Introduction
1La batterie CELEB est née de l’initiative d’un groupe de neuropsychologues belges à la recherche d’un outil d’évaluation de la reconnaissance des visages et de la dénomination des noms propres prenant en compte les connaissances médiatiques des participants. En effet, la seule manière d’évaluer de manière contrôlée la reconnaissance des visages et l’accès aux noms de personnes dans le cadre d’un bilan clinique standardisé est d’utiliser des images de personnes célèbres. Or, le bagage culturel de chacun étant différent, les personnes célèbres connues par la population sont fortement dépendantes de l’âge des sujets, de leur niveau socio-culturel, de leur possibilité d’accès aux médias ainsi que de leurs intérêts. L’objectif de cette batterie est de fournir un outil adapté aux personnes de 20 à 60 ans, dont la passation ne soit pas influencée par les connaissances médiatiques des participants, et dont le but est de pouvoir diagnostiquer des troubles de reconnaissance des visages (prosopagnosie) d’une part, et des difficultés d’accès aux noms propres (anomie des noms propres) d’autre part. Après trois ans d’élaboration du protocole et une normalisation sur 240 participants sains, la batterie est désormais terminée et prête à être utilisée en clinique.
Les troubles de reconnaissance des visages
2La prosopagnosie peut être définie comme « l’incapacité à reconnaître les visages familiers, sur base de la perception visuelle, ne pouvant être expliquée ni par des déficits visuels de bas niveau, ni par une altération cognitive telle qu’une confusion mentale, une aphasie, une amnésie ou d’autres signes de détérioration intellectuelle » [1, 2]. La prosopagnosie est donc un trouble clinique se manifestant par une atteinte de la reconnaissance des visages, généralement acquis à la suite d’une lésion cérébrale. Le trouble se manifeste au quotidien chez les prosopagnosiques par des difficultés importantes de reconnaissances des visages familiers, tels que des membres de leur famille, des amis, des collègues de travail, des personnes célèbres dans les médias ou même encore, dans certains cas, leur propre visage.
3Les premières descriptions cliniques de difficultés à reconnaître des visages suite à une lésion cérébrale ont été rapportées au XIXe siècle, mais il a fallu attendre près d’un siècle pour que Bodamer [1] isole le trouble de reconnaissance des visages des autres troubles de reconnaissance et lui donne le nom de « prosopagnosie ».
4La prosopagnosie se manifeste chez les patients qui en souffrent par une incapacité à attribuer une identité aux visages, ces patients éprouvant généralement un sentiment d’absence de familiarité vis-à-vis des visages connus. Néanmoins, malgré leur déficit de reconnaissance faciale, les patients prosopagnosiques conservent habituellement leur capacité à reconnaître les personnes par le biais d’autres types d’indices : la voix ou d’autres traits visuels tels que la silhouette, la démarche, la taille, les vêtements, certains traits faciaux particuliers (moustache, cicatrice, taches de rousseur…), ou encore certains accessoires (boucles d’oreilles, piercing, lunettes…). Les prosopagnosiques conservent également en général l’accès aux informations sémantiques concernant les personnes, et ce, via d’autres voies, telles que leur nom. En outre, bon nombre de prosopagnosiques parviennent à effectuer correctement des jugements à propos de l’âge, du genre, des expressions émotionnelles ou encore de la direction du regard à partir des visages.
5Sur le plan étiologique, la prosopagnosie apparaît généralement suite à une lésion cérébrale [3-6], résultant le plus souvent de lésions aiguës d’origine ischémique du territoire de l’artère cérébrale postérieure droite. Mais elle peut aussi être d’origine traumatique, résulter d’une encéphalite virale, d’un hématome, ou d’une tumeur, ou encore être la conséquence d’une chirurgie de l’épilepsie. Enfin, une forme évolutive du trouble a été également décrite [7] dans le décours d’une forme particulière de démence sémantique affectant principalement le lobe temporal antérieur droit [8]. Cette dernière forme est souvent associée à une agnosie multimodale des personnes : les patients perdent la capacité à reconnaitre les visages, mais également les voix et les noms propres, et ils n’ont plus accès aux connaissances sémantiques liées aux personnes [9].
6En ce qui concerne la localisation des lésions, la question de la latéralisation a longtemps fait débat, depuis les observations d’une prédominance de lésions droites par Hécaen et al. [10] et l’affirmation contradictoire de lésions nécessairement bilatérales proposée par Damasio et al. [11]. Aujourd’hui, il ressort clairement qu’une lésion unilatérale droite peut être « suffisante » pour provoquer une prosopagnosie, étant donné que plusieurs dizaines de cas avec lésions unilatérales droites ont été décrits depuis les premières observations [12-14]. De plus, l’atteinte hémisphérique droite est une condition « nécessaire » pour causer une prosopagnosie, étant donné que tous les patients prosopagnosiques présentent au minimum une lésion droite (excepté 4 cas relatés dans la littérature mais dont 3 étaient gauchers et le 4e présentait une épilepsie bilatérale) [6].
7Les lésions sous-tendant la prosopagnosie concernent en général la surface ventrale des lobes occipitaux et temporaux, avec cette forte prédominance droite. Il est cependant difficile de préciser davantage les structures impliquées, la localisation des lésions des patients étant généralement très variable au sein de régions impliquant plusieurs gyri ainsi que les faisceaux de matière blanche importants pour leurs connexions fonctionnelles (et en particulier le « faisceau longitudinal inférieur ») [15]. Témoins de cette variabilité et du large volume cortical concerné, Damasio et al. [11] se réfèrent à trois régions critiques (les gyri lingual, fusiforme et parahippocampique), tandis que la revue de Bouvier et Engel [16] montre un recouvrement maximal des lésions plutôt au niveau de la partie ventrale du gyrus occipital inférieur droit. Des lésions plus antérieures, au niveau du pôle temporal droit, peuvent également donner lieu à des prosopagnosies sévères [17, 18]. Il apparaît donc que la reconnaissance des visages dépend d’un large réseau cortical couvrant toute la voie visuelle ventrale, de la partie inférieure du lobe occipital jusqu’au pôle temporal. Une lésion d’un des « nœuds » ou d’une des « branches » de ce réseau pourrait entraîner un dysfonctionnement de l’ensemble de ce réseau et provoquer en conséquence un déficit important de reconnaissance des visages.
Les troubles de dénomination des noms propres
8L’anomie des noms propres peut être définie comme « l’incapacité à récupérer les noms de personnes, et dans une moindre mesure les noms de lieux, de monuments, de marques, mais ne s’accompagnant pas de difficultés à récupérer les noms communs, et ne pouvant pas être expliquée par une altération cognitive globale de l’intelligence, de la mémoire ou du langage » [19, 20]. L’anomie des noms propres est donc un trouble clinique se manifestant principalement par une atteinte de la production des noms de personnes, généralement acquis à la suite d’une lésion cérébrale. Le trouble se manifeste au quotidien par des difficultés importantes à récupérer les noms de personnes familières (proches, amis, collègues) et de personnes célèbres.
9La plupart du temps, l’anomie des noms propres se manifeste par une perte de l’accès lexical aux différentes catégories de noms propres : noms de personnes, de pays, de villes, de rivières, de monuments, de marques commerciales, d’œuvres artistiques, ainsi que des suites de numéros (comme les numéros de téléphone et les dates de naissance), alors que l’accès aux noms communs, même de faible fréquence, est préservé. Cependant, l’anomie des noms propres peut se manifester spécifiquement pour les noms de personnes, en l’absence de toute difficulté à récupérer les autres noms propres, comme les noms de lieux [21-27], les noms de monuments [24-26] ou encore les noms de marques [26]. En outre, alors que les patients anomiques ne peuvent plus récupérer l’étiquette nominale de la personne, ils conservent en général un accès préservé à toutes les autres informations relatives aux personnes, y compris des informations détaillées et spécifiques [24, 25, 27-32]. De plus, alors que la production du nom propre est altérée, l’accès à l’identité de la personne sur base de son nom est régulièrement préservé et l’indiçage phonologique améliore la plupart du temps significativement la production des patients. À ce titre, l’anomie des noms propres est généralement considérée comme un trouble de l’accès aux étiquettes lexicales et non comme une perte de ces étiquettes.
10Le premier cas d’anomie des noms propres spécifique aux noms de personnes (en l’absence de difficultés de production des noms communs et d’autres noms propres) a été décrit par McKenna & Warrington [21]. Il s’agissait d’une patiente ayant souffert d’un infarctus de l’artère cérébrale moyenne gauche et qui était capable de donner le nom d’objets (vivants et non-vivants), de villes européennes et de villages anglais, alors qu’elle était incapable de produire le nom de personnes célèbres. Cette étude clinique présentait pour la première fois une dissociation entre noms propres et noms communs. D’autres cas ont été rapportés par la suite, jusqu’à la démonstration d’une double dissociation entre ces deux catégories [33].
11L’anomie des noms propres apparaît la plupart du temps dans le cadre d’un accident vasculaire cérébral, notamment suite à des lésions aiguës d’origine ischémique du territoire de l’artère cérébrale moyenne gauche ou de la communicante postérieure. Elle peut également être consécutive à un infarctus du thalamus gauche, une encéphalite herpétique, une résection tumorale ou encore une lobectomie antérieure gauche dans le cadre d’épilepsies pharmacorésistantes. Enfin, des troubles de dénomination des noms propres sont aussi observés dans le cadre de pathologies dégénératives, notamment dans le contexte de la démence sémantique. Le trouble se manifeste alors par une perte progressive de la dénomination et de la reconnaissance des noms de personnes. Alors que des troubles de reconnaissance des visages peuvent être un symptôme précoce d’une dégénérescence temporale antérieure droite (voir ci-dessus), les troubles liés aux noms de personnes sont symptomatiques d’une atrophie temporale antérieure prédominante à gauche [8, 34]. Néanmoins, tout comme la prosopagnosie progressive, une anomie des noms propres dans ce contexte s’inscrit plus que probablement dans le cadre d’une pathologie qui évoluera vers un trouble multimodal de la reconnaissance des personnes [35].
12En ce qui concerne la localisation des lésions, jusqu’à présent, tous les cas d’anomie des noms propres ont été rapportés dans le cadre de lésions hémisphériques gauches. Dans la plupart de cas, les lésions sont temporales et impliquent le lobe temporal antérieur, le gyrus parahippocampique et le lobe temporal moyen. L’implication du lobe temporal antérieur gauche en particulier dans le traitement des noms propres a été confirmée par des études en EEG [36] et en imagerie fonctionnelle [37-39]. Au niveau sous-cortical, le thalamus gauche semble être la région la plus fréquemment impliquée. En bref, comme pour la prosopagnosie, il semble difficile de circonscrire un territoire lésionnel précis associé à l’anomie des noms propres, celui-ci semblant plutôt sous-tendre un large réseau de régions interconnectées.
Un outil diagnostique de la prosopagnosie et de l’anomie des noms propres
13Il existe peu d’outils publiés en langue française visant à évaluer la reconnaissance des visages et la dénomination des personnes. À notre connaissance, il existe actuellement 3 tests, dont l’objectif est principalement d’évaluer la mémoire collective et l’accès aux informations sémantiques liées aux personnes (TOP 30 et TOP 10 [40] ; la batterie 75 [41] ; SemPer [42]). La batterie TOP 30 [40] est une batterie de 30 célébrités comprenant 4 sections : évocation spontanée, reconnaissance, questions sémantiques et datation. Les épreuves d’évocation et de reconnaissance sont scindées en 2 parties : le participant doit évoquer la profession ou l’activité de la personne présentée, puis la reconnaître parmi 3 propositions. Il doit dans un second temps, évoquer le nom de la personne présentée puis la reconnaître parmi 3 propositions. Le participant doit ensuite répondre à 2 questions sémantiques précises et enfin situer temporellement la célébrité sur une ligne du temps. La batterie TOP 10 [40], quant à elle, est une version abrégée de TOP 30. Ces 2 outils sont davantage dédiés à l’évaluation des connaissances sémantiques sur les personnes qu’à la reconnaissance ou la dénomination en tant que telles. La batterie 75 [41] permet l’évaluation de l’évocation et de la reconnaissance de noms propres à partir de 75 visages issus des personnages de cire du musée Grévin. À nouveau, cet outil ne permet pas de dissocier la reconnaissance du visage de la dénomination. Enfin, la batterie SemPer [42], composée de 5 épreuves, permet d’évaluer la reconnaissance et l’identification de 16 personnes célèbres. Trois types de tâches sont proposés : familiarité, appariement sémantique et dénomination de visages. Les épreuves de familiarité et d’appariement sémantique sont présentées selon les modalités visuelle (visages) et verbale (noms écrits). Bien que cette batterie permette le calcul de scores dissociés de reconnaissance et de dénomination, elle ne prend pas en compte les connaissances médiatiques des participants et ne porte au final que sur 16 célébrités. Par ailleurs, en complément de ces 3 batteries, Bonin et al. [43] ont publié en 2008 une liste de 105 visages de célébrités pour lesquels ils ont collecté des normes de dénomination. Malheureusement, la collecte des données s’est effectuée sur un échantillon d’étudiants de 19 ans en moyenne, ce qui ne correspond pas à l’étendue du public visé par un outil de diagnostic clinique.
14Ces différents outils présentent donc une série de limites. Tout d’abord, aucun de ces tests n’a l’objectif d’évaluer la reconnaissance des visages en tant que telle, le score de reconnaissance étant souvent confondu avec le score de dénomination. Ensuite, si ce n’est dans le SemPer, le score de dénomination est généralement contaminé par les performances de reconnaissance. En effet, lorsqu’un patient ne reconnaît pas la personne dont le visage est présenté, il ne peut logiquement pas fournir son nom, ce qui biaise systématiquement le score de dénomination. Dans le même ordre d’idée, les connaissances médiatiques du participant ne sont pas prises en compte lors de la passation de ces épreuves, ce qui empêche d’obtenir un score adapté à son exposition culturelle. Enfin, aucun de ces outils n’est informatisé et ne permet de comptabiliser le temps de réponse du participant, ce qui est une donnée importante lorsqu’on évalue des capacités de dénomination.
15Au final, aucun de ces outils ne remplit les exigences poursuivies : évaluer de façon indépendante la reconnaissance faciale et l’accès aux noms propres, tout en considérant les connaissances médiatiques des participants. L’élaboration de la batterie CELEB a donc poursuivi un triple objectif : 1) élaborer un outil d’évaluation conjointe de la reconnaissance des visages et de la dénomination des personnes célèbres permettant de calculer un score de reconnaissance visuelle et un score de dénomination qui soient indépendants l’un de l’autre ; 2) définir une épreuve au plus proche de l’exposition aux médias du participant et qui prenne en compte ses connaissances culturelles, pour pouvoir développer un outil qui soit utilisable en Belgique mais également dans les autres pays de la francophonie (France, Suisse, Québec) ; 3) informatiser l’outil pour que celui-ci puisse enregistrer les temps de réponse des participants et ainsi mettre au jour d’éventuels ralentissements de production. C’est en poursuivant ces trois objectifs que la batterie CELEB a été élaborée, validée et normée.
Méthode
Matériel
16Le défi majeur de la constitution d’une batterie de reconnaissance et de dénomination de personnes célèbres est le choix des items. En effet, la connaissance des médias est un domaine culturel extrêmement hétérogène et il n’existe pas de données normatives de fréquence, de familiarité, d’âge d’acquisition… sur lesquelles se baser pour choisir les items à inclure (exceptés ceux fournis par l’étude de Bonin et al. [43] mais dont nous avons déjà souligné les limites ci-dessus). De ce fait, nous avons opté pour une démarche empirique visant à interroger la population belge sur ses connaissances en matière de célébrités et à tester ses capacités de reconnaissance. La sélection des items s’est donc déroulée en 2 étapes. Lors d’une première étape, un large échantillon de participants belges a été interrogé sur ses connaissances en matière de célébrités. Dans une seconde étape, les aptitudes de reconnaissance d’un nouvel échantillon ont été évaluées sur des items présélectionnés. Au final, cette double procédure a permis de constituer une liste de 60 items.
Questionnaire verbal
17En première étape, une liste de 223 célébrités a été établie selon 5 catégories professionnelles (chanteurs, présentateurs et animateurs TV, acteurs, personnalités politiques, sportifs), 3 périodes temporelles (années 2000, années 1980-90, intemporelles) et 4 nationalités (belge, française, canadienne et américaine). Cette liste de 223 célébrités a été proposée à 202 personnes (belges francophones) âgées de 15 à 75 ans qui ont dû sélectionner les items qu’ils connaissaient et qu’ils pensaient être capables de reconnaitre en photo. Cette procédure a permis de retenir les 100 célébrités obtenant le plus fort pourcentage de réponses affirmatives (29 chanteurs, 24 acteurs, 22 politiciens, 20 présentateurs et animateurs, 5 sportifs). En moyenne, chaque célébrité retenue a été choisie par 94,2 % de notre échantillon.
Prétest visuel
18Lors de cette deuxième étape, les photos des 100 célébrités retenues ont été proposées à un échantillon de 30 nouveaux participants belges francophones âgés de 20 à 60 ans. Les photos ont été détourées pour enlever tout indice périphérique visuel et ne garder que la forme du visage (figure 1). En effet, il a été démontré que les patients prosopagnosiques se basent sur des indices tels que les vêtements, les cheveux, les bijoux pour reconnaître les personnes, et ils peuvent ainsi réussir des épreuves de reconnaissance de visages si trop d’indices périphériques sont fournis [6]. Les performances des 30 participants ont permis d’identifier 60 items reconnus au moins par 86 %de notre échantillon (18 acteurs, 15 chanteurs, 12 politiciens, 13 animateurs et 2 sportifs ; voir la liste en annexe 1).
Illustration des 60 items de la batterie, présentés dans leur ordre d’apparition dans le test (horizontalement du coin supérieur gauche au coin inférieur droit). Les noms des 60 items se trouvent dans l’Annexe 1
Illustration des 60 items de la batterie, présentés dans leur ordre d’apparition dans le test (horizontalement du coin supérieur gauche au coin inférieur droit). Les noms des 60 items se trouvent dans l’Annexe 1
19Par cette double procédure de sélection (questionnaire verbal et reconnaissance visuelle), nous avons ainsi veillé le plus rigoureusement possible à sélectionner les items les mieux connus et reconnus de la population belge, dans l’objectif d’établir l’outil le mieux adapté aux connaissances médiatiques partagées.
Constitution de la batterie
20Comme expliqué dans l’introduction, l’objectif de la batterie CELEB est de permettre de calculer un score de reconnaissance visuelle et un score de dénomination qui soient indépendants. Il convenait donc de réfléchir à un calcul de scores qui permette de dissocier la reconnaissance et la dénomination, ce qui nous a amené à construire le test en 4 étapes : 1) dénomination ; 2) description sémantique ; 3) désignation parmi 5 noms ; 4) question de connaissance.
211) Pour chaque item, le participant est invité à d’abord fournir le nom de la célébrité (le nom de famille seul est accepté, sauf s’il y a équivoque possible avec un homonyme). La réponse est encodée par l’expérimentateur aussitôt celle-ci produite par le participant, sauf en cas de réponses incorrectes pour lesquelles un délai de 3 secondes est accordé au participant pour d’éventuelles autocorrections. Le temps de dénomination est chronométré et un maximum de 30 secondes est admis. Si l’item est réussi, il est considéré comme correctement dénommé – et donc reconnu – et l’item suivant apparaît (dans ce cas, les étapes 2 et 3 ne sont pas administrées).
222) Si l’item n’est pas dénommé, un nouvel écran apparaît où le participant est invité à dire tout ce qu’il sait sur la célébrité en question (« description sémantique »). Il est aiguillé par une fiche rappelant les différentes informations évocables : profession, nationalité, âge, statut familial, titre d’une œuvre, anecdote… À nouveau, un maximum de 30 secondes est alloué au participant pour qu’il produise sa réponse. Un item est considéré comme correctement décrit si l’examinateur juge que la description donnée par le participant serait suffisante à une personne extérieure pour pouvoir identifier la célébrité en question sur base de cette définition seule. Donner uniquement la catégorie professionnelle et/ou la nationalité de la célébrité ne suffit donc pas pour que l’item soit considéré comme correctement décrit.
233) Cette étape de description sémantique est automatiquement suivie de l’étape de désignation. À cette étape, 5 noms apparaissent à l’écran : le nom correct (e.g., Gérard Depardieu), un distracteur phonologique (e.g., Gérald De Palmas), un distracteur sémantique (e.g., Pierre Richard), un distracteur visuel (e.g., Bernard Tapie) et un distracteur visuo-sémantique (e.g., Jean-Pierre Castaldi). L’ordre des distracteurs a été réparti de façon aléatoire pour les 60 items. La réussite de l’étape de désignation permet de valider la description sémantique et constitue une condition sine qua non pour qu’un item soit considéré comme correctement reconnu au total. En d’autres termes, pour accorder le point de reconnaissance faciale, l’item doit être bien décrit et bien désigné. En effet, un item peut être bien décrit et mal désigné, ou mal décrit mais bien désigné. Dans les deux cas, ces profils témoignent d’une reconnaissance imparfaite. En résumé, un item est considéré comme reconnu s’il remplit un des deux critères suivants : soit il a été bien dénommé (et donc bien reconnu), soit il a été bien décrit et désigné.
244) Une fois le test terminé, l’examinateur est invité à reprendre la liste verbale des items du test pour la question de connaissance. Il va considérer d’emblée les items bien dénommés comme connus. En revanche, pour tous les items non dénommés et non correctement décrits, la question suivante est posée au participant : « Normalement, auriez-vous dû reconnaître cette personne ? En d’autres termes, la connaissez-vous suffisamment pour la reconnaître ? ». Cette question permet d’éliminer les items trop peu connus du participant, et ainsi de calculer un score total plus proche de ses connaissances médiatiques.
25Les items sont présentés dans un ordre fixe (voir la liste en Annexe 1) pour chaque participant et l’examinateur est invité à remplir une grille de correction avec les réponses du sujet durant la réalisation du test. Par ailleurs, les réponses sont encodées par le logiciel qui permet de calculer le temps de réponse des différentes sous-épreuves.
Calculs des scores et indices
26La batterie CELEB permet d’obtenir trois scores intermédiaires qui interviennent dans le calcul de deux indices retenus comme critères diagnostiques :
- le score de simple dénomination est obtenu par la somme des items correctement dénommés dans la partie 1 de l’épreuve (« Dénomination ») ;
- le score de reconnaissance consiste en la somme totale des items correctement reconnus. Il est obtenu par la somme des items correctement dénommés et des items qui ont été correctement décrits et désignés. Cette procédure permet de ne pas contaminer le score de reconnaissance par d’éventuels problèmes de dénomination ;
- le score de connaissance est obtenu par la somme totale des items connus par le sujet dans la dernière partie de l’épreuve (« Connaissance »).
27Ensuite, deux indices sont calculés :
- l’indice de reconnaissance faciale (IRF) est obtenu par la division du score de reconnaissance par le score de connaissance. Cet indice permet d’éliminer les items qui ne sont pas connus du participant, et évite ainsi l’obtention d’un score de reconnaissance faciale qui serait biaisé par les faibles connaissances médiatiques du participant. L’IRF s’étale d’une valeur minimale de 0 à une valeur maximale de 1. Plus l’indice IRF obtenu est bas, plus il reflète des difficultés d’ordre gnosique pour la reconnaissance des visages ;
- l’indice d’accès aux noms propres (IANP), ensuite, est obtenu par la division du score de simple dénomination par le score de reconnaissance. En éliminant les items qui n’ont pas été reconnus, cet indice évite d’obtenir un score de dénomination biaisé par de faibles aptitudes en reconnaissance faciale. L’IANP s’étale d’une valeur minimale de 0 à une valeur maximale de 1. Plus l’indice est bas, plus il reflète des difficultés d’accès aux noms propres. Des exemples de calculs d’indices sont proposés dans la figure 2 qui illustre les différents profils cognitifs identifiables par ces deux indices.
28Outre ces deux indices, un troisième critère diagnostique est évalué, le temps de dénomination (TD), qui est calculé sur base de la moyenne du temps de réponse pour les items correctement dénommés. Il permet de vérifier si les items dénommés l’ont été dans un laps de temps raisonnable ou si le participant est significativement ralenti, ce qui est censé traduire des difficultés d’accès aux noms propres. Cette troisième mesure est ajoutée aux deux autres indices comme critère diagnostique, mais ce dernier est à considérer avec quelques précautions. En effet, le temps de dénomination est fonction de la vitesse de réaction de l’expérimentateur qui doit encoder la réponse. Il convient donc d’être prudent dans l’interprétation d’un temps de dénomination au seuil limite du déficit, qui pourrait en fait refléter des variations du temps de réaction des différents examinateurs. Ensuite, bien qu’un temps de dénomination ralenti soit censé refléter un trouble de l’accès à l’étiquette verbale, il peut également traduire le fait que certains items soient moins familiers pour le participant. Une faible familiarité pour certains items entraînera en effet un ralentissement de l’accès à l’identité de la personne, se traduisant par une dénomination retardée. Pour ces raisons, nous encourageons les cliniciens à considérer le temps de dénomination avec prudence et à utiliser leur sens clinique dans son interprétation.
Disponibilité du matériel
29Les utilisateurs de la batterie CELEB ont à leur disposition : le logiciel sous forme de fichier autoexécutable (.exe) tournant sous Windows, une brochure d’installation du logiciel, une grille de correction papier, un fichier de cotation sous Excel, une liste des réponses acceptables et non acceptables pour les définitions sémantiques, un guide de passation du test, et une fiche d’information pour le participant. Le logiciel est téléchargeable librement à l’adresse suivante : www.ipsp.ucl.ac.be/recherche/projets/Celeb/setup.exe. L’ensemble des documents est accessible sur demande en écrivant à thomasbusigny@gmail.com.
Échantillon de normalisation
30Deux cent quarante participants, répartis en 2 genres, 3 niveaux socio-culturels (NSC1 : < 9 ans d’études ; NSC2 : entre 9 et 12 ans d’études ; NSC3 : > à 12 ans d’études) et 4 tranches d’âge (20-29, 30-39, 40-49, 50-60) ont été testés en Belgique francophone. Le critère de recrutement était de ne souffrir d’aucun trouble neurologique ou maladie vasculaire, de ne pas avoir d’antécédents de trauma crânien ou d’abus d’alcool, de ne présenter aucune plainte cognitive, et d’avoir passé au moins les 10 dernières années sur le territoire belge. Les 240 participants ont été testés de janvier 2009 à août 2010, et ont été répartis de manière équilibrée selon les trois critères de regroupement (voir tableau 1A).
Exemples de profils de réponse et de calcul de scores et d’indices. Les exemples de profils illustrent différents cas de figure possible de réussite d’un item. Ensuite, les exemples de scores et indices illustrent 3 profils cognitifs possibles sur base d’un score de 15 en dénomination. Le premier cas démontre que le participant a reconnu beaucoup plus d’items qu’il n’en a dénommés et illustre donc un trouble isolé d’accès aux noms propres. Le second cas montre un patient qui reconnait peu d’items mais qui dénomme le peu d’items qu’il reconnaît, illustrant le profil d’un trouble isolé de reconnaissance des visages. Enfin, le troisième cas illustre le profil d’un participant qui connaît au total peu de célébrités, mais qui les reconnait et dénomme tous, et présente donc un profil normal
Exemples de profils de réponse et de calcul de scores et d’indices. Les exemples de profils illustrent différents cas de figure possible de réussite d’un item. Ensuite, les exemples de scores et indices illustrent 3 profils cognitifs possibles sur base d’un score de 15 en dénomination. Le premier cas démontre que le participant a reconnu beaucoup plus d’items qu’il n’en a dénommés et illustre donc un trouble isolé d’accès aux noms propres. Le second cas montre un patient qui reconnait peu d’items mais qui dénomme le peu d’items qu’il reconnaît, illustrant le profil d’un trouble isolé de reconnaissance des visages. Enfin, le troisième cas illustre le profil d’un participant qui connaît au total peu de célébrités, mais qui les reconnait et dénomme tous, et présente donc un profil normal
Analyses
31Des analyses de l’effet du genre, de l’âge et du niveau socio-culturel ont été effectuées sur nos 3 critères de jugement : IRF, IANP et TD. Préalablement aux analyses, nous avons effectué une vérification visant à éliminer les sujets obtenant des performances anormalement basses. En effet, étant donné que les données recueillies visent à établir des normes de critères diagnostiques, il convient d’être rigoureux quant à leur représentativité. Nous avons décidé d’appliquer le critère d’exclusion suivant : les participants s’écartant de plus de 3 écart-types de la moyenne de l’échantillon total et de plus de 2 écart-types de la moyenne de leur groupe d’appartenance (de même âge et de même niveau socio-culturel) ont été écartés. Cette procédure a conduit à éliminer 6 participants pour le score IRF et 5 participants pour le score IANP. Le temps de dénomination a pu être calculé pour 210 participants (après avoir enlevé les 5 participants en raison de leur mauvais IANP et 25 autres participants pour lesquels le temps de dénomination n’a pas pu être calculé).
32Les analyses des effets principaux et des interactions sur nos 3 critères de jugement ont été conduites par le calcul d’ANOVAs à l’aide du logiciel SPSS 18.0. Les comparaisons par paires post-hoc ont été ajustées pour comparaisons multiples à l’aide de la correction de Bonferroni.
Normes par tranches d’âge et par niveau socio-culturel. A. Répartition des participants par âge, niveau socio-culturel et genre. B. Indices de reconnaissance faciale (IRF). C. Indices d’accès aux noms propres (IANP). D. Temps de dénomination moyen exprimé en millisecondes (TD). Les valeurs représentent la moyenne du groupe (et l’écart-type entre parenthèses) ainsi que le score seuil (moyenne – 2 × écart-type). Un patient obtenant un score inférieur à ce score seuil (c’est-à-dire s’écartant de plus de 2 écart-types par rapport à la moyenne de son groupe) sera considéré comme déficitaire
Normes par tranches d’âge et par niveau socio-culturel. A. Répartition des participants par âge, niveau socio-culturel et genre. B. Indices de reconnaissance faciale (IRF). C. Indices d’accès aux noms propres (IANP). D. Temps de dénomination moyen exprimé en millisecondes (TD). Les valeurs représentent la moyenne du groupe (et l’écart-type entre parenthèses) ainsi que le score seuil (moyenne – 2 × écart-type). Un patient obtenant un score inférieur à ce score seuil (c’est-à-dire s’écartant de plus de 2 écart-types par rapport à la moyenne de son groupe) sera considéré comme déficitaire
Résultats
Indice de reconnaissance faciale
33Les analyses conduites sur les IRF ne révèlent aucun effet principal du genre, les hommes et les femmes obtenant des performances de reconnaissance similaires (F1,233 = 0,00 ; p = 0,99). En revanche, les analyses révèlent un important effet principal du niveau socio-culturel (F2,233 = 8,28 ; p < 0,001). Les comparaisons par paires démontrent que les NSC1 obtiennent des performances significativement inférieures aux NSC2 (p < 0,05) et aux NSC3 (p < 0,001), alors que les NSC2 et les NSC3 obtiennent des performances similaires (p = 0,25). Les analyses révèlent également un effet significatif de l’âge (F3,233 = 4,61 ; p < 0,01). La tranche des 20-29 obtient des performances de reconnaissance significativement inférieures aux 30-39 (p < 0,05) et a également tendance à être moins performante que les 40-49 (p < 0,06). De même, les 50-60 sont significativement moins performants que les 30-39 (p < 0,05) et ont tendance à être moins bons que les 40-49 (p = 0,06). En revanche, les 30-39 ne différent pas des 40-49 (p = 0,99), et les 20-29 ne différent pas des 50-60 (p = 1,00).
34Enfin, les analyses d’interaction ne montrent pas d’interaction significative entre l’âge et le niveau socio-culturel (F6,233 = 1,46 ; p = 0,19). Néanmoins, on remarque que les NSC1 ont tendance à être moins performants que les NSC2 et NSC3 lorsqu’ils sont jeunes et que cette différence s’amenuise avec le temps, ceux-ci atteignant le niveau des NSC2 et NSC3 après 50 ans.
Indice d’accès aux noms propres
35Tout comme pour les IRF, les analyses conduites sur les IANP ne révèlent aucun effet principal du genre, les hommes et les femmes obtenant des performances de dénomination similaires (F1,234 = 0,65 ; p = 0,42). À nouveau, les analyses révèlent également un important effet principal du niveau socio-culturel (F2,234 = 11,32 ; p < 0,001). Comme pour les IRF, les comparaisons par paires démontrent que les NSC1 obtiennent des performances significativement inférieures aux NSC2 (p < 0,01) et aux NSC3 (p < 0,001), alors que les NSC2 et les NSC3 obtiennent des performances similaires (p = 0,83). En revanche, contrairement aux IRF, les analyses ne révèlent aucun effet principal de l’âge sur la dénomination (F3,234 = 0,41 ; p = 0,75). Les 4 groupes d’âge obtiennent des performances de dénomination équivalentes. Néanmoins, les analyses d’interaction montrent une interaction significative entre l’âge et le niveau socio-culturel (F6,234 = 2,33 ; p < 0,05). Les participants de niveau socio-culturel 1 obtiennent des performances inférieures aux NSC2 et NSC3 jusqu’à 50 ans, et puis leurs performances rejoignent celles des niveaux supérieurs. On remarque également que les performances en dénomination des NSC3 tendent à diminuer après 50 ans.
Temps de dénomination
36Les analyses sur les temps de dénomination reflètent globalement les mêmes profils que les analyses sur les IANP. Tout comme pour les IRF et les IANP, les analyses ne révèlent aucun effet principal du genre (F1,209 = 0,75 ; p = 0,39). À nouveau, les analyses révèlent un effet principal du niveau socio-culturel (F2,209 = 5,35 ; p < 0,01). Les comparaisons par paire démontrent que les NSC1 sont plus lents en dénomination que les NSC3 (p < 0,01). En revanche, les NSC1 ne sont pas significativement plus lents que les NSC2 (p = 0,15) et les NSC2 ne sont pas significativement plus lents que les NSC3 (p = 0,15). Tout comme pour les IANP, les analyses ne révèlent pas non plus d’effet principal de l’âge sur le temps de dénomination (F3,209 = 1,74 ; p = 0,16). Et cette fois, l’interaction entre âge et niveau socio-culturel n’est pas significative (F6,209 = 1,41 ; p = 0,21). Néanmoins, on observe la même tendance que pour les IRF et les IANP : les NSC1 qui se démarquent des NSC2 et des NSC3 lorsqu’ils sont jeunes ont tendance à rejoindre les deux autres groupes après 50 ans.
Normes
37Au vu de l’absence d’effet du genre à travers nos 3 critères de jugement, les hommes et les femmes ont été regroupés et classés selon leur âge et leur niveau socio-culturel. Les normes, exprimées en moyennes et écart-types, sont représentées dans les tableaux 1B, 1C et 1D. Chacune des cellules représentant environ 20 participants, la règle du Z-score comme critère de diagnosticité est donc applicable. Un patient s’écartant de plus de 2 écarts-types de la moyenne de son groupe d’appartenance sera donc considéré comme déficitaire. Un déficit au niveau de l’IRF reflète un trouble de reconnaissance des visages et constitue un indice diagnostique de prosopagnosie. Un IANP déficitaire reflète un trouble de l’accès aux noms de personnes et pointe vers une anomie des noms propres. Enfin, un TD ralenti illustre un temps de latence excessif et tend à démontrer une difficulté d’accès aux étiquettes lexicales.
38Par ailleurs, nous avons vérifié le nombre total d’items sur lequel était calculé l’indice de reconnaissance faciale. Pour rappel, l’IRF est obtenu par la somme des items correctement reconnus divisée par la somme des items connus. Cette procédure permet ainsi d’enlever de l’indice les items non connus par le participant. En moyenne, 3 items ont été enlevés par participant, ce qui signifie que l’indice de reconnaissance a été calculé sur un score total moyen de 57. Cette démarche nous a ainsi permis de vérifier et de valider la pertinence du choix des items.
Application internationale et clinique
39Comme nous l’avons décrit plus haut, la batterie CELEB a été établie, validée et normée sur un échantillon de participants belges. Cependant, dans l’objectif de démontrer l’applicabilité de la batterie CELEB en dehors des frontières belges, nous avons testé un échantillon de participants français et suisses pour vérifier si des participants francophones non belges parviennent à réaliser l’épreuve avec le même niveau de performance. Notre échantillon est composé de 16 participants âgés de 22 à 60 ans, de niveaux socio-culturels variés, dont 14 sont français et 2 sont suisses. Ces participants ont réalisé la batterie CELEB dans des conditions exactement identiques aux 240 participants de la normalisation. Les résultats exprimés en Z-scores présentés dans l’annexe 2 montrent que les participants français et suisses obtiennent exactement le même niveau de performance que les participants belges. Même si cet échantillon de participants francophones non belges est loin d’être exhaustif, ces résultats montrent que la batterie CELEB peut être utilisée aussi bien en Belgique, qu’en France et en Suisse, en raison de l’étape de connaissance qui permet d’éliminer les items non connus par le participant. Le projet de valider la batterie CELEB au Québec est actuellement en cours.
40Ensuite, dans un deuxième temps, nous avons entrepris de tester la validité clinique de la batterie CELEB en l’administrant à un échantillon de patients. Dans le cadre de l’actuelle publication, 3 cas sont rapportés : un cas de prosopagnosie, un cas d’anomie des noms propres et un cas de trouble multimodal de reconnaissance des personnes. PS est une femme de 60 ans, institutrice maternelle à la retraite, et est une patiente prosopagnosique rapportée dans de nombreuses études comportementales et neurofonctionnelles [5]. En 1992, PS a subi un accident de la circulation : elle a été renversée par un bus lors d’un voyage à Londres. Le trauma crânien consécutif à l’accident a provoqué des hémorragies causant des lésions au niveau du cortex occipital latéral inférieur droit et du gyrus fusiforme gauche. La seule plainte cognitive persistant actuellement chez PS concerne la reconnaissance des visages familiers, incluant les membres de sa famille et son propre visage sur photographie. Le bilan neuropsychologique montre qu’en dehors d’un léger ralentissement attentionnel, la patiente présente un profil cognitif normal dans toutes les tâches ne requérant pas le traitement de visages. SN est un homme de 60 ans, attaché culturel à la retraite. Il a été victime en 2009 d’un AVC ischémique dans le territoire cérébral postérieur gauche, causant des lésions occipitales médianes et thalamiques unilatérales dans l’hémisphère gauche. Suite à son AVC, SN se plaint d’un manque du mot pour les noms communs et les noms propres, mais ne se plaint pas de difficultés à reconnaître les visages. Le bilan neuropsychologique met en évidence un trouble de la dénomination et un déficit en mémoire verbal, mais une mémoire visuelle préservée. Enfin, BB est une femme de 49 ans, ancienne couturière en arrêt de travail. BB a été victime de 2 accidents de moto, en 2008 et en 2009, causant une commotion cérébrale la première fois et un traumatisme crânien la seconde fois qui a provoqué une lésion temporale antérieure droite. Depuis le deuxième accident, BB relate des difficultés à reconnaître les visages de ses proches, à les associer à leur nom, et également à reconnaître leur voix. Le bilan neuropsychologique objective des troubles de la dénomination, une atteinte des fonctions exécutives, et un déficit en mémoire verbale épisodique et en mémoire de travail.
41Ces 3 patients ont effectué la batterie CELEB. Les résultats illustrés dans le tableau 2 mettent en évidence 3 profils très différents. Alors que PS obtient un indice de reconnaissance faciale largement déficitaire (Z = -4,73), son indice de dénomination est dans la norme (Z = -0,57). Cela veut dire que les rares fois où PS reconnaît un visage, elle parvient à retrouver son nom facilement. Ce profil est typique d’un patient prosopagnosique. SN, quant à lui, présente le profil exactement inverse : alors qu’il obtient un indice de reconnaissance facial tout à fait honorable (Z = 0,25), son indice d’accès aux noms propres (Z = -5,41) ainsi que son temps de dénomination (Z = -4,89) sont largement déficitaires. Ce profil est diagnostique d’une anomie des noms propres avec reconnaissance visuelle préservée. Enfin, la patiente BB obtient un profil mixte : elle obtient des performances déficitaires dans les trois critères de jugements : IRF (Z = -3,48), IANP (Z = -3,26) et TD (Z = -4,20). Ce profil renvoie à un trouble multimodal de reconnaissance des personnes et est en accord avec la plainte de la patiente concernant la reconnaissance des visages et l’accès aux noms des personnes.
42En conclusion, la batterie CELEB est un outil clinique qui semble sensible et discriminant, puisqu’il permet de dégager des profils pathologiques distincts en accord avec les plaintes des patients.
Discussion
43Nous avons présenté un nouvel outil diagnostic de l’évaluation des troubles de reconnaissance des visages et des difficultés d’accès aux noms propres. Par rapport aux outils existants, la batterie CELEB présente une série d’avantages :
- le choix des items a été mené rigoureusement par deux étapes empiriques visant à prendre en compte les connaissances médiatiques et les aptitudes de reconnaissance des participants, dans l’objectif de sélectionner des items qui reflètent les connaissances réelles des participants ;
- l’introduction des indices de reconnaissances faciale (IRF) et d’accès aux noms propres (IANP) permet une évaluation non contaminée de la reconnaissance et de la dénomination. D’une part, le score de reconnaissance n’est pas biaisé par les connaissances culturelles du participant, d’autre part, le score de dénomination n’est pas biaisé par d’éventuelles difficultés de reconnaissance du participant ;
- la prise en compte du temps de dénomination est également un facteur crucial qui est habituellement trop peu pris en compte. En effet, un déficit subtil de dénomination peut ne pas ressortir quantitativement en termes de mauvaises réponses mais se manifester par un ralentissement de la latence de réponse. Prendre en compte le temps de dénomination permet donc de déceler des déficits fins qui n’auraient pas été objectivés par ailleurs ;
- la normalisation a été conduite sur un large échantillon de participants, de sorte que chaque cellule normative comprend environ 20 sujets. Les patients peuvent donc être comparés à un échantillon exhaustif de participants du même âge et niveau socio-culturel qu’eux ;
- bien qu’étalonnée sur un échantillon de participants belges, la batterie CELEB est applicable internationalement en francophonie. En effet, l’étape de connaissance permet d’enlever les items non connus par le participant et ainsi de délimiter un outil sur mesure pour chaque participant. Cet avantage est une réelle force par rapport aux outils précédents ;
- enfin, la batterie CELEB est un outil diagnostique sensible qui permet de dissocier des profils pathologiques distincts. Les calculs des IRF et des IANP permettent en effet d’établir un diagnostic différentiel entre prosopagnosie et anomie des noms propres. En ce qui concerne la prosopagnosie, ce genre d’outil manquait cruellement dans la boite à outils actuelle du neuropsychologue.
44La batterie CELEB présente cependant deux limites :
- tout d’abord, ses normes s’arrêtent à 60 ans. Or, bon nombre de maladies neurodégénératives peuvent se manifester par un trouble précoce de l’accès au nom. Il serait donc pertinent de posséder des normes pour les sujets plus âgés. C’est un travail qui est en fait actuellement en cours, sur une version modifiée de la CELEB. En effet, notre démarche de validation auprès de personnes plus âgées a révélé qu’une batterie de 60 items est trop longue pour les personnes de plus de 60 ans. Nous avons donc effectué une nouvelle étape de sélection des items et avons retenu 30 personnalités pour une version abrégée. Cette version « senior » de la batterie CELEB est actuellement en cours de normalisation. La batterie CELEB présentée dans la présente publication a donc été appelée « junior » et doit être considérée comme un outil diagnostique dans le cadre de pathologies principalement focales chez les sujets de 20 à 60 ans ;
- ensuite, une seconde limite qui peut être relevée concerne l’étape 4 : la question de connaissance. Celle-ci présuppose que le patient a encore accès à l’identité de la personne à partir de son étiquette. Or, dans certaines pathologies comme le trouble multimodal de reconnaissance des personnes, l’accès à l’identité par le nom est perturbé [44]. C’est notamment souvent le cas dans le cadre d’atrophies temporales antérieures prédominantes à droite. Pour ces patients, il convient donc de prendre des précautions quant au calcul du score de connaissance qui peut être biaisé par le trouble du patient. Une solution envisageable est d’interroger un proche du patient sur les items que ce dernier est censé connaître ou non, ce qui permet le calcul d’un score de connaissance contournant le déficit du patient. En revanche, dans le cas de prosopagnosie ou d’anomie des noms propres isolées, ce score de connaissance semble tout à fait adapté et robuste puisqu’on n’attend pas de difficulté de reconnaissance sur entrée verbale de l’étiquette.
Résultats des 3 patients testés avec la batterie CELEB : PS, SN et BB. Les z-scores expriment l’écart de chaque patient par rapport à son groupe de référence pour les trois critères de jugement : IRF, IANP et TD. Les résultats montrent que les profils révélés par CELEB sont distincts et concordent avec la plainte du patient : profil de prosopagnosie pour PS, profil d’anomie des noms propres pour SN, et profil de trouble multimodal de reconnaissance des personnes pour BB
Résultats des 3 patients testés avec la batterie CELEB : PS, SN et BB. Les z-scores expriment l’écart de chaque patient par rapport à son groupe de référence pour les trois critères de jugement : IRF, IANP et TD. Les résultats montrent que les profils révélés par CELEB sont distincts et concordent avec la plainte du patient : profil de prosopagnosie pour PS, profil d’anomie des noms propres pour SN, et profil de trouble multimodal de reconnaissance des personnes pour BB
45Enfin, au-delà de la portée clinique de la batterie CELEB, le travail de normalisation de cet outil apporte des données intéressantes quant aux influences des facteurs d’âge et de niveau socio-culturel sur les aptitudes à reconnaître et dénommer les personnes connues. On remarque notamment que l’âge n’a que peu d’effet sur les aptitudes de reconnaissance et de dénomination, excepté chez les participants de niveau socio-culturel le plus bas. Ces données sont très intéressantes et démontrent que le désavantage des participants jeunes de faible niveau socio-culturel s’amenuise peu à peu, ceux-ci rejoignant les participants de plus haut niveau à partir de 50 ans. Le désavantage lié au niveau d’études se comble donc avec l’âge. Ces observations sont cruciales dans un processus de diagnostic et justifie la répartition des participants en classes d’âge et de niveau socio-culturel.
46En conclusion, la batterie CELEB est un nouvel outil diagnostique de la prosopagnosie et de l’anomie des noms propres, à l’usage des neuropsychologues, pour des patients atteints d’une pathologie focale et âgés de 20 à 60 ans.
Information
47Adresse où télécharger l’outil présenté dans l’article : www.ipsp.ucl.ac.be/recherche/projets/Celeb/setup.exe.
48Liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de lien d’intérêt en rapport avec cet article.
Remerciements
En plus des auteurs du présent article, nous remercions l’ensemble des personnes qui ont participé à l’élaboration et la normalisation de la batterie CELEB : Stéphane Adam, Aurélie Biervoye, Hélène Brissart, Marie Buysschaert, Laetitia Dambroise, Julie Declerq, Nathalie Depoorter, Catherine Deroux, Aurélie Dewulf, Olivia Ghysens, Laurence Robaye, Julien Thonon, Eric Vincent, et Alexia Watelet. Nous remercions également tous les participants contrôles ainsi que les patients qui ont participé à la normalisation de la batterie. Enfin, nous remercions l’Université catholique de Louvain et plus particulièrement l’Institut de psychologie qui a accepté d’héberger la batterie sur son serveur. Thomas Busigny est financé par un contrat de chargé de recherche au Fonds national de la recherche scientifique (FRS-FNRS, Belgique).Liste des 60 items retenus pour la batterie CELEB, présentés dans leur ordre d’apparition dans le test
Liste des 60 items retenus pour la batterie CELEB, présentés dans leur ordre d’apparition dans le test
Résultats des 14 participants français et des 2 participants suisses en comparaison aux sujets belges
Résultats des 14 participants français et des 2 participants suisses en comparaison aux sujets belges
Les z-scores expriment l’écart de chaque participant par rapport à son groupe de référence pour les trois critères de jugement : IRF, IANP et TD. Les résultats montrent que les participants français et suisses obtiennent des performances de niveau équivalent aux participants belges.Références
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Mots-clés éditeurs : prosopagnosie, diagnostic, accès aux noms des personnes, anomie des noms propres, CELEB, reconnaissance des visages
Date de mise en ligne : 13/05/2014
https://doi.org/10.1684/nrp.2014.0287