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Article de revue

Schelling : construction de l'art et récusation de l'esthétique

Pages 29 à 41

Notes

  • [1]
    F. W. J. SCHELLING, Schellings Werke, éd. par Manfred Schröter (édition dite du jubilé, fac-similé de l’édition originale de 1856-1861), Munich, 1927 sq. (cité par la suite : SW), ici t. V, p. 361; id., Philosophie de l’art, trad. fr. de Caroline Sulzer et Alain Pernet, Grenoble, Jérôme Millon, 1999 (cité par la suite : Ph. A.), p. 52-53.
  • [2]
    SW, VII 291.
  • [3]
    Théogonie, v. 116-120; ARISTOTE, Métaphysique, A 4,984 b 28 et sq., et L 6,1072 a 7-8.
  • [4]
    SW, V 351.
  • [5]
    Ibid. = Ph. A., 53 (traduction modifiée).
  • [6]
    Alexander Gottlieb BAUMGARTEN, Metaphysica (Editio VII), Halle, 1779, Hildesheim, rééd. Olms, 1982, p. 187.
  • [7]
    I. KANT, Kritik der reinen Vernunft, A 21-B 36; trad. par Tremesaygues-Pacaud, p. 67.
  • [8]
    Jean BEAUFRET, Leçons de philosophie, éd. Philippe Fouillaron, Paris, Seuil, 1998, t. II, p. 143.
  • [9]
    Gérard LEBRUN, Kant et la fin de la métaphysique – Essai sur la Critique de la faculté de juger, Paris, Armand Colin, 1970, p. 350.
  • [10]
    SW, VI 8; trad. fr. de P. David, in revue Philosophie, no 22, Éd. de Minuit, printemps 1989, p. 8.
  • [11]
    Trad. fr. de Ph. Lacoue-Labarthe et J.-L. Nancy, in L’Absolu littéraire, Paris, Seuil, 1978, p. 85. Il s’agit ici de l’adjectif esthétique (ästhetisch), non du substantif qui désigne la discipline.
  • [12]
    Trad. cit., p. 82, fragment 12.
  • [13]
    G. W. Fr. HEGEL, Vorlesungen über die Ästhetik, Werke in zwanzig Bänden, Theorie Werkausgabe, Francfort/Main, Suhrkamp Verlag, 1970, t. XIII, p. 13; trad. par Jean-Pierre Lefebvre et Veronika von Schenck : Cours d’esthétique, Paris, Aubier, 1995, t. I, p. 5.
  • [14]
    SW, V 463 = Phil. A., 153 (trad. modifiée).
  • [15]
    SW, I 459.
  • [16]
    SW, V 557 = Phil. A., 238.
  • [17]
    SW, V 520 = Phil. A., 207.
  • [18]
    SW, V 350.
  • [19]
    SW, V 360 = Phil. A., 51.
  • [20]
    X. TILLIETTE, Schelling – une philosophie en devenir, Paris, Vrin, 1969, rééd. 1992, t. I, p. 450.
  • [21]
    Sur le statut de la musique dans l’architectonique de la partie spéciale de la Philosophie de l’art, signalons l’article de Luigi PAREYSON, dont nous avons proposé une traduction dans le no 62 (juin 2000) de la revue Philosophie, Éd. de Minuit, p. 20-45 : « L’esthétique musicale de Schelling ».
  • [22]
    SW, V 345.
  • [23]
    SW, V 679 = Phil. A., 338.
  • [24]
    Ästhetik, op. cit., p. 25.
  • [25]
    SW, III 269; trad. fr. de Charles Dubois, Louvain, 1978, p. 260.
  • [26]
    SW, V 655 = Phil. A., 319.
  • [27]
    Le peintre de la vie moderne, in Œuvres complètes, Paris, Gallimard, La Pléiade, 1961, p. 1154.
  • [28]
    SW, V 372 = Phil. A., 62 : « Nach meiner ganzen Ansicht der Kunst ist sie selbst ein Ausfluß des Absoluten »; « Selon toute ma conception, l’art même découle aussi [ ?] de l’Absolu ». Cf. aussi SW, V 345.
  • [29]
    SW V 364 = Phil. A., 56 (trad. modifiée).
  • [30]
    De l’Allemagne, troisième partie, chap. VII, éd. Garnier, s.d., p. 461.
  • [31]
    SW, V 480 = Phil. A., 168.
  • [32]
    SW, V 358 = Phil. A., 49 (trad. modifiée).
  • [33]
    SW, V 370 = Phil. A., 60.
  • [34]
    SW, V 604 = Phil. A., 277.
  • [35]
    SW, V 368 = Phil. A., 59.
  • [36]
    Ibid.
  • [37]
    SW, III 627.
  • [38]
    SW, X 177; trad. fr. de J.-Fr. Marquet, Contribution à l’histoire de la philosophie moderne, Paris, PUF, 1983, p. 196.
  • [39]
    Kantstudien, 1959-1960, p. 14-20. Cf. aussi, du fils de Schelling, la Préface au t. III des Werke (SW, V, XXI).
  • [40]
    « Schelling et le destin de l’art », in Restitutions, Paris, Vrin, 2001.
  • [41]
    SW, V 591 = Phil. A., 84.
  • [42]
    J.-Fr. MARQUET, op. cit., p. 74.
  • [43]
    De l’Allemagne, op. cit., p. 460. Le parallélisme est frappant avec ce qu’écrit Caroline Sulzer dans la préface à sa traduction française (en collaboration avec Alain Pernet) de la Philosophie de l’art (éd. cit., p. 42-43) : « À vrai dire, on peut reprocher à la Philosophie de l’art une certaine rigidité systématique, notamment dans la juxtaposition tranchée d’une partie proprement spéculative et d’une partie illustrative passant en revue l’ensemble des disciplines artistiques de façon extrêmement détaillée et documentée. Au-delà de cette réserve somme toute bien légère, il faut reconnaître le mérite de Schelling sur de nombreux autres points de la Philosophie de l’art. Schelling a tout d’abord réussi à construire une structure systématique solide, basée sur un schéma ternaire qu’il a toujours respecté dans la partie générale et en grande partie dans la partie spéciale, à savoir les trois puissances, les trois dimensions, les trois arts plastiques, les trois arts de la parole, etc. »
  • [44]
    X. TILLIETTE, op. cit., respectivement p. 491 et 495.
  • [45]
    Cité par Jean-Yves TADIÉ, Marcel Proust, Paris, Gallimard, 1996, p. 254.
  • [46]
    À la recherche du temps perdu (Le Temps retrouvé), Clarac (éd.), Paris, Gallimard (Pléiade), 1954, t. III, p. 992.
  • [47]
    « Du nouveau sur Proust », in revue Études, avril 1982 (356/4), p. 499.
  • [48]
    J.-Y. TADIÉ, op. cit., p. 251. Plus généralement, à propos de Proust, se lit encore l’affirmation suivante à la page 413 du même ouvrage : « [...] la source de sa pensée sur l’artiste se trouve, non pas comme on a cherché à le prouver avec fracas, dans la philosophie allemande, mais dans la pensée de langue anglaise ».
  • [49]
    Cité in M. PROUST, Correspondance, Philip Kolb (éd.), Paris, Plon, 1970, t. I, p. 127, n. 6.
  • [50]
    Cf. Contre Sainte-Beuve, P. Clarac (éd.), Paris, Gallimard (Pléiade), 1971, p. 392.
  • [51]
    Éd. cit., p. 899.
  • [52]
    SW, V 484 = Phil. A., 171.
  • [53]
    SW, V 676 = Phil. A., 336.
  • [54]
    SW, V 391 = Phil. A., 84.
  • [55]
    SW, V 394 et 399 = Phil. A., 87 et 92.
  • [56]
    Éd. cit., p. 895.
  • [57]
    G. DELEUZE, Proust et les signes, Paris, PUF, 1964, rééd. 1998, p. 54.
English version

1Le terme d’esthétique, si l’on fait abstraction de son acception proprement kantienne, est susceptible d’être pris lato sensu, en un sens large où il désigne tout ce qui a trait à l’art ou au beau artistique, ou stricto sensu, comme appellation contrôlée et pleinement assumée comme telle. Si l’on adopte ce second point de vue, philosophiquement plus rigoureux et à l’encontre de l’usage courant, ce n’est pas sans quelque paradoxe, ni même sans une certaine violence que l’on peut inscrire sous la rubrique de l’esthétique la « science de l’art » ou « philosophie de l’art » élaborée et enseignée par Schelling, à Iéna puis à Wurzbourg, entre 1802 et 1805. Une telle inscription n’est possible en effet qu’au prix d’une violence attentatoire à la lettre même des textes schellingiens, par où il apparaît que l’éventuelle contribution de Schelling à la fondation de l’esthétique moderne, à l’orée du XIXe siècle, témoigne aussi d’un écart, d’une divergence foncière, bref, d’une essentielle dissidence par rapport au projet et aux présupposés qui sous-tendent et animent celle-ci. D’emblée, Schelling tient en effet à démarquer son projet – celui, répétons-le, d’une philosophie (= science) de l’art – de toute esthétique, par une mise en garde à l’adresse de ses auditeurs, à laquelle la postérité aura souvent fait la sourde oreille :
« Je vous prierai tout d’abord de ne pas confondre cette science de l’art avec tout ce que l’on a exposé jusqu’ici sous tel ou tel nom, comme ceux d’esthétique ou de théorie des beaux-arts et des belles sciences. Il n’existe pas encore de théorie philosophique ou scientifique sur l’art » [1]. Cette « théorie philosophique ou scientifique sur l’art », théorie non esthétique, qui n’existe pas encore, c’est celle-là même que Schelling entend fonder en dévoilant la genèse de l’art, selon la formule du discours de 1807 sur les arts plastiques, où il s’agit de faire droit à la tentative de « dévoiler l’œuvre d’art en général, quant à son essence, et en quelque sorte la faire surgir devant l’œil spirituel » [2]. Il s’agit de la genèse de l’art à partir de l’absolu en sa théophanie, à la faveur d’une histoire des dieux (= mythologie, religion immémoriale du genre humain), et par là d’un procès théogonique de la conscience humaine littéralement « enthousiaste », en proie au dieu qui l’exalte, l’excède et l’accable, d’une théogonie où l’assemblée des dieux, ou plutôt l’université des dieux vient répondre à ce que l’auteur du Plus ancien programme systématique de l’idéalisme allemand appelait le « polythéisme de l’imagination et de l’art ». La mythologie en question est, comme son nom l’indique, la mythologie grecque, telle qu’elle sera tenue ultérieurement pour la clef des autres mythologies (égyptienne et indienne). Les dieux grecs, comme nous le verrons, signalent l’avènement de la forme là où ne régnaient auparavant, selon l’expression d’Hésiode qui avait frappé Aristote, que « le chaos et la nuit » [3]. La déclaration liminaire de la Philosophie de l’art, à savoir de cette généalogie de l’art à partir de l’absolu que Schelling appelle sa « construction », fait écho à celle de la dernière leçon, strictement contemporaine, des Leçons sur la méthode des études académiques :
« Une telle construction de l’art n’est toutefois susceptible d’être comparée avec rien de ce qui a existé, jusqu’au temps présent, sous le nom d’esthétique, de théorie des beaux-arts et des belles sciences, ou sous tout autre nom » [4]. On ne saurait le dire plus clairement que ne le fait Schelling lui-même : la philosophie de l’art de Schelling n’est pas une esthétique. Elle récuse elle-même cette appellation. Le philologue et historien de la philosophie, en Schelling, rattache bien l’esthétique à Baumgarten :
« Toute théorie de l’art [Kunstlehre] n’a été avant Kant, en Allemagne, qu’un rejeton de l’esthétique de Baumgarten – celui-ci est, en effet, le premier à avoir utilisé cette expression » [5]. En rappelant l’origine de cette appellation, Schelling ne la rattache pas seulement à l’Æsthetica (1750) de Baumgarten, mais encore à l’école leibniziano-wolffienne dans le courant de laquelle elle s’inscrit. Sous le nom gréco-latin d’æsthetica, Baumgarten entendait, comme le précisera encore une note en allemand au § 533 de sa Metaphysica de 1779, « la science du beau » (die Wissenschaft des Schönen) [6]. Ce qui lui vaudra bientôt la reconnaissance critique de Kant, dans une note célèbre de l’Esthétique transcendantale de la Critique de la raison pure, dont nous nous contenterons de rappeler le début :
« Les Allemands sont les seuls qui se servent du mot Esthétique pour désigner ce que d’autres appellent critique du goût. Cette dénomination a pour fondement une espérance déçue qu’eut l’excellent analyste Baumgarten de soumettre le jugement critique du beau à des principes rationnels et d’y élever les règles à la dignité d’une science. Mais cet effort est vain » [7]. D’après Schelling, comme le précisera l’article nécrologique sur Kant de 1804, Kant est celui qui a ouvert la voie à une science de l’art (« il est indéniable que c’est seulement depuis Kant et par lui que l’essence de l’art a été exprimée également de façon scientifique ») et qui en a réaffirmé la dignité – assez paradoxalement, s’il est vrai qu’aux yeux de Kant « il y a dans l’art quelque chose de frelaté » [8], et dans la mesure où, pour l’auteur de la Critique de la faculté de juger, la pulchritudo adhærens s’efface devant la pulchritudo vaga (encore que cette distinction ne recouvre pas celle du beau artistique et du beau naturel), à la différence de ce « bréviaire de la beauté adhérente » que sera, selon Gérard Lebrun, « l’Esthétique de Hegel, comme tout système des beaux-arts » [9] :
« [...] en un temps qui avait tant rabaissé l’art – soit en le dissolvant en pure sentimentalité, soit en n’aspirant à rien d’autre qu’à son attrait grossier et matériel, soit encore en réclamant de lui qu’il fût édifiant ou au moins didactique, ou qu’il ait une utilité quelconque – qu’il avait totalement oublié ou méconnu la singulière souveraineté que Winkelmann et Goethe lui avaient conférée, lui, Kant, s’élève jusqu’à une idée de l’art indépendante de toute autre fin que celle qui réside en lui-même, présente la beauté dans tout ce qu’elle a d’inconditionné, et revendique la naïveté comme essence du génie artistique » [10]. Si la perfection objective interne qu’est la finalité a bien sa place dans l’univers de l’art, la perfection objective externe qu’est l’utilité n’y a pas droit de cité.

2En récusant l’appellation d’esthétique, Schelling s’accorde avec Friedrich Schlegel, dont le fragment 40 des Fragments critiques déclare : « Esthétique, au sens qui lui fut attribué et qui a cours en Allemagne, est un mot qui trahit comme on sait une égale et parfaite méconnaissance de la chose signifiée et de la langue qui la signifie. Pourquoi s’obstine-t-on à le garder ? [Warum wird es noch beibehalten ?] » [11]. Schelling et Friedrich Schlegel étaient proches au sein du cercle d’Iéna, qui comptait aussi notamment August Wilhelm et Caroline Schlegel, Tieck et Novalis, parmi les grandes figures du romantisme ou préromantisme allemand. Un autre aphorisme de Friedrich Schlegel déclare que « dans ce qu’on appelle philosophie de l’art, il manque habituellement l’une ou l’autre : ou bien la philosophie, ou bien l’art » [12]. La philosophie de l’art de Schelling ne s’inscrit évidemment pas dans la première catégorie. Hegel soulignera lui aussi, dès le début de ses Cours d’esthétique, l’impropriété du terme légué par Baumgarten, mais en soulignant que ce point purement terminologique importe peu au fond, et en retenant malgré tout le terme sanctionné par l’usage [13]. À la différence de Hegel, toutefois, Schelling se refuse à entériner l’entrée en circulation (quid juris ? ) du « concept usurpé », comme eût dit Kant. Examinant l’interprétation du sublime par Schiller, lequel reprend à son tour la distinction kantienne entre le sublime envisagé mathématiquement comme grandeur (l’immense) ou dynamiquement comme force (l’irrésistible), Schelling souligne que l’infini ne domine, dans l’intuition non sensible ou suprasensible du sublime, que pour autant qu’il est intuitionné dans l’infini sensible qu’est la nature :
« Cette intuition du sublime est, en dépit de son affinité avec l’idéel et l’éthique, une intuition esthétique, j’utilise ici pour une fois ce terme » [14].« Pour une fois » : c’est là en effet un hapax sous la plume de l’auteur de la Philosophie de l’art, appelé par le climat schillerien de l’analyse, et nullement une palinodie ou une concession à Baumgarten, dont Schelling a du reste fait l’éloge dès 1797, en lui reconnaissant le mérite trop peu signalé « d’avoir conquis pour la philosophie un nouveau domaine (celui de la métaphysique du beau) » [15]. Si Baumgarten est le père de l’esthétique, c’est Winkelmann, véritable mentor de Schelling, qui est « le père de toute la science de l’art » [16]. Deux raisons au moins semblent avoir amené Schelling à récuser la pertinence de l’appellation d’esthétique : 1. l’esthétique interprète l’art, comme son nom l’indique, à partir du sensible, « or l’art n’est pas essentiellement axé sur le sensible, mais sur une beauté élevée au-dessus de toute sensibilité » [17] – autrement dit cette « beauté absolue » évoquée par la dernière des Leçons universitaires[18], et 2. l’esthétique se comprend elle-même comme partie ou discipline de la philosophie. Sur ces deux points, la Philosophie de l’art invite à un renversement complet de perspective. La puissante originalité de la « contribution » de Schelling à la fondation de l’esthétique moderne aura donc consisté négativement, en ce sens, en une radicale mise en question des présupposés à partir desquels celle-ci s’élabore, à la faveur d’une tentative visant à « remonter aux sources véritables de l’art » [19] pour fonder une théorie non esthétique de l’art qui puisse mériter le nom de science ou philosophie de l’art. Il est frappant de constater, jusque chez les interprètes les plus avertis de la pensée de Schelling, tels que Xavier Tilliette ou Luigi Pareyson, l’usage récurrent du terme d’esthétique pour qualifier sa philosophie de l’art, nonobstant la lettre des textes schellingiens, comme si Schelling avait mené sur ce point un combat au fond perdu d’avance en ramant à contre-courant de l’usage qui s’est imposé. Le seul titre de la thèse de Jean Gibelin, L’Esthétique de Schelling d’après la philosophie de l’art (Clermont-Ferrand, 1934), passe précisément sous silence le fait que la Philosophie de l’art se refuse expressément à être une esthétique. On peut en outre ne pas souscrire entièrement au jugement de Xavier Tilliette sur la Philosophie de l’art de Schelling : « La Philosophie de l’Art, enseignée à Iéna, puis à Würzburg, est l’un des ouvrages de Schelling qui ont le plus vieilli, comme d’ailleurs la massive Esthétique de Hegel » [20]. S’agissant de Schelling, on trouve déjà ici en creux une indication sur la postérité de sa Philosophie de l’art, notamment de sa partie spéciale, en raison de son caractère lacunaire, hâtivement documenté (Dresde pour la peinture, le Dictionnaire de Rousseau pour la musique [21] ), parfois anecdotique (les bêlements de mouton dont Haydn aurait dû se dispenser dans La Création, la Henriade de Voltaire faisant honte aux Français, les Anglais les moins bien placés pour juger de Shakespeare, etc.). La difficulté majeure semble avoir consisté pour Schelling à rejoindre l’art en ses œuvres, en d’autres termes, à articuler partie générale et partie spéciale de la philosophie de l’art. Ce que nous entendons communément par « art » ou par « œuvre d’art » semble plutôt trouver son répondant dans la partie spéciale – car ni l’univers ni l’Église ne sont d’emblée tenus pour des œuvres d’art. Mais qui plus est, si « rien de ce qu’une manière de voir communément répandue nomme art ne saurait retenir l’attention du philosophe » [22], les croyances que nous pouvions estimer les mieux établies se trouvent elles aussi ébranlées. Exemple : « il n’est pas exagéré de dire qu’il n’existe jusqu’ici que deux romans, le Don Quichotte de Cervantès et le Wilhelm Meister de Goethe » [23]. C’est dire à quel point il s’agit, sous le nom de construction de l’art, d’une véritable reconstruction, à visée transcendantale, faisant fi, en une souveraine désinvolture, des critères empiriques : construire l’art, c’est au fond en instruire la genèse idéale. À la limite, il faut faire comme si l’art n’existait pas afin d’en ressaisir d’autant mieux la nécessité. Mais c’est dire aussi ce que l’entreprise a de profondément novateur. À la différence du motif hégélien de la fin de l’art (du moins « quant à sa suprême destination » [24] ), l’investigation de Schelling invite à s’interroger sur son commencement ou son ultime récapitulation. Le royaume de l’art appartient-il au passé comme un déjà plus, ou bien relève-t-il du pas encore, dans l’attente du moment où toutes les sciences reflueront comme autant de fleuves singuliers dans l’universel océan de la poésie, selon les termes du finale grandiose du Système de l’idéalisme transcendantal[25] ? L’histoire de l’art, marquée par le contraste entre art antique et art moderne, n’est-elle que l’interlude entre un flux (« cet ardent sanglot qui roule d’âge en âge ») et un reflux, entre ces forces respectivement centrifuge et centripète que sont une Iliade et une Odyssée[26] ? Sans prétendre instruire véritablement ici cette question, qui engagerait une confrontation entre Schelling et Hegel, mais aussi Hölderlin, et avant de nous engager sur le terrain de la question épineuse et encore peu défrichée de la postérité ou de la réception de la philosophie schellingienne de l’art, commençons par en rappeler quelques grands traits.

3Si l’art n’est pas essentiellement, mais accessoirement axé sur le sensible – ce qui fait tout son attrait mais ne fait que son attrait, on songe ici au Reiz dont parlait Kant, mais aussi à ce que Baudelaire appelle « l’enveloppe amusante, titillante, apéritive du divin gâteau » [27] –, il est en revanche non pas accessoirement mais essentiellement tributaire de l’absolu, dont il est, comme on voudra dire, une émanation, une effusion, un épanchement ou une effluence (Ausfluß) [28]. L’esthétique est une partie ou une discipline de la philosophie, la philosophie de l’art, quant à elle, n’est pas une partie de la philosophie, comme s’il y avait autant de philosophies que d’objets – une philosophie de l’agriculture, en attendant sans doute une philosophie du charriage (Fuhrwerk) ironise Schelling [29]. « Il n’y a qu’une philosophie, selon l’opinion de Schelling, ou il n’y en a point », avait noté Madame de Staël [30]. Il n’y a qu’une philosophie, une et indivise (la raison n’étant pas plurielle, d’où le « monothéisme de la raison » dans le Plus ancien programme systématique de l’idéalisme allemand), et « la philosophie de l’art est la philosophie universelle elle-même, présentée sous la puissance de l’art » [31]. Elle n’est que la reprise, sous un autre exposant, de la philosophie de la nature appliquée à « ces plantes bien plus hautement organisées et en elles-mêmes autrement plus inextricables que l’on nomme des œuvres d’art » [32], en tant que « plantes achevées » [33] qui, avec la statuaire, en passant par l’intervention de l’horizontalité dans le règne animal qui assure la transition de la plante à l’homme, aboutit au complet retournement de la plante [34]. Présentation de l’univers sous la forme de l’art, la science ou philosophie de l’art n’est pas une simple théorie de l’art :
« Ce n’est, en effet, que pour autant qu’elle présente en elle l’Absolu que [...] la science de l’art est philosophie effective, [...] philosophie de l’art » [35]. Le beau est certes toujours particulier (« bizarre », dira Baudelaire), insularisé en une œuvre, le tableau dans son cadre, la statue sur son socle. Mais seul le particulier susceptible d’accueillir en lui-même l’infini (c’est là l’idée d’Ineinsbildung, l’uniformation, l’esemplasy de Coleridge acclimatée par Gabriel Marcel) est « objet de construction et donc de philosophie » [36]. Loin du foisonnement empirique des œuvres, l’art n’exhibe l’Absolu que pour autant qu’il se laisse construire, autrement dit se laisse assigner sa place dans l’univers, la place qu’il occupe dans l’univers qu’il reflète. Si la philosophie de l’art parle bien de l’art, ou du moins finit bien par en parler dans la partie dite spéciale, c’est de Dieu qu’elle part (« l’Absolu ou bien Dieu »), en qui l’univers est formé comme œuvre d’art absolue (§ 21), c’est-à-dire du principe qui constitue la pierre angulaire de la philosophie de l’identité (A = A). Il n’y a d’ailleurs qu’une seule « œuvre d’art absolue », dont il peut simplement exister bien des « exemplaires » différents. L’art est à la fois le miroir, l’organon et le document de la philosophie [37]. Le fait même que la philosophie de l’art parte de « l’Absolu ou bien Dieu » suffit à indiquer toute la distance qui la sépare d’une esthétique, sur laquelle on ne la rabat que par convention de langage. La philosophie de l’art est donc philosophie, à savoir, selon une équation récurrente qui constitue un leitmotiv presque obsédant des premiers écrits de Schelling, « science de l’absolu », dans la présentation ou la Darstellung qui en est fournie sous la puissance (Potenz) de l’art. Le vocabulaire de Schelling (Darstellung, construction, symbole, schématisme) suffit à attester qu’il se situe sciemment dans le prolongement de l’auteur de la Critique de la faculté de juger – « l’œuvre la plus profonde de Kant, celle qui aurait sans doute donné une autre orientation à toute sa philosophie si, au lieu de finir par elle, c’est par elle qu’il avait pu commencer », comme Schelling dira ultérieurement [38] –, fût-ce volontiers à travers le prisme de la lecture schillerienne.

4Quant à la réception de la Philosophie de l’art, elle semble avoir accumulé les obstacles, et cela au premier chef du fait même de son auteur, obstacles qui sont de trois ordres. Tout d’abord, il faut mentionner le « testament littéraire » rédigé par Schelling durant les dernières années de sa vie, publié par Horst Fuhrmans [39], ne retenant de la Philosophie de l’art, pour la publication, que le chapitre sur la tragédie (qui se situe dans le droit fil de la dixième des Lettres sur le dogmatisme et le criticisme) et quelques autres extraits. En deuxième lieu, il faut noter que sa publication (nonobstant les volontés testamentaires) n’intervient et ne pouvait intervenir qu’à titre posthume, en 1859, quelques années après la mort du philosophe. La Philosophie de l’art fait donc partie du volumineux Nachlaß de Schelling, non de l’œuvre publiée et parfois rééditée de son vivant. Enfin, après 1808, la question de l’art n’est plus abordée de manière centrale ou thématique dans les écrits postérieurs aux cours d’Iéna et de Wurzbourg, depuis les textes qui lui succèdent immédiatement jusqu’aux monuments de la dernière philosophie, fût-ce sur son versant « positif » ou « historique ».

5Ce n’est pas ici le lieu de s’interroger sur le jugement que le vieux Schelling pouvait porter, quelque cinquante années plus tard, et après les mues successives de son système, sur sa philosophie de l’art. On peut en revanche s’interroger sur l’éclipse de la philosophie de l’art après l’enseignement de Wurzbourg. C’est ce qu’a fait Jean-François Marquet [40], qui voit dans la philosophie de la mythologie une reprise de la philosophie de l’art au sein de la philosophie de la mythologie. Ayant toujours une longueur d’avance sur la mue prochaine de son système (l’art dans la nature, la mythologie dans l’art, la Révélation dans la mythologie), Schelling n’avait pas manqué de signaler l’impact de la mythologie au sein de la philosophie de l’art : la mythologie grecque comme suprême archétype du monde poétique, la théogonie, la nécessité pour l’art de l’idée des dieux, et surtout l’analogie directrice selon laquelle les dieux sont à l’art ce que les Idées sont pour la philosophie [41]. Bref, tout art est mythologique [42], et de la philosophie de l’art à la philosophie de la mythologie (c’est-à-dire de la philosophie une et indivise à elle-même envisagée sous un autre exposant) il n’y a en ce sens que transhumance d’un même peuple de dieux, ou une autre version de l’osmose entre les statues et les dieux.

6Il n’en demeure pas moins que la publication à titre posthume de la Philosophie de l’art en 1859 ne lui aura pas permis de trouver l’écho qu’elle méritait, et qu’elle aurait peut-être trouvé du vivant de Schelling. Connue trop tardivement, elle n’aura de carrière que souterraine, éclipsée par les préoccupations et les engouements d’une autre époque, et semble avoir sombré corps et biens dans ce qu’on a appelé « l’effondrement de l’idéalisme allemand » durant la seconde moitié du XIXe siècle. Relayant Schopenhauer et sa « métaphysique de la musique », Nietzsche ne va pas tarder à s’attaquer à la question de la tragédie – la seule dont Schelling avait voulu préserver les développements qui lui étaient consacrés dans sa Philosophie de l’art– ou plus précisément à la question de la naissance de la tragédie à partir de l’esprit de la musique, où Dionysos demeure une figure centrale et tutélaire. Comme le notait encore Madame de Staël, dans ce qui constitue sans doute l’un des tout premiers échos, en domaine francophone, de la philosophie de l’art de Schelling : « Schelling a bien plus de connaissance de la nature et des beaux-arts que Fichte; et son imagination pleine de vie ne saurait se contenter des idées abstraites ; mais, de même que Fichte, il a pour but de réduire l’existence à un seul principe », en l’occurrence la réunion en une harmonie complète des deux puissances que sont l’idéal et le réel, « principe unique et absolu de l’univers organisé » dont la mystérieuse structure ternaire a fourni à Schelling « les applications les plus ingénieuses » en ce qu’il a cru la retrouver dans les beaux-arts [43].

7Le destin posthume de la Philosophie de l’art est évidemment lié à celui de la pensée de Schelling dans son ensemble : « Déjà, à la fin de sa vie, sa renommée, très contestée en Allemagne, brillait en France d’un éclat inaltéré », même si « c’est dans le monde slave que Schelling a trouvé les plus ferventes et durables adhésions » [44] (Soloviev, Berdiaev, Chestov). Interdite de publication par volonté testamentaire, puis publiée à titre posthume, la Philosophie de l’art avait toutes les chances de demeurer une contrée superbement ignorée dans un paysage lui-même peu familier. Mieux connu ou moins méconnu, le Discours sur les arts plastiques de 1807, traduit en français quatre décennies plus tard, n’en véhiculera pas moins quelques thèses sur l’art (la compénétration de la nature et de l’art, l’opposition entre la manière plastique ou antique et la manière moderne ou picturale, la plénitude de la forme comme abolition de la forme). Ravaisson et Secrétan, puis Lachelier et Boutroux, Gabriel Séailles ont pu relayer certains aspects de ce qu’on appelait alors le « schellingisme », arrêté à la philosophie de l’identité où l’art se profile à l’horizon du « système de l’idéalisme transcendantal ». Il est admis que Proust a consulté le recueil Bénard, comprenant le Discours sur les arts plastiques. C’est sur l’éventuelle filiation entre Schelling et Proust, précisément, que nous aimerions, pour conclure, proposer quelques pistes en partie déjà explorées.

8En matière d’esthétique allemande (toutes approches confondues), c’est Gabriel Séailles, auteur d’une thèse sur Le génie dans l’art, qui semble avoir été un passeur d’idées venues d’outre-Rhin : l’art comme « contemplation inspirée », l’œuvre d’art comme continuation de la nature, l’idée que dans les profondeurs de l’esprit « le travail inconscient continue le travail réfléchi et prépare les trouvailles soudaines qui surprennent la conscience de l’artiste » [45] : c’est surtout par cette opposition entre activité consciente et activité inconsciente dans la production artistique (production de la nature agissant comme liberté et de la liberté agissant comme nature, ce qui n’est possible que par le génie) que Schelling a prolongé la troisième Critique de Kant et que, par ailleurs, il a eu des successeurs. C’est un thème récurrent chez Proust que l’œuvre se fait malgré son auteur, et il n’est pas jusqu’à l’énigme de la mémoire involontaire qui ne puisse trouver ici un éclairage. C’est assurément le nom de Schopenhauer qui vient sous la plume de Proust, ou de ses personnages, comme Mme de Cambremer : « Relisez ce que Schopenhauer dit de la musique » [46]. Les noms de Schopenhauer et de Schelling, lequel ignora d’ailleurs superbement Schopenhauer, ne s’en trouvent pas moins souvent associés, que ce soit pour les rattacher à Proust ou pour les en détacher tout aussi solidairement. « Par l’intermédiaire de Gabriel Séailles, Proust trouve en Allemagne ses maîtres à penser, Schopenhauer et Schelling », peut écrire Xavier Tilliette [47]. Sed contra, un récent éditeur et biographe de Proust déclare sans ambages, à propos de la transmission de l’idéalisme kantien au jeune Marcel Proust par son professeur de philosophie Alphonse Darlu, ainsi que de « la rigueur de l’analyse, qui fuit l’imprécision et le vaporeux chers aux symbolistes et parfois à Bergson » : « Voilà ce qui empêche de faire de Proust un héritier du romantisme allemand et de la philosophie de Schelling, de Schopenhauer » [48]. L’enseignement d’Alphonse Darlu aurait donc préservé le jeune Marcel Proust de toute influence schellingienne, à en croire le récent biographe de celui-ci. Si Proust a pu voir en Darlu, figure aujourd’hui bien oubliée, « un grand penseur », « l’homme qui a eu la plus grande influence sur ma pensée », il notera toutefois plus tard sur un carnet de travail : « aucun homme n’a jamais eu d’influence sur moi (que Darlu et je l’ai reconnue mauvaise) » [49]. Si l’influence de Darlu a préservé Proust de Schelling et de Schopenhauer, c’est en luttant contre cette influence que Proust est devenu lui-même, donc peut-être en retrouvant à sa façon les mauvaises fréquentations dont cette influence avait voulu le préserver. L’argument se retourne.

9Si Proust n’est pas un héritier direct de Schelling, en serait-il un « épigone lointain » ? C’est la thèse soutenue par Anne Henry, dans son livre Marcel Proust. Théories pour une esthétique (Klincksieck, 1981). Il serait sans doute fastidieux et peut-être vain de chercher à reconstituer par quels canaux, quelles influences, quelles composantes atmosphériques aussi une présence secrète et diffuse du « schellingisme » peut être attestée dans la Recherche du temps perdu. C’est plutôt dans la parenté de certains thèmes, de certains motifs, de certaines intuitions fondamentales qu’il convient de rechercher, le cas échéant du côté de Schelling, la « petite musique » métaphysique latente qui accompagne les développements de la Recherche, dont l’auteur a très tôt déclaré que « le littérateur et le poète peuvent aller [...] aussi profond dans la réalité des choses que le métaphysicien même », fût-ce par un « autre chemin », délaissant « l’aide du raisonnement » au profit de « l’élan du sentiment » [50].

10On peut lire dans Le Temps retrouvé[51] cette note de Proust : « Chaque personne qui nous fait souffrir peut être rattachée par nous à une divinité dont elle n’est qu’un reflet fragmentaire et le dernier degré, divinité (Idée) dont la contemplation nous donne aussitôt de la joie au lieu de la peine que nous avions. Tout l’art de vivre, c’est de ne nous servir des personnes qui nous font souffrir que comme d’un degré permettant d’accéder à leur forme divine et de peupler ainsi joyeusement notre vie de divinités. » Chaque souffrance redevient ainsi à sa façon « cri pétrifié sur les lèvres de Niobé » [52], lorsqu’elle est transfigurée ou métamorphosée par « le miracle de l’art », et rejoint dès lors la mythologie, ne serait-ce qu’au sein de cette « mythologie partielle » qu’est ou du moins que devrait être, selon Schelling, chaque roman [53]. Mais on notera surtout l’assimilation schellingienne (et plotinienne) des divinités aux Idées : « L’Idée des dieux est nécessaire à l’art [...]. Ce que les Idées sont pour la philosophie, les dieux le sont pour l’art, et réciproquement » [54]. Si les personnes qui nous font souffrir ne sont qu’autant de « reflets fragmentaires » de divinités-Idées dont la contemplation nous réserve de la joie, c’est grâce à l’art que notre vie peut ainsi se peupler joyeusement de divinités. Les dieux – c’est-à-dire l’avènement de la forme, ceux qui repoussent la nuit et le chaos initial, et tels qu’« ils reforment nécessairement entre eux une totalité, un monde » [55]. Avènement de la forme, c’est-à-dire du même coup de la différenciation, de la différence, de cette différence qualitative dont parle Proust dans Le Temps retrouvé, « cette différence qualitative qu’il y a dans la façon dont nous apparaît le monde, différence qui, s’il n’y avait pas l’art, resterait le secret éternel de chacun » [56]. On a pu dire de Proust qu’il était leibnizien [57]. Peut-être serait-on au moins aussi fondé à se demander s’il n’était pas singulièrement schellingien.

Notes

  • [1]
    F. W. J. SCHELLING, Schellings Werke, éd. par Manfred Schröter (édition dite du jubilé, fac-similé de l’édition originale de 1856-1861), Munich, 1927 sq. (cité par la suite : SW), ici t. V, p. 361; id., Philosophie de l’art, trad. fr. de Caroline Sulzer et Alain Pernet, Grenoble, Jérôme Millon, 1999 (cité par la suite : Ph. A.), p. 52-53.
  • [2]
    SW, VII 291.
  • [3]
    Théogonie, v. 116-120; ARISTOTE, Métaphysique, A 4,984 b 28 et sq., et L 6,1072 a 7-8.
  • [4]
    SW, V 351.
  • [5]
    Ibid. = Ph. A., 53 (traduction modifiée).
  • [6]
    Alexander Gottlieb BAUMGARTEN, Metaphysica (Editio VII), Halle, 1779, Hildesheim, rééd. Olms, 1982, p. 187.
  • [7]
    I. KANT, Kritik der reinen Vernunft, A 21-B 36; trad. par Tremesaygues-Pacaud, p. 67.
  • [8]
    Jean BEAUFRET, Leçons de philosophie, éd. Philippe Fouillaron, Paris, Seuil, 1998, t. II, p. 143.
  • [9]
    Gérard LEBRUN, Kant et la fin de la métaphysique – Essai sur la Critique de la faculté de juger, Paris, Armand Colin, 1970, p. 350.
  • [10]
    SW, VI 8; trad. fr. de P. David, in revue Philosophie, no 22, Éd. de Minuit, printemps 1989, p. 8.
  • [11]
    Trad. fr. de Ph. Lacoue-Labarthe et J.-L. Nancy, in L’Absolu littéraire, Paris, Seuil, 1978, p. 85. Il s’agit ici de l’adjectif esthétique (ästhetisch), non du substantif qui désigne la discipline.
  • [12]
    Trad. cit., p. 82, fragment 12.
  • [13]
    G. W. Fr. HEGEL, Vorlesungen über die Ästhetik, Werke in zwanzig Bänden, Theorie Werkausgabe, Francfort/Main, Suhrkamp Verlag, 1970, t. XIII, p. 13; trad. par Jean-Pierre Lefebvre et Veronika von Schenck : Cours d’esthétique, Paris, Aubier, 1995, t. I, p. 5.
  • [14]
    SW, V 463 = Phil. A., 153 (trad. modifiée).
  • [15]
    SW, I 459.
  • [16]
    SW, V 557 = Phil. A., 238.
  • [17]
    SW, V 520 = Phil. A., 207.
  • [18]
    SW, V 350.
  • [19]
    SW, V 360 = Phil. A., 51.
  • [20]
    X. TILLIETTE, Schelling – une philosophie en devenir, Paris, Vrin, 1969, rééd. 1992, t. I, p. 450.
  • [21]
    Sur le statut de la musique dans l’architectonique de la partie spéciale de la Philosophie de l’art, signalons l’article de Luigi PAREYSON, dont nous avons proposé une traduction dans le no 62 (juin 2000) de la revue Philosophie, Éd. de Minuit, p. 20-45 : « L’esthétique musicale de Schelling ».
  • [22]
    SW, V 345.
  • [23]
    SW, V 679 = Phil. A., 338.
  • [24]
    Ästhetik, op. cit., p. 25.
  • [25]
    SW, III 269; trad. fr. de Charles Dubois, Louvain, 1978, p. 260.
  • [26]
    SW, V 655 = Phil. A., 319.
  • [27]
    Le peintre de la vie moderne, in Œuvres complètes, Paris, Gallimard, La Pléiade, 1961, p. 1154.
  • [28]
    SW, V 372 = Phil. A., 62 : « Nach meiner ganzen Ansicht der Kunst ist sie selbst ein Ausfluß des Absoluten »; « Selon toute ma conception, l’art même découle aussi [ ?] de l’Absolu ». Cf. aussi SW, V 345.
  • [29]
    SW V 364 = Phil. A., 56 (trad. modifiée).
  • [30]
    De l’Allemagne, troisième partie, chap. VII, éd. Garnier, s.d., p. 461.
  • [31]
    SW, V 480 = Phil. A., 168.
  • [32]
    SW, V 358 = Phil. A., 49 (trad. modifiée).
  • [33]
    SW, V 370 = Phil. A., 60.
  • [34]
    SW, V 604 = Phil. A., 277.
  • [35]
    SW, V 368 = Phil. A., 59.
  • [36]
    Ibid.
  • [37]
    SW, III 627.
  • [38]
    SW, X 177; trad. fr. de J.-Fr. Marquet, Contribution à l’histoire de la philosophie moderne, Paris, PUF, 1983, p. 196.
  • [39]
    Kantstudien, 1959-1960, p. 14-20. Cf. aussi, du fils de Schelling, la Préface au t. III des Werke (SW, V, XXI).
  • [40]
    « Schelling et le destin de l’art », in Restitutions, Paris, Vrin, 2001.
  • [41]
    SW, V 591 = Phil. A., 84.
  • [42]
    J.-Fr. MARQUET, op. cit., p. 74.
  • [43]
    De l’Allemagne, op. cit., p. 460. Le parallélisme est frappant avec ce qu’écrit Caroline Sulzer dans la préface à sa traduction française (en collaboration avec Alain Pernet) de la Philosophie de l’art (éd. cit., p. 42-43) : « À vrai dire, on peut reprocher à la Philosophie de l’art une certaine rigidité systématique, notamment dans la juxtaposition tranchée d’une partie proprement spéculative et d’une partie illustrative passant en revue l’ensemble des disciplines artistiques de façon extrêmement détaillée et documentée. Au-delà de cette réserve somme toute bien légère, il faut reconnaître le mérite de Schelling sur de nombreux autres points de la Philosophie de l’art. Schelling a tout d’abord réussi à construire une structure systématique solide, basée sur un schéma ternaire qu’il a toujours respecté dans la partie générale et en grande partie dans la partie spéciale, à savoir les trois puissances, les trois dimensions, les trois arts plastiques, les trois arts de la parole, etc. »
  • [44]
    X. TILLIETTE, op. cit., respectivement p. 491 et 495.
  • [45]
    Cité par Jean-Yves TADIÉ, Marcel Proust, Paris, Gallimard, 1996, p. 254.
  • [46]
    À la recherche du temps perdu (Le Temps retrouvé), Clarac (éd.), Paris, Gallimard (Pléiade), 1954, t. III, p. 992.
  • [47]
    « Du nouveau sur Proust », in revue Études, avril 1982 (356/4), p. 499.
  • [48]
    J.-Y. TADIÉ, op. cit., p. 251. Plus généralement, à propos de Proust, se lit encore l’affirmation suivante à la page 413 du même ouvrage : « [...] la source de sa pensée sur l’artiste se trouve, non pas comme on a cherché à le prouver avec fracas, dans la philosophie allemande, mais dans la pensée de langue anglaise ».
  • [49]
    Cité in M. PROUST, Correspondance, Philip Kolb (éd.), Paris, Plon, 1970, t. I, p. 127, n. 6.
  • [50]
    Cf. Contre Sainte-Beuve, P. Clarac (éd.), Paris, Gallimard (Pléiade), 1971, p. 392.
  • [51]
    Éd. cit., p. 899.
  • [52]
    SW, V 484 = Phil. A., 171.
  • [53]
    SW, V 676 = Phil. A., 336.
  • [54]
    SW, V 391 = Phil. A., 84.
  • [55]
    SW, V 394 et 399 = Phil. A., 87 et 92.
  • [56]
    Éd. cit., p. 895.
  • [57]
    G. DELEUZE, Proust et les signes, Paris, PUF, 1964, rééd. 1998, p. 54.
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