Notes
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[1]
Le Dictionnaire de l'Académie française, 1694-1994, sa naissance et son actualité. Catalogue de l'exposition au château de Langeais, Fondation Jacques Siegfried, 16 avril-3 juillet 1694. (Paris, Institut de France, 1994).
-
[2]
Bibliothèque Nationale de France, ms. Fr. 22225, f. 38-41.
-
[3]
Bulletin de la société d'histoire de France, no 2, février 1853, p. 25-30.
-
[4]
L'abbé d'Olivet et Le Dictionnaire de l'Académie française, Bulletin des bibliophiles de Guyenne, (Paris M. Didier, 1954).
-
[5]
Lettre de Bignon à Leibniz du 25 mars 1701 éditée dans De l'Europe à la Chine, de Leibniz aux jésuites : les réseaux de l'abbé Bignon, Kultur der Kommunikation. Die europäische Gelehrtenrepublik im Zeitalter von Leibniz und Lessing (Wiesbaden, 2005).
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[6]
Voltaire, Questions sur l'Encyclopédie par des amateurs... (Genève, Cramer, 1770), p. 59 au mot ACADÉMIE.
-
[7]
Madeleine Jurgens, Documents du Minutier central concernant l'histoire littéraire 1650-1700 (Paris, PUF, 1960), p. 2.
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[8]
Bibliothèque Nationale de France, ms. Fr. 22234, f. 107 v, lettre du 18 juin 1727.
-
[9]
Madrid, Luis Sanchez, 1611.
-
[10]
Pedro Alvarez de Miranda, La Real Academia Espaola et l'Académie française, Bernard Quemada (dir.) Le Dictionnaire de l'Académie française et la lexicographie institutionnelle européenne (Paris, Champion 1998), p. 403-415.
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[11]
ms. Fr. 22234, f. 219v-220.
-
[12]
Bibliothèque Nationale de France, ms. Fr. 22225, f. 38-41.
-
[13]
Robert Estienne grand précurseur est auteur de trois dictionnaires, dont le Dictionarium seu latinae linguae thesaurus publié en 1531.
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[14]
Antoine Furetière, lui-même membre de l'Académie française qui l'exclut et s'opposa à la publication de son Dictionnaire universel...(La Haye et Rotterdam, Arnout et Reinier Leers, 1690), paru deux ans après sa mort, cf. Le Dictionnaire de l'Académie française, 1694-1994, sa naissance et son actualité... ouvr. cité, p. 62-63.
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[15]
Pierre Richelet, Dictionnaire françois contenant les mots et les choses... (Genève, Jean Herman Widerhold, 1680), ouvrage paru clandestinement, également condamné par l'Académie qui n'empêcha pas son succès ni ses nombreuses rééditions, notamment en 1718 et 1727.
1Les critiques et plaisanteries sur les lenteurs du Dictionnaire de l'Académie française sont aussi anciennes que celui-ci, comme le fait remarquer le secrétaire perpétuel Maurice Druon dans la préface de l'édition de 1986. Elles se sont exprimées en vers et en prose dans nombre d'épigrammes et de libelles depuis le XVIIe siècle, sans parler de l'affaire de la condamnation du Dictionnaire de Furetière et des querelles lexicographiques rituelles. Voici une nouvelle pièce à verser au dossier de la polémique suscitée par cet instrument de normalisation de la langue : un mémoire anonyme de 1727 qui s'apparente davantage à un réquisitoire qu'à un banal discours satirique. L'auteur serait l'un des quarante, habitué des séances du Dictionnaire et désireux d'imposer à ses confrères une organisation rationnelle du travail pour accroître leur rendement.
2L'obligation de composer un dictionnaire figurait à l'article 26 des statuts de 1635 fondant l'Académie française. [1] Le Dictionnaire avait paru pour la première fois en 1694 et ce mémoire s'insère entre la 2e édition, ou présumée telle de 1718, et la 3e édition de 1740. L'édition de 1718 qui présentait peu de changements par rapport à la première, malgré la préface annonçant « plutost un dictionnaire nouveau qu'une nouvelle Edition de l'ancien », conservait la facture du beau livre de 1694 mais des éléments d'illustration avaient été actualisés. Au frontispice, un médaillon de l'enfant-roi avait remplacé le buste de Louis XIV en attendant la troisième édition où figurera le profil de Louis XV adulte.
3Intitulé « Projet de réforme de la rédaction du Dictionnaire », présenté sous forme d'objections/réponses, daté précisément du 24 juin 1727 [2], le texte que nous présentons a été attribué à l'abbé d'Olivet, d'abord par Henri Bordier qui le localisait au département des manuscrits de la Bibliothèque impériale, dans les papiers de l'abbé Bignon, qui en serait le destinataire, sans apporter d'autre référence. Il l'édita en même temps qu'une lettre et un autre mémoire « non signés mais spirituels » et attribua ces trois pièces au même auteur avec cette déclaration comme seule garantie : « elles nous paraissent de l'abbé d'Olivet et sont dignes de son bon goût » [3].
4Un siècle plus tard, Charles Beaulieux reprenait ce mémoire [4], corrigeait la date donnée par Bordier, 24 janvier 1727 par celle du 24 juin, avec preuve à l'appui, mais ne fournissait pas de nouvelle référence pour ce document. Après avoir remarqué qu'il y avait une « sérieuse difficulté » à attribuer cette critique impitoyable à l'abbé d'Olivet, défenseur acharné du Dictionnaire en toute occasion, il s'y résolvait sans rechercher d'autre justification.
5Pour notre part, nous avons retrouvé un mémoire anonyme, sans doute une variante, dans les papiers académiques de l'abbé Bignon, portant bien la date du 24 juin 1727 et nous l'éditons ci-dessous. Il n'est ni autographe ni de la main de son secrétaire, ni de ses principaux adjoints.
6Il semble que d'Olivet et Bignon ne s'appréciaient guère. Bignon était le plus ancien : il avait été élu dès 1693 au 10e fauteuil du comte de Bussy, en même temps que La Bruyère, séance orageuse qui fit date dans les annales de l'Académie. L'abbé d'Olivet, élu en 1723, fit élire son ami intime le président Bouhier, précisément en 1727, à force de sollicitations. Bignon n'appréciait ni le choix ni la méthode et faisait cette confidence au duc de Valincourt, le 18 juin 1727 : « L'élection de M. le président Bouhier ne pouvait se passer moins agréablement... » Un peu plus tard, d'Olivet n'hésita pas à proposer au cardinal de Fleury de remplacer Bignon, en disgrâce après l'embastillement de son garde des estampes, l'abbé de Chancey qui était accusé de détournement, par son grand ami Bouhier, à la tête de la Bibliothèque du Roi.
7Le Dictionnaire était assurément un instrument fondamental de la politique culturelle au service de la monarchie, digne de la tradition colbertiste, reflétée par les almanachs où l'on voit une délégation d'académiciens en visite officielle à Versailles pour faire hommage au roi du Dictionnaire ou du volume annuel des autres académies. Cette scène est une représentation symbolique de l'alliance de Mars et de Minerve, le pouvoir politique protégeant les lettres et les sciences.
8L'expertise de l'abbé d'Olivet concernant le Dictionnaire auquel il a consacré toute sa vie est unanimement reconnue quoique plus tardivement. L'abbé Bignon pourrait aussi bien être l'auteur, plutôt que le destinataire de ce projet de réforme dont le ton impérieux conviendrait bien au puissant président des Académies, adjoint et neveu du chancelier Pontchartrain. Il parlerait ici en maître, laissant libre cours à son indignation sans s'embarrasser de précautions diplomatiques. La première phrase ne ménage guère la susceptibilité de ses confrères : « Le dictionnaire ne vaut rien en l'état où il est, et quand on y travailleroit cent ans, on ne le rendra jamais meilleur... » Il avait doté les deux autres Académies royales, celle des sciences en 1699, celle des Inscriptions et Belles-Lettres en 1701, d'un règlement autoritaire qu'il prévoyait d'adapter à l'Académie française. Les contemporains, Fontenelle en tête, avaient approuvé cette réforme qui revivifia les deux Compagnies, enfin sorties de leur « langueur ». Elle signifiait aussi une reprise en main. Les nombreux articles de ce règlement imposaient des devoirs astreignants aux académiciens qui étaient désormais répartis en trois classes : honoraires, pensionnaires et élèves. Ces deux dernières catégories étaient soumises à un encadrement strict : contrôle de l'assiduité aux séances, de l'avancement des travaux conforme au programme déposé en début d'année, obligation pour chacun de produire, « à tour de rôle », le résultat de ses recherches.
9Il est vraisemblable que Bignon ait voulu s'attaquer aussi au Dictionnaire pour en accélérer la publication et ce texte serait un projet de règlement qui ne verra pas le jour, rédigé peut-être avec la complicité de deux confrères, Antoine Danchet et Claude Gros de Boze. Passionné de linguistique, Bignon avait projeté de fonder, dans les années 1700, avec le soutien de Leibniz, une Académie particulière, uniquement consacrée à l'étude comparative des langues [5].
10Jean-Paul Bignon fut d'abord bien accueilli par ses pairs, mais il en alla tout autrement après cette tentative de réforme à laquelle ses confrères s'opposèrent vivement. Contrairement aux deux autres Académies, l'Académie Française réussit à arrêter à sa porte cette implacable logique règlementariste.
11Voltaire, bien que reconnaissant en d'autres endroits tous les mérites de l'abbé Bignon, approuva la réaction de la compagnie et dénonça hautement cet embrigadement. Il stigmatisait « la distinction révoltante entre des honorés, des pensionnés et des élèves » instaurée à l'Académie des sciences, commentant ainsi ce projet : « L'abbé Bignon osa proposer le même règlement à l'Académie française dont il était membre. Il fut reçu avec une indignation unanime. Les moins opulents de l'Académie furent les premiers à rejeter ses offres et à préférer la liberté et l'honneur à des pensions... L'abbé Bignon, qui, avec l'intention louable de faire du bien, n'avait pas assez ménagé la noblesse des sentiments de ses confrères, ne remit plus le pied à l'Académie française ; il régna dans les autres tant que le comte de Pontchartrain fut en place » [6].
12Affirmation partiellement inexacte. Il est vrai que l'abbé Bignon bouda l'Académie française et n'y joua pas le rôle de premier plan qu'il a tenu près de cinquante ans dans les deux autres académies royales mais il fut cependant choisi comme chancelier en 1699, 1707, 1728, 1731 et son influence y resta importante. Il y imposa notamment la pratique de l'éloge de l'académicien disparu par son successeur, obligation remplie fidèlement jusqu'à nos jours.
13Comme chancelier, Bignon participa à la constitution d'une rente de 3000 livres sur l'Hôtel de Ville qui devait financer le prix de poésie de l'Académie française décerné tous les deux ans à une pièce célébrant la gloire du roi [7]. Cette donation effectuée, le 31 mai 1699, par l'un des quarante, François de Clermont, évêque-comte de Clermont fut acceptée par le directeur Jean de la Chapelle, Bignon étant chancelier et François Séraphin Régnier des Marais, secrétaire perpétuel de l'Académie.
14On peut relever d'autres critiques du Dictionnaire de l'Académie française sous la plume de l'abbé Bignon. Il déclarait notamment au duc de Valincourt son confrère, également membre de l'Accademia della Crusca : « J'avoue qu'honnorant et aimant l'Académie française autant que je le fais, je rougis de ce qu'elle produit si peu pendant que les deux autres enrichissent le public de tant de belles choses. La cause du mal est de ce que dans l'ordre de l'esprit comme dans celuy des corps, aucun ouvrage ne sçaurait avoir plusieurs pères » [8].
15La France n'était pas le premier pays à se doter d'un tel outil. L'auteur du mémoire se livre avec un réel complexe de supériorité à une comparaison avec ses voisins et nous offre un tableau convenu de la hiérarchie tacite de l'Europe savante en 1727. Il y exprime une admiration et un respect intacts pour une Italie mère des arts et des académies les plus anciennes et les plus fameuses, bien qu'en léger déclin en ces années 1720. L'Académie florentine avait publié en 1612 la première édition du Vocabolorio degli Accademici della Crusca déjà cité en exemple dans la préface de 1694. Il en va tout autrement pour l'Espagne qui ne jouit pas du même prestige à ses yeux. Elle a pourtant précédé l'Italie et produit, en 1611, le premier dictionnaire en langue vernaculaire moderne Tesoro de la lengua castellana o eeeeespan@ atola, oeuvre de SSSSSSebastia@ aande Covarrubias, [9] suivi du magnifique Diccionario de la lengua castellana, en 6 volumes, de 1726 à 1739 [10], dont le premier avait dû parvenir à notre critique. Ce dernier en fait l'éloge quoiqu'à sa « grande honte » ajoute-t-il avec arrogance. « L'Académie de Madrid [...] n'étant établie que depuis 6 ou 7 ans vient de publier le premier volume de son dictionnaire avec des citations et des exemples tirés de tous les autheurs espagnols, que l'on peut regarder comme un modèle parfait de dictionnaire ». On retrouve dans la correspondance de Bignon d'autres discours du même ordre sur les « imaginations espagnoles », félicitant le marquis de Brancas de séjourner « dans un pays aussi peu scavant que l'est l'Espagne à présent » [11].
16Après le constat de la nullité du Dictionnaire, venaient les propositions aussi constructives que directives pour y remédier, à savoir une méthode de travail pragmatique, rigoureuse et égalitaire qui, en appliquant avant la lettre les règles du taylorisme aux académiciens, devait aboutir à un productivisme satisfaisant. « Il y a 40 académiciens, 153 séances par an, que chaque académicien fournisse un mot à chaque séance, ce sont 6000 mots par an. » Des exemples seraient présentés pour illustrer l'emploi du mot. A ce rythme, le Dictionnaire serait terminé en un an, avec un total de 6120 mots, « c'est peut être plus qu'il n'y en a dans notre langue ». Notre redoutable stakhanoviste ne craignait pas d'ajouter : « On suppose qu'il n'y a pas un académicien qui ne lise quelquefois des livres françois quand ce ne seroit que pour s'amuser ». Ces dispositions rationnelles remplaceraient avantageusement « les séances de l'Académie où l'on ne sait ce que l'on fait aujourd'huy. »
17Au delà de l'attribution à Bignon, à d'Olivet, ou à l'un de leurs confrères plein d'autorité, ce texte pourrait inviter à une nouvelle lecture critique. La verve satirique de Jean-Baptiste Rousseau tournant en ridicule l'abbé Bignon, gardien des « haras du Parnasse » et faisant « provigner la race des bidets du sacré vallon », pourrait s'appliquer à l'auteur de ces lignes, quelqu'il soit.
Projet de réforme de la rédaction du Dictionnaire. [12] (24 juin 1727)
Le dictionnaire ne vaut rien en l'état où il est, et quand on y travailleroit cent ans, on ne le rendra jamais meilleur, à moins qu'on n'y travaille d'une manière toute contraire à celle qu'on a suivie jusques à présent.
On s'assemble 10 ou 12 sans savoir de quoy il doit s'agir, on y propose au hazard selon l'ordre d'alphabet 2 ou 3 mots à quoy personne n'a pensé, il faut faire la définition de ces mots, faire entendre leurs significations et leur étendue, et donner des exemples à des phrases qui fassent voir les diverses manières dont ils peuvent être employés.
Ces définitions se font à la haste et sur le champ quoyque ce soit la chose du monde qui demande le plus d'attention. Les phrases ou les exemples se font de même, ainsi sont-ils pour la pluspart si ridicules ou si impertinents que nous en avons honte / f. 38v quand on les relit de sang froid.
On ne sauroit jamais bien entendre, bien sentir, et moins encore faire comprendre aux autres quelle est la véritable force d'un mot selon les diverses manières dont on peut l'employer que lon n'ays vû comment il est employé dans les bons autheurs qui s'en sont servis.
On ne fera donc jamais rien qui vaille pour le dictionnaire si lon n'y met des citations et des exemples.
Nous avons pour cela de bons modèles à suivre :
Celui des Etienne dans leur Thresor de la langue grecque et latine [13]
celui de l'Académie d'Ella Crusca et à notre grande honte celui de l'Académie de Madrid qui, n'étant établie que depuis 6 ou 7 ans vient de publier le premier volume de son dictionnaire avec des citations / f. 39 et des exemples tirés de tous les autheurs espagnols, et que l'on peut regarder comme un modèle parfait de dictionnaire.
Utilité de celui de l'Académie s'il peut jamais être fait de cette sorte.
Il apprendra le fonds de notre langue aux François memes et aux Etrangers à qui nous avons tant d'envie que notre langue devienne familiaire. Il pourra devenir si on le fait avec soin un commentaire excellent sur tous les passages les plus dificiles de nos bons autheurs, et par la sera recherché avec un empressement infini de tous les Etrangers.
La lecture en deviendra agréable et par conséquent utile, car ce n'est que par le plaisir qu'on menne les hommes.
Le dictionnaire de Furetière [14] ne vaut rien et celui de Richelet [15] vaut encore moins, cependant parce qu'il y a / f. 39v des exemples et des citations on ne sauroit y lire un mot que l'on ne soit tenté de lire la page entière au lieu que dès qu'on a ouvert le nostre on le referme avec empressement, tant on est rebuté de la triste et affreuse sécheresse qui règne partout.
Objection
On dit que nous n'avons point d'autheur classique qui puisse faire loy dans la langue, et l'on demande qui fera le choix des autheurs qu'on devra citer dans le dictionnaire.
Réponse
Il n'y a point de choix à faire, il faut citer les mauvais autheurs comme les bons. Il n'y en a point de si bons où l'on ne trouve quelque façon de parler vicieuse qu'il est bon de remarquer. Il n'y en a point de si mauvais où l'on ne trouve quelque mot heureusement employé et des phrases assés heureusement tournées / f. 40 pour servir d'exemple.
Objection
On dit que cette entreprise sera bien longue et bien dificile.
Réponse
Pourquoy ne pourrons nous pas faire ce qu'ont fait les Estienne et les académies d'Ella Crusca et de Madrid.
Mais il y a lieu de soutenir au contraire que le travail de la manière dont on le va proposer sera infiniment plus facile, plus agréable et plus court que tout ce que lon a fait jusqu'à présent.
On suppose qu'il n'y a pas un académicien qui ne lise quelquefois des livres françois quand ce ne seroit que pour s'amuser. En lisant ces livres, il est aisé de remarquer un mot quel qu'il soit, la manière dont on l'employe, la force qu'il a suivant la manière dont il est employé, il est aisé de jetter cette phrase sur le papier / f. 40v et d'y ajouter telles réflexions qu'on jugera à propos ou même de n'y point mettre de réflexions.
Il y a 40 académiciens, 153 séances par an, que chaque académicien fournisse un mot à chaque séance, ce sont 6000 mots par an, c'est peut être plus qu'il n'y en a dans notre langue.
Il faudra que tous les académiciens meme ceux qui sont en provinces [sic] contribuent à ce travail en envoyant ce qu'ils ne pourront pas apporter eux mesmes.
Ceux à qui leurs dignités ou leurs importantes occupations ne permettent pas de s'assujettir à ce travail, trouverront aisément des confrères qui s'offriront à les en soulager.
Les séances de l'Académie où l'on ne sait ce que l'on fait aujourd'huy seront utilement employées à rectifier les / f. 41 définitions et à faire le choix des phrases et des exemples qui devront être employées ou rejettées. On mettra ensuite pour éviter la confusion chaque mot dans son portefeuille suivant l'ordre de l'alphabet et par ce moyen le dictionnaire que depuis 80 ans nous n'avons pu rendre supportable, pourrait être mis en moins de 3 ans en état de perfection.
Notes
-
[1]
Le Dictionnaire de l'Académie française, 1694-1994, sa naissance et son actualité. Catalogue de l'exposition au château de Langeais, Fondation Jacques Siegfried, 16 avril-3 juillet 1694. (Paris, Institut de France, 1994).
-
[2]
Bibliothèque Nationale de France, ms. Fr. 22225, f. 38-41.
-
[3]
Bulletin de la société d'histoire de France, no 2, février 1853, p. 25-30.
-
[4]
L'abbé d'Olivet et Le Dictionnaire de l'Académie française, Bulletin des bibliophiles de Guyenne, (Paris M. Didier, 1954).
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[5]
Lettre de Bignon à Leibniz du 25 mars 1701 éditée dans De l'Europe à la Chine, de Leibniz aux jésuites : les réseaux de l'abbé Bignon, Kultur der Kommunikation. Die europäische Gelehrtenrepublik im Zeitalter von Leibniz und Lessing (Wiesbaden, 2005).
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[6]
Voltaire, Questions sur l'Encyclopédie par des amateurs... (Genève, Cramer, 1770), p. 59 au mot ACADÉMIE.
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[7]
Madeleine Jurgens, Documents du Minutier central concernant l'histoire littéraire 1650-1700 (Paris, PUF, 1960), p. 2.
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[8]
Bibliothèque Nationale de France, ms. Fr. 22234, f. 107 v, lettre du 18 juin 1727.
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[9]
Madrid, Luis Sanchez, 1611.
-
[10]
Pedro Alvarez de Miranda, La Real Academia Espaola et l'Académie française, Bernard Quemada (dir.) Le Dictionnaire de l'Académie française et la lexicographie institutionnelle européenne (Paris, Champion 1998), p. 403-415.
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[11]
ms. Fr. 22234, f. 219v-220.
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[12]
Bibliothèque Nationale de France, ms. Fr. 22225, f. 38-41.
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[13]
Robert Estienne grand précurseur est auteur de trois dictionnaires, dont le Dictionarium seu latinae linguae thesaurus publié en 1531.
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[14]
Antoine Furetière, lui-même membre de l'Académie française qui l'exclut et s'opposa à la publication de son Dictionnaire universel...(La Haye et Rotterdam, Arnout et Reinier Leers, 1690), paru deux ans après sa mort, cf. Le Dictionnaire de l'Académie française, 1694-1994, sa naissance et son actualité... ouvr. cité, p. 62-63.
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[15]
Pierre Richelet, Dictionnaire françois contenant les mots et les choses... (Genève, Jean Herman Widerhold, 1680), ouvrage paru clandestinement, également condamné par l'Académie qui n'empêcha pas son succès ni ses nombreuses rééditions, notamment en 1718 et 1727.