiques codés par les verbes, mais on constate tout de même que les tout-petits parviennent efficacement à percevoir et à catégoriser les sous-événements codés dans les verbes.
Ce que révèlent les recherches : l’hypothèse de la mise en correspondance
16Le résultat des recherches donne à penser que le problème posé par l’apprentissage des verbes n’est pas attribuable à un manque de maturité au plan conceptuel. Il faut alors conclure que la difficulté réside dans un défaut de mise en correspondance des mots et du monde. On constate en effet que la mise en correspondance des verbes et des référents est difficile, même pour des adultes (encadré 2). Or, le processus de mise en correspondance n’est pas compliqué en soi. Dès l’âge de 10 mois, les tout-petits sont en mesure de relier des mots désignant des objets à des référents ; à 15 mois, ils semblent capables de comprendre certains verbes comme « danser » et « ouvrir » (Fenson et al., 1994). Comment alors expliquer les progrès généralement lents des tout-petits dans l’apprentissage des verbes ?
17 Une des théories de l’apprentissage des mots, connue sous le nom de Modèle de la coalition émergente (MCE), traite plus spécialement du processus d’acquisition des mots relationnels et non relationnels et propose une approche moins complexe que le concept de mise en correspondance des verbes (Hirsh-Pasek et Golinkoff, 2006 ; Maguire et al., 2006 ; Hollich et al., 2000 ; Golinkoff et Hirsh-Pasek, 2006). Il s’agit d’une théorie hybride qui soutient que l’enfant s’appuie diversement sur de multiples indices tout le long de son développement pour établir la correspondance entre les mots d’une part (qu’il s’agisse de noms ou de verbes) et les référents d’autre part. Au début, l’enfant tend à attacher plus d’importance aux signaux perceptuels, c’est-à-dire à faire le lien entre un mot et le référent le plus intéressant ou le plus visible. Il utilise ensuite l’intention sociale du locuteur, ainsi que les signaux linguistiques qu’il perçoit, pour découvrir le sens du mot. L’enfant semble avoir besoin d’un complément d’information pour apprendre les verbes parce qu’ils sont relationnels par nature et que leur sens est quelquefois plus difficile à percevoir (par exemple, le verbe « savoir »). En conséquence, l’apprentissage des verbes pourra être retardé jusqu’à ce que l’enfant parvienne à rassembler non seulement l’information perceptuelle requise pour établir la correspondance des mots avec la réalité, mais aussi l’information sociale et grammaticale pertinente. Une des conséquences de cette hypothèse est que les verbes – du moins ceux qui renvoient au plan perceptuel à des référents moins évidents – seront appris plus tard parce que l’enfant ne peut utiliser l’intention sociale ni la connaissance des règles grammaticales pour acquérir des mots nouveaux avant l’âge approximatif de 24 mois (par exemple, Naigles et Swensen, 2007). Le décodage de l’information grammaticale exige de l’enfant qu’il connaisse un certain nombre de noms (Gleitman et al., 2005) et qu’il ait été suffisamment exposé à des phrases pour établir la correspondance entre les types de signification et les structures de phrase.
18À noter que selon la théorie MCE, les noms ne sont pas toujours plus faciles à apprendre que les verbes (fig. 4). La théorie permet de prévoir les modalités de développement de la fonction de mise en correspondance des verbes et d’expliquer pourquoi les mots non relationnels (comme les premiers noms compris) prédominent dans le vocabulaire précoce de l’enfant (Maguire et al., 2006). Quels sont les éléments d’information à l’appui de cette position ?
19Le rôle de l’information perceptuelle dans l’apprentissage des verbes. Si la stratégie initiale de l’enfant dans la théorie de la mise en correspondance des mots est de s’attacher prioritairement aux référents les plus évidents au plan perceptuel, alors les mots correspondant aux objets ou aux événements les plus évidents devraient apparaître en premier, prédiction confirmée par plusieurs études (Hollich et al., 2000 ; Pruden et al., 2006). Dans le cas des noms, l’enfant âgé de 10 mois suppose qu’un mot s’applique à un objet intéressant plutôt qu’ennuyeux, ce qui mène à un défaut d’appariement systématique. Dans le cas des verbes, Brandone, Pence, Golinkoff et Hirsh-Pasek (2007) ont opposé l’indice de l’évidence perceptuelle à celui de l’intention du locuteur en apprenant à l’enfant le nom d’une action produisant un résultat (intéressant) et le nom d’une action sans résultat (c’est-à-dire, ayant un effet ennuyeux) au moyen du paradigme de la préférence visuelle intermodale (encadré 3). À 21 mois, l’enfant retient le nom d’une action produisant un résultat (il s’agissait d’appuyer sur une clé de code Morse qui émettait un son), mais ne retient pas le nom de cette même action si elle ne produit pas de résultat. Il a fallu attendre que les enfants atteignent 33 mois pour qu’ils retiennent le nom d’une action ne produisant pas de résultat. Dans le même ordre d’idées, on a pu constater que les enfants retiennent d’abord le nom de leurs propres actions, avant de retenir celui des actions des autres (Smiley et Huttenlocher, 1995).
20 Les actions visibles (par opposition aux moins visibles) sont susceptibles de recueillir des cotes d’« imageabilité » plus élevées et d’être plus facilement identifiables par les adultes participant au paradigme de la Simulation Humaine (encadré 2) (Gillette, Gleitman, Gleitman, & Lederer, 1999). Les enfants éduqués en anglais et en chinois retiennent plus tôt les mots présentant une cote d’imageabilité élevée par rapport aux mots possédant une faible cote (Ma, Golinkoff, Hirsh-Pasek, McDonough et Tardif, 2009). La cote d’imageabilité et la fréquence d’utilisation du verbe dans le discours adressé à l’enfant rendent compte de 42 % de la variance de l’âge d’acquisition des verbes en chinois. Les verbes en mandarin appris tôt par les enfants chinois sont plus imageables que les verbes appris tôt par les enfants anglais, toujours selon Ma et ses collègues, ce qui pourrait expliquer pourquoi les enfants chinois retiennent plus tôt davantage de verbes que les enfants éduqués en anglais (Tardif, 2006).
21 Les facteurs perceptuels jouant un rôle prépondérant dans l’apprentissage précoce des verbes, on peut s’attendre à ce que les enfants hésitent à étendre le sens d’un verbe à un événement où ils ne retrouvent pas l’exemple original. De fait, on constate que les enfants ont tendance à restreindre le champ d’application des verbes même lorsqu’ils acquièrent de nombreux verbes très tôt, comme le font les Chinois. Ils ont aussi du mal à étendre à d’autres contextes les verbes nouvellement appris lorsque l’instrument, le résultat ou l’agent de l’événement changent (Behrend, 1990 ; Forbes et Farra, 1995). Même un enfant de 6 ans aura du mal à étendre le sens de verbes d’instrument bien connus (par exemple, « écrire »; Seston, Golinkoff, Ma et Hirsh-Pasek, 2009).
22 Les facteurs perceptuels sont tellement déterminants pour les jeunes enfants que toute exposition à une action perceptuellement intéressante nuira au processus d’apprentissage des verbes. Maguire, Hirsh-Pasek, Golinkoff et Brandone (2008) ont relevé de meilleurs résultats d’apprentissage chez des enfants de 2,5 à 3 ans lorsqu’ils étaient mis en présence d’un acteur unique, et non de plusieurs. Les jeunes enfants peuvent avoir du mal à se concentrer sur une relation d’action jusqu’à ce qu’ils aient pu se familiariser avec les acteurs ; c’est une constatation qu’on retrouve déjà dans les travaux de Kersten et Smith (2002).
23 Information sociale et apprentissage des verbes. Comme l’affirment Tomasello et ses collègues (Akhtar et Tomasello, 2000 ; Tomasello, 2003), l’acquisition du langage se situe au cœur même du processus d’interaction sociale. L’apprentissage des verbes repose sur l’information sociale de deux façons : 1. cette information permet de discerner quel référent vise le locuteur et 2. elle permet aussi de faire la distinction entre les significations intentionnelles et les significations non intentionnelles des verbes. Des études donnent à penser que les enfants en bas âge peuvent déduire les intentions des personnes de leur entourage lors d’événements non linguistiques (Baldwin, Baird, Saylor et Clark, 2001 ; Csibra, Bíró, Koós et Gergely, 2003 ; Woodward, 2005). Des recherches menées auprès d’enfants autistes confirment le rôle central joué par l’intention dans l’apprentissage des verbes : la sensibilité de l’enfant à l’intention du locuteur rendait compte de 67 % de la capacité d’apprentissage des mots (Parish-Morris, Hennon, Hirsh-Pasek, Golinkoff et Tager-Flusberg, 2007).
24 À 24 mois, les tout-petits peuvent déduire qu’un locuteur voulait désigner une action non visible (Akhtar et Tomasello, 1996). À 27 mois, les enfants peuvent utiliser différents verbes ou locutions verbales pour décrire une même action (par exemple, « jeter par terre » et « abattre ») si on leur donne l’information non verbale requise pour conclure que l’action était accidentelle ou volontaire (Poulin-Dubois et Forbes, 2002).
25 Pris globalement, ces résultats donnent à penser qu’en ce qui concerne la signification des verbes, l’attention des enfants vis-à-vis des signaux perceptuels précède celle qu’il accorde aux signaux intentionnels de nature sociale. Toutefois, le contexte extralinguistique est insuffisant pour permettre à l’enfant de déterminer le sens réel des verbes. Dans ces conditions, l’enfant qui ne peut compter que sur les seuls indices perceptuels et sociaux reste perplexe face à une foule de significations possibles.
26 Signaux linguistiques susceptibles de révéler la signification des verbes. Prenons le cas de référents invisibles (par exemple, « penser ») et le fait qu’un même événement peut être décrit de différentes façons (par exemple : « Marie poursuit Jean » ; « Jean se sauve de Marie »). Ici, la structure syntaxique sert en quelque sorte de « zoom » ; elle met en lumière la perspective du locuteur et réduit l’éventail des possibles significations du verbe (Lidz, Gleitman et Gleitman, 2003 ; Gertner, Fisher et Eisengart, 2006). Une étude réalisée par Fisher (2002) auprès d’enfants de 2,5 ans le démontre. Dans cette étude, on a présenté aux enfants une scène complexe où une dame poussait et tirait une autre dame dans une voiturette rouge. On expliquait l’événement aux enfants, en leur disant soit 1. dans la forme intransitive (She pilks back and forth! [Elle zille vers l’avant et vers l’arrière]), soit 2. dans la forme transitive (She pilks her back and forth! [Elle zille la dame vers l’avant et vers l’arrière]). On demandait aux enfants de pointer du doigt des images figées en réponse aux questions qu’on leur posait. Comme les phrases prononcées ne différaient que par le nombre d’arguments entourant le verbe, les enfants ont utilisé l’information véhiculée par les images pour décider si le verbe décrivait l’agent (qui faisait l’action) ou la « victime » (qui subissait l’action). Dans cette méthode, appelée « initialisation syntaxique » (Landau et Gleitman, 1985), on suppose que les enfants parviendront à créer un « alignement structural » (Gentner & Medina, 1998) entre la structure de la phrase qu’ils entendent et l’analyse qu’ils font de la scène (Gleitman et al., 2005). À noter que cette méthode a) peut être utilisée dans des langues qui ont tendance à faire l’économie d’arguments du verbe (par exemple, le chinois ; Lee et Naigles, 2005) ; b) semble fonctionner à contresens dans la mesure où les tout-petits s’attendent à ce que les événements mettant en cause un seul participant soient racontés dans des phrases utilisant des verbes intransitifs (Brandone, Addy, Pulverman, Golinkoff et Hirsh-Pasek, 2005) ; et c) est même susceptible de prendre le pas sur les régularités de la morphologie pour déterminer la signification des verbes, Lidz et al., 2003).
Conclusions
27La compréhension du processus d’apprentissage des verbes constitue un volet essentiel de toute théorie globale de l’apprentissage des mots d’une langue. Les verbes, parce qu’ils décrivent des événements souvent dynamiques, posent un problème d’apprentissage particulier aux jeunes enfants. La dernière décennie a vu éclore un immense intérêt pour le processus d’apprentissage des verbes, y compris les aspects non linguistiques qui sous-tendent la signification des verbes. Des progrès ont été réalisés dans la recherche grâce aux outils dont on dispose maintenant pour décrire des événements dynamiques et aux avancées de la théorie relative à l’apprentissage des verbes. Les recherches semblent indiquer que l’apprentissage des verbes dépend de la capacité de l’enfant à analyser la situation qui l’entoure d’une manière qui soit compatible avec la structure de sa langue. On sait maintenant que les enfants semblent posséder les prérequis conceptuels nécessaires pour comprendre la signification des verbes, mais il reste à examiner de plus près les liens qui existent entre la perception des événements par les enfants et leur compréhension de la signification des verbes.
28 Les problèmes que rencontre l’enfant dans l’apprentissage des verbes seraient liés au processus de mise en correspondance. Le processus en question et les facteurs qui l’influencent semblent évoluer au fil du développement de l’enfant. L’apprentissage des verbes est d’abord fonction de facteurs perceptuels, les événements les plus captivants étant retenus de préférence comme référents. L’enfant doit ensuite apprendre à découvrir l’intention du locuteur lorsque celui-ci choisit un verbe donné, puis comprendre comment la structure de la phrase réduit l’éventail des significations possibles. Nous sommes d’avis qu’un modèle – le Modèle de la coalition émergente (MCE) – permet de bien encadrer le processus d’apprentissage précoce des verbes et donne une explication qui rend compte des multiples signes ou indices que l’enfant doit coordonner pour apprendre les verbes. D’autres recherches s’imposent pour découvrir pourquoi l’enfant passe d’un indice à l’autre et préciser la façon dont il parvient à les unifier pour trouver la signification de chaque verbe.
Remerciements
Dans le cadre de ces travaux, les deux auteurs ont reçu une subvention (5R01HD050199) de la National Institute of Child Health and Human Development (NICHD) et une autre (BCS-0642529) de la National Science Foundation (NSF). Nous tenons à remercier nos formidables étudiants des cycles supérieurs Julia Parish, Weiyi Ma, Wilkey Wong et Lulu Song de même que David Strober et Rebecca Seston de l’aide qu’ils nous ont fournie pour la préparation de ce manuscrit.Encadré 1. En anglais, en japonais ou en chinois, il est plus facile d’apprendre les noms que les verbes et d’étendre leur application à d’autres situations.
Dans le cas Nouveau nom, on a demandé aux enfants de pointer du doigt dans la bonne direction pour répondre à la question Where is the twill? (Où est le twill ?). Dans les deux conditions avec verbe, on leur a posé la question Where is she twilling (Où est-ce que (la dame) twille ?). Les enfants des deux groupes d’âge ont compris la première question et ont pointé du doigt l’étiquette-objet, mais seuls les enfants de 5 ans ont pointé l’étiquette-action, à condition toutefois que le libellé de la question ait été conforme à la façon dont les verbes sont habituellement codés dans leur langue. Ainsi, les enfants éduqués dans la langue anglaise ont réussi l’essai dans le cas Verbe nouveau avec arguments, tandis que les enfants japonais n’y parvenaient que dans le cas Verbe nouveau sans arguments et ont eu des résultats médiocres dans les cas desphrases complètes.
Ayant constaté que les petits Chinois – même âgés de 5 ans – ne réussissaient pas le test du premier coup, les chercheurs Imai et collègues ont supposé que les enfants se fiaient peut-être à des signaux extralinguistiques, puisque les verbes chinois n’ont pas de désinence et permettent d’omettre les locutions nominales qui entourent les verbes dans la phrase. Après élimination d’un segment d’une seconde – où l’on voyait la femme tenir l’objet en cause – du début de chaque séquence vidéo, on a repris le test et constaté que les enfants chinois répondaient correctement aux questions où le verbe était employé seul, démontrant par là une sensibilité extrême à l’information extra-linguistique afin de découvrir le sens des mots. Les enfants anglais et japonais, de leur côté, ont réagi de la même façon, avec ou sans le segment en cause [source de la figure : M. Imai, communication personnelle].
Encadré 2. Apprentissage des noms et des verbes : résultats des recherches basées sur le Paradigme de la Simulation Humaine
Ce test de conception simple avait pour but de vérifier si on pouvait en arriver à une généralisation importante concernant l’apprentissage du vocabulaire, soit que les enfants apprennent les noms avant les verbes. Dans un premier temps, en neutralisant les observations extralinguistiques par la présentation des mêmes scènes, on a cherché à déterminer si les adultes – comme les enfants – arriveraient à deviner plus facilement les noms que les verbes. Par ailleurs, les adultes possédant un système conceptuel pleinement développé, on savait que toute différence dans le rythme d’apprentissage des verbes et des noms ne pouvait être attribuée aux facteurs conceptuels en soi. Enfin, les chercheurs ont cherché à déterminer quels types d’information linguistique facilitaient la découverte des mots en faisant varier l’information linguistique présentée pendant la scène [12,33].
Les résultats ont révélé que les adultes devinent correctement les noms manquants dans 45 % des cas, mais que ce taux tombe à 15 % à peine dans le cas des verbes. Si on limite l’exercice aux seuls verbes décrivant des opérations mentales, la proportion de bonnes réponses devient nulle [32]. Lorsqu’on complète les séquences vidéo par une information linguistique [33] – depuis une simple liste des noms accompagnant les verbes jusqu’à des phrases complètes où il ne reste plus qu’à ajouter le verbe (comme dans l’énoncé : Jean a parlé à Marie) –, l’aptitude des adultes à deviner correctement le verbe connaît une nette amélioration. Ces résultats indiquent que l’identification des verbes fait de nets progrès lorsque les images sont accompagnées d’une information syntaxique de plus en plus complète.
Encadré 3. Exemple d’application du paradigme de la préférence visuelle intermodale pour étudier le processus d’apprentissage des verbes.
Selon l’âge de l’enfant, on utilise habituellement deux variables dépendantes. Pour les enfants de moins de 2,5 ans, la variable dépendante est basée sur la durée du regard (souvent, temps de fixation visuelle total de l’écran correspondant à l’action pertinente, par opposition au temps de fixation de l’autre écran). Pour les enfants de 2,5 ans et plus, l’action de pointer du doigt constitue la variable dépendante [43] (il faudra d’abord que l’expérimentateur ait appris à l’enfant à pointer du doigt à son invitation).
Le PPVI s’est révélé très utile aux chercheurs qui étudient le processus d’apprentissage des verbes parce qu’il permet de présenter des événements dynamiques et qu’il exige un minimum de réaction de la part des jeunes enfants [source de la figure : les auteurs].
29 Figure 2. Images finales des événements dynamiques utilisés pour mesurer l’aptitude des tout-petits à distinguer la relation contenant-contenu des autres relations spatiales [24]. Les enfants ont d’abord été familiarisés avec l’image d’un événement dynamique impliquant une relation contenant-contenu (première photo). Ensuite, après avoir été exposés à cet événement, ils ont vu une autre version de la même scène, filmée cette fois en plongée, de sorte que la figure n’était plus du tout cachée (deuxième photo), puis une nouvelle version de la scène où la figure, posée derrière la corbeille, était partiellement cachée, comme dans la première scène (troisième photo), enfin une scène où la figure reposait en position assise sur la corbeille renversée (quatrième photo). Les enfants ont accordé significativement plus d’attention aux scènes qui présentaient une nouvelle relation (soit la scène où la figure était derrière la corbeille et celle où elle était posée sur celle-ci), par rapport au premier événement illustrant une relation contenant-contenu, d’où on déduit qu’ils peuvent faire la distinction entre une relation contenant-contenu et d’autres événements relationnels [source de la figure : Casasola, M. (2008) The development of infants’ spatial categories.Cur. Dir. Psychol. Sci., 17(21- 25)].
Figure 2. Stimuli utilisés pour mesurer l’aptitude d’enfants de 6 mois à créer des catégories en rapport avec la relation contenant-contenu
Figure 2. Stimuli utilisés pour mesurer l’aptitude d’enfants de 6 mois à créer des catégories en rapport avec la relation contenant-contenu
30 Figure 3. Scènes animées produites par ordinateur et utilisées pour déterminer la capacité de jeunes enfants à distinguer les trajectoires des manières d’agir [26,27]. Dans la scène d’habituation, les enfants voyaient une étoile de mer en mouvement (la figure) et une balle immobile (le sol). L’étoile de mer accomplissait des mouvements où l’on pouvait distinguer une manière d’agir (sautillements, rotations, flexions au niveau des « hanches ») et une trajectoire (au-dessus, au-dessous ou au-delà de la balle). Une fois les enfants habitués à un événement donné (par ex., sautillements au-dessus de la balle), on leur a présenté quatre types d’événements : 1. un événement de contrôle identique à l’événement familier (soit des sautillements au-dessus de la balle) ; 2. un événement où l’étoile fait les mêmes mouvements que dans l’événement de contrôle, mais suit une trajectoire différente (par exemple, des sautillements au-dessous de la balle) ; 3. un événement où l’étoile suit la même trajectoire que dans l’événement de contrôle, mais en adoptant une manière d’agir différente (par exemple, en faisant des mouvements de rotation au-dessus de la balle) ; et 4. un événement où la trajectoire et la manière d’agir de l’étoile diffèrent des autres cas (par exemple, des flexions au-delà de la balle). Tous les enfants (aux deux niveaux d’âge) ont été capables de distinguer les trajectoires des manières d’agir [source de la figure : Pulverman, S. et al. (2006) Conceptual foundations for verb learning: celebrating the event, dans Action Meets Word: How Children Learn Verbs (Hirsh-Pasek, K. et Golinkoff, R.M., rédacteurs), pp. 134-159, Oxford University Press].
Figure 3. Stimuli utilisés pour mesurer chez des enfants de 7 mois et de 14 à 17 mois l’aptitude à distinguer les trajectoires des manières d’agir dans des événements dynamiques
Figure 3. Stimuli utilisés pour mesurer chez des enfants de 7 mois et de 14 à 17 mois l’aptitude à distinguer les trajectoires des manières d’agir dans des événements dynamiques
Figure 4. Le continuum (FICI) permet de comprendre pourquoi certains verbes sont appris plus précocement que certains noms en dépit du fait que les noms sont en général retenus plus tôt que les verbes
Figure 4. Le continuum (FICI) permet de comprendre pourquoi certains verbes sont appris plus précocement que certains noms en dépit du fait que les noms sont en général retenus plus tôt que les verbes
31 La recherche [14,17,33,36,38-40] a retenu quatre facteurs – forme, individualisation, concrétude et imageabilité (FICI) – qui contribuent à l’apprentissage des noms et des verbes, l’importance relative de chacun restant par ailleurs à déterminer. Ces facteurs permettent de comprendre pourquoi tous les noms ne sont pas appris avant tous les verbes. L’explication tient au fait que les concepts véhiculés par les mots peuvent être répartis le long d’un continuum défini par 1. la fiabilité et la cohérence de leur « forme » perceptuelle, 2. la facilité avec laquelle ils peuvent être distingués des autres éléments présents (individuabilité), 3. leur aptitude à être observés et manipulés (concrétude) et 4. leur aptitude à générer une image mentale chez les adultes (imageabilité). En intégrant les valeurs FICI dans une théorie générale de l’apprentissage des mots – en l’occurrence, le Modèle de la coalition émergente (MCE) –, on arrive à mieux expliquer pourquoi les premiers mots retenus par les enfants se situeront probablement à l’extrémité la plus concrète du continuum, comme le mot « tasse » (qui sera appris avant le mot « oncle ») et le verbe « embrasser » (qui sera appris avant le verbe « penser ») [source de la figure : Maguire, M. et al. (2006) A unified theory of word learning: putting verb acquisition in context, dans Action Meets Word: How Children Learn Verbs (Hirsh-Pasek, K. et Golinkoff, R.M., rédacteurs), pp. 364-391, Oxford University Press].
Quelques questions en suspens
32Y a-t-il un lien entre l’aptitude d’un enfant à analyser les éléments secondaires d’un événement codés dans la signification d’un verbe et la capacité de l’enfant à apprendre des verbes nouveaux ?
33 Existe-t-il chez les enfants des différences individuelles dans la vitesse d’acquisition des verbes qui annoncent l’évolution du développement ultérieur de leur capacité langagière ?
34 Quels défis se posent aux enfants qui apprennent une deuxième langue, compte tenu du fait que les langues intègrent différemment la signification des verbes ?
35 Peut-on, dans un modèle bayésien de l’apprentissage des mots, combiner les éléments interactifs du modèle MCE avec la fréquence d’utilisation des verbes, de façon à simuler les modalités réelles d’apprentissage des verbes ?
36 Le modèle MCE peut-il servir à élaborer des profils d’apprentissage des mots qui feraient ressortir les forces et les faiblesses du traitement de l’information relatif à l’apprentissage des mots ? Ces profils permettraient-ils d’élaborer des modalités d’intervention mieux adaptées au cas des enfants présentant un développement atypique de la capacité langagière ?
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Mots-clés éditeurs : acquisition du language, concepts, verbes, sémantique, fast mapping
Mise en ligne 01/11/2017
https://doi.org/10.3917/enf1.113.0363Notes
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Cet article est une adaptation d’un article publié par les auteures en 2008 dans la revue Trends in Cognitive Sciences. Traduction francaise : Danielle Verrier