Notes
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[*]
Université Paris 13, cepn. Correspondance : Campus de Villetaneuse, 99 avenue Jean-Baptiste Clément, 93430 Villetaneuse. Courriel : carre.emnl@gmail.com (auteur correspondant).
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[**]
Paris School of Economics – Université Paris 1 Panthéon Sorbonne. Correspondance : Maison des Sciences économiques, 106-112 boulevard de l’hôpital, 75647 Paris cedex 13. Courriel : couppey@univ-paris1.fr
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[***]
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, Labex Régulation Financière (Réfi). Correspondance : Maison des Sciences économiques, 106-112 boulevardd de l’Hôpital, 75647 Paris cedex 13. Courriel : salim.dehmej@univ-paris1.fr
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[1]
Suite aux contributions séminales de Smets et Wouters [2003], Christiano et al. [2005].
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[2]
La base de données est détaillée dans le tableau 4.
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[3]
Cette méthode a néanmoins une limite car le coefficient de réponse à la stabilité financière dans la règle de Taylor, retenu dans les modèles de notre méta-analyse, que ceux-ci soient optimisés, estimés ou calibrés, peut être influencé par la nature de la cible financière (crédit, prix d’actifs…), l’unité de mesure (milliers, millions…) et la manière dont l’écart financier est calculé (ratio, écart à une moyenne historique…). Il n’est pas possible de remédier complètement à ce problème du fait que, si les coefficients estimés ou calibrés s’obtiennent simplement en lisant un article, il n’en va pas de même pour les séries chronologiques utilisées sans coût rédhibitoire. Du fait de la pratique des économètres et des modélisateurs, surtout sur un sujet aussi balisé que l’estimation de la rt ou de la rta, on peut toutefois légitimement penser que les économètres et les modélisateurs ont depuis longtemps opté pour des écritures ou des spécifications garantissant une très grande homogénéité des ordres de grandeur des variables exogènes et endogènes retenues ; de la sorte, les seuls coefficients contiennent une information utile en ce qui concerne l’impact des différentes variables exogènes. Enfin, s’agissant de la diversité des dimensions de la stabilité financière et des cibles diverses qui peuvent être choisies pour augmenter la règle de Taylor, nous remédions partiellement au problème en construisant une variable muette qui distingue les règles de Taylor augmentées d’une cible de prix d’actifs de celles augmentées d’une variable en lien avec le crédit (cf. infra).
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[4]
Assenmacher-Wesche [2006].
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[5]
Nous nous devons de justifier d’avoir ainsi construit notre variable muette en distinguant d’un côté l’estimation et l’optimisation et de l’autre la calibration. La distinction n’est a priori pas totalement évidente puisque la calibration s’appuie parfois sur des valeurs issues d’estimations économétriques, de même d’ailleurs qu’en cas d’optimisation le modélisateur recourt parfois à un intervalle de valeurs (priors) influencé par des estimations économétriques. Notre choix vient du fait qu’un modèle basé sur optimisation/estimation peut engendrer un coefficient devant l’écart financier égal à 0, ce qui ne peut pas être le cas si les coefficients sont issus d’une calibration (nous excluons par définition les modèles qui calibrent à 0 le coefficient de l’écart financier). En outre, cela nous permet aussi de distinguer les cas où l’intervention des auteurs prime (calibration), de ceux où prime un calcul (qu’il s’agisse d’un modèle théorique dans le cas de l’optimisation ou d’un traitement économétrique des données dans le cas de l’estimation).
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[6]
Cet argument vaut avant tout pour les coefficients de réponse issus d’une optimisation mais, comme 60 % des coefficients de réponse sont obtenus ainsi, on peut le considérer prédominant pour discuter du signe attendu de la variable considérée.
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[7]
À titre d’exemple, un ratio ltv de 80 % signifie que l’emprunteur a la possibilité d’emprunter 80 % de la valeur de l’actif qu’il acquiert et qu’il doit donc apporter les 20 % restants. Un ratio lti limite, quant à lui, le montant emprunté en fonction du revenu de l’emprunteur.
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[8]
Notons que l’absence d’uniformité ne concerne pas exclusivement la cible financière. On la retrouve aussi en ce qui concerne les mesures de l’inflation dans la règle de Taylor. Le gap d’inflation peut provenir de l’inflation courante avec diverses mesures (indice des prix à la consommation cpi (consumer price index), indice pce (personal consumption expenditures), indice des prix de détail, déflateur du pib…), de l’inflation sous-jacente avec diverses mesures (cpi et pce hors prix de l’énergie et des biens alimentaires, cpix, cpif…), ou de prévisions d’inflation (points morts, cf, spf, Michigan Survey…)
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[9]
Voir les travaux de la bri (Moreno [2011]), du fmi (Lim et al. [2011]) ou ceux de Hahm et al. [2012].
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[10]
Ozkan et Unsal [2011] indiquent à plusieurs reprises que leurs calibrations et la dynamique de leur modèle valent pour les pays émergents. Glocker et Towbin [2012] parlent des économies émergentes dans leur résumé et leur introduction. Pour Benigno et al. [2011], le pays correspondant à leur hypothèse de petite économie ouverte est moins explicite. Cependant, les quatre articles de Benigno cités dans la bibliographie de Benigno et al. [2011] traitant de petites économies ouvertes sont calibrés sur des économies émergentes (Mexique ou Argentine).
Introduction
1Aux États-Unis, en Grande-Bretagne comme dans l’Union européenne, les réformes entreprises pour répondre à la crise enclenchée en 2007-2008 reposent en grande partie sur le renforcement du dispositif prudentiel des banques. Ce dispositif impliquera les banques centrales davantage qu’auparavant. La banque d’Angleterre reprend une grande partie des prérogatives de la Financial Services Authority en matière de supervision bancaire et voit ainsi son mandat augmenté de la stabilité financière dans le Banking Act de 2009. De même, la Réserve fédérale américaine (Fed) a désormais en charge la surveillance des établissements systémiques et, dans l’Union européenne, la Banque centrale européenne (bce) est devenue, en novembre 2014, le superviseur des grands établissements bancaires de la zone euro. Pour le moment, il s’agit donc surtout de confier aux banques centrales une mission microprudentielle de surveillance des établissements bancaires.
2Plusieurs avancées sur le plan institutionnel témoignent parallèlement de la gestation d’une politique macroprudentielle (pmp) dont l’objectif sera la stabilité d’ensemble du système financier. Au sein de l’Union européenne a ainsi été mis en place, depuis janvier 2011, le Conseil européen du risque systémique (esrb). Aux États-Unis, la loi Dodd-Frank, votée en juillet 2010, a confié la tâche de surveillance du risque systémique au Financial Stability Oversight Council (fsoc) rattaché au Trésor américain. Au Royaume-Uni, le Financial Services Act de 2012 a confié la surveillance macroprudentielle au Financial Policy Committee (fpc) placé sous l’égide de la Banque centrale. Ces comités commencent à préparer le terrain de la future politique macroprudentielle et devront choisir les instruments permettant de prévenir au mieux le risque systémique.
3La mise en œuvre concrète de la pmp sur le plan opérationnel prendra néanmoins du temps. Précisément parce que son objectif ultime – la stabilité financière – recouvre plusieurs dimensions : la stabilité financière renvoie tout autant à la stabilité du secteur bancaire, du crédit, à celle des marchés d’actifs et des prix qui s’y forment, celle des marchés des changes, des marchés interbancaires, au bon fonctionnement des systèmes de paiement, etc. La définition que la Banque centrale européenne [2013] retient de la stabilité financière traduit ce caractère multidimensionnel : « Situation dans laquelle le système financier, qui recouvre les intermédiaires financiers, les marchés et les infrastructures de marché, est capable de faire face aux chocs et à une correction brutale des déséquilibres financiers, réduisant ainsi la probabilité qu’apparaissent, dans le processus d’intermédiation financière, des perturbations suffisamment graves pour compromettre sérieusement l’allocation de l’épargne à des projets d’investissement rentables ». Mais c’est aussi la raison pour laquelle il n’existe(ra) pas de consensus dans la littérature autour de la définition de la stabilité financière (Borio et Drehmann [2009]). À la différence de la stabilité monétaire que les banques centrales comme la communauté académique ont convenu de réduire à une cible d’inflation et donc à « un chiffre », sinon une fourchette, la stabilité financière, de par sa nature multidimensionnelle, se prêtera difficilement à ce type de réduction. Du moins, chaque autorité qui en aura la charge à un niveau global devra-t-elle préciser la (les) dimension(s) qu’elle entend privilégier : la stabilité du crédit pour les unes, celle des prix d’actifs pour les autres, etc.
4L’autre difficulté à laquelle se trouveront confrontées les autorités monétaires et macroprudentielles, qu’elles soient logées ensemble ou non au sein de la banque centrale, sera de coordonner l’action de la politique monétaire et celle de la pmp. Pour s’attaquer à l’instabilité financière, la politique monétaire ne devrait-elle pas s’efforcer de contrer le cycle financier, en empêchant par exemple les bulles de prix d’actifs de se former et ainsi s’orienter vers la stratégie de « leaning against the wind » (Cecchetti et al. [2000] ; Borio et White [2004] ; White [2009]) (littéralement, « lutter contre le vent » pour signifier une action de la politique monétaire à contre-courant du cycle financier). La règle de Taylor (Taylor [1993]), qui est devenue la représentation standard de la règle de politique monétaire des années 1990-2000 jusqu’à la crise, limitait initialement la réaction de la politique monétaire à une cible d’inflation et à l’écart de production, et ne concevait donc pas initialement ce type de réaction au cycle financier. Son extension à une cible financière permettant de faire réagir le taux directeur aux tensions financières a été l’une des premières façons d’envisager la fin du « principe de séparation » entre la stabilisation de l’inflation et la prévention de l’instabilité financière (Käfer [2014]). La crise financière semblait alors avoir bouleversé les considérations stratégiques à propos de la politique monétaire et démontré le danger de la stratégie du « cleaning up afterwards » (littéralement, « le fait de nettoyer les dégâts après coup », White [2009]), consistant à ignorer la bulle en formation, excepté dans le cas où elle fait augmenter l’inflation ou les anticipations en la matière.
5Loin d’avoir clos le débat « clean » versus « lean », l’avènement de l’instrument macroprudentiel durant la crise l’a plutôt réorienté. Présenté comme l’instrument efficace de lutte contre l’instabilité financière, le macroprudentiel tend en effet à rétablir le principe de séparation qui prévalait avant la crise. La règle de Taylor standard (non augmentée de la stabilité financière) redevient l’option à privilégier, et avec elle le régime de ciblage de l’inflation. Plusieurs simulations (Banque d’Angleterre [2009]) ont, en effet, démontré qu’à elle seule l’augmentation de la règle de Taylor ne constitue pas une alternative souhaitable à la pmp, car si tout l’effort de contention des désajustements financiers reposait sur le seul instrument du taux d’intérêt, il faudrait, dans certaines situations, élever le taux d’intérêt à des niveaux inenvisageables. On retrouve là le principe de Tinbergen [1952] : il faut disposer d’au moins autant d’instruments que d’objectifs à atteindre. En l’occurrence, cela signifie que le taux d’intérêt ne permet tout simplement pas d’atteindre à lui seul trois objectifs : la stabilité monétaire, la stabilité macroconjoncturelle et la stabilité financière.
6Une autre justification au maintien de la règle de Taylor standard tient au principe de Mundell [1962] d’affectation des instruments aux objectifs : un instrument doit être affecté à l’objectif sur lequel il a le plus d’impact. Or, nombre d’études suggèrent que l’instrument macroprudentiel a plus d’impact sur la stabilité financière que l’instrument de taux d’intérêt (Goodhart et al. [2010]).
7Cela étant, les promoteurs de la règle de Taylor augmentée n’envisageaient sans doute pas eux-mêmes qu’elle puisse constituer la seule et unique réponse à l’objectif de stabilité financière. Et la règle de Tinbergen n’enseigne pas non plus (contrairement à l’interprétation stricte qui en est souvent donnée et que Tinbergen rejetait) que chaque instrument soit alloué à un seul objectif. Dès lors qu’il y a autant d’instruments que d’objectifs, rien n’empêche en théorie d’affecter un même instrument à plusieurs objectifs en hiérarchisant ses affectations (Blanchard [2012]). En d’autres termes, si le taux d’intérêt ne peut pas tout, peut-être peut-il agir en complément de(s) l’instrument(s) macroprudentiel(s) et constituer l’élément de coordination entre la politique monétaire et la pmp ?
8Si l’on tient pour acquise l’hypothèse, aujourd’hui largement partagée dans la littérature (Beau et al. [2011]), qu’une pmp est désormais indispensable au maintien de la stabilité financière, alors un policy-mix des politiques monétaire et macroprudentielle devient nécessaire. Deux conceptions polaires de ce policy-mix sont envisageables. Celles-ci relancent le débat quant à l’orientation stratégique « clean » versus « lean » de la politique monétaire en présence de la pmp. Celle selon laquelle le taux d’intérêt pourrait agir en priorité sur la stabilité monétaire, mais agir aussi en temps voulu sur la stabilité financière en complément des instruments macroprudentiels, relève d’une approche « intégrée » du policy-mix entre politique monétaire et pmp selon une terminologie introduite par Kremers et Schoenmaker [2010] et popularisée par Blanchard [2012] et le fmi [2013a]. Dans cette approche, la stabilité monétaire et la stabilité financière sont « intégrées » dans une règle de Taylor « augmentée ». La politique monétaire est orientée « lean » pour soutenir l’instrument macroprudentiel. Le taux d’intérêt et l’instrument macroprudentiel sont alors supposés complémentaires. À l’opposé de cette approche intégrée, l’approche « séparée » (Kremers et Schoenmaker [2010]) ou « découplée » (Stein [2013]) n’envisage pas que le taux d’intérêt puisse répondre, à quelque moment que ce soit, à la stabilité financière. Sur la base d’une lecture stricte à la fois du principe de séparation, de la règle de Tinbergen et du principe de Mundell, l’approche séparée préconise d’affecter la politique monétaire tout entière à la stabilité monétaire et la pmp tout entière à la stabilité financière.
9Dans la suite de cet article, nous proposons une méta-analyse d’un sous-ensemble récent de modèles dsge (Dynamic Stochastic General Equilibrium ou modèles d’équilibre général dynamiques et stochastiques) qui réunissent les caractéristiques permettant d’étudier les modalités de ce policy-mix entre politique monétaire et pmp : ils ont en commun de ne pas exclure l’action combinée de ces deux politiques car ils incorporent à la fois des instruments macroprudentiels pour limiter les fluctuations financières et une règle de Taylor augmentée (rta) d’un écart financier (les articles excluant l’augmentation de la règle de Taylor n’envisagent pas possible d’articuler les deux politiques via l’action du taux d’intérêt). Les 23 modèles que nous recensons avec ces caractéristiques fournissent 99 observations du coefficient de réponse à l’écart financier dans la règle de Taylor, car chaque article envisage plusieurs scénarios (différents chocs, différents instruments macroprudentiels, coordination plus ou moins forte…). Ce coefficient fut au cœur du débat « clean » versus « lean » et reste présenté dans la littérature récente comme la charnière du policy-mix entre politique monétaire et pmp (Kiley et Sim [2014]).
10Les principales questions que nous posons sont les suivantes : où se situe ce nouveau sous-ensemble de modèles dsge dans la gamme des policy-mix envisageables entre politique monétaire et pmp ? Les modèles dsge qui n’interdisent pas l’action combinée de la politique monétaire et de la pmp (via une rta) envisagent-ils une complémentarité entre le taux d’intérêt et le(s) instrument(s) macroprudentiel(s) pour préserver la stabilité financière ? La nature et la diversité des instruments macroprudentiels retenus influencent-elles la solution de policy-mix ? Le pays considéré et l’institution d’appartenance des auteurs de ces modèles ont-ils également une incidence sur la solution obtenue ?
11Notre article se poursuit de la manière suivante. La deuxième section présente les deux approches du policy-mix entre politique monétaire et pmp qui ont émergé dans la littérature. La troisième section fournit un état des lieux des modèles dsge incorporant à la fois la politique monétaire, sous la forme d’une rta, et la pmp. La quatrième section explicite la méthodologie de notre étude, nos variables d’intérêt, la relation testée et présente un ensemble de statistiques descriptives des modèles retenus. La cinquième section présente et interprète les résultats obtenus. La dernière section conclut.
« Approche séparée » versus « approche intégrée » de la combinaison entre politique monétaire et politique macroprudentielle
12Deux cas polaires de la combinaison entre politique monétaire et pmp ont émergé dans la littérature. Les deux approches ont des fondements théoriques différents et sous-tendent des conceptions différentes quant aux canaux de transmission, aux instruments utilisés et aux modalités d’affectation de ces derniers. Le tableau 1 en fait la synthèse.
Politiques monétaire et macroprudentielle : les deux conceptions du policy-mix
Politiques monétaire et macroprudentielle : les deux conceptions du policy-mix
13Les promoteurs d’une approche intégrée de ce policy-mix soulignent qu’une règle de Taylor standard accentue les risques financiers via le « canal de la prise de risque » inspiré de Minsky (Borio et Lowe [2002]). Ils soulignent aussi les limites du macroprudentiel (Mishkin [2011]) et l’intérêt d’y associer une rta, soumettant non pas seulement les banques mais l’ensemble du marché, y compris le shadow banking, à un taux d’intérêt ajusté en fonction des tensions financières. À cet égard est parfois mise en avant la nature plus étroite des instruments macroprudentiels : parce qu’ils sont plus ciblés, ils peuvent aussi être plus facilement contournés, d’où la nécessité de compléter leur action par celle du taux d’intérêt (Angeloni [2014]). De plus, tant que l’efficacité des instruments macroprudentiels n’est pas clairement établie, il peut être tout simplement prudent d’y adjoindre l’action du taux d’intérêt (Agénor et al. [2013]).
14À l’opposé, Svensson [2012] défend l’approche séparée en mettant l’accent d’un côté sur les limites de l’instrument de taux d’intérêt et de l’autre sur l’efficacité de l’instrument macroprudentiel face à l’instabilité financière. Smets [2013] y voit une nouvelle expression du consensus de Jackson Hole qui privilégie le « cleaning ». On retrouve l’argument standard selon lequel la crédibilité de la banque centrale peut avoir à souffrir d’un double objectif de stabilité monétaire et de stabilité financière (Goodhart et Schoenmaker [1995]). De plus, en l’absence de règle uniforme et clairement établie, la politique macroprudentielle est davantage exposée à des problèmes d’incohérence temporelle, ce qui peut aussi affecter la crédibilité des banques centrales et, par suite, l’efficacité de leur politique monétaire (Ueda et Valencia [2012]).
15Au sein même des banques centrales, bien que la politique macroprudentielle n’en soit pas encore à un stade opérationnel, les avis sont partagés entre ces deux conceptions. Ainsi Praet [2011] pour la bce, Olsen [2013] pour la Banque de Norvège et Stein [2013] pour la Fed se rangent plutôt du côté d’une approche intégrée. Mais Ekholm [2013] pour la Banque de Suède, Spencer [2010] pour la Banque de réserve de Nouvelle-Zélande, ainsi que Bernanke [2012] pour la Fed préfèrent l’approche séparée.
16À chacun de ces deux régimes de policy-mix correspond une représentation de la politique monétaire via la règle de Taylor. Dans l’approche séparée du policy-mix, il n’y a aucune raison d’augmenter la règle de Taylor. L’instrument macroprudentiel est supposé pleinement efficace pour empêcher l’instabilité financière. À l’inverse, dans l’approche intégrée du policy-mix, la règle est augmentée d’une cible financière afin que le taux d’intérêt complète l’action de la politique macroprudentielle, ou au moins pour s’assurer que l’action du taux d’intérêt n’aille pas à l’encontre de la stabilité financière.
17En pratique, le choix du policy-mix relèvera sans doute davantage de l’art que de la science. Cependant, la « science », sur laquelle la politique monétaire a, au cours des dernières années, difficilement trouvé à s’appuyer, tente depuis peu d’opérer sa mue. Les modèles dsge, qui constituent depuis le début des années 2000 [1] le principal outil de modélisation macroconjoncturelle issu de la théorie macroéconomique, s’efforcent de mieux intégrer les frictions financières.
Un bref état des lieux des modèles DSGE incorporant à la fois la règle de Taylor augmentée et la politique macroprudentielle
18Jusqu’à la crise financière enclenchée en 2007-2008, la prise en compte des frictions financières se réduisait à l’introduction d’un accélérateur financier, amplificateur de chocs, modélisé, soit par une prime de financement externe (Bernanke et al. [1999]), soit par un collatéral venant restreindre le volume d’emprunt (Kiyotaki et Moore [1997]). Cette approche ne conférait aucun rôle explicite à l’intermédiation financière et se limitait à la demande du crédit. Il en va différemment désormais. Les modèles les plus récents intègrent l’offre du crédit ainsi que le risque systémique et, sur le plan instrumental, l’action de la pmp en plus de celle de la politique monétaire. Plus fins encore, certains combinent un ou plusieurs instruments macroprudentiels avec une rta pour rétablir la stabilité financière. C’est ce sous-ensemble de modèles que nous recensons pour réaliser notre étude (fig. 1, intersection hachurée).
Identification du sous-ensemble de modèles dsge recensés
Identification du sous-ensemble de modèles dsge recensés
19Cette littérature se situe à l’intersection de deux littératures antérieures (Beau et al. [2011]) : celle articulée autour du débat « clean » versus « lean », qui pose la question de savoir s’il faut ou non augmenter la règle de Taylor (cf. encadré 1), et celle consacrée à la pmp.
Encadré 1. Règle de Taylor augmentée
La règle de Taylor est dite « augmentée » (ci-après rta) (Castro [2011]) lorsque le taux d’intérêt de la banque centrale répond aussi à un « écart financier » :
Les coefficients απ, αy, αs représentent respectivement la force de la réponse à chacun des trois écarts et donc l’importance que confère la banque centrale aux différents objectifs que la réduction de ces écarts sous-tend : 1) l’objectif de stabilité monétaire à travers la réduction de l’écart d’inflation ; 2) l’objectif de stabilisation conjoncturelle à travers la réduction de l’output gap ; 3) l’objectif de stabilité financière à travers la réduction de l’écart financier.
La stratégie du « clean » consiste à ne pas faire réagir le taux d’intérêt à l’instabilité financière, notamment face à la montée des bulles financières. Cette réponse serait sous-optimale, inefficace, et d’autres instruments seraient plus appropriés. Formellement, la stratégie du « clean » correspond à un coefficient de réponse αs fixé à zéro, ou, autrement dit, à une règle de Taylor standard (1). La banque centrale répond éventuellement non pas à la montée de la bulle, mais aux conséquences macroéconomiques de l’éclatement de la bulle financière. Il s’agit alors de répondre à l’instabilité financière indirectement et uniquement si elle affecte l’inflation ou les prévisions en la matière. Cette réponse étant ex post, après l’éclatement de la bulle, on désigne cette stratégie par l’expression « cleaning up afterwards » ou « mopping up ».
A contrario, la stratégie du « leaning against the wind » consiste à « lutter constamment contre le vent » de l’instabilité financière, en répondant de façon symétrique au boom en élevant le taux d’intérêt et au bust en l’abaissant.
20La règle de Taylor constitue, dans cette littérature, la modélisation courante de la politique monétaire, sauf dans les rares cas où des régimes d’ancrage monétaire sont considérés (cas de certains pays émergents). C’est l’élément le plus comparable d’un modèle à l’autre de cette classe de modèles, offrant ainsi une base de données d’informations comparables. Il en va différemment du macroprudentiel dont la formalisation varie beaucoup d’un modèle à l’autre ; comme c’est aussi le cas d’ailleurs dans la littérature consacrée à la pmp qui propose un large éventail d’instruments. Très vraisemblablement, cette spécification se stabilisera au fur et à mesure que certains instruments macroprudentiels seront privilégiés dans la littérature et en pratique. La spécification du macroprudentiel est, par ailleurs, souvent rudimentaire dans ces modèles, même si quelques-uns retiennent une règle macroprudentielle complexe. Enfin, comme dans la littérature consacrée aux instruments macroprudentiels, la distinction n’est pas toujours aisée entre les instruments micro et macroprudentiels. Les instruments macroprudentiels retenus dans les modèles dsge relèvent parfois davantage de la catégorie des instruments microprudentiels (Ellis [2012]). Cela étant, si l’on s’appuie sur la typologie de Borio [2009], tout instrument prudentiel qui vise à réduire le risque systémique dans sa dimension transversale ou temporelle peut être qualifié de « macroprudentiel ». Un instrument microprudentiel devient donc « macroprudentiel » dès lors qu’il est appliqué de manière contracyclique ou qu’il discrimine les établissements supervisés selon leur degré de risque systémique.
21Au plan méthodologique, même en retenant une catégorie assez fine incorporant à la fois des règles macroprudentielles et une rta, la diversité de ces modèles est grande. Certains modèles calibrent les coefficients de réponse de la règle de Taylor en fonction de valeurs jugées représentatives de la littérature théorique ou des résultats d’estimations empiriques antérieures, quand d’autres les optimisent en minimisant une fonction de perte ou d’utilité, ou bien encore les estiment empiriquement sur la base des données. Et même quand les coefficients de réponse de la règle de Taylor résultent d’une optimisation ou estimation, les méthodes sont diverses. Les méthodes d’estimation sont tantôt basées sur l’approche bayésienne (Smets et Wouters [2003]), tantôt sur les techniques d’appariement des fonctions de réaction (« Impulse Response Functions ») (Christiano et al. [2005]). L’optimisation peut porter sur la variance de l’inflation et de la production, ou faire intervenir une fonction de perte ad hoc de la banque centrale, avec ou sans la stabilité financière comme argument. Les fonctions de perte de la politique monétaire et de la pmp peuvent être jointes ou séparées, ce qui formalise le fait que les autorités macroprudentielles et monétaires peuvent être des institutions séparées ou non. La fonction de perte peut être microfondée sur la fonction d’utilité du seul consommateur, ou sur celles jointes du consommateur et de l’entrepreneur, dans le prolongement des travaux de Rotemberg et Woodford ([1998]).
22Cette littérature ne tranche pas le débat sur l’opportunité ou non d’augmenter la règle de Taylor. Tous les modèles dsge qui retiennent une règle de Taylor ne l’augmentent pas forcément. Et même lorsqu’ils n’excluent pas l’augmentation de la règle de Taylor, le coefficient retenu devant l’écart financier est parfois nul. Les rares recensions de cette classe de modèles avec rta et pmp, comme celles réalisées par le Fonds monétaire international (fmi [2012] ; [2013a] ; [2013b]), ne donnent pas de conclusion claire sur la valeur du coefficient de l’écart financier dans la règle de Taylor et délivrent même des conclusions ambivalentes : tantôt le fmi ([2012]) affirme que cette classe de modèles dsge aboutit à un coefficient nul et que le policy-mix optimal relève d’une « approche séparée », tantôt il soutient que la valeur optimale du coefficient dépend du type de choc et de son ampleur (fmi [2013a]) et que la politique monétaire peut avoir à répondre aux conditions financières. Ces recensions du fmi sont réalisées sur la base de 6 ou 7 modèles (contre 23 dans notre recension). Cette diversité de résultats et l’absence de conclusion robuste tiennent peut-être aux spécifications qui varient d’un modèle dsge à l’autre, ainsi éventuellement qu’au mode de détermination des coefficients de réponse de la règle de Taylor (optimisation/estimation ou calibration). C’est en partie ce que permettra d’éclairer notre étude économétrique.
Méthodologie
Méta-analyse d’une classe de modèles dsge
23La méthode que nous appliquons s’apparente à la méta-analyse. Désormais bien connue, cette méthode quantitative permet de résumer la littérature empirique traitant d’un sujet particulier. Elle se présente comme une alternative à l’approche narrative des revues de littérature ou surveys (Stanley [2001]). D’abord utilisée dans la recherche médicale, la méta-analyse s’est progressivement développée dans les sciences sociales, y compris en sciences économiques (notamment en économie du travail avec Card et Krueger [1995] et récemment en macro-économie monétaire sur le thème de la politique monétaire (Havranek et Rusnak [2013])). En rassemblant les résultats hétérogènes d’un grand nombre d’études empiriques ayant des caractéristiques différentes (tailles d’échantillons, méthodes d’estimations, études réalisées par des chercheurs dont les a priori ne sont pas nécessairement les mêmes (Chatelain [2010])), la méta-analyse permet d’extraire en théorie des résultats plus robustes que ne le ferait une simple recension.
24Partant du principe que la pmp constituera à l’avenir un instrument indispensable à la stabilité financière, nous réunissons pour construire notre base de données tous les modèles dsge qui rendent possible l’articulation entre la politique monétaire et la pmp [2]. En utilisant les différents moteurs de recherche d’articles académiques (jstor, Science Direct, Google Scholar, etc.) et en effectuant des recherches en cascade dans les bibliographies des articles, nous parvenons à recenser 23 articles présentant les caractéristiques souhaitées (pmp et rta).
25Cette classe de modèles n’existait pas avant la crise financière. Certains modèles dsge introduisaient déjà une rta, mais très peu prenaient en compte un instrument macroprudentiel et, à notre connaissance, aucun ne combinait les deux. Notre base de données débute ainsi avec le document de travail d’Angeloni et Faia de 2009. Nous incorporons dans cette base aussi bien des documents de travail que des articles publiés dans des revues. Quand un article appartient aux deux catégories, on ne retient les deux versions que si les résultats diffèrent entre les deux.
26Dans chacun de ces 23 modèles, nous collectons les données qui nous intéressent pour étudier l’interaction entre les politiques monétaire et macroprudentielle. Pour la politique monétaire, nous collectons l’ensemble des coefficients sur la rta. Rappelons que la rta s’exprime de la manière suivante (cf. encadré 1) :
28Les coefficients de réponse aux écarts d’inflation, de production et financier sont respectivement notés απ, αy et αs. Ces coefficients traduisent l’intensité de la réponse de la banque centrale et découlent en amont de la structure de l’économie (arbitrage inflation/production par exemple) et des préférences de la banque centrale exprimées par sa fonction de perte. Nous collectons dans chaque modèle la valeur de ces différents coefficients. Les 23 modèles recensés nous fournissent en tout 99 observations sur chacun de ces coefficients de réponse.
29Nous collectons également dans chacun des articles les informations concernant la politique macroprudentielle en identifiant, au sein de chaque article, le type d’instrument macroprudentiel considéré.
30Outre ces données relatives à la politique monétaire et à la politique macroprudentielle, importantes pour notre analyse, sont également collectées les données relatives à la cible financière dans la règle de Taylor, aux affiliations des auteurs et aux pays représentés, qui constitueront ensuite des variables d’intérêt ou de contrôle dans la relation que nous allons tester.
Variable expliquée
31La question centrale de notre méta-analyse est celle du policy-mix entre la politique monétaire et la pmp. Nous avons préalablement distingué deux cas polaires de policy : 1) une « approche séparée du policy-mix » dans laquelle la politique monétaire reste concentrée sur la stabilité monétaire et la stabilité macroconjoncturelle, tandis que la pmp a pour objectif la stabilité financière et 2) une « approche intégrée du policy-mix » dans laquelle la politique monétaire peut seconder la pmp dans son objectif de stabilité financière, en ajustant le taux directeur en fonction des conditions financières. Dans cette optique, plus la réponse du taux d’intérêt aux conditions financières est forte et plus l’articulation entre les deux politiques l’est aussi (approche intégrée du policy-mix), et inversement lorsqu’elle est faible (approche séparée du policy-mix). Or, l’intensité de cette réponse est directement renseignée par la valeur du coefficient αs dans la rta [3]. Le coefficient αs constituera donc la variable dépendante de la relation testée dans la méta-analyse que nous menons.
Variables explicatives
32Plusieurs de nos variables explicatives concernent la règle de Taylor. Les coefficients de réponse à l’inflation, απ, et à la production, αy, sont les deux premières variables explicatives. Partant de l’hypothèse de Woodford [2012], on peut considérer qu’il existe chez les banquiers centraux un arbitrage entre la stabilité macroéconomique (inflation, production) et la stabilité financière. En amont, ces coefficients de réponse dépendent aussi des préférences de la banque centrale dans sa fonction de perte. Le principal contre-argument à la prise en charge par la banque centrale d’un objectif supplémentaire de stabilité financière réside dans la possibilité d’un conflit d’objectifs préjudiciable à la crédibilité de la banque centrale en matière de stabilité des prix (fmi [2013a] ; Smets [2013]). Ainsi, plus la banque centrale accorde de l’importance à l’inflation et engage sa crédibilité sur l’atteinte de son objectif de stabilité des prix et plus on peut s’attendre à ce qu’elle soit réticente à donner de l’importance à la stabilité financière. De ce point de vue, on devrait observer dans la relation testée une relation négative entre la variable απ et notre variable dépendante (αs). Formellement, on s’attend donc à un signe négatif dans la relation économétrique que nous allons estimer pour la variable explicative απ.
33Le signe attendu pour la production est moins tranché. L’argument du conflit d’intérêt qui vient d’être énoncé pourrait ici aussi faire attendre une relation négative. Mais si le banquier central est plus « colombe » (préférence plus marquée pour la production et l’emploi et par extension ici pour la stabilité financière) que « faucon » (forte préférence anti-inflationniste) [4], il se préoccupera davantage de la production et sera plus ouvert à d’autres objectifs que l’inflation. Dans ce cas, il peut aussi être ouvert à la stabilité financière comme objectif supplémentaire. Au final, le signe attendu dans notre estimation devant αy est ambigu.
34Au-delà, nous chercherons à évaluer si le fait que les coefficients de la règle de Taylor soient le résultat d’une optimisation/estimation ou, au contraire, celui d’une simple calibration (héritée des modèles de cycle réel) influence ou pas notre variable dépendante. On crée pour ce faire une variable muette notée opti dont la valeur est égale à 1 quand les coefficients de réponse dans la règle de Taylor sont optimisés ou estimés, et 0 quand les coefficients sont calibrés [5]. Si l’on part de l’hypothèse que l’instabilité financière reste très partiellement intégrée dans les modèles dsge et souvent absente explicitement de la fonction de perte de la banque centrale, il faut plutôt s’attendre, dans nos résultats d’estimation, à un signe négatif dans la mesure où la fonction de perte sous-jacente, qui sert à optimiser le coefficient, reste une fonction de perte traditionnelle des Nouveaux Keynésiens pour le régime de ciblage de l’inflation avec seulement l’inflation et la production comme arguments [6]. Ajoutons à cet égard que, dans nos observations, 76 % des coefficients « optimisés » sont issus de modèles dans lesquels la fonction de perte n’inclut pas la stabilité financière.
35Les coefficients de réponse de la règle de Taylor peuvent être estimés en termes absolus ou relatifs. Soit on les considère chacun en termes absolus, au risque que les observations correspondantes ne soient pas parfaitement comparables d’un article à l’autre. Soit on les considère en termes relatifs en exprimant le poids de chacun des coefficients de réponse (αi) en le rapportant à la somme des trois coefficients de réponse intervenant dans la règle de Taylor (απ, αy, αs), soit : αi/(απ + αy + αs). Dans ce second cas, on notera que notre variable expliquée sera elle-même exprimée en termes relatifs. Du côté des variables explicatives, nous ne ferons plus intervenir la variable d’écart de production : la somme des trois coefficients exprimés chacun en termes relatifs étant égale à l’unité, on s’exposerait sinon à un problème de colinéarité. Le poids relatif de la réponse à l’inflation demeure toutefois une façon d’exprimer le caractère plus ou moins « faucon » ou « colombe » du banquier central dans la conduite de la politique monétaire. Formellement, l’importance relative du coefficient de réponse dans la fonction de réaction de la banque centrale (exprimée sous la forme de la règle de Taylor) dérive des poids relatifs appliqués à la variabilité de l’inflation, celle de la production, et éventuellement celle des conditions financières dans la fonction de perte de la banque centrale. Le banquier central est d’autant plus « faucon » qu’il est sensible à la variabilité de l’inflation et qu’il fait réagir fortement son taux directeur à l’écart d’inflation, d’autant plus « colombe » qu’il est davantage sensible au reste. En termes absolus comme en termes relatifs, on s’attend donc dans notre méta-analyse à une relation négative entre notre variable dépendante et la variable représentative de la réponse de la banque centrale à l’inflation.
36En dehors de ce bloc de variables relatives à la règle de Taylor, notre dernière variable d’intérêt concerne les instruments macroprudentiels (cf. tableau 2). Nous sommes particulièrement attentifs à la relation entre la valeur du coefficient αs, notre variable dépendante, et le type de variable macroprudentielle considérée. Notre objectif est en effet d’éclairer la nature du policy-mix entre les politiques macroprudentielle et monétaire au sein de ces modèles. Différents instruments macroprudentiels sont utilisés dans la classe de modèles dsge que nous étudions. Nous tentons de répartir ces instruments. Cette répartition ne peut malheureusement pas s’appuyer sur la typologie de Borio [2009] qui distingue entre des mesures macroprudentielles de type transversal (intervenant sur la distribution du risque systémique en un point donné du temps) et des mesures macroprudentielles temporelles (visant à limiter la formation du risque systémique dans le temps), car les mesures de type transversal sont pour ainsi dire absentes des modèles dsge que nous avons recensés. En revanche, la typologie de Blanchard et al. [2013] se révèle très opérationnelle en raison de sa simplicité. Les instruments macroprudentiels y sont répartis en trois catégories selon qu’ils contraignent les prêteurs, les emprunteurs ou les flux de capitaux. La Banque d’Angleterre [2011] retient trois ensembles : même si les intitulés diffèrent, les deux premiers ensembles sont assez proches de ceux de Blanchard et al. [2013] puisqu’il s’agit des règles bilancielles (celles-ci contraignent les prêteurs) et des termes et conditions des contrats financiers (les conditions d’apport ou de revenu dans l’attribution des crédits généralement exprimées par les ratios de prêt sur actif (« Loan To Value », ltv [7]) et prêt sur revenu (« Loan To Income », lti) entrent dans cet ensemble) ; le troisième ensemble se rapporte en revanche aux structures de marché (chambre de compensation, exigences d’information) sans toutefois que la dimension macroprudentielle de ce troisième ensemble soit clairement établie. La Banque des règlements internationaux (bri [2012]) distingue, quant à elle, trois catégories d’instruments selon qu’ils se rapportent à des exigences de capital (coussins de fonds propres contracycliques, surcharges systémiques de fonds propres…), des exigences de liquidité (exigences supplémentaires de liquidités pour les établissements systémiques) ou à des actifs (ltv, lti…). Ellis [2012] relève dans sa typologie la porosité entre les instruments macro et microprudentiels et distingue « vrais » et « faux » instruments macroprudentiels, les faux étant essentiellement ceux relevant en fait du microprudentiel. Enfin, Galati et Moessner [2013] distinguent les instruments qui agissent sur les prix et ceux visant à restreindre les quantités.
Typologies des instruments macroprudentiels
Typologies des instruments macroprudentiels
37Parmi ces différentes typologies, nous retenons celle qui nous permet de répartir au mieux les instruments macroprudentiels utilisés dans les articles que nous recensons, à savoir celle de Blanchard et al. [2013] en se ramenant cependant à seulement deux catégories d’instruments car la troisième n’intervient pas dans les modèles recensés. On construit alors une variable muette, notée mpp, égale à 1 quand l’instrument macroprudentiel concerne directement les emprunteurs (ltv, lti…) et à 0 lorsqu’il contraint les prêteurs (provisions dynamiques, coussin contracyclique de fonds propres…). Le signe du coefficient attaché à cette variable doit s’interpréter en considérant le supplément d’effet du premier ensemble d’instruments (affectant directement les emprunteurs). Un signe positif signifiera que les instruments macroprudentiels affectant les emprunteurs favorisent davantage l’intensité de la réponse de la politique monétaire aux conditions financières (et favorise plus une approche intégrée du policy-mix) que les instruments contraignant les prêteurs et vice versa. Dans tous les cas de figure, un coefficient statistiquement significatif signifiera que le type d’instrument macroprudentiel influence le policy-mix. A contrario, un coefficient statistiquement non significatif suggérerait la neutralité du type d’instrument macroprudentiel pour le policy-mix. Logiquement, on s’attend à ce que l’articulation entre politique monétaire et pmp soit d’autant plus faible (forte) que l’efficacité de la pmp est supposée forte (faible) : si l’instrument macroprudentiel est supposé efficace, il n’est pas nécessaire de compléter son action par celle du taux d’intérêt. Ici, nous considérons deux types d’instruments auxquels la littérature ne prête pas la même efficacité : les instruments contraignant les emprunteurs (ltv, lti) ont déjà fait leurs preuves et sont tenus pour avoir une efficacité forte (Claessens et al. [2013] ; Jeanne et Korinek [2014]), tandis que les instruments contracycliques contraignant les prêteurs ont été moins expérimentés ou se sont révélés insuffisants (comme le provisionnement dynamique en Espagne). On devrait donc obtenir une articulation moins forte (un coefficient αs plus faible) quand les instruments contraignant les prêteurs sont introduits dans le modèle.
Variables de la régression de base
Variables de la régression de base
Variables de contrôle
Variables de contrôle
Variables de contrôle
38Nous introduisons plusieurs variables de contrôle.
39Tout d’abord, afin d’évaluer si l’absence d’uniformité dans la définition de la stabilité financière affecte nos résultats, nous introduisons une variable supplémentaire correspondant au type de cible financière choisie pour augmenter la règle de Taylor. Par cible, on entend ici l’écart financier, c’est-à-dire l’équivalent pour la stabilité financière de l’output gap pour la production. L’écart financier correspond à un écart entre une variable financière (crédit, crédit/pib, prix de l’immobilier, autre prix d’actif…) et sa valeur à l’état stationnaire ou historique. Les cibles sont assez diverses (cf. tableau 4), autant que le sont les dimensions de la stabilité financière [8], mais elles peuvent être réparties en deux grandes catégories selon qu’elles font intervenir les prix d’actifs (boursiers ou immobiliers) ou alors le crédit. Nous utilisons ici une variable binaire, notée « cible », prenant la valeur 1 lorsque la cible porte sur les prix d’actifs, 0 si elle porte sur le crédit. Comme pour l’ensemble d’instruments macroprudentiels, le signe de cette variable traduira le supplément d’effet des cibles se rapportant à des prix d’actifs par rapport à celles se rapportant au crédit.
Base de données constituée à partir des modèles dsge recensés
Base de données constituée à partir des modèles dsge recensés
Lecture : αs est le coefficient de réponse aux conditions financières ; απ le coefficient de réponse à l’écart à la cible d’inflation ; αy le coefficient de réponse à l’output gap ; mpp la variable indicatrice de l’ensemble d’instruments macroprudentiels ; opti la variable indiquant si le coefficient est le résultat ou non d’une optimisation et nabc qui désigne la non-affiliation ou pas des auteurs à une banque centrale. Source : les auteurs.40Ensuite, il est courant dans les méta-analyses d’évaluer l’incidence des auteurs (affiliation, spécialisation, école de pensée…) sur les résultats que produisent leurs modèles (Doucouliagos et Paldam [2009]). Dans le cas qui nous intéresse, l’affiliation des auteurs est importante. Si les auteurs sont affiliés à une banque centrale, on peut s’attendre à ce qu’ils épousent les vues plutôt conservatrices de la banque centrale. Conformément à l’idée de Kenneth Rogoff [1985], le banquier central a un biais conservateur qui l’amène à privilégier l’inflation dans l’arbitrage entre inflation et chômage et qui l’amène également à privilégier la stabilité de sa stratégie. Pour Schellekens [2002], les banquiers centraux sont aussi plus « prudents » en matière de changement, et peuvent se caractériser par un « conservatisme institutionnel ». Dans le débat qui nous intéresse, cela signifie concrètement que les banquiers centraux sont sans doute moins enclins que la collectivité à modifier leur stratégie pour y faire entrer un nouvel objectif de stabilité financière, aussi peut-on s’attendre à ce qu’ils soient plus enclins à privilégier la séparation entre politique monétaire et politique macroprudentielle qu’une approche intégrée. Pour tester cet effet de l’affiliation, nous construisons une variable binaire, notée « nabc », codée 1 si au moins un des auteurs de l’article n’est pas affilié à une banque centrale, et 0 si les auteurs ont une banque centrale pour affiliation (tableau 4). Les statistiques descriptives montrent que les deux cas de figure sont assez bien répartis dans notre échantillon (tableau 5). Le signe attendu est positif : la non-appartenance à une banque centrale amènerait à moins de conservatisme et à une préférence plus forte pour un changement d’orientation stratégique de la politique monétaire dans le sens d’une prise en compte des conditions financières en soutien de la pmp (approche intégrée du policy-mix).
Principales statistiques descriptives
Principales statistiques descriptives
41Enfin, le pays représenté dans les modèles que nous recensons nous apparaît être une variable explicative potentiellement importante. Une littérature abondante [9] souligne en effet la spécificité de la pmp et de sa combinaison avec la politique monétaire dans les économies émergentes. Ces dernières recourent à la pmp plus intensivement et plus fréquemment que les économies avancées, en partie car elles sont plus exposées aux retournements de flux de capitaux (Lim et al. [2011]). Dans ces pays, l’utilisation de la pmp dépend avant tout du régime de change. Plus il est fixe et moins l’autonomie de la politique monétaire est grande : la pmp offre alors un outil d’ajustement macroconjoncturel (Kincaid et Watson [2013]). La question a gagné en pertinence avec les mesures non conventionnelles adoptées par les banques centrales des pays industrialisés pour faire face à la crise financière, dans la mesure où ces mesures ne sont pas sans incidence pour les pays émergents. Comme le soulignent Hahm et al. [2012], les mesures de politique monétaire non conventionnelles ont rendu la combinaison entre la politique monétaire et la pmp encore plus importante qu’elle ne l’était dans les pays émergents. Dans la même optique, Agénor et Pereira da Silva [2013] proposent de combiner une règle de Taylor augmentée et la pmp, soit une approche intégrée du policy-mix, pour mieux gérer le risque systémique dans sa dimension temporelle. On décide donc d’ajouter une variable « pays » reposant sur la classification du fmi entre économies avancées et émergentes. Elle prend la forme d’une variable muette égale à 1 si le pays du modèle est un pays émergent (incluant selon le fmi notamment les pays à revenus moyens) ou à 0 s’il s’agit d’une économie avancée. Trois articles de notre base de données n’indiquent pas un pays précis mais la catégorie « petite économie ouverte » qui peut être un pays avancé ou émergent. Après une lecture approfondie, les modèles de « petites économies ouvertes » traitent tous d’économies émergentes [10] ; celui d’Ozkan et Unsal [2013], qui traite d’une grande économie ouverte, correspond également à une économie émergente. Partant des analyses de la bri, du fmi et d’Agénor et Pereira da Silva [2013], on s’attend à ce que cette variable « pays » influence positivement notre variable expliquée.
42Les tableaux 3a et 3b reprennent l’ensemble de nos variables d’intérêt et le tableau 4 présente notre base de données.
Relation testée
43La régression testée prend la forme suivante :
44αs = a constante + b απ + c αy + d mpp + e opti
45αs = a constante + b απ + c αy+ d mpp + e opti + f variables de contrôle
46ou, lorsque les coefficients de réponse de la règle de Taylor sont exprimés en poids relatifs :
47poids αs = a constante + b poids απ + c mpp + d opti
48poids αs = a constante + b poids απ + c mpp + d opti + e variables de contrôle
49où
50αs est le coefficient de réponse aux conditions financières dans la règle de Taylor
51απ, le coefficient de réponse à l’écart à la cible d’inflation dans la règle de Taylor
52αy, le coefficient de réponse à l’output gap dans la règle de Taylor
53mpp, la variable indicatrice de l’ensemble d’instruments macroprudentiels
54opti, la variable indiquant si le coefficient de réponse aux conditions financières est le résultat d’une optimisation de la fonction de perte de la banque centrale ou non
55variables de contrôle, alternativement le type de cible financière (cible) qui augmente la règle de Taylor, l’affiliation des auteurs à une institution autre qu’une Banque centrale (nabc), le type de pays représenté dans le modèle dsge (pays)
56Nous appliquons la technique simple des moindres carrés ordinaires (mco), couramment utilisée pour l’économétrie des variables qualitatives (Wooldridge [2006]), ainsi que pour les méta-régressions (Görg et Strobl [2001] ; Bineau [2010]). Notre base de données étant constituée à partir de différents articles indépendants utilisant chacun des techniques (calibration ou optimisation/estimation en ce qui concerne notre analyse), des variables et des paramètres indépendants, les coefficients estimés par les mco sont a priori non biaisés (Stanley et Jarrell [1989]). La technique de correction des termes de la matrice de variance-covariance (Hubert-White) que nous appliquons permet d’obtenir des résultats robustes à l’éventuelle hétéroscédasticité des erreurs (White [1980]).
Statistiques descriptives
57Notre variable expliquée αs prend des valeurs comprises entre 0 et 2,5 avec une moyenne établie à 0,40. On constate donc des valeurs relativement faibles pour le coefficient de réponse à la stabilité financière dans les modèles recensés. L’observation de la distribution du coefficient αs indique en outre une assez forte concentration de la variable autour des valeurs basses comprises entre 0 et 1 (annexe, fig. A1-A3). Ce coefficient αs prend d’ailleurs une valeur nulle dans plusieurs des modèles testés qui, bien qu’ils autorisent l’augmentation de la règle de Taylor, retiennent à l’issue de l’optimisation ou de l’estimation une valeur nulle. Il est toutefois intéressant de relever que, lorsque la variable αs est exprimée en poids relatif, elle représente jusqu’à 65 % de la somme des coefficients de réponse, ce qui n’exclut donc pas que certains des modèles recensés ou des scénarios testés placent la stabilité financière en tête des objectifs à satisfaire.
58Les valeurs prises par le coefficient de réponse à l’inflation απ sont en moyenne plus élevées (moyenne égale à 2,98). Les valeurs et la distribution du coefficient de réponse à l’output gap αy sont intermédiaires.
Résultats
59On présente tout d’abord les résultats de notre estimation de base, puis ceux de nos régressions faisant intervenir les variables de contrôle à des fins de robustesse. On considère, dans un premier temps, les résultats obtenus avec les variables des coefficients de réponse dans la règle de Taylor exprimés en termes absolus (modèle 1 pour l’estimation de base, modèles 2, 3 et 4 pour l’estimation complète), puis, dans un second temps, ceux que l’on obtient avec des coefficients en poids relatifs (modèle 5 pour l’estimation de base, modèles 6, 7 et 8 pour l’estimation complète). Les huit modèles testés sont répartis dans les tableaux 6a et 6b.
Résultats (variables des coefficients de réponse dans la règle de Taylor exprimés en termes absolus)
Résultats (variables des coefficients de réponse dans la règle de Taylor exprimés en termes absolus)
* p < 0,05 ** p < 0,01 *** p < 0,001.Résultats (variables des coefficients de réponse dans la règle de Taylor exprimés en en poids relatifs)
Résultats (variables des coefficients de réponse dans la règle de Taylor exprimés en en poids relatifs)
* p < 0,05 ** p < 0,01 *** p < 0,001.Résultats de l’estimation de base
60Les modèles 1 et 5 évaluent l’incidence du type d’instrument macroprudentiel, des coefficients de réponse à l’inflation et à l’output gap dans la règle de Taylor, et de l’optimisation ou non à l’origine de ces coefficients.
61Notre principal résultat est que le type d’instrument macroprudentiel influence le degré d’articulation entre pmp et politique monétaire. On obtient un coefficient statistiquement significatif et négatif devant la variable mpp représentative de l’ensemble des instruments macroprudentiels. Ce résultat signifie que les instruments macroprudentiels contraignant directement les emprunteurs (ltv, lti…) réduisent davantage la réponse de la politique monétaire à la stabilité financière et sont donc moins favorables à une approche intégrée du policy-mix que les instruments contraignant les prêteurs (coussins contracycliques, provisionnement dynamique…). Ce résultat s’obtient que l’on exprime les coefficients de la règle de Taylor en termes absolus ou en poids relatifs. Comme attendu, ce dernier résultat reflète assez bien les différences d’appréciation quant à l’efficacité des instruments prudentiels : le choix d’instruments contraignant les emprunteurs dont l’efficacité est assez bien démontrée dans la littérature nécessite moins d’augmenter la règle de Taylor pour obtenir une réaction combinée du taux d’intérêt. À l’inverse, les modèles qui retiennent des instruments contraignant les prêteurs dont l’efficacité est moins clairement attestée dans la littérature semblent logiquement considérer comme nécessaire l’action complémentaire du taux d’intérêt pour lutter contre l’instabilité financière.
62Le coefficient de réponse à l’inflation απ dans la règle de Taylor semble aussi influencer, mais faiblement, l’intensité de la réponse de la politique monétaire à la stabilité financière. Le coefficient de cette variable est significatif et de signe négatif comme attendu. Ce résultat suggère que, dans la classe de modèles dsge que nous étudions, l’arbitrage inflation/stabilité financière n’est pas totalement absent. Ce résultat se confirme lorsque le coefficient de réponse à l’inflation est exprimé en poids relatif (modèle 5). On obtient, dans ce cas, un résultat encore plus significatif. Plus la banque centrale est « faucon » et moins elle cherchera à articuler les politiques monétaire et macroprudentielle en augmentant la règle de Taylor.
63En revanche, le coefficient de réponse αy à l’output gap ne ressort pas comme une variable significative lorsqu’il est exprimé en termes absolus. La réponse à l’output gap ne paraît pas influencer le policy-mix, du moins dans la représentation que les modèles dsge que nous étudions en ont. Cela relativise la portée de l’arbitrage entre stabilité macroéconomique et stabilité financière, pourtant très présent dans la littérature consacrée à la politique monétaire.
64Le fait que le coefficient de réponse αs à la stabilité financière soit le résultat d’une optimisation/estimation de la fonction de perte (opti) n’apparaît pas non plus comme une variable déterminante quand les coefficients de réponse de la règle de Taylor sont exprimés en termes absolus. Cette variable opti devient toutefois significative, avec un signe négatif conformément à ce que nous attendions, quand ces coefficients sont exprimés en poids relatifs.
Résultat de l’estimation complétée par les variables de contrôle
65Nos variables de contrôle sont incorporées une à une : la variable pays (modèles 2 et 6), la variable nabc (modèles 3 et 7), la variable cible (modèles 4 et 8). Dans les modèles 2, 3, 4, les coefficients de réponse de la règle de Taylor sont exprimés en termes absolus. Dans les modèles 6, 7 et 8, ils sont en poids relatifs.
66Ces tests de robustesse confirment la significativité et l’influence positive de la variable pays. Cela suggère, conformément à la littérature, l’intérêt d’une combinaison forte entre politique monétaire et politique macroprudentielle (approche intégrée du policy-mix) pour les pays émergents. Il signifie aussi qu’il n’existe pas de policy-mix unique, mais des solutions contingentes aux contraintes auxquelles font face les pays. L’insertion de cette variable a toutefois pour effet de réduire l’influence du type d’instruments macroprudentiels (mpp). L’effet du type d’instruments macroprudentiels est préservé, bien que moins fort, lorsque les coefficients de réponse sont en termes absolus, mais il devient non significatif quand les coefficients de réponse sont en poids relatifs.
67La variable d’affiliation des auteurs à une institution autre qu’une banque centrale (nabc) ne ressort pas significative dans l’estimation réalisée à partir des coefficients exprimés en valeur absolue, sans que son introduction n’altère les résultats de notre estimation de base. Au mieux, cette variable n’est que faiblement significative quand les coefficients sont exprimés en poids relatifs. L’hypothèse selon laquelle le biais « conservateur » des banquiers centraux aurait une incidence sur le degré d’articulation entre politique monétaire et politique macroprudentielle ne paraît pas corroborée, à moins que ce conservatisme ne se soit diffusé au-delà des banques centrales.
68Enfin, le type de cible financière (cible) ne semble pas avoir un effet robuste à l’ensemble de nos estimations. La seule fois où il apparaît significatif (modèle 4), l’effet est positif, ce qui signifie qu’une cible de prix d’actifs nécessiterait davantage d’articuler la politique monétaire et la pmp qu’une cible de crédit. Mais l’effet reste de toute façon faiblement significatif.
Conclusion
69Nous réunissons dans cette méta-analyse vingt-trois modèles dsge qui réunissent les caractéristiques adéquates pour observer les modalités du policy-mix entre la politique monétaire et la pmp. Ils nous permettent d’observer si la combinaison envisagée relève d’une « approche séparée » du policy-mix telle que la politique monétaire ne répond pas aux conditions financières et se concentre sur la stabilité de l’inflation et de la production, ou davantage d’une « approche intégrée » telle que la politique monétaire vient s’articuler à la politique macroprudentielle et la seconder dans la réponse à l’instabilité financière.
70La valeur du coefficient de réponse aux conditions financières dans la règle de Taylor que ces modèles utilisent mesure le degré d’articulation entre la politique monétaire et la pmp dans la recherche de la stabilité financière et constitue donc notre variable dépendante. Pour principales variables explicatives, nous avons retenu le type de règles macroprudentielles choisies, l’importance donnée à l’inflation et à l’output gap dans la règle de Taylor, les modalités d’obtention (par optimisation/estimation ou par calibration) des coefficients de réponse dans la règle de Taylor. Puis nous avons introduit plusieurs variables de contrôle (type de cible financière augmentant la règle de Taylor, pays représenté dans le modèle, affiliation des auteurs à une institution autre qu’une banque centrale).
71Le principal résultat de notre estimation de base est que le type d’instrument macroprudentiel importe pour le policy-mix entre la politique monétaire et la politique macroprudentielle. Ce résultat est crucial puisqu’il tend à démontrer que certains types d’instruments macroprudentiels sont plus favorables que d’autres à une articulation forte entre les deux politiques et à leur action complémentaire sur la stabilité financière. Cependant, ce résultat reflète aussi et peut-être surtout l’hypothèse du modèle quant à l’efficacité des instruments macroprudentiels. En l’occurrence, ceux dont l’efficacité est la mieux démontrée dans la littérature (les instruments type ltv, lti, contraignant les emprunteurs) sont aussi ceux pour lesquels nous trouvons qu’ils favorisent le moins une approche intégrée du policy-mix. Ce résultat est robuste quelle que soit la façon d’exprimer les coefficients de réponse de la règle de Taylor (en termes absolus ou relatifs), et résiste à l’introduction de nos variables de contrôle hormis la variable pays.
72Le second résultat de nos investigations est que la préférence de la banque centrale pour l’inflation (mesurée par le coefficient de réponse à l’inflation dans la règle de Taylor) semble influencer négativement le coefficient de réponse à la stabilité financière. Ce résultat peut signifier que le conservatisme du banquier central à la Rogoff (une forte aversion à l’inflation) est un obstacle à une approche intégrée policy-mix. En revanche, nos résultats n’attestent pas la prise en compte d’un arbitrage entre stabilité macroéconomique (output gap) et stabilité financière dans les modèles dsge que nous avons recensés. Quant aux modalités d’obtention (par optimisation/estimation ou par calibration) des coefficients de réponse dans la règle de Taylor, on obtient, conformément à ce que nous attendions, que l’optimisation/estimation tend à réduire, comparée à la calibration, la valeur du coefficient de réponse à la stabilité financière, uniquement toutefois lorsque les coefficients sont exprimés en poids relatifs. Ce résultat suggère que les modèles dsge devraient spécifier avec précaution la fonction de perte utilisée dans l’optimisation de la règle de Taylor.
73Parmi les variables de contrôle que nous introduisons, la variable pays est celle qui a le plus d’influence. Cela tend à montrer que la combinaison entre politiques monétaire et macroprudentielle n’obéit pas à une formule universelle et diffère selon les pays : la réponse de la politique économique à l’instabilité financière dépend de contraintes spécifiques aux pays, parmi lesquelles vraisemblablement la contrainte extérieure et les externalités des politiques monétaires menées par les autres pays.
74Notre étude contribue au débat, récent et important pour la stabilité financière de demain, consacré aux modalités efficaces de la combinaison entre la politique monétaire et la politique macroprudentielle. Elle éclaire également la façon dont ce policy-mix est appréhendé dans les modèles dsge des années récentes. À cet égard, notre étude permet de constater que l’incorporation du macroprudentiel reste partielle dans les modèles dsge, comme celle plus largement de la stabilité financière. Tout d’abord, cette incorporation se réduit généralement à un instrument alors qu’il en existe un large éventail et que le choix de l’instrument macroprudentiel influence le degré d’articulation choisi, comme le suggère l’un de nos résultats. Ensuite, et c’est sans doute le plus problématique pour la cohérence interne de ces modèles, bien qu’ils incorporent l’instrument macroprudentiel, tous les modèles que nous avons recensés n’intègrent pas en amont ce qui devrait fondamentalement justifier son utilisation, à savoir la perte de bien-être collectif associée à l’instabilité financière. Formellement, cela signifie que la stabilité financière devrait être prise en compte dans une fonction de perte : celle de la banque centrale, ou, à défaut, celle d’une autre institution en charge du macroprudentiel – rarement présente toutefois dans ces modèles – jointe alors à la fonction de perte de la banque centrale. En ne spécifiant pas ces aspects, ces modèles restent, au stade actuel de leur développement, muets sur le design institutionnel de ce policy-mix et sur les utilisations qui peuvent en être faites pour commenter ou prévoir la combinaison entre politique monétaire et politique macroprudentielle.
Distribution du coefficient de réponse à la stabilité financière (αs) dans les modèles dsge recensés
Distribution du coefficient de réponse à la stabilité financière (αs) dans les modèles dsge recensés
Distribution du coefficient de réponse à l’inflation dans les modèles dsge recensés
Distribution du coefficient de réponse à l’inflation dans les modèles dsge recensés
Distribution du coefficient de réponse à l’output gap dans les modèles dsge recensés
Distribution du coefficient de réponse à l’output gap dans les modèles dsge recensés
Matrice de corrélation
Matrice de corrélation
Bibliographie
Références bibliographiques
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Notes
-
[*]
Université Paris 13, cepn. Correspondance : Campus de Villetaneuse, 99 avenue Jean-Baptiste Clément, 93430 Villetaneuse. Courriel : carre.emnl@gmail.com (auteur correspondant).
-
[**]
Paris School of Economics – Université Paris 1 Panthéon Sorbonne. Correspondance : Maison des Sciences économiques, 106-112 boulevard de l’hôpital, 75647 Paris cedex 13. Courriel : couppey@univ-paris1.fr
-
[***]
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, Labex Régulation Financière (Réfi). Correspondance : Maison des Sciences économiques, 106-112 boulevardd de l’Hôpital, 75647 Paris cedex 13. Courriel : salim.dehmej@univ-paris1.fr
-
[1]
Suite aux contributions séminales de Smets et Wouters [2003], Christiano et al. [2005].
-
[2]
La base de données est détaillée dans le tableau 4.
-
[3]
Cette méthode a néanmoins une limite car le coefficient de réponse à la stabilité financière dans la règle de Taylor, retenu dans les modèles de notre méta-analyse, que ceux-ci soient optimisés, estimés ou calibrés, peut être influencé par la nature de la cible financière (crédit, prix d’actifs…), l’unité de mesure (milliers, millions…) et la manière dont l’écart financier est calculé (ratio, écart à une moyenne historique…). Il n’est pas possible de remédier complètement à ce problème du fait que, si les coefficients estimés ou calibrés s’obtiennent simplement en lisant un article, il n’en va pas de même pour les séries chronologiques utilisées sans coût rédhibitoire. Du fait de la pratique des économètres et des modélisateurs, surtout sur un sujet aussi balisé que l’estimation de la rt ou de la rta, on peut toutefois légitimement penser que les économètres et les modélisateurs ont depuis longtemps opté pour des écritures ou des spécifications garantissant une très grande homogénéité des ordres de grandeur des variables exogènes et endogènes retenues ; de la sorte, les seuls coefficients contiennent une information utile en ce qui concerne l’impact des différentes variables exogènes. Enfin, s’agissant de la diversité des dimensions de la stabilité financière et des cibles diverses qui peuvent être choisies pour augmenter la règle de Taylor, nous remédions partiellement au problème en construisant une variable muette qui distingue les règles de Taylor augmentées d’une cible de prix d’actifs de celles augmentées d’une variable en lien avec le crédit (cf. infra).
-
[4]
Assenmacher-Wesche [2006].
-
[5]
Nous nous devons de justifier d’avoir ainsi construit notre variable muette en distinguant d’un côté l’estimation et l’optimisation et de l’autre la calibration. La distinction n’est a priori pas totalement évidente puisque la calibration s’appuie parfois sur des valeurs issues d’estimations économétriques, de même d’ailleurs qu’en cas d’optimisation le modélisateur recourt parfois à un intervalle de valeurs (priors) influencé par des estimations économétriques. Notre choix vient du fait qu’un modèle basé sur optimisation/estimation peut engendrer un coefficient devant l’écart financier égal à 0, ce qui ne peut pas être le cas si les coefficients sont issus d’une calibration (nous excluons par définition les modèles qui calibrent à 0 le coefficient de l’écart financier). En outre, cela nous permet aussi de distinguer les cas où l’intervention des auteurs prime (calibration), de ceux où prime un calcul (qu’il s’agisse d’un modèle théorique dans le cas de l’optimisation ou d’un traitement économétrique des données dans le cas de l’estimation).
-
[6]
Cet argument vaut avant tout pour les coefficients de réponse issus d’une optimisation mais, comme 60 % des coefficients de réponse sont obtenus ainsi, on peut le considérer prédominant pour discuter du signe attendu de la variable considérée.
-
[7]
À titre d’exemple, un ratio ltv de 80 % signifie que l’emprunteur a la possibilité d’emprunter 80 % de la valeur de l’actif qu’il acquiert et qu’il doit donc apporter les 20 % restants. Un ratio lti limite, quant à lui, le montant emprunté en fonction du revenu de l’emprunteur.
-
[8]
Notons que l’absence d’uniformité ne concerne pas exclusivement la cible financière. On la retrouve aussi en ce qui concerne les mesures de l’inflation dans la règle de Taylor. Le gap d’inflation peut provenir de l’inflation courante avec diverses mesures (indice des prix à la consommation cpi (consumer price index), indice pce (personal consumption expenditures), indice des prix de détail, déflateur du pib…), de l’inflation sous-jacente avec diverses mesures (cpi et pce hors prix de l’énergie et des biens alimentaires, cpix, cpif…), ou de prévisions d’inflation (points morts, cf, spf, Michigan Survey…)
-
[9]
Voir les travaux de la bri (Moreno [2011]), du fmi (Lim et al. [2011]) ou ceux de Hahm et al. [2012].
-
[10]
Ozkan et Unsal [2011] indiquent à plusieurs reprises que leurs calibrations et la dynamique de leur modèle valent pour les pays émergents. Glocker et Towbin [2012] parlent des économies émergentes dans leur résumé et leur introduction. Pour Benigno et al. [2011], le pays correspondant à leur hypothèse de petite économie ouverte est moins explicite. Cependant, les quatre articles de Benigno cités dans la bibliographie de Benigno et al. [2011] traitant de petites économies ouvertes sont calibrés sur des économies émergentes (Mexique ou Argentine).