1C’est en mai 2009, au Centre de recherche de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal (CRIUGM), que se tenait la première Réunion de printemps hors Europe de la Société de neuropsychologie de langue française (SNLF). L’événement ayant pour thème « Vieillissement et cognition : du vieillissement réussi aux troubles de la cognition » fut un grand succès. Près de cent cinquante chercheurs, cliniciens et étudiants en provenance de la Belgique, du Canada, des États-Unis, de la France, du Luxembourg, des Pays-Bas, du Québec et de la Suisse étaient présents, témoignant de la vitalité de la communauté scientifique francophone. Pour plusieurs, ce fut l’occasion de belles retrouvailles puisque de nombreux collègues avaient été de passage au CRIUGM à un moment ou un autre de leur carrière.
2C’est dans une ambiance de convivialité que nous avons assisté aux plus récentes découvertes sur le vieillissement cognitif présentées par des chercheurs et cliniciens de renommée internationale. Dans ce dossier spécial, nous vous présentons quatre articles de synthèse issus de cet événement ainsi qu’un bref article consacré à la neuropsychologie au Québec. L’article proposé par le professeur Sylvain Gagnon traite de la question de l’évaluation des compétences au volant des conducteurs âgés. Certaines données de la littérature suggèrent un lien entre la santé cognitive des personnes âgées et la préservation des compétences de conduite sécuritaire. Toutefois, les travaux du professeur Gagnon exposent clairement l’absence de consensus quant aux modes d’évaluation efficaces permettant la discrimination des conducteurs à risque des conducteurs sécuritaires. L’usage de modèles multifactoriels semble offrir une piste de solution prometteuse. Quoique traditionnellement conçue de manière unidirectionnelle, certains travaux invitent à considérer la relation vieillissement réussi et conduite automobile comme étant de nature bidirectionnelle. Ainsi, la conduite automobile pourrait contribuer à la santé cognitive des personnes âgées.
3Le professeur Sylvie Belleville et ses collègues Sylvia Villeneuve, Frédéric Peters et Stéphane Protat mettent en relation les facteurs de risque vasculaire et les changements neurocognitifs dans le trouble cognitif léger. Ses travaux et ceux issus de la littérature établissent une relation entre le fardeau vasculaire et les fonctions exécutives ainsi qu’avec certains aspects plus stratégiques de la mémoire épisodique dans le trouble cognitif léger de type vasculaire. La présence et la nature des symptômes neuropsychiatriques chez les personnes atteintes d’un trouble cognitif léger de type vasculaire sont également discutées. Enfin, l’imagerie cérébrale est proposée comme outil diagnostique dans les cas de démences avérées ou au stade préclinique d’étiologie mixte, incluant la démence vasculaire.
4Dans un troisième article, les Drs Grégoria Kalpouzos, Francis Eustache et Béatrice Desgranges présentent une synthèse qui contraste le déclin neuronal associé à la mémoire épisodique dans le vieillissement normal et dans la maladie d’Alzheimer. Les auteurs nous rappellent que le déclin de la mémoire épisodique est au cœur des changements cognitifs associés à la maladie d’Alzheimer et que le profil diffère de celui rencontré au cours du vieillissement typique. De même, sur la base de leur synthèse de la littérature, ils concluent à un patron cérébral distinct puisque les régions les plus atteintes dans la maladie d’Alzheimer sont parfois celles qui sont les mieux préservées dans le vieillissement. Enfin, la revue porte également sur les mécanismes compensatoires rencontrés au cours du vieillissement et sur la façon dont ils pourraient être implémentés sur le plan neurobiologique.
5Le professeur Patrick Lemaire discute de l’éclairage nouveau qu’apporte l’étude des variations stratégiques sur les modèles du vieillissement cognitif. Il présente un cadre conceptuel permettant de distinguer différents composants stratégiques. De plus, comme il n’est pas toujours facile de mettre en évidence les stratégies utilisées pour résoudre une tâche, il discute comment les manipulations expérimentales pourraient permettre d’élucider le type de stratégie mis en place ou encore permettre de le contrôler. Il appuie son argumentation sur ses nombreux travaux dans le domaine de la résolution de problèmes arithmétiques et conclut en proposant que ce type d’examens soit étendu à d’autres systèmes cognitifs, dont la mémoire.
6juin 2010