Couverture de ECRU_382

Article de revue

Analyse compréhensive de la performance globale des exploitations agricoles en circuits courts et de proximité

Pages 17 à 36

Notes

  • [1]
     Les traitements statistiques ont été réalisés sous le logiciel R, version 4.1.2, en mobilisant principalement d’une part les packages FactoMineR pour l’analyse multivariée et, d’autre part, textometry, ca, ape et proxy pour les analyses textuelles.
  • [2]
     Si l’analyse du sous-corpus n° 1 repose sur un plus faible nombre de citations, le nombre et la diversité de formes analysées sont néanmoins très satisfaisants et permettent l’analyse des résultats et leur comparaison avec ceux issus de l’analyse textuelle du sous-corpus n° 2.

1 Les circuits courts et de proximité (CCP) font l’objet d’une attention toujours croissante en termes de recherche sur les systèmes alimentaires depuis les années 2000 (Chiffoleau et Dourian, 2020). Ils font partie des différents types de circuits de distribution alimentaire (Marsden et al., 2000) avec la particularité de raccourcir la distance relationnelle et géographique entre les producteurs et les consommateurs (Fénéchère et al., 2008 ; Chevallier et al., 2013). Tout un pan de la littérature s’est attaché à définir et caractériser la diversité de ces circuits en permettant de clarifier le vocabulaire, au moins pour partie. Si la définition du caractère court de ces circuits semble stabilisée (au plus un intermédiaire entre producteur et consommateur) (ministère de l’Agriculture, 2009), la notion de proximité ou de circuit local reste à préciser. Elle renvoie le plus souvent à une distance raisonnable entre les lieux de production et de consommation (Ademe, 2017), distance variable mais souvent assimilée à 80 km (Chaffotte et Chiffoleau, 2007 ; Mundler, 2007 ; Chiffoleau et Prévost, 2008 ; Maréchal, 2008). En 2020, 23 % des exploitations vendaient en circuits courts en France (Recensement agricole, 2020). En 2010, un exploitant sur cinq avait opté pour ce type de circuit pour au moins une de ses productions, particulièrement en ce qui concerne l’apiculture, les fruits et légumes et la viticulture (Agreste Aquitaine, 2012).

2 Les CCP répondent globalement à i) la demande des consommateurs pour accéder à une nourriture sûre, saine, de qualité et durable (Goodman, 2003) et ii) la nécessité pour les producteurs de capter une part plus importante de la valeur ajoutée des produits (Kneafsey et al., 2013). Ils sont souvent présentés comme un moyen d’atteindre des objectifs de durabilité quels que soient les acteurs de la chaîne de valeur considérés (producteurs, consommateurs, acteurs des filières et des territoires) (Maréchal, 2008 ; Traversac, 2011 ; Chiffoleau, 2019). Parmi ces objectifs, nous retrouvons l’amélioration de la situation économique des exploitations agricoles, l’assurance d’une transparence quant à la qualité et l’origine des produits, le respect d’un patrimoine local associé à une image du métier renouvelée, ainsi que l’existence d’un lien social fort entre agriculteurs et consommateurs sur un même territoire (Chiffoleau et Prévost, 2012 ; IUFN, 2012). La littérature foisonnante des dernières années propose de multiples travaux portant sur la performance et la durabilité des CCP. Elle montre les bénéfices sociaux de ces circuits, mais les résultats sont moins clairs et tranchés concernant leur impact environnemental et économique (Chiffoleau et Dourian, 2020). Chiffoleau et Prévost (2012) ont mis en évidence des attentes des producteurs vis-à-vis des circuits courts comme l’efficacité du rapport entre coût des inputs et valeur de la production, et le respect d’un patrimoine local, des techniques productives, des variétés cultivées et de l’image du métier. Il existe cependant assez peu de travaux explicitant le rôle que jouent les CCP dans la performance des exploitations agricoles à partir des objectifs que se fixent les agriculteurs (Mundler et Laughrea, 2016) tout en considérant la performance globale de ces circuits. Pourtant, de nombreuses initiatives émergent autour des CCP avec le développement croissant de systèmes alimentaires locaux. Il est donc nécessaire, pour les agriculteurs qui s’installent ou souhaitent développer ce mode de commercialisation, comme pour les structures qui les accompagnent, de mieux connaître la performance de ces circuits afin de mieux accompagner leur développement et les changements d’échelle.

3 Cet article analyse la performance globale des CCP définie comme l’atteinte des objectifs stratégiques (à la fois économiques, environnementaux et sociaux) que fixent les acteurs de la production pour eux-mêmes, pour leurs exploitations et vis-à-vis de leurs parties prenantes. Sur le plan méthodologique, nous nous appuyons sur l’expression d’agriculteurs recueillie grâce une série d’entretiens semi-directifs menés en Aquitaine sur trois filières emblématiques de la région (maraîchage, ovin lait, bovin viande). Nous objectivons ensuite le discours des agriculteurs en nous appuyant sur une double approche combinant analyse par clustering et analyse textuelle, de manière à mettre en évidence i) dans quelle mesure les CCP sont facteurs de performance pour les exploitations, ii) si les agriculteurs ont une approche globale de la performance et iii) s’ils considèrent l’ensemble de leurs parties prenantes.

4 La première partie présente le cadre théorique et les éléments de performance des CCP issus de la littérature. La deuxième partie décrit la méthode retenue, ainsi que les filières étudiées et les exploitations agricoles enquêtées. Enfin, nous présentons les principaux résultats obtenus, avant de les discuter et de conclure.

Cadre théorique pour l’évaluation de la performance globale des exploitations agricoles en CCP

1. Performance globale des exploitations agricoles en CCP

5 Dans la littérature, le concept de performance se rapporte à la fois à l’optimisation des moyens, mais aussi au pilotage des objectifs stratégiques (Platet-Pierrot, 2009). La performance est contingente aux objectifs fixés à atteindre, qui ont longtemps été des objectifs économiques et financiers. C’est à partir de la fin des années 1980 et de la montée en puissance du concept de développement durable (Brundtland, 1987) que le sens donné au concept de performance a évolué depuis le strict prisme de la rentabilité économique, vers une vision élargie ou plurielle de la performance. Le terme « global » de la performance vise à souligner que la performance doit être lue en référence au développement durable comme une combinaison et une atteinte d’objectifs aussi bien économiques que sociaux et environnementaux. Le concept de performance globale renvoie ainsi à l’évaluation de la mise en œuvre par les entreprises du concept de développement durable dans leurs activités (Capron et Quairel-Lanoizelée, 2006 ; Dohou et Berland, 2007 ; Marcenac et al., 2007) et se conçoit comme « l’agrégation des performances économiques, sociales et environnementales » de l’entreprise. Appliquée à l’exploitation agricole, elle est définie comme « le degré d’atteinte de la durabilité d’une exploitation agricole » (Zahm et Mouchet, 2013). Les objectifs concernent à la fois la dimension agroécologique des activités, socio -territoriale de l’agriculture et économique de l’exploitation agricole. Plusieurs revues de la littérature récentes ont permis de faire l’état des lieux des connaissances sur la durabilité des CCP (Deverre et Lamine, 2010 ; Michel-Villarreal et al., 2019 ; Chiffoleau et Dourian, 2020 ; Stein et Santini, 2021). La littérature semble avoir suivi les évolutions du concept de performance en passant d’articles centrés sur des indicateurs économiques classiques à des analyses multicritères basées sur des indicateurs socio-économiques intégrant les différentes dimensions du développement durable. Globalement, les auteurs montrent que les CCP créent d’autres richesses que de la valeur économique (Chiffoleau, 2019). Ils s’accordent principalement sur les bénéfices sociaux des CCP, alors que les résultats concernant les dimensions économiques et environnementales sont plus hétérogènes et que les dimensions santé et gouvernance de ces circuits restent relativement inexplorées, au moins dans un contexte européen (Chiffoleau et Dourian, 2020). Ils concluent sur la nécessité d’approfondissement du sujet et notamment sur le besoin d’analyses systémiques et multidimensionnelles en lien avec les différentes dimensions du développement durable.

2. Des objectifs stratégiques autocentrés et étendus à l’ensemble des parties prenantes

6 Une approche générale de la performance globale renvoie également à la question de la définition des frontières de l’agriculture durable, en lien d’une part avec les objectifs internes à l’exploitation, et d’autre part avec les objectifs sociétaux auxquels les agriculteurs et l’agriculture doivent répondre (Zahm et al., 2015). En mobilisant les travaux de Godard et Hubert (2002) et de Terrier et al. (2013), nous prenons ainsi en compte (i) la durabilité restreinte, qui qualifie les objectifs autocentrés de l’agriculteur et renvoie à des objectifs internes de durabilité en lien avec ses attentes individuelles ou pour l’exploitation (et ses salariés) et (ii) la durabilité étendue, qui identifie les objectifs sociétaux (externes) d’une exploitation agricole contribuant au développement durable de niveaux d’organisation plus englobants (territoire, collectivité, pays, société). Sur le plan théorique, en écho au concept de durabilité étendue, le concept de performance globale renvoie à la vision élargie de la performance développée dans la théorie des parties prenantes (Freeman, 1984), qui définit « une partie prenante comme tout groupe ou individu susceptible d’affecter ou d’être affecté par l’accomplissement des objectifs de l’entreprise ». Cette théorie propose une vision incluant l’entreprise (ici l’exploitation agricole) et les attentes du dirigeant (ici l’agriculteur) pour lui-même et pour le reste de la société, en opposition à la vision conventionnelle micro-économique où l’entreprise est lue comme une simple boîte noire transformant des matières premières en biens et services. Le cadre analytique de la théorie des parties prenantes offre une vision systémique où la performance globale d’une exploitation agricole peut être analysée à travers ses relations avec ses différentes parties prenantes dans une approche politique qui renvoie à la nécessité pour l’entreprise de prendre en compte la satisfaction de ces parties prenantes (Morin et al., 1994 ; Chiffoleau et Dourian, 2020). De Vries et al. (2017) montrent, dans le cas d’exploitations conduites en agriculture biologique vendant en CCP, que la performance dépend non seulement de facteurs à l’échelle de l’exploitation, mais également d’éléments à l’échelle des filières et/ou des territoires (pour la transformation par exemple). Stein et Santini (2021) montrent également que les systèmes alimentaires locaux, s’ils ne contribuent pas forcément à la sécurité et à la résilience alimentaires, peuvent contribuer au développement rural, soulignant la dimension multiscalaire de la performance (Alonso Ugaglia et al., 2020). En définitive, analyser la performance globale des CCP pour une exploitation agricole implique de revenir également sur les frontières assignées à l’entreprise et sur ses relations avec son environnement.

3. Les attentes des agriculteurs en CCP

7 Nous identifions dans la littérature les attentes des agriculteurs concernant la performance des CCP avec une lecture attachée au cadre théorique de la performance globale incluant les durabilités restreinte et étendue. Les travaux identifiés couvrent les trois dimensions du développement durable. Ils soulignent que les motivations des agriculteurs sont d’abord d’ordre économique avec l’ambition d’obtenir un meilleur revenu – ce qui passe par la fixation de prix plus équitables ou une meilleure captation de la valeur ajoutée (Capt et al., 2011 ; Chiffoleau et al., 2013 ; Morizot-Braud et Gauche, 2016 ; Malak-Rawlikowska et al., 2019 ; Cesaro et al., 2020). Mais les exploitations commercialisant en CCP peuvent aussi avoir une performance économique amoindrie, par exemple dans la filière bovin viande (CERD, 2013). La contribution à l’emploi des CCP dans les exploitations et sur les territoires est également mise en évidence (Mundler et Jean-Gagnon, 2019). Ensuite, la dimension sociale tient une place importante, puisqu’elle motive souvent l’émergence ou le renouvellement des formes de CCP (Deverre et Lamine, 2010). Ils facilitent également la création d’un lien social et d’une relation de confiance entre producteurs et consommateurs (Hinrichs, 2000 ; Sage, 2003) qui procure à l’agriculteur un sentiment de reconnaissance de son travail et de son produit (Chiffoleau et al., 2013). Cette reconnaissance participe à améliorer le bien-être au travail des agriculteurs et leur qualité de vie en général (Allain, 2015). Mais la commercialisation en CCP est souvent accompagnée d’une augmentation de la charge de travail (Galt, 2013) et d’une organisation du travail plus complexe dans les exploitations. Toujours sur le plan social, ces circuits semblent contribuer à plus d’égalité des genres (UNIDO, 2020) et à l’intégration des femmes qui sont plus nombreuses que dans les exploitations en circuits longs (Malak-Rawlikowska et al., 2019). Enfin, concernant la performance environnementale, il existe un débat non tranché au sujet de leur empreinte écologique, notamment en termes de logistique et de transport (Schlich et al., 2006 ; Mundler et Rumpus, 2012 ; Vaillant et al., 2017). Mais le transport n’est pas la seule externalité à prendre en compte, puisque la production agricole elle-même représente la majeure partie des émissions (Barbier et al., 2019). Si un éventuel impact environnemental positif des CCP sur les pratiques agricoles est encore à démontrer, Millet-Amrani (2020) a mis en évidence l’adoption de pratiques plus écologiques dans le cas particulier de la vente directe en maraîchage. Le débat sur les formes que peut prendre la massification des CCP dans le cadre d’un changement d’échelle reste ouvert, entre augmentation du nombre d’initiatives avec des unités de production à taille humaine vs développement de beaucoup plus grandes unités de production en CCP (Chiffoleau et Dourian, 2020). Le tableau 1 présente les 10 variables construites à partir de la littérature relative à la performance globale des CCP pour les exploitations agricoles. Elles couvrent à la fois les trois dimensions du développement durable et les durabilités restreinte (AUT1, AUT2, BEH1, VAL1, DYN1) et étendue (VAL2, VAL3, ENV1, PROD1, GLOB1).

Tableau 1. Variables de performance globale des CCP pour les exploitations agricoles identifiées dans la littérature

Figure 0

Tableau 1. Variables de performance globale des CCP pour les exploitations agricoles identifiées dans la littérature

Source : les auteurs.

Méthodologie de recherche et échantillon analysé

1. Des entretiens semi-directifs

8 La performance est particulièrement délicate à évaluer car « la performance n’existe pas comme une réalité objective, elle est le fruit d’une construction sociale » (Naro, 2005). Nous avons ainsi analysé la construction de la performance des CCP au prisme des attentes des agriculteurs pour eux-mêmes, leurs exploitations et vis-à-vis de leurs parties prenantes, c’est-à-dire selon les objectifs stratégiques qu’ils se fixent plutôt que de la mesurer via des indicateurs normés (Malak-Rawlikowska et al., 2019) ou via des objectifs fixés par des tiers. Nous avons pour cela mené des entretiens semi-directifs auprès d’agriculteurs commercialisant en CCP. Cette technique de collecte de données est basée sur une approche qualitative et interprétative dans une logique compréhensive. Il s’agit de saisir l’explication d’un phénomène complexe tel qu’il est perçu par la personne interviewée. L’échange ressemble plus à une conversation qu’à un questionnaire fermé (Imbert, 2010) à partir d’un guide d’entretien construit autour de six grandes thématiques (Profil de l’exploitation et de l’exploitant, Place des CCP, Rapport au Territoire, Organisation du travail-Production, Commercialisation, Besoins). Lors de l’entretien, tous les thèmes sont abordés de façon exhaustive, sans forcément suivre d’ordre précis et en laissant l’interviewé libre dans son discours. Des questions de relance permettent de s’assurer que ce qui devait être abordé par l’exploitant l’a bien été, permettant ainsi de considérer que s’il ne s’exprime pas sur un sujet, cela signifie qu’il n’établit pas de lien entre la thématique et la performance des CCP. Tous les entretiens ont été intégralement transcrits.

2. Une étude sur trois filières emblématiques de l’ex-région Aquitaine

9 L’étude a porté sur trois filières emblématiques de l’ex-région Aquitaine, région particulièrement dynamique en termes de CCP (Agreste Aquitaine, 2012) : ovin lait (17 % des exploitations transforment au moins une partie de leur lait à la ferme et le vendent sur place en 2010), bovin viande (filière historique confrontée à la nécessité de découpe et transformation des animaux pour la commercialisation en CCP) et maraîchage (presque 50 % des exploitations maraîchères de la région font plus de 75 % de leur chiffre d’affaires [CA] en circuits courts) (Agreste Aquitaine, 2012). Ces filières emblématiques de la région ont été choisies pour leur importance en termes économiques, mais aussi parce qu’elles sont présentes sur toute la région bien que parfois concentrées sur une portion du territoire (comme pour ovin lait par exemple). Ce sont également des filières intéressantes du point de vue de leurs caractéristiques qui interrogent les attributs des CCP : l’étape de la transformation pour la filière ovin lait, la fragilité des produits et l’historicité de ce type de circuit pour le maraîchage (marchés) et la nécessité de la présence d’abattoirs à proximité pour la filière bovin viande. Les caractéristiques des 48 exploitations commercialisant tout ou partie de leur production en CCP interviewées en 2017 et 2018 sont présentées dans le tableau 2.

Tableau 2. Caractéristiques des 48 exploitations enquêtées

Figure 1

Tableau 2. Caractéristiques des 48 exploitations enquêtées

Source : les auteurs.

3. Deux approches multivariées complémentaires

10 À partir de la retranscription des 48 entretiens menés, nous proposons une méthode originale articulant deux analyses statistiques multivariées [1], l’une sur des variables correspondant aux attentes potentielles des agriculteurs issues de la littérature (clustering), l’autre plus directement sur les citations des acteurs (analyse statistique textuelle). La mise en complémentarité de ces deux approches nous permet à la fois d’analyser la correspondance entre les attentes vis-à-vis des CCP exprimées par les exploitants et celles relevées par la littérature, tout en précisant la nature et le poids des représentations et des logiques qui sous-tendent ces attentes.

Clustering

11 Nous avons identifié à partir des retranscriptions, pour chaque exploitation, les verbatims ou citations se rapportant à la performance globale des CCP. Ces verbatims ont ensuite été utilisés pour qualifier le positionnement des agriculteurs par rapport aux 10 variables en trois catégories : « Validée », « Rejetée » et « Absence de lien ». Ce travail a mené à la construction d’une matrice qui indique la réponse de chacun des 48 agriculteurs (i.e. les individus statistiques) à chacune des 10 attentes formalisées (i.e. les variables) et qui est décrite dans le tableau 3.

Tableau 3. Dénombrement des réponses des agriculteurs aux 10 variables d’attentes. Les pourcentages sont exprimés à l’échelle de chaque variable

Figure 2

Tableau 3. Dénombrement des réponses des agriculteurs aux 10 variables d’attentes. Les pourcentages sont exprimés à l’échelle de chaque variable

Source : les auteurs.

12 Une analyse factorielle exploratoire est ensuite menée sur cette matrice afin d’observer s’il existe des groupes d’agriculteurs homogènes quant à leurs attentes. Le type de données traitées (qualitatives) préconiserait la réalisation d’une Analyse des correspondances multiples (ACM) pour synthétiser l’information complexe portée par les 480 réponses (48 agriculteurs * 10 variables) en des axes synthétiques. Néanmoins, la lecture du tableau 3 indique que la modalité « Rejetée » est systématiquement moins représentée que les autres modalités de réponse (9,58 % en moyenne, contre 45 % pour « Validée » et « Absence de lien »), ce qui implique un risque élevé de biais dans la lecture des axes factoriels (qui seraient fortement influencés par les modalités négatives). Nous procédons donc au calcul d’une matrice de distances entre les individus en utilisant la mesure du ϕ2 (variante du χ2 utilisée pour l’ACM) sur laquelle nous appliquons une Classification ascendante hiérarchique (CAH) avec la méthode de Ward comme critère d’agrégation. Nous identifions ainsi deux groupes d’agriculteurs aux attentes distinctes. Ces groupes sont décrits i) par rapport à la similitude de leurs profils de positionnement quant aux dix variables (attentes vis-à-vis des CCP) et ii) par le biais de variables illustratives externes telles que UTH, SAU, territoire, issu ou non du milieu agricole, pourcentage du chiffre d’affaires en CCP, certification Agriculture Biologique (AB), autres labels de qualité, vente directe à la ferme et type de filière.

Une analyse textuelle des représentations et des logiques portées par les agriculteurs

13 L’intérêt de l’analyse statistique textuelle est d’aller au-delà des liens de corrélation et de comprendre la nature et le poids des représentations et des logiques propres à chaque groupe identifié par la CAH. Elle permet de mettre en évidence les idées récurrentes exprimées par les agriculteurs des différents groupes. Dans le cadre méthodologique formalisé par Reinert (2008), une Classification hiérarchique descendante (CHD) est réalisée sur les verbatims ou citations (correspondant dans ce cadre aux Unités de contexte initiales [UCI]) de chaque groupe. Cette classification n’est possible qu’après une lemmatisation préalable du corpus, permettant d’identifier les formes « actives » et « supplémentaires » composant chaque citation. Les formes actives identifiées renvoient aux mots qui font sens, à savoir adverbes, adjectifs, formes non reconnues, noms communs et verbes. Elles se distinguent des formes dites supplémentaires (adjectif démonstratif, nombre, conjonction, préposition) qui dépendent de la situation de communication. Chaque UCI étant caractérisée par la présence ou l’absence de formes actives, une matrice de présence/absence est construite, puis transformée en matrice de distances permettant l’implémentation d’une CHD selon les principes statistiques habituels (Reinert, 2008).

14 À partir de cette matrice, des classes de formes sont calculées en regroupant celles qui tendent à être présentes dans les mêmes UCI et qui sont aussi absentes que possible des UCI d’une autre classe, autrement dit en minimisant la variance intragroupe et en maximisant la variance intergroupe. La classification vise donc à « regrouper des mots qui présentent des « environnements » de cooccurrence comparables » (Marchand, 1998, cité par Bart, 2011) ou « mondes lexicaux » (Reinert, 1997). Les classes lexicales issues de la CHD sont principalement interprétées au regard de leur poids dans la classification (c’est-à-dire du nombre de citations qui leur sont associées), du χ2 d’association des citations et des formes significatives aux classes. Le χ2, qui ne doit pas être confondu avec le test statistique, est un indicateur du fort ou faible lien entre une forme et sa classe et met ainsi en évidence les termes les plus représentatifs de cette classe. Ainsi, pour chaque corpus ou sous-corpus, nous analysons d’abord les résultats généraux de la CHD, puis les profils lexicaux et citations de chaque classe issue de la CHD.

Résultats

1. Des constructions de la performance différenciées selon deux groupes d’agriculteurs

15 Le dendrogramme illustrant les résultats de la CAH est présenté dans la figure 1. Nous avons retenu un niveau de coupe du dendrogramme correspondant à deux groupes d’exploitations homogènes présentant des réponses similaires aux attentes. Afin de caractériser ces groupes, des statistiques descriptives ont d’abord été réalisées à la fois sur la réponse des agriculteurs aux attentes (tableau 4), puis sur des variables illustratives externes (tableau 5).

Figure 1. Dendrogramme illustrant les résultats de la CAH appliquée sur une matrice de distances du ϕ2 de la réponse des 48 agriculteurs aux 10 attentes

Figure 3

Figure 1. Dendrogramme illustrant les résultats de la CAH appliquée sur une matrice de distances du ϕ2 de la réponse des 48 agriculteurs aux 10 attentes

Note : un niveau de coupe correspondant à 2 groupes homogènes a été retenu.
Source : les auteurs.

Tableau 4. Dénombrement des réponses des agriculteurs de chacun des groupes aux 10 variables d’attentes

Figure 4

Tableau 4. Dénombrement des réponses des agriculteurs de chacun des groupes aux 10 variables d’attentes

Note : les pourcentages sont exprimés à l’échelle de chaque variable pour chaque groupe.
Source : les auteurs.

Tableau 5. Caractérisation des exploitations de chaque groupe

Figure 5

Tableau 5. Caractérisation des exploitations de chaque groupe

Notes : les pourcentages sont exprimés à l’échelle de chaque variable pour chaque groupe ; Les statistiques sur les variables numériques se lisent : moyenne (±écart-type) médiane.
Source : les auteurs.

16 Le groupe 1 se distingue par une forte fréquence de non-expression en termes d’attentes vis-à-vis de la performance des CCP (60 % de réponse « Absence de lien »). Les attentes des agriculteurs de ce groupe en termes de performance sont donc assez peu nombreuses. Elles sont en fait concentrées sur la valorisation économique via les CCP (VAL1), objectif qui relève de la durabilité restreinte de l’exploitation agricole. Le groupe 2 valide aussi très majoritairement VAL1 (92 %), mais la CAH met en exergue un nombre d’attentes supérieur pour ce groupe (58 % de réponses « Validée »), pour lequel disposer d’un outil de production à taille humaine (PROD1), le bien-être au travail (BEH1), l’autonomie dans le choix du système de production (AUT2) et la revalorisation du métier d’agriculteur (VAL3) constituent des attentes fortes (du plus commun au plus rare). Nous remarquons ainsi que les agriculteurs de ce groupe considèrent aussi bien des objectifs de durabilité restreinte (VAL1, BEH1, AUT2) que des objectifs qui relèvent de la durabilité étendue d’une exploitation (PROD1, VAL3) mais accordent peu d’importance à leurs parties prenantes dans la définition de leurs objectifs. Le groupe 2 est essentiellement composé d’éleveurs ovin lait. Ceux-ci se situant majoritairement dans notre échantillon sur le territoire du Pays Basque, nous observons pour ce groupe une forte représentation des Pyrénées-Atlantiques (15 individus). Enfin, la confrontation des groupes à des variables illustratives autres que la filière et le territoire montre que la SAU ne semble pas les différencier (médiane), même si nous observons une variabilité beaucoup moins grande pour le groupe 2. Ce même groupe présente un pourcentage du chiffre d’affaires en CCP plus important que le groupe 1 et revendique plus souvent des labels de qualité des produits (79 % contre 29 % pour le groupe 1). Nous constatons dans les deux cas un fort pourcentage d’exploitations certifiées en AB (respectivement 46 et 42 % pour le groupe 1 et le groupe 2). Enfin nous notons que les individus des groupes 1 et 2 sont majoritairement issus du milieu agricole, avec une tendance plus marquée pour le groupe 1 (respectivement 92 % et 58 %).

2. Construction de la performance différenciée expliquée par les spécificités de discours des agriculteurs

17 À la suite de cette étape de clustering, nous précisons les caractéristiques des deux groupes au regard de leurs attentes en leur donnant du sens grâce à une analyse textuelle sur les deux sous-corpus [2] compilant respectivement les citations des agriculteurs du groupe 1 (494 citations pour 24 agriculteurs) et du groupe 2 (1467 citations pour 24 agriculteurs). Chaque analyse repose sur un fort taux de classement dans les deux cas (respectivement 80 % et 97 %), ce qui contribue à la robustesse des résultats. Trois classes lexicales, détaillées dans les tableaux 6 et 7, structurent chacun des sous-corpus.

18 Pour chaque sous-corpus, nous portons une attention particulière aux classes lexicales qui structurent le discours des agriculteurs pour révéler les tensions dans la construction de la performance inhérentes au groupe étudié. Sont reprises pour chacune de ces classes, les formes lexicales et parfois les citations représentatives de celles-ci.

Tableau 6. Analyse textuelle des 494 citations d’entretiens du groupe 1

Classe n° 2 (18,4 %)Classe n° 1 (62 %)Classe n° 3 (19,6 %)
Formesχ2Formesχ2Formesχ2
choix43.90***gens29.54***aide54.97***
production38.96***biologique25.27***chambre53.61***
intermédiaire31.63***client17.78***aider49.27***
valeur31.63***acheter15.61***subvention29.14***
diversité31.63***voir13.35***installer23.67***
difficile30.50***travail10.87***agriculture21.83***
circuit25.99***collègue10.23***transformation21.83***
salade25.99***travailler9.63***jeune20.19***
prix23.40***aller9.62***contrat19.70***
topinambour22.47***prendre9.54***état19.70***
libre21.52***monde7.79***plant16.53***
amap20.37***heure7.60***gaec16.53***
ail17.93***valoir6.94***haie16.53***
melon17.93***dernier6.94***pac16.53***
fixe17.93***marché6.86***dossier16.53***
semer17.93***penser6.66***soutenir16.53***
emprunt17.12***fois6.56**installation16.53***
gérer14.52***local6.41**compagnie16.53***
fruit14.30***parler6.06**atelier16.53***
pruneau13.42***venir5.99**serrer16.47***
variables étoiléesχ2-variables étoiléesχ2Variables étoiléesχ2-
filière : maraîchage3.67**filière : ovin lait3.95**Vienne2.77**
---Pays Basque3.72----
Figure 6

Tableau 6. Analyse textuelle des 494 citations d’entretiens du groupe 1

Source : les auteurs.

19 Le discours du groupe 1, figuré par le tableau 6, est peu structuré par des attentes en termes de performance des CCP. Les seules attentes fortes polarisant le discours sont la viabilité économique (attente renvoyant à VAL1, majoritairement validée par ce groupe) et la revalorisation du métier d’agriculteur (attente correspondant à VAL3). La vision de la performance exprimée par ce groupe repose plus fortement sur les conditions de la performance (contraintes et leviers) jouant sur la réalisation de leur projet de commercialisation en CCP : la mobilisation des SIQO (classe n° 1), la diversification des produits (classe n° 2) et la perception d’aides financières (classe n° 3). L’usage des formes « choix », « aide », « installation » semble caractéristique d’une phase particulière correspondant, dans la trajectoire de l’exploitation, à la construction et/ou la (re)définition du projet agricole et de la place des CCP dans ce projet, ce qui expliquerait une attention et une expression plus forte des agriculteurs portés par les éléments conditionnant la réussite de leur projet. La classe n° 1 pèse fortement sur le discours des agriculteurs de ce groupe (62 % des citations analysées). Le lexique de cette classe est mobilisé pour décrire le rapport aux « gens » (les consommateurs) avec une forte importance de la relation de confiance entre producteurs et consommateurs permise par la proximité relationnelle et géographique dans la construction/redéfinition du projet agricole. Les moyens d’assurer cette confiance sont discutés notamment par l’évocation de la demande de produits labellisés (et la forte attente sociétale associée). Le recours aux labels est ainsi un choix parfois retenu :

20

« Pour moi le label biologique aujourd’hui […] il me semble indispensable pour ce que je fais parce que pour les gens c’est un gage de qualité : je n’utilise pas de produits sur mon exploitation, je suis contrôlé. » (E25).

21 Il peut également être jugé inutile notamment dans le cas d’une forte proximité géographique et relationnelle avec le consommateur :

22

« Dans les AMAPs ils s’en fichent qu’on soit certifiés ils veulent qu’on soit en biologique mais la certification ils s’en fichent. » (E29).

23 Mais la construction de cette confiance, qu’elle passe par la labellisation et/ou par la proximité géographique, est discutée par les agriculteurs du groupe et associée étroitement à leur maîtrise de la charge de travail qu’elle implique (« heure », « travail »).

24 Si elle est proche statistiquement de la classe n° 1, la classe n° 2 de ce sous-corpus met en lumière les particularités discursives des maraîchers, surreprésentés dans cette classe. Elle montre notamment une cooccurrence de mots traduisant des idées plus fréquemment exprimées par les maraîchers et relatives à la construction de l’offre, aux déterminants de choix de production pour satisfaire la demande ou encore au lien entre diversité des produits et viabilité économique. La classe n° 3 de ce sous-corpus n° 1, qui ne semble pas être le marqueur d’une filière en particulier, discute beaucoup le rapport à l’aide publique (20 % des citations), mais aussi à l’accompagnement. La thématique de « l’installation » est souvent évoquée que ce soit pour l’accompagnement financier, administratif ou technique, avec une réflexion autour du projet, notamment de la « transformation » (filière ovin lait). Une forme d’insatisfaction (« personne », « ni », « rien ») semble exprimée au travers des mots outils employés pour discuter l’aide européenne (« PAC »), nationale, (« État »), voire régionale (« chambre »).

25 Illustrée par le tableau 7, la structure lexicale du discours du groupe 2 suit à peu près le même schéma que le discours du groupe 1 : des classes n° 1 et n° 2 autour des pratiques de production/commercialisation, une classe n° 3 sur la question de l’accompagnement. En revanche, le contenu lexical, le choix des mots et les idées fortes sont différents. Le groupe 2 porte un discours plus marqué en termes d’attentes vis-à-vis des CCP. Le discours traduit une forme de maturité vis-à-vis des CCP que nous pouvons relier, au moins en partie, à une historicité des CCP sur les territoires concernés. Le groupe 2 est en effet notamment caractérisé par la dominance des exploitations ovines du Pays Basque, filière territorialisée marquée par un développement sensible et plus ancien des CCP. D’un point de vue lexical, ressort dans le discours de ces agriculteurs une dimension territoriale forte, qu’ils associent particulièrement aux enjeux d’accompagnement (classe n° 3). Dans cette classe, ce ne sont pas les acteurs nationaux et européens qui sont évoqués contrairement au groupe précédent ; l’accent est mis ici sur les réseaux professionnels locaux et les collectifs locaux, mais aussi sur les collectivités territoriales. Les termes « collectifs », « association », « communauté », « collectivité » sont par ailleurs associés à des formes verbales telles que « créer », « participer », « contribuer ».

Tableau 7. Analyse textuelle des 1467 citations d’entretiens du groupe 2

Figure 7
Classe n° 2 (11 %)Classe n° 1 (48,8 %)Classe n° 3 (40,1 %)
Formesχ2-Formesχ2-Formesχ2-
travail144.32***vendre79.53***aider75.47***
contact70.24***marché76.12***syndicat53.54***
retour65.88***fromage70.27***chambre51.41***
pratique61.87***prendre45.24***projet43.36***
avantage56.40***produire45.16***agriculture42.41***
direct54.31***produit40.82***idoki39.18***
changement52.54***aller37.57***installation38.45***
fou42.99***prix31.88***créer37.82***
tributaire40.46***veau30.23***agricole36.95***
condition34.09***heure26.85***activité33.68***
conduite33.54***magasin25.29***territoire30.82***
fragilité32.35***cher25.08***formation29.10***
tache32.35***brebis24.58***niveau28.17***
planifier32.35***client24.03***pays27.27***
long27.58***colis23.41***commun27.24***
contraint25.03***frais23.41***structure26.95***
vie24.92***cochon22.65***terre24.71***
relationnel24.31***viande20.77***participer24.71***
week-end24.31***kilo20.50***collectif24.49***
peine24.31***livraison19.74***agriculteur24.49***
Variables étoiléesχ2-Variables étoiléesχ2-Variables étoiléesχ2-
Filière : bovin viande11.26***Lot-et-Garonne5.08**Pays Basque12.41***
Dordogne5.51**---Filière : ovin lait10.95***
Lot-et-Garonne5.12**------

Tableau 7. Analyse textuelle des 1467 citations d’entretiens du groupe 2

Source : les auteurs.

26 La question de l’accompagnement en agriculture est ainsi exprimée sous un angle plus centré sur la coopération et la co-construction que pour le groupe 1, tant pour renvoyer au projet de territoire et à la place que celui-ci fait aux CCP, que pour renvoyer aux initiatives de mutualisation et de coopération (partage d’outils, formations communes) :

27

« On a créé à l’initiative d’un petit groupe une CUMA : c’est une huilerie. On était soutenu par le conseil départemental qui a financé en partie une huilerie […] pour l’autonomie protéique des fermes. Ça, ça a été financé par les collectivités. Ce n’était alors pas du tout dans l’air du temps. » (E35).

28

« Localement, il y a des associations : il y a un réseau le réseau Arrapitz qui fait des formations, il y Idoki qui travaille sur la biologique… donc j’ai adhéré et j’ai eu des formations. » (E38).

29 C’est l’importance de la proximité géographique qui est soulignée ici :

30

« C’est parce que vous êtes voisins, que vous êtes amenés à échanger. S’il [NDLR : éleveur] n’avait pas été là, ce foin grossier, je ne le ferais même pas ou je le mettrais en litières […] c’est des relations de voisinage. » (E4).

31 Ce groupe insiste donc plus que le premier sur la dimension collective de l’agriculture et sur les relations avec les parties prenantes, notamment agricoles et locales.

32 Si du point de vue des pratiques en CCP (classe n° 1), une partie du discours du groupe 2 (notamment par le biais des éleveurs d’ovins et bovins) exprime une réflexion commune avec le groupe 1 sur la commercialisation (comment je réfléchis à mon offre ? quel produit ? quelle transformation ?), il s’en différencie par l’accentuation du lien positif entre le choix de commercialisation en CCP et l’autonomie décisionnelle pour la fixation du prix. Il semblerait que les agriculteurs du groupe 2 aient acquis une meilleure maîtrise de la formation du prix de leurs produits, signe d’un projet mature. Enfin, la classe n° 2 associe un lexique plus complexe entre champ lexical du travail et champ de valeurs à connotation positive (« gratitude », « valorisant ») qui renvoie à des notions de liberté et d’autonomie. La lecture des citations statistiquement représentatives de cette classe montre une mise en balance entre charge de travail et contraintes organisationnelles, qui reste un marqueur des CCP, et bien-être au travail (BEH1) qui peut être résumé ainsi :

33

« Après j’ai une vie de fou dans ce que j’aime » (E26). Ce bien-être s’accomplit par une forme de liberté, d’autonomie et de reconnaissance du métier : « se dire qu’on est capable d’arriver jusqu’au bout ; on nous a fait tellement croire qu’on ne pouvait pas le faire, qu’on était dépendant des autres. On gagne en indépendance » (E7).

Conclusion

34 Les résultats tendent tout d’abord à souligner, en cohérence avec la littérature existante, que les attentes des agriculteurs sont centrées sur la viabilité économique des exploitations (Stein et Santini, 2021). Les autres attentes des producteurs, quand ils en ont, relèvent essentiellement de la dimension sociale des CCP et de leur bien-être dans leur vie personnelle et professionnelle malgré une forte charge de travail. La qualité qu’ils retrouvent dans l’exercice de leur métier et la revalorisation de celui-ci l’emportent sur les contraintes générées par les CCP. La performance environnementale de ces circuits est en revanche la grande absente de leur discours sans que nous ayons pu déterminer s’il s’agit d’un implicite ou d’un impensé. Nos résultats tendraient donc à montrer que les CCP ne permettent pas forcément de réconcilier objectifs de durabilité environnementale, sociale et économique dans un même modèle de commercialisation pour atteindre une performance globale, comme le montrent Enjolras et Aubert (2019). Pourtant, nombreux sont les producteurs interrogés mettant en place des pratiques environnementales, qu’ils communiquent aux consommateurs via des labels ou en activant la proximité relationnelle qu’ils développent avec les consommateurs, mais ils n’expriment aucun lien entre ces choix de pratiques et leurs choix de circuits de commercialisation. La prise en compte de l’environnement dans les objectifs stratégiques des agriculteurs semble être indépendante de leur choix de circuit de commercialisation, mais la dimension environnementale n’est pas absente de leur modèle de production. Reste à identifier si les bénéfices environnementaux des CCP (pratiques environnementales, préservation de la biodiversité, réduction potentielle des émissions de gaz à effet de serre) sont des éléments de stratégie des exploitations et/ou des externalités positives des CCP dans le contexte de leur dynamique actuelle plutôt que des objectifs recherchés par les agriculteurs lorsqu’ils s’y engagent. Compte tenu des enjeux environnementaux et de coexistence des modèles de production déjà identifiés dans la littérature, ainsi que de l’hétérogénéité des résultats (Chiffoleau et Dourian, 2020), l’analyse du rôle des CCP dans la transition agroécologique des exploitations semble nécessaire pour accompagner les changements d’échelle à venir.

35 Les agriculteurs développent donc une conception de la performance plutôt autocentrée et restreinte à leur performance économique (durabilité restreinte), sans formaliser ou exprimer la prise en compte d’objectifs de durabilité étendue vis-à-vis de leurs parties prenantes. Malgré une large place laissée dans nos entretiens aux parties prenantes des exploitations, les relations avec les filières et les acteurs territoriaux ne ressortent pas (cas du groupe 1) ou en partie seulement (cas du groupe 2) dans le discours des agriculteurs. Ils ne font donc a priori pas de lien direct entre la performance des CCP et les dynamiques de filières et de territoire. Il en est d’ailleurs de même pour les acteurs des filières et des territoires agricoles dont les attentes vis-à-vis des CCP sont centrées sur l’amélioration de la performance économique des exploitations (Corade et al., 2022). A contrario, les agriculteurs évoquent parfois ces autres niveaux d’organisation en tant que condition de leur performance, notamment à travers l’obtention d’aides au développement de leur projet. Nous notons aussi, grâce aux variables illustratives, que les agriculteurs qui ont en commun une filière ou un territoire ont plus souvent un discours similaire. Leur expression de ce qu’est la performance des CCP semble donc différenciée en fonction du contexte et du territoire dans lesquels ils évoluent, comme l’ont traduit Corade et al. (2020) au travers du concept d’ambiance territoriale favorable aux CCP, notamment au Pays Basque (cas du groupe 2). Sans qu’ils l’expriment, la dynamique des CCP à l’échelle des filières comme des territoires semble influencer la performance des exploitations agricoles, montrant la nécessité de développer des approches multi-échelles (Maréchal et al., 2019) et de sensibiliser les agriculteurs au caractère systémique de la performance. Toutefois, ces résultats demandent à être confirmés sur d’autres territoires car, comme le montrent Chiffoleau et Dourian (2020), la France, et plus particulièrement la région étudiée ici (première région agricole française), peuvent faire l’objet de spécificités qui limitent la généricité des résultats.

36 Au-delà de la performance économique des exploitations agricoles, centrale dans les attentes des agriculteurs en CCP, les résultats du clustering et de l’analyse textuelle mettent en évidence deux modèles de construction de la performance qui semblent correspondre à des étapes et des choix différents dans les stratégies des exploitations agricoles. Nous distinguons une première acception de la performance relative à une phase où le projet de commercialisation des produits agricoles est encore en cours de construction et de définition, sans forcément être récent. Dans ce cas, la part de la commercialisation en CCP est moindre et la performance des exploitations semble fortement dépendante de l’accompagnement agricole et d’une aide extérieure en lien avec les dispositifs agricoles nationaux et européens. Les aides, financières notamment, conditionnent la performance de ces exploitations. La deuxième acception mise en évidence relève d’un projet de commercialisation en CCP plus mature et autonome avec des exploitations plus spécialisées dans les CCP, ancrées dans leurs territoires et en lien avec les parties prenantes locales ainsi que les consommateurs. Les agriculteurs ont alors des attentes plus diversifiées et accordent une place significative au sens du métier d’agriculteur, au bien-être au travail et portent probablement une vision différente de l’agriculture. Ils développent à la fois des échanges directs avec les consommateurs (cas de la vente directe) et une communication fondée sur des labels de qualité. Nous identifions ici un des paradoxes du monde agricole, avec des tensions entre dépendance et autonomie des exploitations.

37 La mise en œuvre de cette double méthode d’analyse d’un matériau qualitatif nous aura permis d’aller plus loin qu’une simple lecture de la performance et de confronter les résultats à la littérature avec une méthode robuste. Le clustering a permis d’une part de dégager deux types de discours par rapport à ce qui fait plutôt consensus dans la littérature, quand l’analyse statistique textuelle a permis d’autre part de préciser la nature et le poids des représentations et des logiques qui sous-tendent les attentes des agriculteurs. Il s’agissait donc de donner du corps ainsi que de rendre concret le discours de ces acteurs, ce qui nous a permis de mettre en lumière une construction de la performance différenciée et d’expliquer parfois les contradictions observées dans les discours des agriculteurs. Cette démarche a tout d’abord mis en évidence des éléments de performance qui sont « pensés » par les agriculteurs, comme la nécessité de (re)valorisation des produits et le sens à redonner au métier d’agriculteur. Ensuite, elle a permis de souligner des externalités de la mise en œuvre des CCP ou des choix stratégiques des exploitations qui semblent indépendants du type de commercialisation et qui méritent encore des développements en recherche (comme le lien avec la prise en compte de l’environnement dans les stratégies d’entreprise par exemple). Enfin, les agriculteurs ont pu exprimer des conditions pour la performance des CCP (comme le support attendu en termes d’aides financières). Cette analyse mériterait certainement d’être couplée avec des données plus factuelles sur les mêmes systèmes d’exploitation dans une perspective plus normative d’évaluation de la performance globale, avec la méthode IDEA4 par exemple (Zahm et al., 2019).

Ce travail a bénéficié d’un financement dans le cadre du programme PSDR4 Perfecto (Performance des circuits courts et de proximité et Territoires, 2016-2020, coord. Nathalie Corade) en région Aquitaine. Les auteurs remercient les stagiaires ayant contribué au projet de recherche (L. Penvern, M. Philipot, A. Castay, L. Bertrand, M. Pradère, O. Amar).
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Mots-clés éditeurs : circuit court, proximité, performance globale, durabilité, exploitation agricole

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Date de mise en ligne : 13/01/2023

https://doi.org/10.4000/economierurale.10568

Notes

  • [1]
     Les traitements statistiques ont été réalisés sous le logiciel R, version 4.1.2, en mobilisant principalement d’une part les packages FactoMineR pour l’analyse multivariée et, d’autre part, textometry, ca, ape et proxy pour les analyses textuelles.
  • [2]
     Si l’analyse du sous-corpus n° 1 repose sur un plus faible nombre de citations, le nombre et la diversité de formes analysées sont néanmoins très satisfaisants et permettent l’analyse des résultats et leur comparaison avec ceux issus de l’analyse textuelle du sous-corpus n° 2.

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