Notes
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[1]
Voir mon article « Le burlesque dans le Furetière », Littératures classiques, no 47, p. 273-286.
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[2]
Paul Pellisson, Histoire de l’Académie française [1652], éd. par Ch.-L. Livet, 1858, t. 1, p. 79.
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[3]
« C’est le corps d’une belle femme, que finit une queue de poisson ». Montaigne cite ici le v. 4 de l’Art poétique d’Horace, qui s’ouvre donc sur ce qu’on interprète unanimement, au XVIIe siècle, comme la condamnation esthétique à la fois du mélange des genres – comique/tragique, élevé/bas – et du burlesque.
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[4]
Montaigne, Les Essais, I, 28, « De l’amitié », 1992, éd. par Pierre Villey, t. 1, p. 183.
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[5]
Théophile Gautier, Les Grotesques [1833], éd. par Cecilia Rizza, 1985, p. 452.
-
[6]
Adonis [1658], dans Œuvres diverses, éd. par Pierre Clarac, 1958, p. 6.
-
[7]
[1840-1859], éd. par Maxime Leroy, 1955, t. 3, p. 436-437 (livre VI).
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[8]
« La maladie du burlesque », Revue des Deux Mondes, 1er août 1906.
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[9]
Pellisson parle de « fureur » dont la France a dû se « guérir » (op. cit., p. 79) ; la citation de Charles Sorel se trouve p. 208 (De la maniere de bien parler & de bien écrire. De la connoissance des bons livres, ou examen de plusieurs Autheurs [1671], éd. par Lucia Moretti Cenerini, 1974).
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[10]
Ainsi de l’attitude critique de Boileau envers le burlesque, bien plus nuancée et ambiguë que ne l’analyse Sainte-Beuve : voir Jean Leclerc, « Boileau juge du burlesque » et Claudine Nédélec, « Boileau poète héroï-comique ? », Actes du colloque international « Boileau, poésie, esthétique », Versailles, 22-23 mai 2003 (à paraître).
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[11]
Claude Favre de Vaugelas, Remarques sur la langue française, utiles à ceux qui veulent bien parler et bien écrire, 1647, p. 2.
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[12]
Je m’appuie ici sur le travail d’investigation que j’ai mené dans mon ouvrage Les États et Empires du burlesque, 2004.
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[13]
Voir Charles Perrault, Parallèles des anciens et des modernes en ce qui regarde les arts et les sciences [1692-1697, 2e éd.], 1979 ; et Adrien Baillet, Jugemens des savants sur les principaux ouvrages des auteurs [1725], 1971.
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[14]
Voir, par exemple, Antoine Furetière, Le Voyage de Mercure, satyre, 1653, et Claude Petit-Jehan, Virgile goguenard ou le douziesme livre de l’Eneide travesty (Puisque Travesty y a), 1652.
-
[15]
Cyrano de Bergerac, Œuvres complètes, éd. par Madeleine Alcover, 2000, t. 1, p. 7.
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[16]
Voir René Bray, La Formation de la doctrine classique en France, 1927, et Claude Chantalat, À la recherche du goût classique, 1992.
-
[17]
Jugement de tout ce qui a esté imprimé contre le cardinal Mazarin depuis le sixiesme janvier jusques à la declaration du premier avril mil six cent quarante neuf [dit aussi le Mascurat], s.l.n.d. [1649].
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[18]
Charles Sorel, Role des presentations faites aux Grands Jours de l’Eloquence Françoise [1634], éd. par Édouard Fournier dans Variétés historiques et littéraires. Recueil de pièces volantes rares et curieuses en prose et en vers, 1855, t. 1, p. 127-140. Le Rôle [...] fut réédité avec des remaniements en 1650 (version publiée par Ch.-L. Livet dans P. Pellisson, op. cit., t. 1, p. 456-467) ; Gilles Ménage, Le Parnasse alarmé, ou Requeste presentée par les dictionnaires [1649], publié en annexe aux Origines de la langue française [1650], 1972.
-
[19]
Voir Jean-Louis Guez de Balzac, Les Entretiens, « Entretien XXXVIII. Sur le stile burlesque » [vers 1652], éd. par Bernard Beugnot, 1972, t. 2, p. 487-504, et Madeleine de Scudéry, Clélie, histoire romaine [1654-1660], 1973, t. 8, p. 866-868.
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[20]
Jean de La Fontaine, Les Amours de Psyché et de Cupidon [1669], « Préface », Œuvres diverses, op. cit., p. 123.
-
[21]
Voir L’Esthétique galante. Paul Pellisson, Discours sur les Œuvres de Monsieur Sarasin [1656] et autres textes, éd. par Alain Viala et al., 1989. Pellisson n’hésite pas à féliciter Sarasin d’avoir écrit, avec Dulot vaincu ou la Défaite des bouts-rimés, une « imitation presque burlesque du poème épique » (p. 58).
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[22]
L’expression est de Paul Scarron (« À M. d’Aumale », Les Œuvres burlesques de M. Scarron. Troisième partie [1650], dans Poésies diverses, éd. par Maurice Cauchie, 1947, p. 468).
-
[23]
Œuvres complètes, op. cit., t. 2.
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[24]
Car, encore une fois, il faut renoncer à en donner une image faussement unifiée.
-
[25]
« Le Testament de M. Scarron, son épitaphe et son portrait en vers burlesques » [1660], Œuvres, 1970 [1786], t. 1, p. 137.
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[26]
P. Scarron, Le Virgile travesti [1648-1659], éd. par J. Serroy, 1988, p. 384 (préface du livre V).
-
[27]
Ainsi Molière parle-t-il à Louis XIV, dans le « Premier Placet » du Tartuffe [1664], comme au « plus grand roi du monde et [au] plus éclairé » (Œuvres complètes, éd. par Georges Couton, 1971, t. 1, p. 890).
-
[28]
Il le qualifie ainsi dans son Discours sur l’ode [1701] (Odes. Poésies diverses, éd. par Charles-H. Boudhors, 1941, p. 14), reconnaissant au passage en être l’auteur. Et pourquoi en ce lieu ? Hasard éditorial (le volume de l’édition favorite réunit les Odes et l’Arrêt), ou manière indirecte de rappeler que l’Ode sur la prise de Namur n’est pas, par sa pointe finale, sans quelque burlesque ?
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[29]
Le Malade imaginaire [1673], III, 3, op. cit., t. 2, p. 1153.
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[30]
Précisons que, au XVIIe siècle, « héroï-comique » garde, par référence à la littérature italienne, à laquelle Saint-Amant l’avait emprunté (dans la préface au Passage de Gibraltar [1640], 1967, p. 158) le sens de mélange (par juxtaposition) d’éléments héroïques et d’éléments comiques, comme il apparaît clairement dans la préface de Pierre Perrault à sa traduction de La Secchia rapita d’Alessandro Tassoni (1678) ; c’est très certainement encore en ce sens que l’emploie Boileau en 1701 pour le sous-titre du Lutrin. Mais, très vite, on a (indûment) confondu héroï-comique et ce « Burlesque nouveau [...] en nostre Langue », dont Boileau se glorifiait dans la première préface du Lutrin (1674 – préface pourtant disparue en 1701), burlesque inverse de celui de Scarron, où « une Horlogere et un Horloger parlent comme Didon et Énée » (Épîtres, Art Poétique. Lutrin, éd. par Charles-H. Boudhors, 1932, p. 169). Voir mon article « Boileau poète héroï-comique ? » (op. cit.).
-
[31]
Et pour ces deux-là au moins, des plus proches de la Cour...
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[32]
Notons au passage qu’elle fournit encore de belles sources d’inspiration à la bande dessinée, ce qui prouve qu’elle n’est pas si morte qu’on veut bien le dire.
-
[33]
P. Scarron, Le Virgile travesti, op. cit., « Introduction générale », p. 1.
-
[34]
Lettre de Chapelain à Nicolas Heinsius, de janvier 1649 (Soixante-dix-sept lettres inédites à Nicolas Heinsius, 1649-1658, publiées d’après le manuscrit de Leyde [...] par Bernard Alain Bray, 1965, p. 128).
-
[35]
« Les Murs de Troye, chant II », publié par Paul Bonnefon, Revue d’histoire littéraire de la France, 1900, p. 453 (voir aussi Arsenal Ms 2956). C’est Charles qui, dans ses Mémoires de ma vie (1993, p. 114), attribue ce texte à son frère Claude.
-
[36]
La Critique de l’École des femmes [1663], sc. 6, Œuvres complètes, op. cit., t. 1, p. 661.
-
[37]
Ce dont même Boileau semble persuadé, du moins lorsqu’il égale Molière à Térence (Stances à Mr Molière sur la comédie de l’École des Femmes [...], dans Odes. Poésies diverses, op. cit., p. 34) et Racine à Euripide (Vers pour mettre au bas du portrait de Mr Racine, ibid., p. 58).
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[38]
Voir « Le burlesque dans le Furetière », op. cit.
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[39]
Dis/simulations [...]. Religion, morale et politique au XVIIe siècle, 2002, p. 147.
-
[40]
C’est la thèse défendue par Christian Biet, « Énéide triomphante, Énéide travestie. Virgile au siècle classique », Europe, janvier-février 1993, p. 130-144.
-
[41]
Les États et Empires du Soleil, op. cit., t. 1, p. 167 sq. Voir mon article « Cyrano de Bergerac et la censure, dans ce monde-ci et dans l’autre », Cahiers Diderot, no 9, 1997, p. 193-203.
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[42]
Qui rappellent ceux des prêtres de la Lune de Cyrano.
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[43]
Cité par Georges Mongrédien, Comédies et pamphlets sur Molière, 1986, p. 89-90.
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[44]
Louis Racine, Mémoires [...], dans Jean Racine, Œuvres complètes, 1999, t. 1, p. 1190.
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[45]
Voir n. 35 de cet article.
1Choisir au XVIIe siècle de « dire en burlesque », selon l’expression de Furetière [1], paraît aujourd’hui faire à l’évidence un choix esthétique qui constitue et institue en marginal du Grand Siècle, en amont comme en aval.
2En amont, parce que, selon Pellisson, « burlesque » n’est autre qu’un mot nouveau, d’importation récente et venu d’Italie, pour désigner ce qu’on appelait auparavant grotesque [2] ; or les grotesques (ou « crotesques »), ce sont ces « peintures fantasques » en marge des grands tableaux, dont parle Montaigne :
Considérant la conduite de la besongne d’un peintre que j’ay, il m’a pris envie de l’ensuivre. Il choisit le plus bel endroit et milieu de chaque paroy, pour y loger un tableau élabouré de toute sa suffisance ; et, le vuide tout au tour, il le remplit de crotesques, qui sont peintures fantasques, n’ayant grace qu’en la variété et estrangeté. Que sont-ce icy aussi, à la verité, que crotesques et corps monstrueux, rappiecez de divers membres, sans certaine figure, n’ayants ordre, suite ny proportion que fortuite ?
3Desinit in piscem mulier formosa superne. [3]
Je vay bien jusques à ce second point avec mon peintre, mais je demeure court en l’autre et meilleure partie : car ma suffisance ne va pas si avant que d’oser entreprendre un tableau riche, poly et formé selon l’art. [4]
4Au centre donc, un tableau produisant une impression de beauté, d’équilibre, ayant ordre, suite et proportion ; dans les marges, tout ce qui tire sa grâce (notons le terme) de l’irrégulier et du désordonné, du rapiéçage et de l’hybridation, voire de la monstruosité. C’est peut-être en partie en souvenir de ce texte que Gautier rassembla en 1833 une série de « portraits littéraires » des marginaux du XVIIe siècle sous le titre Les Grotesques, au nombre desquels il met Saint-Amant, Cyrano, et Scarron, burlesques notables. Il explique en effet que son objectif n’est nullement de faire passer ces marginaux pour d’authentiques représentants, méconnus, de l’âge classique et du classicisme ; il ne s’agit pas de les « mettre au centre », mais de faire valoir ce centre par la description de ses marges, et des « figures grimaçantes » qui s’y trouvent, ainsi que de rappeler qu’il peut y avoir quelque grâce, ou quelque attrait pittoresque, chez les fantasques et les extravagants, ceux auxquels conviendrait « le nom d’arabesque, où, sans grand souci de la pureté des lignes, le crayon s’égare en mille fantaisies baroques » [5].
5Opération destinée – sans grand succès – à lutter contre la profonde modification du jugement porté sur cette marginalité-là depuis Montaigne. Chez lui en effet, la métaphore picturale illustrait et valorisait un choix esthétique assumé, en quelque sorte légitime, même si c’était avec quelque modestie provocante. Les Essais n’ont grâce qu’en leur variété et étrangeté – mais ils ont cette grâce-là, « plus belle encor que la beauté » peut-être, selon la formule de La Fontaine [6] (qu’il n’est point trop étrange de rencontrer là). Mais dans la doxa critique du XIXe siècle, en aval donc, les burlesques sont passés du rang de marge décorative au rang de marge dangereuse, d’une marginalité « choisie » au double sens du terme (résultat d’un choix esthétique, et preuve de raffinement) à une marginalité vicieuse, faute esthétique et défaut moral. En témoigne ce qu’écrit Sainte-Beuve, dans une incidente vengeresse de son Port-Royal :
Et le burlesque, autre fléau, le burlesque, cette lèpre des années de la Fronde et qui y survivait, Boileau en fit son affaire comme personnelle et n’en voulut rien laisser subsister. [...] Genre bas, vil, dégradant, détestable, et pour lequel il n’y aurait eu qu’une excuse à donner : c’est qu’il faisait une sorte de contre-poids au genre précieux ; il y fut une manière d’antidote. Ces deux maladies se contrarièrent. Mais Boileau ne voulait pas plus de l’une que de l’autre, et n’admettait qu’un régime sain pour la santé de l’esprit. [7]
6Ainsi, tandis que, chez Montaigne, la métaphore picturale et géométrique insistait sur l’heureuse association esthétique entre le désordre et l’ordre, l’étrange et le normal, le discontinu et l’unifié, chez Sainte-Beuve, la métaphore médicale et ses développements connexes signifient tout autre chose, de profondément éthique, et non esthétique : le burlesque provoque le dégoût, il est une sorte de maladie contagieuse qui atteint la santé de l’âme... et la bonne marche des autorités politiques, puisqu’il est intrinsèquement lié à la Fronde. Certes, Sainte-Beuve, et Brunetière qui reprend la même métaphore dans un article célèbre [8], peuvent s’appuyer sur l’autorité de Pellisson, ou encore de Sorel, qui écrit en 1671, dans De la connaissance des bons livres, « il semble que toute la France soit malade du burlesque » [9].
7Mais aujourd’hui que nous avons réévalué le baroque, et que notre vision du « classicisme » s’est problématisée [10], devons-nous continuer à féliciter les « classiques » d’avoir su s’interdire des choix esthétiques éthiquement dangereux, c’est-à-dire au fond des choix inesthétiques, le Beau, le Bien et le Vrai ne faisant qu’une seule et même chose dans cette représentation de l’âge classique finalement très platonicienne ? Est-il réellement fondé de voir dans les burlesques du XVIIe siècle des marginaux rejetés, à juste titre, par la « plus saine partie des Autheurs du temps » [11], c’est-à-dire par ceux qui constituent le panthéon classique – perchée sur une racine de bruyère, la corneille boit l’eau de la fontaine Molière... – et dont les œuvres offrent le « modèle » des canons de l’esthétique et de la morale classiques, comme le répète avec insistance Brunetière ?
8Il semble bien que ce soit le concept exogène de classicisme qui a fait de l’esthétique burlesque, telle qu’elle se définit de manière endogène, une esthétique marginale. Mais cette marginalité n’est pas seulement un effet en retour : elle est aussi une réalité historique. En quoi cette esthétique a-t-elle effectivement servi à illustrer, manifester, exprimer des positions idéologiques marginales, déviantes, transgressives, voire contestataires ? Et pourtant Molière, La Fontaine, Racine, Perrault, La Bruyère, et même Boileau, ont « écrit en burlesque » : marginalité donc pour le moins paradoxale.
UNE ESTHÉTIQUE MARGINALE PAR DÉFINITION ?
9Cette esthétique vouée à être déniée et dénigrée a pourtant cet avantage sur la prétendue « doctrine classique » qu’elle fut assez nettement constituée en notion littéraire tout au cours du siècle [12]. Mais cette notion a été réinterprétée de façon gauchie par l’histoire littéraire, qui a tendu, dans un mouvement en apparence contradictoire, à la fois à justifier son rejet, et à l’assimiler en partie, à l’intérieur même du classicisme.
Le burlesque comme genre
10L’assimilation du burlesque à une catégorie générique, le travestissement de l’épopée gréco-latine, dont le modèle est Le Virgile travesti, est historiquement fausse : des dizaines de textes explicitement désignés comme burlesques ont paru au XVIIe siècle, sans avoir rien à voir avec le travestissement épique, à commencer par le premier à s’intituler ainsi, le Recueil de quelques vers burlesques de Scarron (1643). Et quand on célèbre Scarron comme modèle du bon burlesque, on célèbre tout autant l’auteur du Roman comique et d’un théâtre dont le héros est le burlesque Jodelet que celui du Virgile travesti [13].
11Non seulement le burlesque est une catégorie transgénérique, mais une part essentielle de son effet comique tient en réalité à ce qu’il pratique un mélange aussi incongru et discordant que possible des genres canoniques. Ainsi, on ne se contente pas de travestir l’épopée, on y mêle la satire des mœurs, ou le pamphlet politique [14] ; Le Parasite Mormon, histoire comique (1650) est un extravagant mélange de prose et de poésie, de genres doctes (apophtegmes et problèmes, discours pro et contra...) et de descriptions réalistes du petit peuple de Paris, de discussions littéraires et de pointes, calembours et jeux de mots – mélange qu’on retrouve dans Les États et Empires de la Lune (1657) de Cyrano de Bergerac, entre scènes rabelaisiennes, parodie de la Bible et discussions philosophiques, « raisonnements sérieux » et « croyance burlesque » [15].
12Par rapport à la « règle » classique de l’interdiction du mélange des genres [16], la marginalité du burlesque est donc chose avérée. Ce qui a conduit, pour sauver quelque chose du naufrage, à prétendre que le burlesque correspondait lui aussi à une sorte de forme « pure », et constituait une manière de genre, certes transgressif puisque parodique, mais du moins unifié. C’était aussi sacrifier à ce schéma classique de l’histoire littéraire, que met déjà en place la seconde moitié du XVIIe siècle, qui veut lier genre et registre – le tragique à la tragédie, l’épique à l’épopée, le burlesque au travestissement comique de cette même épopée... – et genre/registre à un auteur qui y a excellé et doit en rester le maître – d’où les parallèles entre Scarron et le Boileau du Lutrin, comme entre Racine et Corneille.
Le burlesque comme style
13Une certaine part de la critique, à la suite de Gabriel Naudé [17], assimile le burlesque au « style bas », marge défectueuse et déviante du style simple, style interdit aux « honnêtes gens », rassemblant proverbes et expressions populaires, prosaïsmes, provincialismes et archaïsmes, injures et grossièretés, « mots de gueule » et jargons des arts mécaniques, voire du Palais. Notons au passage, comme l’ont fait remarquer quelques textes burlesques [18], que cette marginalité-là a quelque chose d’étrange, puisque en réalité elle fait de la majorité des locuteurs des marginaux dans leur langue, sauf à décider d’adopter les codes linguistiques de la minorité dominante...
14Mais, en réalité, cette définition est fausse, et une fois de plus faussement unifiante. Il suffit de lire du Saint-Amant, du Scarron, et du Molière, pour constater que le burlesque n’utilise pas un style, mais un mélange de styles, un style mêlé, miscellaneum, qui brasse proverbes triviaux et imitations du grand style, raffinements précieux et équivoques grossières, jargon judiciaire et parisianismes à la mode, néologismes de bon ton et provincialismes archaïsants...
15Marginal, ce mélange ? Probablement davantage là encore que le seul style bas. D’une part, il est décrit par Guez de Balzac, ou par Madeleine de Scudéry, comme contraire à l’esthétique du naturel : il est artificiel, voire invraisemblable, puisqu’il ne correspond à aucune parlure réelle [19]. D’autre part, si l’on admet que « l’uniformité de style est la règle la plus étroite que nous ayons » [20], il est bien évidemment déviant, puisqu’il recherche précisément la diversité, et même la discordance stylistiques. Enfin, la recherche de cette diversité conduit à introduire dans le littéraire des langages qui en sont exclus, par leur origine sociale et par leur transgression des bienséances.
16Ce qui nous amène évidemment à l’autre versant de la question : le burlesque comme idéologiquement transgressif, et de ce fait marginal, dans un contexte de mise en ordre esthétique et politique. Mais concluons : s’il n’est ni genre, ni style, qu’est-ce que le burlesque ?
Un genre d’écrire
17Le XVIIe siècle répondrait probablement : un « genre d’écrire », une « manière » – en l’occurrence railleuse, « gaillarde, tirant sur le ridicule » (Furetière), manière capable d’investir tous les genres. Concept « classique » ? Probablement pas aux yeux de la critique du XIXe siècle. Et pourtant – première objection que je soulèverai contre la vision du classicisme qu’elle construit – La Fontaine ne cherche-t-il pas une telle manière dans ses Fables, dans ses Contes, dans ses poésies de circonstance, dans ses Amours de Psyché ? Et c’est aussi de manière, et de grâce, dont il est question dans l’esthétique galante théorisée par Pellisson [21], manière enjouée, souple et aisée, capable de traiter grandes et petites choses avec la même ingéniosité. Il y a loin cependant, dira-t-on, des burlesques aux galants. Voire... Relisons la préface aux Amours de Psyché :
Je ne savais quel caractère choisir : celui de l’histoire est trop simple ; celui du roman n’est pas encore assez orné ; et celui du poème l’est plus qu’il ne faut. Mes personnages me demandaient quelque chose de galant ; leurs aventures, étant pleines de merveilleux en beaucoup d’endroits, me demandaient quelque chose d’héroïque et de relevé. D’employer l’un en un endroit, et l’autre en un autre, il n’est pas permis : l’uniformité de style est la règle la plus étroite que nous ayons. J’avais donc besoin d’un caractère nouveau, et qui fût mêlé de tous ceux-là : il me le fallait réduire dans un juste tempérament [...].
Mon principal but est toujours de plaire : pour en venir là, je considère le goût du siècle. Or, après plusieurs expériences, il m’a semblé que ce goût se porte au galant et à la plaisanterie [...] ; dans un conte comme celui-ci, qui est plein de merveilleux, à la vérité, mais d’un merveilleux accompagné de badineries, et propre à amuser des enfants, il a fallu badiner depuis le commencement jusqu’à la fin ; il a fallu chercher du galant et de la plaisanterie. Quand il ne l’aurait pas fallu, mon inclination m’y portait, et peut-être y suis-je tombé en beaucoup d’endroits contre la raison et la bienséance (op. cit., p. 123-124).
18Et qu’est-ce que ce « juste tempérament », sinon un mélange de styles et de genres, une manière mêlée, qui admet une part de burlesque ? Qu’à cela ne tienne : on « oubliera » que le burlesque c’est aussi cela, et on oubliera de même que ce « merveilleux » roman fait partie des œuvres de La Fontaine.
MARGINAL PAR ESSENCE ?
Burlesque et refus des bienséances
19La critique s’entend généralement pour dénoncer la grossièreté, voire les ordures, la boue, les « équivoques à choses sales » [22], que véhicule le burlesque. Et il est vrai que la scatologie et les injures, par exemple dans les Lettres [23] de Cyrano de Bergerac, plus d’ailleurs que la pornographie ou l’obscénité, sont présents dans des formes de burlesque [24] provocantes et transgressives par rapport à la fois aux codes esthétiques et aux normes éthiques de la morale de l’honnête homme. Cette grossièreté peut être à la fois dans les choses et dans les mots – crus – qui servent à les dire ; mais elle peut être seulement dans les mots : le fait même d’user du « jargon des halles » (s’agirait-il de choses convenables) fait de vous un grossier personnage, en vertu d’une définition sociale de la bienséance, donc de la marginalité. Mais en ce qui concerne la grossièreté qui n’est que dans les choses, nous entrons dans le domaine de l’allusion et du sous-entendu – qui, sans cesser d’être burlesques, peuvent passer pour fort élégants... et c’est ce qu’on nomme le badinage marotique, célébré par Boileau, celui de Voiture, de Sarasin, et de La Fontaine, encore...
Le refus des hiérarchies
20Non seulement, en usant de tous les lexiques à la fois, et de tous les genres, le burlesque nie leurs relations hiérarchiques, mais encore il procède systématiquement à un renversement « révolutionnaire » au sens propre des hiérarchies établies. Ainsi Scarron écrit-il qu’il a l’art de
Donner une vive beauté
À l’affreuse difformité,
Faire un louvre d’une cabane,
D’une coureuse une Suzanne,
D’un folâtre en faire un Caton,
Et d’un gros âne un Cicéron :
Quelque chose de plus encore,
Peser le vent, blanchir un Maure,
D’une farce en faire un sermon,
Et canoniser un démon,
Prédire les choses futures,
Grossir, ou moindrir les figures,
Faire un nouveau calendrier,
Et d’une buse un épervier,
Faire un libéral d’un avare,
Comme d’un sot un homme rare,
Un Alexandre d’un poltron,
Et d’un petit Nain un Typhon. [25]
21C’est bien sûr ce burlesque-là qu’on désigne comme l’héritage de la Fronde – ce qui est faux, car on le trouve, dès la fin des années 1630, sous la plume de Saint-Amant, et sous celle du Scarron du Recueil de quelques vers burlesques. Attitude irrévérencieuse, provocante, qui refuse de se laisser prendre aux faux clinquants de la puissance et de la gloire, raillerie et dérision envers ces Grands qui ne valent pas mieux que les bouffons qui les moquent...
22Mais n’est-ce pas Pascal – et l’on sait qu’il fut loin d’être isolé – qui a dit que la grandeur de l’homme, c’est de se savoir dérisoire, et que les « grands capitaines » ne sont que vanité ? N’est-ce pas lui qui dénonce les illusions de l’imparfaite raison humaine, tandis que les burlesques jouent à extravaguer, à divaguer, à refuser le prétendu primat du « bon sens » ?
23Là où peut-être le burlesque est vraiment agressif vis-à-vis des valeurs classiques, et non la version enjouée d’un esprit de satire et de dérision, voire de démolition du héros, qui est dans l’air du temps, c’est en ce que cette dérision s’en prend aussi à la littérature. Elle n’est pas davantage, selon eux, « à prendre au sérieux » que le reste : elle n’est que jeu, plaisir, voire « coyonneries » [26]... Mais faut-il prendre Scarron au sérieux lorsqu’il le dit, ou Voltaire, lorsqu’il traite ses contes de couillonnades ?
L’esprit de mystification
24Comme Dieu chez Cyrano de Bergerac, l’auteur burlesque joue à « cligne-musette » avec son lecteur... quand il veut bien se poser comme « auteur », et n’adopte pas une série de masques en trompe l’œil ou en anamorphose, comme cet étrange « je » des États et Empires de la Lune, nommé Dyrcona (Cyrano de... en désordre), à l’identité indéterminée : est-il un homme, ou une espèce d’autruche, un perroquet plumé, voire la femelle du petit animal de la Reine, lequel est un Espagnol que l’on prend pour un singe, et avec lequel il est encagé ?
25Il n’y a pas de véritable burlesque sans burla, polyphonie énonciative, ambiguïté et équivoque. Le burlesque refuse les « raisons claires et distinctes », l’univocité de la pensée et de l’écriture ; il préfère le doute aux certitudes établies, l’enquête ouverte et l’expérimentation de tous les possibles à la confiance en une Vérité donnée d’avance : en ce sens, il y a bien un lien entre burlesque et esprit d’examen.
26Mais il est aujourd’hui démontré que les lumières n’ont pas attendu le XVIIIe siècle pour commencer à éclairer les esprits [27]. Prenons Boileau : il publie, sous l’anonymat, et en collaboration avec François Bernier, proche des milieux libertins, un Arrêt donné en la grand’chambre du Parnasse, en faveur des maîtres ès arts, médecins et professeurs de l’université de Stagyre au pays des chimères, pour le maintien de la doctrine d’Aristote. Mais cet arrêt est, selon Boileau lui-même [28], « burlesque », entendez à prendre par antiphrase, puisqu’il s’agit de tourner en ridicule, en leur « donnant » malignement la parole, les sorbonnagres qui voudraient faire interdire l’enseignement des « vilaines nouveautés », soit les découvertes récentes en matière de philosophie naturelle (physique et médecine), au nom d’une fidélité aveugle à un Aristote qu’ils ne comprennent même pas. Quand ils en sont à se glorifier de n’avoir jamais cru en la Raison ni en l’Expérience, et à prétendre interdire au sang de circuler, ne croirait-on pas entendre les Diafoirus, et reconnaître en Boileau l’ami de Molière, condamnant tous deux cette « impétuosité de prévention, [cette] roideur de confiance, [cette] brutalité de sens commun et de raison » [29] qui font les fanatiques, gens dangereux mais burlesques, voire héroï-comiques [30] en ce qu’ils seraient capables de tuer pour des idées ridicules ?
27Tout ce qui vient d’être dit tend déjà à montrer que si le burlesque peut globalement être qualifié de marginal, en ce qu’il transgresse effectivement la « doctrine classique » – ordre, clarté, raison, mesure, unité et harmonie – il fut tout de même pratiqué par les « meilleurs auteurs », Boileau, Molière [31], La Fontaine...
QUELQUES PARADOXES BURLESQUES
28D’où la question récurrente : et si le burlesque était au cœur de l’âge classique, comme une des expressions de ces tensions, de ces contradictions, de ces paradoxes qui le hantent, derrière la fausse façade de son unité et de son équilibre ?
Anciens et Modernes
29Tout texte burlesque ne renvoie pas à un intertexte qu’il déplace et caricature, mais la parodie – chant à côté, chant discordant – en est tout de même une des caractéristiques majeures, encore que jamais soulignée en ces termes au XVIIe siècle.
30Il faut ici distinguer. Parodier la littérature antique n’a, c’est évident, de sel que dans la mesure où le lecteur la connaît bien. La vogue des travestissements témoigne donc de la familiarité du public avec la culture antique ; elle peut fonctionner comme une confirmation de son statut, et contribuer à sa survie [32]. Selon Jean Serroy, « les références burlesques ne sont que l’image inversée, mais respectueuse, des révérences culturelles d’une société qui ne châtie bien que ce qu’elle aime bien » [33].
31Il n’est donc pas sûr que les travestissements aient été une opération de démolition menée par les Modernes contre les Anciens – et pourtant c’est ainsi que cela a été interprété, par Chapelain par exemple :
Je suis, Monsieur, tout a fait de vostre opinion que nos Poëtes gaillards se sont rendus ridicules aux honnestes gens lorsqu’ils se sont mis en teste de faire rire les sots aux despens de la gravité des Anciens. Je passe outre et dis qu’ils sont tombés en une espece d’impieté en le faisant, ces grands ouvrages ayant je ne say quoy de sacré et ne pouvant estre tournés en bouffonnerie sans profanation. [34]
32Pour les Perrault en tout cas, le burlesque fut bel et bien une de leurs machines de guerre : pour ne pas citer toujours Charles et ses Parallèles, mentionnons Claude, qui déclare, avec quelques circonvolutions ironiques après une charge en règle contre Homère, dans sa préface au chant II des Murs de Troye :
Je ne sais si l’on peut bien défendre les Anciens contre cette sorte de satyre, en supposant que leurs poètes n’ont point été jusqu’à cet excès, et que n’y ayant que l’excès qui soit vicieux, tout le ridicule tombe et demeure sur le burlesque, car il est certain qu’il y a des abus qui sans être parvenus jusqu’à l’excès ne laissent pas d’être vicieux. [35]
33Ambiguïté fondamentale, donc. Mais une chose est sûre : les travestissements ont introduit le burlesque au cœur du Grand Siècle, puisqu’ils l’ont introduit dans la querelle des Anciens et des Modernes, dont on ne saurait exagérer l’importance dans la définition même du classicisme.
A burlesque, burlesque et demi
34Tel personnage de La Bruyère, ou de Molière – M. Jourdain par exemple – est burlesque parce qu’il se travestit, oubliant que le naturel est une valeur, ce qui le conduit à confondre le noble et le trivial, l’élégant et le commun, le bourgeois et le gentilhomme ; il cherche à nous burler sur sa nature réelle mais c’est finalement lui que l’on burle, par le biais d’une mise en scène elle-même burlesque : et c’est grâce à une mystification que la raison et la morale recouvrent leurs droits, et que le mystificateur est démystifié. Vive la mystification au service de la morale du naturel, donc ?
35Aucun doute en apparence qu’ici le burlesque ne serve à confirmer les normes sociales et morales (il ne faut pas prétendre à une « qualité » que l’on n’a pas), voire politique (chacun à sa place dans un État bien ordonné), et en cela Molière peut passer pour représenter et défendre la morale et l’esthétique de l’honnête homme, voire les intérêts de l’aristocratie (encore) au pouvoir. Mais « [...] c’est une étrange entreprise que celle de faire rire les honnêtes gens » [36]. Si Molière a dû rappeler, dans L’Impromptu de Versailles, qu’il ne fallait pas confondre le peintre et son modèle, n’est-ce pas parce qu’on l’a soupçonné de quelque complicité avec ceux qui, par leur imitation caricaturale, révélaient les failles et les faiblesses de ceux qui se prétendent « conformes » ? Les discordances que la théâtralité burlesque révèle, et dont elle fait rire, sont des deux bords : si M. Jourdain a tort de vouloir forcer sa nature (socialement acquise) de bourgeois, puisque son naturel revient au galop, que penser de celui qui dissimule, sous le masque culturel de l’aristocrate, voire du grand seigneur, expert en belles choses, quelque peu artificielles tout de même, une nature d’escroc de bas étage et d’hypocrite profiteur ?
De la transgression
36C’est une évidence, il faut qu’il y ait des normes pour qu’il y ait transgression ; mais le burlesque étant un mode du registre du comique (théoriciens et praticiens s’accordent à dire que le rire est le gage de sa réussite), il faut que celle-ci produise du ridicule, et soit ressentie comme plaisante, donc ne suscite ni le scandale, ni une indignation « sérieuse », c’est-à-dire ne mette pas sérieusement en danger les normes admises, ou du moins fasse valoir, contre des normes déjà contestées (les anciennes valeurs, par exemple celle qui veut que les pères imposent leur volonté en matière de mariage à leurs enfants, ou l’aristotélisme, voire l’admiration obligatoire pour l’Antiquité) de nouvelles normes déjà en partie admises (un certain respect de la volonté des jeunes gens, ou la science moderne de la nature, ou l’affirmation de l’excellence des Modernes, en passe au moins d’égaler les Anciens [37]), en tournant en ridicule les premiers (regardez comme ils sont burlesques) au profit des seconds.
37Même lorsqu’il veut se faire passer pour carnaval, jeu ludique de défoulement par le renversement provisoire des hiérarchies et des révérences établies, le burlesque reconnaît effectivement la valeur de la Loi, ne serait-ce que parce qu’il ne peut s’en passer pour réellement « fonctionner ». Il offre un espace non de liberté, mais de libéralisation, qui ne remet pas fondamentalement en cause les fondements du système hiérarchique, tant dans l’ordre de l’esthétique que dans l’ordre du social. Il aide tantôt à supporter le système, tantôt à le confirmer, tantôt à le faire évoluer. On en trouve un bon exemple dans les débats (là encore, centraux) sur la langue auxquels ont contribué de nombreux textes burlesques : ni Sorel, ni Ménage, ni Furetière [38] ne contestent la nécessité de normes en ce domaine ; ce qu’ils réclament, c’est la liberté – pour les écrivains essentiellement ! – de jouer avec ces normes, de prendre parfois avec elles la distance du rire, de la satire, de la liberté créatrice, de ne pas « se piquer » de correction au point de risquer le ridicule que la morale de l’honnête homme elle-même attache aux pédants, aux doctes et aux gens trop sérieux. Et user de çà de là du langage populaire ne signifie ici nullement « donner la parole au peuple », ou l’élever en dignité (au contraire peut-être) !
38On peut pourtant dire du burlesque ce que J.-P. Cavaillé dit de La Mothe Le Vayer :
Il faut [dire] qu’il trouve sa place dans le procès auquel il semble – et pour une part est réellement – opposé, en tant que celui-ci produit sa propre opposition, ou plutôt parce qu’il admet en son sein, comme lui appartenant, un regard critique, voire subversif, à la condition impérative de le soumettre à la règle d’airain de la dis/simulation et de la dénégation. [39]
39Car il y a bien aussi un burlesque réellement subversif qui se cache sous le masque du rire, et de la fiction enjouée et railleuse, au point parfois de brouiller les pistes. Qui pourra jamais dire avec certitude si rire d’un Énée bigot, peureux et pleurnichard, c’est contribuer à la démolition d’un ministre étranger, aux relations plus que douteuses avec une reine veuve, donc s’adonner à une véritable transgression politique et idéologique [40], ou libérer par le rire ou pour de rire de contraintes esthétiques et hiérarchiques dont cette libération provisoire et ludique ne ferait au fond qu’assurer plus profondément la domination ? Pour pouvoir publier (au sens de rendre publiques) des thèses fort révolutionnaires malgré la censure, Cyrano et son éditeur Le Bret passent par une « histoire comique », un roman burlesque, « pot-pourri de contes ridicules » – victime malgré tout de la censure, dans la fiction même [41]. Et c’est au burlesque Sganarelle que revient la charge de tenir des raisonnements théologiques parodiques [42] – mais est-ce Sganarelle qui est ridicule, ou les raisonnements, dont la caricature ferait ainsi ressortir les failles ? L’auteur anonyme des Observations sur une comédie de Molière intitulée le Festin de Pierre ne laisse pas passer l’ambiguïté :
[...] Habillé en Sganarelle, et qui se moque de Dieu et du Diable, qui joue le Ciel et l’Enfer, qui souffle le chaud et le froid, qui confond la vertu et le vice, qui croit et ne croit pas, qui pleure et qui rit, qui reprend et qui approuve, qui est censeur et athée, qui est hypocrite et libertin, qui est homme et démon tout ensemble : un diable incarné comme lui-même se définit. [43]
40On voit qu’on passe là à cette limite où un certain burlesque ne fait plus rire, à force de vouloir faire rire de ce dont on ne doit pas rire...
41Les burlesques contestent-ils ou acceptent-ils les valeurs « classiques » ? Sont-ils en marge du classicisme ? L’ennui avec eux c’est qu’ils sont burladores, et que la coincidentia oppositorum et l’ambiguïté leur sont constitutives ; mais ils sont bien présents au cœur de l’âge classique. J’aurais donc tendance à répondre, avec quelque esprit de provocation, qu’ils en sont, non l’envers, mais l’autre visage en anamorphose : il suffit peut-être seulement d’adapter le regard pour voir, à la place de la noble face de Racine, le visage grimaçant de Scarron. Car, selon Louis Racine, son père (auteur des très burlesques Plaideurs) riait beaucoup, mais plus ou moins en cachette, au Virgile travesti de Scarron [44]...
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE RÉCAPITULATIVE
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- Racine Louis, Mémoires contenant quelques particularités sur la vie et les ouvrages de Jean Racine, dans Jean Racine, Œuvres complètes, éd. par Georges Forestier, Paris, Gallimard, « La Pléiade », 1999, t. 1.
- Saint-Amant, Le Passage de Gibraltar [1640], dans Œuvres, éd. par Jean Bailbé et Jean Lagny, Paris, Didier, STFM, 1971-1979, 5 vol., t. 2.
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- Scarron Paul, Le Virgile travesti [1648-1659], éd. par J. Serroy, Paris, Garnier, 1988.
- — Les Œuvres burlesques de M. Scarron. Troisième partie [1650], dans Poésies diverses, éd. par Maurice Cauchie, Paris, M. Didier, 1947.
- — « Le Testament de M. Scarron, son épitaphe et son portrait en vers burlesques » [1660], Œuvres, Genève, Slatkine, 1970 [1786], t. 1.
- Scudéry Madeleine de, Clélie, histoire romaine [1654-1660], Genève, Slatkine, 1973, 10 vol.
- Sorel Charles, Role des presentations faites aux Grands Jours de l’Eloquence Françoise [1634], publié dans Variétés historiques et littéraires. Recueil de pièces volantes rares et curieuses en prose et en vers, par Édouard Fournier, Paris, P. Jannet, 1855, t. 1, p. 127-140. [Voir aussi la réédition remaniée de 1650, publiée par Ch.-L. Livet dans P. Pellisson, Histoire de l’Académie française, op. cit., t. 1, p. 456-467.]
- — De la maniere de bien parler & de bien écrire. De la connoissance des bons livres, ou examen de plusieurs Autheurs [1671], éd. par Lucia Moretti Cenerini, Roma, Bulzoni, 1974.
- Vaugelas Claude Favre de, Remarques sur la langue française, utiles à ceux qui veulent bien parler et bien écrire, Paris, Vve J. Camusat, 1647.
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- Bray René, La Formation de la doctrine classique en France, Paris, Hachette, 1927 (Nizet, 1959).
- Brunetière Ferdinand, « La maladie du burlesque », Revue des Deux Mondes, 1er août 1906 (5e période, LXXVIe année, vol. 34, juillet-août), p. 667-691.
- Chantalat Claude, À la recherche du goût classique, Paris, Klincksieck, « Théorie et critique à l’âge classique », 1992.
- Cavaillé Jean-Pierre, Dis/simulations : Jules César Vanini, François La Mothe Le Vayer, Gabriel Naudé, Louis Machon et Torquato Accetto. Religion, morale et politique au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2002.
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- Mongrédien Georges Comédies et pamphlets sur Molière, Paris, Nizet, 1986.
- Nédélec Claudine, « Cyrano de Bergerac et la censure, dans ce monde-ci et dans l’autre », Cahiers Diderot, no 9, Rennes, PUR, 1997, p. 193-203.
- — « Le burlesque dans le Furetière », Littératures classiques, no 47, hiver 2003, p. 273-286.
- — « Boileau poète héroï-comique ? », Actes du colloque international « Boileau, poésie, esthétique », Versailles, 22-23 mai 2003, à paraître, op. cit.
- — Les États et empires du burlesque, Paris, Honoré Champion, 2004.
Notes
-
[1]
Voir mon article « Le burlesque dans le Furetière », Littératures classiques, no 47, p. 273-286.
-
[2]
Paul Pellisson, Histoire de l’Académie française [1652], éd. par Ch.-L. Livet, 1858, t. 1, p. 79.
-
[3]
« C’est le corps d’une belle femme, que finit une queue de poisson ». Montaigne cite ici le v. 4 de l’Art poétique d’Horace, qui s’ouvre donc sur ce qu’on interprète unanimement, au XVIIe siècle, comme la condamnation esthétique à la fois du mélange des genres – comique/tragique, élevé/bas – et du burlesque.
-
[4]
Montaigne, Les Essais, I, 28, « De l’amitié », 1992, éd. par Pierre Villey, t. 1, p. 183.
-
[5]
Théophile Gautier, Les Grotesques [1833], éd. par Cecilia Rizza, 1985, p. 452.
-
[6]
Adonis [1658], dans Œuvres diverses, éd. par Pierre Clarac, 1958, p. 6.
-
[7]
[1840-1859], éd. par Maxime Leroy, 1955, t. 3, p. 436-437 (livre VI).
-
[8]
« La maladie du burlesque », Revue des Deux Mondes, 1er août 1906.
-
[9]
Pellisson parle de « fureur » dont la France a dû se « guérir » (op. cit., p. 79) ; la citation de Charles Sorel se trouve p. 208 (De la maniere de bien parler & de bien écrire. De la connoissance des bons livres, ou examen de plusieurs Autheurs [1671], éd. par Lucia Moretti Cenerini, 1974).
-
[10]
Ainsi de l’attitude critique de Boileau envers le burlesque, bien plus nuancée et ambiguë que ne l’analyse Sainte-Beuve : voir Jean Leclerc, « Boileau juge du burlesque » et Claudine Nédélec, « Boileau poète héroï-comique ? », Actes du colloque international « Boileau, poésie, esthétique », Versailles, 22-23 mai 2003 (à paraître).
-
[11]
Claude Favre de Vaugelas, Remarques sur la langue française, utiles à ceux qui veulent bien parler et bien écrire, 1647, p. 2.
-
[12]
Je m’appuie ici sur le travail d’investigation que j’ai mené dans mon ouvrage Les États et Empires du burlesque, 2004.
-
[13]
Voir Charles Perrault, Parallèles des anciens et des modernes en ce qui regarde les arts et les sciences [1692-1697, 2e éd.], 1979 ; et Adrien Baillet, Jugemens des savants sur les principaux ouvrages des auteurs [1725], 1971.
-
[14]
Voir, par exemple, Antoine Furetière, Le Voyage de Mercure, satyre, 1653, et Claude Petit-Jehan, Virgile goguenard ou le douziesme livre de l’Eneide travesty (Puisque Travesty y a), 1652.
-
[15]
Cyrano de Bergerac, Œuvres complètes, éd. par Madeleine Alcover, 2000, t. 1, p. 7.
-
[16]
Voir René Bray, La Formation de la doctrine classique en France, 1927, et Claude Chantalat, À la recherche du goût classique, 1992.
-
[17]
Jugement de tout ce qui a esté imprimé contre le cardinal Mazarin depuis le sixiesme janvier jusques à la declaration du premier avril mil six cent quarante neuf [dit aussi le Mascurat], s.l.n.d. [1649].
-
[18]
Charles Sorel, Role des presentations faites aux Grands Jours de l’Eloquence Françoise [1634], éd. par Édouard Fournier dans Variétés historiques et littéraires. Recueil de pièces volantes rares et curieuses en prose et en vers, 1855, t. 1, p. 127-140. Le Rôle [...] fut réédité avec des remaniements en 1650 (version publiée par Ch.-L. Livet dans P. Pellisson, op. cit., t. 1, p. 456-467) ; Gilles Ménage, Le Parnasse alarmé, ou Requeste presentée par les dictionnaires [1649], publié en annexe aux Origines de la langue française [1650], 1972.
-
[19]
Voir Jean-Louis Guez de Balzac, Les Entretiens, « Entretien XXXVIII. Sur le stile burlesque » [vers 1652], éd. par Bernard Beugnot, 1972, t. 2, p. 487-504, et Madeleine de Scudéry, Clélie, histoire romaine [1654-1660], 1973, t. 8, p. 866-868.
-
[20]
Jean de La Fontaine, Les Amours de Psyché et de Cupidon [1669], « Préface », Œuvres diverses, op. cit., p. 123.
-
[21]
Voir L’Esthétique galante. Paul Pellisson, Discours sur les Œuvres de Monsieur Sarasin [1656] et autres textes, éd. par Alain Viala et al., 1989. Pellisson n’hésite pas à féliciter Sarasin d’avoir écrit, avec Dulot vaincu ou la Défaite des bouts-rimés, une « imitation presque burlesque du poème épique » (p. 58).
-
[22]
L’expression est de Paul Scarron (« À M. d’Aumale », Les Œuvres burlesques de M. Scarron. Troisième partie [1650], dans Poésies diverses, éd. par Maurice Cauchie, 1947, p. 468).
-
[23]
Œuvres complètes, op. cit., t. 2.
-
[24]
Car, encore une fois, il faut renoncer à en donner une image faussement unifiée.
-
[25]
« Le Testament de M. Scarron, son épitaphe et son portrait en vers burlesques » [1660], Œuvres, 1970 [1786], t. 1, p. 137.
-
[26]
P. Scarron, Le Virgile travesti [1648-1659], éd. par J. Serroy, 1988, p. 384 (préface du livre V).
-
[27]
Ainsi Molière parle-t-il à Louis XIV, dans le « Premier Placet » du Tartuffe [1664], comme au « plus grand roi du monde et [au] plus éclairé » (Œuvres complètes, éd. par Georges Couton, 1971, t. 1, p. 890).
-
[28]
Il le qualifie ainsi dans son Discours sur l’ode [1701] (Odes. Poésies diverses, éd. par Charles-H. Boudhors, 1941, p. 14), reconnaissant au passage en être l’auteur. Et pourquoi en ce lieu ? Hasard éditorial (le volume de l’édition favorite réunit les Odes et l’Arrêt), ou manière indirecte de rappeler que l’Ode sur la prise de Namur n’est pas, par sa pointe finale, sans quelque burlesque ?
-
[29]
Le Malade imaginaire [1673], III, 3, op. cit., t. 2, p. 1153.
-
[30]
Précisons que, au XVIIe siècle, « héroï-comique » garde, par référence à la littérature italienne, à laquelle Saint-Amant l’avait emprunté (dans la préface au Passage de Gibraltar [1640], 1967, p. 158) le sens de mélange (par juxtaposition) d’éléments héroïques et d’éléments comiques, comme il apparaît clairement dans la préface de Pierre Perrault à sa traduction de La Secchia rapita d’Alessandro Tassoni (1678) ; c’est très certainement encore en ce sens que l’emploie Boileau en 1701 pour le sous-titre du Lutrin. Mais, très vite, on a (indûment) confondu héroï-comique et ce « Burlesque nouveau [...] en nostre Langue », dont Boileau se glorifiait dans la première préface du Lutrin (1674 – préface pourtant disparue en 1701), burlesque inverse de celui de Scarron, où « une Horlogere et un Horloger parlent comme Didon et Énée » (Épîtres, Art Poétique. Lutrin, éd. par Charles-H. Boudhors, 1932, p. 169). Voir mon article « Boileau poète héroï-comique ? » (op. cit.).
-
[31]
Et pour ces deux-là au moins, des plus proches de la Cour...
-
[32]
Notons au passage qu’elle fournit encore de belles sources d’inspiration à la bande dessinée, ce qui prouve qu’elle n’est pas si morte qu’on veut bien le dire.
-
[33]
P. Scarron, Le Virgile travesti, op. cit., « Introduction générale », p. 1.
-
[34]
Lettre de Chapelain à Nicolas Heinsius, de janvier 1649 (Soixante-dix-sept lettres inédites à Nicolas Heinsius, 1649-1658, publiées d’après le manuscrit de Leyde [...] par Bernard Alain Bray, 1965, p. 128).
-
[35]
« Les Murs de Troye, chant II », publié par Paul Bonnefon, Revue d’histoire littéraire de la France, 1900, p. 453 (voir aussi Arsenal Ms 2956). C’est Charles qui, dans ses Mémoires de ma vie (1993, p. 114), attribue ce texte à son frère Claude.
-
[36]
La Critique de l’École des femmes [1663], sc. 6, Œuvres complètes, op. cit., t. 1, p. 661.
-
[37]
Ce dont même Boileau semble persuadé, du moins lorsqu’il égale Molière à Térence (Stances à Mr Molière sur la comédie de l’École des Femmes [...], dans Odes. Poésies diverses, op. cit., p. 34) et Racine à Euripide (Vers pour mettre au bas du portrait de Mr Racine, ibid., p. 58).
-
[38]
Voir « Le burlesque dans le Furetière », op. cit.
-
[39]
Dis/simulations [...]. Religion, morale et politique au XVIIe siècle, 2002, p. 147.
-
[40]
C’est la thèse défendue par Christian Biet, « Énéide triomphante, Énéide travestie. Virgile au siècle classique », Europe, janvier-février 1993, p. 130-144.
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[41]
Les États et Empires du Soleil, op. cit., t. 1, p. 167 sq. Voir mon article « Cyrano de Bergerac et la censure, dans ce monde-ci et dans l’autre », Cahiers Diderot, no 9, 1997, p. 193-203.
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[42]
Qui rappellent ceux des prêtres de la Lune de Cyrano.
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[43]
Cité par Georges Mongrédien, Comédies et pamphlets sur Molière, 1986, p. 89-90.
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[44]
Louis Racine, Mémoires [...], dans Jean Racine, Œuvres complètes, 1999, t. 1, p. 1190.
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[45]
Voir n. 35 de cet article.