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Article de revue

La Libye en guerre

Pages 38 à 43

Notes

  • [1]
    NDLR : avec la participation de Kamel Almarache, ancien professeur de sciences politiques à l’université de Tripoli.
  • [2]
    L’armée était constituée d’une armée ordinaire et des Brigades spéciales (environ 32 000 hommes), mieux armées (blindés, rockets très modernes) que la première et restées fidèles au colonel Kadhafi, lors de la « Révolution » de février 2011.
  • [3]
    Les gangs existaient déjà, sous Kadhafi, notamment à l’époque de l’embargo et lors de l’atomisation, à partir de 1995, des organes de sécurité, autrement dit des Comités révolutionnaires.
  • [4]
    On compte entre 1 et 1,5 million de réfugiés en Tunisie, Égypte, Maroc et Malte.
  • [5]
    Les milices islamistes de Abdelhakim Bel Haj (ex-Al-Qaïda, membre de l’ex-Groupe islamique du combat en Libye, GICL, originaire de Tripoli), emprisonné et relâché par Kadhafi, à la suite de la signature d’un mémorandum de 320 pages signé avec le fils de Kadhafi Seif Al Islam en 2006, dans lequel il renonce à Al-Qaïda. Le Conseil suprême de l’union des révolutionnaires libyens (CSURL), ex-Al-Qaïda, les milices tribales issues de la ville de Misurata, les milices tribales issues de la ville Zentan.
  • [6]
    Décrets n° 166, 2011 (1 000 militaires de grades différents), n° 81, 2013 (14 hauts gradés), n° 15, 2013 (915 hauts gradés).
  • [7]
    Pour défendre la cause fédéraliste, mais aussi afin d’obtenir des gains substantiels, la milice de Ibrahim Al Jadran, jeune milicien trentenaire, a occupé, au cours de longs mois, les installations pétrolières de l’Est faisant ainsi chuter la production de pétrole de 1,2 million b/j à 200 000 b/j environ.
  • [8]
    La HCIP a été créée à l’initiative de Mostafa Abdeljalil, Président du Conseil National de Transition (CNT), le 29 janvier 2012 (décret n° 16). Cette commission aura un rôle crucial lors notamment de la formation du gouvernement Ali Zeidane.
  • [9]
    NDLR : cette loi qui n’a pas été appliquée fait l’objet actuellement d’une annulation par le Parlement légitime de Tobrouk.

1 Depuis le départ des Occidentaux et de l’Otan, le 31 octobre 2011, et surtout depuis la mort de Mouammar Kadhafi, le chaos règne en Libye. La chute de Kadhafi a entraîné la déstructuration de l’armée nationale, et l’explosion de « milices gangs » tribales, concentrées dans plusieurs zones lourdement armées, terrorisant la population et créant une instabilité politique. Face à certaines milices, qui contestent les institutions légitimes élues le 25 juin 2014, un militaire, le général Khalifa Aboulkasim Haftar, ainsi que des tribus, des puissantes milices situées à Zentan, mais aussi l’Armée nationale embryonnaire se sont unis pour tenter de les vaincre. S’ils y parviennent, ils devront alors lutter contre deux autres nouveaux acteurs qui se sont greffés aux milices : d’une part Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique) qui a soutenu les « révolutionnaires » islamistes Frères musulmans et ex-Al-Qaïda durant le conflit, et qui à l’occasion de la chute de Kadhafi et de l’intervention française profilèrent, aujourd’hui, un peu partout en Libye et surtout dans le Sud. D’autre part l’« État islamique en Irak et au Levant » (EIIL ou ISIL en anglais) appelé Daech, qui depuis le mois d’avril 2014, à la faveur des combats irakiens et syriens a pris pied à l’Est de la Libye (Derna) et récemment à Tripoli. Et dont l’objectif est d’établir un État islamique (EI) en Libye, pays riche en ressources pétrolières. À cette fin, l’organisation terroriste a su rallier les cellules Al-Qaïda et Aqmi. Une situation qui inquiète beaucoup les pays frontaliers, notamment le Tchad et le Niger… qui craignent une déstabilisation de la bande Sahélo-saharienne.

2 Forte de près de 80 000 hommes  [2], sous le colonel Mouammar Kadhafi, l’armée a quasiment disparu au lendemain de la mort du Guide. Pourchassés ou par crainte d’être tués par les islamistes-djihadistes ou par certaines milices tribales – à l’instar du général Abdul Fatah Younès, ancien commandant de l’armée de libération nationale tué dans des conditions épouvantables par des djihadistes, bien avant la fin de la révolte –, en raison de leur simple appartenance à l’armée, ou de leur soutien à Kadhafi durant le conflit, beaucoup d’officiers ou simples militaires ont préféré fuir la Libye se réfugiant, soit à l’étranger (Tunisie, Algérie, Égypte, Maroc, Niger, Tchad…), soit en intégrant certaines milices, comme ce fut le cas, pour quelques officiers de la « Brigade 32 » dirigée par Khamis, un des fils de Kadhafi, mort au combat, qui ont dès la fin de la révolte rejoint les milices de Zentan. Ou encore en créant leur propre milice. En atteste, la « Brigade du Bouclier de la Libye (région Ouest) » située à Zaouia, dirigée par un ex-colonel de Kadhafi, Mohamed Moussa, passé dans l’opposition durant la révolte.

3 D’autres militaires ont également fait le choix de rester en Libye, mais sans réintégrer l’armée tout en continuant à percevoir leur solde, soit par simple crainte d’être tués, soit parce que leurs propres bases militaires ou casernes ont tout simplement été détruites ou prises d’assaut par des milices lourdement armées. Enfin, certains, qui ont ou n’ont pas soutenu Kadhafi en 2011, ont réussi à réintégrer l’armée, sans pourtant la reconstituer véritablement.

4 Profitant de ce vide, des gangs  [3] se sont organisés en véritables milices, équipés d’armes lourdes récoltées durant la révolte, mêlant indifféremment des éléments d’une ou plusieurs tribus des villes longeant la côte Est-Ouest, ou des éléments d’Al-Qaïda réprimés et atomisés sous Kadhafi. Dès la fin de la révolte, ces milices-gangs ont occupé le terrain, les villes principales et secondaires, jusqu’au Sud. Des quartiers entiers, des édifices publics et des sites stratégiques, tels que les installations pétrolières (à l’Est dans le Croissant pétrolier et au Sud), sont ainsi passés sous leur coupe. Au fil des mois, les milices s’étant rendues maîtresses des lieux, elles ont pu asseoir leur influence et organiser leurs trafics en tout genre (armes, drogues, carburant, cigarettes, rackets, kidnappings, vols, viols, meurtres, tortures, attentats…) pourchassant, sans limites, des supposés ou non kadhafistes au-delà même des frontières  [4].

5 Au lendemain de la révolte, dans les principales villes situées sur la côte Est-Ouest et dans le Sud, des milices se sont concentrées en 7 pôles majeurs sur toute la Libye : Tripoli, Misurata, Barqa, Djebel Nefusa et Zouwara, Zentan, la Zone du Sud, Darna et Benghazi. Six types de milices (tribales, identitaires, islamistes, ex-Al-Qaïda, salafistes djihadistes, fédéralistes) sont ainsi créés dans différentes zones.

  • Zentan : milices tribales.
  • Djebel Nefoussa : milices identitaires (Amazigh).
  • Sud : milices identitaires toubous, touarègues et milices Al-Qaïda.
  • Misurata : cette ville devenue un véritable État dans un État et regroupe ainsi quatre grandes milices tribales et sept brigades salafistes djihadistes avec une dimension religieuse. On peut ainsi citer les milices tribales, les Brigades de Saadoun Al Souali, Al Nousour (« Les Aigles ») et djihadistes à dimension religieuse, telles que la Brigade Tawid (« l’Unicité »), la Brigade Al Sidiq (du nom du premier califat).
  • Darna et Benghazi : milices djihadistes (Ançar Al-Charia, Al-Qaïda) et islamistes.
  • Barqa : milices fédéralistes.
  • Tripoli : milices tribales, Ançar Al-Charia, islamistes et ex-Al-Qaïda[5].

6 Dès février 2012, en l’absence d’une armée, le pouvoir, qui souhaite vivement l’intégration de ces milices dans l’armée, va alors les rémunérer, afin qu’elles assurent officiellement la sécurité des sites. Si une majorité de milices – excepté les milices d’Ançar Al-Charia, Al-Qaïda – intègrent bien l’armée « officielle », c’est à l’issue de lourds chantages financiers, et tout en gardant leur propre structure et leurs propres chefs, n’obéissant en aucune façon au chef d’état-major. Cette intégration est rendue d’autant plus difficile que parallèlement, les pouvoirs politiques, ont contribué à la désintégration de la structure militaire. Afin de purger l’armée des anciens du régime de Kadhafi, mais aussi sous la pression des milices islamistes et tribales, le Conseil national de transition (CNT) chargé d’assurer la transition politique de mars 2011 jusqu’en août 2012, puis le Congrès général national (CGN) qui a remplacé le CNT, à l’issue des premières élections législatives post « révolutionnaires » de juillet 2012, ont ainsi promulgué, une série de décrets  [6] relatifs à la mise en retraite anticipée de très nombreux officiers gradés. Parmi eux, le général Khalifa Aboulkasim Haftar, tombé en disgrâce, lors de la guerre au Tchad, et qui s’était réfugié aux États-Unis et en Égypte, pour revenir ensuite en Libye, lors de la révolte. Ce dernier jouera par la suite un rôle important.

7 Au fil des différentes stratégies mises en place par les gouvernements successifs pour leur totale intégration, les milices procéderont à un chantage permanent, soit pour l’augmentation de leurs salaires, soit pour imposer leurs revendications politico-économiques (emploi, cause fédéraliste), allant jusqu’à bloquer la production pétrolière  [7].

8 Fortes de leur influence notamment dans la capitale, les milices islamistes, mais aussi dans une moindre mesure celles de Misurata, bénéficieront, en premier chef, des purges opérées dans l’administration par la Haute commission de l’intégrité et du patriotisme (HCIP)  [8], dirigée par un Frère musulman, Omar Mustafa Alhbasi. Elles placeront, par ailleurs, leurs hommes dans les organes sécuritaires de Tripoli, dont le Comité de haute sécurité (CHS) chargé du recrutement de la police et dirigé un temps par Hacham Bechir (il sera remplacé par Abdourraouf Kara), ex-Al-Qaïda, membre de l’ex-Groupe islamique du combat en Libye (GICL), et donc frère d’arme de Abdelhakim Bel Haj.

9 Dans cet engrenage, les politiques n’hésiteront pas à les utiliser afin de neutraliser des conflits tribaux. Lourdement armées, les milices tribales de Misurata interviendront ainsi contre le fief des Warfallahs, Beni Walid, en novembre 2012, perçu alors comme une poche de résistance des Kadhafistes, ou dans les conflits du Sud (les Ouled Souleiman et les Toubous). Pire, à la faveur de certains conflits entre les milices au sein même de la capitale, certains politiques tombés dans l’escarcelle, notamment des islamistes, comme c’est le cas du président du Parlement, Nouri Ali Mohamed Abousaheimin, élu grâce aux voix des Frères musulmans, ira jusqu’à créer une Alliance de milices (islamistes et tribales) et légaliser, le 29 août 2013 (décret n° 143/2013), un de ses éléments, le Conseil suprême de l’union des révolutionnaires libyens (CSURL) ainsi que sa cellule d’opération composés essentiellement d’islamistes et ex-Al-Qaïda, afin de bouter les milices de Zentan hors de Tripoli en conflit avec les milices islamistes de Abdelhakim Bel Haj. Quelque temps plus tard, cette cellule se retournera contre le pouvoir en enlevant le Premier ministre Ali Zeidane, qui renoncera à sa stratégie d’évacuation des milices de Tripoli.

10 Ce sont encore les milices islamistes de A. Bel Haj et celles de Misurata qui épauleront, les frères musulmans du PJC, et les députés de Misurata dans le vote de la loi de l’exclusion politique  [9] vidant l’administration de ses cadres pour leur participation au régime de Kadhafi, par des actions violentes menées contre les députés, et l’occupation des ministères le temps du vote de la loi. Sur le plan religieux, Al Sadek Al Gharyanie, le grand mufti de Libye, nommé après la révolte, homme lige de Youssef al-Qaradawi, le chef spirituel des Frères musulmans installé au Qatar, émettra, régulièrement, des fatwas pour l’application exclusive de la charia en direction de la population par des milices qui sévissent dans les villes en suivant les préceptes des muftis salafistes et Frères musulmans, lesquels ont pris d’assaut les mosquées.

11 Au bout de trois ans, la configuration et le positionnement des milices dans les villes principales vont toutefois évoluer à la suite de deux événements. Le premier : l’offensive du général Khalifa Aboulkasim Haftar, en avril 2014, appelée Al-Karama « La Dignité », contre les islamistes et les djihadistes situés à Benghazi. Il sera suivi en cela par la majorité des tribus de l’Est. Second élément : la guerre de Tripoli qui débutera entre d’une part, une alliance appelée Fajar Libya « l’Aube de la Libye » constituée des milices de Misurata, des ex-djihadistes de la CSRUL, les islamistes de Abdelhakim Bel Haj (soutien logistique, puis militaire ultérieurement à partir de décembre 2014) et d’autre part, les milices de Zentan pour le contrôle de l’aéroport de Tripoli. Quelques tribus, dont la puissante tribu des Wouarcheffanahs située au Sud de Tripoli, se mêleront aux combats, sans toutefois faire alliance. Durant les premiers mois, deux fronts se créent donc indépendamment. Cette guerre à Tripoli amènera l’exil du Parlement et du gouvernement légitimes, issus des urnes du 25 juin 2014 à Tobrouk, et la réactivation du CGN, devenu illégitime sans oublier la formation d’un gouvernement à Tripoli.

12 En août 2014, les milices de Zentan, certaines tribus de l’Ouest, dont les Wouarcheffanahs du Sud, les Touaregues et les Toubous ainsi que le général Haftar – dont l’action sera reconnue officiellement par les autorités légitimes – intégreront l’Armée nationale, dirigée par Abderrazak Al Nadhouri, pour ne former qu’une seule structure, constituant ainsi les prémices d’une armée. Aidée, par l’Égypte, grâce aux bonnes relations entretenues par le général Haftar avec le général Abdel Fattah Al Sissi, les Émirats Arabes Unis (EAU) – qui lui fourniront des équipements et pilonneront 7 sites à Tripoli et ses environs –, cette armée, toutefois peu homogène, enclenchera une lutte aérienne et terrestre sans merci contre les djihadistes, islamistes et les milices, aussi bien de Benghazi que de Tripoli, contestant les autorités légitimes de Tobrouk et de Al-Beida (nouveau siège du gouvernement). Ces milices recevront des armes du Qatar – qui déclarera officiellement l’arrêt de son soutien aux Frères musulmans lors du 35e Sommet des États du Golfe, en décembre 2014 –, de la Turquie et du Soudan, qui sera également rappelé à l’ordre par le Premier ministre légitime, Al Thini. Désormais, la Libye est divisée en deux blocs, dont les ramifications atteignent même le Sud, où des combats ont déjà eu lieu pour la possession des puits pétroliers.

13 Si l’Armée nationale a bien progressé à l’Est, dégageant les positions des islamistes et de Al-Qaïda (Ançar Al-Charia) de Benghazi, celle-ci – à l’heure où nous bouclons – tentait une progression sur Tripoli par le flanc Ouest (poste stratégique frontalier de Ras Igdir) et s’efforçait de repousser les assauts des milices de Misurata sur les puits pétroliers du Croissant de l’Est. Par ailleurs, l’envoyé spécial de l’ONU, Bernadino León, tentait de mettre sur pied un gouvernement national entre les deux parties. Un travail utile et qui peut porter ses fruits, car compte tenu des combats, des fissures apparaissent dans le camp de Abdelhakim Bel Haj – dont le jeu est trouble avec Al-Qaïda – et de Misurata où les vengeances post-combats font craindre le pire. Si l’armée nationale et l’ensemble des milices – un cessez-le-feu a été accepté de part et d’autre – cèdent totalement (une partie seulement des milices de Fajar Libya l’ont accepté, à l’heure où nous bouclons) une autre étape restera à franchir, celle du combat contre Aqmi, Al-Qaïda et Daech.

14 Durant la révolte de 2011, les islamistes d’Al-Qaïda, et particulièrement d’Aqmi, sont venus prêter main-forte à leurs frères libyens. Au lendemain de l’intervention de la France au Mali, certaines cellules, dont celles de Mokhtar Belmokhtar surnommé Alahour « Le borgne » se sont établies dans le Sud libyen, ont réactivé des cellules Al-Qaïda libyennes, et pris totalement pied dans certaines villes (ex : Oubari, Sirte, Mizda). De nombreuses cellules Aqmi, Al-Qaïda, Ançar Al-Charia, lesquelles ont établi des ramifications à l’Est et l’Ouest, et des connexions entre elles, voire avec l’islamiste, ex-Al-Qaïda Abdelhakim Bel Haj, dont les hommes ont été vus à Al Awinat (Fezzan), là où se situait, un temps, BelMoktar. Certes, Haftar peut se positionner dans le Sud où il a rallié de nombreux officiers et tribus, pour s’appuyer notamment sur certains Touaregs, Toubous et les Al Hassouma qui lui sont favorables, mais il n’y arrivera probablement pas seul. Par ailleurs, Daech a pris pied à Darna (Est), fief des djihadistes qui lui a prêté allégeance. Et depuis peu à Tripoli (Ouest) où le maire de Tripoli, Almhadi Al Harati, un Libyo-Irlandais qui a dirigé un temps une brigade en Syrie, dans la province d’Idlib (Nord) recrute de jeunes libyens pour les combats en Syrie. Ces derniers reviennent ensuite en Libye. Certains éléments de Daech ont, par ailleurs, déjà intégré les milices de A. Bel Haj.

15 C’est pourquoi, une action de grande envergure des Occidentaux et particulièrement de la France dans le Sud serait nécessaire, ne serait-ce que pour éviter que les djihadistes passent les frontières, notamment des pays frontaliers, et dans le cas où l’armée nationale et donc Haftar arriveraient à Tripoli, devenu une base de recrutement djihadiste, islamiste et de Daech. Et dans le cas où l’armée atteignerait Derna et parviendrait à stopper l’afflux des membres de Daech et puisse mener des actions dans le Sud. Ces opérations pourraient provoquer un repli important des djihadistes dans le Sud libyen, lesquels tenteront de franchir les frontières des pays voisins, dont l’Algérie et le Niger, et celle du Tchad. Les frontières sont immenses, poreuses et certains points de passage connus comme la « passe de Salvador » qui relie le Niger, l’Algérie et la Libye, ne sont pas encore véritablement sécurisés pour des raisons de commerce de contrebande, d’armes et de drogue, impliquant plusieurs acteurs, mais la France a implanté, non loin, une base avancée à Madama, dans le Nord-Est du Niger, à 200 kilomètres de la Libye. Mais là, tout dépend de la progression de Daech, du rapport de force en présence, et de la réelle volonté des acteurs concernés à vouloir s’unir contre l’État islamique, encore minoritaire, et surtout Al-Qaïda et Aqmi. Le timing ainsi que la coordination avec les pays voisins sont aujourd’hui cruciaux. Pour l’instant, l’Algérie s’oppose à une intervention massive qu’elle considère comme dangereuse en raison de cet afflux hypothétique de djihadistes sur son territoire.

Notes

  • [1]
    NDLR : avec la participation de Kamel Almarache, ancien professeur de sciences politiques à l’université de Tripoli.
  • [2]
    L’armée était constituée d’une armée ordinaire et des Brigades spéciales (environ 32 000 hommes), mieux armées (blindés, rockets très modernes) que la première et restées fidèles au colonel Kadhafi, lors de la « Révolution » de février 2011.
  • [3]
    Les gangs existaient déjà, sous Kadhafi, notamment à l’époque de l’embargo et lors de l’atomisation, à partir de 1995, des organes de sécurité, autrement dit des Comités révolutionnaires.
  • [4]
    On compte entre 1 et 1,5 million de réfugiés en Tunisie, Égypte, Maroc et Malte.
  • [5]
    Les milices islamistes de Abdelhakim Bel Haj (ex-Al-Qaïda, membre de l’ex-Groupe islamique du combat en Libye, GICL, originaire de Tripoli), emprisonné et relâché par Kadhafi, à la suite de la signature d’un mémorandum de 320 pages signé avec le fils de Kadhafi Seif Al Islam en 2006, dans lequel il renonce à Al-Qaïda. Le Conseil suprême de l’union des révolutionnaires libyens (CSURL), ex-Al-Qaïda, les milices tribales issues de la ville de Misurata, les milices tribales issues de la ville Zentan.
  • [6]
    Décrets n° 166, 2011 (1 000 militaires de grades différents), n° 81, 2013 (14 hauts gradés), n° 15, 2013 (915 hauts gradés).
  • [7]
    Pour défendre la cause fédéraliste, mais aussi afin d’obtenir des gains substantiels, la milice de Ibrahim Al Jadran, jeune milicien trentenaire, a occupé, au cours de longs mois, les installations pétrolières de l’Est faisant ainsi chuter la production de pétrole de 1,2 million b/j à 200 000 b/j environ.
  • [8]
    La HCIP a été créée à l’initiative de Mostafa Abdeljalil, Président du Conseil National de Transition (CNT), le 29 janvier 2012 (décret n° 16). Cette commission aura un rôle crucial lors notamment de la formation du gouvernement Ali Zeidane.
  • [9]
    NDLR : cette loi qui n’a pas été appliquée fait l’objet actuellement d’une annulation par le Parlement légitime de Tobrouk.
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