Notes
- (1)Atlas des zones d’emploi 2010, p. 53. Voir aussi Insee méthode n°129 disponible en ligne à l’adresse
http://www.insee.fr/fr/publications-et-services/sommaire.asp ?reg_id=0etref_id=IMET129. - (2)La plus petite unité territoriale est la commune. La construction des ZE mobilise les règles suivantes : (a) chaque ZE est constituée d’un ensemble de communes entières ; (b) l’ensemble des ZE réalise une partition de la France ; (c) une commune n’appartient qu’à une seule ZE ; (d) les communes d’une ZE sont contigües ;(e) chaque ZE comporte au moins 5 000 actifs ; (f) le contour d’une ZE peut franchir une limite administrative (département, région). Ibid., p. 53.
- (3)À chaque étape, les flux de déplacements domicile-travail les plus importants entre unités (communes ou groupes de communes agrégées à une étape précédente) et communes non encore agrégées sont repérés. Passé une certaine taille, un agrégat de communes devient un « pôle d’emploi » : il peut agréger d’autres communes mais ne peut lui-même être agrégé à un autre pôle d’emploi.
- (4)On peut ainsi examiner l’emploi au lieu de travail par grands postes distinguant agriculture (3,5 % de l’emploi national), industrie (15,2 %), construction (6,4 %) mais surtout, au sein du tertiaire (74,8 %) : commerce (13,3 % de l’emploi national), services aux entreprises (13,3 %), services aux particuliers (7,6 %), services à la collectivité (30,3 %) et « autres services » (activités financières et immobilières, transports ; 10,4 %).
- (5)Ces résultats sont détaillés en annexe 2, tableau 19.
- (6)Cf. tableau 20 en annexe 2.
- (7)Ceci est documenté dans le tableau 21 proposé et commenté en annexe 2.
- (8)La catégorie socioprofessionnelle assignée à un ménage correspond à celle de la personne de référence du ménage. Pour le RP, la règle permettant d’identifier cette personne est précisée à la fin de l’annexe 1 : il suffit ici de souligner que dès lors qu’il existe au moins un homme dans le ménage (logement), c’est la CS de l’homme non-retraité le plus âgé qui est assignée au ménage.
- (9)Pour coller aux usages en économie régionale, des spécifications ajoutant un terme de densité quadratique ont également été considérées ; cela n’ayant modifié aucun des résultats de l’analyse, on s’en tient finalement par la suite à des spécifications sans terme quadratique.
- (10)Elhorst (2003) distingue entre variables intermédiaires et variables exogènes. Parmi les déterminants intermédiaires listés : la démographie, le comportement d’activité, les migrations, les navettes domicile-travail, les salaires, le produit local brut. Parmi les déterminants qualifiés d’exogènes par Elhorst : le potentiel marchand (taille du marché), la structure sectorielle de l’emploi, les barrières à la mobilité géographique, le niveau d’éducation. Tout en s’inspirant de cette liste, on privilégie ici des déterminants ayant une certaine inertie à moyen terme.
- (11)La difficulté de distinguer la contribution de la proportion d’ouvrières de l’effet territoire ouvrier tient essentiellement au fait que les ZE présentant à la fois une part d’ouvrières supérieure à la moyenne et une part de ménages ouvriers inférieure à la moyenne sont rares (11 sur 304 ZE). Elles sont cependant remarquablement homogènes lorsqu’on considère leur taux d’emploi féminin : sur ces 11 ZE, deux affichent un taux d’emploi féminin très légèrement inférieur à la moyenne d’ensemble, huit autres présentant un avantage d’au moins deux points de pourcentage sur cette moyenne. Cela explique que l’ajustement parvienne à des estimations précises.
- (12)Il est également possible que l’influence de la structure sectorielle de l’emploi soit captée par les conditionnements introduits jusque-là : proportion d’ouvrières, structure par type de ménages, de familles, structure par âges.
- (13)Cette partie suit dans une large mesure Floch et Le Saout (2016) ; elle repose en particulier sur les mêmes matrices de proximité.
- (14)Inversement, l’implantation au sein d’une ZE et aux dépens de ses voisines, d’un établissement régional gros utilisateur de main-d’œuvre féminine peut déterminer, en matière de taux d’emploi féminin, une dépendance négative entre zones voisines.
- (15)On retient ainsi trois des options considérées par Floch et Le Saout (2016). La contiguïté relie exclusivement les ZE ayant une frontière commune, le critère des cinq plus proches voisins connecte chaque ZE aux cinq ZE dont le centroïde est le moins distant.
- (16)À variables de conditionnement données et par référence à l’Ile-de-France, dix régions accusent un écart de taux d’emploi féminin significatif au seuil de 1 % (toujours en leur défaveur) : il s’agit en particulier de la Corse et du Nord-Pas-de-Calais (plus de 7 points de pourcentage d’écart), du Languedoc-Roussillon (5,6 points), de la Provence-Alpes-Côte d’Azur et de la Picardie (4,4 points).
- (17)Une rétroaction selon laquelle une exogène locale influence directement l’endogène locale qui influence les endogènes voisines qui rétroagissent sur l’endogène locale.
- (18)Les indicatrices régionales décalées spatialement permettent d’associer à chaque ZE la proportion (éventuellement pondérée) de ses voisines appartenant à chaque région : cela permet de repérer les ZE en bordure de région qui peuvent être plus ou moins favorables que les autres à l’emploi féminin. En pratique (résultats non reportés), la seule mesure légèrement significative de cet effet concerne le voisinage des Pays-de-la-Loire et l’effet estimé est négatif. L’indicatrice frontière décalée spatialement associe à chaque ZE la proportion de ses voisines qui sont en frontière de l’espace métropolitain : cet aspect ne joue pas de rôle significatif.
- (19)On a vu en effet que les spécialistes de l’économie géographique identifient la densité du peuplement et le poids des services aux particuliers comme deux marqueurs de dynamisme de l’économie résidentielle.
- (20)Cette catégorie est assignée rappelons-le à des personnes non retraitées n’ayant jamais occupé d’emploi.
- (21)Cette différence concerne, pour décrire la structure de l’emploi local, l’utilisation de la NAF (nomenclature d’activités française) en remplacement de la NES : la distinction entre services aux particuliers et services aux entreprises, particulièrement pertinente en termes d’économie géographique n’est plus possible. En lieu et place, on trouvera les catégories « commerce, transports et services marchands » et « administration publique, enseignement, santé, art et autres services non marchands ».
- (22)Voir pp. 58-67 ; voir également, Observatoire des territoires (2016), pp. 92-137.
1 Dans le contexte d’une fragilisation tendancielle de l’emploi industriel masculin, la bi-activité constitue pour les ménages ouvriers (i.e. dont la personne de référence est un ouvrier) une forme d’assurance particulièrement opportune : à l’échelle du couple, la précarisation du revenu salarial de l’un des conjoints peut ainsi être compensée par une plus forte participation à l’emploi de l’autre (selon un effet « travailleur additionnel »). Les ménages ouvriers sont pourtant nettement plus souvent mono-actifs que les autres avec une très nette prépondérance du modèle de l’homme soutien de famille. La présente étude questionne la portée d’une explication géographique à ce constat : la vie en couple impliquant généralement la cohabitation, la réalisation d’un effet « travailleur additionnel » suppose un marché du travail local capable d’absorber un surcroît d’offre de travail féminin. Or les territoires ouvriers (territoires à forte proportion de ménages ouvriers) apparaissent plutôt défavorables à l’emploi féminin ; cela dépend essentiellement de la présence d’industries locales intenses en main-d’œuvre féminine (telles que l’industrie textile ou agroalimentaire).
2 À densité de peuplement et proportion d’ouvrières données, les territoires ouvriers présentent des taux d’emploi féminin très inférieurs aux autres. Cette liaison statistique est analysée en détail, dans une optique de diagnostic de politique publique : il s’agit en particulier d’examiner l’hypothèse d’une inadéquation géographique entre peuplement et production spécifiquement défavorable aux femmes résidant au sein de territoires ouvriers. L’idée est que la vie en couple implique une structuration géographique des offres de travail masculine et féminine qui n’a pas de raison de concorder spontanément avec la structure géographique de la demande de travail (telle que documentée par l’analyse territoriale) que l’on sait fortement segmentée selon le sexe. L’étude est menée pour les années 2006-2012 sur données de recensement agrégées à l’échelle de la zone d’emploi (concept correspondant aux commuting zones anglo-saxonnes et donnant corps à la notion de marché du travail local) ce qui permet notamment une analyse successivement en coupe et en panel. Dans les deux cas, les méthodes de l’économétrie spatiale sont mises en œuvre pour prévenir le risque de biais d’estimation tenant aux interdépendances entre situations locales : il s’agit d’éviter que les liaisons mesurées puissent tenir à des effets de voisinages plutôt qu’aux caractéristiques de chaque zone. En coupe, une fois neutralisés effets de composition et interdépendances spatiales, la liaison d’intérêt est atténuée mais reste très significative. Pour 2006, un écart-type à la hausse de la proportion de ménages ouvriers sur un territoire est associé à un taux d’emploi féminin réduit de 1,7 point de pourcentage (56,4 % contre 58,1 % en moyenne) et à un taux de chômage accru de 1,1 point (14,1 % contre 13,0 % en moyenne). Il s’agit là de mesures macroéconomiques tenant compte d’éventuels effets émergents, résultant par exemple d’une moindre externalisation de la production domestique qui pénaliserait encore, localement, l’emploi féminin peu qualifié. Les résultats de l’estimation d’un modèle à effet fixe sur les années 2007 et 2012 suggèrent qu’il s’agit aux deux tiers d’une liaison de long terme (stable sur 5 ans) compatible avec un scénario d’inadéquation géographique. Les mobilités résidentielles des ménages installés sont en effet pro-cycliques : la récession et ses suites auraient donc plutôt figé une situation durablement dégradée des ménages ouvriers. Reste une faible composante de non-emploi féminin propre aux territoires ouvriers prenant la forme d’une inactivité de repli, en particulier sur la production domestique. Au regard des résultats obtenus, une interprétation causale plausible (à défaut d’être certaine) est proposée qui met au premier plan le cas des ménages ouvriers. La disjonction spatiale entre emploi ouvrier masculin et opportunités d’emploi tertiaire féminin peu qualifié confronterait les ménages ouvriers à un dilemme géographique compliquant la bi-activité.
3 La présente étude porte sur la relation statistique entre la proportion de ménages ouvriers sur un territoire et l’accès à l’emploi de la population féminine résidente. L’analyse est menée pour la France métropolitaine sur des données de recensement de la population agrégées à l’échelle de la zone d’emploi (ZE), concept statistique destiné à donner corps à l’idée de marché du travail local. Chaque ZE met en rapport, selon un critère de co-localisation, une main-d’œuvre (décrite au lieu de résidence) et des emplois (décrits au lieu de travail). Une première étape consiste à décrire la structuration géographique de l’emploi et de la main-d’œuvre par secteurs d’activité et groupes socioprofessionnels. La description obtenue alimente l’hypothèse d’une inadéquation géographique spécifiquement défavorable à l’emploi féminin. La relation correspondante, qualifiée d’effet territoire ouvrier, est une liaison négative entre la proportion de ménages ouvriers résidant sur un territoire et l’accès à l’emploi de la population féminine résidente. Cet effet est l’objet d’une analyse économétrique successivement en coupe et en variations (modèle à effet fixe) destinée à se rapprocher d’une comparaison toutes choses égales par ailleurs. L’interprétation privilégiée est qu’en cohabitant avec des ouvriers, un nombre considérable de femmes s’éloignent géographiquement de leurs opportunités d’emploi, déterminant ainsi des taux d’emploi féminin anormalement faibles.
4 L’analyse adopte une perspective d’économie régionale en agrégeant l’information statistique à l’échelle de la ZE et en s’intéressant à la question de la persistance d’écarts de performance (en matière de mobilisation de la main-d’œuvre) entre zones au sein d’économies pourtant intégrées, notamment au plan institutionnel. Elhorst (2003) est le premier à proposer une revue de littérature systématique sur cette question : le constat est qu’en termes de taux de chômage, dans l’Europe de la fin des années 1990 et du début des années 2000, les disparités étaient aussi fortes entre régions d’un même pays qu’entre pays. Ce constat a des enjeux théoriques importants pour l’économie du travail. D’une part, il relativise l’importance de la dimension institutionnelle dans l’explication des différences, d’un pays à l’autre, de performance en matière de mobilisation de la main-d’œuvre. D’autre part, il signifie que les mécanismes classiquement attendus d’un marché (déplacements d’offre et/ou de demande, ajustement de prix) ne viennent pas niveler les différences. Blanc et Hild (2008) et plus récemment Roussez et alii (2015) renouvellent le constat pour la France à partir d’analyses sur ZE. Roussez et alii (2015) examinent les disparités entre ZE du nombre de demandeurs d’emploi par actif et l’évolution de ces disparités entre 2003 et 2013. En 2013, ce nombre varie d’environ 8 % à plus de 22 % avec, entre ZE contiguës, des écarts pouvant aller du simple au double (ex. en Ile-de-France). La position relative de chaque ZE n’est certes pas figée (on peut observer sur la période une amélioration ou une détérioration de la position relative de ZE particulières) mais l’ampleur des disparités s’avère stable sur la décennie voire légèrement plus marquées en 2013 qu’en 2003. La persistance de ces disparités est interprétée comme la traduction d’une insuffisante différenciation géographique des salaires et/ou une trop faible mobilité de l’offre et de la demande de travail. Caliendo et alii (2017) apportent un éclairage indirect à travers l’évaluation d’un dispositif d’aide à la mobilité résidentielle des chômeurs en Allemagne. Neutralisant les effets de sélection endogène, le constat est que les participants au dispositif accèdent à des salaires plus élevés et à des emplois plus stables que les non-participants. Pour autant qu’il soit généralisable au cas de la France, cela suggère qu’il existe bien au niveau individuel un gain à la mobilité géographique. L’enjeu semble donc, par-delà les seuls salaires, d’identifier les facteurs entravant la cohérence des choix de localisation de la main-d’œuvre et de l’emploi c’est-à-dire une inadéquation géographique.
5 Deux éléments composent l’explication avancée ici. Le premier relève d’un constat existant : celui d’une disjonction géographique entre la demande de travail ouvrier et la demande de travail tertiaire peu qualifié (Roussez et alii, 2015). Cette disjonction est précisée ici en termes de disponibilité locale de l’emploi de chaque grand secteur : on montre que la disponibilité locale de l’emploi industriel, largement ouvrier, est supérieure à la moyenne là où celle de l’emploi tertiaire est inférieure à la moyenne, et inversement. Le second élément part d’observations réalisées au niveau individuel et en tire les conséquences, au niveau agrégé, en termes de structuration géographique de l’offre de travail par catégorie socioprofessionnelle (CS). Ces observations concernent des formes d’homogamie : les individus en couple tendent à appartenir à des CS proches. Le constat le plus saillant est la très nette prépondérance des couples formés d’un homme ouvrier et d’une femme employée (CS5 de la nomenclature 2003 des professions et catégories socioprofessionnelles). Sous l’angle géographique, la cohabitation restant la norme parmi les couples, le constat précédent signifie qu’il n’existe pas de disjonction géographique entre l’offre de travail masculin ouvrier et l’offre de travail féminin employé. Or les employées trouvent typiquement à s’embaucher dans le tertiaire peu qualifié. Associés au fait que les choix résidentiels des couples de classe populaire interviennent souvent en faveur de l’emploi masculin, les deux éléments précédents suggèrent une explication à une inadéquation géographique persistante : la situation de dilemme (tranché en faveur des hommes) dans laquelle se trouveraient les couples composés d’un ouvrier et d’une employée. L’analyse précédente va ainsi au-delà de l’explication de différences territoriales de taux d’emploi et de chômage : elle apporte un nouvel éclairage sur les enjeux géographiques des disparités homme-femme en matière d’emploi. Chamkhi (2015) étudie la variabilité, d’une ZE à l’autre, de l’écart de salaires homme-femme à caractéristiques observables identiques. Cette variabilité est considérable : de 1 % à 15 % selon les ZE (toujours en faveur des hommes). En documentant une inadéquation géographique spécifiquement défavorable aux femmes et en mettant en évidence un effet territoire ouvrier, on confirme ici une dimension territoriale des inégalités homme-femme en matière d’emploi.
6 Dans la présente étude, on raisonne donc de façon agrégée et l’on recourt à deux concepts statistiques particulièrement utiles : la notion de zone d’emploi et celle de groupe socioprofessionnel (échelon le plus agrégé des catégories socioprofessionnelles – CS).
7 En agrégeant les données de recensement à l’échelle de la ZE, on rejoint un courant d’investigation sur données françaises de l’appariement géographique de la main-d’œuvre à l’emploi particulièrement dynamique : Blanc et Hild (2008) ; Hecquet (2014) ; Chamkhi (2015) ; Roussez et alii (2015). Ces zones « d’étude et d’information sur les marchés du travail locaux » sont définies comme des espaces à l’intérieur desquels la plupart des actifs résident et travaillent (et dans lesquels les établissements peuvent trouver l’essentiel de la main-d’œuvre nécessaire pour occuper les emplois offerts) (1). Le contour de ces zones est depuis leur version 2010 fondé sur le seul critère des migrations communales entre domicile et travail ; il découle de la maximisation de taux de stabilité (rapport du nombre d’individus occupant un emploi au sein de leur zone de résidence sur celui de l’ensemble des résidents occupant un emploi) (2). En ce sens, le concept de ZE est une réponse appropriée à l’exigence d’analyses unifiant, sur une base géographique, les enjeux relatifs aux marchés du travail et du logement – Lelièvre et Robette (2010), Coulter et alii (2013). La construction de ce zonage procède par agrégation progressive de communes selon l’intensité des flux de déplacements domicile-travail (3). Agréger l’information statistique à l’échelle de la ZE a donc une signification importante : cela revient à rassembler des réalités qui se déploient sur un espace effectivement commun. Sous un angle plus technique, l’agrégation de l’information à l’échelle de la ZE a aussi des implications statistiques puisque ce zonage tend à autonomiser chaque entité géographique, au moins sous l’angle des échanges quotidiens de main-d’œuvre. Les aspects de dépendance spatiale, c’est-à-dire la possibilité que les liens statistiques identifiés entre variables spatialisées tiennent à leur proximité géographique (et donc, notamment, à des flux de travailleurs) et non à des cohérences géographiques structurelles, s’en trouvent vraisemblablement réduits ; nous verrons que le problème n’est toutefois pas totalement levé. En contrepartie, l’objectif de stabilité maximale de la main-d’œuvre débouche sur des entités statistiques de tailles très variées (ex. ZE de Paris 3,7 millions d’emplois versus ZE de Coulommiers 16 500 emplois). Afin de pouvoir recourir aux outils d’analyse statistique les plus courants (coefficient de Pearson, régression linéaire), il est souhaitable de raisonner sur des indicateurs neutralisant les effets d’échelle (indicateur de disponibilité, taux d’emploi, d’activité, de chômage, etc.). Ce choix correspond d’ailleurs bien à l’intention, dans la présente étude, de privilégier des dimensions structurelles de comparaison. Raisonner sur ZE permet aussi une analyse en variations (modèle à effet fixe), ce qui est particulièrement utile pour approcher l’effet propre de court terme de la proportion de ménages ouvriers sur le taux d’emploi féminin.
8 Les données mobilisées couvrent les années 2006 à 2012. Partir de l’année 2006 permet d’abord de mener l’analyse sur les données mêmes qui ont servi à construire le zonage utilisé (ZE, 2010). Autre intérêt, 2006 est la dernière année pour laquelle l’activité économique des employeurs est appréhendée en termes de NES (nomenclature économique de synthèse), nomenclature mobilisant les concepts de « services aux entreprises » et de « services aux particuliers », des marqueurs particulièrement intéressants en économie géographique (Hecquet, 2014) (4). Il s’agit également de se placer avant le déclenchement de la crise de 2008 dont on sait qu’elle a profondément affecté l’emploi ouvrier. Au stade de l’analyse en coupe et s’agissant de phénomènes structurels (structuration géographique du tissu productif et du peuplement), partir d’une année sans bouleversement majeur est souhaitable. Quant à l’estimation de modèles à effets fixes, l’ampleur des variations mesurées entre les années 2007 et 2012, tant du côté des explicatives que de celui de la variable expliquée, limite l’influence potentielle des erreurs de mesure qui peuvent nuire à une analyse en panel.
9 La présente étude s’appuie aussi sur la notion de groupe socioprofessionnel. À l’exception des catégories 7 (retraités) et 8 (autres personnes sans activité professionnelle), le principal intérêt de cette notion est d’être a priori indépendante du statut d’activité (inactif, chômeur, actif occupé). La catégorie socioprofessionnelle assignée à une personne est celle de son emploi lorsqu’elle en occupe un, mais une catégorie socioprofessionnelle lui est tout de même assignée si elle est au chômage ou inactive. Il s’agit de celle du dernier emploi occupé s’il existe, la catégorie des non retraités sans activité professionnelle (CS8) sinon. Cela signifie d’abord qu’il suffit d’une expérience d’emploi pour qu’on associe à une personne une catégorie socioprofessionnelle. Cela signifie ensuite que la catégorie 8, lorsqu’elle ne concerne pas des étudiants ou des militaires, correspond à une forme d’inactivité particulièrement marquée puisqu’elle signale qu’aucune expérience d’emploi n’est intervenue dans la trajectoire de la personne concernée. Au-delà de la description d’un instantané (situation au moment de l’enquête), la catégorie socioprofessionnelle peut donc résumer pour partie une trajectoire. Un point important en ce sens est que, contrairement au niveau de diplôme, la catégorie socioprofessionnelle d’une personne n’est pas figée et peut changer au gré des expériences d’emploi. En particulier, pour les personnes peu diplômées, les catégories employé (CS5) et ouvrier (CS6) sont très perméables : selon la nature de leurs expériences d’emploi (qui reflètent notamment les secteurs d’activité qui dominent leur territoire de résidence), deux personnes détenant un même niveau de diplôme seront assignées à l’une ou à l’autre. On verra que cet aspect joue un rôle important dans l’analyse proposée ci-après.
10 Le niveau macroéconomique de la présente étude répond essentiellement à la perspective de diagnostic de politique publique privilégiée ici. L’analyse ne porte pas sur une probabilité individuelle d’accès à l’emploi selon qu’une femme appartient ou non à un ménage ouvrier (comparaison entre des personnes) mais sur le taux d’emploi d’une population féminine locale selon la proportion de ménages ouvriers du territoire (comparaison entre des populations localisées). En conséquence, même si l’on rassemble quantité d’indices suggérant une interprétation centrée sur le cas des femmes de ménages ouvriers, on ne peut totalement exclure (sans s’exposer au risque d’erreur écologique) qu’un autre scénario parvienne à rendre compte des cohérences observées au niveau agrégé. En contrepartie, la liaison statistique mise en évidence a une signification macroéconomique i.e. elle intègre de possibles effets émergents pouvant dépasser le seul cas des ménages ouvriers. Compte tenu du rôle de l’externalisation de la production domestique dans le développement de l’emploi féminin peu qualifié (Pailhé et Solaz, 2009), cela paraît très utile : s’il s’avère qu’un moindre accès à l’emploi des femmes appartenant à un ménage ouvrier entrave un mouvement d’externalisation de la production domestique spécifiquement favorable à l’emploi féminin peu qualifié, l’effet microéconomique sous-estime le handicap des territoires ouvriers en matière de bi-activité.
11 La suite de cet article comporte cinq parties. La première propose une revue de la littérature et tente de traduire les éléments d’analyse micro économiques disponibles en termes macro géographiques. On fait en particulier apparaître des cohérences géographiques justifiant l’intérêt prêté par la suite à l’hypothèse d’une inadéquation géographique spécifiquement défavorable à l’accès à l’emploi des femmes résidant en territoire ouvrier. La deuxième partie est consacrée à une analyse en coupe de l’effet territoire ouvrier. Une attention toute particulière est accordée au traitement des interdépendances spatiales susceptibles de biaiser l’estimation de la relation d’intérêt. La troisième partie complète l’analyse en proposant une estimation en variations (modèle à effet fixe) de la relation d’intérêt. Cela permet en particulier d’en raffiner l’interprétation. La quatrième partie présente l’articulation et la synthèse globale de tous les résultats. La dernière partie conclut l’étude.
Littérature, micro-fondements et traductions (macro-)géographiques
12 L’objet de cette partie est triple : proposer une revue de littérature ; faire le point sur les résultats disponibles, notamment microéconométriques, issus d’analyses sur données individuelles ; documenter les manifestations (macro-) géographiques de ces résultats. Ce troisième aspect est adossé à une étape d’analyse de corrélations géographiques dont les résultats complets sont fournis en annexe. La notion de corrélation géographique utilisée et détaillée dans l’'encadré. Il s’agit de montrer que les hypothèses et interprétations avancées par la suite sont plausibles indépendamment de tout choix de modélisation économétrique ; dans le type d’analyse proposé, les risques d’erreurs de spécification ne peuvent jamais être totalement exclus (ne serait-ce que par l’utilisation de modèles linéaires). Les associations statistiques documentées sur données individuelles trouvent leur contrepartie macroéconomique dans des cohérences géographiques de localisation des diverses catégories d’emploi et de populations résidentes.
La structuration géographique des activités et des professions
13 Duranton (1997) dresse un panorama des mécanismes microéconomiques expliquant la répartition des activités sur un territoire : proximité aux marchés (coût de transport des marchandises), proximité aux sources d’approvisionnement (coût de transport des matières premières), coûts de transport des personnes, économies d’agglomération, coûts de congestion ; prix du foncier, etc. Ces mécanismes détermineraient une tendance à la spécialisation sectorielle des territoires selon une logique d’avantage comparatif – Ellison et Glaeser (1997), prenant notamment la forme, dans un contexte de mondialisation et de diffusion des nouvelles technologies, d’un processus de métropolisation. Davezies (2008) analyse les conséquences de ce processus dans le cas français en appliquant la théorie de la base économique (bases productive marchande, publique, résidentielle, sociale). Hecquet (2014) étudie, dans une optique proche, la différenciation sectorielle progressive des territoires métropolitains entre 1975 et 2009. Cette différenciation se traduit notamment par le fait que certains secteurs tendent à la co-localisation, d’autres à l’anti-localisation ; cela peut être mis en évidence même à un niveau sectoriel très agrégé – Observatoire des territoires (2014). On propose de faire apparaître ici cette différenciation sur les marchés du travail locaux. La disponibilité locale de l’emploi de chaque grand secteur d’activité (agriculture, construction, industrie, services aux entreprises, services aux particuliers, commerces, services à la collectivité et « autres services ») est mesurée par le rapport du nombre d’emplois du secteur au nombre de résidents de 15-64 ans. Une corrélation géographique est calculée pour chaque couple de secteurs (5). En 2006, en France métropolitaine, la disponibilité de l’emploi de certains secteurs tend à la co-localisation : c’est le cas, par exemple, de l’emploi de la construction, des services aux particuliers et du commerce. À l’inverse, on observe des tendances à l’anti-localisation pour l’emploi des services aux entreprises d’un côté et celui de l’agriculture (-0,37) ou de la construction (-0,17). Plus important pour la suite de l’analyse, l’anti-localisation est également nette entre l’emploi industriel d’un côté et celui du commerce, des services aux particuliers et surtout des services à la collectivité, de l’autre. Tout emploi tertiaire confondu, on obtient une corrélation géographique de -0,35 : les zones où la disponibilité de l’emploi industriel est forte sont souvent des zones où la disponibilité de l’emploi tertiaire est faible, et réciproquement. Cela se répercute évidemment en termes de disponibilité locale de l’emploi des différentes catégories socio professionnelles (6). Si la disponibilité de l’emploi cadre (CS4) est géographiquement très associée à celle de l’emploi des services aux entreprises (+0,88), la disponibilité de l’emploi ouvrier présente le même degré d’association avec celle de l’emploi industriel. Fort logiquement, on observe une association presqu’aussi forte (+0,83) entre disponibilité locale de postes d’employés et disponibilité locale de l’emploi tertiaire. En résumé, la spécialisation sectorielle des territoires détermine des exigences différentes en termes de catégories de main-d’œuvre : aux territoires industriels sollicitant une main-d’œuvre ouvrière s’opposent des territoires tertiarisés qui sollicitent des employés.
L’homogamie socioprofessionnelle
14 Les personnes vivant en couple tendent à appartenir à des catégories socioprofessionnelles proches. L’économie de la famille explique ce phénomène dans une optique beckerienne de marché matrimonial qui déterminerait des accouplements efficaces : les femmes ayant les meilleures dispositions professionnelles se mettent en couple avec les hommes correspondants, les femmes ayant des dispositions un peu moins favorables aux hommes correspondants et ainsi de suite. En admettant que la hiérarchie des professions capte cette échelle de dispositions diversement favorables, l’homogamie socioprofessionnelle traduirait ce processus d’accouplements efficaces. Pour la France, plusieurs études documentent le phénomène sur données individuelles à partir d’enquêtes spécifiques (Vanderschelden, 2006) mais surtout de l’Enquête emploi – Stancanelli (2006), Biausque et Govillot (2012) et Bouchet-Valat (2014). Pour l’année 2002 et au niveau le plus agrégé du groupe socioprofessionnel, Stancanelli (2006, p. 254) constate que 14,8 % des couples d’individus de moins de 65 ans associent un ouvrier à une employée : il s’agit de la situation modale ; la deuxième situation la plus courante associe un ouvrier à une femme au foyer – CS8 (9,3 % des couples) et la troisième, un ouvrier à une ouvrière (5,7 %). Pour l’année 2011, et sur la population des couples cohabitant dans lesquels au moins l’un des conjoints a entre 30 et 59 ans et hors retraités (CS7) et hors personnes au foyer (CS8), Bouchet-Valat chiffre à 19,3 % la part de couples ouvrier-employée et à 7,7 % la part de couples ouvrier-ouvrière. La cohabitation restant la norme parmi les couples, l’homogamie socioprofessionnelle mesurée sur données individuelles doit avoir une contrepartie géographique. C’est précisément ce que nous observons dans les données (7).
Offre de travail féminin, vie en couple et dimension spatiale des inégalités homme-femme sur le marché du travail
15 Briard (2017) propose une revue des principaux résultats micro-économétriques obtenus sur données françaises concernant l’élasticité de l’offre de travail féminin. La variété des méthodes et spécifications économétriques donne lieu à une certaine dispersion des valeurs estimées mais plusieurs résultats qualitatifs se dégagent : l’offre de travail des femmes est plus élastique à leur salaire que celle des hommes, l’élasticité mesurée est plus élevée pour les femmes en couple et les mères de jeunes enfants que pour les femmes seules et les femmes sans enfant. De fait, la situation parentale joue un rôle primordial dans l’offre de travail féminin notamment du fait de dispositions institutionnelles – Piketty (1998). Minni et Moschion (2010) le documentent de façon systématique à partir de l’Enquête emploi pour la période 1975-2008 : le taux d’activité des femmes décroît avec le nombre d’enfants et augmente lorsqu’ils grandissent. Ce constat subsiste y compris en conditionnant l’ajustement selon l’âge de la mère, le niveau de diplôme, la nationalité et le fait de vivre en couple. Les études passées en revue par Briard (2017) divergent quant à la sensibilité de l’offre de travail des femmes en couple à l’offre de travail de leur conjoint. On sait pourtant que vivre en couple influence considérablement les comportements individuels d’activité. L’économie de la famille modélise les interdépendances entre offre de travail masculin et féminin des individus en couple (Sofer, 2005). Estimant un modèle d’offre jointe de travail sur données britanniques, Clark et alii (2004) documentent des asymétries considérables entre hommes et femmes. Ces asymétries peuvent nourrir des inégalités professionnelles. Van Ommeren et alii (1999) considèrent par exemple sur données néerlandaises l’impact du fait d’avoir un conjoint en emploi sur la mobilité professionnelle : les femmes salariées vivant en couple, en particulier au sein de ménages biactifs occupés, présentent une propension plus faible à la mobilité professionnelle ; ce n’est pas le cas pour les hommes. Dans l’ensemble, en matière de carrière, vivre en couple pourrait représenter un atout pour les hommes, une contrainte pour les femmes.
16 Cette asymétrie homme-femme de l’influence de la vie en couple sur les carrières pourrait, indépendamment des situations parentales, transiter par les choix de lieu de résidence et de mobilité géographique des couples. Costa et Kahn (2000) analysent en ce sens la manière dont les couples biactifs occupés très diplômés (« power couples ») font face à la contrainte géographique qu’implique la cohabitation : la poursuite d’objectifs de carrière ambitieux par les deux membres de ces couples nécessiterait qu’ils résident au sein de métropoles dotées de marchés du travail locaux denses. Ils montrent sur données étatsuniennes, qu’on observe effectivement une tendance de ce type à partir des années 1950. Rouwendal et alii (2003) répliquent cette analyse sur données néerlandaises. Ils observent également une tendance à la concentration des couples de salariés à hauts diplômes dans la partie la plus urbanisée du pays (en dépit de congestions et de l’absence de prime salariale). Ces couples sont plus souvent propriétaires et occupent des logements plus chers que les ménages comparables ; ils bénéficient par ailleurs, à autres caractéristiques égales, de distances domicile-travail plus courtes que les ménages mono-actifs. Le cas des « power couples » suggère la possibilité d’un traitement plutôt égalitaire (entre homme et femme) de la contrainte que la cohabitation peut poser aux carrières individuelles. Sorenson et Dahl (2016) parviennent pour le Danemark à des conclusions moins optimistes. Leurs résultats suggèrent que les couples tendent à déménager vers des lieux offrant de meilleures opportunités salariales aux maris qu’aux épouses : les choix de mobilité résidentiels seraient biaisés en faveur des hommes. Plusieurs études contestent ce scénario. Benson (2014) montre par exemple pour les États-Unis que la tendance des ménages à déménager en faveur de la carrière des hommes s’explique mieux par la ségrégation des femmes dans des professions géographiquement dispersées que par une priorité donnée à la carrière des hommes. Foged (2016) modélise le choix de mobilité résidentielle de familles susceptibles de privilégier le niveau du salaire masculin plutôt que féminin et en tire des prédictions testables quant au profil des couples les plus mobiles géographiquement. Son analyse, menée sur données danoises, conclut que l’hypothèse d’un choix neutre en termes de genre (égale pondération des salaires masculin et féminin dans la décision) ne peut être rejetée ; des biais de genre pourraient cependant intervenir lorsque les différences de salaire potentiel entre homme et femme sont faibles.
17 Indépendamment d’éventuels biais de genre dans les choix résidentiels, le problème de la distance physique à l’emploi ne semble pas se poser dans les mêmes termes pour les hommes et pour les femmes. Selon Gobillon et Selod (2014), la charge de la production domestique pesant sur les femmes de façon disproportionnée, elles manifesteraient un besoin spécifique de proximité spatiale à l’emploi, notamment lorsqu’elles sont mères de jeunes enfants et/ou en couple avec des hommes occupant un emploi. Matas et alii (2010) identifient sur données individuelles un effet positif de l’accessibilité de l’emploi par transport public sur la probabilité d’emploi des femmes de Barcelone et de Madrid. Black et alii (2014) étudient dans le même esprit, aux États-Unis, la très grande variabilité de l’offre de travail des femmes mariées d’une ville à l’autre. Leur analyse se concentre sur les différences de temps de déplacement domicile-travail comme explication potentielle de la variabilité constatée. À l’examen, les taux d’activité féminins s’avèrent en effet négativement corrélés aux durées de transport dans les aires métropolitaines. De surcroît, les aires dont les durées moyennes de transport ont le plus augmenté sur la période 1980-2000 ont connu une croissance moins rapide de l’activité des femmes mariées.
18 La question d’une disparité homme-femme d’accessibilité géographique à l’emploi est posée ici au niveau agrégé de la ZE en mesurant la cohérence géographique entre main-d’œuvre (au lieu de résidence) et emploi (au lieu de travail) par groupe socioprofessionnel (cf. annexe 1). On calcule, séparément pour chaque sexe, les corrélations géographiques entre proportion d’emploi local de chaque groupe socioprofessionnel et proportion d’adultes relevant de chacun de ces groupes. La proportion d’individus de chaque groupe socioprofessionnel tend logiquement à être forte là où la part d’emploi correspondant est elle aussi élevée (8) mais des différences existent selon le sexe. C’est très nettement le cas pour les employés : l’association est de +0,73 pour les hommes contre seulement +0,31 pour les femmes. Les employées résident moins systématiquement que les autres à proximité de l’emploi correspondant à leur catégorie socioprofessionnelle. Par ailleurs et de façon remarquable, la corrélation négative de la proportion d’employés à la proportion d’emplois ouvriers est pour les femmes nettement moins forte (en valeur absolue) : -0,18 contre -0,64 pour les hommes. Cela est cohérent avec l’hypothèse de choix résidentiels des ménages donnant la priorité à l’emploi correspondant à la catégorie socioprofessionnelle de l’homme.
19 En résumé, en 2006 les ZE métropolitaines se répartissent entre des zones dominées par l’emploi industriel et d’autres dominées par le tertiaire. Les premières sont riches en emploi ouvrier, largement masculin, mais pauvres en postes d’employés (CS5) ; l’inverse prévaut dans les zones dominées par l’emploi tertiaire, un emploi très féminisé. Si l’on reprend la typologie de Chamkhi (2015), les ZE ouvrières représentent environ 80 % des ZE métropolitaines et couvrent en 2006, 54 % de la population en âge de travailler. La répartition des couples par combinaison de groupes socioprofessionnels fait apparaître une très forte proportion de ménages constitués d’un ouvrier et d’une employée. Cette configuration apparaît a priori défavorable à l’accès à l’emploi des compagnes d’ouvrier et plus généralement des femmes résidant au sein de territoires ouvriers. L’analyse cartographique ne fait pourtant pas apparaître d’association évidente (cf. figure 1). La population féminine des zones ouvrières diffère en effet vraisemblablement de celle des autres territoires dans bien d’autres dimensions, dont certaines peuvent influencer son taux d’emploi. Il s’agit donc désormais de préciser l’analyse en neutralisant le rôle des effets de composition.
Analyse économétrique en coupe de la relation entre proportion de ménages ouvriers et taux d’emploi féminin
20 On étudie, par régression linéaire, la relation entre la part de ménages ouvriers, parmi les ménages résidents (variable d’intérêt), et le taux d’emploi des femmes (variable expliquée) de chaque ZE métropolitaine (voir l’encadré). Les variables explicatives sont centrées réduites de sorte qu’en l’absence de termes d’interaction ou d’indicatrices régionales, la constante corresponde à un taux d’emploi moyen par zone. Par défaut, la seule variable de contrôle est la densité de population de chaque zone : il s’agit principalement de contrôler du potentiel d’emploi associé à ce que les spécialistes de l’économie géographique appellent la sphère d’activité résidentielle (Hecquet, 2014) (9). En l’absence de conditionnement supplémentaire, on obtient (modèle 1, tableau 1) une liaison significativement positive : à densité donnée, le taux d’emploi féminin est plus élevé là où la proportion de ménages ouvriers est plus forte. Cette liaison, contradictoire avec l’analyse descriptive menée jusqu’à présent, traduit en fait des effets de composition qu’il s’agit de neutraliser. Restant dans le cadre d’une analyse en coupe, l’enjeu est notamment d’ajuster l’estimation de la relation d’intérêt de différences concernant : les déterminants des taux d’emploi locaux mis en évidence en économie régionale (Elhorst, 2003) (10) et les déterminants usuels du taux d’emploi féminin, tels que documentés pour la France sur données individuelles (Piketty, 2005 ; Minni et Moschion, 2010).
cartes des taux d’emploi féminins et des proportions de ménages ouvriers en 2006
cartes des taux d’emploi féminins et des proportions de ménages ouvriers en 2006
Données : recensement de la population 2006, Insee.La mesure des corrélations géographiques
Soit xij la valeur prise en zone i (il y a 304 zones considérées) par un indicateur de représentation locale d’un marqueur j – par exemple la disponibilité locale de l’emploi du secteur j ∈{agri, const, indus, terti}. La représentation locale moyenne du marqueur j sur l’ensemble des zone est définie par et la variance de cette représentation locale par . Étant donné un couple de marqueurs (j, j’), la covariance géographique est donnée par et le coefficient de corrélation géographique privilégié dans l’analyse descriptive est simplement .
Obtenir ρ (xj , xj′) = 1 signifie que sur- et sous-représentation locale des marqueurs j et j’ (par rapport à une zone moyenne) interviennent dans les mêmes zones dans les mêmes proportions ; ρ (xj , xj′ ) > 0 signifie que suret sous-représentation locale des marqueurs j et j’ (par rapport à une zone moyenne) tendent à intervenir dans les mêmes zones dans des proportions proches.
Spécifications et modèles économétriques
En coupe, le modèle s’écrit :
li est la part locale de ménages ouvriers ;
yi la variable de résultat (taux d’emploi, taux d’activité ou taux de chômage) ;
Xi une matrice de variables de conditionnements, déterminants usuels de la variable de résultat ;
εi un terme d’erreur.
L’ensemble des variables explicatives (y compris la variable d’intérêt) sont centrées-réduites de sorte qu’en l’absence d’indicatrices régionales ou frontalière, le paramètre estimé α donne la moyenne géographique de y et que γ mesure l’effet apparent (toutes choses égales pour l’ensemble du conditionnement) d’une variation d’un écart-type de li . Les termes de la somme correspondent aux indicatrices régionales et frontalière : la région de référence est alors l’Ile-de-France et δk mesure l’écart propre à la région k (toutes choses égales par ailleurs) ; φ mesure un effet frontière. Les valeurs estimées pour ces coefficients ne sont pas reportées mais disponibles sur demande.
Toujours dans le cadre d’une analyse en coupe et en omettant les indicatrices régionales ou frontalière, les quatre modèles envisagés pour neutraliser l’action de l’interdépendance spatiale s’écrivent (en usant de notations standards) :
j≠i
(SE) yi = α + yli + Xi'β + ui avec ui = λ ∑wijuj + εi
j≠i
(SLX) yi = α + yli + Xi'β + ∑wijX'jθ + εi
j≠i
(SD) yi = α + yli + Xi'β +ρ∑wijyj + ∑wijX'jθ + εi
j≠i j≠i
La première spécification de l’interdépendance spatiale (par la variable de résultat) est qualifiée de « spatiale autorégressive » (SAR), la deuxième, où l’interdépendance transite par les termes d’erreur (i.e. des explicatives omises) correspond à un modèle à erreurs auto-corrélées (SE), la troisième voit l’interdépendance spatiale transiter par les explicatives (modèle à exogènes spatialement décalées, SLX) ; le modèle spatial de Durbin (SD) conjugue deux canaux d’interdépendance spatiale, par la variable de résultat et par les exogènes.
Le modèle à effet fixe s’écrit simplement :
L’effet territoire ouvrier
21 La mise en évidence de l’effet territoire ouvrier suppose essentiellement de tenir compte des deux formes que peut prendre l’emploi des femmes de classes populaires : ouvrier ou employé. Ces deux catégories socioprofessionnelles sont évidemment très perméables. Selon la spécialisation sectorielle locale, les expériences d’emploi sur un poste ouvrier ou employé seront plus ou moins fréquentes, de sorte que deux femmes identiques par ailleurs se verront assignées à la catégorie ouvrière (ex. expérience sur un poste d’agent de conditionnement) ou employée (ex. expérience sur un poste de caissière). En conséquence et toutes choses égales par ailleurs, les territoires d’implantation (passée ou présente) d’activités intenses en emploi ouvrier féminin (ex. textile, électroménager) seront caractérisés par une proportion d’ouvrières supérieure à la moyenne et d’employées inférieure à la moyenne. Dans le cadre d’une analyse par régression, tenir compte de cet aspect soulève a priori une difficulté tenant à la forte corrélation positive entre proportion d’ouvrières parmi les femmes et proportion de ménages ouvriers : le risque d’une colinéarité empêchant l’estimation de coefficients de régression interprétables est a priori réel. Le modèle 2 (cf. tableau 1) propose pourtant d’ajuster l’estimation initiale de la proportion locale de femmes ouvrières et d’un terme d’interaction (proportion de ménages ouvriers × proportion de femmes ouvrières). La part d’ouvrières s’avère ressortir fortement parmi les déterminants de taux d’emploi féminin élevés et tenir compte de cette dimension d’hétérogénéité entre les ZE fait apparaître l’effet territoire ouvrier.
22 À proportion d’ouvrières données, les zones ayant une proportion de ménages ouvriers supérieure à la moyenne présentent un taux d’emploi féminin très inférieur (55,0 % contre 58,5 % pour un écart-type à la hausse), avec un effet d’interaction de faible amplitude mais également négatif. Les coefficients obtenus, s’ils sont fortement associés, sont estimés avec précision contrairement à ce que devrait impliquer une colinéarité excessive (11). Il convient donc de joindre la part d’ouvrières parmi les variables de conditionnement et de bien comprendre que l’effet territoire ouvrier lui est lié. Dans le cadre d’une interprétation en termes d’inadéquation géographique, ce serait lorsque le bassin d’emploi local n’offre pas d’emploi féminin ouvrier que l’accès à l’emploi des femmes de classes populaires se trouverait fragilisé.
23 Il s’agit à présent d’évaluer la sensibilité de cette liaison d’intérêt lorsque l’estimation est ajustée en tenant compte d’autres déterminants du taux d’emploi féminin. On ajuste en premier lieu (modèle 3, tableau 1) de la structure locale de la population des ménages (personnes seules, cohabitants non liés, familles) et de celle de la population des familles (couples sans enfant, couples avec enfant(s), familles monoparentales). Le terme d’interaction perd sa significativité mais l’effet territoire ouvrier est amplifié (-4,1 points de pourcentage pour un écart-type à la hausse) : la structure moyenne de la population des ménages et des familles dans les territoires ouvriers est favorable aux taux d’emploi féminin élevés. Le modèle 4 (cf. tableau 1) ajuste l’estimation de la structure par âges de la population féminine résidente. Conformément aux attentes, une population féminine particulièrement concentrée sur les moins de 30 ans et/ou les plus de 60 ans implique des taux d’emploi féminin plus faibles, l’inverse intervenant lorsque les 30-44 ans pèsent davantage. Ce conditionnement réduit l’estimation du rôle de la proportion d’ouvrières (traduisant vraisemblablement le fait que la part d’ouvrières est plus forte parmi les femmes plus âgées) ainsi que celle de l’effet territoire ouvrier mais celui-ci reste fort. À ce stade, une présomption naturelle est que la part de ménages ouvriers au sein d’une zone soit associée à une main-d’œuvre féminine d’un niveau d’éducation défavorable à l’accès à l’emploi. Le modèle 5 (cf. tableau 1) introduit ainsi parmi les variables de conditionnement la structure par niveaux de diplôme de la population des femmes de 15 ans et plus. Sans surprise, la part de femmes ayant un faible niveau de diplôme joue en défaveur de taux d’emploi féminin élevés mais cela n’affecte pas l’estimation de l’effet territoire ouvrier. En clair, les territoires ouvriers ne présentent pas une population féminine au profil éducatif spécialement défavorable à l’accès à l’emploi. Au stade de cette 5ème spécification, remarquons que le modèle présente déjà de bonnes qualités prédictives (R2 ajusté = 0,78).
analyse en coupe, estimation par MCO
Modèle | Taux d’emploi des femmes de 15-64 ans | ||||||||||
(1) | (2) | (3) | (4) | (5) | (6) | (7) | (8) | (9) | (10) | ||
Constante | 0,581 | 0,585 | 0,582 | 0,582 | 0,580 | 0,580 | 0,580 | 0,580 | 0,581 | 0,608 | |
(0,003) | (0,003) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,001) | (0,008) | ||
% de ménages ouvriers | 0,009 | - 0,035 | - 0,041 | - 0,034 | - 0,035 | - 0,030 | - 0,030 | - 0,028 | - 0,030 | - 0,019 | |
(0,003) | (0,005) | (0,005) | (0,004) | (0,006) | (0,006) | (0,006) | (0,007) | (0,005) | (0,005) | ||
% d’ouvrières (parmi 15 ans et plus) | 0,054 | 0,034 | 0,025 | 0,024 | 0,024 | 0,024 | 0,024 | 0,026 | 0,023 | ||
(0,006) | (0,005) | (0,004) | (0,004) | (0,004) | (0,005) | (0,005) | (0,003) | (0,003) | |||
Interaction | - 0,004 | - 0,000 | - 0,000 | 0,002 | 0,002 | 0,002 | 0,002 | ||||
(0,002) | (0,002) | (0,001) | (0,001) | (0,001) | (0,001) | (0,001) | |||||
% des ménages | Personnes seules | - 0,550 | - 0,440 | - 0,438 | - 0,386 | - 0,389 | - 0,388 | 0,013 | 0,007 | ||
(0,562) | (0,458) | (0,413) | (0,422) | (0,424) | (0,423) | (0,003) | (0,003) | ||||
Cohabitants non liés | - 0,155 | - 0,126 | - 0,117 | - 0,103 | - 0,104 | - 0,104 | |||||
(0,149) | (0,121) | (0,110) | (0,112) | (0,112) | (0,112) | ||||||
Familles | - 0,609 | - 0,500 | - 0,490 | - 0,432 | - 0,436 | - 0,436 | |||||
(0,608) | (0,496) | (0,448) | (0,457) | (0,459) | (0,458) | ||||||
% des familles | Couples sans enfant | 0,161 | 0,081 | 0,227 | 0,154 | 0.151 | 0,190 | ||||
(0,349) | (0,282) | (0,256) | (0,273) | (0,274) | (0,276) | ||||||
Couples avec enfant(s) | 0,169 | 0,077 | 0,204 | 0,143 | 0,142 | 0,176 | 0,008 | 0,007 | |||
(0,305) | (0,246) | (0,224) | (0,238) | (0,239) | (0,241) | (0,005) | (0,005) | ||||
Familles monoparentales | 0,041 | - 0,002 | 0,073 | 0,042 | 0,041 | 0,058 | - 0,021 | - 0,010 | |||
(0,150) | (0,121) | (0,110) | (0,117) | (0,118) | (0,118) | (0,003) | (0,003) |
Modèle | Taux d’emploi des femmes de 15-64 ans | ||||||||||
(1) | (2) | (3) (4) | (5) | (6) | (7) | (8) | (9) | (10) | |||
% des femmes | 15-29 ans | - 0,027 | - 0,019 | - 0,018 | - 0,018 | - 0,018 | - 0,017 | - 0,008 | |||
(0,005) | (0,005) | (0,005) | (0,005) | (0,005) | (0,004) | (0,004) | |||||
30-44 ans | 0,018 | 0,019 | 0,016 | 0,016 | 0,015 | 0,016 | 0,020 | ||||
(0,003) | (0,004) | (0,005) | (0,005 | (0,005) | (0,004) | (0,004) | |||||
45-59 ans | 0,001 | 0,001 | 0,002 | 0,002 | 0,002 | ||||||
(0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | |||||||
60-74 ans | - 0,036 | - 0,028 | - 0,25 | - 0,025 | - 0,023 | - 0,024 | - 0,009 | ||||
(0,007) | (0,007) | (0,007) | (0,007) | (0,007) | (0,006) | (0,006) | |||||
% des femmes de 15 ans ou plus non- scolarisées | Sans diplôme | - 0,023 | - 0,025 | - 0,025 | - 0,023 | - 0,023 | - 0,029 | ||||
(0,004) | (0,004) | (0,004) | (0,004) | (0,003) | (0,003) | ||||||
BEPC | - 0,017 | - 0,019 | - 0,019 | - 0,018 | - 0,017 | - 0,018 | |||||
(0,003) | (0,003) | (0,003) | (0,004) | (0,003) | (0,003) | ||||||
CAP-BEP | - 0,010 | - 0,011 | - 0,011 | - 0,010 | - 0,010 | - 0,020 | |||||
(0,003 | (0,003) | (0,003) | (0,003) | (0,003) | (0,003) | ||||||
Bac | - 0,003 | - 0,002 | - 0,002 | - 0,000 | |||||||
(0,004) | (0,004) | (0,004) | (0,004) | ||||||||
Bac+2 | 0,002 | 0,001 | 0,001 | 0,002 | |||||||
(0,004) | (0,004) | (0,004) | (0,004 | ||||||||
Supérieur | - 0,025 | - 0,025 | - 0,025 | - 0,024 | - 0,020 | - 0,023 | |||||
(0,005) | (0,006) | (0,006) | (0,006) | (0,005) | (0,004) | ||||||
% dans l’emploi au lieu de travail | Agriculture | 0,195 | 0,198 | 0,098 | 0,004 | 0,004 | |||||
(0,305) | (0,307) | (0,311) | (0,002) | (0,002) | |||||||
Construction | 0,069 | 0,070 | 0,033 | ||||||||
(0,114) | (0,114) | (0,116) | |||||||||
Industrie | 0,357 | 0,363 | 0,175 | ||||||||
(0,576) | (0,579) | (0,587) | |||||||||
Commerce | 0,100 | 0,102 | 0,050 | ||||||||
(0,156) | (0,159) | (0,161) | |||||||||
Services aux particuliers | 0,130 | 0,132 | 0,067 | 0,005 | 0,004 | ||||||
(0,200) | (0,201) | (0,204) | (0,002) | (0,002) | |||||||
Services aux entreprises | 0,141 | 0,143 | 0,071 | ||||||||
(0,220) | (0,222) | (0,224) | |||||||||
Autres services | 0,274 | 0,278 | 0,135 | ||||||||
(0,437) | (0,439) | (0,445) | |||||||||
Salaire net horaire à temps complet | - 0,000 | - 0,000 | |||||||||
(0,003) | (0,004) | ||||||||||
Superficie | 0,004 | 0,004 | 0,002 | ||||||||
(0,002) | (0,002) | (0,002) | |||||||||
Taux de stabilité | - 0,004 | - 0,004 | 0,001 | ||||||||
(0,002) | (0,002) | (0,002) | |||||||||
Densité de population | 0,003 | 0,003 | 0,004 0,002 | 0,006 | 0,005 | 0,005 | 0,005 | 0,005 | 0,002 | ||
(0,003) | (0,003) | (0,002) (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | (0,002) | |||
Indic. rég. (21, réf.=IdF) et frontière | Non | Non | Non Non | Non | Non | Non | Non | Non | Oui | ||
N = 304 | R2 ajusté | 0,02 | 0,26 | 0,58 0,73 | 0,78 | 0,78 | 0,78 | 0,78 | 0,79 | 0,86 |
analyse en coupe, estimation par MCO
Données : recensement de la population 2006, Insee.24 L’amplitude de l’effet territoire ouvrier peut également être questionnée sous l’angle de la composition sectorielle de l’emploi local. Il s’agit en particulier, dans une optique d’inadéquation géographique, d’examiner si la structure de l’emploi des territoires ouvriers est spécifiquement défavorable à l’emploi féminin. L’estimation du modèle 6 (cf. tableau 1) montre que cela joue en fait un rôle modéré dans l’interprétation de la relation d’intérêt : ajuster l’estimation en tenant compte de la structure sectorielle de l’emploi local ne réduit que faiblement l’effet estimé (12). Un autre aspect potentiellement important est le niveau moyen des salaires locaux : le modèle 7 (cf. tableau 1) joint le salaire net horaire à temps complet parmi les variables de conditionnement sans affecter l’effet territoire ouvrier.
25 Les dernières dimensions prises en considération sont la superficie de chaque zone d’emploi et le taux de stabilité de la main-d’œuvre résidente (rapport du nombre d’actifs résidant et travaillant au sein d’une zone sur l’ensemble des résidents occupant un emploi). Il s’agit ici de repérer d’éventuels obstacles à la circulation de main-d’œuvre entre ZE qui pourraient être propres aux territoires ouvriers. Concernant la variable superficie, l’a priori était que des zones étendues (à densité donnée) soient spécifiquement défavorables à l’emploi féminin – les femmes manifestant, sur données individuelles, un plus fort attachement à la proximité spatiale de l’emploi – Roberts et Taylor (2016). À l’échelle agrégée, cet a priori est détrompé (modèle 8, cf. tableau 1) : les autres conditionnements étant fixés, la superficie jouerait (très légèrement) en faveur de taux d’emploi féminin élevés. Quant au taux de stabilité de chaque ZE, il pourrait jouer un rôle important, l’hétérogénéité restant très grande entre des zones très connectées à leurs voisines (taux de stabilité inférieur à 70 %, ex. Paris) et d’autres moins (taux de stabilité proche de 90 %, ex. Rennes). L’estimation du modèle 8 (cf. tableau 1) montre que cet aspect joue dans le sens attendu mais de façon modeste. Conjointement, ajuster l’estimation de la superficie et du taux de stabilité ne réduit que très légèrement l’amplitude de l’effet territoire ouvrier qui reste de l’ordre de 2,8 points de pourcentage pour un écart-type.
26 Le constat de l’écart-type élevé de plusieurs des coefficients estimés du modèle 8 (cf. tableau 1) indique un très vraisemblable problème de multi-colinéarité qui rend hasardeux l’interprétation des coefficients concernés et qui, surtout, peut influencer l’estimation de la relation d’intérêt. Pour traiter ce problème, plusieurs procédures de sélection (ascendante, descendante, graduelle) de variables explicatives ont été appliquées avec pour critère l’indice d’information d’Akaike. L’ensemble des variables du modèle 8 sont incluses y compris la variable d’intérêt (la part de ménages ouvriers). Il s’avère que les trois procédures conduisent à sélectionner exactement la même liste de variables correspondant au modèle 9 (cf. tableau 1) dont la part d’ouvrières et la part de ménages ouvriers (mais non le terme d’interaction). Ainsi purgé, le rôle de chaque déterminant apparaît remarquablement conforme à l’intuition et aux résultats existant sur données micro-économiques. À autres variables de conditionnement données : la proportion de personnes seules parmi les ménages et de couples avec enfant(s) parmi les familles jouent en faveur de taux d’emploi féminin élevés, à l’inverse de la proportion de familles monoparentales (mères isolées pour l’essentiel) ; la proportion de femmes peu diplômées joue en défaveur de taux d’emploi élevé ce d’autant plus qu’il s’agit de femmes sans diplôme ou dotées du seul BEPC ; le poids de l’emploi agricole joue en faveur de taux d’emploi féminin élevé, tout comme celui des services aux particuliers (secteur réputé intense en emploi féminin peu qualifié). Avec cette spécification purgée de problèmes de multi-colinéarité, l’effet territoire ouvrier se stabilise à -3 points.
L’autocorrélation spatiale
27 L’analyse étant menée à l’échelle de la ZE, on ne peut exclure a priori l’existence d’une interdépendance entre observations, qui impliquerait des estimateurs MCO biaisés du fait de l’omission de variables explicatives spatialement corrélées à la variable d’intérêt (13). Dans le cadre de la présente analyse, le taux d’emploi féminin local peut par exemple être accru par le voisinage de zones elles-mêmes favorables à l’emploi féminin (effet de débordement) (14). Le taux d’emploi au sein d’une zone s’explique alors partiellement par ce qui se passe hors de cette zone. Le graphique de Moran proposé décrit la situation en mettant en relation le taux d’emploi de chaque ZE avec la moyenne pondérée du taux d’emploi de ses voisines ; la matrice de voisinage retenue pondère le lien entre deux ZE distinctes par l’inverse de la distance euclidienne entre leur centroïdes, dans la limite de 100 km (au-delà, la pondération est fixée à zéro). Cette figure confirme l’impression donnée par la carte figure 1, à savoir une autocorrélation positive des taux d’emploi féminin. Reste à savoir si ces effets ne se réduisent pas à l’action des déterminants locaux figurant dans le modèle 9 (cf. tableau 1) dont les valeurs diffèrent également d’une ZE à l’autre et peuvent elles-mêmes présenter la même dépendance spatiale. Pour cela, le test de Moran est réalisé sur les résidus d’ajustement du modèle 9 (cf. tableau 1) : l’hypothèse nulle (absence d’autocorrélation spatiale) est rejetée que l’on utilise pour pondération la distance inverse, la contiguïté ou le critère des cinq plus proches voisins (15). Le risque d’estimateurs biaisés est donc bel et bien présent. Une façon simple (qui peut s’avérer insuffisante) de répondre à ce problème consiste à introduire des indicatrices géographiques ; il s’agit d’autoriser l’ajustement linéaire à faire intervenir des constantes différentes pour divers sous-ensembles de ZE – Floch et Le Saout (2016). Deux types d’indicatrices sont introduits : 21 indicatrices régionales (en prenant l’Ile-de-France pour référence) ; une indicatrice « frontière ». L’estimation du coefficient des principales explicatives correspond au modèle 10 tableau 1 (la valeur estimée de « l’effet frontière » et des effets régionaux ne sont pas reportés (16)). Inclure ces indicatrices a un impact très sensible sur l’effet territoire ouvrier puisque son amplitude s’en trouve réduite d’environ un tiers. Si l’on revient à une interprétation de l’effet territoire ouvrier comme reflet d’un problème de distance spatiale à l’emploi féminin, l’introduction d’indicatrices régionales revient à recentrer la discussion sur une possible inadéquation géographique infrarégionale. Si une part significative du problème tient à une inadéquation interrégionale, ce choix revient à sous-estimer le problème.
28 Neutraliser l’action des effets région et frontière suffit-il à lever l’interdépendance spatiale ? Les résultats reportés dans le tableau 2 permettent de répondre négativement : le risque de rejeter à tort l’hypothèse d’absence d’autocorrélation spatiale des résidus est nul. Il y a donc véritablement lieu de prendre en compte des interactions spatiales. La question dès lors est de choisir la spécification la mieux adaptée au type d’interdépendance spatiale caractérisant les données. La littérature distingue trois formes d’interdépendance spatiale qui ne sont pas mutuellement exclusives : l’autocorrélation endogène, exogène et/ou inobservée (Floch et Le Saout, 2016). La détection de la première forme justifie une spécification autorégressive, ici l’inclusion du taux d’emploi féminin moyen des zones voisines parmi les explicatives : il s’agit d’une modélisation spatiale autorégressive (SAR). La détection de la deuxième forme d’interdépendance spatiale justifie de conditionner l’ajustement par les valeurs moyennes de chaque explicative au sein des zones voisines, modélisation à variables exogènes spatialement décalées (SLX pour « spatial lag X »). Enfin, le cas d’une interdépendance provenant de variables inobservées justifie le recours à une modélisation à erreurs auto-corrélées (SE). Les modèles SAR et SE sont estimés par maximum de vraisemblance (MV) tandis que le modèle SLX peut l’être par MCO. L’application de tests du multiplicateur de Lagrange au modèle 10 permet de détecter la présence d’une interdépendance endogène et/ou inobservée et de juger de l’opportunité de spécification autorégressive de l’endogène (SAR) et/ou du terme d’erreur (SE). La version robuste de ce test intègre la possibilité que les deux formes coexistent. Le tableau 2 fournit les résultats obtenus à partir du modèle 10 (tableau 1, sans interaction spatiale) pour trois matrices de voisinage (distance, contiguïté, cinq plus proches voisins). La nécessité de prendre en compte une interdépendance endogène est sans ambiguïté. L’utilité d’une spécification autorégressive des erreurs est en revanche moins claire (l’hypothèse nulle est acceptable lorsqu’on représente les relations de voisinage par une matrice de contiguïté).
graphique de Moran du taux d’emploi féminin 2006
graphique de Moran du taux d’emploi féminin 2006
Lecture : les croix signalent les ZE ayant la plus forte influence sur la valeur du I de Moran.Données : recensement de la population 2006, Insee.
29 Le choix de spécification s’opère alors en estimant les divers modèles d’interaction spatiale (SAR, SE, SLX) et en comparant leur performance (pouvoir prédictif, neutralisation de l’autocorrélation spatiale) ; on suit ici l’approche d’Elhorst (2010). Les résultats obtenus sont rassemblés dans le tableau 3 : outre les spécifications déjà évoquées, ce tableau comporte l’estimation d’un modèle spatial de Durbin (SD) qui conjugue spécification autorégressive de la variable dépendante (taux d’emploi féminin) et valeur spatialement décalée des variables exogènes. Les résultats du tableau 3 correspondent à une matrice de voisinage assimilant la proximité entre zone à la distance inverse entre leur centroïde (dans la limite de 100 km) mais l’ensemble des conclusions tirées désormais sont robustes à l’utilisation des deux autres matrices de voisinage considérées. Le tableau 3 comporte également les résultats d’un test du multiplicateur de Lagrange d’autocorrélation résiduelle des erreurs pour les modèles SAR et SD, ainsi que d’un test de rapport de vraisemblances comparant le modèle SD aux modèles SAR et SE. Le modèle SE est rejeté car nettement dominé par le modèle SD ; le modèle SAR débouche sur des erreurs dont l’indépendance spatiale peut être acceptée mais s’avère également dominé en termes de pouvoir prédictif par le modèle SD. Ces résultats orientent vers l’intégration d’explicatives spatialement décalées. Reste à juger des mérites comparés des modèles SD et SLX. Le principal enjeu concerne la mesure de l’effet des différentes explicatives et son interprétation : la spécification autorégressive associée au modèle SD implique que les coefficients estimés ne fournissent pas une mesure immédiate de ces effets du fait de rétroactions provenant de zones voisines (17). Gibbons et Overman (2012) et Vega Halleck et Elhorst (2015) s’accordent pour considérer qu’en l’absence de justification théorique précise (comme c’est le cas ici), la spécification SLX est préférable. Sans entrer dans ce débat, les résultats reportés dans le tableau 3 montrent que le coefficient associé au terme autorégressif du modèle SD est peu significatif de sorte que le pouvoir prédictif des deux spécifications est sensiblement le même. L’application des tests d’indépendance spatiale au modèle SLX (cf. tableau 2) confirme qu’il s’agit plutôt d’un bon modèle : on propose donc de s’en satisfaire.
30 Quelques mots de commentaire sur l’estimation du modèle SLX (18). Pour s’en tenir aux principales explicatives, cinq d’entre elles donnent lieu à des interactions spatiales significatives dont trois au seuil de 1 % : la part de familles monoparentales, le poids des services aux particuliers dans l’emploi et la densité de peuplement. La part moyenne de familles monoparentales des zones voisines réduit le taux d’emploi féminin local. À l’inverse, le poids moyen des services aux particuliers et la densité de peuplement des zones voisines accroît le taux d’emploi féminin local. Dans l’optique d’une interprétation en termes d’inadéquation géographique, ce résultat est intéressant car il suggère que le voisinage de ZE dont l’économie résidentielle (19) est dynamique joue favorablement sur l’accès à l’emploi de main-d’œuvre féminine locale.
risques de première espèce (p-value) des tests d’indépendance spatiale
Modèle avec indicatrices région et frontière | Sans interaction spatiale | SLX | Sans interaction spatiale | SLX | Sans interaction spatiale | SLX |
Pondération du voisinage | Distance inverse | Contiguïté | Cinq plus proches voisins | |||
Test de Moran | 0,000 | 0,020 | 0,000 | 0,004 | 0,000 | 0,010 |
Test du multiplicateur de Lagrange Robuste Erreurs auto-corrélées Endogène autorégr. |
0,000 0,000 |
0,800 0,800 |
0,200 0,000 |
0,400 0,300 |
0,000 0,000 |
0,030 0,040 |
Simple Erreurs auto-corrélées Endogène autorégr. |
0,000 0,000 |
0,200 0,200 |
0,000 0,000 |
0,900 0,700 |
0,000 0,000 |
0,600 0,800 |
risques de première espèce (p-value) des tests d’indépendance spatiale
Données : recensement de la population 2006, Insee.analyse en coupe, modèles avec interactions spatiales (résultats obtenus avec une matrice de distance inverse)
Modèle | Taux d’emploi des femmes de 15-64 ans | |||||||
(10) | SE | SAR | SD (MV) | SLX (MCO) | ||||
(MCO) | (MV) | (MV) | Direct | Voisin | Direct | Voisin | ||
Constante | 0,608 (0,008) | 0,605 (0,008) | 0,418 (0,035) | 0,712 (0,072) | 0,599 (0,027) | |||
% de ménages ouvriers | - 0,019 (0,005) | - 0,018 (0,005) | - 0,017 (0,005) | - 0,018 (0,004) | - 0,020 (0,016) | - 0,017 (0,005) | - 0,016 (0,018) | |
% d’ouvrières (parmi 15 ans et plus) | 0,023 (0,003) | 0,023 (0,003) | 0,021 (0,003) | 0,022 (0,003) | 0,015 (0,035) | 0,023 (0,003) | 0,010 (0,010) | |
% des ménages | Personne seules | 0,007 (0,003) | 0,006 (0,003) | 0,004 (0,003) | 0,010 (0,003) | 0,023 (0,008) | 0,010 (0,003) | 0,021 (0,009) |
% des familles | Couples avec enfant | 0,007 (0,005) | 0,007 (0,005) | 0,004 (0,005) | 0,011 (0,005) | 0,025 (0,012) | 0,011 (0,006) | 0,024 (0,014) |
Familles monoparentales | - 0,010 (0,003) | - 0,008 (0,002) | - 0,007 (0,002) | - 0,012 (0,002) | - 0,036 (0,007) | - 0,011 (0,003) | - 0,033 (0,008) | |
% des femmes | 15-29 ans | - 0,008 (0,004) | - 0,009 (0,004) | - 0,007 (0,003) | - 0,005 (0,003) | 0,008 (0,010) | - 0,006 (0,004) | 0,010 (0,011) |
30-44 ans | 0,020 (0,004) | - 0,030 (0,004) | - 0,019 (0,003) | 0,014 (0,003) | - 0,001 (0,010) | 0,014 (0,004) | - 0,004 (0,011) | |
60-74 ans | - 0,009 (0,006) | - 0,009 (0,006) | - 0,009 (0,006) | - 0,007 (0,006) | 0,002 (0,018) | - 0,007 (0,007) | - 0,003 (0,021) | |
% des femmes de 15 ans ou plus non-scolarisées | Sans diplôme | - 0,029 (0,003) | - 0,030 (0,003) | - 0,028 (0,003) | - 0,026 (0,003) | 0,006 (0,008) | - 0,027 (0,003) | 0,010 (0,009) |
BEPC | - 0,018 (0,003) | - 0,017 (0,003) | - 0,017 (0,003) | - 0,014 (0,003) | - 0,007 (0,008) | - 0,014 (0,003) | - 0,005 (0,010) | |
CAP-BEP | - 0,020 (0,003) | - 0,019 (0,003) | - 0,019 (0,003) | - 0,016 (0,003) | 0,011 (0,008) | - 0,016 (0,003) | 0,004 (0,009) | |
Supérieur |
- 0,023 (0,004) | - 0,021 (0,004) | - 0,020 (0,004) | - 0,018 (0,004) | - 0,016 (0,013) | - 0,018 (0,004) | - 0,013 (0,014) | |
% dans l’emploi au lieu de travail | Agriculture | 0,004 (0,002) | 0,004 (0,002) | 0,005 (0,002) | 0,006 (0,002) | 0,003 (0,005) | 0,005 (0,002) | 0,003 (0,006) |
Services aux particuliers | 0,004 (0,002) | 0,003 (0,002) | 0,002 (0,002) | 0,004 (0,002) | 0,018 (0,005) | 0,004 (0,002) | 0,017 (0,005) | |
Superficie | 0,001 (0,002) | 0,001 (0,002) | 0,002 (0,002) | 0,000 (0,001) | - 0,000 (0,005) | 0,000 (0,002) | - 0,000 (0,006) | |
Taux de stabilité | 0,002 (0,002) | 0,002 (0,002) | 0,002 (0,002) | 0,000 (0,002) | - 0,005 (0,007) | 0,000 (0,002) | - 0,005 (0,008) | |
Densité de population | 0,002 (0,002) | 0,002 (0,002) | 0,001 (0,002) | - 0,000 (0,002) | 0,025 (0,007) | - 0,000 (0,002) | 0,025 (0,008) | |
Indicatrices régions (21, réf.=IdF) et frontière | Oui | Oui | Oui | Oui | Oui | |||
Erreur MCO moyenne des zones voisines | 0,260 (0,096) | |||||||
Taux d’emploi féminin moyen des zones voisines | 0,310 (0,056) | - 0,190 (0,110) | ||||||
N =304 | R2 ajusté | 0,86 | 0,89 | |||||
AIC | - 1 503 | - 1 503 | - 1 526 | - 1 553 | - 1 552 | |||
Risques de première espèce (p-value) de tests de spécification des dépendances spatiales | ||||||||
Multiplicateur de Lagrange | Autocorrélation résiduelle | 0,162 | 0,222 | |||||
Rapport de vraisemblance | Voisinage exogène (SAR/SD) | 0,000 | ||||||
Hypothèse de facteur commun (SE/SD) | 0,000 |
analyse en coupe, modèles avec interactions spatiales (résultats obtenus avec une matrice de distance inverse)
Données : recensement de la population 2006, Insee.31 Qu’en est-il finalement de l’estimation de la relation d’intérêt une fois tenu compte des interactions spatiales ? L’effet territoire ouvrier s’avère légèrement atténué mais reste très significatif (modèle SLX, tableau 3) : pour des valeurs données de l’ensemble des variables de conditionnement locales et voisines, un écart-type à la hausse de la proportion locale de ménages est associé à un handicap direct de 1,7 points de pourcentage de taux d’emploi féminin. Il s’agit désormais de mieux comprendre la signification de ce handicap.
Analyse de l’effet territoire ouvrier
32 Le but de la présente section est de cadrer les interprétations envisageables de l’effet territoire ouvrier mis en évidence ci-dessus. On y traite plusieurs questions : cet effet correspond-t-il, pour les populations féminines concernées, à une moindre participation au marché du travail ou à plus de chômage ? Touche-t-il exclusivement les femmes ? Quel segment d’âges cet effet concerne-t-il principalement ? Peut-il être associé à une surfécondité des populations concernées ? À des formes particulières d’inactivité ? Est-il cohérent avec l’hypothèse d’un marquage socioprofessionnel du problème posé par l’inadéquation géographique ? Il s’agit ici d’apporter des éléments de réponse en considérant des variantes modifiant la variable expliquée dans le cadre du modèle SLX adopté précédemment.
33 À ce stade l’effet territoire ouvrier peut s’interpréter comme l’expression d’un choix, au sein des populations féminines concernées, de rester hors de l’emploi (non-emploi choisi). Le modèle est appliqué successivement au taux d’activité et au taux de chômage féminin : les effets estimés indiquent qu’il y a bien un aspect subi dans le non-emploi féminin des territoires ouvriers (cf. tableau 4). À valeurs données de l’ensemble des variables de conditionnement, une part plus forte de ménages ouvriers est associée à des taux d’activité féminine plus faibles mais aussi à des taux de chômage féminin plus élevés. L’ordre de grandeur du coefficient obtenu pour le taux de chômage est remarquablement élevé : une proportion de ménages ouvriers accrue d’un écart-type représente 1,1 point de taux de chômage féminin en plus. Le lien à la participation féminine au marché du travail apparaît proportionnellement plus limité : -1,2 point de pourcentage. Ces résultats peuvent à la fois traduire une insuffisante disponibilité locale d’emploi tertiaire féminin (d’où un sur-chômage féminin) et une propension spécifique des populations féminines des territoires ouvriers au repli (sous-activité féminine). Les deux aspects peuvent d’ailleurs découler d’un même problème sous-jacent d’inadéquation géographique, le premier opérant directement, le second via un effet « chômeur découragé ».
l’effet territoire ouvrier, variantes « sexe, âge, activité, chômage, fécondité » (modèle SLX)
Femmes 15-64 ans | ||||||
Taux d’emploi | Taux d’activité | Taux de chômage | ||||
Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | |
Constante | 0,599 (0,027) | 0,675 (0,020) | 0,116 (0,020) | |||
% de ménages ouvriers | - 0,017 (0,005) | - 0,016 (0,018) | - 0,012 (0,004) | - 0,005 (0,014) | 0,011 (0,004) | 0,020 (0,014) |
R2 | 0,92 | 0,92 | 0,87 | |||
Femmes 25-54 ans | ||||||
Taux d’emploi | Taux d’activité | Taux de chômage | ||||
Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | |
Constante | 0,764 (0,030) | 0,857 (0,022) |
0,109 (0,020) | |||
% de ménages ouvriers | - 0,024 (0,006) | - 0,033 (0,021) | - 0,017 (0,004) | - 0,019 (0,015) | 0,011 (0,004) | 0,022 (0,014) |
R2 | 0,91 | 0,91 | 0,86 | |||
Hommes 15-64 ans Taux d’emploi | Taux d’inactives non-retraitées (CS8) | Taux de fécondité | ||||
Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | |
Constante |
0,685 (0,021) | 0,173 (0,023) | 0,060 (0,007) | |||
% de ménages ouvriers |
0,005 (0,004) | 0,012 (0,015) | 0,013 (0,004) | 0,010 (0,016) | 0,001 (0,001) | 0,003 (0,005) |
R2 | 0,91 | 0,93 | 0,66 | |||
Ensemble des variables de conditionnement du modèle SLX | Oui | Oui | Oui |
l’effet territoire ouvrier, variantes « sexe, âge, activité, chômage, fécondité » (modèle SLX)
Données : recensement de la population 2006, Insee.34 L’effet territoire ouvrier intervient-il principalement aux extrémités de la vie adulte des populations féminines concernées ou au contraire aux âges intermédiaires ? L’analyse recentrée sur les femmes de 25-54 ans (cf. tableau 4) montre que c’est ce noyau dur de la population en âge de travailler qui est le plus concerné. En termes de taux d’emploi, l’effet estimé passe de -1,7 points à -2,4 points. La nature du non-emploi correspondant est atypique et mérite un approfondissement. C’est le sens de l’examen (cf. tableau 4) de l’influence de la proportion de ménages ouvriers sur celle de femmes assignées à la catégorie 8 de la nomenclature des groupes socio professionnels (20). Ici, le fait de conditionner l’ajustement à la structure par âges de la population féminine permet de resserrer l’interprétation de l’effet territoire ouvrier sur des profils de femmes au foyer, une inactivité relevant d’un repli durable du marché du travail. L’effet estimé du tableau 4 est significatif et d’une amplitude notable lorsqu’on le rapporte au taux de base, 17,3 % : un écart-type à la hausse de la proportion locale de ménages ouvriers élève ce taux à 18,6 % ; il s’agit donc d’un canal de transmission crucial que l’on reconsidère ci-dessous. Cela plaide-t-il pour une interprétation de l’effet territoire ouvrier en termes de surfécondité ? S’intéresser aux différences de comportement de fécondité entre zone apparaît utile : sur données individuelles, Davie et Niel (2012) observe une légère surfécondité parmi les ménages à bas revenu. L’estimation reportée dans le tableau 4 montre qu’à autres variables de conditionnement données, les zones ouvrières ne manifestent pas de taux de fécondité particulièrement élevés.
35 Les analyses documentant l’homogamie socioprofessionnelle sur données individuelles en France pointe, on l’a vu, la nette prépondérance des couples formés d’un homme ouvrier et d’une femme employée (CS5). On en déduit que l’effet territoire ouvrier devrait concerner au premier chef des femmes assignées à cette catégorie, cohabitant avec un homme ouvrier et tenues pour cela éloignées des opportunités d’emploi tertiaire existant hors de leur zone de résidence. Les variantes suivantes permettent de mettre ce scénario à l’épreuve. Première question, l’effet territoire ouvrier concerne-t-il également les hommes ? Le résultat fourni (cf. tableau 4) en substituant au taux d’emploi féminin son pendant masculin indique que non : on a bien affaire à un problème spécifiquement féminin. Seconde question, indépendamment du sexe, la catégorie des employés (CS5) est-elle effectivement la plus concernée ? En considérant une variable dépendante décrivant l’accès à l’emploi des professions intermédiaires (CS4), des employés (CS5) et des ouvriers (CS6), les variantes correspondant aux trois colonnes du tableau 5 indiquent que oui : l’effet territoire ouvrier n’intervient ni pour les professions intermédiaires ni pour les ouvriers mais bel et bien pour les employés. Cela justifie que l’on s’intéresse particulièrement au cas des femmes appartenant à un ménage ouvrier puisque c’est au sein de ces ménages que l’on trouve le plus d’employées.
36 Une dernière étape d’analyse en coupe est maintenant proposée prolongeant la réflexion quant à l’interprétation de l’effet territoire ouvrier.
Disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin et repli
37 Il s’agit de mettre plus directement à l’épreuve cette interprétation en explicitant de possibles manifestations. L’hypothèse serait que, toutes choses égales par ailleurs, une insuffisance locale, propre aux territoires ouvriers, d’activités intenses en main-d’œuvre féminine peu qualifiée détermine un taux d’emploi féminin réduit. Au niveau individuel, cela se traduirait par un risque de chômage accru à court terme et, à défaut de mobilité géographique favorable à l’accès à l’emploi féminin, par une inactivité de repli à plus long terme. Si cette hypothèse est correcte, ajouter parmi les variables de conditionnement un indicateur mesurant le volume de la demande de travail féminin peu qualifié devrait se répercuter sur l’effet territoire ouvrier en supprimant l’un de ses canaux de transmission. L’idée ici est de repartir de la spécification SLX du tableau 3 et d’introduire de telles variables de conditionnement susceptibles de capter l’effet territoire ouvrier. Ces variables sont interprétées comme des marqueurs de court et de long terme d’inadéquation géographique.
l’effet territoire ouvrier, variantes « groupes socioprofessionnels » (modèle SLX)
Taux d’actifs occupés parmi les actifs de 15 ans et plus | ||||||
Professions intermédiaires (CS4) | Employés (CS5) | Ouvriers (CS6) | ||||
Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | |
Constante | 0,945 (0,018) | 0,896 (0,021) | 0,867 (0,026) | |||
% de ménages ouvriers | - 0,004 (0,003) | 0,011 (0,012) | - 0,011 (0,004) | - 0,019 (0,015) | 0,007 (0,005) | - 0,002 (0,017) |
R2 | 0,73 | 0,84 | 0,86 | |||
Ensemble des variables de conditionnement du modèle SLX | Oui | Oui | Oui |
l’effet territoire ouvrier, variantes « groupes socioprofessionnels » (modèle SLX)
Données : recensement de la population 2006, Insee.38 Quels marqueurs de ce type peut-on envisager ? Un premier est la disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin : cette variable est a priori au croisement de la question de la proximité géographique de l’emploi et du cas des femmes employées (CS5). Les résultats obtenus correspondent au modèle 12 (cf. tableau 6). Le rôle de la disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin est significatif et intervient dans le sens attendu : à autres variables de conditionnement données, un écart-type à la hausse représente 1,4 point de taux d’emploi féminin en plus. Cela dit, ajouter ce conditionnement ne fait que réduire l’effet territoire ouvrier (de -1,7 à -1,4 points de taux d’emploi) qui reste significatif. Les zones ouvrières sont de façon attendue moins bien dotées que la moyenne en emploi tertiaire féminin local mais cet aspect est loin de capter l’ensemble de l’effet d’intérêt. Le même exercice (résultats non reportés) est réalisé en retenant alternativement le taux de chômage et le taux d’activité comme variable dépendante. L’amplitude de l’effet territoire ouvrier n’en est que modérément réduit (d’environ 2 dixièmes de points dans chaque cas) et reste statistiquement très significatif. Ces résultats peuvent donner lieu à plusieurs interprétations. Première piste, l’effet territoire ouvrier est pour l’essentiel indépendant de tout problème d’inadéquation géographique : il pourrait par exemple avoir le statut d’une norme sociale inaccessible à une analyse en termes de facteurs économiques « proximaux ». Deuxième piste, les variations de disponibilité locales d’emploi tertiaire féminin peuvent refléter la répartition géographique de la fonction publique. La présence de fonctionnaires sur un territoire ne capte que partiellement les opportunités locales d’emploi des compagnes d’ouvrier. Si tel est le cas, joindre ce conditionnement permet de corriger un biais de variable omise (et de confirmer la robustesse de l’effet territoire ouvrier) mais pas d’obstruer de façon complète, comme le voudrait l’analyse, la transmission de l’effet territoire ouvrier par la distance géographique aux opportunités d’emploi. Troisième piste, la disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin est un marqueur satisfaisant de proximité aux opportunités d’emploi pour les compagnes d’ouvrier mais les problèmes de distance géographique à l’emploi exercent une action de long terme du fait de l’inertie des comportements (rendue éventuellement possible par le système socio-fiscal ; Davezies, 2008). Des femmes résidant en territoire ouvrier font l’expérience d’un chômage prolongé (ou observent autour d’elles des difficultés particulières d’accès à l’emploi) : elles optent, de façon adaptative, dans une logique de « chômeur découragé », pour un repli du marché du travail en se recentrant éventuellement sur la production domestique, un scénario conforté par les conclusions d’Allègre et alii (2015). On propose d’approfondir la réflexion dans cette direction.
39 Deux marqueurs de repli dans l’inactivité déjà considérées plus haut le sont ici à nouveau, cette fois en tant que canaux de transmission potentiels de l’effet territoire ouvrier. Il s’agit du nombre de naissances annuelles par résidente en âge de procréer et de la part d’individus non retraités sans activité professionnelle (CS8) parmi les résidentes de 15 ans et plus. Le modèle 13 (cf. tableau 6) fait certes apparaître une influence négative du taux de fécondité locale sur le taux d’emploi féminin mais une liaison non-significative et surtout sans répercussion sur l’effet territoire ouvrier estimé. La dernière variable introduite, la part de femmes non retraitées sans activité professionnelle (CS8), a déjà été identifiée comme fortement associée à l’effet territoire ouvrier (cf. tableau 4). L’influence négative de cette variable sur le taux d’emploi féminin intervient par définition. L’intérêt ici est plutôt de constater qu’obstruer ce canal de transmission (modèle 14, tableau 6) fait perdre à l’effet territoire ouvrier l’essentiel de sa significativité statistique (p-value = 0,06) et bouleverse le coefficient estimé de la plupart des autres explicatives (résultat non reporté). L’analyse indique que la part de femmes CS8 est liée essentiellement (colinéarité manifeste) à la structure par âges et par niveau de diplôme de la population féminine. L’information supplémentaire contenue dans cette nouvelle variable de conditionnement qui capte une bonne part de l’effet territoire ouvrier doit tenir à autre chose qu’à la part de femmes de classes d’âge à faible participation (15-29 ans et 60-74 ans) ou de femmes peu diplômées : reste la possibilité, là où la part de ménages ouvriers est forte, d’une fraction particulièrement élevée de femmes au foyer potentiellement diplômées mais sans expérience d’emploi.
40 Le modèle 15 (cf. tableau 6) intègre simultanément les trois marqueurs : il permet en particulier d’évaluer leur influence réciproque. Conformément à l’intuition, leurs rôles ne sont pas indépendants. L’influence du taux de fécondité se trouve en particulier considérablement réévalué puisqu’il devient très significatif statistiquement, ce dans le sens attendu. À valeurs données de l’ensemble des autres variables de conditionnement, le taux d’emploi féminin serait donc plus bas dans les territoires ouvriers via une moindre disponibilité de l’emploi tertiaire féminin mais aussi parce que : à proportion d’inactives données, les femmes des territoires ouvriers font plus d’enfants que la moyenne et surtout, à fécondité donnée, la proportion de femmes en inactivité de repli est plus forte que la moyenne.
41 Dans le cadre d’une interprétation de l’effet territoire ouvrier en termes d’inadéquation géographique, l’analyse de ces résultats pourrait être la suivante. L’inactivité de repli serait une manifestation de long terme du fait, pour les femmes concernées, de vivre à distance de leurs opportunités d’emploi : ajouter les marqueurs correspondants parmi les variables de conditionnement reviendrait à fermer le principal canal de transmission de l’effet territoire ouvrier qui serait alors réduit à une composante de court terme de l’ordre de -0,7 point de pourcentage (modèle 14, tableau 6). Cette piste d’interprétation est à présent approfondie à l’aide d’une analyse en variations, susceptible de nous aider à séparer composantes de court et de long terme de l’effet territoire ouvrier.
Analyse économétrique en variations de la relation entre proportion de ménages ouvriers et taux d’emploi féminin
42 L’objectif de la présente partie est d’estimer le modèle de taux d’emploi féminin obtenu précédemment en neutralisant les sources d’hétérogénéité entre zones, inobservées mais stables sur cinq ans, par une analyse en variations. Il s’agit en particulier d’approfondir l’analyse de l’effet territoire ouvrier en tentant d’approcher des composantes de long (effet fixe sur cinq ans) et de court terme. L’opportunité d’un modèle à effet fixe est ici particulièrement nette parce que les 304 zones considérées représentent la France métropolitaine dans sa totalité (Elhorst, 2014, p. 56). L’utilisation du recensement de la population dans sa version rénovée en 2004, ce à une échelle infrarégionale, nécessite cependant quelques précautions. Les modalités de collecte n’impliquent un renouvellement complet de l’échantillon enquêté de chaque commune qu’entre millésimes écartés d’au moins cinq ans. Pour un écart d’une durée inférieure, s’agissant de variables influencées par la conjoncture et sans tendance régulière, les comparaisons entre territoires peuvent être trompeuses en particulier dans le cas de zones faiblement peuplées . On s’en tiendra donc ici à une analyse en variations quinquennales. Le découpage des ZE reposant sur des données de mobilités alternantes du recensement de 2006, l’analyse aurait pu concerner les années 2006 et 2011 (garantie d’une pertinence maximale du zonage d’étude). Un changement de nomenclature (21) opéré entre les enquêtes 2006 et 2007 nécessitent cependant de travailler sur les années 2007 et 2012.
disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin et repli, modèle SLX
Taux d’emploi des femmes de 15-64 ans | ||||||||||
(11) | (12) | (13) | (14) | (15) | ||||||
Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | |
Constante | 0,599 (0,027) | 0,598 (0,023) | 0,598 (0,026) | 0,576 (0,021) | 0,567 (0,019) | |||||
% de ménages ouvriers |
- 0,017 (0,005) | - 0,016 (0,018) | - 0,014 (0,004) | - 0,012 (0,016) | - 0,017 (0,005) | - 0,015 (0,019) | - 0,007 (0,004) | - 0,011 (0,014) | - 0,006 (0,004) | - 0,001 (0,013) |
Disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin | 0,014 (0,002) | - 0,014 (0,007) | 0,009 (0,002) | - 0,008 (0,006) | ||||||
Taux de fécondité (naissances par femmes de 15-45 ans) | - 0,002 (0,002) | - 0,000 (0,005) | - 0,006 (0,001) | - 0,000 (0,003) | ||||||
% d’inactives non retraitées parmi les femmes de 15 ans et plus | - 0,036 (0,003) | 0,006 (0,008) | - 0,031 (0,003) | - 0,007 (0,008) | ||||||
Ensemble des variables de conditionnement du modèle SLX | Oui | Oui | Oui | Oui | Oui | |||||
R2 ajusté | 0,89 | 0,89 | 0,87 | 0,94 | 0,95 |
disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin et repli, modèle SLX
Données : recensement de la population 2006, Insee.43 Une réflexion préalable sur l’interprétation de l’effet territoire ouvrier est nécessaire : comment l’hypothèse d’un problème de distance géographique à l’emploi (inadéquation géographique) doit-elle être traitée dans le cadre d’un modèle à effet fixe ? Plus précisément, l’inadéquation géographique tend-t-elle à se résorber avec le temps (sous l’effet des mobilités de l’emploi et/ou de la main-d’œuvre) ou s’agit-il d’un phénomène durable, que l’on peut à tout le moins retrouver inchangé sur un intervalle de temps de cinq années ? Sur la période 2007-2012, les éléments d’analyse empirique disponibles plaident plutôt pour l’hypothèse d’un phénomène stable voire plus fort. À volume d’emploi local donné, sa résorption devrait impliquer une accélération des mobilités résidentielles. Sigaud (2014) ne distingue pas de tendance de ce type entre 2006 et 2011 : il constate au contraire un recul très net des mobilités résidentielles (ibid. graphique 7, p. 89), celles-ci étant procyclique. Alternativement, à volume de main-d’œuvre locale donné, la résorption de l’inadéquation géographique envisagée devrait requérir une accélération de la création d’emploi en territoires ouvriers. L’analyse pour la période 1999-2011 réalisée par l’Observatoire des territoires (22) ne décèle rien de tel, le phénomène se serait au contraire intensifié. Ces éléments amènent à penser qu’une analyse en variations quinquennales devrait neutraliser l’essentiel des effets de l’inadéquation géographique de la composante de long terme. Si l’effet territoire ouvrier s’explique effectivement par un problème d’inadéquation géographique entre offre de travail des compagnes d’ouvrier et demande de travail tertiaire féminin peu qualifié, l’analyse en variations quinquennales devrait pour l’essentiel le faire disparaître.
44 Le traitement de potentielles interactions spatiales (pouvant biaiser l’estimation du modèle de référence) est conduite conformément aux recommandations d’Elhorst (2014) : partant d’un modèle sans interaction spatiale, les tests du multiplicateur de Lagrange adaptés aux modèles à effet fixe sont menés pour les trois matrices de voisinages considérées jusque-là (pondération par distance inverse, contiguïté et cinq plus proches voisins). On retient pour l’analyse la spécification prenant le mieux en compte les interactions spatiales. Dans les résultats du tableau 7, les écarts-types estimés sont robustes (en suivant, lorsqu’une interaction spatiale est prise en compte, la procédure de correction de Lee et Yu, 2010).
Modélisation sans interactions spatiales
45 Commençons par commenter les résultats de l’analyse en coupe sur données 2007 et 2012 regroupées (pooling), tableau 7. Modulo une légère différence de spécification associée au changement de nomenclature mentionnée ci-dessus, ces résultats peuvent être mis en relation avec ceux du modèle 9 (cf. tableau 1). L’effet territoire ouvrier ressort significativement et l’on observe, pour la plupart des déterminants du taux d’emploi féminin, peu de différences dans les coefficients de régression estimés. Deux observations peuvent pourtant être proposées. Premier aspect, l’augmentation de la constante assimilable au taux d’emploi moyen (sur l’ensemble des ZE métropolitaines) : 59,2 % contre 58,1 % sur données 2006. Cela est cohérent avec l’évolution mesurée sur données individuelles à partir de l’Enquête emploi (mais de plus forte ampleur, suggérant que les hausses de taux d’emploi féminin ont été plus fortes dans les ZE moins peuplées). Un second aspect concerne le coefficient estimé pour l’effet territoire ouvrier qui paraît se réduire (de 3,0 à 2,3 points de pourcentage pour un écart-type). L’analyse conjointe de ces deux aspects permet un éclairage sur cet effet : sur la période, le taux d’emploi féminin a augmenté plus fortement dans les ZE plus ouvrières, ce qui aura contribué à réduire l’effet territoire ouvrier. Une telle analyse est cohérente avec les conclusions de Baguelin (2013) : la politique de contrats aidés menée face à la crise a été spécialement favorable aux zones rurales industrielles et aux femmes aux marges de l’activité. L’atténuation de l’effet territoire ouvrier ne serait qu’un reflet des politiques publiques adoptées pour répondre au recul de l’emploi global sur la période.
46 L’estimation du modèle à effet fixe conduit à une très forte atténuation de l’effet territoire ouvrier : le coefficient correspondant est ramené au-dessous de 0,9 point (en valeur absolue) et cesse d’être statistiquement significatif (cf. tableau 7, deuxième colonne). Cette perte de significativité se manifeste pour la plupart des déterminants sélectionnés dans le cadre de l’analyse en coupe, seule l’influence de la proportion de femmes sans diplôme reste fortement significative, le rôle de la part de familles monoparentales ne restant lui-même significatif qu’au seuil de 10 %. Si, comme cela a été indiqué précédemment, les problèmes d’inadéquation géographique peuvent être considérés comme des facteurs fixes sur 2007-2012, la disparition constatée de l’effet territoire ouvrier est cohérente avec son interprétation en termes d’inadéquation géographique. Néanmoins, les résultats des tests d’indépendance spatiale rassemblés (cf. tableau 8) montrent clairement qu’il convient de tenir compte d’interactions spatiales. Les résultats obtenus pointent en particulier l’utilité d’une spécification autorégressive, et ce quelle que soit la matrice de voisinage privilégiée.
Sans interactions spatiales | Interactions spatiales | ||||||||
Données groupées | Effet fixe |
SLX Effet fixe | SAR | SE |
SD Effet fixe | ||||
Constante = 0,592 | Direct | Voisin | Effet fixe | Effet fixe | Direct | Voisin | |||
% de ménages ouvriers | - 0,023 [0,004] | - 0,009 [0,007] | - 0,009 [0,007] | - 0,022 [0,018] | - 0,006 [0,003] | - 0,006 [0,003] | - 0,006 [0,004] | 0,002 [0,009] | |
% d’ouvrières (parmi 15 ans et plus) | 0,022 [0,003] | 0,010 [0,005] | 0,013 [0,005] | 0,007 [0,015] | 0,010 [0,003] | 0,010 [0,003] | 0,011 [0,004] | 0,008 [0,008] | |
% des ménages | Personnes seules | 0,009 [0,002] | 0,005 [0,006] | 0,004 [0,006] | 0,014 [0,016] | 0,001 [0,003] | 0,001 [0,003] | 0,001 [0,003] | 0,002 [0,009] |
% des familles | Couples avec enfant | 0,004 [0,004] | - 0,001 [0,006] | - 0,006 [0,007] | 0,013 [0,014] | - 0,004 [0,003] | - 0,006 [0,004] | - 0,006 [0,004] | 0,004 [0,008] |
Familles monoparentales | - 0,017 [0,002] | - 0,006 [0,003] | - 0,006 [0,004] | 0,003 [0,009] | - 0,005 [0,002] | - 0,006 [0,002] | - 0,006 [0,002] | 0,006 [0,005] | |
% des femmes | 15-29 ans | - 0,019 [0,003] | 0,006 [0,006] | 0,004 [0,006] | 0,003 [0,014] | 0,004 [0,002] | 0,004 [0,003] | 0,004 [0,003] | - 0,002 [0,008] |
30-44 ans | 0,011 [0,003] | 0,002 [0,004] | 0,002 [0,004] | 0,001 [0,008] | 0,000 [0,002] | - 0,000 [0,002] | - 0,000 [0,002] | 0,002 [0,004] | |
60-74 ans | - 0,024 [0,004] | - 0,004 [0,005] | - 0,003 [0,005] | 0,002 [0,011] | - 0,003 [0,003] | - 0,005 [0,003] | - 0,005 [0,003] | 0,010 [0,006] | |
% des femmes de 15 ans ou plus non- scolarisées | Sans diplôme | - 0,022 [0,002] | - 0,013 [0,005] | - 0,009 [0,005] | - 0,011 [0,012] | - 0,007 [0,003] | - 0,006 [0,002] | - 0,007 [0,003] | - 0,001 [0,007] |
BEPC | - 0,012 [0,002] | - 0,004 [0,003] | - 0,002 [0,003] | - 0,015 [0,007] | - 0,000 [0,001] | - 0,000 [0,001] | - 0,000 [0,001] | - 0,001 [0,004] | |
CAP-BEP | - 0,006 [0,002] | - 0,003 [0,003] | - 0,002 [0,003] | - 0,007 [0,007] | 0,004 [0,002] | - 0,005 [0,002] | - 0,004 [0,002] | - 0,004 [0,004] | |
Supérieur | - 0,011 [0,004] | 0,001 [0,007] | 0,003 [0,008] | 0,004 [0,017] | 0,004 [0,004] | 0,004 [0,004] | 0,005 [0,004] | 0,001 [0,009] | |
% dans l’emploi au lieu de travail | Agriculture | 0,005 [0,002] | - 0,002 [0,007] | 0,002 [0,007] | - 0,023 [0,019] | 0,003 [0,004] | 0,003 [0,003] | 0,003 [0,004] | 0,009 [0,010] |
Commerce, transports et services marchands | 0,005 [0,002] | - 0,003 [0,005] | 0,000 [0,004] | 0,008 [0,012] | 0,000 [0,002] | - 0,000 [0,002] | 0,000 [0,002] | 0,005 [0,006] | |
Administration publique, enseignement, santé, art et autres services non marchands | - 0,002 [0,002] | - 0,007 [0,004] | - 0,002 [0,004] | - 0,017 [0,010] | - 0,000 [0,002] | - 0,000 [0,002] | - 0,000 [0,002] | - 0,003 [0,005] | |
Densité de population | 0,002 [0,001] | - 0,063 [0,074] | - 0,060 [0,074] | - 0,068 [0,164] | - 0,028 [0,039] | - 0,046 [0,039] | - 0,040 [0,040] | - 0,066 [0,088] | |
Taux d’emploi féminin moyen des zones d’emploi voisines | 0,851 [0,031] | 0,852 [0,033] | |||||||
Résidus d’ajustement MCO moyen des zones d’emploi voisines | 0,863 [0,031] | ||||||||
R2 | 0,77 | 0,97 | 0, | 98 |
Modélisation avec interactions spatiales
47 Contrairement à ce qui était obtenu en coupe, introduire les valeurs spatialement décalées des explicatives de référence (modèle SLX) ne capte pas de façon satisfaisante les interactions qui sont à l’œuvre (cf. tableau 8, colonnes SLX). La procédure proposée par Elhorst (2014) conduit à retenir un modèle spatial de Durbin conjuguant terme autorégressif et exogènes spatialement décalées. Avec ce modèle mieux spécifié, l’effet territoire ouvrier paraît redevenir (faiblement) statistiquement significatif (seuil de 10 %). La présence d’un terme autorégressif ne permet cependant pas une conclusion immédiate. Les mesures d’impact proposées par LeSage et Pace (2009) sont calculées (cf. tableau 9) : on retrouve un effet territoire ouvrier de faible amplitude auquel est adjoint une p-value légèrement supérieure à 10 %.
48 Cette estimation pourrait correspondre à la composante de court terme d’une inadéquation spatiale. Si tel est le cas, fermer les canaux de transmission de l’effet territoire ouvrier précédemment envisagés comme spécifiques à une composante de long terme (inactivité de repli) ne devrait pas avoir d’influence sur l’estimation. Nous testons cette hypothèse dans une dernière étape d’analyse.
Disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin et repli
49 L’analyse est recentrée sur cette composante de court terme en ajoutant des variables de conditionnement susceptibles d’obstruer les divers canaux envisagés de transmission de l’effet territoire ouvrier. La disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin intervient en variations (modèle 17, tableau 10) avec une amplitude semblable à ce qui est obtenu en coupe (1,4 points de pourcentage). L’influence de ce conditionnement sur l’effet territoire ouvrier mesuré nous renvoie également à la même conclusion incertaine. Première possibilité, la disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin est un bon marqueur des opportunités offertes aux compagnes d’ouvrier et l’effet d’intérêt est indépendant de problèmes d’inadéquation géographique. Deuxième possibilité, cet indicateur signale une présence locale d’emplois de fonctionnaires sans rapport aux opportunités qui pourraient s’offrir aux compagnes d’ouvrier. Joindre cette variable de conditionnement corrige alors un biais de variable omise mais ne joue pas le rôle attendu d’obstruction du canal de transmission « inadéquation géographique » de l’effet territoire ouvrier. Toujours est-il que l’effet territoire ouvrier redevient significatif avec une amplitude, -0,7 point, proche de ce que l’on envisageait d’interpréter à l’étape d’analyse en coupe comme une composante de court terme de l’effet territoire ouvrier (modèle 15, tableau 6).
50 L’inclusion de la part d’inactives non retraitées (modèles 19, tableau 10) parmi les variables de conditionnement semble plus décisive. En effet, contrairement à ce qui prévaut en coupe, la répercussion sur la mesure de l’effet territoire ouvrier est très faible : cela confirme une interprétation en tant que composante de long terme qui serait ici déjà captée par l’effet fixe neutralisé par l’analyse en variations.
risques de première espèce (p-value) des tests d’indépendance spatiale
Modèle à effet fixe | Sans interaction spatiale | SLX | Sans interaction spatiale | SLX | Sans interaction spatiale | SLX | |
Pondération du voisinage | Distance inverse | Contiguïté | Cinq plus proches voisins | ||||
Test du multiplicateur de Lagrange | Risque de première espèce (p-value) | ||||||
Robuste | Erreur auto-corrélée | 0,000 | 0,000 | 0,200 | 0,020 | 0,000 | 0,300 |
Endogène auto-régr. | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 | |
Simple | Erreur auto-corrélée | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 |
Endogène auto-régr. | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 | 0,000 |
risques de première espèce (p-value) des tests d’indépendance spatiale
impacts directs et indirects à partir des coefficients estimés du modèle SD, tableau 7
Impact direct | p-value simulée * | Impact indirect | p-value simulée * | ||
% de ménages ouvriers | - 0,008 | 0,102 | - 0,033 | 0,156 | |
% d’ouvrières (parmi 15 ans et plus) | 0,014 | 0,001 | 0,058 | 0,005 | |
% Familles monoparentales | - 0,007 | 0,003 | 0,032 | 0,013 | |
% des femmes de 15 ans ou plus | Sans diplôme | - 0,009 | 0,008 | - 0,036 | 0,028 |
non-scolarisées | CAP-BEP | - 0,006 | 0,013 | - 0,024 | 0,039 |
impacts directs et indirects à partir des coefficients estimés du modèle SD, tableau 7
* Les p-value sont simulées sur 200 réplications (Piras, 2014).Données : recensement de la population 2007 et 2012, Insee.
Taux d’emploi des femmes de 15-64 ans | ||||||||||
(16) | (17) | (18) | (19) | (20) | ||||||
Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | Direct | Voisin | |
% de ménages ouvriers | - 0,006 [0,004] | 0,002 [0,009] | - 0,007 [0,003] | 0,002 [0,010] | - 0,005 [0,003] | 0,003 [0,009] | - 0,004 [0,003] | 0,002 [0,009] | - 0,005 [0,003] | 0,002 [0,008] |
Disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin | 0,014 [0,002] | - 0,011 [0,006] | 0,010 [0,002] | - 0,004 [0,006] | ||||||
Taux de fécondité (naissances par femme de 15-45 ans) | 0,000 [0,001] | 0,004 [0,002] | 0,000 [0,001] | 0,002 [0,002] | ||||||
% d’inactives non retraitées parmi les femmes de 15 ans et plus | - 0,021 [0,003] | 0,021 [0,007] | - 0,018 [0,003] | 0,020 [0,008] | ||||||
Ensemble des variables de conditionnement (tableau 7) | Oui | Oui | Oui | Oui | Oui |
Synthèse des résultats
51 La présente étude se proposait de mettre en évidence et d’analyser un effet territoire ouvrier, c’est-à-dire une liaison statistique négative entre proportion de ménages ouvriers sur un territoire et taux d’emploi féminin parmi les résidents de ce territoire. L’analyse est menée successivement en coupe et en variations (modèle à effet fixe). Il s’agissait en particulier d’examiner la portée d’une interprétation de l’effet territoire ouvrier en termes d’inadéquation géographique de la main-d’œuvre féminime.
52 La figure 3 décrit les contraintes de l’analyse et les pistes d’interprétation examinées. Sur la droite de cette figure, on trouve une décomposition de la variable de résultat privilégiée (le taux d’emploi des femmes de 15-64 ans) entre inactivité, chômage et emploi d’une part, et entre groupes socioprofessionnels de l’autre. Sur la gauche, on trouve la variable d’intérêt de l’analyse, la proportion locale de ménages ouvriers dont on explicite un antécédent important, une spécialisation industrielle du territoire intense en main-d’œuvre masculine ouvrière. Au centre de la figure 3 le principal défi d’une interprétation en termes d’inadéquation géographique : le fait que la proportion de femmes éloignées géographiquement de leurs opportunités d’emploi reste inobservée.
53 Au total, la figure 3 résume une interprétation causale plausible (compatible avec les résultats rassemblés) à défaut d’être certaine, interprétation qui serait centrée sur le cas des ménages ouvriers. La disjonction spatiale entre opportunités d’emploi ouvrier masculin et opportunités d’emploi tertiaire féminin peu qualifié confronterait les ménages ouvriers à un dilemme géographique compliquant la biactivité.
54 L’analyse en coupe vise principalement à neutraliser les effets de composition dans la comparaison de taux d’emploi féminin entre territoires ouvriers et autres territoires. L’effet territoire ouvrier mesuré en coupe neutralise les différences de densité de peuplement, de structures par types de ménages et de familles, de structure de la population féminine par âges et niveaux de diplôme, de structure sectorielle de l’emploi local, de salaire moyen, de superficie et de taux de stabilité : il représente alors un handicap de taux d’emploi féminin de 3 points de pourcentage. Une part de ce handicap intervient entre régions : si l’on neutralise les facteurs fixes régionaux (quoi que cela puisse être débattu), l’effet territoire ouvrier est ramené en coupe à un peu moins de 2 points de pourcentage. Cet effet concerne essentiellement les femmes de 25-54 ans, la catégorie des employées et prend à la fois la forme d’un sur-chômage et d’une moindre participation au marché du travail ; il transite en particulier par une inactivité de repli correspondant à des femmes non retraitées sans aucune expérience d’emploi (groupe 8 de la nomenclature des catégories socioprofessionnelles).
55 La démarche mise en œuvre pour interpréter l’effet territoire ouvrier consiste à joindre des variables de conditionnement susceptibles d’isoler certains canaux de transmission : si cela réduit l’effet territoire ouvrier, c’est que cet effet transitait au moins partiellement par le canal envisagé. L’utilisation directe de la disponibilité locale de l’emploi tertiaire féminin comme marqueur d’inadéquation géographique ne permet pas de conclusion décisive. En revanche, on parvient à confirmer que l’effet territoire ouvrier passe largement par le cas des femmes non retraitées sans aucune expérience d’emploi (CS8), ce que l’on peut interpréter comme un effet de long terme de l’inadéquation géographique ou par d’autres facteurs indépendants de contraintes spatiales.
représentation schématique de l’interprétation de l’effet territoire ouvrier en termes d’inadéquation géographique
56 Dans le cadre d’une analyse en variations (modèle à effet fixe), les études disponibles suggèrent de traiter l’inadéquation géographique comme un effet de long terme (en particulier pour la période considérée ici, 2007-2012). L’affaiblissement constaté de l’effet territoire ouvrier lorsqu’on raisonne en variations est en ce sens cohérent avec l’hypothèse d’inadéquation géographique. Même si, à nouveau, d’autres facteurs fixes propres aux territoires ouvriers peuvent également intervenir. La liaison persistante est ramenée au-dessous de 1 point de pourcentage et ne franchit plus le seuil de la significativité statistique. Cette liaison peut correspondre à la composante de court terme d’une inadéquation géographique (sur-chômage) ou à l’action de cofacteurs inobservés qui ne peuvent être tenues pour fixes sur cinq ans (cf. figure 3).
Conclusion
57 Avec toutes les précautions d’usage, nous pouvons tirer de la présente étude quelques enseignements plus généraux en matière d’analyse économique d’une part et de politique publique d’autre part. Côté analyse économique, l’étude confirmerait, via une démonstration ciblée sur le cas des ménages ouvriers, la possibilité d’un hiatus structurel entre production et peuplement. Les deux aspects répondent à des structurations géographiques partiellement indépendantes qui peuvent jouer en défaveur de certains ménages, en l’espèce, des ménages ouvriers. La référence au marché pour penser l’assignation de la main-d’œuvre à la production est alors prise en défaut : aucun des mécanismes classiquement associés à cette référence (ajustement de salaires, déplacements de main-d’œuvre ou d’emploi) n’étant à même de résoudre le hiatus identifié. Ceci constitue une complication insuffisamment soulignée des stratégies postindustrielles comptant sur une mobilité (notamment géographique) de la main-d’œuvre vers les services pour répondre à la désindustrialisation. Si tout repose sur cette attente, le dilemme conjecturé ici fragiliserait considérablement la situation des ménages ouvriers (en 2013 : 4,8 millions de ménages sur un total de 28,5 millions). Ce diagnostic débouche sur un enjeu de politique publique assez clair : accompagner les ménages ouvriers en tenant compte de la dimension géographique de leur situation. D’abord, prendre acte de la difficulté des choix de mobilité géographique des ménages ouvriers. Lorsque des mesures de réindustrialisation sont lancées, veiller à territorialiser le processus en privilégiant des zones anciennement industrialisées. À défaut de mesures de ce type, développer dans les zones ouvrières des activités intensives en emploi féminin peu qualifié, par exemple en solvabilisant localement une demande de services à la personne ou en implantant des services à la collectivité (ex. maisons de retraite). Une autre piste reposant sur le soutien à la mobilité des ménages ouvriers aurait été de réserver dans les grandes agglomérations des logements sociaux aux ménages ouvriers faisant le choix de se rapprocher d’un bassin d’emploi plus féminin.
Annexe 1 : statistiques descriptives
principales variables de résultat
ZE moyenne | Minimum | Maximum | |
Taux d’activité des 15-64 ans | 0,71 (0,03) | 0,53 | 0,80 |
Taux d’activité des femmes de 15-64 ans | 0,67 (0,04) | 0,46 | 0,75 |
Taux de chômage des 15-64 ans | 0,11 (0,03) | 0,05 | 0,19 |
Taux de chômage des femmes de 15-64 ans | 0,13 (0,03) | 0,05 | 0,22 |
Taux d’emploi des 15-64 ans | 0,64 (0,04) | 0,47 | 0,75 |
Taux d’emploi des femmes de 15-64 ans | 0,58 (0,05) | 0,40 | 0,70 |
principales variables de résultat
structures de population
ZE | Moins de 15 ans | 15-29 ans | 30-44 ans | 45-59 ans | 60-74 ans | 75 ans et plus | |
Ensemble de la population |
Moyenne N = 304 | 0,18 (0,02) | 0,17 (0,03) | 0,20 (0,01) | 0,21 (0,01) | 0,14 (0,02) | 0,10 (0,02) |
Minimum | 0,11 | 0,12 | 0,16 | 0,17 | 0,08 | 0,04 | |
Maximum | 0,23 | 0,30 | 0,25 | 0,24 | 0,22 | 0,16 | |
Moyenne N = 304 |
0,17 (0,02) | 0,16 (0,03) | 0,20 (0,02) | 0,20 (0,01) | 0,15 (0,02) | 0,12 (0,03) | |
Population féminine | Minimum | 0,11 | 0,11 | 0,15 | 0,16 | 0,08 | 0,05 |
Maximum | 0,22 | 0,30 | 0,24 | 0,23 | 0,22 | 0,20 |
structures de population
structures de population de 15 ans et plus non scolarisée
ZE | Sans diplôme | CEP | BEPC | BEP-CAP | Bac | Bac+2 | Sup | |
Ensemble de la population non-scolarisée de 15 ans et plus |
Moyenne N = 304 | 0,21 (0,04) | 0,15 (0,03) | 0,07 (0,01) | 0,26 (0,03) | 0,14 (0,02) | 0,10 (0,02) | 0,08 (0,03) |
Minimum | 0,11 | 0,07 | 0,04 | 0,13 | 0,11 | 0,06 | 0,03 | |
Maximum | 0,32 | 0,24 | 0,11 | 0,35 | 0,21 | 0,17 | 0,28 | |
Population féminine non-scolarisée de 15 ans et plus |
Moyenne N = 304 | 0,22 (0,04) | 0,17 (0,04) | 0,08 (0,01) | 0,20 (0,02) | 0,15 (0,02) | 0,11 (0,02) | 0,07 (0,03) |
Minimum | 0,13 | 0,08 | 0,04 | 0,11 | 0,11 | 0,07 | 0,03 | |
Maximum | 0,34 | 0,28 | 0,12 | 0,28 | 0,22 | 0,18 | 0,26 |
structures de population de 15 ans et plus non scolarisée
structures socioprofessionnelle de la population
ZE | CS1 | CS2 | CS3 | CS4 | CS5 | CS6 | CS7 | CS8 | |
Individus de 15 ans et plus |
Moyenne N = 304 | 0,02 (0,01) | 0,04 (0,01) | 0,05 (0,02) | 0,12 (0,02) | 0,16 (0,02) | 0,16 (0,04) | 0,29 (0,05) | 0,16 (0,03) |
Minimum | 0,00 | 0,02 | 0,02 | 0,07 | 0,12 | 0,08 | 0,14 | 0,11 | |
Maximum | 0,10 | 0,07 | 0,20 | 0,20 | 0,22 | 0,30 | 0,43 | 0,36 | |
Ménages (personne de référence), 2006 |
Moyenne N = 304 | 0,02 (0,02) | 0,05 (0,01) | 0,07 (0,04) | 0,13 (0,03) | 0,11 (0,02) | 0,20 (0,05) | 0,36 (0,06) | 0,06 (0,02) |
Minimum | 0,00 | 0,02 | 0,03 | 0,06 | 0,06 | 0,10 | 0,19 | 0,02 | |
Maximum | 0,11 | 0,10 | 0,25 | 0,22 | 0,19 | 0,35 | 0,51 | 0,26 | |
Femmes de 15 ans et plus |
Moyenne N = 304 | 0,01 (0,01) | 0,02 (0,01) | 0,04 (0,02) | 0,12 (0,02) | 0,25 (0,02) | 0,06 (0,03) | 0,30 (0,06) | 0,21 (0,05) |
Minimum | 0,00 | 0,01 | 0,02 | 0,07 | 0,18 | 0,02 | 0,15 | 0,14 | |
Maximum | 0,07 | 0,05 | 0,16 | 0,21 | 0,30 | 0,20 | 0,46 | 0,44 |
structures socioprofessionnelle de la population
ZE moyenne | Minimum | Maximum | |
Part de ménages constitués de femmes seules | 0,18 (0,02) | 0,12 | 0,25 |
Part de ménages constitués de mères isolées avec enfants | 0,10 (0,02) | 0,05 | 0,16 |
Nombre de naissances par femmes de 15 à 44 ans/an | 0,06 (0,01) | 0,02 | 0,08 |
l’emploi local selon le groupe socioprofessionnel
ZE | CS1 | CS2 | CS3 | CS4 | CS5 | CS6 | |
Structure de l’emploi de long terme local (ETL) |
Moyenne N = 304 | 0,04 (0,03) | 0,07 (0,02) | 0,10 (0,03) | 0,22 (0,03) | 0,29 (0,03) | 0,28 (0,06) |
Minimum | 0,00 | 0,04 | 0,05 | 0,15 | 0,19 | 0,12 | |
Maximum | 0,21 | 0,15 | 0,31 | 0,30 | 0,41 | 0,46 | |
Disponibilité de l’ELT par résident de 15-64 ans |
Moyenne N = 304 | 0,02 (0,02) | 0,04 (0,01) | 0,06 (0,02) | 0,13 (0,02) | 0,17 (0,02) | 0,17 (0,05) |
Minimum | 0,00 | 0,02 | 0,03 | 0,07 | 0,12 | 0,07 | |
Maximum | 0,14 | 0,10 | 0,26 | 0,22 | 0,26 | 0,35 |
l’emploi local selon le groupe socioprofessionnel
l’emploi local selon le secteur d’activité
ZE | Agriculture | Construction | Industrie | Tertiaire | Tertiaire | ||||
Services aux entreprises | Commerce |
Services aux Particuliers | Autres services | ||||||
Structure de l’ELT local |
Moyenne N = 304 | 0,06 (0,04) | 0,07 (0,01) | 0,18 (0,08) | 0,69 (0,08) | 0,09 (0,03) | 0,13 (0,02) | 0,07 (0,03) | 0,38 (0,06) |
Minimum | 0,00 | 0,04 | 0,04 | 0,48 | 0,04 | 0,08 | 0,04 | 0,21 | |
Maximum | 0,27 | 0,16 | 0,43 | 0,87 | 0,23 | 0,21 | 0,21 | 0,55 | |
Disponibilité de
l’ELT / résident 15-64 ans |
Moyenne N = 304 | 0,04 (0,03) | 0,04 (0,01) | 0,11 (0,05) | 0,42 (0,06) | 0,06 (0,02) | 0,08 (0,01) | 0,04 (0,02) | 0,23 (0,04) |
Minimum | 0,00 | 0,02 | 0,02 | 0,26 | 0,03 | 0,05 | 0,02 | 0,14 | |
Maximum | 0,15 | 0,10 | 0,35 | 0,73 | 0,19 | 0,15 | 0,17 | 0,35 |
l’emploi local selon le secteur d’activité
description des ZE
ZE Moyenne | Minimum | Maximum | |
Densité de population (habitant/km2) | 173 (580) | 13 | 8 867 |
Superficie (en km2) | 1 790 (1 376) | 121 | 8 759 |
Taux de stabilité(*) |
0,76 (0,14) | 0,26 | 0,97 |
description des ZE
(*) Au sens du Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET).
Données : recensement de la population 2006, Insee.
Personne de référence du ménage
58 La personne de référence du ménage est déterminée à partir de la structure familiale du ménage et des caractéristiques des individus qui le composent.
59 Dans l’exploitation principale du recensement, la personne de référence du ménage est déterminée automatiquement à l’aide d’une règle qui ne prend en compte que les trois personnes les plus âgées du ménage (classées par ordre décroissant) et considère leurs relations potentielles :
- si le ménage compte une seule personne, cette dernière est la personne de référence ;
- si le ménage compte deux personnes : si elles sont de sexe différent et identifiées comme formant un couple, l’homme est la personne de référence ; sinon la personne de référence est la personne active la plus âgée, ou si aucune des deux n’est active, la personne la plus âgée ;
- si le ménage compte trois personnes ou plus : si un couple formé d’un homme et d’une femme est identifié, l’homme du couple est la personne de référence ; sinon la personne de référence est la personne active la plus âgée, ou si aucune des trois personnes considérées n’est active, la personne la plus âgée.
61 Dans l’exploitation complémentaire du recensement, la connaissance des liens familiaux au sein des ménages permet de définir la personne de référence plus précisément que dans l’exploitation principale. La règle de détermination de la personne de référence du ménage est la suivante :
- si le ménage comprend plusieurs familles dont au moins un couple, la personne de référence est, parmi les hommes de ces couples, le plus âgé des actifs ou, à défaut, le plus âgé ;
- si le ménage ne comprend aucun couple mais au moins une famille monoparentale, alors la personne de référence est, parmi les parents des familles monoparentales, le plus âgé des actifs ou, à défaut, le plus âgé ;
- si le ménage ne comprend aucune famille, la personne de référence est, à l’exception des pensionnaires ou salariés logés, la personne active la plus âgée ou, à défaut, la personne la plus âgée.
Annexe 2 : analyse de corrélations géographiques
Cohérences géographiques dans la composition sectorielle et socioprofessionnelle de l’emploi
corrélations géographiques de disponibilité locale de l’emploi de chaque secteur
ELT / population de 15-64 ans | Tertiaire | ||||||
Construction | Industrie | Services aux entreprises | Services aux particuliers | Commerce | Services aux collectivités | Tertiaire | |
Agriculture | +0,35 | +0,04 | - 0,37 | - 0,06 | +0,07 | - 0,05 | - 0,15 |
Construction | - 0,09 | - 0,17 | +0,42 | +0,39 | +0,13 | +0,23 | |
Industrie | +0,11 | - 0,32 | - 0,18 | - 0,42 | - 0,35 | ||
Services aux entreprises | +0,09 | +0,27 | +0,27 | +0,57 | |||
Services aux particuliers | +0,44 | +0,27 | +0,59 | ||||
Commerce | +0,27 | +0,60 | |||||
Services à la collectivité et « autres services » | +0,84 |
corrélations géographiques de disponibilité locale de l’emploi de chaque secteur
Note : 304 ZE métropolitaines ; en italique, coefficients non-significatifs au seuil de 1 %.Lecture : la corrélation du nombre d’ELT de l’agriculture par résident de 15-64 ans au nombre d’ELT de la construction par résident de 15-64 ans est de +0,35, cf. encadré “corrélation et régression géographiques”.
Données : recensement de la population 2006, Insee.
corrélations géographiques de la disponibilité locale de l’emploi de chaque secteur et de celle de chaque profession
ELT / population de 15-64 ans | Tertiaire | ||||||
Agriculture | Construction | Industrie | Services aux Services aux entreprises particuliers | Commerce | Services aux collectivités | Tertiaire | |
Agriculteurs (CS1) | +0,91 | +0,37 | +0,11 | - 0,37 -0,09 | +0,00 | +0,01 | - 0,14 |
Artisans-commerçants-chefs d’entreprise (CS2) | +0,42 | +0,74 | - 0,26 | - 0,30 +0,60 | +0,40 | +0,11 | +0,23 |
Cadres (CS3) | - 0,41 | - 0,20 | - 0,11 | +0,88 +0,17 | +0,28 | +0,42 | +0,65 |
Professions intermédiaires (CS4) | - 0,32 | +0,02 | +0,02 | +0,74 +0,30 | +0,41 | +0,62 | +0,80 |
Employés (CS5) | - 0,10 | +0,41 | - 0,30 | +0,18 +0,60 | +0,53 | +0,78 | +0,83 |
Ouvriers (CS6) | +0,31 | +0,15 | +0,88 | - 0,03 -0,17 | +0,02 | - 0,29 | - 0,23 |
corrélations géographiques de la disponibilité locale de l’emploi de chaque secteur et de celle de chaque profession
Note : 304 ZE métropolitaines ; en italique, coefficients non-significatifs au seuil de 1 %.Lecture : la corrélation du nombre d’ELT de l’agriculture par résident de 15-64 ans au nombre d’ELT d’agriculteurs par résident de 15-64 ans est de +0,91, cf. encadré “corrélation et régression géographiques”.
Données : recensement de la population 2006, Insee.
63 Le tableau 21 reporte les corrélations géographiques entre la part de chaque groupe socioprofessionnel parmi les ménages (voir la diagonale principale du tableau) et celle de chaque groupe socioprofessionnel parmi les femmes. L’homogamie socioprofessionnelle observée sur données individuelles doit se refléter géographiquement notamment dans les coefficients figurant le long de la diagonale principale. C’est en effet ce qu’on observe : chaque groupe socioprofessionnel est surreprésenté parmi les femmes résidentes là où il est surreprésenté parmi les ménages. La force de l’association varie pourtant sensiblement selon le groupe socioprofessionnel considéré. Les coefficients de corrélation géographique obtenus dépassent +0,70 à une exception près : la catégorie des employées, pour laquelle le coefficient n’est que de +0,53. La cohérence entre zones de résidence des employées (femmes CS5) et des ménages employés est beaucoup moins systématique que pour les autres groupes socioprofessionnels. L’analyse des coefficients figurant hors de la diagonale principale permet de repérer les écarts à une stricte homogamie propre à ce groupe socioprofessionnel. Les cas d’asymétrie de la matrice de corrélations sont particulièrement révélateurs. Les ouvrières sont nettement sous-représentées là où les ménages employés sont surreprésentés (-0,56). En revanche, les employées ne sont nullement sous-représentées là où les ménages ouvriers sont surreprésentés (+0,09). Des employées seraient effectivement fixées au sein de zones où les ménages ouvriers sont surreprésentés (territoires ouvriers). De façon parallèle, là où les ouvrières sont surreprésentées, les ménages CS8 sont nettement sous-représentés (-0,44) tandis que les zones où les ménages ouvriers sont surreprésentés n’affichent pas de sous-représentation significative de la catégorie CS8 parmi les femmes. Tout cela traduit bien géographiquement, les observations réalisées sur données individuelles à partir de tables d’homogamie.
Pourcentage | De ménages (dont la personne de référence est)… | ||||||||
CS1 | CS2 | CS3 | CS4 | CS5 | CS6 | CS7 | CS8 | ||
Agriculteurs (CS1) | H : | +0,99 | +0,21 | - 0,55 | - 0,66 | - 0,53 | +0,03 | +0,62 | - 0,25 |
F : | +0,94 | +0,19 | - 0,48 | - 0,58 | - 0,52 | +0,03 | +0,55 | - 0,25 | |
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise (CS2) | H : | +0,20 | +0,99 | - 0,17 | - 0,24 | +0,09 | - 0,50 | +0,36 | - 0.08 |
F : | +0,33 | +0,87 | - 0,38 | - 0,41 | - 0,01 | - 0,33 | +0,47 | - 0,09 | |
Cadres (CS3) | H : | - 0,56 | - 0,14 | +1,00 | +0,80 | +0,43 | - 0,36 | - 0,73 | +0.08 |
F : | - 0,49 | - 0,07 | +0,97 | +0,74 | +0,48 | - 0,45 | - 0,69 | +0,13 | |
Professions intermédiaires (CS4) | H : | - 0,68 | - 0,24 | +0,76 | +0,99 | +0,46 | - 0,07 | - 0,83 | - 0.01 |
F : | - 0,53 | - 0,10 | +0,89 | +0,93 | +0,49 | - 0,27 | - 0,80 | - 0,02 | |
Employés (CS5) | H : | - 0,46 | +0,12 | +0,35 | +0,37 | +0,91 | - 0,48 | - 0,40 | +0,37 |
F : | - 0,39 | - 0,12 | +0,31 | +0,59 | +0,53 | +0,09 | - 0,52 | - 0,26 | |
Ouvriers (CS6) | H : | +0,09 | - 0,44 | - 0,43 | - 0,20 | - 0,56 | +0,99 | - 0,03 | - 0,33 |
F : | +0,15 | - 0,29 | - 0,24 | - 0,12 | - 0,63 | +0,86 | - 0,06 | - 0,44 | |
Retraités (CS7) | H : | +0,56 | +0,40 | - 0,68 | - 0,81 | - 0,40 | - 0,23 | +0,97 | - 0,12 |
F : | +0,66 | +0,31 | - 0,67 | - 0,80 | - 0,52 | - 0,11 | +0,95 | - 0,27 | |
Autres sans activité professionnelle (CS8) | H : | - 0,44 | - 0,28 | +0,41 | +0,36 | +0,55 | - 0,35 | - 0,49 | +0,81 |
F : | - 0,50 | - 0,21 | +0,14 | +0,19 | +0,46 | - 0,10 | - 0,38 | +0,74 |
corrélations géographiques populations féminine-masculine par groupe socioprofessionnel
Note : 304 ZE métropolitaines.Lecture : un coefficient égal à 1 par exemple pour le couple proportion de cadres parmi les hommes, proportion de ménages cadres parmi les ménages signifie que sur- et sous-représentation locale des hommes et des ménages cadres (par rapport à une ZE moyenne) interviennent dans les mêmes ZE dans les mêmes proportions.
Données : recensement de la population 2006, Insee.
Asymétrie homme-femme dans la cohérence géographique entre groupe socioprofessionnelle des résidents et des emplois locaux
corrélations géographiques peuplement-emploi par groupe socioprofessionnel selon le sexe
Pourcentage | D’emplois (au lieu de travail)… | |||||||
CS1 | CS2 | CS3 | CS4 | CS5 | CS6 | |||
Parmi les 15 ans et plus (au lieu de résidence) | Agriculteurs (CS1) | H : | +0,99 | +0,29 | - 0,57 | - 0,66 | - 0,23 | +0,20 |
F : | +0,94 | +0,25 | - 0,50 | - 0,59 | - 0,29 | +0,19 | ||
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise (CS2) | H : | +0,24 | +0,91 | - 0,19 | - 0,21 | +0,24 | - 0,35 | |
F : | +0,36 | +0,88 | - 0,40 | - 0,40 | +0,24 | - 0,18 | ||
Cadres (CS3) | H : | - 0,56 | - 0,36 | +0,91 | +0,71 | - 0,03 | - 0,48 | |
F : | - 0,49 | - 0,29 | +0,92 | +0,67 | +0,01 | - 0,55 | ||
Professions intermédiaires (CS4) | H : | - 0,71 | - 0,49 | +0,68 | +0,87 | - 0,03 | - 0,31 | |
F : | - 0,54 | - 0,38 | +0,78 | +0,81 | - 0,03 | - 0,46 | ||
Employés (CS5) | H : | - 0,44 | +0,07 | +0,42 | +0,40 | +0,73 | - 0,64 | |
F : | - 0,43 | - 0,29 | +0,21 | +0,41 | +0,31 | - 0,18 | ||
Ouvriers (CS6) | H : | +0,02 | - 0,42 | - 0,51 | - 0,39 | - 0,50 | +0,91 | |
F : | +0,05 | - 0,36 | - 0,35 | - 0,38 | - 0,69 | +0,86 | ||
Retraités (CS7) | H : | +0,62 | +0,64 | - 0,60 | - 0,61 | +0,14 | +0,06 | |
F : | +0,70 | +0,51 | - 0,62 | - 0,65 | - 0,02 | +0,18 | ||
Autres sans activité professionnelle (CS8) | H : | - 0,41 | - 0,26 | +0,59 | +0,54 | +0,28 | - 0,47 | |
F : | - 0,47 | - 0,12 | +0,27 | +0,34 | +0,36 | - 0,24 |
corrélations géographiques peuplement-emploi par groupe socioprofessionnel selon le sexe
Note : 304 ZE métropolitaines. Cf. encadré.Données : recensement de la population 2006, Insee.
Bibliographie
Bibliographie
- Allègre G., Bart V., Castell L., Lippmann Q. et Martin H. (2015). “Travail domestique : les couples mono-actifs en font-ils vraiment plus ?”, Économie et Statistique, n° 478-480, pp. 189-208.
- Baguelin O. (2013). “Politique conjoncturelle de l’emploi et structures des marchés du travail locaux : le déploiement territorial du contrat d’accompagnement dans l’emploi en 2009”, Économie et Statistique, n° 454, pp. 79-107.
- Benson A. (2014). “Re-Thinking the Two-Body Problem : The Segregation of Women into Geographically-Flexible Occupations”, Demography, vol. 51, n° 5, pp. 1619-1639.
- Biausque V. et Govillot S. (2012). “Les couples sur le marché du travail”, Dans Insee Références, France, portrait social - édition 2012. Paris : Insee, pp. 137-148.
- Black D., Kolesnikova N. et Taylor L.J. (2014). “Why Do so Few Women Work in New York (and so Many in Mineapolis) ? Labor Supply of Married Women Across U.S. Cities”, Journal of Urban Economics, n° 79, pp. 59-71.
- Blanc M. et Hild F. (2008). “Analyse des marchés du travail locaux : du chômage à l’emploi”, Économie et Statistique, n° 415-416, pp. 45-60.
- Blumenberg E. (2004). “En-Gendering Effective Planning : Spatial Mismatch, Low-Income Women, and Transportation Policy”, Journal of the American Planning Association, vol. 70, n° 3, pp. 269-281.
- Bouchet-Valat M. (2014). “Les évolutions de l’homogamie de diplôme, de classe et d’origine sociale en France (1969-2011) : ouverture d’ensemble, repli des élites”, Revue française de sociologie, vol. 55, n° 3, pp. 459-505.
- Briard K. (2017). “L’élasticité de l’offre de travail des femmes : repères méthodologiques et principaux résultats pour la France”, Document d’études n° 210, de la Direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques, 29 pages.
- Caliendo M., Künn S. et Mahlstedt R. (2017). “The Return to Labor Market Mobility : an Evaluation of Relocation Assistance for the Unemployed”, Journal of Public Economics, vol. 148, n° C, pp. 136-151.
- Chamkhi A. (2015). “Les écarts de salaires entre femmes et hommes par zone d’emploi”, Dares Analyses n° 020, 11 pages.
- Clark A., Couprie H. et Sofer C. (2004). “La modélisation collective de l’offre de travail”, Revue Économique, vol. 55, n° 4, pp. 767-789.
- Costa D. L. et Kahn M.E. (2000). “Power Couples : Changes in the Locational Choice of the College Educated : 1940-1990”, Quarterly Journal of Economics, vol. 115, n° 1, pp. 1287-1315.
- Coulter R., Van Ham M. et Findlay A. (2013). “New Directions for Residential Mobility Research : Linking Lives through Time and Space”, IZA Discussion Paper n° 7525, 25 pages.
- Davezies L. (2008). La république et ses territoires. Paris : Seuil - La République des idées, 110 pages.
- Davie E. et Niel X. (2012). “Mesurer la fécondité par secteur d’activité et par catégorie socioprofessionnelle à partir des recensements”, Document de travail de l’Insee n° F1203, 71 pages.
- Desplanques G. (2008). “Avantages et incertitudes des enquêtes de recensement en France”, Population-F, vol. 63, n° 3, pp. 477-502.
- Duranton G. (1997). “La nouvelle économie géographique : agglomération et dispersion”, Économie et Prévision, n° 131, pp. 1-24.
- Elhorst J.-P. (2003). “The Mystery of Regional Unemployement Differentials : a Survey of Theoretical and Empirical Explanations”, Journal of Economic Surveys, vol. 17, n° 5, pp. 709-748.
- Elhorst J.-P. (2010). “Applied Spatial Econometrics : Raising the Bar”, Spatial Economic Analysis, vol. 5, n° 1, pp. 9-28.
- Elhorst J.-P. (2014). Spatial Econometrics : From Cross-Sectional Data to Spatial Panels, Heidelberg, New York, Dordrecht, London : Springer.
- Ellison G. et Glaeser E.L. (1997). “Geographic Concentration in U.S. Manufacturing Industries : a Dartboard Approach”, Journal of Political Economy, vol. 105, n° 5, pp. 879-927.
- Favre F. (2009). “Hommes-Femmes, des différences de revenu sensibles pour les non-salariés”, dans Les revenus d’activité des indépendants, édition 2009, pp. 31-45.
- Floch J.-M. et Le Saout R. (2016). “Économétrie spatiale : une introduction pratique”, Journées de méthodologie statistique, 41 pages.
- Foged M. (2016). “Family Migration and Relative Earnings Potentials, Labour Economics, vol. 42, n° C, pp. 87-100.
- Gibbons S. et Overman H.G. (2012). “Mostly Pointless Spatial Econometrics”, Journal of Regional Science, vol. 52, n° 2, pp. 172-191.
- Gobillon L. et Selod H. (2014). “Spatial Mismatch, Poverty, and Vulnerable Populations”, In Handbook of Regional Science, M. Fisher & P. Nijkamp (eds), Berlin : Springer, pp. 93-107.
- Hecquet V. (2014). “Emploi et territoires de 1975 à 2009 : tertiarisation et rétrécissement de la sphère productive”, Économie et Statistique, n° 462-463, pp. 25-67.
- Insee (2015). “Les zonages d’étude de l’Insee - Une histoire des zonages supracommunaux définis à des fins statistiques”, Insee Méthodes n°129, Mars, 100 pages.
- Le Gallo J. (2002). “Économétrie spatiale : l’autocorrélation spatiale dans les modèles de régression linéaire”, Économie et Prévision, n° 155, pp. 139-157.
- Lee L. et Yu J. (2010). “Estimation of Spatial Autoregressive Panel Data Models with Fixed Effects”, Journal of Econometrics, vol. 154, n° 2, pp. 165-185.
- Lelièvre E. et Robette N. (2010). “Les trajectoires spatiales d’activité des couples”, Temporalités, n° 11, accessible à : http://dx.doi.org/10.4000/temporalites.1182.
- LeSage J.P. et Pace R.K. (2009). Introduction to Spatial Econometrics. Boca Raton : Taylor and Francis, 374 pages.
- Matas A., Raymond J.-L. et Roig J.-L. (2010). “Job Accessibility and Female Employment Probability : the Case of Barcelona and Madrid”, Urban Studies, vol. 47, n° 4, pp. 769-787.
- Minni C. et Moschion J. (2010). “Activité féminine et composition familiale depuis 1975”, Dares-Analyses, Mai, n° 027, 10 pages.
- Observatoire des territoires (2014). “Qualité de vie, habitants, territoires”, Rapport 2014, Commissariat général à l’égalité des territoires, 233 pages.
- Observatoire des territoires (2016). “Emploi et territoires”, Rapport 2016, Commissariat général à l’égalité des territoires, 148 pages.
- Pailhé A. et Solaz A. (2009). Entre famille et travail : des arrangements de couples aux pratiques des employeurs. La Découverte.
- Piketty T. (1998). “L’impact des incitations financières au travail sur les comportements individuels : une estimation pour le cas français”, Économie et Prévision, n°132-133, pp. 1-35.
- Piketty T. (2005). “L’impact de l’allocation parentale d’éducation sur l’activité féminine et la fécondité, 1982-2002”, dans C. Lefèvre, Histoires de familles, histoire familiales (pp. 79-109). Les cahiers de l’Ined n°156.
- Piras G. (2014). “Impact Estimates for Static Spatial Panel Data Modelsin R”, Letters in Spatial and Resource Sciences, vol. 7, n° 3, pp. 213-223.
- Roberts J. et Taylor K. (2016). “Intra-Household Commuting Choices and Local Labour Markets”, Oxford Economic Papers, vol. 69, n° 3, pp. 734-757.
- Roussez V., Bougard J. et Roumier B. (2015). “La concentration des métiers par zone d’emploi tend à se renforcer”, dans Insee Références, La France et ses territoires, édition 2015. Paris, pp. 39-48.
- Rouwendal J. et van der Straaten W. (2003). “Dual Earners, Urban Labor Markets and Housing Demand”, Tinbergen Institute Discussion Paper n° TI 2003-084/3, 28 pages.
- Sigaud T. (2014). “Mobilités résidentielles et professionnelles des salariés en France : entreprises, marchés”, Thèse de doctorat. Paris : Université Paris Dauphine, Avril, 600 pages.
- Sofer C. (2005). “Les choix relatifs au travail dans la famille : la modélisation économique des décisions”, Travail et Emploi, n°102, pp. 79-89.
- Sorenson O. et Dahl M.S. (2016). “Geography, Joint Choices and the Reproduction of Gender Inequality”, American Sociological Review, vol. 81, n° 5, pp. 900-920.
- Stancanelli E. (2006). “Les couples sur le marché de l’emploi”, Revue de l’OFCE, n° 99, pp. 235-272, Novembre.
- van Ommeren J., Rietveld P. et Nijkamp P. (1999). “Impacts of Employed Spouses on Job-Moving Behavior”, International Regional Science Review, vol. 22, n° 1, pp. 54-68.
- Vanderschelden M. (2006). “Homogamie socio professionnelle et ressemblance en termes de niveau d’études : constat et évolution au fil des cohortes d’union”, Économie et Statistique, n° 398-399, pp. 33-58.
- Vega Halleck S. et Elhorst J.P. (2015). “The SLX Model”, Journal of Regional Science, vol. 55, n° 3, pp. 339-363.
Notes
- (1)Atlas des zones d’emploi 2010, p. 53. Voir aussi Insee méthode n°129 disponible en ligne à l’adresse
http://www.insee.fr/fr/publications-et-services/sommaire.asp ?reg_id=0etref_id=IMET129. - (2)La plus petite unité territoriale est la commune. La construction des ZE mobilise les règles suivantes : (a) chaque ZE est constituée d’un ensemble de communes entières ; (b) l’ensemble des ZE réalise une partition de la France ; (c) une commune n’appartient qu’à une seule ZE ; (d) les communes d’une ZE sont contigües ;(e) chaque ZE comporte au moins 5 000 actifs ; (f) le contour d’une ZE peut franchir une limite administrative (département, région). Ibid., p. 53.
- (3)À chaque étape, les flux de déplacements domicile-travail les plus importants entre unités (communes ou groupes de communes agrégées à une étape précédente) et communes non encore agrégées sont repérés. Passé une certaine taille, un agrégat de communes devient un « pôle d’emploi » : il peut agréger d’autres communes mais ne peut lui-même être agrégé à un autre pôle d’emploi.
- (4)On peut ainsi examiner l’emploi au lieu de travail par grands postes distinguant agriculture (3,5 % de l’emploi national), industrie (15,2 %), construction (6,4 %) mais surtout, au sein du tertiaire (74,8 %) : commerce (13,3 % de l’emploi national), services aux entreprises (13,3 %), services aux particuliers (7,6 %), services à la collectivité (30,3 %) et « autres services » (activités financières et immobilières, transports ; 10,4 %).
- (5)Ces résultats sont détaillés en annexe 2, tableau 19.
- (6)Cf. tableau 20 en annexe 2.
- (7)Ceci est documenté dans le tableau 21 proposé et commenté en annexe 2.
- (8)La catégorie socioprofessionnelle assignée à un ménage correspond à celle de la personne de référence du ménage. Pour le RP, la règle permettant d’identifier cette personne est précisée à la fin de l’annexe 1 : il suffit ici de souligner que dès lors qu’il existe au moins un homme dans le ménage (logement), c’est la CS de l’homme non-retraité le plus âgé qui est assignée au ménage.
- (9)Pour coller aux usages en économie régionale, des spécifications ajoutant un terme de densité quadratique ont également été considérées ; cela n’ayant modifié aucun des résultats de l’analyse, on s’en tient finalement par la suite à des spécifications sans terme quadratique.
- (10)Elhorst (2003) distingue entre variables intermédiaires et variables exogènes. Parmi les déterminants intermédiaires listés : la démographie, le comportement d’activité, les migrations, les navettes domicile-travail, les salaires, le produit local brut. Parmi les déterminants qualifiés d’exogènes par Elhorst : le potentiel marchand (taille du marché), la structure sectorielle de l’emploi, les barrières à la mobilité géographique, le niveau d’éducation. Tout en s’inspirant de cette liste, on privilégie ici des déterminants ayant une certaine inertie à moyen terme.
- (11)La difficulté de distinguer la contribution de la proportion d’ouvrières de l’effet territoire ouvrier tient essentiellement au fait que les ZE présentant à la fois une part d’ouvrières supérieure à la moyenne et une part de ménages ouvriers inférieure à la moyenne sont rares (11 sur 304 ZE). Elles sont cependant remarquablement homogènes lorsqu’on considère leur taux d’emploi féminin : sur ces 11 ZE, deux affichent un taux d’emploi féminin très légèrement inférieur à la moyenne d’ensemble, huit autres présentant un avantage d’au moins deux points de pourcentage sur cette moyenne. Cela explique que l’ajustement parvienne à des estimations précises.
- (12)Il est également possible que l’influence de la structure sectorielle de l’emploi soit captée par les conditionnements introduits jusque-là : proportion d’ouvrières, structure par type de ménages, de familles, structure par âges.
- (13)Cette partie suit dans une large mesure Floch et Le Saout (2016) ; elle repose en particulier sur les mêmes matrices de proximité.
- (14)Inversement, l’implantation au sein d’une ZE et aux dépens de ses voisines, d’un établissement régional gros utilisateur de main-d’œuvre féminine peut déterminer, en matière de taux d’emploi féminin, une dépendance négative entre zones voisines.
- (15)On retient ainsi trois des options considérées par Floch et Le Saout (2016). La contiguïté relie exclusivement les ZE ayant une frontière commune, le critère des cinq plus proches voisins connecte chaque ZE aux cinq ZE dont le centroïde est le moins distant.
- (16)À variables de conditionnement données et par référence à l’Ile-de-France, dix régions accusent un écart de taux d’emploi féminin significatif au seuil de 1 % (toujours en leur défaveur) : il s’agit en particulier de la Corse et du Nord-Pas-de-Calais (plus de 7 points de pourcentage d’écart), du Languedoc-Roussillon (5,6 points), de la Provence-Alpes-Côte d’Azur et de la Picardie (4,4 points).
- (17)Une rétroaction selon laquelle une exogène locale influence directement l’endogène locale qui influence les endogènes voisines qui rétroagissent sur l’endogène locale.
- (18)Les indicatrices régionales décalées spatialement permettent d’associer à chaque ZE la proportion (éventuellement pondérée) de ses voisines appartenant à chaque région : cela permet de repérer les ZE en bordure de région qui peuvent être plus ou moins favorables que les autres à l’emploi féminin. En pratique (résultats non reportés), la seule mesure légèrement significative de cet effet concerne le voisinage des Pays-de-la-Loire et l’effet estimé est négatif. L’indicatrice frontière décalée spatialement associe à chaque ZE la proportion de ses voisines qui sont en frontière de l’espace métropolitain : cet aspect ne joue pas de rôle significatif.
- (19)On a vu en effet que les spécialistes de l’économie géographique identifient la densité du peuplement et le poids des services aux particuliers comme deux marqueurs de dynamisme de l’économie résidentielle.
- (20)Cette catégorie est assignée rappelons-le à des personnes non retraitées n’ayant jamais occupé d’emploi.
- (21)Cette différence concerne, pour décrire la structure de l’emploi local, l’utilisation de la NAF (nomenclature d’activités française) en remplacement de la NES : la distinction entre services aux particuliers et services aux entreprises, particulièrement pertinente en termes d’économie géographique n’est plus possible. En lieu et place, on trouvera les catégories « commerce, transports et services marchands » et « administration publique, enseignement, santé, art et autres services non marchands ».
- (22)Voir pp. 58-67 ; voir également, Observatoire des territoires (2016), pp. 92-137.