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Article de revue

La notion d'effectivité du droit

Pages 715 à 732

Notes

  • [1]
    Où il caractérise un procédé effectif : Roger Martin et Daniel Andler, V° « Logique mathématique », in Encyclopædia Universalis <http://www.universalis.fr>.
  • [2]
    Jean Ladrière, V° « Cybernétique – signification », in Encyclopædia Universalis, op. cit.
  • [3]
    Notamment chez Hegel ; voir par exemple : Jean-Louis Vieillard-Baron, « La “Wirklichkeit” ou réalité effective dans les “Principes de la philosophie du droit” de Hegel », Revue philosophique de Louvain, 103 (3), 2005, p. 347-363.
  • [4]
    Comme s’il n’était encore qu’un néologisme. En ce sens, voir Guy Rocher, « L’effectivité du droit », in Andrée Lajoie, Roderick A. Macdonald, Richard Janda et Guy Rocher (dir.), Théories et émergence du droit : pluralisme, surdétermination et effectivité, Montréal : Thémis, Bruxelles : Bruylant, 1998, p. 135.
  • [5]
    Giovanni Distefano, L’ordre international entre légalité et effectivité, Paris : Pedone, 2002, p. 257.
  • [6]
    Paul Amselek, Perspectives critiques d’une réflexion épistémologique sur la théorie du droit, Paris : LGDJ, 1964, p. 340.
  • [7]
    Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, Montréal : Thémis, 1996, p. 7.
  • [8]
    En ce sens, voir Luzius Mader, L’évaluation législative. Pour une analyse empirique des effets de la législation, Lausanne : Payot, 1985, p. 13.
  • [9]
    Voir les premières lignes de l’article précurseur du doyen Jean Carbonnier, « Effectivité et ineffectivité de la règle de droit », L’Année sociologique, LVII, 1958, p. 3.
  • [10]
    Antoine Jeammaud, « Le concept d’effectivité du droit », in Philippe Auvergnon (dir.), L’effectivité du droit du travail : à quelles conditions ?, Actes du Séminaire international de droit comparé du travail, des relations professionnelles et de la sécurité sociale, COMPTRASEC, 2006, p. 34 (souligné par nous). Cet ouvrage collectif est également paru aux Presses universitaires de Bordeaux (2e éd., 2008 ; citation p. 36).
  • [11]
    Antoine Jeammaud et Évelyne Serverin, « Évaluer le droit », Recueil Dalloz, 1992, chronique, p. 264. L’ouvrage collectif dirigé par C. Thibierge est particulièrement révélateur de cet intérêt pour la destinée des normes, leur réception, leur impact sur leur environnement et leurs destinataires : Catherine Thibierge (dir.), La force normative. Naissance d’un concept, Paris : LGDJ, Bruxelles : Bruylant, 2009.
  • [12]
    Hubert Reid, Dictionnaire de droit québécois et canadien, Montréal : Wilson et Lafleur, 2e éd., 1996, p. 209 ; Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Paris : PUF, 6e éd., 2004, p. 339.
  • [13]
    Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, op. cit., p. 15.
  • [14]
    Jean Carbonnier, « Effectivité et ineffectivité de la règle de droit », article cité, p. 3 ; Id., Flexible droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur, Paris : LGDJ, 9e éd., 1998, p. 133.
  • [15]
    Pierre Lascoumes, V° « Effectivité », in André-Jean Arnaud (dir.), Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, Paris : LGDJ, 1993, p. 217.
  • [16]
    Pour Guillaume Drago, l’effectivité est la réalisation concrète, pratique de la règle de droit, son exécution, son application par les destinataires de celle-ci : voir Id., « L’effectivité des sanctions de la violation des droits fondamentaux dans les pays de la Communauté francophone », in Aupelf, L’effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la Communauté francophone, Colloque international, Port-Louis, 29-30 sept. et 1er oct. 1993, AUPELF-UREF, 1994, p. 535.
  • [17]
    Jean-François Perrin, « L’effectivité de l’ordonnance du 10 mars 1975 », in Charles A. Morand, Jean-François Perrin, Christian-Nils Robert et Robert Roth, Le port obligatoire de la ceinture de sécurité. Hypothèses et données pour l’étude des effets d’une norme, Genève : CETEL, Université de Genève, 1977, p. 38.
  • [18]
    Ce qui est clairement exprimé par un auteur portugais : « Le fait que la règle visant la “conformation” de certains comportements de ses destinataires ne soit pas respectée par eux ne signifie pas immédiatement qu’elle soit ineffective : si la sanction est normalement appliquée, il y a là quand même l’un des effets possibles de la règle, la conséquence juridico-pratique de sa violation » (Antonio Monteiro Fernandes, « Réflexions sur l’effectivité en droit du travail à partir du cas portugais », in Philippe Auvergnon (dir.), L’effectivité du droit du travail : à quelles conditions ?, op. cit., p. 106 ; ou p. 108 dans l’édition parue aux Presses universitaires de Bordeaux).
  • [19]
    Ou efficace, les deux mots étant confondus chez Kelsen ou, tout au moins, dans les traductions de ses ouvrages.
  • [20]
    Hans Kelsen, Théorie pure du droit, Paris : Dalloz, 1962, p. 15.
  • [21]
    Hans Kelsen, Théorie générale des normes, Paris : PUF, 1996, p. 4.
  • [22]
    Jean-François Perrin, « L’effectivité de l’ordonnance du 10 mars 1975 », article cité, p. 40 (souligné par nous).
  • [23]
    Pour une illustration de la force, encore aujourd’hui, de cette conception, voir un récent rapport du Conseil d’État pour qui « la loi est faite pour prescrire, interdire, sanctionner » : voir Conseil d’État, Sécurité juridique et complexité du droit, Rapport public 2006, Paris : La Documentation française, coll. « Études et documents. Conseil d’État », 2006, p. 282 <http://www.ladocumentationfrancaise.fr>.
  • [24]
    Herbert Lionel Adolphus Hart, Le concept de droit, Bruxelles : Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 1976, p. 45.
  • [25]
    Philippe Malinvaud, Introduction à l’étude du droit. Cadre juridique des relations économiques, Paris : Litec, 6e éd., 1992, p. 12.
  • [26]
    Jean-Luc Aubert, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, Paris : Armand Colin, 2e éd., 1984, p. 21.
  • [27]
    Philippe Malinvaud, Introduction à l’étude du droit, op. cit., p. 12.
  • [28]
    Jean-Luc Aubert, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, op. cit., p. 22.
  • [29]
    Pour la distinction entre « les lois impératives stricto sensu qui s’opposent aux lois supplétives et les lois impératives lato sensu qui englobent les lois supplétives », voir René Capitant, Introduction à l’étude de l’illicite. L’impératif juridique, thèse Université de Paris, Paris : Dalloz, 1928, p. 70 et suiv.
  • [30]
    Jean-Luc Aubert, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, op. cit., p. 22. Au demeurant, l’existence même d’une distinction entre normes impératives et normes supplétives laisse supposer que toutes les normes ne sont pas, au sens strict, impératives. En tout cas, même en admettant que toutes les normes juridiques sont impératives, il faut bien reconnaître que certaines le sont moins que d’autres : voir Gérard Timsit, Les noms de la loi, Paris : PUF, 1991, p. 50.
  • [31]
    Jean Carbonnier, Flexible droit, op. cit., p. 134.
  • [32]
    Philippe Jestaz, Le droit, Paris : Dalloz, 2007, p. 71.
  • [33]
    Paul Amselek, Perspectives critiques d’une réflexion épistémologique sur la théorie du droit, op. cit., p. 336.
  • [34]
    L’on peut alors parler de normes ou de mesures incitatives. Voir notamment Jean-François Perrin, « Règle », Archives de philosophie du droit, 35, 1990, p. 250.
  • [35]
    Antoine Jeammaud, « La règle de droit comme modèle », Recueil Dalloz, 1990, chronique, p. 201.
  • [36]
    Jean Dabin, Théorie générale du droit, Paris : Dalloz, 1969, p. 82 ; Denys de Béchillon, Qu’est-ce qu’une règle de droit ?, Paris : Odile Jacob, 1997, p. 176 et suiv.
  • [37]
    Jean Carbonnier, Flexible droit, op. cit., p. 135.
  • [38]
    Ibid., p. 136.
  • [39]
    Ibid.
  • [40]
    Philippe Auvergnon, « Une approche comparative de la question de l’effectivité du droit du travail », in Id. (dir.), L’effectivité du droit du travail : à quelles conditions ?, op. cit., p. 10 (ou p. 12 dans l’édition parue aux Presses universitaires de Bordeaux).
  • [41]
    Le fait que les études empiriques d’effectivité aient presque toujours porté sur des normes pénales – ou des normes exprimant soit une obligation, soit une interdiction – contribue sans nul doute à expliquer cette approche : voir Jacques Commaille, V° « Effectivité », in Denis Alland et Stéphane Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris : Lamy/PUF, 2003, p. 584.
  • [42]
    Charles-Antoine Morand, « La sanction », Archives de philosophie du droit, 35, 1990, p. 296.
  • [43]
    Alain Laquièze, V° « Sanction », in Denis Alland et Stéphane Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, op. cit., p. 1381.
  • [44]
    Michel Troper, La philosophie du droit, Paris : PUF, coll. « Que sais-je ? », 2003, p. 70.
  • [45]
    Jean Rivero, « Sur l’effet dissuasif de la sanction juridique », dans Mélanges offerts à Pierre Raynaud, Paris : Dalloz-Sirey, 1985, p. 675.
  • [46]
    Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Paris : PUF, 1987. Contra, écrivant qu’une règle sanctionnée est une règle qui a été transgressée et qui est donc ineffective : voir Philippe Conte, « “Effectivité”, “inefficacité”, “sous-effectivité”, “surefficacité”… : variations pour droit pénal », dans Le droit privé français à la fin du xxe siècle. Études offertes à Pierre Catala, Paris : Litec, 2001, p. 127.
  • [47]
    Louis Le Fur, « Les caractères essentiels du droit en comparaison avec les autres règles de la vie sociale », Archives de philosophie du droit, 1935, p. 7.
  • [48]
    Marie-Anne Frison-Roche, « L’efficacité des décisions en matière de concurrence : notions, critères, typologie », Revue de la concurrence et de la consommation, nov.-déc. 2000, p. 8.
  • [49]
    Jean-François Perrin, Pour une théorie de la connaissance juridique, Paris, Genève : Droz, 1979, p. 94 ; Gunther Teubner, Droit et réflexivité. L’auto-référence en droit et dans l’organisation, Paris : LGDJ, 1996, p. 118 ; Jacques Vérin, « L’efficacité de la prévention générale », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, 4, oct-déc. 1975, p. 1067.
  • [50]
    Jean Rivero, « Sur l’effet dissuasif de la sanction juridique », dans Mélanges offerts à Pierre Raynaud, op. cit., p. 677 et suiv.
  • [51]
    Antoine Jeammaud, « La règle de droit comme modèle », article cité, p. 209. Les règles juridiques peuvent, en effet, prévoir un désagrément en cas de violation de leurs prescriptions, d’autres créent la perspective d’un gain - ou d’une économie - attaché à des opérations à encourager : voir Antoine Jeammaud, « Les règles juridiques et l’action », Recueil Dalloz, 1993, chronique, p. 208. Au-delà de la sanction, « la norme juridique produit bien d’autres effets, juridiques ou extra-juridiques, susceptibles de signer sa force » : Catherine Thibierge, « Synthèse », in Id. (dir.), La force normative. Naissance d’un concept, op. cit., p. 774.
  • [52]
    Voir aussi Christophe Mincke, « Effets, effectivité, efficience et efficacité du droit : le pôle réaliste de la validité », Revue interdisciplinaire d’études juridiques, 40, 1998, p. 115.
  • [53]
    François Ost et Michel van de Kerchove, De la pyramide au réseau. Pour une théorie dialectique du droit, Bruxelles : Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2002, p. 329.
  • [54]
    Ce que résume joliment Pierre Bourdieu en affirmant que « le jeu avec la règle fait partie de la règle du jeu » : voir Pierre Bourdieu, « Droit et passe-droit. Le champ des pouvoirs territoriaux et la mise en œuvre des règlements », Actes de la recherche en sciences sociales, 81/82, 1990, p. 89.
  • [55]
    Danièle Lochak, « Présentation », in Curapp, Les usages sociaux du droit, Paris : PUF, 1989, p. 6.
  • [56]
    François Ost et Michel van de Kerchove, De la pyramide au réseau, op. cit., p. 330.
  • [57]
    Tout en soulignant que le droit n’est qu’une des dimensions à partir desquelles s’organisent les comportements des sujets de droit.
  • [58]
    En ce sens, voir Antoine Jeammaud et Évelyne Serverin, « Évaluer le droit », article cité, p. 268.
  • [59]
    Pierre Guibentif, Les effets du droit comme objet de la sociologie juridique. Réflexions méthodologiques et perspectives de recherche, Genève : CETEL, 1979.
  • [60]
    Luzius Mader, L’évaluation législative. Pour une analyse empirique des effets de la législation, op. cit., p. 89.
  • [61]
    L’auteur nuance, toutefois, cette définition classique de l’effectivité au sujet des normes dites facultatives, estimant qu’à leur égard la question de l’effectivité est moins un problème de respect que d’utilisation.
  • [62]
    François Rangeon, « Réflexions sur l’effectivité du droit », in Curapp, Les usages sociaux du droit, op. cit., p. 130.
  • [63]
    Ibid., p. 139.
  • [64]
    Ibid., p. 135.
  • [65]
    Sur les effets symboliques des normes juridiques, voir Pierre Noreau, « De la force symbolique du droit », in Catherine Thibierge (dir.), La force normative. Naissance d’un concept, op. cit., p. 137.
  • [66]
    François Rangeon, « Réflexions sur l’effectivité du droit », op. cit., p. 137.
  • [67]
    Ibid., p. 128.
  • [68]
    Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, op. cit., p. 3.
  • [69]
    Le droit « ne détient pas le monopole de l’orientation des conduites et il est largement dépendant de variables qui échappent à son contrôle. Dans cette optique, le droit est susceptible d’entraîner plusieurs effets et nous croyons qu’une analyse de ceux-ci permettra de saisir avec davantage de concision l’effectivité du droit, c’est-à-dire la façon dont le droit exerce son influence » (Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, op. cit., p. 59).
  • [70]
    Il était le directeur de recherche de Valérie Demers.
  • [71]
    Guy Rocher, « L’effectivité du droit », op. cit., p. 136.
  • [72]
    Luzius Mader, L’évaluation législative. Pour une analyse empirique des effets de la législation, op. cit., p. 64.
  • [73]
    Guy Rocher, « L’effectivité du droit », op. cit., p. 136.
  • [74]
    Ibid.
  • [75]
    Raymond Boudon, Effets pervers et ordre social, Paris : PUF, 1989, p. 14.
  • [76]
    Geneviève Pignarre, « L’effet pervers des lois », Revue de la recherche juridique. Droit prospectif, 59, 1994 (4), p. 1102.
  • [77]
    Ibid., p. 1098 et suiv. En ce sens, pour L. Mader, l’effet pervers est négatif, non souhaitable : voir Luzius Mader, L’évaluation législative. Pour une analyse empirique des effets de la législation, op. cit., p. 93.
  • [78]
    Geneviève Pignarre, « L’effet pervers des lois », article cité, p. 1113.
  • [79]
    Oscar Bloch et Walther von Wartburg, Dictionnaire étymologique de la langue française, Paris : PUF, 2004, p. 213 ; Emmanuelle Baumgartner et Philippe Ménard, Dictionnaire étymologique et historique de la langue française, Paris : Le livre de poche, 1996, p. 269.
  • [80]
    Alain Rey (dir.), Le Grand Robert de la langue française, Paris : Le Robert, 1989, p. 800.
  • [81]
    Dictionnaire Quillet de la langue française, Paris : A. Quillet, 1975.
  • [82]
    Louis Guilbert, René Lagane et Georges Niobey (dir.), Grand dictionnaire des lettres. Grand Larousse de la langue française, Paris : Larousse, 1986, p. 1493.
  • [83]
    Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, op. cit., p. 68 et suiv.
  • [84]
    Christophe Mincke, « Effets, effectivité, efficience et efficacité du droit : le pôle réaliste de la validité », article cité, p. 126.
  • [85]
    Ibid., p. 139.
  • [86]
    Qu’ils aient une force obligatoire ou simplement recommandatoire.
  • [87]
    Paul Durand, « Droit du travail et sociologie industrielle », Sociologie du travail, janvier-mars 1960, p. 1-13. Dans le même sens, voir Jean Brèthe de la Gressaye, « Le droit et la sociologie du travail », Droit social, juillet-août 1963, p. 402-406.
  • [88]
    Selon Pierre Lascoumes, il est « nécessaire de prendre une distance critique vis-à-vis de toutes les approches dichotomiques qui raisonnent en termes de respect/violation » : voir Pierre Lascoumes, « L’analyse sociologique des effets de la norme juridique : de la contrainte à l’interaction », in Andrée Lajoie, Roderick A. Macdonald, Richard Janda et Guy Rocher (dir.), Théories et émergence du droit : pluralisme, surdétermination et effectivité, op. cit., p. 15.
  • [89]
    Cet article est issu de notre thèse de doctorat de droit privé : Yann Leroy, L’effectivité du droit au travers d’un questionnement en droit du travail, Paris : LGDJ Lextenso éditions, coll. « Bibliothèque de droit social », 2011.

1Le terme « effectivité » n’est, de manière générale, que très peu utilisé dans les différents domaines de connaissance. En dehors des disciplines mobilisées dans la présente recherche, il n’y a guère qu’en logique mathématique [1], en cybernétique [2] ou en philosophie [3] que l’on croise son chemin. Il ne fait d’ailleurs pas partie, en tant que tel, du langage courant, n’apparaissant pas toujours [4] dans les dictionnaires de langue française.

2En première approche, il semble que l’effectivité n’appartienne pas réellement au langage du droit. Elle ne constitue, à proprement parler, ni une catégorie juridique, ni un mot dont les juristes usent de façon habituelle, hormis en droit international public où le terme s’applique à la nationalité des personnes, l’État, l’occupation de territoires, l’exercice de la souveraineté, l’annexion ou encore le blocus maritime. L’effectivité vise alors ce qui se réalise en fait pour être valable ou opposable aux tiers, ce qui prévaut dans les faits et dont l’existence indiscutable justifie la reconnaissance ou l’opposabilité. C’est ici une méthode de création de droit : l’occupation effective d’un territoire sans maître vaut attribution d’un titre juridique [5]. Autrement dit, la notion d’effectivité est utilisée, en droit international, pour définir le caractère d’une situation qui existe en fait, réellement. Cette effectivité-là n’est point celle du droit lui-même. Elle désigne une situation de fait dont la règle de droit va tenir compte. Ainsi que l’écrit Paul Amselek, l’étude de l’effectivité statuée par les normes juridiques interroge sur le contenu même d’une norme juridique, tandis que l’analyse de l’effectivité des règles de droit porte sur la question de leur application [6]. Dans le premier cas, la réflexion ne porte pas sur l’effectivité de la norme, c’est l’effectivité – c’est-à-dire une situation effective – qui est prise en compte par la règle de droit. Il s’agit de l’action de l’effectivité sur le droit, autrement dit du rôle joué par le fait au niveau de la création de la règle de droit, et non pas de l’effectivité de la norme juridique proprement dite qui, seule, nous intéresse ici.

3Si l’effectivité n’est pas traditionnellement une question qui intéresse le juriste, c’est parce que la tâche de celui-ci a surtout été consacrée « à la systématisation des règles de droit ainsi qu’à l’interprétation et à l’application de normes générales et abstraites à des cas d’espèce » [7]. L’essentiel de son travail portait – et porte encore – sur le problème de la détermination du contenu des normes, suivant une approche qu’il est possible de qualifier de statique [8]. De ce fait, l’amont, comme l’aval, du droit, c’est-à-dire le domaine des interactions existant entre le droit et le fait, n’ont été l’objet que d’interrogations d’ordre secondaire pour la dogmatique juridique. Aux yeux de celle-ci, le fait que la loi ne soit pas appliquée atteste seulement qu’une fonction gouvernementale n’est pas correctement remplie, mais la loi inappliquée reste la loi [9]. Il n’en demeure pas moins que l’effectivité apparaît, ainsi que l’écrit fort justement Antoine Jeammaud, comme « un objet d’indispensable inquiétude pour les juristes soucieux de convaincre qu’ils ne s’enferment pas dans “l’univers abstrait des règles” et sont attentifs à l’inscription de celles-ci dans les pratiques sociales » [10]. Il semble, en effet, particulièrement « logique, sinon nécessaire, que l’on s’attache à apprécier les effets concrets ou l’efficience de ces instruments juridiques de changement ou d’amélioration des données socio-économiques » [11] que constituent les règles de droit.

4Pour ce faire, nous partirons, dans un premier temps, de la définition généralement retenue de la notion d’effectivité, afin de révéler les représentations implicites du droit qu’elle véhicule, puis d’analyser le bien-fondé de ces conceptions théoriques (I). Nous pourrons alors, dans un second temps, proposer, à l’aide des analyses théoriques relatives à la notion d’effectivité du droit qui ont pu être développées, une définition de celle-ci plus pertinente au regard de la réalité juridique (II).

I – L’effectivité du droit entendue comme son application

5Classiquement, l’ineffectivité du droit renvoie à l’idée qu’il n’est pas appliqué par les autorités chargées de son contrôle et/ou par le juge compétent pour sanctionner les violations dont il fait l’objet. L’effectivité d’une norme repose, dès lors, soit sur la conformité des comportements suivis par ses destinataires ou par les autorités chargées de sa mise en œuvre, soit sur la sanction prononcée contre ceux qui ne respectent pas la règle. C’est ainsi que les dictionnaires de droit qui contiennent ce terme définissent l’effectivité comme le « caractère d’une règle de droit qui est appliquée réellement » [12]. C’est là, selon l’expression proposée par Valérie Demers, le « paradigme dominant de la notion d’effectivité du droit » [13] (I.1).

6Nous voudrions, dans un second temps, mettre au jour les implicites d’une telle approche de l’effectivité du droit. En ce sens, considérer qu’une norme juridique n’est effective que si elle est appliquée, n’est-ce pas retenir une conception nécessairement impérative et répressive du droit, dans laquelle, d’une part, la norme juridique est nécessairement une règle de conduite obligatoire qui ne peut être que respectée ou violée et, d’autre part, la sanction apparaît comme le meilleur moyen d’assurer le respect de la norme, c’est-à-dire la meilleure garantie de l’effectivité (I.2) ?

I.1 – Le paradigme dominant de la notion d’effectivité du droit

7Dans sa première acception, est effectif ce qui se traduit par des actes réels, tangibles, c’est-à-dire ce qui existe réellement, ce qui est une réalité. En ce sens, dire qu’une norme juridique est effective, c’est indiquer qu’elle existe dans la réalité, autrement dit qu’elle est appliquée dans les faits. C’est cette acception que retient, en première analyse, Jean Carbonnier dans son article précurseur publié en 1958, où il décrit l’effectivité comme « l’application effective » [14] de la règle de droit. L’effectivité est alors entendue comme le « degré de réalisation, dans les pratiques sociales, des règles énoncées par le droit » [15].

8La norme est dite appliquée – et donc, selon ce raisonnement, effective – soit lorsque ses destinataires la respectent [16], c’est-à-dire quand ils accomplissent l’obligation à laquelle la règle les soumet, soit quand les autorités chargées de sa mise en œuvre, juge inclus, l’exécutent [17], autrement dit lorsqu’ils contrôlent et sanctionnent ses violations [18]. La position de Hans Kelsen est quelque peu différente. Le maître autrichien considère qu’une norme est effective [19] « soit lorsqu’elle est appliquée dans les cas concrets par les organes de l’ordre juridique, par les tribunaux, c’est-à-dire lorsque la sanction est ordonnée et exécutée quand la norme le prévoit, soit également lorsqu’elle est suivie par les sujets, c’est-à-dire lorsqu’ils manifestent la conduite qui évite la sanction » [20]. Le théoricien réserve donc l’expression « application d’une norme » à la seule hypothèse dans laquelle les autorités étatiques ordonnent une sanction contre le comportement contraire à la norme [21]. Selon lui, l’application d’une règle de droit est uniquement le comportement d’un plaignant ou du ministère public qui requiert du juge la délivrance d’une sanction à l’égard de celui qui a violé la norme ou l’acte par lequel le juge prescrit cette sanction ou encore l’attitude des organes d’exécution qui exécutent la sanction ordonnée. Il n’y a pas, selon lui, application de la norme quand les sujets de droit la respectent. Pour Kelsen, l’application d’une règle de droit a donc un sens plus étroit que son effectivité. Mais cette divergence n’est finalement qu’un problème terminologique. Ce qui nous importe, c’est que, dans les deux approches, une norme est dite effective soit si elle est appliquée, au sens où Kelsen entend cette expression, soit si elle est observée par ses destinataires, c’est-à-dire si le comportement de ceux-ci correspond à la signification exprimée dans l’énonciation du commandement.

9Dans ce cadre d’analyse, l’effectivité d’une norme juridique dépend donc de son application au sens large, c’est-à-dire de son respect par les individus à qui elle est destinée ou, en cas d’inobservation, du prononcé d’une sanction à l’encontre de celui qui l’a violée. Ce que Jean-François Perrin, qui a été l’un des premiers à mener des recherches sur l’effectivité d’une réglementation – en l’occurrence, celle imposant le port de la ceinture de sécurité –, exprime de manière fort explicite en indiquant qu’« application et inapplication, effectivité et ineffectivité sont les deux facettes d’un même problème » [22], précisant que l’effectivité est liée, à la fois, au comportement des sujets de droit – qui calquent ou non leur comportement sur ce que prescrit la norme – et à la survenance du mécanisme sanctionnateur, à l’application de la sanction.

10Derrière cette grille d’analyse rattachant l’effectivité d’une norme juridique au fait que celle-ci soit respectée ou sanctionnée en cas de violation, transparaît implicitement une conception impérative et répressive du droit.

1.2 – Une conception impérative et répressive du droit

11Si la règle de droit est considérée comme ineffective lorsque l’obligation qu’elle pose n’est pas appliquée, faute d’un contrôle suffisant, ou lorsque sa violation n’est pas sanctionnée de manière suffisamment adéquate, c’est parce qu’elle est comprise comme étant tout à la fois obligatoire et sanctionnée par l’État.

12(1) Selon le premier postulat, toute norme de droit est perçue comme ne pouvant qu’être soit respectée, soit violée. La seule fonction de la règle serait de prescrire, d’interdire ou d’autoriser un comportement [23]. Cette approche, qui semble rendre la notion d’effectivité relativement simple – le comportement étant conforme ou non aux règles posées – semble discutable si l’on veut bien étudier l’ensemble des normes juridiques. Comme l’écrivait le célèbre juriste anglais, H.L.A. Hart, la règle de droit n’a, en effet, pas toujours les traits d’ordres appuyés de menaces [24]. Il s’agit, en fait, de la classique distinction opérée entre règles impératives et règles supplétives. Les premières ne laissent aucune marge de manœuvre aux sujets de droit, ces derniers ne pouvant y échapper par une convention contraire [25]. Elles « s’imposent absolument aux sujets de droit » [26], ce qui implique qu’ils ne peuvent que les respecter, qu’y obéir. En revanche, l’application des secondes « peut être écartée par une volonté contraire exprimée » [27] par les individus. A contrario, « elles ne s’appliquent que dans la mesure où les sujets de droit n’ont pas exprimé de volonté particulière pour l’organisation de leur situation » [28].

13Certes, le caractère supplétif de ces normes juridiques n’est pas incompatible avec leur caractère obligatoire dans la mesure où, à défaut de manifestation de la volonté des sujets de droit, les normes supplétives s’imposent aux intéressés [29]. Notre objectif n’est pas, dans le cadre restreint de cet article, d’approfondir cette question qui relève de la définition même de la norme juridique. Tel n’est pas, en réalité, notre propos. Il nous suffit de remarquer que « l’existence de règles supplétives démontre que l’idée d’obligation liée à la règle de droit n’est pas dépourvue de souplesse » [30], et surtout que l’application de ces dernières n’est pas une règle absolue dans la mesure où leur applicabilité dépend directement de la volonté de ceux à qui elle est destinée. Dès lors, le raisonnement reliant l’effectivité de la norme à son application – c’est-à-dire à son respect ou au fait qu’elle soit sanctionnée dans le cas contraire – n’est guère pertinent pour ce type de règles, puisque l’inapplication d’une norme supplétive n’est pas nécessairement un cas de violation de celle-ci et que, partant, il serait illogique d’en faire un cas d’ineffectivité. Autrement dit, affirmer qu’une règle est effective si elle est respectée n’a pas de sens pour les normes supplétives puisque, précisément, l’application de ces dernières peut, en toute légalité, être écartée par les sujets de droit.

14Dans le même sens, bien des normes juridiques ne trouvent à s’appliquer que si les intéressés décident de les mettre en œuvre. Comme l’a fort justement écrit Jean Carbonnier, la plupart des lois en matière contractuelle ne sont, en effet, que des propositions, offrant aux individus des possibilités de contracter mais ne les y obligeant pas [31]. Philippe Jestaz illustre cet état de fait en relevant qu’« aucune loi n’oblige jamais personne à divorcer ou à fonder une société » [32]. Ces normes sont à la disposition des individus [33]. Si elles visent, certes, les comportements des individus, elles ne leur en imposent aucun, cherchant simplement parfois à les inciter à faire ou à ne pas faire telle ou telle chose [34]. Il semble, dès lors, impossible de dire de ceux qui refusent d’adopter les attitudes en question, qu’ils ont violé lesdites règles. Fondant aussi bien l’adoption que la non-adoption de la conduite qui constitue leur objet, elles offrent, en fait, un cadre pour les échanges entre particuliers. Ces règles procurent aux sujets de droit les moyens de réaliser leurs intentions et leur laissent la liberté d’user de ce droit, ce qui signifie également qu’ils sont libres de ne pas en user. Comme le souligne Antoine Jeammaud, « il est clair qu’il y a dans la reconnaissance ou l’attribution d’un droit subjectif bien davantage que l’autorisation d’une conduite déterminée » [35]. Et si certains auteurs estiment que les règles facultatives ou attributives sont tout de même impératives – en ce sens qu’elles font défense à autrui de porter atteinte au droit attribué et obligent donc tout tiers à respecter cette faculté [36] –, ce qui nous importe, dans le cadre de notre démonstration, c’est de souligner, comme l’a fait avant nous Jean Carbonnier, que, pour ce type de normes, « la loi inappliquée n’en demeure pas moins disponible aux convenances du public, et [que] c’est cette disponibilité qui est son utilité essentielle » [37]. Et l’éminent auteur de préciser qu’« on ne saurait pousser la notion d’effectivité, pour les lois permissives, jusqu’à cette conséquence que tout ce qui est permis devrait être effectivement appliqué » [38], ajoutant fort justement que « l’effectivité de la loi qui consacre une liberté d’agir se situe non dans l’action, mais dans la liberté même, c’est-à-dire dans le pouvoir de choisir l’inaction aussi bien que l’action » [39]. Ainsi, ce type de normes qui nécessitent une mise en mouvement de la part des acteurs, en fonction de leurs intérêts, de leurs intentions, de leurs besoins, de leurs connaissances, « ne peut tout simplement pas être ineffective » [40] si l’on retient la définition classique de l’effectivité du droit, entendue comme la conformation du comportement des individus au prescrit de la règle.

15Finalement, la conception suivant laquelle l’effectivité d’une règle de droit correspond au fait que celle-ci soit respectée ou, à défaut, sanctionnée, ne tient pas compte de la diversité et de la spécificité des normes juridiques. Cette approche a été élaborée uniquement en se référant aux normes impératives au sens strict, pour lesquelles seule l’analyse en terme de conformité est opératoire [41]. Or, cette vision impérativiste du droit est, nous l’avons relevé, gravement réductrice.

16(2) Le second postulat repose sur l’idée, liée à l’affirmation précédente, suivant laquelle toute norme juridique est accompagnée d’une sanction qui doit s’appliquer en cas de violation de la règle. La sanction serait le plus sûr moyen d’assurer le respect de la règle de droit et, par voie de conséquence dans ce raisonnement, la meilleure garantie de l’effectivité, la condition essentielle de son effectivité.

17Ce raisonnement renvoie au débat portant sur le caractère obligatoire de la norme juridique, puisque, dans cette optique, la règle de droit est un commandement qui se caractérise précisément par la possibilité d’infliger une sanction à celui qui y désobéit [42]. Or, nous l’avons vu, la dimension impérative d’un certain nombre de normes juridiques n’apparaît pas essentielle. En fait, cette approche aboutit à voir dans le droit un système avant tout répressif et à occulter les autres fonctions du droit. Comme le souligne Alain Laquièze, « rapprocher la sanction de la punition en cas de non-respect d’une obligation juridique revient à mettre l’accent sur la dimension répressive de tout ordre juridique » [43]. Une telle conception de la sanction est critiquable dans la mesure où cette dernière n’a pas uniquement une nature répressive, mais parfois, au contraire, une nature positive lorsqu’elle prend la forme d’une récompense et non d’une peine. Au-delà, ainsi que l’écrit Michel Troper, « il existe de très nombreuses normes juridiques dépourvues de toute sanction » [44]. Affirmer que ces règles sont ineffectives lorsqu’elles ne sont pas sanctionnées n’a dès lors aucun sens.

18Par ailleurs, la sanction est souvent présentée comme le plus sûr moyen d’assurer le respect de la règle de droit, « l’instrument principal de [la] nécessaire mise en conformité du sein avec le sollen, du réel avec la norme » [45]. Elle serait le « moyen destiné à assurer le respect et l’exécution effective d’un droit ou d’une obligation » [46], ou encore « une conséquence naturelle, sinon nécessaire de l’effectivité du droit » [47]. Autrement dit, la fonction première de la sanction serait d’assurer l’effectivité d’une règle juridique, sa réalisation dans les faits. En ce sens, la sanction apparaît comme une condition essentielle de l’effectivité d’une norme juridique puisque la menace de son prononcé est érigée en élément crucial dans l’attitude des sujets de droit face à l’obligation posée ; ou, pour le dire autrement, elle est le moyen de rétablir l’effectivité du droit lorsque celui-ci a été violé [48]. Il est alors couramment affirmé le rapport évident entre le taux de conformité à une norme juridique et la sévérité de la sanction prévue en cas de violation de celle-ci. De même, il est postulé que l’effectivité de la norme est liée à la fréquence d’application de la sanction [49].

19Nous ne nions pas que l’existence de contrôles réels vérifiant le respect de la réglementation ou que l’importance de la sanction prévue et de la condamnation prononcée aient une influence sur le comportement des acteurs sociaux et notamment sur leur choix de se conformer ou non à l’obligation posée par la règle [50]. Mais cette influence doit être relativisée. D’abord, nous l’avons vu, une norme juridique n’impose pas nécessairement un comportement obligatoire et déterminé, sous peine d’une sanction en cas de non-respect. À tout le moins, il convient de relever l’extrême « variété des modalités selon lesquelles les règles de droit en vigueur tendent à exercer une pression effective en vue de l’accomplissement ou de l’abstention d’actions [ainsi] que des différences d’intensité de cette pression » [51]. Ensuite, en se plaçant sur un terrain non plus juridique, mais sociologique, psychologique ou économique, l’hypothèse d’une relation causale entre la sévérité des sanctions prévues suite à la violation d’une norme et son taux de conformité est contredite par de nombreuses études empiriques de criminologie et de sociologie pénale qui n’attribuent à l’augmentation de la sévérité des peines qu’un rôle négligeable au niveau de l’effectivité, entendue dans le sens d’application, des normes juridiques. La sévérité de la sanction peut même avoir justement l’effet inverse, en ce qu’elle dissuade le juge de la prononcer.

20Il ressort de ce qui précède que l’effectivité d’une norme juridique n’est pas directement liée à l’application d’une sanction en cas de non-respect de celle-ci.

21Des développements qui précèdent, il faut conclure soit que la notion d’effectivité du droit n’est utilisable que pour les normes juridiques impératives au sens strict, c’est-à-dire imposant une conduite déterminée aux sujets de droit et pourvues d’une sanction en cas de violation de cette conduite, soit qu’elle ne peut pas se résumer à la question de son application dans les faits. C’est cette seconde voie que nous devons, à présent, emprunter : dépasser l’approche classique de la notion d’effectivité afin d’en révéler toutes les potentialités.

II – L’effectivité du droit : une notion au cœur des effets produits par les normes juridiques

22Différents auteurs ont cherché à s’écarter de l’acception classique assimilant l’effectivité à l’application de la norme juridique. Nous distinguerons, parmi les différentes analyses proposées, deux orientations principales qui ne sont toutefois pas exclusives l’une de l’autre et qui se rejoignent à certains égards. Dans la première, la notion d’effectivité ne correspond plus seulement à l’application de la norme mais plus largement à son utilisation par les individus ou les autorités compétentes, tandis que la seconde orientation traduit un changement de perspective dans l’approche de l’effectivité, à nos yeux absolument essentiel, en plaçant la notion au cœur même des effets produits par les normes juridiques (II.1). À partir de ces fertiles analyses, nous essayerons de montrer que, selon nous, l’effectivité correspond à la production de tous les effets adéquats à la finalité des normes juridiques observées (II.2).

II.1 – Des conceptions renouvelées de l’effectivité du droit

23(1) Rejetant l’univocité des critères de validité du droit et proposant, avec d’autres, d’admettre que c’est la combinaison de trois concepts – légalité, légitimité et effectivité – qui détermine le degré de validité d’une norme juridique, François Ost et Michel van de Kerchove estiment que l’effectivité prend place au sein du pôle réaliste de la validité [52]. Selon eux, l’effectivité est une notion extrêmement complexe qu’ils définissent, en première analyse, comme « la capacité de la règle à orienter le comportement de ses destinataires dans le sens souhaité par le législateur » [53]. Ils partent de l’idée selon laquelle la norme juridique constitue une ressource, un étalon, une référence pour les actions. Dès lors, si les sujets de droit se déterminent, en partie, en fonction des normes juridiques, ce n’est pas nécessairement pour les appliquer. Autrement dit, l’on ne joue pas toujours dans les règles mais avec ou sur les règles [54]. Le droit laisse une marge d’action importante aux acteurs, les individus restant, face aux normes juridiques, libres d’agir comme ils le souhaitent, sauf à assumer les conséquences de leurs choix.

24La circonstance que le comportement d’un sujet de droit ait été décidé en fonction de la règle de droit, même si ce n’est pas pour s’y conformer, apparaît alors tout à fait éclairante au regard de notre problématique car, comme l’écrit Danièle Lochak, si l’action du droit s’opère surtout « à travers les usages que les acteurs font de la règle, et qui ne coïncident pas nécessairement avec les objectifs poursuivis initialement par le législateur, [cela] conduit, chemin faisant, à repenser la notion d’effectivité du droit » [55]. En effet, dans ce cadre, ce qui compte, ce n’est pas que la règle de droit soit respectée, appliquée, mais c’est la circonstance qu’elle puisse être utilisée, mobilisée par les sujets de droit ou les autorités étatiques d’application. Par voie de conséquence, François Ost et Michel van de Kerchove en déduisent qu’« est effective la règle utilisée par ses destinataires comme modèle pour orienter leur pratique » [56], qu’il s’agisse des destinataires primaires, c’est-à-dire les individus auxquels la règle s’adresse, ou des destinataires secondaires, à savoir les autorités administratives et répressives chargées d’assurer la mise en œuvre et le contrôle de la norme. Il n’est pas question, dans leur approche, de se limiter aux seuls cas dans lesquels les individus utilisent les possibilités qui leur sont offertes par les règles supplétives, facultatives ou attributives, mais d’envisager l’ensemble des hypothèses donnant lieu à une mobilisation – de quelque manière que ce soit – de la règle par les acteurs. Adoptant une approche wébérienne des activités juridiques, il leur semble moins important de mesurer le degré de réalisation pratique des règles de droit que la façon dont les sujets de droit agissent et se déterminent vis-à-vis d’elles [57]. Autrement dit, il faut identifier le plus finement possible les cadres d’action à partir desquels les individus agissent, en scrutant les rapports que les normes juridiques rendent possibles, en décryptant les choix qu’elles consacrent et en détaillant les différentes façons dont elles peuvent être prises en compte par leurs destinataires [58]. Cette grille d’analyse nous semble fort pertinente au regard de notre problématique. L’étude de la façon dont les différents acteurs – sujets de droit, agents chargés du contrôle, juges – mobilisent les normes juridiques, qu’elles soient impératives ou facultatives, et de la manière dont celles-ci pèsent sur leurs conduites apparaît, en effet, tout à fait indispensable.

25(2) Dans une recherche réalisée à la fin des années 1980, le sociologue du droit Pierre Guibentif a été l’un des premiers à tenter une analyse théorique portant sur les effets du droit [59]. Toutefois, dans l’approche retenue par cet auteur, la problématique des effets produits par les règles de droit dépasse très largement celle de l’effectivité. Selon lui, seule la question visant à savoir dans quelle mesure la loi a été appliquée, tant par les individus que par les autorités publiques chargées de son contrôle, traite de l’effectivité. Dans son analyse, les autres questions soulevées au sujet des effets produits par une règle de droit ne relèvent pas de la problématique de l’effectivité. De façon relativement similaire, l’ouvrage que Luzius Mader a consacré au thème de l’évaluation législative met incontestablement l’accent sur les effets du droit, tout en estimant que l’effectivité des normes juridiques ne constitue qu’un des questionnements que soulève la notion d’effet ou d’impact de la loi [60]. Selon cet auteur, le problème de l’effectivité se résume à la question de savoir si les comportements des sujets de droit correspondent à ceux prescrits par la législation et s’ils lui sont réellement imputables. Autrement dit, son approche reste là encore identique à la définition classique de l’effectivité pour laquelle une norme juridique n’est effective que si elle amène ses destinataires à se conformer aux prescriptions qu’elles posent [61]. L’effectivité vise alors un effet particulier lié aux comportements induits par la loi. Finalement, ces auteurs, faisant le constat du caractère trop réducteur du concept d’effectivité – tel qu’ils l’entendent –, jugent nécessaire de dépasser ce cadre conceptuel et d’analyser les effets, les conséquences, qu’engendrent les règles de droit afin de pouvoir disposer d’une évaluation plus pertinente de celles-ci. Ils ne suggèrent donc pas d’élargir la notion d’effectivité pour englober les effets causés par une norme juridique, mais seulement de mobiliser, à côté de celle-ci et compte tenu de son insuffisance, un autre concept centré sur l’étude des effets du droit.

26Selon François Rangeon, l’effectivité ne se limite pas au comportement actif d’application d’une règle, mais doit également recouvrir les hypothèses dans lesquelles une norme est respectée parce que les individus la considèrent comme juste et légitime ou parce qu’ils craignent d’éventuelles sanctions. L’effectivité n’est donc pas, pour cet auteur, « une simple question de fait (le constat empirique des cas de respect de la règle), mais présente aussi une dimension symbolique » [62]. Son évaluation ne peut donc pas « se borner à l’analyse des effets “visibles” du droit, mais doit inclure les effets symboliques, tant juridiques que non juridiques » [63]. Partant de l’idée suivant laquelle la norme juridique n’est pas nécessairement impérative, mais qu’elle est, selon les perspectives tracées par Max Weber, davantage un modèle d’action, un système de potentialité à partir duquel se déploient des activités spécifiques de mobilisation des règles, François Rangeon estime que l’analyse de l’effectivité d’une norme juridique doit englober « une véritable évaluation des effets du droit prenant en compte le point de vue des usagers » [64], qu’il s’agisse des destinataires de la règle ou des fonctionnaires chargés de son exécution. Il convient donc, d’après lui, d’étudier les effets visibles ou symboliques [65], juridiques ou non juridiques, les effets prévisibles ou imprévus, voulus ou non, voire les effets inverses de ceux qui étaient recherchés. L’effectivité ne saurait ainsi, pour cet auteur, se réduire, ni à la réalisation des effets voulus par le législateur, ni à l’application des règles énoncées par le droit, dans la mesure où celles-ci sont susceptibles d’être interprétées de diverses manières. En ce sens, il ajoute qu’une évaluation de l’effectivité doit se prémunir d’une conception trop restrictive du droit, précisant que, puisqu’un même texte peut faire l’objet de différentes interprétations, il peut engendrer de multiples usages sociaux [66].

27À cet égard, sa conception de l’effectivité semble relativement proche de celle développée par François Ost et Michel van de Kerchove. Toutefois, dans l’approche de François Rangeon, la problématique de l’effectivité est davantage centrée sur les effets du droit. L’effectivité ne correspond pas seulement, selon lui, à l’utilisation, concrète ou symbolique, de la règle, mais réside dans les effets qui résultent d’une telle utilisation. Cette nuance souligne un changement d’optique essentiel à nos yeux puisque l’effectivité n’est alors plus envisagée comme une action – l’action consistant, pour les sujets de droit, à appliquer les prescriptions posées par la règle ou à utiliser les facultés qu’elle leur offre – mais comme le résultat de cette action, la problématique de l’effectivité se situant, dès lors, au cœur même des effets produits par le droit.

28Toutefois, selon cet auteur, « si d’un côté l’effectivité ne se limite pas à la stricte application de la règle, de l’autre elle ne s’étend pas à l’ensemble des effets du droit » [67]. François Rangeon exclut, ainsi, de sa définition de l’effectivité, les phénomènes de rejet de la règle ou de volonté de contournement de celle-ci. Selon lui, il s’agit alors plus de situations d’ineffectivité que d’effectivité de la norme juridique. L’évaluation de l’ensemble des effets du droit reste encore, pour cet auteur, plus large que l’évaluation de l’effectivité.

29À l’inverse, deux auteurs québécois ont, quant à eux, il y a une dizaine d’années, proposé d’élargir, sans réserve, la notion d’effectivité à l’ensemble des effets produits par la règle de droit. Une chercheuse québécoise, Valérie Demers, a suggéré d’élargir la définition de l’effectivité en l’inscrivant au cœur « d’une véritable évaluation des effets sociaux susceptibles d’être engendrés par une règle de droit » [68]. Selon elle, l’effectivité se comprend comme la façon dont le droit exerce son influence. Les termes effectivité et effets apparaissent donc synonymes l’un de l’autre. Sa conception repose sur l’idée que le droit n’est qu’un mécanisme de régulation sociale, un déterminant des rapports sociaux, parmi d’autres, contrairement au paradigme dominant de la notion d’effectivité qui postule implicitement la vocation du droit à tout régir, à s’appliquer de façon quasi mécanique. Dès lors, centrer l’effectivité d’une règle de droit sur l’analyse de ses effets offre, selon elle, l’avantage de pouvoir mieux cerner la façon dont le droit exerce une influence face à d’autres systèmes de régulation [69]. Elle justifie également son choix d’élargir la définition de l’effectivité du droit à l’ensemble des effets qu’il engendre par la nécessité qui se fait jour désormais d’évaluer les conséquences des normes juridiques, ces dernières étant très souvent considérées aujourd’hui comme un processus finalisé destiné à modifier une situation. En ce sens, l’étude des effets qu’elles produisent apparaît donc essentielle pour justifier, pour légitimer même, leur présence dans le corpus juridique.

30La conception de l’effectivité du droit adoptée par Guy Rocher est très proche de celle de Valérie Demers [70]. Partant du constat suivant lequel les lois engendrent parfois des conséquences non prévues ou dissimulées par leur auteur ou encore des effets qui se produisent par des voies indirectes, Guy Rocher estime, sans pour autant se livrer à une véritable démonstration, que la notion d’effectivité englobe les recherches portant sur l’évaluation de l’impact d’une loi, c’est-à-dire celles qui s’intéressent aux résultats, qu’ils soient voulus ou non, engendrés par les règles de droit. En fait, selon cet auteur, l’effectivité recouvrirait également d’autres concepts utilisés tant par des juristes que par des sociologues [71], ajoutant ainsi à la conception défendue par Valérie Demers. Feraient, en ce sens, partie intégrante d’une analyse de l’effectivité les études relatives à l’observance de la loi, lesquelles portent leur attention sur les motifs ou les circonstances expliquant les comportements des justiciables face aux prescriptions posées par les normes juridiques. De même, l’analyse de l’effectivité s’étendrait à celle de la mise en œuvre de la loi dont l’objet repose sur ce qui survient après l’adoption formelle de la loi, c’est-à-dire sur l’ensemble du « processus de concrétisation et de transformations des décisions législatives » [72]. L’analyse de l’effectivité du droit nécessiterait donc, selon l’approche développée par cet auteur, d’investir deux voies principales. La première, observée à travers les études d’impact du droit, consisterait à « retracer la diversité de ses effets, voulus et involontaires, recherchés ou accidentels, directs et indirects, prévus et inattendus, sociaux, politiques, économiques ou culturels » [73]. La seconde doit avoir pour ambition, grâce aux études relatives à l’observance de la loi et, plus encore, à celles portant sur sa mise en œuvre, « de retrouver les voies par lesquelles passent ces effets et les mécanismes qui les produisent » [74]. Pour Guy Rocher, l’effectivité ne se limite donc pas seulement à la recherche des effets, de toute nature qu’ils soient, mais s’étend également aux raisons expliquant ces effets et à la façon dont ils se produisent. En particulier, l’étude de la mise en œuvre doit, à ses yeux, non pas se contenter d’expliquer l’écart existant entre le contenu normatif des règles et le comportement réel des autorités responsables de leur application, mais analyser les relations entre les différents acteurs chargés de la mise en œuvre d’une réglementation donnée, tant entre eux qu’avec les destinataires de celle-ci, ainsi que les stratégies d’action des uns et des autres afin précisément d’expliquer pourquoi tel effet peut être observé dans la réalité sociale.

31La conception de l’effectivité proposée par les deux auteurs québécois opère donc une véritable fusion entre les notions d’effectivité et d’effets du droit. Non seulement l’effectivité se découvre à travers les effets engendrés par les normes juridiques, comme dans l’approche développée par François Rangeon, mais elle se fond totalement dans ces effets, au point que plus rien ne permet de distinguer les deux notions. Peut-on réellement aller jusque-là ?

II.2 – L’effectivité : des effets en adéquation avec la finalité des normes juridiques

32L’approche développée par les deux auteurs québécois précités, en élargissant la notion d’effectivité à l’ensemble des effets engendrés par les règles de droit, conduit à admettre que les effets pervers y ont pleinement leur place. Le sociologue Raymond Boudon définit l’effet pervers de manière très large, sans connotation négative, l’expression désignant à la fois l’effet non désiré quoique désirable et l’effet non désiré et indésirable. Selon lui, le terme pervers désigne ce qui est renversé ou retourné, l’effet pervers correspondant alors à l’effet qui n’est pas recherché. Dès lors, écrit-il, les effets pervers qui sont « non explicitement voulus peuvent être positifs, négatifs ou à la fois positifs et négatifs pour certains ou pour tous » [75]. Il reconnaît toutefois que le terme est mieux adapté au second cas de figure. En ce sens, l’expression d’effet pervers est presque toujours connotée de façon négative et désigne, dans le domaine juridique, « un effet de la règle qui est une réaction contre elle » [76]. Autrement dit, il s’agit d’un effet qui n’est jamais désiré et qui, en outre, est jugé indésirable, parasitaire, incompatible avec l’effet utile de la règle [77]. L’effet pervers porte ainsi atteinte, selon Geneviève Pignarre, soit à la finalité, soit aux bienfaits de la règle [78].

33Sachant cela, la question qui est posée est de savoir s’il est possible d’accueillir ces effets pervers au sein de la notion d’effectivité. Il ne nous le semble pas, d’abord, car ce serait alors s’éloigner incontestablement du sens commun attribué aux mots effectif et effectivité. Certes, nous l’avons indiqué, l’adjectif effectif désigne ce qui « produit un effet » [79]. En ce sens, la règle de droit qui engendre un effet pervers pourrait donc être qualifiée d’effective puisqu’elle est bien, au sens strict, à l’origine d’un effet. Toutefois, différents dictionnaires de langue française attirent l’attention sur les liens étroits entre les adjectifs effectif et efficace. Ainsi, le Robert cite les deux mots comme de possibles synonymes [80]. De façon encore plus nette, le dictionnaire Quillet définit l’adjectif effectif comme ce « qui produit l’effet attendu, qui est efficace » [81]. Quant au Larousse, il estime effectif ce qui notamment « produit un résultat positif » [82]. Dès lors, il apparaît que l’effectivité se rapporte à une finalité. Même s’il ne s’agit pas de confondre effectivité et efficacité, les deux notions entretiennent d’étroites relations. Si l’évaluation de l’efficacité n’a d’égards que pour les effets désirés, l’appréciation de l’effectivité, plus large, porte aussi sur les effets non intentionnels. Cependant, parmi ces effets non désirés, voire non prévus, seuls ceux qui correspondent aux finalités de la norme juridique ou, plus précisément encore, ceux qui ne sont pas en opposition avec les valeurs que la règle véhicule nous semblent participer de la notion d’effectivité. Autrement dit, cette dernière comprend les effets qui sont en adéquation avec la finalité de la règle de droit qui les produit, qu’il s’agisse d’effets voulus ou d’effets non désirés mais désirables, ou même d’effets non prévus tant qu’ils ne sont pas contradictoires avec ladite finalité. La question de la finalité des règles de droit ne se confond pas, tout au moins en totalité, avec celle des objectifs poursuivis, des résultats désirés. Il s’agit en fait de rechercher quelles sont les finalités qui unissent, qui sous-tendent les règles de droit dont on souhaite évaluer l’effectivité, en procédant à une véritable reconstruction des buts qu’elles poursuivent, eu égard aux concepts qu’elles contiennent, aux procédures qu’elles mettent en place ou encore aux choix qu’elles consacrent. D’évidence, une telle identification des finalités n’est guère aisée, tant celles-ci peuvent être multiples, dissimulées, contradictoires.

34Cela ne signifie pas que l’identification d’effets pervers n’est pas, en soi, riche d’enseignements, mais seulement que ce type d’effets ne peut, sauf à vider de son sens l’idée d’effectivité, y être intégré. La conception des deux auteurs québécois élargissant l’effectivité à l’ensemble des effets du droit, donc y compris aux effets pervers, entraîne, selon nous, la désintégration même de la notion d’effectivité. Une telle position aboutit, en effet, à ne plus pouvoir qualifier une règle de droit d’ineffective, dans la mesure où il est des plus improbables qu’elle ne produise absolument aucun effet. Comme l’écrit, précisément, Valérie Demers, « toutes les normes, même celles qualifiées, à tort ou à raison, d’ineffectives, engendrent des effets » [83]. Or, si la règle ne peut plus être ineffective, à quoi pourrait bien servir la notion d’effectivité ? Il semble bien que, dans une telle approche, cette notion n’existe tout simplement plus.

35L’effectivité ne s’étend donc pas, selon nos analyses, à tous les effets produits par le droit. Néanmoins, il ne s’agit pas, d’après nous, de réduire l’effectivité à « un effet particulier » [84], correspondant à « l’effet immédiat désiré » [85], découlant tantôt de l’application, tantôt de l’utilisation de la règle. Ce serait alors conserver une acception de l’effectivité, au final, relativement proche de la conception dominante, dans la mesure où l’effet auquel il est fait référence n’est, en réalité, rien d’autre que celui qui résulte de l’application ou de l’utilisation d’une norme juridique. À nos yeux, l’effectivité ne se résume pas à une catégorie d’effets parmi d’autres, à un effet particulier, car si l’effectivité n’embrasse pas l’ensemble des effets du droit, elle dépasse de beaucoup une catégorie d’effets en particulier. L’effectivité vise, dès lors, tout à la fois les effets concrets ou symboliques, les effets juridiques[86], économiques, sociaux ou de quelque autre nature, les effets désirés ou non voulus, prévus ou non intentionnels, immédiats ou différés, à la seule condition qu’ils n’entrent pas en contradiction avec les finalités des règles de droit évaluées.

36Il ne faut pas toutefois nier les difficultés qu’une telle définition peut poser tant au stade de l’observation des effets produits par les normes juridiques – surtout si l’on pense aux effets symboliques qui se manifestent dans les mentalités des individus – qu’au niveau de l’explication de la causalité entre l’effet observé et la règle de droit évaluée, d’autant que le premier peut parfaitement rétroagir sur la seconde. Ces difficultés liées à l’évaluation de l’effectivité doivent appeler le chercheur à la plus grande prudence. Elles ne rendent toutefois pas l’évaluation impossible, révélant seulement son inscription dans le paradigme de la complexité et de l’interdisciplinarité. Le juriste, seul, ne dispose pas, d’évidence, des compétences lui permettant d’observer et d’analyser les effets extra-juridiques, ce que Paul Durand avait déjà relevé il y a près d’un demi-siècle, indiquant que la pensée juridique doit nécessairement se tourner vers l’histoire, la science politique, l’économie, la sociologie afin de mieux connaître le monde que les règles de droit prétendent ordonner et afin de pouvoir observer l’action et l’efficacité de celles-ci [87].

37* * *

38En conclusion, dans la conception de l’effectivité du droit que nous défendons, l’approche n’est pas seulement quantitative mais aussi qualitative. Il s’agit moins de mesurer le taux d’effectivité de la règle que de faire apparaître la richesse et la diversité des effets, juridiques ou non, qu’elle engendre. Derrière les effets habituellement mis en avant dans les études empiriques – effets concrets, immédiats, directs –, nous pensons que d’autres effets, même plus difficilement observables, n’en demeurent pas moins des signes d’effectivité du droit. La mise au jour des effets symboliques, différés ou médiats, nous semble en ce sens, à proprement parler, indispensable. L’approche extensive de l’effectivité que nous proposons permet, à notre avis, de mieux comprendre le rôle joué par les normes juridiques et les conséquences qu’elles induisent. Elle se pense, en réalité, comme un moyen de lutter contre la vision unilatérale des effets généralement proposée. En plaçant l’accent sur la diversité de ces effets, notre acception nous semble apte à dépasser les problématiques liées à une pensée dualiste ou binaire [88] – suivant une logique du « tout ou rien » ou du « blanc ou noir » – dans laquelle la règle ne peut être qu’effective ou ineffective. En ce sens elle entend s’opposer aux visions réductrices de l’effectivité généralement adoptées en contribuant à un renouvellement de cette notion susceptible d’être mobilisée par d’autres chercheurs – qu’ils soient juristes, sociologues, économistes – pour révéler toute la richesse mais aussi toute la complexité des effets du droit [89].

L’auteur

Maître de conférences à l’Université Nancy 2, Yann Leroy est membre du CERIT, unité de recherche en droit social de l’Institut François Gény (Université de Lorraine), laboratoire au sein duquel il dirige actuellement une étude collective sur les ruptures conventionnelles, après avoir réalisé une recherche sur l’emploi des seniors. L’auteur place ses recherches au carrefour de la théorie du droit et du droit du travail qui reste son domaine de prédilection.
Parmi ses publications :
  • L’effectivité du droit au travers d’un questionnement en droit du travail, Paris : LGDJ Lextenso éditions, coll. « Bibliothèque de droit social », 2011 ;
  • « Concours réel de fautes en droit du travail : une seule sanction possible », Revue de droit du travail, 7/8, juillet/août 2010 ;
  • « La discrimination fondée sur l’âge : un principe général encore fragile », Revue de jurisprudence sociale, 12, décembre 2010 ;
  • « L’obligation de reclassement : l’indispensable préalable à tout licenciement pour motif économique », Cass. soc., 25 nov. 2009, n° 08-42755, Chronique de droit du travail,Petites affiches, 207, 22 octobre 2010 ;
  • « Un rapport de plus critiquant l’inefficacité économique du droit du travail », La Semaine juridique – Social (JCP S), 12, 23 mars 2010.

Mots-clés éditeurs : théorie du droit, norme juridique, effectivité du droit, effets du droit

Mise en ligne 23/01/2012

https://doi.org/10.3917/drs.079.0715

Notes

  • [1]
    Où il caractérise un procédé effectif : Roger Martin et Daniel Andler, V° « Logique mathématique », in Encyclopædia Universalis <http://www.universalis.fr>.
  • [2]
    Jean Ladrière, V° « Cybernétique – signification », in Encyclopædia Universalis, op. cit.
  • [3]
    Notamment chez Hegel ; voir par exemple : Jean-Louis Vieillard-Baron, « La “Wirklichkeit” ou réalité effective dans les “Principes de la philosophie du droit” de Hegel », Revue philosophique de Louvain, 103 (3), 2005, p. 347-363.
  • [4]
    Comme s’il n’était encore qu’un néologisme. En ce sens, voir Guy Rocher, « L’effectivité du droit », in Andrée Lajoie, Roderick A. Macdonald, Richard Janda et Guy Rocher (dir.), Théories et émergence du droit : pluralisme, surdétermination et effectivité, Montréal : Thémis, Bruxelles : Bruylant, 1998, p. 135.
  • [5]
    Giovanni Distefano, L’ordre international entre légalité et effectivité, Paris : Pedone, 2002, p. 257.
  • [6]
    Paul Amselek, Perspectives critiques d’une réflexion épistémologique sur la théorie du droit, Paris : LGDJ, 1964, p. 340.
  • [7]
    Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, Montréal : Thémis, 1996, p. 7.
  • [8]
    En ce sens, voir Luzius Mader, L’évaluation législative. Pour une analyse empirique des effets de la législation, Lausanne : Payot, 1985, p. 13.
  • [9]
    Voir les premières lignes de l’article précurseur du doyen Jean Carbonnier, « Effectivité et ineffectivité de la règle de droit », L’Année sociologique, LVII, 1958, p. 3.
  • [10]
    Antoine Jeammaud, « Le concept d’effectivité du droit », in Philippe Auvergnon (dir.), L’effectivité du droit du travail : à quelles conditions ?, Actes du Séminaire international de droit comparé du travail, des relations professionnelles et de la sécurité sociale, COMPTRASEC, 2006, p. 34 (souligné par nous). Cet ouvrage collectif est également paru aux Presses universitaires de Bordeaux (2e éd., 2008 ; citation p. 36).
  • [11]
    Antoine Jeammaud et Évelyne Serverin, « Évaluer le droit », Recueil Dalloz, 1992, chronique, p. 264. L’ouvrage collectif dirigé par C. Thibierge est particulièrement révélateur de cet intérêt pour la destinée des normes, leur réception, leur impact sur leur environnement et leurs destinataires : Catherine Thibierge (dir.), La force normative. Naissance d’un concept, Paris : LGDJ, Bruxelles : Bruylant, 2009.
  • [12]
    Hubert Reid, Dictionnaire de droit québécois et canadien, Montréal : Wilson et Lafleur, 2e éd., 1996, p. 209 ; Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Paris : PUF, 6e éd., 2004, p. 339.
  • [13]
    Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, op. cit., p. 15.
  • [14]
    Jean Carbonnier, « Effectivité et ineffectivité de la règle de droit », article cité, p. 3 ; Id., Flexible droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur, Paris : LGDJ, 9e éd., 1998, p. 133.
  • [15]
    Pierre Lascoumes, V° « Effectivité », in André-Jean Arnaud (dir.), Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, Paris : LGDJ, 1993, p. 217.
  • [16]
    Pour Guillaume Drago, l’effectivité est la réalisation concrète, pratique de la règle de droit, son exécution, son application par les destinataires de celle-ci : voir Id., « L’effectivité des sanctions de la violation des droits fondamentaux dans les pays de la Communauté francophone », in Aupelf, L’effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la Communauté francophone, Colloque international, Port-Louis, 29-30 sept. et 1er oct. 1993, AUPELF-UREF, 1994, p. 535.
  • [17]
    Jean-François Perrin, « L’effectivité de l’ordonnance du 10 mars 1975 », in Charles A. Morand, Jean-François Perrin, Christian-Nils Robert et Robert Roth, Le port obligatoire de la ceinture de sécurité. Hypothèses et données pour l’étude des effets d’une norme, Genève : CETEL, Université de Genève, 1977, p. 38.
  • [18]
    Ce qui est clairement exprimé par un auteur portugais : « Le fait que la règle visant la “conformation” de certains comportements de ses destinataires ne soit pas respectée par eux ne signifie pas immédiatement qu’elle soit ineffective : si la sanction est normalement appliquée, il y a là quand même l’un des effets possibles de la règle, la conséquence juridico-pratique de sa violation » (Antonio Monteiro Fernandes, « Réflexions sur l’effectivité en droit du travail à partir du cas portugais », in Philippe Auvergnon (dir.), L’effectivité du droit du travail : à quelles conditions ?, op. cit., p. 106 ; ou p. 108 dans l’édition parue aux Presses universitaires de Bordeaux).
  • [19]
    Ou efficace, les deux mots étant confondus chez Kelsen ou, tout au moins, dans les traductions de ses ouvrages.
  • [20]
    Hans Kelsen, Théorie pure du droit, Paris : Dalloz, 1962, p. 15.
  • [21]
    Hans Kelsen, Théorie générale des normes, Paris : PUF, 1996, p. 4.
  • [22]
    Jean-François Perrin, « L’effectivité de l’ordonnance du 10 mars 1975 », article cité, p. 40 (souligné par nous).
  • [23]
    Pour une illustration de la force, encore aujourd’hui, de cette conception, voir un récent rapport du Conseil d’État pour qui « la loi est faite pour prescrire, interdire, sanctionner » : voir Conseil d’État, Sécurité juridique et complexité du droit, Rapport public 2006, Paris : La Documentation française, coll. « Études et documents. Conseil d’État », 2006, p. 282 <http://www.ladocumentationfrancaise.fr>.
  • [24]
    Herbert Lionel Adolphus Hart, Le concept de droit, Bruxelles : Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 1976, p. 45.
  • [25]
    Philippe Malinvaud, Introduction à l’étude du droit. Cadre juridique des relations économiques, Paris : Litec, 6e éd., 1992, p. 12.
  • [26]
    Jean-Luc Aubert, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, Paris : Armand Colin, 2e éd., 1984, p. 21.
  • [27]
    Philippe Malinvaud, Introduction à l’étude du droit, op. cit., p. 12.
  • [28]
    Jean-Luc Aubert, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, op. cit., p. 22.
  • [29]
    Pour la distinction entre « les lois impératives stricto sensu qui s’opposent aux lois supplétives et les lois impératives lato sensu qui englobent les lois supplétives », voir René Capitant, Introduction à l’étude de l’illicite. L’impératif juridique, thèse Université de Paris, Paris : Dalloz, 1928, p. 70 et suiv.
  • [30]
    Jean-Luc Aubert, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, op. cit., p. 22. Au demeurant, l’existence même d’une distinction entre normes impératives et normes supplétives laisse supposer que toutes les normes ne sont pas, au sens strict, impératives. En tout cas, même en admettant que toutes les normes juridiques sont impératives, il faut bien reconnaître que certaines le sont moins que d’autres : voir Gérard Timsit, Les noms de la loi, Paris : PUF, 1991, p. 50.
  • [31]
    Jean Carbonnier, Flexible droit, op. cit., p. 134.
  • [32]
    Philippe Jestaz, Le droit, Paris : Dalloz, 2007, p. 71.
  • [33]
    Paul Amselek, Perspectives critiques d’une réflexion épistémologique sur la théorie du droit, op. cit., p. 336.
  • [34]
    L’on peut alors parler de normes ou de mesures incitatives. Voir notamment Jean-François Perrin, « Règle », Archives de philosophie du droit, 35, 1990, p. 250.
  • [35]
    Antoine Jeammaud, « La règle de droit comme modèle », Recueil Dalloz, 1990, chronique, p. 201.
  • [36]
    Jean Dabin, Théorie générale du droit, Paris : Dalloz, 1969, p. 82 ; Denys de Béchillon, Qu’est-ce qu’une règle de droit ?, Paris : Odile Jacob, 1997, p. 176 et suiv.
  • [37]
    Jean Carbonnier, Flexible droit, op. cit., p. 135.
  • [38]
    Ibid., p. 136.
  • [39]
    Ibid.
  • [40]
    Philippe Auvergnon, « Une approche comparative de la question de l’effectivité du droit du travail », in Id. (dir.), L’effectivité du droit du travail : à quelles conditions ?, op. cit., p. 10 (ou p. 12 dans l’édition parue aux Presses universitaires de Bordeaux).
  • [41]
    Le fait que les études empiriques d’effectivité aient presque toujours porté sur des normes pénales – ou des normes exprimant soit une obligation, soit une interdiction – contribue sans nul doute à expliquer cette approche : voir Jacques Commaille, V° « Effectivité », in Denis Alland et Stéphane Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris : Lamy/PUF, 2003, p. 584.
  • [42]
    Charles-Antoine Morand, « La sanction », Archives de philosophie du droit, 35, 1990, p. 296.
  • [43]
    Alain Laquièze, V° « Sanction », in Denis Alland et Stéphane Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, op. cit., p. 1381.
  • [44]
    Michel Troper, La philosophie du droit, Paris : PUF, coll. « Que sais-je ? », 2003, p. 70.
  • [45]
    Jean Rivero, « Sur l’effet dissuasif de la sanction juridique », dans Mélanges offerts à Pierre Raynaud, Paris : Dalloz-Sirey, 1985, p. 675.
  • [46]
    Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Paris : PUF, 1987. Contra, écrivant qu’une règle sanctionnée est une règle qui a été transgressée et qui est donc ineffective : voir Philippe Conte, « “Effectivité”, “inefficacité”, “sous-effectivité”, “surefficacité”… : variations pour droit pénal », dans Le droit privé français à la fin du xxe siècle. Études offertes à Pierre Catala, Paris : Litec, 2001, p. 127.
  • [47]
    Louis Le Fur, « Les caractères essentiels du droit en comparaison avec les autres règles de la vie sociale », Archives de philosophie du droit, 1935, p. 7.
  • [48]
    Marie-Anne Frison-Roche, « L’efficacité des décisions en matière de concurrence : notions, critères, typologie », Revue de la concurrence et de la consommation, nov.-déc. 2000, p. 8.
  • [49]
    Jean-François Perrin, Pour une théorie de la connaissance juridique, Paris, Genève : Droz, 1979, p. 94 ; Gunther Teubner, Droit et réflexivité. L’auto-référence en droit et dans l’organisation, Paris : LGDJ, 1996, p. 118 ; Jacques Vérin, « L’efficacité de la prévention générale », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, 4, oct-déc. 1975, p. 1067.
  • [50]
    Jean Rivero, « Sur l’effet dissuasif de la sanction juridique », dans Mélanges offerts à Pierre Raynaud, op. cit., p. 677 et suiv.
  • [51]
    Antoine Jeammaud, « La règle de droit comme modèle », article cité, p. 209. Les règles juridiques peuvent, en effet, prévoir un désagrément en cas de violation de leurs prescriptions, d’autres créent la perspective d’un gain - ou d’une économie - attaché à des opérations à encourager : voir Antoine Jeammaud, « Les règles juridiques et l’action », Recueil Dalloz, 1993, chronique, p. 208. Au-delà de la sanction, « la norme juridique produit bien d’autres effets, juridiques ou extra-juridiques, susceptibles de signer sa force » : Catherine Thibierge, « Synthèse », in Id. (dir.), La force normative. Naissance d’un concept, op. cit., p. 774.
  • [52]
    Voir aussi Christophe Mincke, « Effets, effectivité, efficience et efficacité du droit : le pôle réaliste de la validité », Revue interdisciplinaire d’études juridiques, 40, 1998, p. 115.
  • [53]
    François Ost et Michel van de Kerchove, De la pyramide au réseau. Pour une théorie dialectique du droit, Bruxelles : Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2002, p. 329.
  • [54]
    Ce que résume joliment Pierre Bourdieu en affirmant que « le jeu avec la règle fait partie de la règle du jeu » : voir Pierre Bourdieu, « Droit et passe-droit. Le champ des pouvoirs territoriaux et la mise en œuvre des règlements », Actes de la recherche en sciences sociales, 81/82, 1990, p. 89.
  • [55]
    Danièle Lochak, « Présentation », in Curapp, Les usages sociaux du droit, Paris : PUF, 1989, p. 6.
  • [56]
    François Ost et Michel van de Kerchove, De la pyramide au réseau, op. cit., p. 330.
  • [57]
    Tout en soulignant que le droit n’est qu’une des dimensions à partir desquelles s’organisent les comportements des sujets de droit.
  • [58]
    En ce sens, voir Antoine Jeammaud et Évelyne Serverin, « Évaluer le droit », article cité, p. 268.
  • [59]
    Pierre Guibentif, Les effets du droit comme objet de la sociologie juridique. Réflexions méthodologiques et perspectives de recherche, Genève : CETEL, 1979.
  • [60]
    Luzius Mader, L’évaluation législative. Pour une analyse empirique des effets de la législation, op. cit., p. 89.
  • [61]
    L’auteur nuance, toutefois, cette définition classique de l’effectivité au sujet des normes dites facultatives, estimant qu’à leur égard la question de l’effectivité est moins un problème de respect que d’utilisation.
  • [62]
    François Rangeon, « Réflexions sur l’effectivité du droit », in Curapp, Les usages sociaux du droit, op. cit., p. 130.
  • [63]
    Ibid., p. 139.
  • [64]
    Ibid., p. 135.
  • [65]
    Sur les effets symboliques des normes juridiques, voir Pierre Noreau, « De la force symbolique du droit », in Catherine Thibierge (dir.), La force normative. Naissance d’un concept, op. cit., p. 137.
  • [66]
    François Rangeon, « Réflexions sur l’effectivité du droit », op. cit., p. 137.
  • [67]
    Ibid., p. 128.
  • [68]
    Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, op. cit., p. 3.
  • [69]
    Le droit « ne détient pas le monopole de l’orientation des conduites et il est largement dépendant de variables qui échappent à son contrôle. Dans cette optique, le droit est susceptible d’entraîner plusieurs effets et nous croyons qu’une analyse de ceux-ci permettra de saisir avec davantage de concision l’effectivité du droit, c’est-à-dire la façon dont le droit exerce son influence » (Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, op. cit., p. 59).
  • [70]
    Il était le directeur de recherche de Valérie Demers.
  • [71]
    Guy Rocher, « L’effectivité du droit », op. cit., p. 136.
  • [72]
    Luzius Mader, L’évaluation législative. Pour une analyse empirique des effets de la législation, op. cit., p. 64.
  • [73]
    Guy Rocher, « L’effectivité du droit », op. cit., p. 136.
  • [74]
    Ibid.
  • [75]
    Raymond Boudon, Effets pervers et ordre social, Paris : PUF, 1989, p. 14.
  • [76]
    Geneviève Pignarre, « L’effet pervers des lois », Revue de la recherche juridique. Droit prospectif, 59, 1994 (4), p. 1102.
  • [77]
    Ibid., p. 1098 et suiv. En ce sens, pour L. Mader, l’effet pervers est négatif, non souhaitable : voir Luzius Mader, L’évaluation législative. Pour une analyse empirique des effets de la législation, op. cit., p. 93.
  • [78]
    Geneviève Pignarre, « L’effet pervers des lois », article cité, p. 1113.
  • [79]
    Oscar Bloch et Walther von Wartburg, Dictionnaire étymologique de la langue française, Paris : PUF, 2004, p. 213 ; Emmanuelle Baumgartner et Philippe Ménard, Dictionnaire étymologique et historique de la langue française, Paris : Le livre de poche, 1996, p. 269.
  • [80]
    Alain Rey (dir.), Le Grand Robert de la langue française, Paris : Le Robert, 1989, p. 800.
  • [81]
    Dictionnaire Quillet de la langue française, Paris : A. Quillet, 1975.
  • [82]
    Louis Guilbert, René Lagane et Georges Niobey (dir.), Grand dictionnaire des lettres. Grand Larousse de la langue française, Paris : Larousse, 1986, p. 1493.
  • [83]
    Valérie Demers, Le contrôle des fumeurs. Une étude d’effectivité du droit, op. cit., p. 68 et suiv.
  • [84]
    Christophe Mincke, « Effets, effectivité, efficience et efficacité du droit : le pôle réaliste de la validité », article cité, p. 126.
  • [85]
    Ibid., p. 139.
  • [86]
    Qu’ils aient une force obligatoire ou simplement recommandatoire.
  • [87]
    Paul Durand, « Droit du travail et sociologie industrielle », Sociologie du travail, janvier-mars 1960, p. 1-13. Dans le même sens, voir Jean Brèthe de la Gressaye, « Le droit et la sociologie du travail », Droit social, juillet-août 1963, p. 402-406.
  • [88]
    Selon Pierre Lascoumes, il est « nécessaire de prendre une distance critique vis-à-vis de toutes les approches dichotomiques qui raisonnent en termes de respect/violation » : voir Pierre Lascoumes, « L’analyse sociologique des effets de la norme juridique : de la contrainte à l’interaction », in Andrée Lajoie, Roderick A. Macdonald, Richard Janda et Guy Rocher (dir.), Théories et émergence du droit : pluralisme, surdétermination et effectivité, op. cit., p. 15.
  • [89]
    Cet article est issu de notre thèse de doctorat de droit privé : Yann Leroy, L’effectivité du droit au travers d’un questionnement en droit du travail, Paris : LGDJ Lextenso éditions, coll. « Bibliothèque de droit social », 2011.
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