Notes
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[1]
La croissance de la population urbaine depuis 1950 a été extrêmement rapide, passant de 751 millions à 4,2 milliards en 2018 (soit un facteur 5 en 70 ans).
-
[2]
United Nations, Department of Economic and Social Affairs, Population Division (2018).
-
[3]
Actuellement, dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), où près de 70 % de la population vit dans des aires urbaines, les 275 métropoles de plus de 500 000 habitants concentrent à elles seules la moitié de la population et des emplois totaux de ces pays.
-
[4]
Fujita (1988).
-
[5]
Krugman (1991 et 1998).
-
[6]
Brueckner (2011).
-
[7]
Wheeler (1971).
-
[8]
En 1965, l’ingénieur américain Abel Wolman définissait le métabolisme urbain comme la somme de « tous les matériaux et toutes les commodités nécessaires pour assurer la subsistance des habitants de la ville chez eux, au travail et pendant leurs loisirs » (Wolman, 1965).
-
[9]
Les sciences sociales se sont emparées de la question de la justice territoriale dès les années 1920 et 1930, au sein du courant dit de « l’écologie urbaine » développée par l’École de Chicago, qui s’est notamment préoccupée de l’influence des facteurs spatiaux sur les phénomènes sociaux. La première occurrence du concept de « justice territoriale » dans la littérature académique remonte exactement à quatre décennies (David Harvey, Social Justice and the City, 1973).
-
[10]
Laurent (2013 et 2018).
-
[11]
Krugman (1993).
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[12]
Landes (1998).
-
[13]
« Quant à la terre, elle est sous la domination de l’homme avec toutes ses richesses. Les plaines et les montagnes sont là pour notre jouissance, les cours d’eaux, les lacs sont à nous, nous semons le blé, nous plantons des arbres, nous donnons à la terre de la fertilité par des canaux d’irrigation, nous régularisons le cours des fleuves, le rectifions, le détournons, nous nous efforçons enfin avec nos mains à créer dans la nature une seconde nature. », Cicéron, De la nature des Dieux. Livre I.
-
[14]
Ellis (2010).
-
[15]
Laurent (2017).
-
[16]
Cette question apparaît d’ailleurs explicitement dans la Charte d’Aalborg (Conférence européenne sur les villes durables à Aalborg, Danemark, le 27 mai 1994) : « Nous, villes, sommes conscientes que les populations démunies sont les plus touchées par les problèmes de l’environnement (bruit, pollution de l’atmosphère par les gaz d’échappement, insuffisance des équipements, insalubrité des logements, manque d’espaces verts) et les moins aptes à les résoudre… Nous voulons intégrer à la protection de l’environnement les exigences sociales essentielles de la population ainsi que les programmes d’action sanitaire, de l’emploi et du logement. »
-
[17]
Source : INSEE.
-
[18]
Observatoire des territoires.
-
[19]
Il importe de distinguer ici ce qui relève des déplacements des particuliers (qui représentent environ 55% des émissions) et du transport de marchandises (les 45% restant, qui se répartissent à part à peu près égale entre véhicules utilitaires légers et poids lourds).
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[20]
Sur ce point, voir notamment Paul Malliet (2018) https://www.ofce.sciences-po.fr/blog/10664-2/ et Berry et Laurent (2019) qui montrent que l’impact budgétaire de la taxe carbone française de 2018 décroît avec le niveau de vie. En particulier, le premier décile est largement plus affecté que les autres déciles. L’impact est 1,5 fois supérieur à l’impact moyen dans la population et 2,6 fois supérieur à l’impact sur les 10 % les plus riches. L’impact fléchit à partir du décile 7 et bascule sous l’impact moyen. Il en découle que l’impact sur les 6 premiers déciles est plus important que l’impact moyen, alors qu’il est moindre pour les déciles supérieurs. Toutefois ces inégalités verticales n’épuisent pas les différences d’impact de la taxe carbone au sein de la population française. On trouve ainsi que 20 % des ménages du premier décile sont plus affectés que 50 % des ménages du dixième décile.
-
[21]
Pour les pays de l’OCDE en moyenne, l’indice était de 80 en 1990 et de 107 en 2017.
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[22]
Autrement dit, l’inhalation forcée de particules fines cause au sein de la population française autant de décès que la consommation volontaire d’alcool.
-
[23]
Source : Pascal M., Crouy Chanel P. de, Corso M., Medina S., Wagner V., Goria S., et al. (2016).
-
[24]
Source : EEA (2018).
-
[25]
Le projet Aphekom (Improving Knowledge and communication for Decision Making on Air Pollution and Health in Europe) a estimé l’impact de la pollution de l’air sur la santé des 39 millions d’habitants des 25 villes européennes participant au projet.
-
[26]
Deguen, Petit, Delbarre, Kihal, Padilla, Benmarhnia, Lapostolle, Chauvin, Zmirou-Navier (2015 et 2016).
-
[27]
Source : Mairie de Paris https://www.paris.fr/pages/etat-des-lieux-de-la-qualite-de-l-air-a-paris-7101
-
[28]
Un indicateur de santé récent, l’Air Quality Life Index, estime à environ une année la perte d’espérance de vie liée à une exposition prolongée à des seuils dangereux (au sens de l’OMS) de PM 2,5, exposition prolongée qui correspond à la situation de ces « points noirs » parisiens.
- [29]
-
[30]
Klinenberg (2002).
-
[31]
Institut de veille sanitaire (2004).
-
[32]
Santé Publique France vient de publier le premier bilan humain des deux canicules de l’été 2019 (24 juin-7 juillet ; 21-27 juillet) et dénombre un total de 1 435 décès qui en seraient résulté (on parle de « surmortalité » liée à l’impact des épisodes de chaleur sur les organismes des victimes).
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[33]
Selon les Nations Unies, entre 1970 et 2010, la population mondiale a augmenté de 87 % (de 3,7 milliards à près de 7 milliards) mais dans le même temps, le nombre de personnes exposées au risque d’inondation s’est accru de 114 % (de 32 millions à 70 millions de personnes).
- [34]
-
[35]
Beucher et Reghezza (2012).
-
[36]
« Malgré les travaux lancés par le deuxième plan national santé environnement (PNSE2), les inégalités environnementales demeurent peu évaluées et donc peu traitées en tant que telles par les pouvoirs publics car il n’existe pas à ce jour des données spatialisées pour l’ensemble de ces risques et de méthodologie opérationnelle pour les additionner » in Inégalités territoriales, environnementales et sociales de santé - Regards croisés en régions : de l’observation à l’action, Ministère des Affaires sociales et de la Santé, Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, 2014.
Introduction : une révolution orpheline de définitions
1Le début du 21e siècle se caractérise par deux dynamiques territoriales de grande ampleur. La première est la révolution urbaine mondiale engagée dans la deuxième moitié du 20e siècle. Si en 1700, seulement 2 % des habitants de la planète vivaient dans les villes, puis 3 % en 1800, cette proportion monte à 15 % en 1900 puis double pour atteindre 30 % en 50 ans à peine, le seuil des 50 % étant franchi en 2007 [1]. En 2018, selon les chiffres des Nations Unies [2], 55 % de la population mondiale vivait en zone urbaine. Cette révolution est aussi celle de la taille des villes : au 21e siècle, la croissance des espaces urbains est deux fois plus rapide que celle de la population mondiale, les experts prévoyant que l’expansion physique des villes du monde au cours des trois premières décennies de ce siècle sera supérieure à celle de tous les espaces urbains depuis les origines de l’espèce humaine jusqu’à la fin du 20e siècle. À court terme, la population urbaine, qui est d’environ 4,2 milliards d’habitants en 2020, devrait atteindre 5,1 milliards d’ici 2030 (soit environ 60 % de la population mondiale), près de la moitié de celle-ci vivant dans des zones urbaines de plus d’un million d’habitants.
2Cette dynamique d’urbanisation est bel et bien planétaire, de sorte que l’on peut parler sans hyperbole d’une révolution urbaine universelle. Certes les régions de monde ne sont pas toutes également urbanisées mais elles convergent à un rythme soutenu. En tête figurent l’Amérique du Nord (avec 82 % de sa population vivant en zone urbaine en 2018), l’Amérique latine et les Caraïbes (81 %), l’Europe (74 %) et l’Océanie (68 %). À l’inverse, l’Inde compte la plus grande population rurale (893 millions), suivie de la Chine (578 millions) et l’Afrique reste essentiellement rurale, avec 43% seulement de sa population vivant en zones urbaines. Mais l’Asie comme l’Afrique devraient représenter 90 % de la croissance de la population urbaine au cours des trois prochaines décennies. Le cas du Nigéria, dont la population est devenue majoritairement urbaine en 2018, est de ce point de vue représentatif de la convergence mondiale vers l’urbanisation : alors que le pays comptait moins de 10 % de population urbaine en 1960 (3 fois moins qu’au plan mondial), on anticipe qu’en 2050 celle-ci s’élèvera à 70 %, soit le même niveau que la moyenne mondiale.
3Deuxième fait stylisé, résultant des deux précédentes tendances, la soutenabilité environnementale est désormais un enjeu urbain. Alors même que la révolution urbaine s’accélère sous nos yeux, les villes sont désormais reconnues comme les lieux clés à la fois pour l’atténuation des crises écologiques, à commencer par le changement climatique, et la réduction de la consommation des ressources naturelles qui entraîne des dommages considérables sur la biodiversité et les écosystèmes (et les zones rurales progressivement dépeuplées). Alors qu’elles n’occupent que 5 % de la surface de la planète, les villes représentent ainsi 66 % de l’énergie consommée et 75 % des émissions de CO2. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), les bâtiments sont à eux seuls la plus grande source de consommation d’énergie au monde.
4Aussi surprenant que cela puisse paraître au vu de la saillance de ces dynamiques, il n’y a pas, aujourd’hui encore, de définition formelle, universellement acceptée et usitée, de ce qu’est une ville. Il n’y a donc pas, a fortiori, de consensus académique sur ce que serait une ville soutenable.
5La première partie de cet article propose quatre approches des systèmes urbains et tente de caractériser les enjeux de soutenabilité qui s’y rattachent. La deuxième partie s’attache à mettre en lumière l’enjeu des inégalités environnementales des systèmes urbains ainsi caractérisés, à la croisée de la justice spatiale et environnementale. La troisième partie reprend les quatre approches définies à la première partie pour montrer, au sujet du cas français, comment prendre la mesure des inégalités environnementales urbaines définies à la deuxième partie.
1 – Les systèmes urbains et leur soutenabilité : quatre angles d’analyse
6On peut envisager au moins quatre définitions de ce qu’est une ville, en ayant recours à quatre disciplines différentes. La première est une définition géographique, liée aux dimensions fonctionnelle et administrative des espaces urbains. L’INSEE définit ainsi une « unité urbaine » sur la base de deux critères : la continuité des bâtiments et le nombre d’habitants. Une unité urbaine est une municipalité ou un groupe de municipalités ayant une superficie construite continue (ce qui suppose que pas plus de 200 mètres ne séparent deux bâtiments) et une population d’au moins 2 000 personnes. Les zones de peuplement humain ne correspondant pas à ces deux critères sont considérées comme des zones rurales. La définition administrative est ici combinée avec deux critères de densité. Une « grande zone urbaine » est quant à elle un ensemble de zones urbaines, d’un seul tenant et sans enclave, constituée d’un pôle urbain de plus de 10 000 emplois et de zones rurales ou périphériques dont au moins 40 % de la population résidente travaille dans le pôle urbain. On peut ajouter à ces critères le fait que les habitants d’une zone urbaine partagent ses infrastructures (routes, ponts, écoles, énergie, eau, etc.). Les villes peuvent donc être définies, dans cette première approche, comme des espaces de vie collective denses et interconnectés. La notion de « systèmes urbains » reflète ces interrelations spatiales et humaines.
7La question de la hiérarchie entre les espaces (au vu notamment de la logique contemporaine de métropolisation [3], qui voit la mise en relation d’un pôle urbain et d’une ou plusieurs périphéries) induisant des mobilités plus ou moins maîtrisées entre eux, apparaît d’emblée comme essentielle du point de vue de la soutenabilité environnementale. Elle nous amène naturellement à la deuxième approche des systèmes urbains, l’approche économique, centrée autour des notions d’agglomération et d’étalement.
8La « nouvelle économie géographique » s’est développée à la fin des années 1980 [4] et au début des années 1990 [5] pour faire de la distance (et de la proximité) l’aspect clé de l’activité économique. Le compromis entre les coûts de transport et les économies d’échelle (en raison des rendements croissants des interactions humaines) détermine ces modèles où la production doit être de préférence localisée. L’économie urbaine, dont l’intuition fondamentale est de considérer simultanément et non pas séparément les coûts de logement et de transport qui s’imposent à des individus qui cherchent leur place dans les espaces urbains, a appliqué ces enseignements au niveau des ménages en montrant que les décisions économiques de consommation sont, tout comme les choix de production, influencées par des facteurs spatiaux. Les contraintes et les choix spatiaux – dont les principales variables sont la concentration de l’emploi, la recherche d’équipements sociaux et culturels et d’aménités environnementales, le prix du foncier, le coût et la taille du logement, les coûts de déplacement – expliquent, pour reprendre les termes de Brueckner « pourquoi les villes existent » [6] et comment elles évoluent. Dans cette perspective d’économie urbaine, une ville est essentiellement un lieu d’agglomération efficace (d’emplois, de biens, de services, de personnes, d’institutions et d’idées). Mais, dans une perspective de soutenabilité, l’agglomération peut aussi s’avérer inefficace, engendrant des coûts environnementaux et sociaux considérables, comme ceux qui sont attachés à la pollution de l’air.
9Les systèmes urbains ne se limitent toutefois pas aux transactions marchandes. La troisième définition que l’on peut en donner provient de la sociologie et définit les villes comme des espaces de coopération sociale. Les recherches contemporaines indiquent ainsi que les espaces urbains sont le théâtre « d’interactions sociales » [7] qui dépassent de loin les bénéfices et les arbitrages économiques. Les personnes trouvent dans les villes de multiples sources de leur bien-être multi-dimensionnel : sécurité, mobilité et sociabilité, mais aussi culture, connaissances et émotions. L’urbaniste et activiste américaine Jane Jacobs a superbement décrit et défendu cette diversité coopérative des espaces urbains. Dans Déclin et survie des grandes villes américaines, elle écrit ainsi : « Un quartier n’est pas seulement une réunion d’immeubles, c’est un tissu de relations sociales, un milieu où s’épanouissent des sentiments et des sympathies. » Elle ajoute plus loin : « Dans nos villes, nous avons besoin de toutes les formes de diversité possibles, entremêlées de façon à se compléter les unes les autres. ». Autrement dit, les quartiers ne sont pas simplement des ensembles de bâtiments, mais des réseaux de relations sociales. La notion clé ici est celle de diversité urbaine, qui signifie pour Jacobs que les espaces urbains doivent être utilisés alternativement par différentes personnes, leur vitalité étant assurée à toute heure du jour et de la nuit par différents types de groupes sociaux. En d’autres termes, l’espace urbain doit être partagé pour remplir sa vocation essentielle. Selon cette troisième approche, une ville est, en somme, le produit de la densité humaine et de la diversité sociale.
10Enfin, la ville, entreprise de coopération humaine, est soumise aux conditions de son environnement et l’affecte en retour, au plan local et mondial. Les concepts clés ici sont ceux de métabolisme urbain et d’adaptation urbaine, notamment au changement climatique. Le métabolisme urbain [8] considère la ville comme un organisme vivant ou un écosystème et se concentre sur la quantité de ressources dont elle a besoin pour fonctionner (eau, énergie, etc.). L’adaptation urbaine fait référence au processus d’ajustement des systèmes urbains au changement environnemental global (changement climatique, destruction de la biodiversité, dégradation des écosystèmes) compte tenu de ses effets observés ou attendus.
11Chacune de ces dimensions représente une facette de la réalité des systèmes urbains contemporains et définit des enjeux propres mais aussi connexes de soutenabilité. Reliées par des arêtes (le point de contact entre les différentes facettes, comme le lien entre la forme compacte de la ville et son métabolisme au contact de la ville géographique et de la ville écologique), ces facettes forment un objet : la soutenabilité des systèmes urbains, entendue comme la possibilité de projeter le bien-être humain urbain dans le temps sous la contrainte écologique locale et globale (figure). La question de la justice environnementale apparaît, dans cette perspective de soutenabilité urbaine, de première importance.
Le Tétraèdre du système urbain
Le Tétraèdre du système urbain
2 – Justice et inégalités environnementales urbaines
12Les citadins sont des citoyens dans des lieux : une ville est par définition un espace politisé, un domaine défini par l’autorité légale sous laquelle elle est placée par une communauté humaine. C’est donc par excellence un lieu de justice entre les humains, un territoire de droit. Ainsi, si le latin distingue d’une part l’urbs (l’espace physique) et de l’autre la civitas (la communauté des citoyens), la polis grecque signifie à la fois la ville et la communauté politique. En retour, l’espace de droit ainsi défini détermine le destin social des personnes qui l’occupent. L’injustice sociale est ainsi reflétée par l’espace (à travers l’ inscription spatiale de l’inégalité sociale comme la ségrégation raciale frappante de la ville de Détroit) ; l’organisation spatiale engendre l’injustice (c’est la création spatiale d’inégalités sociales, comme l’externalisation du risque industriel dans les départements les plus pauvres de la région Île-de-France) ; enfin, les relations sociales, en particulier les inégalités, produisent de l’espace (on parle alors de création sociale de l’espace, comme dans le cas par exemple de la reconquête d’espaces publics par les citadins telle que la réappropriation des places par les habitants de la ville de New York depuis quelques années).
13Les sciences sociales se sont saisies de la question de la justice urbaine dans les années 1920 et 1930, avec l’approche de l’« écologie urbaine » développée par les sociologues de l’École de Chicago, qui s’intéressaient particulièrement à l’influence des facteurs spatiaux sur les phénomènes sociaux. La première apparition du concept de « justice spatiale » dans la littérature académique remonte quant à elle aux travaux pionniers de David Harvey au début des années 1970 [9]. En France se sont développées depuis une dizaine d’années à ce sujet les notions voisines « d’égalité des territoires » et de « cohésion des territoires » [10].
14Cet enjeu de justice spatiale urbaine rejoint au début du 21e siècle l’exigence de justice environnementale. L’environnement planétaire, soumis de manière intensive depuis la révolution industrielle à une humanisation forcenée, fait désormais figure de « seconde nature ». Il y a de ce point de vue deux types d’inégalités dans l’espace mondial : les inégalités de « première nature » et les inégalités de « seconde nature » [11]. Les inégalités de première nature relèvent de la géographie physique : elles reflètent les caractéristiques des milieux naturels (climat, accès maritime, reliefs montagneux), et sont « exogènes » au sens où les humains n’en sont pas responsables (par exemple le désert du Sahara) et peuvent difficilement les surmonter (la construction du barrage des Trois Gorges en Chine a induit un coût humain et écologique considérable). Comme l’écrit David Landes : « La géographie nous enseigne que la nature comme la vie est injuste : elle accorde inégalement ses faveurs et il est difficile de réparer ses injustices » [12].
15Les inégalités de seconde nature sont quant à elles liées à la géographie humaine : elles résultent de l’inscription dans l’espace de l’échange économique, de la division du travail et de la diffusion du progrès technique, autrement dit de la coopération sociale et des institutions qui en résultent et qui déterminent à long terme le développement humain et expliquent son inégale répartition. La ville est le symbole et l’incarnation de la « seconde nature » évoquée par Cicéron [13]. Si l’on voit bien, quand on observe la Terre par satellite de jour, les inégalités de « première nature » entre les territoires, c’est la nuit, sous la forme des taches de lumière que forment les agglomérations urbaines à la surface du globe que l’on mesure le mieux ces inégalités de « seconde nature ».
16Mais cette distinction entre inégalités de première et de seconde nature s’efface en partie à mesure que progressent les crises écologiques : les éléments naturels, profondément altérés par les humains, font naître de nouvelles inégalités, d’un troisième type, que l’on pourrait qualifier de social-écologiques au sein des espaces humanisés ou « Anthromes » [14]. Les canicules liées au changement climatique, comme celle de 2003 en Europe, sont certes des phénomènes naturels, mais au 21e siècle ceux-ci sont mis en mouvement par les sociétés humaines via le changement climatique, et leur impact social est en retour considérable : 70 000 morts en Europe et près de 15 000 en France dans le cas de la canicule de 2003. Ils méritent donc doublement, en amont comme en aval, le qualificatif de social-écologique.
17L’entrecroisement des thèmes de la justice spatiale et environnementale, qui apparaît clairement avec l’avènement du mouvement hygiéniste au 18e siècle, est aujourd’hui une évidence. La notion d’inégalité environnementale urbaine permet de préciser les contours de cet entrelacement.
18Une inégalité environnementale, qui peut être la simple observation empirique d’une disparité, se traduit par une injustice sociale dès lors que le bien-être et les capacités d’une population particulière sont affectés de manière disproportionnée par ses conditions environnementales d’existence, même si cette situation résulte d’un choix. Les conditions environnementales d’existence désignent, de manière négative, l’exposition aux nuisances, pollutions et risques et, de manière positive, l’accès aux aménités et ressources naturelles. Le caractère particulier de la population en question peut être défini selon différents critères, sociaux, démographiques, territoriaux, etc. La justice environnementale vise dès lors à repérer, mesurer et corriger les inégalités environnementales qui se traduisent par des injustices sociales. Elle suppose l’adoption d’un arsenal efficace de politiques publiques, qui inclut des moyens de recherche conséquents [15].
19Il est clair que cette définition générique trouve à s’appliquer aux enjeux urbains tels que nous les avons détaillés dans la première partie de cet article. On peut ainsi, dans une première typologie, distinguer trois formes d’inégalités environnementales urbaines selon leur fait générateur :
- Les inégalités d’exposition, de sensibilité et d’accès : cette catégorie désigne l’inégale répartition de la qualité de l’environnement entre les individus et les groupes dans les espaces urbains. Cette qualité peut être négative (l’exposition à des impacts environnementaux néfastes comme la pollution atmosphérique urbaine) ou positive (l’accès à des aménités environnementales telles que les espaces verts mais aussi l’eau ou l’énergie appréhendées sous l’angle de leur qualité ou de leur prix). Dans cette catégorie d’inégalités sont inclus la vulnérabilité sociale aux risques social-écologique (sites Seveso, canicules, inondations, etc.), le risque d’effet cumulatif des inégalités sociales et environnementales (les difficultés scolaires des enfants de la ville américaine de Flint, dans le Michigan, exposés à une forte pollution de l’eau au plomb) et le risque de conséquences sociales à plus long terme des inégalités environnementales (tel que l’effet sur l’éducation ou le revenu à long terme de l’exposition prénatale ou périnatale à la pollution atmosphérique urbaine) ;
- Les inégalités distributives des politiques environnementales : il s’agit de l’inégal effet des politiques environnementales selon la catégorie sociale des citadins, notamment l’inégale répartition des effets des politiques fiscales ou réglementaires entre les individus et les groupes, selon leur place dans l’échelle des revenus (inégalité verticale) et leur localisation dans l’espace social (inégalité horizontale). L’impact différentiel des taxes sur le carbone, qui sont aussi des taxes sur l’énergie, en fonction du niveau de revenu et du lieu de résidence, ressort par exemple de cette catégorie d’inégalité environnementale ;
- L’inégalité dans la participation aux politiques publiques urbaines : il s’agit de l’accès inégal à la définition des politiques environnementales urbaines selon le statut social et politique, politiques qui déterminent pourtant en partie les conditions environnementales des individus et des groupes. Un exemple bien connu de ce type d’inégalité environnementale est l’absence de consultation des populations locales dans le choix des sites sur lesquels sont installés des installations toxiques comme les incinérateurs.
20Afin d’ajouter à l’analyse la question des impacts inégaux des individus et des groupes sur les dégradations environnementales, une typologie simplifiée des inégalités environnementales consiste à les diviser en deux fois deux catégories : les inégalités d’impact des personnes et des groupes sur les dommages environnementaux et la définition des politiques environnementales ; les inégalités d’impact sur les personnes et les groupes, aussi bien des politiques que des dommages environnementaux (Laurent, 2011).
21Mais on peut également proposer une deuxième typologie des inégalités environnementales, selon leur vecteur d’inégalité (pollutions de l’air, pollutions du milieu, accès aux ressources naturelles, exposition et sensibilité aux catastrophes social-écologiques, etc.).
22On peut enfin ajouter une troisième typologie selon le critère d’inégalité : selon l’âge (exposition aux canicules des personnes âgées isolées), le niveau socio-économique (le fait d’habiter au rez-de-chaussée en cas d’inondation ou sous les toits en cas de canicule), la qualité du logement (la pollution de l’air intérieur frappe les plus pauvres via l’insalubrité), le quartier (les enfants des familles modestes de Marseille ou de Lille sont plus exposés à la pollution aux particules fines et donc à ses conséquences sociales durables), le territoire (les zones côtières pour les tempêtes, les zones urbaines privées de végétation pour les canicules).
23On peut ainsi distinguer trois typologies des inégalités environnementales : la première selon le fait générateur de l’inégalité, la deuxième selon le vecteur d’inégalité et enfin la troisième selon le critère d’inégalité. Le tableau 1 propose une visualisation de ces trois typologies, en partant de la distinction traditionnelle établie en philosophie politique entre inégalité distributive, inégalité procédurale et inégalité de reconnaissance pour aboutir à des exemples concrets d’inégalités environnementales.
Typologies des inégalités environnementales urbaines
Typologies des inégalités environnementales urbaines
24En croisant ces typologies, on peut dire que l’inégalité environnementale que subit un enfant d’une famille modeste de Seine-Saint-Denis habitant près du périphérique parisien lors d’un pic de pollution aux particules fines est une inégalité distributive (approche philosophique) d’exposition et de sensibilité (fait générateur) dont le vecteur est la pollution atmosphérique urbaine et les critères d’inégalité sont l’âge, le niveau socio-économique et la localisation spatiale.
25Dans le reste de cet article, on mobilise ces typologies pour les appliquer aux quatre approches de la soutenabilité des systèmes urbains décrites dans la première partie.
3 – Les inégalités environnementales urbaines en France
26Le défi majeur des villes françaises au début du 21e siècle n’est plus, comme aux 18e et 19e siècle, la proximité problématique des lieux d’habitation et des sites de production, mais plutôt la distance problématique entre l’emploi et les zones résidentielles conduisant à une mobilité contrainte qui engendre des pollutions locale et globale inégalement supportées [16] et la vulnérabilité écologique d’espaces urbains qui concentrent désormais la quasi-totalité de la population. Il importe à présent de préciser ces enjeux selon la quadripartition présentée en première partie de cet article.
3.1 – La ville distante
27La structuration centre-périphérie joue à plein sur le territoire français : si les grandes aires urbaines expliquent l’essentiel de la croissance démographique française sur la période 2006-2016, la population des pôles urbains n’a crû sur la période que de 0,35 %, presque trois fois moins que celle de leurs couronnes (1 % de croissance par an, soit environ 120 000 habitants de plus chaque année) [17].
28Dans l’agglomération parisienne, par exemple, entre 1968 et le milieu des années 2000, les habitants vivent en moyenne 5 km plus loin du centre-ville (en 2007, les logements sont situés en moyenne à 15,5 km de Paris et les habitants à 17,1 km, au lieu de 11,3 km et 12,9 km respectivement en 1968). Les 19 principales aires urbaines hors Île-de-France suivent la même logique : l’accroissement (en pourcentage) du parc de logements a presque systématiquement été plus fort à la périphérie qu’au centre, et la distance moyenne au centre s’est en général accrue pour les logements et pour les habitants.
29Cette structuration de l’espace induit une forte mobilité pendulaire : les trajets entre les zones périurbaines et les zones à forte densité engendrent 45 % des émissions de CO2 liées aux navettes quotidiennes pour seulement 17 % du total des flux. Ceci est largement dû à l’usage du véhicule individuel (84 % des flux). Au final, environ 15 % des émissions totales de CO2 sont le résultat des flux des couronnes périurbaines vers les zones denses. Avec près d’une heure et quart en moyenne de trajet quotidien (aller-retour), les Français sont les Européens qui consacrent le plus de temps à leurs déplacements domicile-travail [18].
30Cette hiérarchie spatiale des espaces urbains emporte des conséquences environnementales fortes : si les émissions de gaz à effet de serre françaises (en production) ont diminué de quelque 15 % entre 1990 et 2017, la France n’a pas réussi sur cette période à contenir ses émissions des transports routiers en raison de son étalement urbain. Les transports (dont 95 % par route [19]) représentent 30 % de toutes les émissions françaises, de loin la contribution la plus importante. Alors que les émissions dans tous les secteurs ont diminué entre 1990 et 2017, parfois de manière très significative, les émissions provenant du transport routier ont au contraire augmenté (tableau 2).
Profil d’émissions de GES de la France, 1990-2017
MtCO2e et % | 1990 | 2017 | 1990-2017 | |
---|---|---|---|---|
Différence en volume | Différence en % | |||
Total | 546,4 | 466,1 | -80,3 | -15 |
Transports | 122,3 | 137,9 | 15,6 | 13 |
Bâtiments | 91,4 | 91,0 | -0,4 | -0,4 |
Agriculture | 93,8 | 88,4 | -5,4 | -6 |
Industrie | 143,9 | 79 | -64,9 | -45 |
Production d’énergie | 78,1 | 54,5 | -23,6 | -30 |
Déchets | 17 | 15 | -2 | -12 |
Profil d’émissions de GES de la France, 1990-2017
31Il faut donc aux autorités publiques françaises se concentrer sur les émissions des véhicules automobiles pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) à la hauteur des ambitions nationales et des objectifs européens et mondiaux auxquels le pays a souscrit. Mais un redoutable obstacle surgit alors : l’inégalité territoriale française rend l’usage de l’instrument le plus efficace et le plus sous-utilisé pour réduire ces émissions dites diffuses – la fiscalité carbone – extrêmement sensible socialement. C’est une des leçons du mouvement des « gilets jaunes ». L’effort énergétique est en effet, en France, très sensible au lieu d’habitation (tableau 3) et cet écart, notamment entre les villes-centres et les espaces périurbains, s’est renforcée au cours des dernières décennies (l’effort énergétique des habitants du périurbain en matière de transport étant devenu y compris plus élevé que celui des habitants des zones rurales).
Effort énergétique* selon le type de ménage rapporté à l’effort moyen (en %)
Effort énergétique lié au transport | ||
Milieu d’habitation | 1985 | 2006 |
Pôle urbain de Paris | 70 | 67 |
Ville-centre | 98 | 88 |
Banlieue | 104 | 106 |
Périurbain | 119 | 128 |
Espace à dominante rurale | 118 | 122 |
Effort énergétique* selon le type de ménage rapporté à l’effort moyen (en %)
* Dépenses en énergie rapportées aux ressources du ménage.32L’application d’une fiscalité environnementale sur l’énergie sans compensation sociale induit donc, pour reprendre les typologies établies dans la deuxième partie, une inégalité environnementale urbaine qui est une inégalité distributive d’une politique environnementale dont le vecteur est la fiscalité et les critères sont le niveau de revenu et le lieu d’habitation.
33On peut en effet démontrer que la taxe carbone dont la hausse a été suspendue en décembre 2018 par le gouvernement français, proportionnelle à la consommation d’énergie et ne prévoyant aucune compensation sociale, était doublement inégalitaire, de manière verticale (entre les déciles de revenu) comme horizontale (au sein des déciles de revenu, notamment entre les habitants des centres urbains et ceux de la périphérie) [20]. Il n’est pas anodin pour l’importance du sujet que l’une des plus grandes révoltes sociales des cinquante dernières années en France ait été déclenchée par une inégalité environnementale urbaine.
3.2 – La ville asphyxiée
34L’évidement des pôles urbains vers la périphérie s’est opéré selon une logique économique qui met en tension la recherche d’emploi et la quête d’un logement abordable : les pôles urbains, noyaux denses des aires urbaines, qui ne couvrent que 8 % du territoire métropolitain, concentrent 80 % de l’emploi tandis que l’indice du coût réel du logement, qui était de 60 en 1990 en France, atteignait 102 en 2017 [21], les centres urbains tirant les prix vers les haut. L’augmentation des flux de transport sont donc l’image inversée de l’augmentation du prix du logement, selon la logique des modèles de l’économie urbaine.
35Mais les émissions de C02 qui résultent de ces flux, et dont la taxation qui ira grandissante avec la lutte contre le changement climatique peut être, comme on vient de le voir, un facteur d’inégalité sociale pour les habitants de la périphérie, sont aussi des émissions de polluants locaux dont l’effet sanitaire, qui obéit lui aussi à un gradient social, touchent cette fois les habitants des centres urbains.
36En France continentale, la pollution par les seules particules fines représente plus de 48 000 décès chaque année (dits évitables) soit environ 8 % de tous les décès, autant que la mortalité due à l’alcool [22], correspondant à une perte moyenne d’espérance de vie à 30 ans de 9 mois [23]. Si l’on ajoute l’impact sanitaire de deux autres polluants atmosphériques majeurs (ozone et dioxyde d’azote), c’est environ 58 000 morts prématurées qu’il faut déplorer, soit de l’ordre de 10 % de l’ensemble des décès en France [24].
37Les habitants des zones urbaines sont tout particulièrement exposés à cette pollution en France comme en Europe (16 % de la population urbaine de l’UE-28 a été exposée à des niveaux de PM 10 supérieurs à la valeur limite quotidienne et environ 50 % à des concentrations dépassant la valeur limite de l’OMS pour les PM10 en 2014). Les villes françaises dépassent en effet dans leur grande majorité les seuils de sécurité de l’OMS en matière de pollution aux particules fines, 17 des 20 plus grandes villes françaises excédant les normes pour les particules PM 2,5 pour l’année 2016 selon les dernières données disponibles (graphique 2).
La qualité de l’air dans les 20 plus grandes villes françaises en 2016
La qualité de l’air dans les 20 plus grandes villes françaises en 2016
38Une étude européenne de grande ampleur [25] a récemment évalué avec précision l’impact sanitaire de la pollution aux particules fines dans les villes françaises et révèle des inégalités fortes en la matière. Les résultats considérés en moyenne témoignent de l’ampleur du problème sanitaire : si les normes de l’OMS étaient respectées en matière de pollution atmosphérique, l’espérance de vie pourrait augmenter d’ici 30 ans de 3,6 à 7,5 mois selon la ville française étudiée. Mais le projet révèle aussi l’inégalité territoriale attachée à cette exposition : l’impact sanitaire varie considérablement selon les espaces urbains (du simple au double de Toulouse, ville étudiée la moins polluée, à Marseille, ville la plus polluée).
39Les inégalités sont également fortes au sein des espaces urbains. Habiter à proximité du trafic routier augmente ainsi sensiblement la morbidité attribuable à la pollution atmosphérique (à proximité de voies à forte densité de trafic automobile, on constate une augmentation de 15 à 30 % des nouveaux cas d’asthme chez l’enfant et des pathologies chroniques respiratoires et cardiovasculaires fréquentes chez les adultes âgés de 65 ans et plus). Une équipe française [26] a pu distinguer à cet égard la question de l’exposition de celle de la sensibilité à la pollution : même si à Paris les zones touchées par le dioxyde d’azote comptent parmi elles des « beaux quartiers », les publics qui y résident sont bien moins affectés par lui que les groupes sociaux qui habitent les quartiers défavorisés eux aussi exposés car leur santé est bien meilleure et leur accès aux soins plus aisé.
40Il n’en reste pas moins que la pollution urbaine touche d’abord les habitants les plus modestes. En prévision de la « la journée nationale de la qualité de l’air » du 18 septembre 2019, la Mairie de Paris a ainsi publié sur son site web une série de cartes [27] illustrant et documentant la pollution atmosphérique dans la capitale ou plutôt les pollutions atmosphériques auxquelles est soumise la population parisienne (dioxyde d’azote, ozone, particules fines, benzène). La tendance qui ressort de ces cartes est analogue à celle que l’on peut observer ailleurs dans l’Union européenne : la qualité de l’air s’améliore globalement mais laisse apparaître de fortes inégalités territoriales, autrement dit de fortes inégalités environnementales. Parmi toutes les cartes proposées, celle des « hotspots » ou points noirs de pollution aux particules fines PM 2,5 – lieux dans lesquels la population parisienne a été exposée entre septembre 2018 et septembre 2019 à des niveaux de PM 2,5 dépassant la moyenne de la ville (elle-même au-dessus des normes de l’OMS) au moins 60 % du temps – est particulièrement frappante [28]. L’INSEE a produit en 2017 une carte originale qui agrège différentes caractéristiques socio-démographiques pour dessiner la « mosaïque sociale » de Paris [29]. L’avantage de cette typologie en « profils de territoire » est qu’elle croise plusieurs critères de bien-être plutôt que de n’en utiliser qu’un seul comme le revenu, le logement ou la composition des familles. Si l’on retient le zonage social de cette étude, il apparaît que les populations les plus exposées à la pollution urbaine aux PM 2,5 vivent en majorité dans des territoires vulnérables, de classes moyennes ou de mixité sociale (notamment le long du périphérique), tandis que les territoires parisiens les plus aisés de l’Ouest et du Sud sont largement épargnés par cette pollution.
41Un enjeu dont l’importance va croissante est l’accélération du temps induite par la transition numérique qui conduit à réduire les bénéfices environnementaux du caractère compact de l’espace urbain. La compression du temps que subissent les espaces urbains sous l’effet de la transition numérique conduit ainsi à davantage de congestion et de pollution.
3.3 – La ville isolée
42L’isolement social, entendu non pas comme un choix de vie, mais comme une insuffisante connexion sociale, voire une déconnexion totale des réseaux de sociabilité, monte en puissance en France (comme ailleurs dans le monde, notamment au Royaume-Uni et aux États-Unis). Dès 2010, la Fondation de France s’est intéressée à la problématique des « solitudes en France ». Son baromètre annuel (une enquête menée sur l’ensemble de la population de 15 ans et plus) indique un accroissement du nombre de Français seuls, passé de 4 millions en 2010 à 5 millions en 2016 (soit 20 % d’augmentation).
43L’isolement social frappe proportionnellement davantage les plus de 60 ans, mais il faut prendre en compte la dimension socio- économique pour saisir l’ampleur du phénomène : les personnes les plus exposées au risque d’isolement social en France sont, selon la Fondation de France, celles qui à la fois gagnent moins de 1 000 euros par mois et ont 75 ans et plus. En regardant le détail de la vague 2013 de cette enquête, une autre réalité apparaît : c’est dans les grandes zones urbaines que l’isolement social augmente le plus fortement (entre 2010 et 2013, il passe de 8 % à 13 % des personnes interrogées, soit une progression de 5 points, dans les unités urbaines de 100 000 habitants et plus).
44Or cette dégradation de la sociabilité, dont Jane Jacobs souligne l’importance dans les espaces urbains, joue un rôle majeur lors des épisodes de canicule. Eric Klinenberg a ainsi bien montré le rôle de l’isolement social dans le décès de 739 personnes lors de la canicule qui a frappé la ville de Chicago en juillet 1995 [30]. L’effet de l’isolement social des personnes âgées ressort aussi de l’analyse de la catastrophe dite naturelle la plus meurtrière en France depuis 1900 : la canicule de 2003, qui a touché à 90 % des personnes âgées de 65 ans dont l’isolement social a constitué un facteur majeur de mortalité [31].
45On ne peut pas minimiser cet enjeu compte tenu de la perspective historique et des prévisions climatiques pour les décennies à venir. La base de données Emergency Events Database (EM-DAT) du Centre for Research on the Epidemiology of Disasters (CRED), référence internationale en matière de recensement des désastres naturels et technologiques, indique à ce sujet que les canicules de l’été 2019, considérées ensemble, sont la troisième plus grave catastrophe naturelle qu’a connu la France depuis 1900 sur le plan humain [32] (tableau 4). Prises isolément, elles sont respectivement la quatrième (pour la canicule de fin juillet) et la cinquième (pour celle de fin juin-début juillet) plus grave catastrophe naturelle depuis 120 ans en France. Les trois plus meurtrières catastrophes dites naturelles sont toutes des canicules.
46La France a connu un total de 196 épisodes de vagues de chaleur observés entre 2004 et 2014 et Météo France prévoit à partir de 2020 au moins une canicule par an dont l’intensité va s’aggraver avec des effets de sensibilité qui s’ajoutent aux effets d’exposition pour créer de fortes inégalités démographiques et territoriales. Les premières données disponibles montrent ainsi que les départements les plus touchés par la surmortalité de la canicule de fin juillet 2019 n’ont pas été exposés aux chaleurs les plus fortes et réciproquement, il est donc probable que les paramètres sociaux, comme l’isolement des personnes âgées, aient joué un rôle important dans la survenue des décès.
Les 10 catastrophes « naturelles » les plus meurtrières en France depuis 1900
Type de désastre | Date de survenue | Nombre de victimes |
---|---|---|
Canicule | 01/08/2003 | 19 490 |
Canicule | 29/06/2015 | 3 275 |
Canicule | 15/07/2006 | 1 388 |
Tempête | 26/12/1999 | 88 |
Incendie | 01/08/1949 | 80 |
Glissement de terrain | 16/04/1970 | 72 |
Tempête | 28/02/2010 | 53 |
Tempête | 22/09/1992 | 47 |
Tremblement de terre | 11/06/1909 | 46 |
Glissement de terrain | 10/02/1970 | 42 |
Les 10 catastrophes « naturelles » les plus meurtrières en France depuis 1900
3.4 – La ville vulnérable
47La ville a notamment pour vocation de protéger des désastres naturels mais elle peut tout aussi bien y exposer davantage ses résidents comme c’est le cas avec les inondations. Les « événements hydrométéorologiques » (tels que les inondations et les tempêtes) constituent le risque social-écologique touchant le plus grand nombre de personnes dans le monde [33] et représentent les deux tiers des coûts liés aux catastrophes dites naturelles en Europe. À titre d’illustration, le choc « naturel » des inondations de juin 2013 (les plus graves de ces dernières décennies sur le continent) a été considérable : une crue décennale le long de la plaine fluviale du Danube, de l’Elbe, de la Saale et de la Vltava, touchant l’Allemagne, l’Autriche, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie. Mais c’est le facteur humain qui explique l’ampleur de la catastrophe du fait de l’accroissement démographique dans les zones inondables et de l’occupation des sols, à commencer par l’urbanisation qui suppose l’artificialisation des sols et donc la dégradation, voire l’inversion de leurs capacités de régulation.
48En France aussi, l’importance du risque d’inondation tient à la combinaison de l’exposition et de la sensibilité des populations, autrement dit à la concentration de présence humaine dans les espaces urbains situés en zones inondables. Au total, 25 % de la population française regroupée dans 16 000 communes dont 300 agglomérations est exposée au risque d’inondation, sous une forme ou une autre (inondation de plaine, par remontée de nappe, crues torrentielles, ruissellement, submersion marine). Les zones inondables représentent en France 27 000 km² sur lesquels vivent environ 10 % de la population. La crue de la Seine de mai et juin 2016 a ainsi causé l’évacuation de 18 000 personnes, tandis qu’une crue comparable à la crue historique de 1910 pourrait affecter jusqu’à 5 millions de personnes, selon les estimations de l’OCDE [34].
49Les inégalités environnementales urbaines en termes d’exposition et de sensibilité aux inondations concernent à la fois le type de territoire (les villes situées à proximité des nombreux cours d’eau et le long de la large façade littorale) et, au sein des espaces urbains, la localisation et la morphologie des habitations.
50La notion de « vulnérabilité territoriale », mobilisée par les pouvoirs publics pour analyser et prévenir les conséquences sociales liées au risque d’inondation, éclaire les différentes facettes de ces inégalités environnementales (encadré).
Encadré. éléments d’analyse de la vulnérabilité territoriale du territoire dit « boucle de la Seine »
- Superficie du territoire : 51 km² dont 17 km² en zone inondable.
- Population totale : 440 500 habitants.
- Zone inondable urbanisée à 95 %, et construite à 64 % (habitats, activités, équipements).
- 127 500 personnes exposées aux zones inondables (population résidente)
- 32,6 % de la population est exposée à des niveaux d’aléas fort à très fort (supérieur à 1 m).
- Une part importante de la population en zone inondable directement impactée par la montée des eaux (maisons individuelles, appartement en rez-de-chaussée), à titre d’exemple 5 500 habitants de Gennevilliers et 9 600 habitants à Colombes.
- Une forte exposition des établissements et des effectifs scolaires : plus du quart des établissements (74) et des capacités scolaires (22 000 élèves) directement exposés par les zones inondables.
- Un impact fort sur les capacités d’accueil scolaires pour certaines communes : 50 % Colombes, 55 % Gennevilliers, 89 % Villeneuve-la-Garenne.
- Des conséquences aggravées par l’impact des fragilités électriques. 50 % des établissements et des capacités d’accueil impactés. Un taux supérieur à 75 % sur la moitié des communes.
51Il importe de noter que l’exposition au risque d’inondation résulte aussi, en partie, d’un arbitrage entre deux types d’inégalités environnementales présentes dans la première typologie présentée à la deuxième partie, entre un meilleur accès aux aménités environnementales (en l‘occurrence les rives d’un cours d’eau) et une plus forte exposition au risque. Il n’en reste pas moins que la sensibilité demeure un facteur d’injustice sociale selon la définition adoptée à la deuxième partie, en particulier du fait de l’inégal accès aux mécanismes d’assurance et d’indemnisation. Beucher et Reghezza [35] notent à cet égard qu’aux inégalités d’exposition et de sensibilité s’ajoutent celles qui peuvent naître des politiques d’indemnisation et d’assurance.
4 – Conclusion : des inégalités orphelines de politiques publiques
52En matière de reconnaissance de l’inégalité et de la justice environnementales, la France, comme la plupart de ses voisins européens à quelques exceptions notables (dont le Royaume-Uni et les Pays-Bas), n’en est qu’aux balbutiements. Le constat, formulé par les pouvoirs publics eux-mêmes [36], s’impose : la montée en puissance des inégalités environnementales ne s’est pas accompagnée de politiques publiques capables d’y répondre.
53C’est pourquoi la nouvelle stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable 2015-2020 arrêtée en mars 2015 comprenait un axe 3 visant à « prévenir et réduire les inégalités environnementales, sociales et territoriales », tandis que le Conseil économique, social et environnemental rendait en janvier 2015 un rapport qui entendait identifier les urgences et créer des dynamiques pour réduire les inégalités environnementales. Mais les pouvoirs publics français peinent toujours à se saisir de ces enjeux pourtant de plus en plus tangibles pour les populations. Trois impératifs sont toujours devant nous : définir, mesurer, atténuer.
Références
- Agence européenne de l’environnement, 2018, Exposition et répercussions inégales : vulnérabilité sociale à la pollution atmosphérique, au bruit et aux températures extrêmes en Europe, Rapport.
- Beucher Stéphanie et Reghezza Magali, 2012, « Quelle gestion durable des inondations en Île-de-France quand le souci de justice environnementale introduit plus d’inégalités ? », in Justice et injustices environnementales [en ligne], Nanterre, Presses universitaires de Paris-Nanterre.
- Berry A. et Laurent É., 2019, « Taxe carbone, le retour, à quelles con-ditions ? », OFCE Working Paper, n° 06/2019.
- Brueckner Jan K., 2011, Lectures on Urban Economics, Cambridge, Massachusetts, MIT Press.
- Deguen S., Petit C., Delbarre A., Kihal W., Padilla C., Benmarhnia T., Lapostolle A., Chauvin P., Zmirou-Navier D., 2015, « Neighbourhood Characteristics and Long-Term Air Pollution Levels Modify the Association between the Short-Term Nitrogen Dioxide Concentrations and All-Cause Mortality in Paris », PLoS ONE, vol. 10, n° 7.
- Deguen S., Petit C., Delbarre A., Kihal W., Padilla C. et al., 2016, « Correction: Neighbourhood Characteristics and Long-Term Air Pollution Levels Modify the Association between the Short-Term Nitrogen Dioxide Concentrations and All-Cause Mortality in Paris », PLOS ONE, vol. 11, n° 3.
- Ellis E.C. et al., 2010, « Anthropogenic transformation of the biomes, 1700 to 2000 », Global Ecology and Biogeography, vol. 19, n° 5, septembre, pp. 589-606.
- European Environment Agency, 2018, Air quality in Europe. Report.
- Fujita M., 1988, « A Monopolistic Competition Model of Spatial Agglomeration: Differentiated Product Approach », Regional Science and Urban Economics, n° 18, pp. 87-124.
- Institut de veille sanitaire, 2004, « Étude des facteurs de décès des personnes âgées résidant à domicile durant la vague de chaleur d’août 2003 », Paris.
- Klinenberg Eric, 2002, Heat Wave. A Social Autopsy of Disaster in Chicago, Chicago, University of Chicago Press.
- Krugman P., 1991, « Increasing Returns and Economic Geography », Journal of Political Economy, n° 99, pp. 483-499.
- Krugman P., 1993, « First Nature, Second Nature, and Metropolitan Location », Journal of Regional Science, vol. 33, n° 2, p. 129.
- Krugman P., 1998, « Space: the final frontier », The Journal of Economic Perspectives, vol. 12, n° 2, pp. 161-174.
- Landes David S., 1998, The Wealth and Poverty of Nations: Why Are Some So Rich and Others So Poor, New York, W.W. Norton.
- Laurent Éloi, 2009, « Écologie et inégalités », Revue de l’OFCE, n° 109, pp. 33-57.
- https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/revue/2-109.pdf
- Laurent Éloi, 2011, « Issues in environmental justice within the European Union », Ecological Economics, Vol. 70, n° 11, 15 septembre, pp. 1846-1853.
- Laurent Éloi, 2019, The New Environmental Economics – Sustainability and Justice, Polity Press.
- Malliet Paul, 2018, « Les impacts de la fiscalité carbone sur les ménages : les Français, pas tous égaux devant les coups de pompe », OFCE le Blog, 20 décembre.
- Pascal M., P. de Crouy Chanel, M. Corso, S. Medina, V. Wagner, S. Goria et al., 2016, « Impacts de l’exposition chronique aux particules fines sur la mortalité en France continentale et analyse des gains en santé de plusieurs scénarios de réduction de la pollution atmosphérique », Santé Publique France, juin.
- United Nations, Department of Economic and Social Affairs, Population Division (2018), World Urbanization Prospects: The 2018 Revision.
- Wheeler James O., 1971, « Social Interaction and Urban Space », Journal of Geography, vol. 70, n° 4, pp. 200-203. DOI: 10.1080/0022134710 8981620
Mots-clés éditeurs : systèmes urbains, inégalités environnementales, pollutions
Date de mise en ligne : 18/02/2020
https://doi.org/10.3917/reof.165.0145Notes
-
[1]
La croissance de la population urbaine depuis 1950 a été extrêmement rapide, passant de 751 millions à 4,2 milliards en 2018 (soit un facteur 5 en 70 ans).
-
[2]
United Nations, Department of Economic and Social Affairs, Population Division (2018).
-
[3]
Actuellement, dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), où près de 70 % de la population vit dans des aires urbaines, les 275 métropoles de plus de 500 000 habitants concentrent à elles seules la moitié de la population et des emplois totaux de ces pays.
-
[4]
Fujita (1988).
-
[5]
Krugman (1991 et 1998).
-
[6]
Brueckner (2011).
-
[7]
Wheeler (1971).
-
[8]
En 1965, l’ingénieur américain Abel Wolman définissait le métabolisme urbain comme la somme de « tous les matériaux et toutes les commodités nécessaires pour assurer la subsistance des habitants de la ville chez eux, au travail et pendant leurs loisirs » (Wolman, 1965).
-
[9]
Les sciences sociales se sont emparées de la question de la justice territoriale dès les années 1920 et 1930, au sein du courant dit de « l’écologie urbaine » développée par l’École de Chicago, qui s’est notamment préoccupée de l’influence des facteurs spatiaux sur les phénomènes sociaux. La première occurrence du concept de « justice territoriale » dans la littérature académique remonte exactement à quatre décennies (David Harvey, Social Justice and the City, 1973).
-
[10]
Laurent (2013 et 2018).
-
[11]
Krugman (1993).
-
[12]
Landes (1998).
-
[13]
« Quant à la terre, elle est sous la domination de l’homme avec toutes ses richesses. Les plaines et les montagnes sont là pour notre jouissance, les cours d’eaux, les lacs sont à nous, nous semons le blé, nous plantons des arbres, nous donnons à la terre de la fertilité par des canaux d’irrigation, nous régularisons le cours des fleuves, le rectifions, le détournons, nous nous efforçons enfin avec nos mains à créer dans la nature une seconde nature. », Cicéron, De la nature des Dieux. Livre I.
-
[14]
Ellis (2010).
-
[15]
Laurent (2017).
-
[16]
Cette question apparaît d’ailleurs explicitement dans la Charte d’Aalborg (Conférence européenne sur les villes durables à Aalborg, Danemark, le 27 mai 1994) : « Nous, villes, sommes conscientes que les populations démunies sont les plus touchées par les problèmes de l’environnement (bruit, pollution de l’atmosphère par les gaz d’échappement, insuffisance des équipements, insalubrité des logements, manque d’espaces verts) et les moins aptes à les résoudre… Nous voulons intégrer à la protection de l’environnement les exigences sociales essentielles de la population ainsi que les programmes d’action sanitaire, de l’emploi et du logement. »
-
[17]
Source : INSEE.
-
[18]
Observatoire des territoires.
-
[19]
Il importe de distinguer ici ce qui relève des déplacements des particuliers (qui représentent environ 55% des émissions) et du transport de marchandises (les 45% restant, qui se répartissent à part à peu près égale entre véhicules utilitaires légers et poids lourds).
-
[20]
Sur ce point, voir notamment Paul Malliet (2018) https://www.ofce.sciences-po.fr/blog/10664-2/ et Berry et Laurent (2019) qui montrent que l’impact budgétaire de la taxe carbone française de 2018 décroît avec le niveau de vie. En particulier, le premier décile est largement plus affecté que les autres déciles. L’impact est 1,5 fois supérieur à l’impact moyen dans la population et 2,6 fois supérieur à l’impact sur les 10 % les plus riches. L’impact fléchit à partir du décile 7 et bascule sous l’impact moyen. Il en découle que l’impact sur les 6 premiers déciles est plus important que l’impact moyen, alors qu’il est moindre pour les déciles supérieurs. Toutefois ces inégalités verticales n’épuisent pas les différences d’impact de la taxe carbone au sein de la population française. On trouve ainsi que 20 % des ménages du premier décile sont plus affectés que 50 % des ménages du dixième décile.
-
[21]
Pour les pays de l’OCDE en moyenne, l’indice était de 80 en 1990 et de 107 en 2017.
-
[22]
Autrement dit, l’inhalation forcée de particules fines cause au sein de la population française autant de décès que la consommation volontaire d’alcool.
-
[23]
Source : Pascal M., Crouy Chanel P. de, Corso M., Medina S., Wagner V., Goria S., et al. (2016).
-
[24]
Source : EEA (2018).
-
[25]
Le projet Aphekom (Improving Knowledge and communication for Decision Making on Air Pollution and Health in Europe) a estimé l’impact de la pollution de l’air sur la santé des 39 millions d’habitants des 25 villes européennes participant au projet.
-
[26]
Deguen, Petit, Delbarre, Kihal, Padilla, Benmarhnia, Lapostolle, Chauvin, Zmirou-Navier (2015 et 2016).
-
[27]
Source : Mairie de Paris https://www.paris.fr/pages/etat-des-lieux-de-la-qualite-de-l-air-a-paris-7101
-
[28]
Un indicateur de santé récent, l’Air Quality Life Index, estime à environ une année la perte d’espérance de vie liée à une exposition prolongée à des seuils dangereux (au sens de l’OMS) de PM 2,5, exposition prolongée qui correspond à la situation de ces « points noirs » parisiens.
- [29]
-
[30]
Klinenberg (2002).
-
[31]
Institut de veille sanitaire (2004).
-
[32]
Santé Publique France vient de publier le premier bilan humain des deux canicules de l’été 2019 (24 juin-7 juillet ; 21-27 juillet) et dénombre un total de 1 435 décès qui en seraient résulté (on parle de « surmortalité » liée à l’impact des épisodes de chaleur sur les organismes des victimes).
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[33]
Selon les Nations Unies, entre 1970 et 2010, la population mondiale a augmenté de 87 % (de 3,7 milliards à près de 7 milliards) mais dans le même temps, le nombre de personnes exposées au risque d’inondation s’est accru de 114 % (de 32 millions à 70 millions de personnes).
- [34]
-
[35]
Beucher et Reghezza (2012).
-
[36]
« Malgré les travaux lancés par le deuxième plan national santé environnement (PNSE2), les inégalités environnementales demeurent peu évaluées et donc peu traitées en tant que telles par les pouvoirs publics car il n’existe pas à ce jour des données spatialisées pour l’ensemble de ces risques et de méthodologie opérationnelle pour les additionner » in Inégalités territoriales, environnementales et sociales de santé - Regards croisés en régions : de l’observation à l’action, Ministère des Affaires sociales et de la Santé, Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, 2014.